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CASSATION (9 septembre 1852). COUR D'ASSISES, JURÉS, PARENTÉ, INCAPACITÉ. L'art. 63 de la loi du 20 avril 1810, qui dispose que les parents et alliés, jusqu'au degré d'on cle et neveu inclusivement, ne pourront être simultanément membres d'un même tribunal ou d'une même Cour, ne s'applique qu'aux membres de l'ordre judiciaire, et ne peut être étendu aux jurés (1). L. 7 août 1848, art. 4. En conséquence deux frères peuvent être membres du même jury........., sauf le droit de récusation du ministère public et de l'accusé (2). C. inst. crim. 399, 400 et 402.

BONARDEL-ARGENTY.

Du 9 SEPTEMBRE 1852, arrêt C. cass., ch. crim., MM. Laplagne-Barris prés., Faustin-Hélierapp., Raynal av. gén.

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« LA COUR ; Vu l'art. 4 de la loi du 7 août 1848; Vu les art. 399, 400 et 401 C. inst. crim.;-Attendu que l'art. 63 de la loi du 20 avril 1810, qui dispose que les parents et alliés, jusqu'au degré d'oncle et neveu inclusivement, ne pourront être simultanément membres d'un même tribunal ou d'une même Cour, ne s'applique qu'aux membres de l'ordre judiciaire; Qu'aucune des lois relatives à l'organisation du jury n'a étendu cette disposition aux membres d'un même jury de jugement; Que les incompatibilités établies par l'art. 4 de la loi du 7 août 1848 et par l'art. 392 C. inst. crim. ne peuvent être étendues au delà de leurs termes; Qu'il n'est pas permis d'invoquer une analogie entre les fonctions du juge et celles du juré, puisque les jurés n'ont pas le caractère public de juges, et qu'aucune des règles de l'organisation judiciaire ne leur est applicable;-Que, si l'exercice simultané des fonctions de jure par deux citoyens parents ou alliés peut présenter quelques inconvénients dans l'intérêt de l'administration de la justice, le droit de récusation dont la loi a investi l'accusé et le ministère public suffit pour faire disparaître ces inconvénients et préserver les délibérations du jury de toute influence qui pourrait être dangereuse à la vérité; - Et attendu, en fait, qu'il résulte du procès-verbal de la Cour d'assises de l'Yonne que cette Cour d'assises, procédant, dans sa séance du 10 août dernier, au tirage du jury de jugement dans l'affaire de Bonardel-Argenty, avait terminé le tirage au sort de douze noms de jurés non récusés, lorsqu'il fut constaté que deux frères, les sieurs Challan, faisaient partie de ces douze jurés; qu'elle rendit alors un arrêt pour annuler le tirage qui venait d'avoir lieu et pour ordonner qu'il serait procédé immédiatement à un nouveau tirage, et qu'en exécution de cet arrêt, un nouveau jury a été formé et a procédé au jugement de Bonardel-Argenty; Attendu qu'en

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annulant le tableau du jury régulièrement composé, la Cour d'assises a violé l'art. 399 C. inst. crim., qui déclare que le jury de jugement sera formé à l'instant où il sera sorti de l'urne douze noms de jurés non récusés, et l'art. 4 de la loi du 7 août 1848, qui énumère les cas d'incompat bilité applicables aux fonctions du jury; CASSE, etc. »

CASSATION (2 octobre 1852). ACTION PUBLIQUE, FRANÇAIS, PAYS ÉTRANGER, CRIME, PLAINTE, DÉSISTEMENT. Lorsqu'un Français a porté plainte contre un autre Français pour crime commis à son préjudice par ce dernier en pays étranger, tout désistement ultérieur de sa part est sans effet pour arrêter l'action publique mise en mouvement par cette plainte (3). C. inst. crim. 1, 4 et 7. BERTHONNEAU.

Du 2 OCTOBRE 1852, arrêt C. cass., ch. crim., MM. Laplagne-Barris prés., Nouguier rapp., Plougoulm av. gén.

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« LA COUR ; Vu l'art. 7 C. inst. crim. ; Attendu qu'aux termes de cet article et au cas de crime commis en pays étranger par un Français au préjudice d'un Français, la poursuite et le jugement ne peuvent avoir lieu en France que sous la triple condition : 1o qu'il n'y aura pas eu poursuite et jugement en pays étranger; 2o que le Français prévenu du crime sera de retour en France; et 3° que le Français offensé aura porté plainte; Attendu que ni cet article ni aucune autre disposition de loi n'exige, en outre, pour la validité de l'information et du jugement, que le Français offensé persiste jusqu'au dernier acte de la poursuite dans la plainte qu'il a antérieurement portée; - Que la plainte, au point de vue de la criminalité du fait, la révèle, mais ne la constitue pas; qu'au point de vue de la compétence, dont le principe réside dans la protection assurée par la loi française à tous les Français, cette plainte la met en mouvement, mais ne la crée pas; Que, dès lors, tout désistement ultérieur étant sans effet, soit pour dépouiller le fait de sa qualification légale, soit pour faire cesser une compétence préexistante, ne saurait mettre obstacle à la continuation de l'action publique; Attendu que, s'il en était autrement, la loi aurait en quelque sorte substitué le plaignant aux magistrats chargés de l'action publique, et l'au rait, en fait, rendu maître de cette action, puis

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(3) V. conf. C. d'ass. Seine, 20 nov. 1846 (rapporté avec Cass. 23 janv. 1847 [t. 1 1847, p. 674]);

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Legraverend, Législ. crim., 3e édit., t. 1er, p. 54; Hélie, Tr. de l'inst. crim., $ 130, t. 2, p. 623 et suiv.; Le Sellyer, Tr. du dr. crim., t. 5, no 1992; Rodière, Elem. de proc. crim., p. 28; de Grattier, Comm. L. de la presse, sous la loi du 26 mai 1819, art. 1er, n° 8; Morin, Rép. du dr. crim., v° Désistement, no 8. Contr. Carnot, Instruct. crim., sur l'art. 7, Observ. addit., no 5; Mangin, Action publique, t. 1er, no 70, p. 131.

V. Rép. gen. Journ. Pal., vo Action publique, nos 160 et suiv.

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JURISPRUDENCE FRANÇAISE.

qu'il pourrait, à son gré et à toutes les phases de la procédure, arrêter la poursuite par un désistement, ou la faire revivre par une plainte nouvelle; Attendu, dès lors, qu'en ne s'arrêtant pas au désistement donné par Tillet de la plainte que, comme Français, il avait portée contre Pierre-Benjamin Berthonneau, également Français, pour divers faux commis dans l'ile de Guernesey et à son préjudice par ce dernier, et en ordonnant, au contraire, qu'il serait procédé à la continuation des poursuites et passé outre aux débats, l'arrêt attaqué, loin de violer l'art. 7 ci-dessus visé, en a fait une exacte application; - Rejette. »

CASSATION (15 novembre 1852).

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CAN

ÉCHANGE, ENREGISTRement, expertise, TONS DIFFÉRENTS, TIERS EXPERT, COMPÉTENCE, PROCÈS-VERBAL, REMISE, DÉLAI. Dans le cas de partage' entre les deux experts nommés pour faire l'évaluation d'immeubles aliénés à titre d'échange et situés dans des cantons différents, la désignation du tiers expert doit, faute par lesdits experts d'avoir pu en convenir, être faite par le juge de paix de la situation de l'immeuble qui présente le plus grand revenu d'après la matrice du rôle (1). | LL. 22 frim. an VII, art. 17 et 18; 15 nov. 1808, art. 1.

L'art. 18 de la loi du 22 frim. an VII, suivant lequel le procès-verbal d'expertise doit être rapporté au plus tard dans le mois qui suit la remise faite aux experts du jugement qui les nomme, n'est point prescrit à peine de nullité. Dès lors, bien qu'il se soit écoulé plus d'un an entre l'ouverture de leur rapport et sa clôture où se trouve constaté leur dissentiment, on peut encore poursuivre la nomination d'un tiers expert à l'effet de les départager (2). L. 22 frim. an VII, art. 18. (Rés. par le tribunal seulement.)

ENREGISTREMENT C. PIAT.

Par un acte notarié des 10 et 11 sept. 1847,
les époux Meurisse ont cédé, à titre d'échange,
aux époux Piat, une maison nouvellement con-
struite, située à Paris rue d'Isly, 5. Ils ont
reçu en contre-échange trois terrains situés à
Belleville, contenant ensemble 6,600 mètres.
Les parties ont déclaré dans l'acte, pour la
perception des droits d'enregistrement, que la
maison rue d'lsly, dans son état actuel, n'était
pas susceptible d'un produit de plus de 12,000
fr.; mais qu'après l'entière exécution des tra-
vaux que les sieur et dame Meurisse preuaient
l'engagement de faire, elle pourrait produire
un revenu brut de 15,000 fr.; qu'alors la va-
leur de cet immeuble serait de 300,000 fr.; que
les terrains cédés en contre-échange étaient
susceptibles d'un produit de 13,200 fr., et que
leur valeur était de 264,000 fr.- Une soulte de

(1)V. Rép. gén.Journ. Pal.,vo Enregistrement, no 584.
(2) V. Rép. gen. Journ Pal., vo Enregistrement, no

592.

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36,000 fr. a donc été stipulée au profit des
époux Meurisse, et les droits dus pour l'échange
parties, chacune pour moitié. Ces droits ont
et pour la soulte ont été mis à la charge des
été perçus conformément à ces dispositions et
évaluations.

Plus tard, l'administration de l'enregistre-
ment a pensé que les estimations faites par les
parties n'étaient pas exactes, et que le revenu
des terrains situés à Belleville avait été exagé-
ré afin d'atténuer la perception du droit de
entre le revenu des deux immeubles échangés.
soulte exigible à raison de la différence existant
En conséquence elle a fait signifier aux époux
Piat et Meurisse une requête à fin d'expertise;
et, sur leur refus, a obtenu, le 15 nov. 1848,
un jugement du tribunal de la Seine ordonnant
qu'il y serait procédé par le sieur Deschamps,
choisi par
l'administration,
architecte à Paris,
et par le sieur Saussay, également architecte à
Paris, dans l'intérêt des sieurs Piat et Meu-
risse.

Mais, ces experts n'étant pas tombés d'accord
dans leurs évaluations, non plus que pour la
nomination d'un tiers expert, le directeur de
l'enregistrement a présenté à M. le juge de paix
du premier arrondissement de Paris, dans le
ressort duquel est située la maison de la rue
tiers expert
Par une ordonnance du 8 avril
d'lsly, une requête tendant à nomination d'un
1850, ce magistrat a commis le sieur Barto-
mieux, architecte à Paris.

Cependant les époux Piat ont prétendu que cette ordonnance, qui leur avait été signifiée le 11 avril, devait être annulée en ce que, le procèsverbal des experts n'ayant pas été dressé dans le mois à partir de la remise du jugement de nomination, leur mission se trouvait éteinte, et Subsidiairement, ils ont soutenu que il n'y avait plus lieu à la nomination d'un tiers expert. la même ordonnance avait été incompétemment rendue quant aux terrains situés à Belleville, son effet étant restreint à la maison de la rue d'Isly.

Le 25 juil. 1850, jugement du tribunal de la Seine ainsi conçu :

«En ce qui touche la prétendue extinction - Attendu du droit de poursuivre l'expertise: que les prescriptions, déchéances et nullités ne peuvent se suppléer, et que, pour être prononcées par les tribunaux, il faut qu'elles soient établies par un texte de loi précis et formel;Que, dans l'espèce, l'administration s'est conformée à l'art. 17 de la loi du 22 frim. an VII, en requérant l'expertise dans l'année à compter du jour du contrat; que les experts mêmes se sont conformés à l'art. 18 en acceptant leur été confiée dans le mois de la remise à eux faite mandat et procédant à l'opération qui leur avait du jugement qui les commettait; que seulement, entre la date de l'ouverture de leur rapport, qui est du 9 fév. 1849, et celle de sa clôture, du 23 fév. 1850, plus d'une année s'est écoulée et accuse une négligence en opposition manifeste avec l'esprit de la loi, qui, au point de vue des intérêts des parties, comme au point de vue des intérêts du trésor, exige une promp

te solution aux questions soulevées par les demandes d'expertise; que cette négligence, imputable autant à la partie qu'à la régie, puisque | 'une et l'autre avaient le droit de réclamer le dépôt du rapport, et même de réquérir la nomination d'un tiers-expert pour amener une conclusion qui ne pouvait être indéfiniment retardée, ne saurait avoir pour résultat d'empêcher une constatation ordonnée par justice, ni de rendre impossible un mode d'instruction duquel seul dépend le jugement définitif;

>> En ce qui touche l'incompétence présentée comme moyen subsidiaire : Attendu qu'il n'est pas possible d'admettre que les experts nommés, en exécution de l'art. 17 de la loi de frimaire an VII, à l'effet spécial, unique et restreint d'apprécier la valeur vénale d'immenbles dont la mutation s'opère, à l'époque de ladite mutation, par comparaison avec les fonds voisins, soient et doivent être chargés, en matière d'échange, d'embrasser toute l'opération, et de fixer le revenu de chaque immeuble eu égard à la valeur respective des objets échangés; qu'au contraire l'expert commis à l'évaluation de l'un et de l'autre biens donnés en échange et contre-échange doit religieusement s'abstenir de se laisser influencer par aucune considération de convenances personnelles ou de valeur respective ou relative, puisqu'il a charge de rechercher le revenu brut, et, au moyen de ce revenu reconnu, de déterminer la valeur intrinsèque et vénale de chaque propriété; qu'au tribunal il appartient de rapprocher ces évaluations isolées, et, par ce rapprochement, de reconnaître s'il y a eu exactitude ou dissimula tion, égalité ou différence dans les prix, et enfin s'il y a soulte et à quel chiffre elle doit être portée; que du texte et de l'esprit de la loi de frimaire an VII, à laquelle est loin d'avoir dérogé celle du 15 nov. 1808, laquelle ne dispose que pour le cas où une seule et même propriété formant un ensemble d'exploitation s'étendrait sur différents cantons, mais n'est nullement applicable au cas où il s'agit de plusieurs propriétés distinctes et séparées, il résulte clairement que le législateur a voulu que l'évaluation fût confiée aux experts les mieux en position de connaître et d'apprécier, par comparaison avec les fonds voisins; que c'est nécessairement dans cette vue qu'il a voulu que le choix du tiers expert, lorsqu'il y a partage, fût déféré, non plus au tribunal ayant ordonné l'expertise, mais au juge de paix de la situation de l'immeuble; qu'en présence d'une disposition aussi formelle, tout autre juge de paix que celui de la situation, lorsqu'il n'y a pas lieu à l'exception prévue par la loi de 1808, est essentiellement incompétent, même en matière d'échange, puisqu'il est établi qu'aucune connexité n'existe entre les deux chefs de mission cumulativement confiés aux premiers experts; que c'est en quelque sorte par erreur et par suite du principe faux de la corrélation et de la relation des prix entre les deux termes de l'échange que l'admininistration, qui n'entendait nullement critiquer la valeur assignée à la maison concé dée par les époux Meurisse, a néanmoins con

clu à l'expertise de cette maison, dont le prix n'était pas contesté, parce qu'elle voulait expertiser les terrains donnés par les époux Piat en contre-échange; que sur les terrains seuls, en effet, les experts ont été sérieusement divisés, l'un les considérant comme terrains de spéculation propres à bâtir, et l'autre n'y voyant que des jardins ou des terres de culture; que cette division et ce désaccoad ont nécessité la nomination d'un tiers arbitre, qui doit être pris sar les lieux et êt être choisi par le juge de paix de la localité; que pour faire un pareil choix le juge de paix du premier arrondissement de Paris était incompétent, et que dès lors l'ordonnance qu'il a rendue doit être déclarée nulle;

>> Par ces motifs, le tribnal déclare nulle et de nul effet comme incompétemment rendue l'ordonnance obtenue le 8 août dernier par M. le juge de patx du premier arrondissement, etc. »

Pourvoi en cassation par l'administration de l'enregistrement pour excès de pouvoir et violation des art 17, 18 et 19 de la loi du 22 frim. an VII, ainsi que de la loi du 15 nov. 1808 et de l'art. 1351 C. civ.

Du 15 NOVEMBRE 1852, arrêt C. cass., ch. civ., MM. Béranger prés, Laborie rapp., Rouand av. gén. (concl. conf., Moutard-Martin et Rigaud av.

<< LA COUR; Vu les art. 17, 18, de la loi du 22 frim. an VII, et 1 de la loi du 15 nov. 1808; - Attendu, en fait, que l'administration demanderesse, contestant l'exactitude des évaluations énoncées au contrat des 10 et 11 sept. 1847, a requis une expertise à l'effet de déterminer ces évaluations; que, par jugement du 15 nov. 1848, exécuté par les parties, le tribunal civil de la Seine a ordonné que l'expertise serait faite par deux experts et porterait sur les biens immeubles objet du contrat d'échange; que, d'après les qualités mêmes du jugement dénoncé, les experts n'ont pu se mettre d'accord pour l'estimation, soit de la maison, soit des terrains, objet du contrat d'échange, ni pour la désignation d'un tiers expert; -- Attendu, en droit, que, lorsqu'en matière d'échange d'immeubles, il y a lieu à expertise pour réconnaître la valeur respective des immeubles échangés, et déterminer, en cas de différence, l'importance de la plus-value qui, à titre de soulte, devra être passible du droit proportionnel fixé pour ventes d'immeubles par les art. 69, § 5, n 3, de la loi du 22 frim. an VII, 52 de la loi du 28 avril 1816 et 2 de la loi du 16 juin 1824, l'opération doit nécessairement porter sur chacun des immeubles dont l'évaluation contestée a été requise et ordonnée; — Que, si elle a été confiée à deux experts seulement, elle doit, en cas de partage, être attribuée à un seul tiers expert, avec mission de vérifier et de fixer les évaluations sur lesquelles les deux experts ont été en dissentiment; Que, si les immeubles échangés sont situés dans deux cantons différents, le juge de paix de la situation de l'immeuble qui présente le plus grand revenu, d'après la matrice du rôle, a compétence pour pourvoir a la désignation d'un tiers expert,

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faute par les deux experts d'avoir pu en convenir; D'où il suit qu'en déclarant nulle et de nul effet comme incompétemment rendue l'ordonnance du 8 avril 1850 du juge de paix du premier arrondissement de Paris, où se trouve situé l'un des immeubles échangés, sans constater que cet immeuble présentât un revenu inférieur, d'après la matrice du rôle, à celui des terrains donnés en contre-échange, et situés dans le canton de Belleville, le jugement démoncé a violé les dispositions ci-dessus visées; CASSE. D

CASSATION (29 novembre 1852). ARRET, MOTIFS IMPLICITES, COMPENSATION, BÉRITIERS, CRÉANCES PERSONNELLES, DETTES DE LA SUCCESSION, INTÉRÊTS, VEnte de

FONDS DE COMMERCE, PRIX, BILLETS.

L'arrêt qui, dans une instance en liquidation de succession, énonce formellement que la créance d'un héritier contre son cohéritier est exclusivement personnelle et étrangère à la succession, motive suffisamment le rejet des conclusions par lesquelles cet héritier demandait que les sommes à lui dues par son cohéritier fussent imputées sur celles dont il pouvait être lui-même débiteur envers la succession (1). L. 20 avril 1810, art. 7.

Les créances qu'un des héritiers a personnelle ment contre son cohéritier et qui sont étrangères à la succession ne peuvent pas, lors de la liquidation de cette succession, se compenser avec les sommes dont il est lui-même dé biteur envers elle (2), C. Nap. 1269 et 1290. Bien que l'acceptation, par le vendeur d'un fonds de commerce, en paiement du prix stipule, de billets souscrits par l'acheteur, n'emporte pas novation de la créance, néanmoins, si les billets n'ont pas été stipulés productifs d'intérêts,

(1) V. Cass. 23 mai 1852 (t. 2 1852, p. 175), et le renvoi ; Rep. gen. Journ. Pal., vo Jugement (mat. 9.), nos 1105 et suiv. (2) Jusqu'a sa liquidation une succession continue d'être une personne morale distincte de la personne de chaque héritier. Il en est à cet égard comme en matièro de société. Or les créances d'une société ne peuvent être compensées avec les dettes de chaque associé, lorsque ces dettes n'ont point été contractées par eux pour le compte de la société, mais pour leur compte particulier, et vice versa Toullier, Dr. civ., t. 7, n° 378; Delvincourt, Cours de C. civ., édit. 1819, t. 2, p. 789, notes, p. 168, no 4 in fine; Duranton, Cours de dr. fr., t. 12, no 432. Ce dernier auteur, toutefois, fait plusieurs distinctions. Que si l'on objecte que, par le fait du décès de l'auteur commun, chacun des héritiers a été immédiatement saisi de sa part virile, ce qui exclut l'existence d'une personne morale, et rendrait dès lors la compensation admissible, on répondrait que la compensation ne saurait non plus avoir lieu par défaut de liquidité des deux dettes. En effet, si la dette du cohéritier vis-à-vis de son cohéritier, et de son chef, est liquide, celle du second vis-a-vis du premier, et du chef de la succession, ne l'est pas. Ce n'est que par le résultat de la liquidation qu'elle le deviendra, ce n'est donc qu'à partir de ce moment que la compensation pourra être opposée. Jugé toutefois que, lorsque, sur la licitation de biens indivis entre cohéritiers, l'un d'eux,

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́il a pu être décidé sans qu'il en résulte aucune violation de loi que les intérêts n'ont pas couru de plein droit, et ne pouvaient courir que du jour de la demande (3). C. Nap. 1153 et 1682.

VEUVE DELQUIÉ C. HÉRITIERS HENAULT.

Le 11 juin 1825, le sieur Auguste Hénault père, libraire à Toulouse, est décédé laissant pour héritiers ses deux enfants, la dame Adélaïde Hénault, veuve Delquié, et Auguste, Hénault fils, représenté aujourd'hui par ses enfants.-II pa rait que le sieur Hénault père avait l'habitude de se charger des différentes sommes dont sa fille avait la disposition; il les plaçait comme il l'entendait, et les remboursait à sa fille lorsqu'il en avait opéré le recouvrement.-A son décès, le compte ouvert entre lui et la dame veuve Delquié se soldait par un excédant de 2,000 fr. en faveur de cette dernière.

Peu de temps après le décès d Пléault père, et par un acte sous seings privés cu 7 juil. 1825, la dame Delquié vendit à son frère sa part dans le fonds de commerce de son père. Cette vente fut faite moyennant la somme de 20,000 fr., pour une partie de laquelle l'acquéreur souscrivit des billeis où il ne fut fait aucune stipulation d'intérêts. — Plus tard il lui souscrivit encore d'autres billets pour une somme de 8100 fr. qu'elle lui avait prêtée. D'un autre côté, la dame Delquié se trouvait débitrice envers la succession de différentes sommes assez importantes, notainment d'une somme de 40.000 fr. qu'elle avait reçue en dot et dont elle devait le rapport.

Pondant longues années, les deax cohéritiers restèrent dans l'indivision, et ce ne fut qu'en 1848 qu'un partage fut proposé entre la veuve Delquié et les représentants de son frère, décédé.

-Un jugement du tribunal de Toulouse renvoya les parties devant un notaire commis. -Celui-ci

qui était créancier de son cohéritier avec inscription hypothécaire sur la part indivise de celui-ci, se rend adjudicataire des biens indivis, il s'opère de plein droit, jusqu'à due concurrence, entre la créance et le prix de l'adjudication, une compensation qui peut être opposée même au tiers qui, avant l'adjudication, avait acquis la part de ce cohéritier : Bordeaux, 12 mai 1827.-V. Rép. gen. Journ. Pal., vo Compensation, no 242.

(3) Il est généralement reconnu que le vendeur d'un immeuble ou d'objets mobiliers qui reçoit des billets en paiement du prix de vente ne fait pas par cela seul novation de sa créance, et qu'il conserve toujours les actions qui compètent au vendeur, alors surtout que la remise des billets n'a lieu que comme mode d'exécution plus avantageux pour le vendeur. V. Rep. gen. Journ. Pal, vo Novation, nos 69 et

suiv. Adde Caen, 3 janv. 1849 (t. 2 1830, p. 113), et le renvoi; Marcadé, Cours de dr. civ., sur l'art. 1273, no 2; Championnière et Rigaud, Tr. des dr. d'enreg., t. 2, no 4011. - - V. aussi les arrêts cités dans la discussion qui accompagne l'arrêt que nous rapportons.- Quant au point de savoir si le prix de vente d'un fonds de commerce est de plein droit productif d'intérêts, V. affirm., Massé, Dr. commun, t. 4, n. 262. V. aussi Pardessus, t. 2, n. 289; Delamarre et Lepoitvin, Tr. du contr. de commiss., t. 3, p. 670.

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dressa un projet de liquidation et de partage des deux successions. En ce qui concernait la succession de l'auteur commun, le projet faisait partir du jour de l'ouverture de la succession les intérêts des sommes que la dame veuve Delquié était tenue de rapporter, tandis qu'il ne faisait produire aucun intérêt aux sommes réclamées par cette dernière. La dame Delquié contesta, et, les parties ayant été renvoyées devant le tribunal, elle demanda, entre autres choses, l'annulation du traité de vente du 7 juil. 1825, le rapport par son frère ou ses ayantcause de 69,000 fr. pour représentation de la valeur du fonds de commerce, avec les intérêts depuis l'ouverture de la succession; l'inscription, savoir, à cette succession, des 2,000 fr. à elle dus par son père, et à celle de son frère, d'abord de la somme de 8100, puis de celle de 20,000 fr. pour le cas où le traité serait maintenu, le tout avec les intérêts à partir du jour de l'ouverture de chaque succession ou de la date de ses créances.

si les intimés reconnaissent que l'exception admise par les premiers juges ne s'applique point à une somme de 2,000 fr., puisqu'elle provient d'une obligation personnelle à leur aïeul, il n'en saurait être de même des autres, qui toutes é manent de leur auteur; celles-ci seules doivent être l'objet des délibérations de la Cour; — Attendu, à cet égard, que, s'il est constant, d'un côté, que la plus forte partie de ces créances provient de la vente qu'en 1825 l'appelante fit à son frère d'une partie des biens héréditaires, le fonds de la librairie, il est également certain que les billets à l'aide desquels le paiement s'est opéré en partie ne portent point stipulation d'intérêts; mais, aux termes du droit, les intérêts ne courant point de plein droit à l'égard des ventes mobilières, cette seule considération suffit pour justifier la décision des premiers juges; peu importe en effet que, d'un côté, l'appelante allègue que cette vente lui fut surprise, et que, dès lors, elle ne saurait être liée par la stipulation de l'écrit qui la constate; puisque, indépendamment de ce que la proposition d'un pareil système exclurait à son protit la qualité de créancière, cette allégation, loin d'être justifiée, est démentie par les faits de la cause; et que, de l'autre, sa créance, représentant des biens héréditaires, doit participer au priDel-vilége de ceux-ci, qui est d'obliger respectivement les cohéritiers au paiement des intérêts de toutes les sommes dont ils sont débiteurs, comme ils ont le droit de répéter ceux de celles dont ils sont créanciers, puisque, dès que, par la vente faite par un cohéritier à son cohéritier d'un immeuble héréditaire durant l'instance en partage, il est constant que cet immeuble devient étranger à la succession, l'acquéreur n'en doit le prix qu'au cohéritier qui le lui a transmis; l'appelante est donc

Le 7 mars 1849, jugement du tribunal de Toulouse qui déclare non recevable et mal fondée la demande en rescision ou en annulation, ordonne que les 2,000 fr. seront portés à la succession du père, les 20,000 fr. et les 8100 fr. au passif de celle du frère, refuse les intérêts de ces différentes sommes à la dame veuve quié, si ce n'est à partir du jour de la demande qu'elle en avait faite devant le notaire, enfin démet les parties du surplus de leurs conclusions, tant principales que subsidiaires.

Appel par la veuve Delquié.

Le 25 août 1849, arrêt par défaut de la Cour de Toulouse, qui confirme le jugement.

La dame Delquié forme opposition à cet arrêt, et', après avoir rappelé ses conclusions princi pales, demande subsidiairement que, dans le cas où la vente par elle faite à son frère serait main-mal fondée dans sa demande; Par ces motifs tenue, il soit déclaré que la somme de 20,000 fr. qui en forme le prix produira des intérêts à partir du jour du traité, si mieux n'aime la Cour ordonner que le montant de cette somme, comme de celle de 8,100 fr., sera imputé temps par temps sur les sommes dont la dame Delquié sera reconnue débitrice envers la succession et productives d'intérêts.

Le 4 janv. 1850, arrêt de la Cour de Toulouse, qui maintient son arrêt du 25 août 1849. On y lit, entre autres motifs, les suivants :

« ...

Attendu que, sur tous les autres griefs proposés par l'appelante et relatifs à ses répétitions contre les intimés, les motifs des premiers juges justifient suffisamment leurs diverses décisions; d'où suit aussi qu'il y a lieu à en prononçer le maintien; Attendu si les inque, timés ont reconnu que, quelque anciennes que soient, d'après les titres qui les constituent, les créances de l'appelante contre leur auteur, et si, dès lors, ils sont tenus de leur paiement, il n'en faut pas moins rechercher si c'est par une exacte appréciation des principes du droit que les premiers juges ont déclaré qu'elles n'étaient productives d'intérêts qu'à partir du jour de la demande, puisque l'appelante querelle leur décision sous ce dernier rapport; Attendu que,

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et ceux des premiers juges à l'égard des chefs sur lesquels ne portent pas d'une manière explicite les développements ci-dessus, la Cour reçoit, dans la forme, l'opposition de la partie de Boutan envers son précédent arrêt du 25 août dernier; mais, sans s'y arrêter au fond, l'en a démis et démet; quoi faisant, ordonne de plus fort l'exécution du jugement attaqué. »

Pourvoi par la dame veuve Delquié.

1o Violation de l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810, en ce que l'arrêt attaqué a, sans donner aucuns motifs, rejeté les conclusions subsidiaires prises pour la première fois en appel par la demanderesse.

2o Violation des art. 1289, 1290 et 1256 C. Nap. La dame Delquié demandait que, si on ne lui accordait pas les intérêts des sommes à elle dues, on prononçât du moins qu'il y avait eu compensation entre ses dettes et ses créances. Or elle était fondée dans une pareille demande. En effet son frère était son seul cohéritier; toutes les sommes dont elle pouvait être débitrice envers la succession étaient donc pour moitié des créances personnelles de son frère contre elle. D'un autre côté, les dettes et les créances d'une hérédité se divisent de plein droit entre les héritiers, suivant leur part hé

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