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>>tion ne pourra connaître du fond des affaires; >> après avoir cassé les procédures ou le juge>>ment, il renverra le fond des affaires aux tri>> bunaux qui devront en connaître »> ; Par ces motifs, CASSE et ANNULE le jugement du tribunal de commerce de Marseille du 25 avr. 1850, et le jugement par défaut du même tribunal du 20 juin 1849, dont ledit jugement du 25 avr. 1850 a prononcé le maintien; REMET la cause et les parties au même et semblable état où elles étaient avant ledit jugement du 25 avr. 1850, et, pour leur être fait droit, les RENVOIE devant le tribunal de commerce de La Ciotat, etc. >>

CASSATION (18 avril 1853).

montant de sa dot, que 11,317 fr. 74 cent. » Lors de l'enregistrement de cet acte, le receveur n'a d'abord perçu qu'un droit fixe de 2 fr. Mais, depuis, Tadministration a décerné contre les époux de Saint-Pardoux une contrainte en paiement 1° d'un droit de 2 p. 100 sur les meubles abandonnés pour 5,000 fr. à la dame de Saint-Pardoux, par le motif que rien ne justifiait que ces valeurs dépendissent de la communauté, et qu'il résultait au contraire du contrat de mariage du 6 nov. 1837 qu'elles appartenaient personnellement au sieur de SaintPardoux; 2° et le droit de transcription de 1 fr. 50 cent. p. 100 sur les 77,000 fr., valeur des immeubles cédés en remploi.-Toutefois la réclamation du premier de ces droits a été ensuite abandonnée par l'administration.

Sur l'opposition des sieur et dame de SaintPardoux, jugement du tribunal de Brives, du 16 avril 1850, qui annule la contrainte par les motifs suivants :

TRANSCRIPTION (DROIT DE), IMMEUBLE DE COMMUNAUTÉ, CESSION, STIPULATION D'EMPLOI. L'acte par lequel un mari cède à sa femme, à titre d'emploi de sa dot, des immeubles de la « Attendu que les questions soumises au tricommunauté ou société d'acquêts, est de natu- bunal consistent à savoir: 1° si le sous-seing re à être transcrit, et par conséquent est pas-privé passé le 10 mai 1848 entre les sieur et sible du droit de transcription, bien que non dame de Saint-Pardoux contient un acte transsoumis au droit de mutation (1). L. 28 avril latif de propriétés immobilières; 2° si, dans le 1816, art. 54. cas contraire, cet acte est passible du droit proportionnel de transcription établi par l'art. 54 de la loi du 28 avril 1816; - Attendu que l'administration de l'enregistrement a elle-même

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ENREGISTREMENT C. DE SAINT-PARDOUX. Suivant contrat passé le 6 nov. 1837, les sieur et dame de Saint-Pardoux se sont ma-jugé négativement la première question, en se riés sous le régime de la communauté réduite bornant à réclamer le droit proportionnel de aux acquêts; le futur s'est constitué une somme transcription de 1 fr. 50 cent. p. 100, sans exiger de 5,000 fr. en meubles et effets mobiliers lui le droit proportionnel de mutation pour vente, provenant de ses économies, et la future a été bien autrement important, puisqu'il est tarifé à dotée par ses père et mère d'une somme de 5 fr. 50 cent. p. 100, non compris le décime, 94,017 fr. 74 cent. Les époux ayant fait, de- par l'art. 52 de la même loi; qu'elle a donc repuis leur union, plusieurs acquisitions de connu par là qu'il n'y avait pas eu transmission meubles et d'immeubles, ils ont, par un acte de propriété par l'acte du 10 mai 1848; qu'elle sous seing privé du 10 mai 1848, déclaré l'a si bien reconnu ainsi, sous un autre rapport, que le prix de ces acquisitions avait été payé que, dans son mémoire signifié, elle a déclaré des fonds reçus par le mari sur la dot de abandonner le droit de 2 p. 100 qu'elle avait sa femme; que ces acquisitions avaient été demandé dans sa contrainte sur les 5,000 fr., faites dans le but d'effectuer un emploi des prix du mobilier délaissé par le même acte à la fonds au profit de la dame de Saint-Pardoux, dame de Saint-Pardoux par son mari, en se << mais que, les contrats d'acquisition ne ren- fondant sur ce que ce mobilier, non inventorié fermant pas l'expression de cette pensée, les dans le contrat de mariage des époux, était parties ont cru nécessaire et juste de suppléer présumé un acquêt de communauté, et que par les présentes à cette omission. En con- d'ailleurs son acte de délaissement n'était point séquence, M. de Saint-Pardoux reconnaît ici, assujetti à la transcription, puisque les meubles en faveur de ladite dame son épouse, qui l'ac- ne sont pas susceptibles d'hypothèques ; qu'il cepte, que les immeubles ci-après......, sons suit de là que la première question posée échaptoute garantie de la part du mari, ont été, dès pe, en fait, à l'examen et à l'appréciation du l'origine, la propriété propre et personnelle de tribunal; -- Attendu, sur la seconde question, ladite dame de Saint-Pardoux, comme ayant que de la combinaison des art. 52, 53 et 54 de été l'objet de l'emploi des deniers constitués la loi du 28 avril 1816, 939 et 2181 C. civ., et par le contrat précité ». Aux termes de cet 34 C. proc. civ., il résulte que les actes tranacte donc, la dame de Saint-Pardoux est deve-slatifs de propriété, tels que les donations et nue propriétaire exclusive d'immeubles estimés 77,000 fr., et de tout le mobilier, valant 5,000 fr. possédé par son mari, «au moyen de quoi, a-t-il été dit, celui-ci ne lui devait plus, sur le

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les ventes, sont seuls susceptibles de transcription, parce qu'ils sont seuls susceptibles d'hypothèque; qu'il ne faut pas prendre isolément et dans sa vague généralité l'art. 54 de la loi du 28 avril 1816, qui porte que, dans tous les cas où les actes seront de nature à être transcrits au bureau des hypothèques, le droit sera augmenté d'un et demi pour cent; que cet article a été placé après ceux qui ne parlent que

des ventes et des donations; qu'il n'a donc trait | époux de Saint-Pardoux en paiement du droit qu'à ces diverses mutations, qui sont seules su- proportionnel de un et demi p. 100 affecté à jettes par conséquent à être transcrites; que cette transcription, a expressément violé l'art. 54 T'administration de l'enregistrement ayant re- de la loi du 28 avril 1816; CASSE, etc. >> connu, ainsi qu'il a été dit plus haut, que l'acte du 10 mai 1848 n'était point translatif de propriété, il ne devait pas être soumis à la transcription, et que dès lors le droit proportionnel réclamé à ce sujet n'est point légalemeut dû. »

Pourvoi en cassation par l'administration de l'enregistrement pour fausse application des art. 939 et 2181 C. civ., 834 C. proc., et violation de l'art. 54 de la loi du 28 avr. 1816.

Du 18 AVRIL 1853, arrêt C. cass, ch. civ., MM. Mérilhou cons. f. f. prés.. Moreau (de la Meurthe) rapp., Nicias Gaillard 1er av. gén. (concl. conf.), Moutard-Martin av.

<<< LA COUR; Vu l'art. 54 de la loi du 28 av. 1816; Attendu que le droit propor

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COLOGNE (5 avril 1852).
SAISIE-EXÉCUTION, REVENDICATION, PROPRIÉTÉ,

PREUVE.

Le tiers qui s'oppose à la vente d'objets saisis dont il se prétend propriétaire ne peut, dans le cours de la procédure, notamment en appel, invoquer d'autres preuves de sa propriété que celles énoncées dans son exploit d'opposition (1). C. proc. civ. 608.

WOLFF C. GODenau.

Les héritiers Godenau avaient fait pratiquer une saisie-exécution sur leur débiteur Pauly. Wolf y fit opposition, se prétendant proprié

tobre 1848.

Jugement du tribunal de Cologne qui rejette quel elle était fondée avait été fait en fraude des cette opposition par le motif que l'acte sur lecréanciers.

Appel par Wolf. Il voulait alors établir son droit de propriété en alléguant qu'il avait acheté tiers, notamment dans des ventes publiques, ses meubles déjà en 1847 et 1848 des mains de après décès. Il produisait à l'appui de son dire plusieurs documents, et demandait subsidiairement à faire la preuve testimoniale.

Du 5 avril 1852, arrêt C. Cologne, 1re ch.; MM. Borchardt et Herbertz av.

tionnel de transcription de 1 et 1/2 p. 100, établitaire des meubles saisis en vertu d'un acte de par la loi du 27 vent. an VII sur l'organisation de transfert intervenu entre lui et Pauly le 4 ocla conservation des hypothèques, diffère essentiellement du droit proportionnel de mutation sur les immeubles établi par la loi sur l'enregistrement du 22 frim. an VII; que la perception du premier de ces droits n'est nullement subordonnée à la perception du second, en telle sorte que, alors même qu'il n'y a pas ouverture au droit de mutation, mais à un simple droit fixe, le droit de transcription peut et doit être exigé, suivant l'article 54 de la loi du 28 avr. 1816, sur tout acte qui est de nature à être transcrit;-Attendu que, si, dans la vue de favoriser les emplois et remplois entre époux, les lois sur l'enregistrement en ont soumis la déclaration à un simple droit fixe, l'abandon que, pendant le cours d'une communauté ou d'une société d'acquêts, le mari fait à ce titre à sa femme d'un immeuble dépendant de cette société d'acquêts, a pour résultat de faire sortir de cette société la propriété de cet immeuble et de l'attribuer à la femme; Attendu que tel a été, dans l'espèce, l'effet de l'acte intervenu, le 10 mai 1848, entre les époux de Saint-Pardoux, mariés sous le régime de la communauté réduite aux acquêts, et par lequel des immeubles acquis par de Saint-Pardoux pendant cette communauté d'acquêts ont été abandonnés à sa femme, qui les a acceptés en emploi des deniers à elle constitués en dot et qui avaient servi à payer ces acquisitions;

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Attendu que ces immeubles pouvaient être grevés d'hypothèques du chef des propriétaires antérieurs, et aussi du chef de Saint-Pardoux lui-même pour dettes à lui propres et dont sa femme ne serait pas personnellement tenue; que pour que l'emploi stipulé dans l'acte précité fût certain et utile à celle-ci il fallait que ces hypothèques réelles ou possibles, et d'origines diverses, fussent purgées; qu'elles ne pouvaient l'etre que par la transcription de cet acte; que cet acte était donc de nature à être transcrit ; qu'il suit de là que le jugement attaqué, en annulant la contrainte décernée par l'administration de l'enregistrement contre les

<< LA COUR; Attendu que les motifs sur lesquels l'appelant a fondé sa revendication en première instance ont été suffisamment réfutés dans le jugement dont est appel; Qu'en appel il n'a plus invoqué l'acte du 4 octobre 1848, mais qu'il a soutenu avoir été propriétaire des objets revendiqués déjà antérieurement à cet acie, en vertu d'autres titres; Que c'est là changer complétement le fondement de son action; Attendu que le nouveau fondement de sa demande et les preuves à l'appui n'ont pas été énoncés dans l'exploit d'assignation, ce que l'art. 608 C. proc. prescrit impérieusement; Que dès lors la Cour d'appel ne peut y avoir aucun égard et que l'appel n'est pas fondé; - Par ces motifs, MET l'appel à néant; CONFIRME, etc.»

CASSATION (16 juin 1852).

MARIAGE, LOI PERSONNELLE, LOI INDOUE,
INDIENS SUJETS FRANÇAIS.

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Le mariage contracté en contravention aux prohibitions de la loi personnelle étrangère à laquelle est soumise l'une des parties peut être annulé par un tribunal français, quoiqu'il ne contrevienne à aucune des disposi

(1) V. Rép. gén. Journ. Pal., vo Saisie-exécution, n 297 et suiv.

tions du Code Napoléon (1). (Rés. par la Cour d'appel.)

Le mariage contracté par un Indien sujet français conformément à la loi civile française est valable; l'arrêté du 6 janvier 1819, qui déclare que les Indiens seront jugés, com

(1-2) Rien, ce nous semble, n'est plus contraire aux règles du droit que l'arrêt rendu dans cette affaire par la Cour de Pondichéry; et rien, dès lors, ne leur est plus conforme que la cassation de cet arrêt par la Cour suprême.

me par le passé, suivant les lois et coutumes de leurs castes, est une disposition purement facultative qui n'interdit point aux Indiens sujets français de se soumet re aux lois françaises (2). Code Napoléon, 3 et 170.

Delangle, et par le motif même que le tribunal de première instance avait si nettement indiqué.

Mais autant le demandeur en cassation était bien fondé dans l'argument qu'il tirait ainsi de l'art. 3 de l'arrêté de 1819, et quand il disait, comme les premiers juges, que cet article, en permettant aux Indiens de conserver leurs lois et coutumes, si étranges qu'elles puissent être en certains points, n'avait certes pas entendu les contraindre à y rester soumis malgré eux, autant il l'était peu, à notre avis, dans l'autre branche de son moyen de cassation.

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Ramastrapoullé, Indien, sujet français de nos possessions de Pondichéry, avait épousé une femme de l'ile Maurice, et l'on prétendait son mariage nul, parce que la loi indoue, qui n'admet pas comme légitime le mariage que l'individu d'une caste contracte avec la femme d'une autre caste de la même nation, ne saurait admettre, à plus forte raison, ce- Suivant lui, quand même nos Codes français n'aului qu'il contracte avec une femme d'une nation dif- raient pas été promulgués dans l'Inde, et que la loi férente. Portée au tribunal de première instance de indoue eût été dès lors la seule loi personnelle de Pondichéry, la question fut décidée, comme elle Ramastrapoullé, son mariage eût encore dû être dédevait l'être, dans le sens de la validité du mariage. claré valable du moment qu'il s'était marié hors de «Nos Codes français, a dit le tribunal, ayant été l'Inde et dans un pays où cette loi indoue n'était pas promulgués, dans toutes nos possessions de l'Inde, suivie. « Les empêchements de mariage édictés par par arrêté de 1819, tous les Indiens sujets français une loi étrangère, disait-il, n'ont aucune force en ont pu, depuis lors, jouir du bénéfice de notre loi dehors du pays dans lequel cette loi existe; les juges civile, et tout mariage par eux contracté, qui n'a rien français, devant lesquels on invoque des empêchede contraire aux prohibitions du Code Napoléon, est ments que n'établit pas notre loi française, ne doipar conséquent valable. Il est très vrai que l'art. 3 vent pas respecter ces empêchements; ils ne doivent de cet arrêté de 1819 porte que les sujets français pas appliquer la loi étrangère qui les édicte ; ils ne de l'Inde continueront d'être jugés suivant les lois et doivent pas même la connaitre : des tribunaux francoutumes de leur caste; mais ce n'est là qu'une dis-çais ne doivent pas appliquer une loi étrangère. » position facultative et de pure faveur, dont le but C'est la une grave erreur, ou plutôt trois erreurs unique est de ne pas gêner les mœurs, les convic- en une. - D'abord, si le Code civil n'était pas protions religieuses, les sentiments ou les préjugés de mulgué dans l'Inde et que la loi indoue y fût, de ces peuples, et qui ne saurait évidemment empêcher par l'autorité française elle-même, la seule loi à de suivre notre loi française ceux des Indiens qui, suivre, il est clair que, par cela même que cette loi reconnaissant sa supériorité, la préfèrent à la leur, serait imposée à ce pays par l'autorité française, elle et viennent librement se soumettre à elle. La loi ne serait plus une loi étrangère, une loi que nos maindoue, avec ses prescriptions et prohibitions suran- gistrats ne devraient ni appliquer ni connaître; il nées et anti-sociales, ne continue donc à être la loi est clair qu'elle deviendrait la loi des Français Indu pays que pour ceux des Indiens qui la préfèrent à diens, comme notre Code est la loi des Français Eula nôtre; et déclarer nul, parce qu'il est condamné ropéens, et que, pour ces Français Indiens, nos par cette loi indoue, le mariage que l'Indien Fran- magistrats ne pourraient connaître qu'elle et ne çais a contracté d'après nos lois françaises et nos pourraient appliquer qu'elle. Mais, quand même idées chrétiennes, ce serait vouloir refouler malgré il s'agirait d'une loi vraiment étrangère, quand même eux dans la barbarie et l'ignorance des hommes que il s'agirait, par exemple, d'appliquer en France la le vœu du législateur est d'en voir sortir. On ne loi allemande à des époux allemands, ou la loi ancomprend pas que la Cour de Pondichery ait pu in-glaise à des époux anglais, le système du demanfirmer une décision si juridique, si morale! L'arrêt d'appel dit sérieusement que le brame ne peut épouser qu'une bramine, que le kchatrya ne peut prendre qu'une kchatrya, et ainsi de suite; de façon que l'homme d'une caste épouse toujours une femme de cette caste; et comme Ramastapoullé avait pris femme non pas seulement en dehors de sa caste, mais en dehors même de sa nation, son mariage était nul, de la plus complète nullité! Et quant à cette idée que la loi indoue n'est obligatoire que pour ceux des Indiens qui veulent bien la suivre, et non pour ceux qui lui préfèrent notre loi française, la Cour ne l'a pas même discutée; elle n'en a pas dit un mot, quoique le jugement l'eût longuement et très bien développée; elle a même été jusqu'à avancer que peu importait que Ramastrapoullé eût renoncé à la religion indoue et se fut fait chrétien, ceci ne pouvant pas l'empêcher de rester tenu d'épouser une bramine s'il était brame, une kchatrya s'il était kchatrya, une vaisja s'il était vaisja... Encore une fois, on ne saurait comprendre un tel arrêt, émané d'une Cour souveraine ! Aussi la Cour supréme l'a-t-elle cassé sur les conclusions (conformes, bien entendu) de M. le procureur général

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deur en cassation serait encore gravement erroné. Quand on dit que des étrangers peuvent se marier en France conformément à la loi française, ou, plus généralement, que deux individus d'une nation quelconque peuvent se marier valablement en tout autre pays conformément aux lois de ce pays, c'est seu lemnent des formes de la célébration du mariage qu'il s'agit, et nullement des règles de capacité personnelle, lesquelles sont toujours et partout celles de la nation à laquelle ces individus appartiennent. Des Allemands peuvent se marier en France d'après les formes fixées par la loi française; mais ils ne le peuvent que d'après les règles de capacité fixées par la loi allemande. Comment, enfin, a-t-on pù dire que des juges français ne doivent connaître et appliquer que la loi française? Est-ce que les juges fran çais, au contraire, ne sont pas tenus tous les jours d'appliquer (et par conséquent de connaître, en les étudiant pour le besoin de la cause, s'ils ne les connaissaient pas avant) les lois de tous les pays possibles, ne fat-ce que pour décider si un mariage célébré dans tel ou tel pays l'a été suivant les formes fixées par les lois de ce pays?... Nos juges français sont donc tenus de connaître les lois étrangères; et,

RAMASTRAPOULLÉ C. Hecquet. Ramastrapoullé, Indien, mais sujet français, quitta vers 1790 Pondichery, où il était né, pour venir faire le commerce à Port-Louis de l'ile de France, depuis île Maurice. Là, il eut de Marie-Louise Ferrine, esclave affranchie, neuf enfants, qu'il voulut ensuite légitimer; et, dans ce but, il épousa leur mère, en reconnais sant les enfants dans l'acte de mariage, le 21 juin 1819. Le mariage fut célébré dans les formes et avec les conditions requises par le C. Nap., alors en vigueur dans cette colonie. Ramastrapoullé étant revenu à Pondichéry, et y étant décédé le 12 mai 1841, le sieur Hecquet, curateur aux biens vacants, fut envoyé le 22 juin suivant en possession de la succession.

Le 21 août, les femmes Ellamallé et Ponnamallé, nièces du défunt, assignèrent Hecquet de vant le tribunal de Pondichery à l'effet de se faire envoyer en possession des biens dont elles se prétendaient héritières. Mais alors les enfants de Ramastrapoullé sont intervenus et ont revendiqué la succession en cette qualité. Les deux nieces du défunt leur ont opposé que le mariage contracté par celui-ci était nul, attendu Ramastrapoullé, qui était Indien de la race que Toulouvavillaja, n'ayant pas pu, d'après sa loi personnelle, épouser une femme d'une autre caste, n'avait pas pu, dès lors et à plus forte raison, en épouser une qui était d'une autre nation. Le 12 déc. 1842, jugement du tribunal de Pondichery qui déclare le mariage valable, et admet, en conséquence, les enfants de Ramastrapoullé à la succession de leur père, par les

leurs;

maures

Attendu que, par son arrêté du 6 janv. 1819, le gouvernement de Pondichéry a promulgué dans cette colonie les différents Codes qui composaient alors la législation française, pour y avoir leur exécution en tout ce qui n'était pas contraire au règlement du 22 fév. 1777, à l'édit de 1784, etc.; que si l'art. 3 de cet arrêté déclare que les Indiens, chrétiens, ou gentils, seront jugés, comme par le passé, suivant les lois, us et coutumes de leurs castes, cette dernière disposition n'a été faite que dans la vue bienveillante de respecter les idées et les préjugés de ce peuple, et de ne point le contraindre par une espèce de violence à adopter une législation qui se trouve, dans un grand nombre de points, contraire à ses mœurs ou à ses usages; Que l'on ne saurait supposer que le gouvernement ait voulu établir une barrière infranchissable entre l'Indien et l'Européen, et refuser à celui-là, lorsqu'il viendrait les réclamer, les bienfaits de lois fondées sur la raison, et fruits de l'expérience et d'une civilisation plus avancée; que son but a été, plutôt, en promulguant, par l'art. 1" de l'arrêté susénoncé, le Code civil en son entier dans les établissements français de l'Inde, d'inviter le peuple indien à suivre les règles et les prescriptions de ce Code, en ce qui lui paraîtrait compatible avec età profiter ainsi de ce qui lui semblerait s'approprier à ses besoins; Qu'il est constant que cette intention du gouvernement français, manifestée alors par son représentant, a produit sous ce point de vue quelques résulles lois concernant l'état civil, la tutelle des entats qu'il est important de constater; qu'ainsi fants mineurs par leurs mères devenues veuves, l'émancipation de celles-ci pour tout ce qui regarde les actes de la vie civile, la puissance paternelle, la renonciation aux successions, ont déjà diens qui en ont reconnu la supériorité ; - Que été adoptées en partie par un grand nombre d'Inles tribunaux de la colonie n'ont jamais refusé aux indigènes l'exercice des droits accordés par ces lois et de consacrer les conséquences qui en découlaient, sous le prétexte qu'ils devaient être régis uniquement par les us et coutumes de leur caste et que les lois françaises ne devaient jamais leur être applicables ;-Attendu que, d'après ce principe, Raman-Estrapoullé (1), qui, depuis un grand nombre d'années, habitait Mautrement, par un arrêt du 16 mai 1846 (t. 1 1847, Prine, le 21 juin 1819, et avait dû se rendre rice lors de son mariage avec la femme Fer

motifs suivants :

«Attendu que les actes de mariage et de légitimation ont eu lieu suivant les formes exigées par les lois alors en vigueur à l'ile Maurice; Attendu que tout mariage contracté en pays étranger est valable s'il a été célébré dans les formes usitées dans ce pays, pourvu qu'il n'y ait aucun empêchement d'ail

de même qu'ils doivent les appliquer, quant aux formes, pour des mariages célébrés à l'étranger, même par des Français, de même ils doivent les appliquer, ces lois étrangères, pour des questions de capacité, même pour des mariages célébrés en France, du moment qu'il s'agit de personnes étrangères.

Il est vrai pourtant que la Cour de Caen a jugé au

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ses mœurs,

compte des lois du Code civil sur la légitimation des enfants naturels par un mariage subséquent, a voulu profiter du bienfait de cette même loi, qui venait d'être promulguée dans son pays, et à laquelle il se soumettait volontairement, en reconnaissant et en légitimant les demandeurs,

etc. >>

616). Mais cet arrêt nous paraît trop contraire, soit aux principes, soit à la jurisprudence et à la doctrine, pour pouvoir faire autorité. V. notamment Paris, 13 juin 1814; Rennes, 16 mars 1842 (t. 1 1843, p. 99, dans ses motifs ;-Merlin, Rép., vo Lois, $6, no 6; Felix, T. du dr. internat., no 64, p. 112; Demolombe, Cours de C. civ., t. 1er, no 99, et t. 3, no 230; Rolland de Villargues, Rép. du notar., vo Statut, no 88. V. aussi Boullenois, De la personn. et de la réal. des lois, t. 2, p. 94; Louet, lettre C, no 42; Du- Sur l'appel, arrêt de la Cour de Pondichéry ranton, Cours de dr. fr., t. 1er, nos 79 et 93; Marcadé, du 29 août 1843, qui infirme en ces termes : Expl. du C. Nap., sur l'art. 3, no 5, t. 1er, no 76 de « Attendu que, si l'art. 170 C. civ. dispose que la 5e édition; Zachariæ, Cours de dr. civ., $31; Boi- le mariage contracté en pays étranger entre Franleux, Comment. C. Nap., 6o édit., sur l'art. 3; Riche-çais et étrangers sera valable s'il a été célébré lot, Principes du dr. civ., t. 1er, no 35; Mourlon, Répét. écrites, sur l'art. 3, 1er examen, p. 51; - Rép. gén. Journ. Pal. vis Lois, no 149; Mariage, no 550 et suiv.

(1) Ramastrapoullé n'est que la contraction du nom complet Raman-Estrapoullé.

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dans les formes usitées dans le pays, le même ment dans le cas d'impossibilité de faire autrearticle a le soin d'ajouter : pourvu qu'il ait été ment; et que jamais ils ne pouvaient, même en précédé des publications prescrites par l'art. 63, cas de cette impossibilité, descendre de deux et pourvu que le Français n'ait pas contrevenu degrés ni prendre pour épouse (patne) unc peraux dispositions contenues au chapitre précé- sonne de la quatrième classe, qui, ainsi qu'il dent, lequel a pour titre : Des qualités et condi- vient d'être dit, ne pouvait être que leur femme tions requises pour pouvoir contracter mariage; (iri), ou leur concubine (hari) (V. les §§ 14 d'où il suit qu'un mariage contracté à l'étranger et 15 du chap. 3 des lois de Manou, et le folio par un Français et une étrangère n'est valable 47 du chap. ir, sect. 1re du Dharm Pastra, qui qu'autant qu'indépendamment de ce que le con- termine une dissertation sur ce sujet par ces trat a été célébré dans les formes usitées dans le mots : « En conséquence, une bramine est l'épays, il n'existait aucun empêchement à ce ma- »pouse légale (patne) d'un brame; à défaut de riage, ni aucune incapacité absolue dans la per- » telle, une kchatrya peut l'être en cas de nésonne des contractants, ce qui n'est que la consé- >> cessité; mais ni une vaïsja ni une soudra ne quence naturelle du principe posé dans l'art. 3 » peut l'être, même s'il se marie avec elle. Une C. civ., qui porte que les lois concernant l'état » femme kchatrya est l'épouse d'un kchatrya; et la capacité des personnes régissent les Fran- » à son défaut une vaïsja peut l'être, puisqu'elle çais même résidant en pays étranger; --Attendu » est de la classe immédiatement inférieure, que dans tous les temps, sous la domination fran- » mais non une femme soudra. Une vaïsja est la çaise comme sous celle des Anglais, et même >> seule épouse que puisse avoir un vaïsja, puissous celle des Musulmans, les Indiens de Pondi- » qu'il est défendu aux classes régénérées de chéry, comme tous les autres, ont été régis par» prendre une soudra pour première femme. »>); leurs propres lois civiles, et le sont encore, ainsi Attendu que ces mariages, plus ou moins irque cela résulte de nombreux arrêtés, ordonnan- réguliers, tolérés par l'ancienne loi, et depuis ces et règlements, notamment du règlement du long-temps prohibés, ainsi qu'on peut le voir 22 fév. 1777, de l'édit de 1784 et de l'arrêté du dans la note générale à la fin du livre de Ma6 janv. 1819; que, par conséquent, et en admet- nou, sont entièrement tombés en désuétude, et tant que les art. 3 et 170 C. civ. puissent être que la coutume immémoriale, la principale loi de quelque application à la cause, Ramastra- suivant ce législateur, ne permet plus à un Inpoullé étant Indien, c'est à la loi indoue, et non dien de contracter mariage hors de sa caste parau chap. 1, liv. 1er, tit. 5, C. civ., qu'il faut ticulière; — Attendu, d'ailleurs, que la loi ciavoir recours pour savoir s'il existait dans la loi vile des Indous, comme celle de tous les peuples quelque empêchement dirimant au mariage con- primitifs, est fondée sur la loi religieuse, et si tracté par lui et l'esclave affranchie Marie-Louise intimement liée avec elle, que l'on ne peut comFerrine, ou quelque incapacité absolue de la part prendre l'esprit et le but de l'une, qu'en examide Ramastrapoullé lui-même; - Attendu que, nant les prescriptions et les motifs de l'autre ; bien que l'ancienne loi indoue permit de pren- que si l'on se livre à cet examen, l'on voit que dre des femmes dans l'ordre des classes, il n'y les droits héréditaires d'un Indou, de même a jamais eu dans l'Inde de femmes vraiment lé- que les règles relatives aux mariages, sont bien gitimes que celles qui étaient de la même classe moins fondés sur la proximité réelle du sang, que leur mari, lesquelles recevaient le nom de que sur l'aptitude à accomplir certains rites auxpatné (épouses), tandis que les autres étaient ap-quels la croyance attribue ou attribuait le poupelées iri (femmes), ou hari (concubines); que les enfants de celles-ci n'avaient droit à l'héritage du mari qu'au défaut de ceux des premières, et, en concurrence, ne recevaient que des portions moindres; que ces femmes n'assistaient point aux sacrifices et cérémonies religieuses faits par le mari, et n'étaient point admises à vaquer aux soins à donner à sa personne, honneurs qui n'étaient réservés qu'à celles de la même classe que lui (V. le Mitacshara, ch. 1, sect. 2, § 2, qui porte: « Le produit de l'uras est le fruit légitime aurasa; c'est celui qui est né d'une femme lé>> gitime. Une femme de la même classe que son » mari, épousée en légitime mariage, est une >>femme légitime, etc. »;- ch. 1, sect. 8, §4: << Les fils d'un brahme par une femme bramine >> prennent chacun quatre parts; les fils par une » femme khatrya reçoivent chacun trois parts; >> par une femme vaïsja, deux; par une soudra, >> une seule. »);

» Attendu qu'à la vérité, lorsque l'ancienne loi dominait, il était aussi permis aux hommes des classes supérieures de prendre pour épouse ou femme légitime une personne de la classe immédiatement au dessous de la leur, mais seule

voir de sauver d'un lieu d'horreur les mânes de ses ancêtres; que c'est là, ainsi que l'a fait remarquer le célèbre et savant maître Jones, la clef de tout le système d'hérédité des Indous, qu'il est impossible de comprendre si l'on n'en fait pas usage; Attendu que le premier but légal du mariage était, pour un Indou, de s'unir à une compagne qui pût l'assister dans les sacritices et cérémonies qu'il lui était prescrit de faire pendant sa vie, et qui pât les faire à sa place et pour lui après son décès; le second, d'obtenir des enfants mâles qui pussent à leur tour accomplir ces rites nécessaires : d'où il suit qu'il est de toute évidence qu'aucun mariage, d'aucune espèce, ni aucune union sexuelle entre Indous et étrangers, n'a pu être dans les prévisions d'une loi qui n'admettait pas de prosélytes et, de même que celle des Juifs, considé|rait toutes les autres nations de la terre comme des barbares; Attendu qu'il importe peu que la famille de Ramastrapouflé, comme cela a été dit dans une note fournie depuis les plaidoiries, eût cessé de suivre la religion indoue pour adopter les principes du christianisme; que la seule conséquenceè qui puisse résulter de cette

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