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tage, aucune participation.-Bref, la femme ne peut rien acquérir à l'aide d'une administration dans laquelle elle ne veut rien compromettre; elle s'est préoccupée exclusivement du soin de conserver et de reprendre intacte sa fortune personnelle, et le mari, dont elle a décliné l'association d'intérêts, travaille et administre pour lui seul, à ses risques et périls.

tombent à sa charge? Là surgissent toutes les difficultés du débat ; et, avant de les résoudre, constatons bien que, dans l'espèce, comme dans la doctrine, il ne s'agit jamais d'imposer à cette communauté autre chose que de véritables dettes de communauté restreinte.-Ainsi, personne ne songe à la charger ni des dettes existantes au moment du mariage, ni des dettes résultant des successions ou donations advenues pendant sa durée. De pareilles dettes, aux termes de l'art. 1498 C. Nap., ne grèvent pas même la communauté plus étendue, celle qui embrasse indistinctement les acquêts meubles et immeubles. Il ne peut être question, à fortiori, des dettes contractées dans l'intérêt spécial des immeubles propres à l'un ou à l'autre des époux, et dont la communauté légale est elle-même exonérée (art. 1409 C. Nap.). — Il s'agit uniquement des dettes de ménage, des dettes contractées par le mari comme chef de l'association conjugale, et qui ont, partout et toujours, le caractère certain de dettes de com

>> Mais la position change. A côté du régime dotal stipulé comme régime général du mariage, les époux placent une convention particulière de société réduite aux acquêts immobiliers. Remarquons ici, et cette réflexion est importante, que l'association qui va se créer ne résulte en rien de la volonté de la loi; elle est tout entière le produit de la volonté des contractants. Ils avaient soumis leur union à un régime matrimonial qui, sans nier ni le fait de la contribution des revenus dotaux, ni le fait de la collaboration de la femme, n'y attachait pourtant aucune conséquence réelle et prcfitable pour celle-ci. Or, par la seule puissance de la volonté des époux, et parce qu'ils se dé-munauté. clarent, par une clause exceptionnelle, associés dans une certaine mesure, voici que la contribution des revenus de la femme et sa collaboration, stériles au point de vue de la dotafité, deviennent un élément producteur, une véritable mise sociale. Mais, ne l'oublions pas, cette société, toute conventionnelle, reste dans les limites que la volonté des époux lui a assignées. Elle a pour but l'acquisition d'immeubles; elle n'aura de manifestation utile que dans cette acquisition. Il n'y aura des gains et épargnes communs aux deux époux que sous la forme d'immeubles acquis. Hors de la, on invoquera vainement le fait de la collaboration commune, le fait des revenus dotaux touchés par le mari, le fait d'acquêts mobiliers, le fait de l'augmentation considérable de la fortune du mari. S'il n'y a pas d'acquêts immobiliers, la société exceptionnelle aura vécu impuissante et improductive; elle n'aura pas d'actif. Tous les autres bénéfices du ménage lui sont étrangers. Le régime dotal règne ici d'une manière absolue; tout ce qui n'est pas acquêt immeuble reste gouverné par ce régime, et appartient au mari. Telle est la loi du contrat. En résumé, donc, sur ce point, la société réduite aux acquêts immobiliers, stipulée à côté du régime dotal, ne nait pas, ipso facto, ou parce qu'il y a collaboration des époux, ou parce qu'il y a des gains et épargnes dans le ménage. Elle est une exception, une dérogation aux effets du statut dotal, et elle procède directement de la volonté des époux qui l'établissent, mais seulement dans l'étendue que la convention lui accorde. Elle ne peut jamais réclamer que les acquêts immeubles. Tout autre produit se règle et s'attribue suivant les principes de la dotalité, qui subsiste comme régime principal du mariage.

» Telle est donc la nature de la communauté réduite aux acquêts immobiliers, considérée dans son adjonction au régime dotal. Nous venons d'indiquer le seul actif qu'elle puisse réclamer. Maintenant quelles sont les dettes qui

» Plusieurs systèmes sont en présence pour régler d'une manière diverse l'attribution de ces dettes ainsi définies. Les uns ne veulent reconnaître comme dettes de la communauté restreinte aux acquêts immeubles que les dettes spéciales à ces immeubles. Les autres prétendent que le mobilier acquis par le mari doit supporter tout le passif, sauf, en cas d'insuffisance, à revenir sur les acquêts immobiliers.Une troisième combinaison consiste à répartir proportionnellement les dettes entre le mobilier acquis par le mari et les immeubles acquis par la communauté. Enfin, suivant la jurispru dence des Cours de Rouen et de Caen, le vœu de la loi serait que les dettes et reprises fussent une charge directe de la communauté, et ne pussent être répétées contre le mari qu'en cas d'insuffisance de l'actif commun. - Cette multiplicité de systèmes si divergents semble indiquer que, dans l'examen de la question qui nous occupe, chacun a créé arbitrairement son point de départ, et que peut-être on n'a pas recherché d'une manière assez laborieuse et assez ferme le principe élémentaire de la solution. C'est donc à cette recherche qu'il convient de se livrer, et la doctrine qui aura trouvé ce principe, et qui en déduira logiquement les conséquences, sera assurément celle qui lèvera tous les doutes et proclamera la vérité.

>> Lorsqu'il s'agit de reconnaître et de préciser le passif des différentes espèces de communauté qui naissent de la loi ou de la convention, il y a deux termes qu'il ne faut jamais isoler, l'apport réel de chacun des époux, et leur industrie ou collaboration commune. L'apport réel entraîne avec lui, pour la contribution aux dettes, des résultats importants que la raison consacre avant la loi. Il est bien clair, par exem ple, que celui des époux qui met dans le fonds social tout ou partie du mobilier qu'il possède ne peut pas entendre gratifier absolument la communauté. Il apporte une portion de sa fortune telle qu'elle est, actif et passif, et la communauté qui reçoit une portion d'actif doit né

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cessairement supporter une part correspondante [ n'ait droit qu'à un actif restreint, les acquêts des charges qui l'affectent. En sens inverse, ceimmeubles. Elles sont le fait de la société, et, lui qui refuse de mettre dans la société tout ou par conséquent, elles sont les dettes de cette partie de sa fortune restera seul obligé à ses société. Ici ce n'est plus un apport réel des dettes personnelles, dans la mesure de ce qu'il biens que l'on envisage avec son inséparable s'est réservé. Mais faut-il en induire que passif de dettes ou charges. On ne voit plus, tout est terminé alors qu'on a fixé l'apport réel on ne peut plus voir, que l'apport moral, la et le passif qui en dépend? Non, certes, car les mise en commun de l'industrie et de l'épargne, dettes ne se rattachent pas toutes à un actif mo- la collaboration enfin, qui compose, au début, bilier, soit présent, soit futur, actif mobilier que le seul actif de la société, le seul moyen qu'elle les époux conservent en propre ou mettent en ait de fonctionner et d'acquérir. En fonctioncommunauté. Elles peuvent avoir et ont souvent nant, en se livrant aux actes et aux transacune autre origine, une autre cause. Ainsi elles tions de la vie civile, en cherchant à se créer sont contractées pour les besoins du ménage ou des gains afin d'acquérir des immeubles, cette les nécessités de l'administration conjugale. société, bien entendu, est exposée aux chances diverses de la bonne et de la mauvaise fortune. Si le mari administre mal et fait des pertes, ou si, tout en administrant bien, il laisse pourtant un passif, il a agi aux risques et périls de la communauté.

Il

>> Supposons maintenant que, comme dans notre espèce, les époux aient établi entre eux, à côté du régime dotal, une communauté particulière, sans aucun apport réel présent et futur, sans y engager aucune parcelle de leur fortune actuelle et à venir, et demandons-nous quel est le fonds social de cette communauté. se réduit, évidemment, à la collaboration des époux, produisant des gains et épargnes. Cette collaboration, ainsi que nous l'avons dit déjà, existait en fait sous le régime dotal, mais elle n'avait aucune conséquence utile pour la femme; la voilà maintenant, par la force d'une convention de communauté, devenue une véritable mise sociale. Mais encore elle ne saurait être autre chose que ce qu'elle est; elle n'est point un apport de biens existants, de valeurs réelles; elle ne constitue qu'un apport d'industric. Pourtant une pareille communauté aura des dettes et devra les supporter. Mais quelles dettes? Non pas celles existantes à l'époque du mariage, non pas celles qui grèvent les successions ou donations échues pendant son cours, mais celles qui résultent de la collaboration commune et de l'administration du mari. En effet, une société a été formée entre les deux époux, et elle a pour but des acquêts immobiliers. Mais comment arriver à ces acquêts? Par le moyen des gains et épargnes résultant de la vie commune. Or qu'est-ce qui est l'agent du ménage, le chef de la société, l'administrateur de la communauté? Le mari. Et quand, en dehors des dettes qui grevaient les biens possédés par les époux lors du mariage, en dehors de celles qui grèvent leurs biens personnels à venir, il y aura des dettes procédant de l'administration ordinaire du mari, il faudra bien qu'elles soient supportées par la communauté. C'est qu'en réalité, nous le répétons, il y a deux termes, deux éléments dans la formation du passif des communautés. Elles doivent acquitter, sans doute, les charges des biens qu'elles reçoivent, ou être dispensées de celles qui affectent les biens réservés par chaque époux (ici on considère l'apport réel). Mais, outre ces dettes, il y a celles qui naissent du mouvement et des opérations de la société représentée par le mari. Elles sont étrangères à toute espèce d'apport réel. Elles existent, encore bien que les époux aient exclu de leur communauté tout leur mobilier présent et futur; encore bien que cette communauté

>>> Les observations qui précèdent amènent cette solution toute naturelle, savoir, qu'une communauté réduite aux acquêts immobiliers doit supporter néanmoins toutes les dettes de l'administration du mari. Le principe de cette solution est désormais nettement dégagé. Les deux époux, mariés sous le régime dotal, ont voulu que le fait de leur collaboration devînt un fait civil, légal, une véritable association, et dans ce but ils ont écrit une convention matrimoniale. Il importe peu qu'ils n'aient effectué aucun apport réel et qu'ils aient entendu se réserver tous leurs biens présents et à venir. La communauté n'en existe pas moins avec le fonds de l'industrie des deux époux qui travaillent et épargnent en commun, le mari étant le chef de l'administration. Donc ce qui sera contracté d'obligations et charges à cause de cette administration sera du par la communauté.

>> On objecte, à la vérité, que la communauté particulière dont il est question au procès n'a pour but que l'acquisition d'immeubles, tandis quc tout le mobilier acquêt appartiendra au mari. Dans le cas de la communauté embrassant les acquêts meubles et immeubles, dit-on, on conçoit que toutes les dettes de l'administration maritale soient des dettes communes, puisque la collaboration des époux profite de tous les gains sans exception, qu'ils se réalisent sous forme de meubles ou immeubles acquis. Mais pourquoi, alors que le mari seul profite des gains mobiliers, alors que son administration se préoccupe autant de ses intérêts personnels que des intérêts communs, alors même qu'elle peut arriver à cet étrange résultat d'enrichir exclusivement le mari par des acquèts mobiliers, pourquoi vouloir que la communauté supporte toutes les dettes de l'administration du mari? Est-ce que, sous le régime dotal stipulé comme règle générale à côté de la clause de communauté particulière, le mari n'est pas tenu de toutes les dettes ? Et comment se fait-il qu'à cause de cette communauté particulière, il s'en trouve affranchi, en ce sens que toutes les dettes qui ont le caractère légal de dettes de communauté grèveront le méuage? Il n'y a là ni droit ni justice.

elles n'ont pas, comme dans une société ordinaire d'acquisition d'immeubles, ce caractère net et tranché qui les rattache au but final de l'association.-Rien n'est plus large, plus varié, plus divers, que l'existence sociale des familles. Elles veulent d'abord, et avant toutes choses, comme nous l'avons dit si souvent, se créer des ressources, des gains, des épargnes, et tous les actes si multipliés d'administration qui interviennent à cet effet, qui produisent dettes ou créances, n'ont aucun rapport intime, nécessaire, avec le fait d'acquisition de conquêts immeubles. Encore une fois, que ces conquêts se réalisent ou ne se réalisent point, l'association conjugale vit, existe, fonctionne à ce titre, et fait irrésistiblement siennes les dettes du ménage. Ainsi, le but final de la communauté, ce but déterminé, particulier, n'empêche en rien la généralité, l'universalité, des actes de la vie commune. En un mot, cette communauté s'oblige dès l'instant qu'elle agit comme être moral constitué, comme personne civile, et indépendamment du but lucratif et dernier qu'elle se propose. Ses obligations ont pour base l'exercice de la collaboration commune, et il n'est pas permis de les distinguer en obligations mobilières et immobilières, relativement aux conquêts, réalisés ou non réalisés. Il suffit qu'elles procèdent du fait et de la volonté de la collaboration commune, exercée par le mari, pour qu'elles soient irrévocablement des dettes de la société conjugale.

» Ces objections, si spécieuses qu'elles soient, ont d'abord le défaut de constituer une critique qui n'aboutit pas. Quand on leur demande de se résumer et d'indiquer un système précis, une conclusion formelle, elles s'échappent, au contraire, dans des directions divergentes pour proposer autant de solutions contradictoires. Elles ont ensuite un autre défaut, et il est capital, celui de prendre pour base une erreur considérable. Elles s'attachent, en effet, au but final de la communauté stipulée, l'acquisition d'immeubles; mais ce but est insignifiant. La loi a permis aux parties de contracter toutes sortes de communautés, et celle qui nous occupe, tout le monde en convient, est parfaitement licite. Or ce n'est pas le but intéressé de la communauté qu'il faut voir pour déterminer son passif. Autrement, dans l'espèce, elle ne devrait acquitter que les dettes contractées à l'occasion des acquêts immobiliers, soit pour leur achat, soit pour leur conservation, prétention désertée par presque tous les jurisconsultes, et contraire, d'ailleurs, à l'essence des choses. Les dettes naissent de la vie et du fonctionnement de la communauté. Sans doute elle veut arriver à acquérir des immeubles, mais avant cette acquisition elle existe, elle se meut, elle agit, elle contracte; bref, la collaboration commune a son existence réelle et sa vie civile. Les époux n'ont pas dit seulement: «Les immeu»bles acquis constant le mariage seront com>>muns »; ils ont dit : « Il y aura collaboration >> commune avec les chances de perte et de >> Vainement dira-t-on que, dans cette admi>> gain», tant et si bien que, si la communauté nistration maritale, il y a un double intérêt et un n'avait pu réussir à faire des gains ou achats double résultat ; que, si le mari gouverne pour immobiliers, il serait pourtant impossible de la société, il gouverne aussi pour lui; que ses nier son existence et d'empêcher la femme ac- actes peuvent tendre non pas seulement à créer ceptant cette communauté mauvaise d'être sou- un actifà la société, mais aussi à créer un actif pumise à sa part des dettes de l'administration. rement personnel; que, s'il est difficile de spéLa communauté, considérée comme collabora cialiser chaque dette à raison du but pour lequel tion, existe indépendamment de son but réali-elle était contractée, il convient au moins, sinon sé. Elle a vécu pour atteindre ce but, mais si elle ne l'a point atteint, elle n'en a pas moins vécu, et elle a créé des charges qu'elle doit supporter. On se trompe fort quand on prétend assimiler la communauté conjugale réduite aux acquêts immobiliers à une société ordinaire formée dans le but d'acquérir des immeubles. Cette dernière société ne peut pas vivre sans remplir son but, ou bien elle se dissout; sa manière d'agir et de fonctionner est restreinte, et elle ne se manifeste légalement qu'autant qu'elle travaille à remplir sa condition constitutive, celle d'acquérir. Aussi les dettes sont faciles à déterminer et elles se rapportent toutes et directement au but social. Mais, dans la communauté conjugale, lorsqu'elle n'a pas de fonds réel, d'apport en biens ou valeurs, tout réside dans la commune collaboration, c'est-àdire dans la vie civile du ménage. L'acquisition de conquêts immobiliers n'est que le dernier terme de cette vie civile qui, avant d'y arriver, s'emploie à utiliser, à féconder la mise sociale. C'est à cette période active de la collaboration, qui se constitue d'une foule d'opérations et de transactions, qu'on retrouve la cause et l'origine des dettes de l'administration maritale, et

de les mettre toutes à la charge du mari, du moins de les répartir, proportionnellement,et sur le mobilier acquis pendant le mariage et sur les conquêts immeubles; qu'il faut ainsi concilier l'effet des deux stipulations de dotalité et de communauté; qu'autrement on tomberait dans cette évidente iniquité de trouver le mari enrichi par d'immenses valeurs mobilières, et laissant à la communauté le fardeau de dettes qui peut-être n'ont été que la conséquence de l'acquisition de ces valeurs.

>> Nous répondons qu'on substitue ici les tentations d'une équité trompeuse aux véritables règles du droit, qui, après tout, concordent avec la justice. Il est temps de revenir aux idées que nous émettions au début de cette discussion sur la nature de la convention de communauté restreinte aux acquêts immobiliers, écrits à côté de la stipulation du régime dotal. Nous ne saurions trop insister sur ce point essentiel, que les époux dotaux, et la loi avec eux, n'admettent en rien les effets civils de la collaboration commune. Ils ne peuvent pas supprimer le fait, mais il n'a aucune valeur légale. Ainsi, sous ce régime, malgré l'évidence des avantages que le ménage a retirés des soins, du travail et de l'é

conomie de la femme, il n'y a rien pour elle, | fonds social de la communauté restreinte est et tout reste au mari.- En quoi donc les époux cette collaboration de toute la vie, comment ont-ils dérogé à cet état des choses? Ont-ils par- voulez-vous que les dettes de communauté, tout et toujours relevé la collaboration à la hau- c'est-à-dire celles qui dérivent de l'administrateur d'un titre réel et lucratif pour tous deux?tion du ménage et de ses ressources, ne soient Non. En stipulant cette collaboration commune avec le but unique d'acquêts immobiliers, il est manifeste qu'ils l'ont reniée, repoussée, pour tout autre but que celui-là. Or on s'étonne de rencontrer le mari faisant main basse sur tous les acquêts meubles, et laissant néanmoins au passif de la communauté les dettes qu'il a contractées en administrant, tant pour lui-même que pour cette communauté. Mais qu'on y prenne garde. Légalement parlant, il n'y a eu ni collaboration ni administration commune au regard de ces acquêts mobiliers. C'est le mari dotal qui a agi, et non le chef de la communauté. Le contrat de mariage l'a voulu ainsi, et la femme, satisfaite de garantir sa fortune personnelle contre tous les hasards de l'administration maritale, a complétement effacé, abdiqué, sur ce point, ses droits de collaboration.- Les augmentations ou acquisitions de mobilier pendant l'union sont faites comme s'il n'existait aucune clause de

communauté.

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pas des dettes de communauté? - Le mari, diton, s'exonère de la sorte de payer les dettes que le régime dotal mettait à sa charge. Non. Sous ce régime pur et sans mélange, l'administration du ménage était legalement son administration, propre et personnelle. On change cela complétement. Les époux prennent cette administration depuis son premier jusqu'à son dernier jour, dans son ensemble et dans ses détails, non plus comme le fait individuel et exclusif du mari, mais comme le fait d'un gérant social; et, quel que soit le but final de la société, ils veulent que cette administration de la vie commune soit le moyen de la société, comme la collaboration en sera le fonds. Il est donc impossible que, pour quelque moment que ce soit, vous parveniez. dans les actes d'administration et de collaboration, à donner au mari, au point de vue spécial- du débat, une autre qualité que celle d'administrateur du ménage associé. Îl achète du mobilier, et ce mobilier pourra lui rester >> Inutilement essaie-t-on d'insister en ré- propre. Qu'importe? les époux ont eu le tort, si clamant alors contre le mari dotal l'exécution vous voulez, de ne reconnaître que des acquêts même des règles de ce régime. C'est lui seul, immeubles pour actif définitif de la communaucontinue-t-on, qui supporte les charges, puis- té; est-ce que cela altère le moins du monde qu'il a tous les bénéfices. Il est donc conforme leur convention fondamentale d'associer leurs à la loi et à l'équité qu'il paye, dans les det efforts et leurs actes de collaboration? Est-ce que tes, une part proportionnelle à la valeur du mo- cela modifie et le fonds social et son administrabilier dont il s'est enrichi. On tombe en- tion nécessaire? Sous le régime dotal, la femme core ici dans une grave erreur. Qu'arriverait-il ne revendiquait aucun des résultats de cette addonc si le mari n'avait aucunement augmenté ministration; les bénéfices et les charges ne son mobilier pendant le mariage et qu'il y eût pouvaient donc concerner que le mari. Maintedes dettes d'administration? Lui en demande- nant elle veut que cette administration lui prorait-on sa part, sous le prétexte que le mari dotal fite; elle s'empare, en ce sens, d'un moyen d'acdoit payer les dettes du ménage? Si non, quelle quérir que le régime dotal réservait au mari est donc cette règle de droit qui fléchit et tombe seul, et, si restreint que soit le but de la comà chaque pas, et qu'on n'exhume que quand il munauté établie, elle convient avec lui, par une y a des acquêts mobiliers? Et dans quelle clause dérogatoire, qu'il y aura collaboration perplexité serait-on placé, si, en présence de et administration communes. Donc cette comdeties considérables, il n'y avait ni augmenta-munauté absorbe en entier l'une et l'autre dans tions mobilières ni immeubles acquêts. Mais allons droit à l'erreur signalée. D'une part, il est bien entendu qu'on n'a à se préoccuper en rien ni des mots ni des effets de communauté et de collaboration en face d'acquisitions mobilières faites par le mari : le régime dotal adopté y résiste; lui seul gouverne ce fait. D'autre part, la collaboration commune, exceptionnellement convenue, est une et indivisible. Peu importe son but restreint, cela est démontré; elle est ou elle n'est pas dans l'administration du ménage: il faut choisir. Nul n'oserait soutenir qu'on peut scinder cette collaboration, la diviser, la répartir en catégories d'actes et de temps. Lorsqu'on l'établit dans un contrat où le régime dotal même a été stipulé comme principe général, on l'établit sans distinction ni division; on l'établit comme elle est, et ni plus ni moins que dans toute autre communauté; elle consiste, dussions-nous le répéter encore, dans la mise en commun des efforts de chacun et des résultats de la vie civile des époux. Eh bien! si le

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son mode d'existence et de fonctionnement. Donc, encore, les dettes qui, dans le langage du droit, sont dettes d'administration maritale, retombent aussi en entier sur cette communauté.

» Au surplus, rien ne démontre mieux l'exactitude légale de ce système que l'impuissance à laquelle est réduite l'opinion que nous combattons, celle de la proportionnalité de contribution aux dettes entre l'actif immobilier de la communauté et le mobilier acquêt du mari. Cette opinion, on le sait, est la seule qui soit aujourd'hui sérieusement soutenue, car la prétention ou de faire payer toutes les dettes d'abord par le mari, ou de ne laisser à la communauté que les dettes spéciales aux conquêts immeubles effectués, ne se défend plus et ne souffre pas l'examen. Or, dans la thèse de la répar tition proportionnelle, nul ne conteste que les dettes de l'administration du ménage et de la vie commune ne soient bien dettes de communauté. Pourtant ce sont ces dettes qu'il s'agit de rejeter, pour une part, à la charge du mo

vérité, sortir, pour la liquidation de cette communauté, tout entière dans les intérêts de la femme, pourquoi sortir de ses termes et de ses éléments naturels? Pourquoi déroger à la règle qui veut que toute société n'ait d'actif vrai qu'après le paiement intégral du passif? - On se récrie à tort, et c'est là notre dernier mot, sur la faculté illimitée que possède le ma

bilier acquêt du mari. Que l'équité semble ainsi réclamer, nous l'accordons pour un moment; mais on viole le droit d'une manière flagrante. Comment expliquer légalement cet inconcevable résultat de mettre une dette de communauté ailleurs que dans le passif de cette communauté? Comment, quand il y a un actif, quand il n'est pas épuisé, aller prendre, au nom de la communauté, un bien propre duri d'administrer moins dans l'intérêt de la somari? Comment avouer que la dette de l'administration conjugale, dette commune, qui a désormais son caractère fixe, inviolable, devient en même temps exclusivement une dette du-mari? Comment concilier la certitude que le mobilier acquis pendant le mariage est un propre du mari avec l'opération singulière qui l'assimile à un propre de communauté, et le grève des dettes de la société?

Toutes ces contradictions et ces impossibilités viennent, on nous permettra de le répéter, en nous résumant, de ce qu'on n'a pas assez rigoureusement précisé le véritable élément de solution. Le fait, dans l'espèce que nous examinons, est que les époux, par dérogation au régime dotal, ont considéré le ménage comme une association d'intérêts dans le but d'arriver à des acquisitions immobilières. Le droit est qu'une pareille association met l'existence commune et tous les actes de son administration aux périls et risques de la communauté, indépendamment du but lucratif à réaliser; que, désormais, l'administration du mari, sans aucune distinction | possible, devient l'administration sociale; et que, s'il y a un actif créé par ses soins et ses ef forts, cet actif doit supporter exclusivement les dettes de l'administration dont il est le produit. » Et l'équité, loin de repousser cette solution, la consacre. Il serait inique, en effet, que le mari à qui la femme n'a pas voulu laisser la propriété personnelle de l'administration du ménage, et qui devient son associé dans une communauté dont le seul fonds est la collabotion commune, fùt obligé, en présence d'un actif, de contribuer, pour les dettes, sur un bien que le contrat de mariage déclare être sa propriété personnelle. Il serait inique, parce qu'il a plu à la femme d'établir une communauté particulière, pour faire valoir sa collaboration, où elle ne risque pas une obole de sa fortune présente et à venir, où elle ne court que la chance de gagner, d'accorder que l'épouse pourra exiger que le paiement des dettes communes ne se fasse pas en entier sur l'actif commun, et qu'il atteigne directement le propre de l'époux, pour faire sa part plus belle. Il serait inique d'aller au delà de l'intention légale et sincère des époux. La femme a d'abord recouru au régime d'égoïsme, au régime dotal. Elle a renoncé aux ellets de la commune collaboration, aimant mieux ne rien gagner en ménage que d'exposer la moindre parcelle de ses biens présents et à venir. Puis, après cette sécurité acquise, elle a proposé au mari acceptant de relever légalement cette collaboration commune que le régime dotal ne connaissait pas, pour en faire un moyen personnel de bénéfices, jamais de périls ou de pertes. Pourquoi donc, en

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ciété que dans le sien propre, et on s'effraie énormément de ce qu'il pourra consacrer tous les gains et épargnes à l'achat de mobilier, renonçant exprès à l'acquisition d'immeubles, et négligeant volontairement de payer les dettes contractées. Ceci n'a aucune force, aucune valeur devant la loi. Les sociétés malheureuses d'une mauvaise administration n'en sont pas moins obligées. La loi a voulu que le mari fût chef de l'administration sociale, et, dans toutes les espèces de communauté, sa volonté peut en modifier considérablement les résultats. Tel est le danger de ce régime à côté de ses avantages. Il faut l'admettre ou le repousser. Mais lorsque les époux l'ont choisi en pleine connaissance de cause, aucun d'eux n'a le droit de s'en plaindre. »

Du 3 AOUT 1852, arrêt C. cass., ch. civ., land av. gén. (concl. conf.), Ripault et Huet av. MM. Bérenger prés., Delapalme rapp., Rou

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« LA COUR (apr. délib. en ch. du cons.); Sur le premier moyen :- - Attendu qu'aux termes du contrat de mariage contracté entre les époux Vimard, il a été stipulé qu'il y aurait entre eux, indépendamment des dispositions par lesquelles ils s'étaient soumis au régime dotal, une société d'acquêts immobiliers relativement aux immeubles qui, pendant le mariage, seraient acquis par le mari; Que, malgré la coexistence du régime dotal, une telle société n'en constituait pas moins entre les époux, et dans les limites déterminées, une communauté conventionnelle réduite aux acquêts immobiliers: - Que, d'après les dispositions de l'art. 1581 C. Nap., lorsque les époux, en se soumettant au régime dota!, stipulent néanmoins une société d'acquêts, les effets de cette société d'acquêts sont réglés suivant ce qui est dit aux art. 1498 et 1499; Que ce principe s'applique, par une conséquence nécessaire, à la communauté réduite, dans ce cas, aux acquêts immobiliers; qu'elle constitue, en effet, une véritable communauté conventionnelle, et que, d'après les dispositions de l'art. 1528, cette communauté, bien que réduite, reste soumise aux règles de la communauté légale ; — Qu'ainsi, elle est tenue des dettes contractées par le mari durant son existence, et qu'elle en est tenue sur les biens dont elle se compose; Que l'effet de la stipulation du contrat de mariage qui a établi la communauté réduite aux acquêts immobiliers a été d'attribuer au mari la propriété de tout son mobilier présent et futur, et de ne considérer comme acquêts que les immeubles achetés durant le mariage; Que, dès lors, au regard de la femme, et sauf, bien entendu, les droits des

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