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térêts remis, sans distinction de ceux légitimes avec ceux qui ne le sont pas ;

-

» Sur les intérêts que la maison Mallet pouvait percevoir sur les prêts dont s'agit, et d'abord sur la quotité des intérêts: Attendu que les intérêts en matière commerciale ne peuvent excéder 6 p. 100 par an (art. 1er de la loi du 3 sept. 1807); En fait, et sauf l'examen de la question des droits accessoires pouvant former des suppléments d'intérêts, la maison Mallet s'est conformée aux dispositions de la loi dans les intérêts ostensiblements stipulés; » Sur le mode de perception des intérêts: Attendu que les comptes courants sont d'une nature spéciale, distincte de celle des autres comptes; qu'ils ont aussi des règles particulières qui les régissent; que ce mode de comptes est reconnu et consacré par la jurisprudence;-Attendu que les parties reconnais sent toutes qu'elles ont adopté le compte courant; que de plus elles ont stipulé que les intérêts scraient supportés respectivement à raison de six pour cent par an; que le reliquat du compte arrêté serait reporté au compte suivant et serait lui-même productif d'intérêts comme constituant une avance nouvelle; - Attendu que ces diverses stipulations sont conformes à la nature du compte dont il s'agit et autorisées par la jurisprudence, et n'ont rien d'excessif pour l'emprunteur; Qu'ainsi les comptes sont réguliers sur les points ci-dessus; Attendu toutefois que le terme de trois mois, et quelquefois plus court encore pour le règlement des comptes, a pour objet de capitaliser les intérêts à des époques rapprochées, charge qui peut devenir accablante pour l'emprunteur; que le terme de six mois, généralement adopté, concilie tous les droits et tous les intérêts; En fait, attendu néanmoins que quelques uns des comptes des quatre débiteurs dont il s'agit ont été arrêtés à moins de trois mois, et la plupart à peine à trois mois seulement de durée; Qu'en plus de la capitalisation à trois mois, dont il a été parlé ci-dessus, la maison Mallet en a consacré une deuxième qui avait pour effet de faire produire des intérêts jour par jour dans la même période de temps adoptée pour le règlement des comptes; qu'elle ne comptait l'année qu'à raison de trois cent soixante jours, au lieu de trois cent soixante-cinq; que, dans tous les paiements faits par elle, elle s'attribuait deux jours d'intérêts supplémentaires à titre de bonification de caisse; que le même bénéfice était perçu sur les sommes versées par des tiers, et quelquefois même sur les remises et effets de commerce; Qu'ainsi il est arrivé quelquefois que, dans la vue de s'attribuer quelques intérêts de plus, la maison Mallet reportait l'époque de certains versements par ses débiteurs à six, dix et treize jours après le jour même des versements; qu'ainsi, le 11 fév. 1847, elle a reçu, pour Florent Corroyer, 120,000 fr., qu'elle porte valeur du 20 février, soit neuf jours après le versement effectif, ou 180 fr. d'intérêts perçus en trop; - Qu'il en est de même de la retenue faite à titre de passe de sacs; - Que ces diverses perceptions sont abusives;

» Sur les commissions perçues par la maison Mallet: Et d'abord, sur le point de savoir si des commissions étaient dues :- Attendu que les banquiers réunissent une double qualité, celle de prêteurs d'argent et celle de mandataires salariés de l'emprunteur; - Que, sur le premier point, bailleurs de fonds, ils sont soumis, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, à ne point dépasser les limites de la loi de 1807; - Que, mandataires salariés pour mettre à fin l'affaire dont ils sont chargés, ils ont droit a une indemnité pour leurs peines, soins et démarches, de la même manière qu'un tiers qui aurait été chargé de ce soin y aurait eu droit lui-même ;-Que ladite commission représente aussi un ducroire pour les risques des avances du banquier; — Et aussi les frais d'établissement de tenue de maison que nécessite le genre de commerce du banquier; - Que la jurisprudence, aujourd'hui bien fixée, consacre cette allocation;

» Sur l'importance du droit de commission : - Attendu que les motifs ci-dessus développés font connaître que la commission est variable de sa nature, et doit être proportionnée aux difficultés aplanies, aux circonstances plus ou moins critiques dans lesquelles on s'est trouvé; qu'elle doit être, en un mot, la juste rémunération de l'exécution du mandat; - Attendu que les motifs ci-dessus déduits font suffisamment connaître que la commission ne doit s'appliquer qu'aux capitaux réellement versés par le banquier, et non aux intérêts et aux reliquats reportés d'un compte à un autre; ils ne forment pas des avances; il n'y a pas lieu à rémunération; que la jurisprudence et la doctrine ne laissent aucun doute à cet égard; - Attendu que les commissions supplémentaires perçues à titre de primes dans le cours des opérations sont évidemment des moyens de percevoir des droits qui ne sont justifiés par aucun service, et qui sont repoussés par toutes les Cours comme formant des perceptions illicites; - En fait, attendu que la commission a été portée, dans certains des comptes dont il s'agit, à 1 pour 100 pour trois mois et même pour un temps plus court, et dans certains comptes à un demi pour cent seulement; - Que des commissions ont été perçues sur toutes les sommes que certains débiteurs, comme Corroyer et AnssartManem, touchaient directement de l'administra tion, qui n'entraient pas dans la caisse de la maison Mallet, qui étaient portés sur les comptes des débiteurs au crédit et au débit le même jour, afin de grossir d'autant le chiffre sur le quel la commission était prise, sans pourtant augmenter la dette (suit le détail d'autres faits de même nature);

» Que des sommes appartenant par leurs da tes à certains comptes étaient portées dans d'autres comptes afin de leur faire supporter une double commission; - Que la commission était prélevée sur les intérêts et le montant de la commission elle-même, et que parfois aussi la commission était prise sur un chiffre plus élevé que celui du montant général du compte;; Attendu qu'on ne saurait invoquer utilement les

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usages du commerce; que des usages de cette nature sont abusifs; qu'ils ont pour effet de provoquer en peu de temps la ruine complète des négociants et marchands qui ont recours au crédit; qu'ils sont contraires aux loyales habitudes du commerce et en opposition flagrante avec un texte de loi clair, précis, d'ordre public, qui n'admet ni distinctions ni subterfuges à l'aide desquels on puisse faire indirectement ce qu'il défend en termes formels ;

>>... Condamne solidairement et par corps les sieurs Mallet père et Noblesse à 24,000 fr. d'amende, etc. »>

Appel par Mallet et autres.

Le 10 janv. 1852, arrêt infirmatif de la Cour d'Amiens, fondé notamment sur les motifs sui

vants :

-

« La Cour;- En ce qui touche l'établissement des comptes-Attendu que si les comptes ont été arrêtés et fournis tous les trois mois, c'est que telle avait été la convention des parties, conforme en cela à l'usage des principales places de commerce;-Attendu qu'en établissant le calcul des intérêts à partir de la première époque, la maison Mallet n'a fait que se conformer à l'usage géné ral, et notamment à l'usage d'Amiens; Qu'au surplus ce mode d'opérer était réciproque; Qu'elle s'est encore conformée à l'usage en capitalisant les intérêts trimestriels pour faire, de la balance des comptes, augmentée de ces intérêts, le premier article du compte suivant;-Attendu qu'il est de règle dans les maisons de banque les plus accréditées de calculer les intérêts sur le nombre des jours et de réduire l'année à 360 jours; Qu'en présence d'usages si générale ment établis, et quoique le mode de calcul des intérêts sur une année incomplète conduise à l'élévation du taux de l'intérêt de l'argent au profit du banquier, il est certain qu'en cela la maison Mallet n'a fait que suivre les errements du Attendu qu'il en est ainsi de la retenue dite passe de sacs; que cette retenue, admise même dans les caisses publiques, est d'ailleurs autorisée par un décret; — Qu'il est vrai que le sac n'est généralement compté qu'à raison de 15 centimes, et que la retenue opérée par la maison Mallet est de 25 centimes pour 1,000 fr.; mais que ce taux est celui de la place d'Amiens et qu'il est réciproquement admis entre banquiers et négociants;

commerce;

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formant aux habitudes du commerce, n'ont pas eu l'intention coupable qui seule pourrait donner aux faits le caractère de délit; - Attendu qu'il est arrivé quelquefois que la maison Mallet n'a bonifié les crédités de l'intérêt des sommes par eux versées que plusieurs jours après la date de l'encaissement; Mais attendu que la maison Mallet subissait de son côté cette perte d'intérêt soit pour les sommes par elle versées à la recette générale, soit de la part de Pavie Blondel, chargé par elle d'encaisser à Paris les mandats délivrés à Corroyer;

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>> Sur les commissions: Attendu que la convention par laquelle le banquier se réserve un droit de commission indépendamment des intérêts légaux est une stipulation licite consacrée par l'usage général du commerce et la jurisprudence; Que cependant, et quoique la commission ne puisse être confondue avec l'intérêt de l'argent, elle peut, comme le prêt ordinaire, être discutée au point de vue de l'usure; Attendu que les premiers juges ont considéré comme usuraires les commissions perçues sur des sommes touchées directement par Corroyer de l'administration; - Mais attendu que Corroyer, avait donné pouvoir à Mallet de toucher seul le mandat; Que de son côté Mallet avait traité avec Pavie Blondel et s'était obligé par écrit envers ce banquier à lui laisser encaisser la totalité des mandats, se soumettant à lui payer 118 de commission sur ceux des mandats qui seraient délivrés sans sa participation; · Attendu que cette clause pénale ayant été encourue par Mallet l'aîné, pour des mandats touchés par Corroyer au mépris de la convention, il était juste qu'il débitât le compte de celui-ci du montant de l'indemnité qu'il se croyait en droit de réclamer, sauf la faculté pour Corroyer d'en contester le chiffre;

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>>... Sur les primes: - Attendu qu'elles ont été stipulées par la maison Mallet pour lui tenir lieu de la commission à laquelle elle avait droit non seulement à raison des crédits considérables par elle ouverts à Corroyer, mais encore pour le concours promis aux opérations de l'entreprise; - Qu'en effet, la commission d'un demi pour cent ostensiblement stipulée aurait été insuffisante soit pour l'indemniser de ses démarches, soit pour la couvrir des commissions qu'elle payait elle-même aux banquiers par l'intermédiaire desquels elle faisait ses cncaissements; que le tribunal a reconnu cette re-insuffisance en élevant cette commission à un pour cent; Attendu que le concours de la maison Mallet n'a jamais fait défaut à Corroyer, même à l'époque de la crise commerciale de 1847 et de celle plus désastreuse encore de 1848;

>> En ce qui touche les deux jours d'intérêt que la maison Mallet a fait perdre aux crédités pour bonification de caisse: Attendu que cette tenue est universellement adoptée dans la limite de un à deux jours d'intérêts; - Que deux jours sont comptés à Amiens, sur les capitaux versés; Que si, dans les comptes si nombreux de la maison Mallet avec les crédités, cette perception a été appliquée quelquefois à des remises d'effets, cette erreur ne pourrait donner lieu qu'à de simples redressements; Considérant que si chacun de ces droits accessoires pris isolé ment a peu d'importance, leur réunion, quoique autorisée par l'usage de la Banque, a pour effet d'élever le prix de l'argent au grand préjudice de l'emprunteur; -Que c'est la sans doute un abus grave; mais que les prévenus, en se con

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--

Que même l'intervention de Mallet aîné dans les opérations de l'entreprise a été si active qu'un jugement du tribunal de commerce de Meaux, réformé depuis en appel, l'avait déclaré associé gérant; Attendu que la prime de 87,000 fr., réduite en réalité à 84,000 fr., par suite de la déduction de 3,000 fr. payés par Mallet à Duparc, notaire, en l'acquit de Corroyer, pour frais d'actes hypothécaires à sa charge, représente un prélèvement de deux pour

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« LA COUR; Vu les art. 1, 3 et 4 de la loi du 3 sept. 1807, et l'art. 65 C. pén.; - Attendu que, d'après les dispositions ci-dessus visées de la loi du 3 sept. 1807, toutes les stipulations par lesquelles on excède le taux de l'intérêt légal pour prêt d'argent sont des stipulations usuraires, dont la multiplicité constitue le délit d'habitude d'usure;-Attendu que les dispositions de la loi du 3 sept. 1807 sont d'ordre public, et qu'elles s'appliquent aux stipulations ou perceptions pour prêts ou avances par comptes courants, en exécution de crédits ouverts, comme dans l'espèce, par des banquiers à des commerçants; Attendu que les usages qui se seraient établis sur certaines places de commerce, en contravention à ces dispositions, ne sauraient prévaloir contre une loi d'ordre public, changer le caractère des infractions et faire cesser la présomption légale de dol et de fraude dont elles sont frappées ;

cent sur la somme de quatre millions deux cent mille francs, montant de l'adjudication des travaux; Que ces travaux n'ayant pas dépassé le chiffre de deux millions cent mille francs, la maison Mallet n'a produit à la liquidation Corroyer que pour la moitié de sa créance résultant des primes, et qu'elle n'a tiré aucun profit de l'excédant; Attendu que cette commission de deux pour cent est à peu près celle que, dans un jugement récent, le tribunal de commerce de Meaux a allouée à la maison Mallet pour des paiements et avances; Attendu toutefois que nonobstant les soins et démarches de Mallet l'aîné dans l'intérêt de Corroyer et compagnie, et quelque douteuse qu'ait été la solvabilité de l'emprunteur, cette prime de 84,000 fr. est un avantage excessif qui pourrait être considéré comme renfermant un intérêt usuraire;-Mais, attendu que cette prime, réduite à moitié par suite de l'interruption des travaux, a pris sa source dans un engagement unique et qui, n'ayant pas été renouvelé, ne constituerait pas l'habitude, qui est le caractère essentiel du délit d'usure;

>> Attendu, en fait, qu'il a été reconnu par l'arrêt attaqué que, dans les comptes trimestriels de la maison Mallet, le mode de calcul des intérêts sur une année incomplète, réduite à 360 jours, avait pour résultat l'élévation de l'intérêt de l'argent au profit du banquier;

>>... Sur la manière dont les commissions étaient perçues dans les comptes fournis par la maison Mallet:—Attendu qu'il résulte de l'exa- >> Qu'il a été également reconnu par l'arrêt atmen des comptes que le droit de commission a taqué que la retenue pour passe de sac, qui été par elle prélevé, non seulement sur les ca- n'est permise que sur le pied de 15 cent. par sac pitaux prêtés, mais encore sur les intérêts, le réellement fourni, d'après les dispositions formontant de la commission elle-même et enfin welles du décret du 1er juil. 1809, avait été opésur le report du compte précédent; - Que cet-rée par la maison Mallet sur le pied de 25 cent. te perception a été injuste et abusive; - Qu'el- par 1,000 fr., et que ces perceptions de droits le l'a été d'autant plus que la commission sti- accessoires avaient pour effet d'élever le prix de pulée sous le nom de prime était plus élevée; l'argent au préjudice de l'emprunteur; - At Attendu toutefois que le doute à pu exister tendu que ces perceptions faites sans cause et sur la légalité d'une perception semblable; en contravention aux prohibitions légales étaient Que, bien que condamnée par la jurisprudence, usuraires; - Que, néanmoins, elles ont été conle caractère en est chaque jour débattu devant sidérées par l'arrêt attaqué comme exemptes de les tribunaux, ce qui prouverait le dissentiment tout caractère délictueux à raison de leur conqui existe encore sur ce point; -Que la Cour formité à de prétendues habitudes du commerce; de cassation elle-même, en rejetant, le 12 mars A l'égard des primes: Attendu qu'il a été 1851 (Journ. Pal., t. 2 1851, p. 388), un pour- reconnu par l'arrêt attaqué qu'une prime de voi contre un arrêt de la Cour de Dijon, a re- 84,000 fr. avait été obtenue par la maison Malconnu que dans les circonstances de l'affaire let de Corroyer en sus de la commission ostenqui lui était soumise les reports d'un compte siblement stipulée, et qu'elle représentait un sur un autre avaient pu donner lieu à un droit prélèvement de 2 fr. pour 100 fr. sur la somme de de commission au profit des banquiers crédi- 4,200,000 fr. montant de l'adjudication des trateurs; Que ces considérations, impuissan-vaux à faire par cet entrepreneur; - Attendu tes, sans doute, pour faire maintenir la perception s'il s'agissait de l'apprécier en droit et au point de vue d'un retranchement demandé, suffisent pour faire naître le doute sur l'intention frauduleuse de la maison Mallet et pour écarter dès lors la prévention du délit d'usure; -Attendu enfin que l'intention frauduleuse doit être d'autant moins présumée que les comptes taient ostensiblement établis dans les registres, sur les comptes adressés aux crédités, et que ce n'est pas ainsi que, généralement, se produit l'usure; Par ces motifs, infirme. »

que cette prime fixée d'avance à un chiffre inva riable, sans rapport et sans proportion avec le crédit de 400,000 fr. ouvert par la maison Mallet, ne saurait être confondue avec le droit de commission qui a le caractère d'une indemnité ou rémunération, et qui se base et se mesure sur les prestations de fonds ou autres services de é-même nature rendus par le banquier; - Que ladite prime ne saurait être justifiée, sous le rap❤ port de sa cause, par l'allégation vague des ser vices d'une autre nature, tels que la promesse qui aurait été faite par Mallet d'un concours actif dans les opérations de l'entreprise Corroyer, services qui ne se rattachaient point à l'exercice de la profession de banquier, mais qui rentreraient dans les droits ou dans les devoirs inhérents à la qualité d'associé et même d'associé gé rant que les défendeurs ont repoussée en justice

Pourvoi en cassation pour violation des art. 3 et 4 de la loi du 3 sept. 1807 et 65 C. pén.

Du 14 MAI 1852, arrêt C. cass., ch. crim.,. MM. Laplagne-Barris prés., Quénault rapp., Raynal av. gén. ( concl. conf.), Delaborde av.

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et qui a été jugée ne pas leur appartenir;
Que la prime de 84,000 fr. exigée d'avance en
sus de la commission qui était calculée sur des
bases différentes constituait donc une exaction
usuraire; Que la cour d'Amiens a elle-même
reconnu, dans l'arrêt attaqué, que cette prime
était un avantage excessif, susceptible d'être con-
sidéré comme renfermant un intérêt usuraire,
et qui n'échapperait à l'application de la loi pé-
nale que par le motif que cet avantage aurait
pris sa source dans un engagement unique et
par cela même exclusif de l'habitude qui est la
condition essentielle de l'existence du délit d'u-
Mais attendu que cet engagement ne
sure;
consistait que dans une ouverture de crédit ou
promesse de prêter; que des prêts nombreux ont
été postérieurement réalisés entre les parties et
ont donné lieu aux perceptions usuraires; que
de la multiplicité de ces prêts et de ces percep-
tions résulte l'habitude qui constitue le délit d'u-

sure;

--

>> Sur le mode de perception des intérêts, des commissions et de la prime: Attendu qu'il résulte du jugement de première instance, qui n'a point été démenti sur ce point par l'arrêt attaqué, qu'en plus de la capitalisation à trois mois la maison Mallet en a consacré une seconde qui avait pour effet de faire produire des intérêts jour par jour dans la même période de temps adoptée pour le règlement des comptes; Attendu qu'il est, en outre, constaté par l'arrêt attaqué que le droit de commission et la prime étaient prélevés par la maison Mallet, non seulement sur les capitaux prêtés, mais encore sur les intérêts, sur le montant de la commission elle-même et enfin sur le report du compte précédent; Attendu que l'intérêt et le droit de commission ne peuvent être perçus qu'une seule fois sur le même capital dans la période de temps adoptée pour le règlement des comptes -Que les intérêts des capitaux prêtés et les droits de commission acquis pour prestations de fonds ou autres services ne peuvent devenir la source de nouveaux droits de commission qui, n'ayant plus le caractère de rémunération d'un service, ne seraient que des perceptions usuraires; Que la capitalisation de tous les bénéfices du banquier dans des comptes réglés à des époques rapprochées et se liant les uns aux autres, a pour résultat l'élévation progressive et indéfinie de l'usure, et la subversion complète de la loi du 3 sept. 1807;

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trevenants de la responsabilité pénale attachée aux faits dont ils se sont rendus volontairement coupables; —Qu'ainsi la Cour d'appel d'Amiens, en admettant des excuses non autorisées par les lois pour justifier des faits prévus et réprimés par la loi du 3 sept. 1807, a tout à la fois violé les art. 3 et 4 de ladite loi et l'art. 65 C. pén. ; CASSE l'arrêt rendu par ladite Cour chambre des appels de police crrrectionnelle, le 10 janv. 1852; RENVOIE la cause et les parties devant la Cour de Paris, etc. »

§ II.

La Cour de Paris, ainsi saisie, a maintenu la condamnation prononcée par le tribunal correctionnel d'Amiens.

Du 28 JANVIER 1853, arrêt C. Paris, ch. corr., MM. Desparbès de Lussan prés., de Gaujal av. gén. (concl. conf.), Paillet et BenoîtChampy av.

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que

les lois et

« LA COUR; Considérant les usages du commerce spéciaux aux comptes courants n'autorisent, au profit du banquier, à l'expiration de chaque période semestrielle ou trimestrielle, que la capitalisation des intérêts échus pour ses peines et soins, et la perception d'une commission d'un demi ou d'un quart pour cent sur les capitaux fournis par lui ou par son entremise; Considérant qu'en 1845, 1846, 1847, 1848, 1849 et 1850, les frères Mallet et Noblesse, associés pour l'exploitation d'une maison de banque à Amiens, ont fait successivement et sans interruption à Corroyer et compagaie des prêts d'argent qui ont donné lieu à des comptes courants entre les parties; -- Que les comptes courants faisaient la loi entre elles, suivant les conventions, faute de réclamation dans la quinzaine de leur envoi;-Qu'ainsi les comptes produits, non contestés dans la quinzaine, reproduisent les conditions de ces prêts ;-Que, dans ces comptes, les banquiers ont capitalisé les intérêts jour par jour, et, en outre, à l'expiraration de chaque trimestre, ont perçu des bonifications de deux jours d'intérêts supplémentaires et le droit de passe de sac, à raison de 25 cent. par mille; qu'ils ont perçu, à l'expiration de chaque trimestre, une commission, tantôt de un pour cent, tantôt de demi pour cent, non seulement sur les capitaux fournis ou encaissés par eux, mais encore sur les sommes qui n'avaient été ni fournies ni encaissées par eux, et, de plus, sur les intérêts capitalisés quotidien>> Attendu que tout en reconnaissant le carac-nement et trimestriellement, et sur les commistère injuste et abusif des perceptions ainsi faites sions antérieurement perçues ; - Qu'en outre par la maison Mallet, l'arrêt attaqué y trouve de ces commissions ils en ont opéré de suppléune excuse dans le doute qui aurait pu exister mentaires, tantôt de demi, tantôt de quart, tantôt sur la légalité de ces perceptions; Mais at- d'un huitième pour cent sur quelques sommes;tendu que nul n'est censé ignorer la loi ;— At- Qu'à ces commissions ils ont ajouté une prime tendu que les perceptions usuraires faites par de 84,000 fr., prime calculée non sur les créles banquiers Mallet ne pouvaient être justi- dits ouverts et réalisés par eux, mais sur les fiées, même sous le rapport intentionnel, ni chiffres des opérations des débiteurs, et enfin une par cette ignorance prétendue des lois de leur commission trimestrielle sur lesdites primes;--profession, qui n'est pas admissible en droit, Considérant que ces capitalisations, bonificani par l'empire des usages locaux, qui, ne con- tions, droits de passe de sac, commissions et stituant que des abus et des contraventions primes, ont eu pour objet et pour effet d'élever le des prohibitions d'ordre public, ne sauraient taux de l'intérêt au dessus de l'intérêt légal, et fonder une excuse légale et affranchir les con- ont par conséquent le caractère de perceptions

à

usuraires, et constituent le délit d'habitude Le 23 août 1852, jugement du tribunal civil
d'usure; - Considérant
que les usages établis de Rouen, ainsi conçu :
sur la place d'Amiens, avant et depuis les prêts
opérés par les appelants, sont de nature à at-
ténuer la gravité des faits; mais que l'existence
de ces usages ne peut justifier ceux qui les ont
adoptés, sachant qu'ils étaient contraires à la
loi;-Considérant que les sommes prêtées s'é-
lèvent à plus de 400,000 fr.;
lations au néant; ORDONNE que le jugement
sortira son plein et entier cffet, etc. »

« Le tribunal; -Attendu que, pour apprécier la nature d'une disposition testamentaire, il faut rechercher quelle a été la volonté du disposant et ne pas s'arrêter au sens littéral des termes dont il s'est servi pour qualifier sa libéralité; que, spécialement, pour reconnaître si un MET les appel-legs est universel ou à titre universel, ce n'est pas la dénomination que lui a donnée le testateur qui doit être considérée, si, d'ailleurs, ce legs a par lui-même et par la force de la loi un caractère qui lui est propre; que, dans l'espèce, Lerond sa légataire universelle, il n'en est pas si Mortreuil a déclaré instituer la demoiselle certains biens et la toute propriété de certains moins vrai qu'il ne lui a légué que l'usufruit de autres; qu'il a donc légué à la demoiselle Lerond non l'universalité, mais une quote-part seu

ROUEN (2 mars 1853).
LEGS, TESTATEUR, QUALIFICATION, APPRÉCIA-

TION, LEGS UNIVERSEL.

Pour apprécier la nature d'une disposition tes-
tamentaire, il faut rechercher quelle a été la
volonté du disposant et ne pas s'arrêter au
sens littéral des termes dont il s'est servi pourlement de sa fortune, et n'a fait ainsi en réalité
qualifier sa libéralité (1).

Spécialement, pour reconnaître si un legs est universel ou à titre universel, il n'y a pas lieu de s'arrêter à la dénomination que lui a donnée le testateur, si d'ailleurs ce legs a par lui-même et par la force de la loi un caractère qui lui est propre (2).

Ainsi, n'est point universel, bien que qualifié tel par le testateur, le legs en usufruit de certains biens, et en toute propriété de certains autres; il n'y a là qu'un legs à titre universel (3). C. Nap. 1003, 1010.

LEROND C. HÉRITIERS MOrtreuil. Décès du sieur Mortreuil laissant un testament olographe ainsi conçu : « Je soussigné, LouisBenjamin Mortreuil, demeurant à Rouen, quai aux Merles, 12, et place Saint-Eloi, 15, caissier de la banque de France, succursale de Rouen, donne et institue pour ma légataire universelle ma cousine Catherine-Arthémise Lerond, de l'usufruit soit des actions que je posséderai à la banque de France, des rentes sur l'état ou des propriétés que je posséderai en cas de prédécès, afin qu'elle ne soit pas tracassée par aucun de mes héritiers, et lui donne en possession tous meubles et argent qui m'appartiendront, soit à mon domicile, quai aux Merles, 12, ou à tout autre domicile. Fait double à Rouen le 25 janv. 1852.»>-Un débat s'éleva entre la légataire et les héritiers collatéraux du testateur sur la nature de la disposition testamentaire. Les héritiers soutenaient que la libéralité faite au profit de la demoiselle Lerond, bien que dénommée legs universel, ne constituait qu'un legs à titre universel.

(1-2-3) V. conf. (dans ses motifs), Cass. 28 août 1827.-V. Rép. gén. Journ. Pal., vis Legs, no 121, et Testament, no 1695.-Jugé aussi que l'appréciation consistant à préciser le caractère d'une disposition dans ses rapports avec la loi qui la définit, et à régler les effets qu'elle doit produire, pouvant avoir pour résultat la violation de la loi, tombe sous la censure de la Cour de cassation; qu'il en est ainsi, spécialement, de l'interprétation d'un testament, lorsqu'il s'agit de savoir si la clause litigieuse consti

C. Nap., qu'un legs à titre universel; - Far ces
à son profit, aux termes des art. 1003 et 1010
motifs, déclare la demoiselle Lerond mal fondée
dans son action. >>
Appel.

Du 2 MARS 1853, arrêt C. Rouen,.1 ch.,
naudeau d'Arc, Vaucquier du Traversaín, av.
MM. Franck-Carré 1er prés., Deschamps, Re-
miers juges,
« LA COUR, -Adoptant les motifs des pre-
CONFIRME.>>

AMIENS (19 février 1853).
QUESTION PRéjudicielle, DROIT DE CHASSE,
SURSIS, SÉNATUS-CONSulte, force OBLI-
GATOIRE, FORÊTS NATIONALES, CHASSE,
BAUX, RÉSILIATION.

Lorsque le moyen préjudiciel proposé dans une
poursuite correctionnelle porte, non sur une
question de propriété, mais sur un droit de
chasse, ce droit, d'une nature purement mo-
bilière, se trouvant en dehors du cas prévu
par l'art. 182 C. for., le tribunal de répres
sion est compétent pour apprécier immédiate-
ment, et sans sursis, au fond, le mérite du
Les sénatus-consultes des 1er avril et 7 juil. 1852,
moyen justificatif proposé (4).
qui accordaient au prince-président de la Ré-
publique la jouissance exclusive du droit de
chasse dans les bois de Versailles, dans les
forêts de Fontainebleau, de Compiègne, de
Marly et de Saint-Germain, sauf indemnité,
s'il y avait lieu, en faveur des locataires dépos-
sédés, avaient force de loi, et ont eu pour effet
de résilier immédiatement, à compter de leur
promulgation, les locations de chasse con-
En conséquence, à dater de cette époque, les lo-
senties par l'état dans lesdites forêts.
cataires n'ont pu se prévaloir de leurs baux
pour exercer, soit personnellement, soit par
leurs agents, le droit de chasse, sans enfrein-
dre les dispositions prohibitives des sénatus-
consulles précités, et sans encourir par suite
les peines portées par la loi du 3mai 1844.

(4) V., dans ce sens, Cass. 22 janv. 1836; ·

tue un legs particulier ou universel. V. Cass. 5 mai | Rép. gén. Journ. Pal., v Question préjudicielle, no 1832 (t. 2 1852, p. 484), et les renvois.

251.

a

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