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l'emploi des formes usitées dans les pays étrangers où ils résident momentanément n'est qu'une exception. C'est l'opinion des auteurs modernes (V. les autorités citées par M. Félix, n° 83); en sorte que, si un Anglais a fait en France un testament olographe revêtu de toutes les formes voulues par la loi anglaise pour ce genre de testament, ses dispositions devront ètre validées par les tribunaux français. Or, dans l'espèce, les testaments du colonel Conolly étaient dans la forme déterminée par la loi d'Angleterre pour les testaments olographes; celan'est pas contesté. C'est donc à tort et par une fausse application de la règle précitée que l'arrêt attaqué a prononcé la nullité de ces testaments.

DU 9 MARS 1853, arrêt C. cass., ch. req. MM. Mesnard prés., Pécourt rapp., Raynal av. gén., Paignon av.

sa fortune et l'entier exercice de ses droits (1). C. proc. civ. 443; C. comm. 582.

Peu importe d'ailleurs que les anciens syndics du failli lui aient été adjoints comme commissaires à l'exécution de son concordat (2). L'art. 582 C. comm. ne s'applique, en effet, qu'aux contestations qui, nées de l'événement de la faillite, intéressent en même temps son administration et sa procédure spéciale (3).

SYNDICS FAJON ET SYNDICS BENAZECH.

En 1849, le sieur Fajon et les syndics préposés à sa liquidation judiciaire assignèrent les syndics définitifs de la faillite des sieurs Benazech frères, négociants à Castres, en paiement d'une somme de 12,588 fr. 30 c., montant de laines consignées par le sieur Fajon aux frères Benazech, et qui étaient encore en la possession de ceux-ci lors de la déclaration de leur faillite.

Le 5 avril 1850, jugement du tribunal de commerce de Castres qui rejette la prétention des demandeurs. - Ce jugement leur ayant été signifié le 10 mai, le sieur Fajon et ses syndicscommissaires en interjetèrent appel le 12 juin

suivant. Les intimés conclurent à la nullité de l'appel, qui aurait dû, suivant eux, être formé dans les quinze jours de la signification, aux termes de l'art. 582 C. comm.

<<LA COUR; -Sur le moyen unique, tiré de la fausse application de la règle Locus regit actum et de l'art. 970 C. Nap., et de la violation du principe de réciprocité internationale établi par l'art. 999 et par l'art. 3 même Code: - Attendu qu'il est de principe de droit international que la forme extérieure des actes est essentiellement soumise aux lois, aux usages et cou tumes du pays où ils sont passés; que ce principe s'applique aux testaments olographes comme à tous autres actes publics ou privés; -Attendu que, si tout ce qui tient à l'état du testateur, à l'étendue et à la limite de ses droits et de sa capacité, est régi par le statut personnel, qui suit la personne partout où elle se trouve, il en est autrement de la solennité de l'acte et de sa forme extérieure, qui sont réglées par la loi du pays où le testateur dispose; - Qu'ainsi le testament olographe fait par un étranger en | disparaître le dessaisissement prononcé par l'art.

France, et dont l'exécution est demandée devant les tribunaux français, ne peut être déclaré valable qu'autant qu'il réunit toutes les conditions de forme exigées par la législation française, quelle que soit à cet égard la législation du pays uquel appartient le testateur; Attendu que l'arrêt attaqué constate que les testaments en la forme olographe faits en France par Conolly, sujet Anglais, ne sont pas écrits en entier de sa main, ou ne sont pas datés par lui, ainsi que l'exige l'art. 970 C. Nap.; - Qu'en prononçant, par suite, la nullité de ces testaments comme n'étant pas faits dans la forme olographe déterminée par la loi française, la Cour impériale de Paris n'a violé aucune loi; REJETTE, etc.»

CASSATION (10 mai 1853).

FAILLITE, APPEL, DÉLAI, CONCORDAT, JUGEMENTS ULTÉRIEURS, SYNDICS-COMMISSAIRES. L'art. 582 C. comm., qui a réduit à quinze jours, pour l'appel de tout jugement rendu en matière de faillite, le délai ordinaire de trois mois, n'est point applicable aux contestations survenues entre le failli et ses créanciers depuis l'homologation de son concordat, lequel a eu pour effet de lui rendre l'administration de

Le 18 juil. 1850, arrêt de la Cour de Toulouse qui déclare l'appel nul en ces termes :

<< Attendu qu'aux termes de l'article 582 C. comm., l'appel envers les jugements qui ont statué en matière de faillite doit être interjeté

(1) L'homologation du concordat, suivie de l'apurement du compte des syndics, a pour effet de faire

443 C. comm.:C.comm., 519.-V. Rép. gén. Journ. Pal., vo Faillite, nos 1469 et suiv. Le failli reprend l'administration de ses biens; la loi le rend à la vie

commerciale, et, par suite, les actions exercées par ou contre doivent suivre les règles ordinaires la procédure. Le jugement rendu sur les contestations entre le concordataire et ses créanciers est donc en dehors de la faillite, et les délais pour en appeler sont dès lors ceux du droit commun: Esnault, Traité des fail., t. 2, no 451; Geoffroy, Code

prat. des fail., p. 427. - Sur ce qu'il faut entendre par jugement rendu en matière de faillite relativement au délai spécial d'appel fixé par l'art. 582 C. comm., V. les principes posés par l'arrêt de Cass., 1er avril 1840 (t. 1 1840, p. 634), dans ses motifs.

V. aussi Cass. 2 avril 1850 (t. 2 1850, p. 353), et la note; Paris, 19 août 1852 (t. 2 1852, p. 699); - Rép. gén. Journ. Pal., cod verbo, nos 2783 et suiv.

(2) Les créanciers peuvent stipuler dans le concordat que le failli ne reprendra la direction de ses affaires que sous la surveillance de commissaires choisis par les créanciers, et même qu'il ne pourra agir et disposer de ses biens qu'avec l'assistance et le consentement de ces commissaires: Rép.gén.Journ. Pal., vo Faillite, nos 1519 et suiv.- Adde Rennes, 24 mai 1851 (t. 21851, p. 529); - Esnault, Tr. des faill. et bang., t. 2, no 452; Bedarride, ibid., sur l'art. 319, t. 2, no 616. - Mais, ainsi que le fait observer avec raison l'arrêt que nous rapportons, l'adjonction de commissaires au failli concordataire ne change pas l'état des choses, et n'empêche pas que la faillite n'ait cessé.

(3) V. la note tre.

dans les quinze jours qui suivent la signification; que Fajon n'a fait le sien que long-temps après l'expiration de ce délai, en tenant compte de l'addition qu'il fallait faire à cause des distances; qu'il y a donc lieu de le déclarer non recevable si l'article précité doit recevoir son application à la cause; Attendu que Fajon exerçait les actions qui lui appartenaient comme créancier de Benazech par suite des ventes de Jaines qu'il avait faites à ce dernier; que, Benazech étant tombé en faillite, c'était contre ses syndics qu'il avait formé sa demande; - Qu'en vain il soutient que le failli avait fait un concordat, et que l'effet de l'existence de cet acte dressé entre lui et ses créanciers avait dû être de lui rendre la pleine administration de ses affaires; qu'en supposant qu'il en dût être ainsi, on comprendrait que Fajon pût tirer tel avantage que de droit de cette situation si, la prenant luimême telle qu'il dit qu'elle était, il avait assigné directement Benazech devant le tribunal; Mais que telle n'a pas été sa conduite; qu'il a au contraire donné citation aux syndics; que c'est la dénomination qu'il leur a donnée tant dans l'exploit d'ajournement que dans l'acte d'appel; que, soit qu'il la leur conserve ou qu'il veuille les appeler commissaires, il a luimême qualifié sa demande en les appelant; qu'il devait les citer, en effet, puisqu'ils sont chargés de l'administration des biens et de la rentrée des créances abandonnées par Benazech; que, quel que soit le titre auquel ils sont chargés de cette liquidation, elle est la suite, une conséquence nécessaire, de la faillite; que c'est donc à l'occasion de la faillite que l'instance a été engagée et poursuivie; - Que, si de la forme on passe au fond, on est amené a reconnaître que, soit que l'on consulte le libellé de la citation, les conclusions prises ou la chose qui a été jugée, il faut dire qu'il s'agit toujours de la même matière; que Fajon a exercé une action en revendication, ou au moins demandé son admission au passif; qu'il agissait donc contre un failli ou ses représentants pour affaires relatives à la faillite; qu'il n'est donc pas possible de se soustraire à l'application de l'art. 582 C. comm.; que l'appel relevé contre les syndics de Benazech après le délai qu'il prescrit doit par conséquent être rejeté. »

Pourvoi en cassation par le sieur Fajon et les syndics à sa liquidation pour violation de l'art. 443 C. proc. civ., et fausse application de l'art. 582 C. comm., en ce que l'arrêt attaqué avait déclaré non recevable l'appel de la liquidation Fajon, en considérant le jugement de première instance comme rendu en matière de faillite, alors cependant que les sieurs Benazech, ayant obtenu un concordat, avaient cessé par là d'être dans les liens de la faillite.

DU 10 MAI 1853, arrêt C. cass., ch. civ., M. Berenger prés., Feuilhade-Chauvin rapp., Nicias-Gaillard 1er av. gén. (concl. conf.), Fabre et Costa av.

« LA COUR ; Vu les art. 443 C. proc. civ. et 582 nouveau C. comm.; Attendu que le Code de commerce modifié, en réduisant, par

son art. 582, à quinze jours le délai de trois mois établi par l'art. 443 C. proc. pour les appels, a eu pour but de simplifier la procédure en matière de faillite, et d'abréger des délais qui tenaient en suspens les droits et les intérêts d'une masse de créanciers; - Que la disposition de l'art. 582 s'applique aux contestations qui, nées de l'événement de la faillite, intéressent en même temps son administration et sa procédure spéciale; — Qu'après leur accomplissement et alors qu'il est survenu un concordat entre le failli et ses créanciers, qui a obtenu, par son homologation, la sanction de la justice, les droits et intérêts qui étaient en suspens sont irrévocablement fixés; le failli, un instant dessaisi, reprend l'administration de sa fortune et recouvre l'entier exercice de ses droits; — Que, si, pour cet exercice, en ce qui concerne la rentrée des créances et pour assurer d'autant l'exécution du concordat, il arrive qu'on adjoigne au failli concordataire ses anciens syndics comme agents auxiliaires de la liquidation qui va s'établir, cette adjonction ne change pas l'état des choses et n'empêche pas que la faillite n'ait cessé ; — Que, pour cette liquidation, même placée sous la surveillance des anciens syndics, la disposition purement exceptionnelle de l'art. 582 C. comm. cesse de recevoir son application, et que, les parties étant rentrées dans le droit commun, il y a évidemment lieu d'appliquer la règle générale de l'art. 443 C. proc. dans les instances ultérieures auxquelles peut donner lieu la liquidation qui reste à faire ; — Attendu, en fait, que, les deux maisons de commerce Fajon et Bénazech, qui avaient eu des rapports d'intérêts entre elles, étant toutes deux tombées en faillite, un concordat est survenu, qui a confié la liquidation et la rentrée des créances à chacun des faillis, sous la surveillance de leurs anciens syndics; que ce concordat, dûment homologué, a reçu son exécution et a ainsi acquis l'autorité de la chose jugée; —Que, par suite de la liquidation, une instance est survenue entre les deux maisons au sujet d'une demande en remboursement de laines formée par l'une d'elles; qu'en appliquant à l'appel du jugement intervenu dans cette instance le délai exceptionnel de l'art. 582 C. comm., l'arrêt attaqué a évidemment fait une fausse application de cet article, et expressément violé l'art. 443 C. proc., concernant le délai général de tout appel en matière civ.; CASSE, etc. »

-

CASSATION (2 août 1853). ENREGISTREMENT, CRÉANCIERS INSCRITS, COÏNTÉRESSÉS, NOTIFICATION, PLUSIEURS ACQUÉ, REURS, PLURALITÉ DE DROITS.

Les créanciers inscrits sur un immeuble, et qui ne sont d'ailleurs ni associés ni solidaires, ne peuvent être considérés comme cointéressés dans le sens de l'art. 68, § 1, no 30, de la loi du 22 frim. an VII; et, dès lors, la notification qui leur est collectivement faite par les acquéreurs de cet immeuble, aux termes de l'art. 2183 C. Nap., est passible non pas seulement d'un droit fixe par chaque acquéreur,

mais bien d'autant de droits fixes qu'il y a tout à la fois d'acquéreurs et de créanciers (1). ENREGISTREMENT C. FORTIER.

Par un procès-verbal notarié du 21 juil. 1850, des biens immeubles appartenant au sieur Lemarre, et grevés d'hypothèques au profit de dix-neuf créanciers, ont été adjugés à

diminuer la valeur de leur gage; - Que leur droit est tellement identique que, dans certains cas, il peut arriver même que des créanciers inscrits, soit par suite de stipulations permises, soit à cause du même rang ou de la même date de leurs hypothèques, aient tous entre eux les mêmes droits et ne puissent venir qu'au marc le franc en cas d'insuffisance pour

onze acquéreurs différents. - Ces onze acqué-les désintéresser tous; d'où la conséquence

reurs ont, par un seul exploit, du ministère du sieur Fortier, huissier, fait aux dix-neuf créanciers inscrits les notifications prescrites par les art. 2183 et suivants C. civ. - Le receveur ayant, lors de l'enregistrement de cet exploit, perçu deux cent neuf droits fixes à raison de 2 fr., soit au total 450 fr. 80 cent., le sieur Fortier a fait assigner l'administration en restitution de cette somme, sous la réserve d'un seul droit fixe de 2 fr.

Le 27 mai 1851, jugement du tribunal de

Pithiviers ainsi conçu :

<< Attendu qu'il s'agit de savoir si, dans l'espèce, divers acquéreurs d'un immeuble, d'une part, et, de l'autre part, les créanciers inscrits

sur ledit immeuble, doivent être considérés comme coïntéressés; - Attendu d'abord, en ce qui concerne les adjudicataires, qu'il ne suffit pas d'avoir un intérêt semblable pour qu'on doive être nécessairement considéré comme coïntéressé, dans le sens de la loi du 22 frim. an VII; que la seule similitude d'intérêts

qu'ils ont un intérêt parfaitement identique et indivisible à défendre l'importance du prix de vente, afin de ne pas supporter au définitif une perte qui, dans le cas, retomberait sur eux tous; Qu'ainsi, quoique divisés par le nombre, ils n'en représentent pas moins la propriété elle-même tout entière; qu'il forment tous une seule masse, et qu'ils sont tous en quelque sorte un être de raison intéressé à conserver au prix de vente la plus grande importance possible; - Attendu, en outre, que, pour que l'exception prévue par la loi de frim. an VII soit appliquée, il n'est pas nécessaire qu'il y ait solidarité d'intérêts, mais que la simple communauté d'intérêts suffit; que ce qui le démon

tre d'ailleurs, c'est cette loi elle-même, puisqu'après avoir compris les coïntéressés dans une catégorie, elle comprend ensuite dans une autre les débiteurs ou créanciers, associés ou solidaires; -- Le tribunal dit à bon droit la perception faite du droit de 2 fr. 20 cent. sur chacun des adjudicataires, qui sont au nombre conséquence, à 24 fr. 20 cent.; mais dit sans droit et illicite la perception quant au surplus; condamne l'administration à restituer au sieur Fortier la somme de 435 fr. 60 cent. perçue en trop. >>>

ne constitue pas un lien de droit; qu'il faut de onze, perception dont le tout s'élève, en

pour cela avoir, un intérêt identique et indivisible; que dans l'espèce, au contraire, l'intérèt des adjudicataires peut être distinct et séparé; qu'en effet, le lot de chacun d'eux reste distinct; que leur prix reste la dette particulière de chacun; qu'il peut arriver en outre qu'une surenchère soit formée contre l'un ou quelques uns seulement des adjudicataires, sans quece droit des créanciers inscrits soit exercé contre les autres; - Attendu d'ailleurs qu'il ne s'agit ici que d'une exception; que, par leur nature, les exceptions sont de droit étroit, stricto jure, et ne peuvent s'étendre de manière à absorber le principe général; Mais en ce qui concerne les créanciers inscrits: Attendu que la position n'est plus la même, qu'en effet, si les premiers ont véritablement un intérêt distinct et séparé, s'ils ne sont pas valablement intéressés à s'unir entre eux pour épargner les frais, puisqu'en définitive ils ne sauraient être contraints au delà de leurs prix respectifs d'acquisition, il en est tout autrement des créanciers, qui ont un intérêt, identique, incontestable, à ce que les frais de notification et de purge ne viennent point absorber ou même seulement

(1) V. Conf. Cass. 17 juin 1851 (t. 2 1851, p. 481), et la note. - On invoquait en sens contraire, dans l'espèce de l'arrêt que nous rapportons, un arrêt de la Cour de cassation, qui avait considéré comme coîntéressés, bien qu'ils ne fussent ni associés ni solidaires, des créanciers d'un défunt qui s'étaient

réunis po ur demander par un même exploit la séparation des patrimoines: Cass. 2 juin 1832. - V. Rép. gén Journ. Pal., vo Enregistrement, nos 1633 et

suiv.

Pourvoi en cassation par l'administration de l'enregistrement, pour violation des art. 11 et 68, § 1er, no 30, de la loi du 22 frim. an VII.

DU 2 AOUT 1853, arrêt C. cass., ch. civ., MM. Bérenger prés., Grandet rapp., Vaïsse av. gén. (concl. conf.), Moutard-Martin av.

<<< LA COUR; - Vu l'art. 68, § 1er, no 30, de la loi du 22 frim. an VII; - Attendu qu'aux termes de cet article, il est dû un droit pour chaque demandeur ou défendeur, en quelque nombre qu'ils soient dans le même acte, excepté les copropriétaires et cohéritiers, les parents réunis, les coïntéressés, les débiteurs ou créanciers associés ou solidaires, les séquestres, etc.; Attendu que cet article ne comprend les créanciers dans l'exception qu'il accorde que lorsqu'ils sont associés ou solidaires; Attendu qu'il n'est pas établi au procès que les créanciers auxquels la notification a été faite fussent liés par aucune association ou solidarité; - Que la notification n'avait pour but que de parvenir à la purge des immeubles hypothéqués en mettant les créanciers en demeure de faire valoir leurs droits; qu'ainsi, c'était uniquement à titre de créanciers et dans un intérêt individuel qu'ils recevaient ladite notification; qu'ils n'étaient point coïntéressés dans le sens de la loi précitée, et que, dès lors, l'exception accordée par ladite loi ne leur était pas applicable;

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VENTE MOBILIÈRE, ARBRES, VENTES SUCCESSIVES, PRISE DE POSSESSION, PRÉFÉRENCE.

La vente d'arbres dont la coupe doit être faite

soit immédiatement, soit à la volonté de l'acquéreur, qui s'est réservé la faculté d'en laisser croître une partie pendant un certain nombre d'années, est, non immobilière, mais mobilière (1); et doit dès lors être préférée à une autre vente des mêmes arbres faite, même antérieurement, et par acte authentique, à un tiers, si elle a été accompagnée d'une mise en possession réelle (2) par la marque des arbres vendus (3).

(1) C'est la un point généralement reconnu. V. Rép. gén. Journ. Pal., vo Biens, nos 31 et suiv. Adde Cass. 21 juin 1820; - Toullier, Dr. civ., t. 3, n. 11; Proudhon, Tr. du dom. de propr., t. 1er, nos 97 et 182; Duranton, Cours de dr. fr., t. 4, nos 40 et suiv.; Marcadé, Explic. C. Nap., sur l'art. 521; Demolombe, Cours de C. civ., t. 9, no 160; Zacha riæ, Cours de C. civ., § 170, note 15; Duvergier,

Tr. de la vente, t. 1er, no 37; Chavot, Tr. de la propriété mobilière, t. 1er n° 22; Ducaurroy, Bonnier et Roustain, Comment. C. civ., sur l'art. 521, t. 2, no 17; Boileux, Comment.C.civ., sur l'art. 521; Rolland de Villargues, Rép. du notar., vo Meubles-immeubles, nos 73 et suiv. - Aussi, en matière d'en

PÉCHIN-GOURDIN ET AUBERT C. MEURISSE.

Le 28 janv. 1847, les époux Humbert ont vendu aux époux Meurisse, par acte notarié, 16,000 pieds d'arbres à prendre au choix des acquéreurs dans 117 hectares 72 ares 36 centiares de bois dépendant de la terre des Gachetiers, arrondissement d'Orléans. Le même jour, ils ont vendu aux mêmes, suivant un second acte sous seings privés, 84,000 pieds d'arbres, au choix des acquéreurs, à prendre dans les 117 hectares 72 ares 36 centiares de bois en question, indépendamment des 16,000 pieds cidessus. Le choix des sieur et dame Meurisse, aux termes de cet acte, devait être fait dans le mois, et les arbres par eux choisis devaient étre frappés de leur marque et devenir immédiatement leur propriété, restant comme tels à leurs risques et périls. Enfin il fut stipulé que M. et Mme Meurisse auraient la faculté de laisser croître pendant vingt ans 50,000 pieds des arbres vendus, à leur choix, sur la totalité des 117 hectares 72 ares et 36 centiares, mais qu'ils devraient couper et faire enlever tout le surplus avant le 1er mars 1849. - Cependant, le 10 fév. 1847, les sieur et dame Humbert ont vendu, par acte sous seing privé, enregistré le 11, la totalité des arbres du bois des Gâchetiers, à M. Aubert, qui, le 23 juin suivant, les a donnés en nantissement aux sieurs Péchin-Gourdin, et les leur a hypothécairement affectés en tant qu'immeubles, tant qu'ils seraient sur pied.

Le 27 mai 1847, les sieur et dame Meurisse ont fait marquer contradictoirement les arbres par eux choisis, tandis que ni M. Aubert, ni session des arbres qui leur ont été vendus ou donnés en nantissement.

registrement, la loi du 22 frim. an VII comprend-elle plus tard MM. Péchin-Gourdin, n'ont pris pos

dans l'art. 69, § 5, no 1er, qui établit sur les ventes mobilières un droit de 2 p. 100, les ventes de coupes de bois taillis et de hautes futaies. -Jugé, par application de cette loi, 1o que les ventes de bois taillis sont soumises seulement au droit proportionnel de 2 p. 100, soit qu'elles comprennent des bois susceptibles d'une exploitation immédiate, soit qu'elles comprennent des bois dont l'exploitation ne devra avoir lieu que successivement, et dans un nombre d'années déterminé: Cass., 4 avril 1827; - 20 qu'une vente de bois taillis et de haute futaie n'est soumise qu'au droit d'enregistrement de 2 p. 100,

lors même qu'elle

la même personne, mais par acte séparé et sans fraude. Cass. 8 sept. 1813, et 21 mars 1820, et les renvois. V., au surplus, Rép. gen. Journ. Pal., Enregistrement, nos 3637, 3770 et suiv. - Enfin, la loi du 5 juin 1831 est également fondée sur le même motif. En effet, c'est précisément parce que les ventes de coupes de bois taillis ont été considérées comme mobilières que cette loi porte qu'elles seront faites en concurrence, et au choix des parties, par les notaires, commissaires-priseurs, huissiers et greffiers de justices de paix. V. ladite loi, et les notes qui l'accompagnent, dans nos Lois, décrets, etc., de 1851, t. 4, p. 115.

(2) V. conf. Cass. 21 juin 1820. - V. Rép. gén. Journ. Pal., vo Vente, no 126.

(3) Jugé que la tradition, pour une coupe entière de bois, peut résulter d'un commencement d'exploitation, de l'établissement d'un garde-vente et du paiement des contributions; que, du moins, l'arrêt qui le décide ainsi ne donne pas ouverture à cassation: Cass., 21 juin 1820. - V. Rép. gen. Journ, Pal., vo Vente, no 721.

Les époux Meurisse ayant voulu couper et vendre les bois par eux achetés, les sieurs Aubert et Péchin-Gourdin s'y sont opposés par le motif que, s'agissant d'une vente immobilière et leur acte étant le premier en date, puisqu'il était seul enregistré, c'était eux qui se trouvaient propriétaires du bois des Gachetiers. Les époux Meurisse ont soutenu que la vente était mobilière, et que, puisqu'ils avaient été mis en possession de la chose vendue, leurs droits étaient préférables à ceux de leurs adversaires.

Le 21 juin 1849, jugement du tribunal de la Seine ainsi conçu :

<<< Le tribunal; - Attendu que, si, par acte sous seings privés du 10 fév. 1847, enregistré, Humbert a vendu à Aubert le bois de la Gachetière, et si, par autre acte devant Me AumontThiéville, notaire à Paris, en date du 23 juin 1847, enregistré, ledit Aubert a donné ce bois en nantissement à Péchin-Gourdin, ces actes ne peuvent préjudicier au droit antérieur de Meurisse, résultant pour lui de la vente devant Olagnier et Planchat, du 28 janv. 1847, enregistrée, et des conventions verbales du même jour; Attendu que le droit de Meurisse résultant de l'acte du 28 janvier, et relatif aux 16,000 pieds d'arbres, est certain; que, si, à l'égard des 84,000 pieds d'arbres restants, il ne produit que des enga gements sous seings privés, il faut reconnaître

PARIS (27 mai 1851).

OUTRAGE AU CULTE, SERVICE DIVIN, VIN BU

DANS L'ÉGLISE.

Le fait d'avoir apporté une bouteille de vin dans une église, et de l'avoir bue et fait boire pendant que les prêtres officiaient à l'autel, constitue un outrage au culte catholique prévu et réprimé par l'art. 262 C. pén., et non un outrage aux ministres du culte, non plus que le délit de trouble et interruption de l'exercice du culte, alors que cet exercice n'en a été réellement ni empêché, ni retardé, ni même interrompu (1). C. pén. 261, 262.

néanmoins que, dans l'espèce, il s'agit d'une transaction purement commerciale passée entre commerçants, et régie par l'art. 109 C. comm.; que, par conséquent, ces engagements sont valables, bien que contractés par correspondance et dans une forme non authentique; qu'on ne saurait donc avec fondement méconnaître la sincérité de la vente dont s'agit; Attendu que cette vente, aux conditions de laquelle il n'a été fait aucune dérogation, et qui a reçu un commencement d'exécution par la marque des bois vendus à M. Meurisse, marque qui, en pareille matière, est le mode de tradition usité, ne peut être annulée par ce fait que Humbert, par vente directe, et Aubert, par voie de nantissement, auraient disposé de la chose déjà vendue à Meurisse, et ce par acte authentique; Attendu que cette disposition, contraire à l'acte du 28 janv. 1847, à la convention verbale qui en est l'accessoire, ne peut recevoir d'exécution qu'après la réalisation de la vente faite à Meurisse, et après que celui-ci aura pris effective-te: - Considérant que l'art. 261 C. pén. pré

ment livraison de la chose à lui vendue, sauf aux syndics Aubert et a Péchin-Gourdin et Cle à faire valoir contre la faillite Humbert tels droits qu'il appartiendra; - Attendu qu'en cet état les oppositions formées par Péchín-Gourdin ou tous autres ne peuvent subsister et arrêter l'exécution de l'acte du 28 janv. 1847; Par ces motifs, déclare nuls et de nul effet, en tant qu'ils font obstacle à l'exécution de l'acte du 28 janv. 1847, les actes de vente et de nantissement des 10 fév. et 23 juin 1847, etc. >>

Appel par les sieurs Péchin-Gourdinet Aubert. - Ils ont soutena que la vente faite à Meurisse était évidemment immobilière, puisque les pieds d'arbres vendus n'avaient pas acquis, en général, l'âge d'exploitation, et qu'ils ne devaient être coupés que dans un temps plus ou moins éloigné; que, dans le cas où cette vente serait considérée comme une vente mobilière et commerciale, on devait remarquer que l'art. 1328 C. civ. était aussi bien applicable dans les matières commerciales que dans les matières civiles; et que l'art. 109 C. comm. réglait les droits des parties contractantes, et non ceux des tiers entre eux.

DU 12 AVRIL 1851, arrêt C. Paris, MM. Rigal prés., Barbier av. gén., Flandin et Caignet av.

« LA COUR; -- Considérant qu'il résulte des faits, circonstances et documents, de la cause, que la vente de la coupe de bois dont s'agit faite à Meurisse était mobilière, puisque dans l'intention des parties cette coupe devait se faire soit immédiatement, soit à la volonté de l'acheteur; - Que cette vente a été suivie d'une mise en possession réelle, de la seule manière que comporte une pareille vente, par la marque de la totalité des arbres vendus; qu'ainsi, en supposant qu'elle fût postérieure en date à celle faite à Aubert, elle devait être préférée à celle-ci; - Adoptant, au surplus, les motifs des premiers juges, - CONFIRME, etc. »

FLOQUET.

DU 27 MAI 1851, arrêt C. Paris, ch. accus., MM. Lassis prés., Lévesque subst.

« LA COUR ; - En ce qui touche le premier chef d'inculpation, résultant de ce que Floquet aurait troublé et interrompu l'exercice du cul

voit le cas où l'exercice d'un culte a été empêché, retardé ou interrompu, par des troubles ou des désordres commis dans le temple; que, dans l'espèce, les faits reprochés à Floquet pourraient être considérés comme des troubles; mais que, d'après la déclaration même du curé, ces troubles n'ont pas empêché, retardé, ni même interrompu, les exercices du culte; que, dès lors, ils ne constituent pas le délit prévu par l'art. 261;

>> En ce qui touche le deuxième chef, résultant de ce que Floquet aurait outragé les ministres du culte en apportant dans l'église une bouteille de vin, et en buvant et faisant boire ce vin, pendant que les prêtres officiaient à l'autel: Considérant que cette action n'avait pas pour objet d'outrager les ministres du culte, et qu'elle n'a rien d'outrageant pour leurs personnes;

>> Mais en ce qui touche le troisième chef, relatif à l'outrage aux objets du culte : Considérant que l'art. 262 punit toute personne qui aura, par paroles ou gestes, outragé les objets d'un culte dans les lieux destinés ou servant actuellement à son exercice; que cette disposition. est générale; qu'elle embrasse tout ce qui constitue un culte ou sert à l'exercice de ce culte, les dogmes, les cérémonies, les symboles, les images, les ornements; enfin, tout ce qui est l'objet de l'adoration ou de la vénération des fidèles; que le législateur a voulu, par l'art. 262, protéger le libre et paisible exercice des cultes dans l'enceinte de leurs temples; que, pour atteindre ce but, il a voulu punir tout acte injurieux pour le culte, qui doit nécessairement causer un scandale parmi les fidèles; sidérant, dans l'espèce, que l'inculpé a apporté une bouteille de vin dans l'église, qu'il a bu et fait boire ce vin pendant que les prêtres officiaient à l'autel; que cet acte, par sa nature, indique clairement, comme l'inculpé l'a d'ailleurs expliqué lui-même le lendemain, qu'il voulait

Con

(1) V. Rép. gén. Journ. Pal., vo Culte, nos 532 et suiv.

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