Leduc avait formée, le 4 mars 1850, à cet arrêt par défaut, était donc non recevable; et en recevant cette opposition l'arrêt attaqué a violé lesdits art. 470 et 159 C. proc. Vainement cet arrêt objecte-t-il que le paiement des frais a été fait après et sur commandement, qu'il a été opéré avec protestations et réserves, et que cela a suffi pour conserver à Leduc le droit de former, même après ce paiement, opposition à l'arrêt par défaut du 5 fév. 1848. L'arrêt par défaut n'était pas exécutoire nonobstant opposition; Leduc pouvait donc se dispenser de payer en formant opposition; on ne saurait en même temps exécuter un arrêt dont on peut, dès à présent, se dispenser de subir la loi, et déclarer que l'on se réserve ultérieurement le droit de l'attaquer. Attaquez ou n'attaquez pas, exécutez ou n'exécutez pas; mais vous ne pouvez à la fois exécu ter et conserver le droit d'attaquer plus tard. Dans cette situation des choses on doit faire prévaloir l'acte sur la réserve, l'exécution actuelle sur la réverve éventuelle d'attaquer; - Protestatio actui contraria nihil valet. Protestatio contra actum non agit. Protestatio adversus actum non relevat. Qui protestatur non agit. Ce sont là autant de formules de ce principe de raison que les paroles sont vaines pour empêcher les conséquences des actes consommés. Pour le défendeur on répondait :- L'art. 159 C. proc. n'admet le paiement des frais comme fin de non-recevoir à l'opposition que quand ce paiement a été fait volontairement, et non lorsque la partie paie en présence de poursuites dirigées contre elle, pour en éviter les suites, comme contrainte et forcée, et sous la ré. serve formelle de ses droits. La maxime Protestatio actui contraria inutilis n'est applicable qu'au cas d'exécution volontaire, et l'on ne peut qualifier ainsi le simple paiement de frais réclamé avec commandement et en vertu duquel une saisie peut être opérée. Quant à l'objection que le condamné pouvait arrêter les poursuites par l'opposition, il est facile de la repousser. Le condamné peut avoir intérêt à ne pas former de suite opposition. Il paie les frais pour éviter au demandeur la péremption du jugement par l'expiration du délai de six mois, prononcée par l'art. 156; mais ce paiement n'anéantit pas son droit d'opposition lorsqu'il se l'est conservé par une réserve insérée dans la quittance signée par le demandeur, et par conséquent du consentement de ce dernier. - C'est par le même motif qu'il a été décidé que le paiement des condamnations principales et accessoires prononcées par un jugement contradictoire, fait sous réserve d'interjeter appel, n'était pas un acquiescement au jugement et une exécution volontaire; Cass. 8 août 1838 (Journ. Pal., t.21838, p. 370).-On conçoit, sans doute, que si le débiteur a exécuté l'arrêt au fond en fai sant des réserves, le juge puisse considérer ces réserves comme non avenues, étant démenties par l'acte qu'elles accompagnent. Mais il ne saurait en être de même quand il y a simplement remise de l'argent nécessaire pour payer les frais réclamés avec menace de poursuites. Dans ce cas, l'opposition est recevable au moins relativement au fond.-Enfin, si l'on se reporte aux termes de la quittance donnée au sieur Leduc, par l'avoué à qui il a payé les frais, et aux réserves qu'elle contient, on voit que ces réserves ont été acceptées par la partie adverse, qui s'est trouvée liée elle-même. Le sieur Leduc n'a donc ni exécuté volontairement l'arrêt, ni acquiescé aux condamnations prononcées contre lui. En donnant à ses réserves l'effet qu'elles devaient produire, l'arrêt attaqué, loin de violer l'art. 159 C. proc., n'en a donc fait qu'une juste application. Du 31 AOUT 1852, arrêt C. cass., ch. civ., MM. Portalis 1er prés., Moreau (de la Meurthe) rapp., Rouland av. gén. (concl. conf.), Frignet et Morin av. -- << LA COUR; Sur le premier moyen :- Vu Attendu les art. 470, 158 et 159 C. proc.; que, suivant l'art. 470, et en l'absence de toute disposition spéciale et exceptionnelle sur ce point, les règles établies sur l'opposition aux jugements par défaut sont applicables aux arrêts rendus par défaut; qu'ainsi, lorsque l'arrêt est pas d'avoué, rendu contre une partie qui n'a l'opposition n'est, aux termes de l'art. 158, recevable que jusqu'à l'exécution de l'arrêt, et que, d'après l'art. 159, « l'arrêt est réputé exéQue cuté lorsque les frais ont été payés »; le fait de ce paiement interdit donc de recevoir l'opposition formée ultérieurement; — Attendu qu'il est constaté, en fait, par l'arrêt attaqué, que les frais auxquels le défendeur en cassation avait été condamné par l'arrêt rendu par défaut contre lui, sans qu'il ait constitué avoué, le 5 fév. 1848, ont été payés par lui le 21 juillet suivant, bien antérieurement à l'opposition qu'il a formée à cet arrêt, par requête du 4 mars 1850; Attendu que, pour écarter l'effet de ce paiement, le défendeur excipe de la déclaration par lui faite, lorsqu'il l'a opéré entre les mains de l'avoué du demandeur en cassation, qui en avait obtenu la distraction, « qu'il en»tendait que le paiement desdits frais, effec>> tué à la suite d'un commandement à lui signi » fié, ne pût être considéré, dans aucun cas, » comme acquiescement à l'arrêt par défaut >> dont s'agit, contre lequel il se réservait for» mellement de se pourvoir par la voie de l'op» position en cas d'exécution;- Attendu que ledit arrêt par défaut n'étant pas exécutoire par provision et nonobstant opposition, le défenfrais de se soustraire immédiatement à l'effet deur avait un moyen autre que le paiement des de ce commandement, à savoir l'opposition audans de telles circonstances, étaient vaines et dit arrêt; que les protestations et les réserves, inefficaces, et ne pouvaient détruire l'effet attaché par la loi au fait du paiement des frais; Qu'il suit de là que l'arrêt attaqué, en déclarant, dans cet état des faits, recevable l'opposition du défendeur à l'arrêt par défaut du 5 fév, 1848, a expressément violé les articles du Code Sans qu'il soit de procédure ci-dessus visés; besoin d'apprécier les autres moyens; - CASSE.>> CASSATION (22) novembre 1852). PAIEMENT, ACQUISITION EN COMMUN, REVENTE AVEC BÉNÉFICE, QUITTANCE D'UN SEUL, PORTEFORT, RATIFICATION. L'achat d'un domaine fait en commun par deux personnes, la jouissancepar indivis qu'elles en ont eue pendant plusieurs années, et sa revente avec bénéfice, ne sauraient, en l'absence de toute constatation que ces personnes avaient acheté ledit domaine dans la vue d'en opérer la revente et de partager le bénéfice qui pourrait en résulter, constituer qu'un simple état de communauté et d'indivision, mais non le contrat de société défini par l'art. 1832 C. Nap., et auquel l'art. 1859 est applicable (1). En conséquence, le paiement du prix de la revente doit être fait à chacun des covendeurs personnellement dans la proportion de ses droits; et la quittance de la totalité du prix donnée par l'un d'eux seulement, même se portant fort solidairement pour son covendeur et promettant sa ratification, laquelle n'a point été ultérieurement rapportée, ne libère point l'acquéreur vis-à-vis de ce dernier, comme, en cas de société, le libérerait vis-à-vis de tous les associés le paiement fait à un seul d'entre eux (2). C. civ. 1239, 1859. DERVIEUX C. FRAIX. Par un acte notarié du 24 fév. 1831, les (1) La société est un contrat dont les conséquences sont trop graves pour qu'on puisse en admettre l'exis tence en dehors de l'intention évidente des contrac tants. Aussi Cujas, sur la loi 13, D. De præscriptis verbis, dit-il : In dubio non videtur societas. Or, l'acquisition en commun d'un immeuble pour en jouir en peut-elle être considérée comme emportant par ellemême présomption d'une convention de société entre les coacquéreurs, alors surtout qu'à une semblable acquisition se joint la circonstance d'une revente avec bénéfice? Certes, oui, mais à la condition essentielle qu'il résulte de la nature des stipulations intervenues, ou des faits et circonstances de la cause, que les parties ont eu en vue ce bénéfice en achetant l'immeuble, et qu'elles ont mis des capitaux en commun dans le but d'arriver à sa réalisation. Si cette condition manque, il n'y a pas société, il y a simple communauté. Telle était déjà la décision des lois 31,32 et 33, ff., Pro socio, et tel est le sentiment professé par MM. Duvergier, Sociétés, no11, et Troplong, Société, t. 1er, no 28. La circonstance seule que l'immeuble aurait été revendu avec bénéfice ne saurait donc entraîner la présomption d'un contrat de société; car ce n'est pas le résultat de l'opération qu'il faut considérer, mais bien le but qu'on se proposait en la faisant. Cependant il a été jugé que l'acquisition et la jouissance en commun d'un immeuble consti tuaient une société civile: Bordeaux, 11 avril 1845 (t. 21845, p. 203); Cass. 9 nov. 1846 (t. 21846, p. 629). Mais il est à remarquer que, lors de ces arrêts, on n'avait point agité la question de savoir s'il fallait voir là une société ou une simple communauté. De plus, dans l'espèce du second, il avait été stipulé que la majorité des coacquéreurs aurait la faculté de revendre l'immeuble, nonobstant le refus de la minorité, stipulation impliquant presque nécessairement l'existence entre les coacquéreurs.-V., au surplus, Rép. gen. Journ. Pal., vo Société, nos 39 et suiv. (2) V. Rép. gén. Journ. Pal., vo Paiement, nos 40 et suiv. sieurs Dervieux frères, négociants à Marseille, avaient acquis la principale partie du domaine de l'Hopital, moyennant le prix de 30,000 fr. Par un second acte du 30 mai 1833, ils en avaient ensuite acquis le surplus moyennant 9,000 fr.Ce domaine fut loué par eux à divers fermiers ou colons partiaires, à l'exception de certaines portions dont ils se réservèrent jouissance. - Le 22 juil. 1844, les sieurs Dervieux frères revendirent au sieur Fraix de Martigues le domaine de l'Hopital, «par eux possédé, suivant les termes du contrat, conjointement et par indivis, moyennant la somme de 60,000 fr., payable : : 30,000 fr. après l'accomplissement des formalités de purge, et les 30,000 fr. restants le 31 déc. 1846. Une première quittance notariée du 31 oct.. 1844 constate en effet le paiement aux deux frères Dervieux, «comparaissant individuellement >», de la somme de 30,000 fr. Quant aux autres 30,000 fr., ils furent payés, le 8 juin 1845, par l'acquéreur, au sieur Dervieux aîné, « agissant, porte la quittance notariée, tant en son propre nom que comme se portant fort solidairement de M. Edouard Dervieux, son frère, non comparaissant, par lequel il promet de faire approuver et ratifier le présent acte dans le délai de deux mois....» Cependant, le 10 avril 1848, le sieur Edouard Dervieux ayant assigné le sieur Fraix en paiement de la somme de 15,000 fr. qu'il prétendait lui être due pour sa part dans le solde du prix du domaine de l'Hopital, celui-ci appela le sieur Dervieux aîné en garantie. Sur la prétention du sieur Fraix qu'une société avait existé entre les deux frères Dervieux, et que, par conséquent, chacun avait eu le pouvoir de toucher pour son coassocié, un jugement du tribunal civil d'Aix du 6 janv. 1849 ordonna que les livres de commerce de la société des sieurs Dervieux fussent apportés. Cet apport ayant eu lieu, les parties conclurent, Dervieux cadet au paiement de la somme de 15,000 fr. contre Fraix, sous l'offre cependant de laisser aux mains de ce dernier une somme de 5,600 fr. pour assurer le service d'une rente viagère encore subsistante et hypothéquée sur le domaine vendu; Fraix, au rejet de la demande principale de Dervieux cadet, et, dans tous les cas, à être garanti par Dervieux aîné; enfin ce dernier, qui reconnaissait devoir la garantie demandée contre lui, conclut au rejet de la demande principale de Dervieux jeune contre Fraix, par le motif que celui-ci avait reçu la somme de 15,000 fr. qu'il réclamait. Le 5 avril 1849, jugement qui, tout en refusant, à raison de l'existence d'inscriptions hypothécaires, d'ordonner le paiement des 15,000 fr. réclamés par Dervieux jeune, reconnaît néanmoins que cette somme lui est due par Fraix, la quittance du 8 juin 1845 n'emportant pas libération de cette somme à l'égard dudit Dervieux, Sur l'appel de Fraix, le 6 mars 1850, ar-rêt de la Cour d'Aix qui infirme et déclare Fraix libéré vis-à-vis de Dervieux cadet, par ce motif qu'une société avait existé entre les frères Dervieux pour l'acquisition et la revente du domaine de l'Hopital, et que l'existence de cette société avait donné à Dervieux aîné droit et qualité pour recevoir les 30,000 fr. formant le solde du prix, puisqu'il est de règle, en matière de société, et consacré par l'art. 1859 C.civ., que les associés sont censés s'être donné réciproquement le pouvoir d'administrer l'un pour l'autre, que chacun d'eux fait est valable, me et que ce me pour la part des autres. Pourvoi en cassation par le sieur Dervieux. Violation des art. 1834 et 1832 C. civ., en ce que, d'une part, l'arrêt attaqué s'était, pour décider qu'il y avait eu société entre les frères Dervieux, fondé sur des faits qui constituaient tout au plus de simples présomptions de l'existence d'une société, tandis que, suivant l'art. 1834 C. civ., toutes sociétés doivent être rédigées par écrit, lorsque leur valeur est d'un objet | de plus de 150 fr.; et, d'autre part, en admettant les faits accueillis par l'arrêt attaqué, à savoir, l'achat en commun du domaine de l'Hopital, la jouissance indivise, la revente avec bénéfice, il aurait fallu, de plus, qu'il fût constaté que le tout avait eu lieu dans la vue d'un bénéfice à faire en revendant, condition essentielle et caractéristique du contrat de société. Enfin, fausse application de l'art. 1859 C. civ. et violation des art. 1239 et 1998 mème Code, en ce que, si une société avait réellement existé, elle avait au moins été dissoute par la vente de l'immeuble qui en faisait l'objet, et que, dès lors, à partir de cette vente, chacun des associés était rentré dans l'exercice privatif et exclusif de ses droits. Du 22 NOVEMBRE 1852, arrêt C. cass., ch. άν., MM. Bérenger prés., Moreau (de la Meurthe) rapp., Nicias-Gaillard 1 av. gén. (concl. conf.), Lanvin et Luro av. « LA COUR; - Vu l'art. 1239 C. Nap.; Attendu 'qu'aux termes de cet article, le paiement n'est valable qu'autant qu'il est fait au créancier ou à quelqu'un ayant pouvoir pour lui de recevoir; - Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que Dervieux aîné n'avait aucun mandat spécial et écrit pour toucher de Fraix, acquéreur du domaine de l'Hopital, sur les frères Dervieux, par contrat du 22 juil. 1844, la portion revenant à Dervieux cadet dans la somme de 30,000 fr. restant due sur le prix de ce domaine, et qu'il a reçue en totalité, suivant quittance authentique du 8 juin 1845, agissant tant en son propre nom que comme se portant fort solidairement de Dervieux cadet, dont il a promis la ratification, qui n'a point été ultérieurement apportée; - Attendu que les faits relevés et reconnus par ledit arrêt, sur l'achat fait en commun, en 1831 et 1833, par les frères Dervieux, de ce domaine, sur la jouissance en commun et par indivis qu'ils en ont eue pendant plusieurs années, et sur la revente dudit domaine avec bénéfice, en l'absence de toute constatation que les frères Dervieux avaient acheté ce domaine dans la vue d'en opérer la revente et de partager le bénéfice qui pourrait en résulter, ont constitué entre eux, non le contrat de société défini par l'art. 1832 C. Nap., et auquel seul l'art. 1859 même Code est applicable, mais un simple état de communauté et d'indivision, justifié d'ailleurs par les termes du contrat précité du 22 juil. 1814 et par ceux des deux quittances du prix, des 31 oct. 1844 et 8 juin 1845, et qui n'est point régi par cet article; Qu'il suit de la que l'arrêt attaqué, en se fondant sur les dispositions par lui citées de l'art. 1859 pour déclarer Fraix bien et dûment libéré envers Dervieux cadet de la portion revenant à ce dernier dans le prix du domaine de l'Hopital qu'il a versé à Dervieux aîné le 8 juin 1845, a fait une fausse application dudit article et expressément violé l'art. 1239 du même Code; - CASSE, etc. ». CASSATION (1er décembre 1852). INVENTAIRE, MOBILIER, PREUVE, REPRISES, Lorsqu'à la dissolution de la communauté par Le mari n'est pas, en pareil cas, recevable à établir la consistance du mobilier de la communauté par témoins ou commune renommée à l'effet d'obliğer les héritiers de la femme à exercer les reprises de celle-ci sur les valeurs mobilières avant de s'attaquer aux immeubles. C. Nap. 1415, 1504, 1442. BLAIZOT C. HÉRITIERS DE LA DAME BLAIZOT. Les époux Blaizot s'étaient mariés, le 17 juill. 1809, sous le régime de la communauté, et, par leur contrat, ils s'étaient fait donation mutuelle, au profit du survivant, de la propriété de tous les biens meubles, et de l'usufruit de tous les immeubles, qui appartiendraient au prédécédé. Le8 juill. 1821, 821, la dame Blaizot est décédée sans enfants. Le mari, donataire dans les termes du contrat de mariage, se mit en possession de tout ce qui composait l'actif de la communauté, et ne fit constater d'aucune manière la consistance du mobilier, qui n'était pas sans importance, car c'était celui d'une assez grande exploitation rurale. Pendant plus de vingt ans, les héritiers de la dame Blaizot parurent vouloir respecter cette situation; mais, dans le courant de l'année 1842, ils songèrent à faire cesser l'état d'indivision qui existait entre eux et le sieur Blaizot. En conséquence, ils assignèrent ce dernier, et plusieurs de leurs cohéritiers, devant le tribunal de Valognes, pour faire ordonner le partage des biens immeubles composant les communauté et succession dont il s'agit.-Unjugement du 4 mars (1) V. Rép. gen. Journ. Pal., vo Communauté, nos 1179 et suiv. 1843 a ordonné la liquidation et le partage, a nommé des experts pour estimer les biens, et commis un notaire pour procéder aux opérations définitives. Par son procès-verbal de liquidation, le notaire établissait, au profit des héritiers de la dame Blaizot, un prélèvement sur les immeubles de la communauté, jusqu'a concurrence d'une somme de 12,000 fr., montant des reprises de la femme, à raison de ses propres aliénés sans remploi durant le mariage. - Le sieur Blaizot critiqua cette partie de la liquidation, et soutint que c'était à tort que le notaire ne faisait pas figurer à l'actif de la communauté les valeurs mobilières qui en faisaient partie, et sur lesquelles il y avait lieu de faire porter l'imputation des reprises de la femme. -Les parties ayant été renvoyées à l'audience, pour être réglées sur le contredit, le sieur Blaizot demanda à faire preuve, tant par titres que par témoins à l'appui de ses déclarations, de l'existence, de la consistance et de la valeur des biens mobiliers de la communauté en liquidation. Le 13 février 1847, jugement du tribunal de Valognes, qui, « attendu qu'il n'y avait lieu de faire figurer à l'actif de la communauté les valeurs mobilières que Blaizot allègue en avoir fait partie, et qui, selon lui, existaient à la dissolution de la communauté, rejette la preuve par lui offerte, aux fins d'en établir l'exisience, la consistance et la valeur, maintient le prélèvement des immeubles de la communauté, jusqu'à concurrence d'une valeur de 12,000 fr., au profit de la succession de la dame Blaizot, ainsi qu'il a été établi par le notaire liquidateur, et homologue, au surplus, dans toutes ses parties, le procès-verbal de liquidation....>>> Appel par le sieur Blaizot qui, devant la Cour, a pris des conclusions tendant à faire ordonner que dans l'actif de la communauté d'entre lui et sa femme on ferait entrer pour une valeur de 25,000 fr. le mobilier existant à la dissolution de cette communauté; subsidiairement ordonner que l'importance de son exploitation et la valeur des récoltes existant au décès de la dame Blaizot seraient déterminées par expert; appointer en outre lui Blaizot à prouver par témoins la consistance de toutes les valeurs mobilières qui se trouvaient au domicile commun à la même époque. Quant aux héritiers de la dame Blaizot, ils concluaient à la confirmation pure et simple du jugement. Le 10 mars 1851, arrêt de la Cour de Caen ainsi conçu : ceux finitive qu'une preuve par commune renommée, essentiellement incertaine et dangereuse, qui n'est autorisée par la loi qu'en faveur de qui n'ont pas été à portée de s'en procurer une autre, ainsi que le démontrent les art. 1415 et 1504 C. civ., et que, quand l'art. 1442 ouvre cette voie aux parties intéressées, il est clair qu'il n'entend pas appliquer ces derniers mots à l'époux survivant qui a négligé la preuve ordinaire et normale résultant d'un inventaire; Considérant que Blaizot, qui s'est mis ainsi, par sa négligence, dans l'impossibilité de prouver d'une manière légale en quoi pouvait consister le mobilier de la communauté, ne peut réussir dans sa prétention actuelle, qui ne repose que sur l'allégation non justifiée d'un mobilier suffisant pour faire face au prélèvement de la feue dame Blaizot, et qui, par conséquent, manque de base; - Par ces motifs, confirme le jugement dont est appel, etc. >>> Pourvoi par le sieur Blaizot. 1o Fausse application des art. 1415 et 1504 C. Nap., en ce que l'arrêt attaqué, se fondant sur ce que le demandeur n'a point, après la mort de sa femme, fait procéder à l'inventaire du mobilier de la communauté, a refusé de l'admettre à prouver l'existence et l'importance de ce mobilier.. 2o Violation de l'art. 1442 du même Code, en ce que, au lieu d'autoriser simplement, comme le veut cet article, les parties intéressées à exercer toutes poursuites relativement à la consistance du mobilier, l'arrêt attaqué a conclu du défaut d'inventaire à la non-existence de ce mobilier. 3o Violation des art. 1470 et 1471 dudit Code, en ce que l'arrèt attaqué n'a point ordonné qu'une reprise de 12,000 fr., à exercer par les héritiers de la femme pour défaut de remploi d'un de ses propres aliénés, serait imputable sur le mobilier, et qu'il a décidé que le prélèvement de 12,000 fr. aurait lieu sur des immeubles. M. Hardoin, conseiller rapporteur, après avoir fait remarquer que ces trois moyens se confondent en un seul, a présenté sur leur ensemble les observations suivantes : << Voici quelle était la position respective des parties devant la Cour de Caen et la prétention du sieur Blaizot. Les héritiers de la femme qui poursuivaient la liquidation de la communauté voulaient exercer sur les valeurs de cette communauté un prélèvement à raison d'une somme de 12,000 fr. pour prix d'un propre de la dame Blaizot, aliéné sans remploi durant le mariage. Blaizot qui, d'après son contrat de mariage, avait la jouissance d'une portion des biens de sa femme, invoquait les dispositions de l'art. 1471 C. Nap., et disait à ses adversaires : Observez l'ordre indiqué par cet article; exercez votre pré lèvement d'abord sur le mobilier, puisqu'il n'y a point d'argent comptant; vous n'atteindrez les immeubles que lorsque les valeurs mobilières vous manqueront. Les héritiers de la femme répondaient: ondaient: Existait-il un mobilier au moment où la communauté s'est dissoute? En quoi consistait-il? C'est ce qu'il est impossible, après << Considérant qu'après le décès de sa femme, arrivé le 8 juil. 1821, Blaizot ne fit constater par aucun inventaire le mobilier de la communauté, et qu'il est toujours resté ainsi en possession tant des biens dépendant de cette communauté que de ceux qui appartenaient en propre à son épouse; que, par là, il s'est volontairement privé de la preuve régulière de la consistance des valeurs mobilières qui pouvaient se trouver dans ladite communauté; Considérant qu'il ne peut être admis à y suppléer aujourd'hui par une preuve qui ne serait en dé-vingt-deux aus, d'affirmer d'une manière pré toute autre preuve; c'est un recours que la loi leur accorde; ils ne doivent point souffrir de la faute de l'époux survivant. Mais il serait absurde d'accorder la même faveur à celui que la loi regarde comme coupable d'une faute, puisque, d'après le dernier paragraphe de l'art. 1442, l'époux survivant qui n'a point fait inventaire est puni, lorsqu'il a des enfants, par la privation de la jouissance de leurs biens personnels. Il n'a pu entrer dans l'esprit du législateur de venir au secours de l'époux qui n'obéit point à la loi, d'indemniser celui qu'on déclare négligent des suites mêmes de sa négligence. Ainsi donc, à défaut d'argent comptant, à défaut de mobilier légalement constaté, le prélèvement à exercer par les héritiers de la femme Blaizot ne pouvait porter que sur les immeubles. >> ch Du 1er DÉCEMBRE 1852, arrêt C. cass., req., MM. Jaubert cons. f. f. prés., Hardoin rapp., Raynal av. gén., Groualle av. cise; votre devoir à vous époux survivant était de faire constater par un inventaire et la consistance et la valeur de tous les effets mobiliers qui se trouvaient au décès de votre femme. Au lieu de remplir cette formalité, prescrite par la loi, vous vous êtes emparé de tout l'actif, vous en avez joui et sans doute disposé comme propriétaire; nous ne pouvons aujourd'hui savoir s'il y avait autre chose dans la communauté que des immeubles. C'est donc sur ces immeubles que nous demandons à exercer notre prélèvement de 12,000 fr.- Le sieur Blaizot soutenait alors qu'il devait être admis à prouver par témoins et par experts l'existence et l'importance du mobilier composant l'actif de la communauté au moment où elle s'est dissoute. La Cour d'appel a considéré ce genre de preuve offert par Blaizot comme une preuve par commune renommée, car elle ne pouvait avoir un autre caractère après qu'un aussi long intervalle s'était écoulé et qu'il s'agissait de recueillir des ren<< LA COUR; Attendu qu'il est constaté seignements sur la valeur que pouvaient avoir en fait par l'arrêt attaqué qu'après la mort de vingt-deux ans auparavant des objets mobiliers. sa femme, Blaizot s'est mis et est resté en posLa Cour d'appel à donc repoussé la prétention session de tous les biens dépendant de leur du demandeur.- Son motif vous paraîtra peutêtre fondé sur l'esprit et sur la lettre de la loi. communauté et de ceux qui appartenaient en -La lecture de l'art. 1415 démontre que, lorsque un inventaire la consistance du mobilier; -Atpropre à son épouse, saus faire constater par le mari qui devait faire procéder à un inventaire tendu qu'en cet état et en l'absence d'argent n'a point obéi à cette prescription, il ne peut y comptant et de mobilier dépendant de la comsuppléer par la voie de l'enquête par commune munauté, les héritiers de la dame Blaizot ne renommée. Il est vrai que l'art. 1415 parle spé- pouvaient exercer que sur les immeubles exicialement de ce qui arrive durant la commu- stant entre les mains du mari la reprise qu'ils nauté; mais il est facile de reconuattre qu'il avaient à faire à raison des propres de la femme pose un principe général, puisqu'il dit que dans aliénés sans remploi durant le mariage; qu'ainsi tous les cas où le défaut d'inventaire portera les art. 1470 et 1471 C. Nap., relatifs à l'ordre préjudice à la femme, celle-ci ou ses héritiers dans lequel les prélèvements de la femme doipourront prouver la consistance du mobilier par vent s'exercer, loin d'avoir été violés, ont reçu, commune renommée, et que le mari n'y sera ja- au contraire, une juste application; - Attendu mais recevable.—L'art. 1504 contient la même que la demande de Blaizot tendant à être autorisé distinction dans le cas où, le mobilier étant exclu de la communauté par le contrat de maria-existant à la dissolution de la communauté n'est à prouver par témoins l'importance du mobilier ge, celui qui échoit à l'un ou à l'autre des époux point justifiée par l'art. 1442 C. Nap., qui, en n'a point été constaté par un inventaire. La accordant ce droit aux parties intéressées, n'a femme, qui n'administre pas, qui est réduite pu l'étendre au mari survivant, à la négligence pendant la communauté à un rôle passif, pour- duquel le défaut d'inventaire doit être attribué; ra, dans ce cas, recourir à la commune renommée pour établir et sauvegarder son bien; le mari, chargé de la direction des affaires communes, et qui a manqué au devoir qui lui était imposé, ne jouira pas de la même faveur. Sa négligence est punie par le refus que lui fait l'art. 1504 de suppléer au défaut d'inventaire. -C'est le même principe qui doit diriger dans l'interprétation de l'art. 1442, qui statue pour le cas de défaut d'inventaire au moment de la dissolution de la communauté. Le survivant des époux est alors chargé par la loi de faire inventorier le mobilier existant; il est tenu de l'accomplissement de cette formalité dans l'intérêt des héritiers de son conjoint comme dans le sien propre. - Représentant seul tous ceux qui ont des droits sur la communauté, i! se trouve dans la position où se trouvait le mari pendant qu'existait la communauté. Les mêmes obligations lui sont imposées. S'il néglige de faire procéder à un inventaire, les représentants de l'autre époux y pourront suppléer par T. Ier de 1853. Que cette prétention du demandeur est, en outre, formellement condamnée par l'art. 1415 du même Code, qui déclare en règle générale que le mari n'est jamais recevable à faire la preuve par témoins ou par commune renommée de la consistance et de la valeur du mobilier non inventorié, tandis que cette faculté appartient de droit à la femme ou à ses héritiers, quand ils éprouvent du défaut d'inventaire quelque préjudice; d'où il suit que les articles invoqués n'ont point été violés; REJETTE, etc. » BORDEAUX (18 mai 1852). Dans le cas où un individu a épousé deux femmes, dont les mariages, contractés de bonne foi par celles-ci sous le régime de la communauté, ont subsisté simultanément, la première femme a droit à la moitié de tous les acquéts 16 |