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que le tribunal, suivant l'usage constant et les besoins de la pratique, a repoussé la demande de l'appelant.

Du 4 JUILLET 1853, arrêt C. Paris, 3e ch., MM. Delahaye prés., Berville 1er av. gén. (concl. conf.), Krauemptens et Blondel av.

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BELLAMY ET AUTRES

C. DAME DE LA VILLE-LEROUX.

Le 19 nov. 1791, contrat de mariage passe a Cayenne entre les sieur et dame Beauregard; les époux se placent sous le régime de la com<< LA COUR; Considérant que, par les munauté tel qu'il était établi par la coutume de offres réelles faites par Rey et acceptées par Paris, et stipulent que le survivant d'eux aura la l'huissier porteur de pièces, ainsi le contotalité des biens dépendant de la communauté, que state son procès-verbal du 4 oct. 1851, toutes en usufruit pour les immeubles, en pleine proles condamnations, en principal, intérêts et priété pour les meubles, sauf toutefois la fafrais, prononcées par le jugement du 8 juil. l'avisera, d'une somme de 10,000 fr., laquelle, culté, pour chacun d'eux, de disposer comme il 1851, ont été éteintes; Considérant que ce jugement n'a pu prononcer, et n'a pas, en efà défaut de disposition, rentrera dans la donafet, prononcé la condamnation aux frais des action faite au survivant.- Le 5 juin 1810, le sieur tes de poursuite faits pour son exécution, actes Beauregard fit à sa nièce, la dame de la Villequi n'existaient pas au moment où il a été renLeroux, une première donation, en biens meudu; qu'ainsi il n'a pu servir de base aux pourbles et immeubles dépendant de la communausuites exercées pour le paiement de ces frais; té, d'une valeur de 22,000 fr. environ; puis, le Que, si ces actes de poursuite ont été taxés 1er avril 1816, il lui fit, mais cette fois avec le par un juge du tribunal de première instance, concours de la dame Beauregard, une seconde le règlement de ce magistrat n'a aucune force donation, de la somme de 30,000 fr.- Il mouexécutoire; que, s'il pourrait autoriser l'emploi rut sans enfants, le 13 mai 1842, après avoir inet le paiement de ces frais dans une distribu-stitué la dame de la Ville-Leroux pour sa légation de deniers, il ne saurait servir de titre pour avait recueilli le bénéfice du don mutuel stipulé taire universelle. La dame Beauregard, qui diriger des poursuites d'exécution... dans le contrat de mariage, mourut elle-même un an après.

FIRME. >>

IN

-

CASSATION (16 février 1852). COMMUNAUTÉ, DONATION, IMMEUBLES, RAPPORT DE LA VALEUR, CARACTÈRE IMMOBILIER, CONTRAT DE mariage, réserve de dispoSER, EXCES, CONSENTEMENT. Lorsque, le mari ayant disposé indúment, à titre de donation, d'immeubles dépendant de la communauté (1), la donation a été annulée, et le donataire condamné à restituer les immeubles ou leur valeur, la somme d'argent que celui-ci rapporte, à défaut des immeubles par lui aliénés, est représentative desdits immeubles, et, à ce titre, doit être comprise dans la masse immobilière de la communauté. -Dès lors, la femme survivante, à laquelle les stipulations du contrat de mariage altribuaient la totalité des meubles en pleine propriété, ne peut prétendre un droit exclusif à cette som-es me, qui, faisant partie de l'actif immobilier, doit être partagée entre elle et les ayant-droit de son mari, comme les autres immeubles de la communauté. La clause d'un contrat de mariage par laquelle les époux, en se faisant donation mutuellement, pour le survivant, de la totalité de leurs biens, se réservent la faculté de disposer d'une somme déterminée, ne fait pas obstacle à la donation d'une somme supérieure en faveur d'un successible du mari, si la femme a concouru avec le mari à cette donation, et si, en outre, la donation n'est pas excessive, eu égard à la fortune des époux: il n'y a là aucun changement aux stipulations du contrat de mariage (2).

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Alors out eu lieu la liquidation et le partage époux. Les sieur et dame Bellamy et autres, de la communauté entre les héritiers des deux héritiers de la dame Beauregard, ont soutenu d'abord que la première donation, faite par le sieur Beauregard, excédant de beaucoup la somservé la libre disposition, devait être réduite. me de 10,000 fr. dont chaque époux s'était réEt en effet, un jugement du tribunal de Nantes, suivi d'un arrêt confirmatif de la Cour de Rennes, du 22 juil. 1846, ordonna que la dame de la Ville-Leroux rapporterait les biens à elle donnés le 5 juin 1810, ou leur valeur, sous la déduction de la somme de 10,000 fr. - Le rapport eut lieu, en exécution de cette condamnation; seulement, il ne fut effectué en nature que pour partie, la dame de la Ville-Leroux immeubles qui lui avaient été donnés. ayant aliéné jusqu'à concurrence de 12,400 fr. Ce premier résultat obtenu, les sieur et dame Bellamy et autres soutinrent 1. que cette somme de 12,400 fr., constituant désormais une tribuée en totalité, comme faisant partie du don valeur purement mobilière, devait leur être atmutuel stipulé dans le contrat de mariage des époux Beauregard, et dont la dame Beauregard avait recueilli le bénéfice, comme ayant survécu à son mari; 2° que la donation faite par les deux époux conjointement, le 1er avril 1816, le-Leroux, devait être annulée comme contraire d'une somme de 30,000 fr., à la dame de la Vilà la stipulation du contrat de mariage des donateurs, stipulation qui laissait à chacun d'eux la libre disposition d'une somme de 10,000 fr. seulement. A cette double prétentionļla dame valeur des immeubles était de même nature que de la Ville-Leroux opposa, d'une part, que la les immeubles eux-mêmes, et par conséquent que la somme de 12,400 fr. faisait partie de l'ac

tif immobilier, dont la veuve survivante n'avait eu que l'usufruit, aux termes de son contrat de mariage; d'une autre part, que, la dame Beauregard ayant concouru à la donation, ses héritiers ne pouvaient venir mettre les effets de cette donation en question, avec d'autant plus de raison que la libéralité était fort modique eu égard à la fortune des époux Beauregard.

Le 27 mars 1849, jugement du tribunal de Nantes qui accueille pleinement le système de défense présenté par la dame de la Ville-Leroux; puis, sur appel, le 14 mars 1850, arrêt confirmatif de la Cour de Rennes.]

qu'elle porte atteinte à ses droits. Lebrun et Pothier sont d'accord sur cette faculté que donnait à celle-ci la coutume; ils ajoutaient seulement que la donation n'était pas nulle du mari au donataire, qui conservait la propriété de la partie de l'immeuble qui tombait au lot du mari. M. Troplong, dans son Commentaire sur le contrat de mariage, dit également que, d'après le Code, conforme en cela à la coutume, la femme a le droit de revendiquer sa moitié, même contre le donataire, et de le contraindre au partage: « Toutefois, ajoute M. Troplong, si la fem» me le préfère, elle pourra se contenter de >> demander récompense à la communauté; >> mais ceci dépend de sa volonté : l'action ré» vocatoire est dans son droit, elle peut l'exer>> cer contre une donation frauduleuse et con

Pourvoi en cassation par les époux Bellamy et autres.-1° Violation des art. 1437 et 529 C. Nap., et fausse application de l'art. 860 mème Code, en ce que le rapport auquel la défenderesse éventuelle était condamnée avait été attri-» bué à l'actif immobilier de la communauté, alors que, d'après l'ancien comme d'après le nouveau droit, les donations faites par le mari aux dépens de la communauté ne donnent lieu qu'à une récompense, c'est-à-dire à une créance purement mobilière, en faveur de la communauté.

2o Violation de l'art. 1395 C. Nap., en ce qu'une donation faite par le mari contrairement aux stipulations du contrat de mariage a été validée sous prétexte que la femme avait concouru à ladite donation, et en ce que par là l'arrêt avait sanctionné un changement apporté pendant le mariage aux conventions qui en réglaient les conditions civiles.

M. le conseiller rapporteur Hardoin a présenté, sur ces deux moyens, les observations qui suivent :

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Premier moyen. «Le rapport que doit faire à la communauté la dame de la Ville-Leroux, héritière du sieur de Beauregard, du montant de la donation en immeubles qui lui a été faite par ce dernier, sera-t-il fait à la masse mobilière ou à la masse immobilière? Voilà la difficulté qu'il s'agit de décider, et vous avez déjà reconnu l'intérêt qui s'attache à sa solution pour l'une et l'autre des parties : les demandeurs en cassation, représentants de la dame de Beauregard, laquelle, en qualité de donataire du mobilier du mari en toute propriété et des immeubles en usufruit, auraient un droit exclusif au montant du rapport ordonné s'il tombe dans le mobilier de la communauté, puisque leur auteur a survécu au donateur, et qu'ils peuvent revendiquer tout ce qu'il y a de mobilier dans la succession de celui-ci ; si la valeur à rapporter sort nature d'immeubles, les deux parties y ont un droit égal comme à un bien de communauté. — On pourrait ajouter, ce me semble, aux raisons que donne le pourvoi pour que la récompense due par l'héritière du mari soit considérée comme mobilière, une considération de quelque valeur : il est certain que, lorsque le mari donnait un bien de communauté à l'un de ses héritiers, cette donation était réputée, aux termes de l'art. 225 de la coutume de Paris, faite en fraude des droits de la femme, quant à la moitié qui revenait à celle-ci dans l'immeuble donné; de là, pour la femme, le droit de faire annuler la disposition faite par le mari, en tant

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tre ceux qui en ont profité. » Il y a plus : le droit qu'a la femme de faire tomber la donation des biens de communauté consentie par son mari a été reconnu dans la cause le jugement du 19 juill. 1845, confirmé par la Cour de Rennes le 22 juill. 1846, a prononcé la nullité de la donation faite par le sieur de Beauregard à son héritière, la dame de la Ville-Leroux, comme faite en fraude des droits de la dame de Beauregard. La dame de la Ville-Leroux pourrait donc être obligée de rapporter en nature les immeubles à elle donnés, quelle que fût la disposition qu'elle en eût faite. Mais le jugement et l'arrêt dont il vient d'être question l'ont autorisée, par une disposition formelle, à faire raison à la communauté de la valeur des immeubles donnés; cette alternative a été acceptée par les héritiers de la dame de Beauregard, et c'est d'après l'option de la dame de la Ville Leroux de représenter la valeur des biens que le notaire a préparé son travail, sans réclamation des parties sur ce point. Quel sens actuellement donner à ces mots faire raison de la valeur d'un immeuble qu'on ne rapporte pas en nature? N'est-ce point en représenter le prix, la valeur en argent? De ce choix donné au mari ou à son héritier de rapporter le bien ou de faire raison de sa valeur ne résulte-t-il pas qu'à un immeuble se trouve substituée une somme qui le représente, par conséquent une valeur mobilière, puisque aucun texte de loi ne dit que cette somme, dont le paiement à la communauté suffira pour libérer le mari, prendra le caractère d'immeuble.- Quoi qu'il en soit de ces arguments en faveur du pourvoi, vous n'oublierez pas qu'il s'agit de déterminer les effets de conventions matrimoniales contractées sous l'empire de la coutume de Paris, qu'il s'agit donc avant tout de constater le vœu de la coutume et de constater l'application que, dans l'usage, on faisait de ses dispositions. Or, quel interprète plus sage, quel guide plus sûr en matière de communauté, pourrions-nous choisir que Pothier? Voici comment il s'exprime sur le cas que présente notre espèce: « Les dona» tions faites par le mari à son héritier des biens » de la communauté ne peuvent porter aucun » préjudice à la femme, et elles doivent en con» séquence être censées faites sur la seule part >> du mari dans les biens de la communauté.

Ainsi, le don fait à la dame de la Ville-Leroux ne saurait être sujet à rapport ou annulé comme contraire aux règles de la communauté. - Serait-ce comme violant les clauses du contrat de tuel, ainsi que le prétendent les demandeurs, que la donation de 30,000 fr. serait rapportable? Mais, indépendamment de l'opinion de Lebrun, qui pense que l'instituant peut, avec le concours de l'institué, excéder la réserve d'une somme qui n'est point excessive (et la Cour d'apappréciant souverainement le rapport de la somme donnée avec la fortune des deux époux, déclare qu'il n'y a point excès dans la somme donnée), indépendamment, disons-nous, d'une auterité si imposante, considérez la position particulière où se trouvent placés les héritiers de la femme donatrice. L'épouse commune peut s'engager avec son mari; si elle peut exiger de celui-ci qu'il la garantisse de l'effet des

>> C'est pourquoi au partage des biens de la serait donc, a fortiori, considérée par eux com>> communauté qui doit se faire après sa disso-me inattaquable si la femme était donatrice. >>lution, le mari ou ses héritiers doivent en >> faire récompense en rapportant par fiction, à » la masse de la communauté, le montant des>> dites donations, lequel doit être précompté » sur la part du mari. » — Il est évident, d'a-mariage, comme incompatible avec le don muprès ces expressions, que ce que rapporte fictivement le mari c'est l'immeuble objet de la donation; que ce qui est précompté sur sa part, c'est encore l'immeuble; qu'ainsi il ne rapporte en aucun cas une valeur mobilière. De là aussi ce motif que nous trouvons dans l'arrêt attaqué, c'est qu'on doit opérer pour la liqui-pel, dation comme si la donation n'avait point eu lieu, comme si les biens sortis de la communauté s'y trouvaient encore; et que, pour concilier autant que possible tous les intérêts, respecter les faits accomplis, et ne pas susciter de nouveaux procès, on place le bien donné dans le lot du mari, qui indemnise les héritiers de la femme en moins prenant dans la masse.-Pourquoi d'ailleurs la disposition illégale, fraudu-obligations qu'elle a contractées avec les tiers, leuse, par le mari, d'un bien qu'il lui était défendu de donner à son héritier, aurait-elle pour effet de changer la nature de l'indemnité qu'il doit à sa femme? La loi veut que, dans ce cas, il récompense la communauté, qu'il restitue ce qu'il a soustrait de la portion revenant à sa femme pourquoi serait-il dispensé de représenter l'immeuble, ou du moins l'équivalent de l'immeuble, une valeur qui n'ait point changé de nature? La raison parfe ici comme la coutume et la doctrine. »

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son engagement la lie à l'égard des tiers. Elle ne peut, comme la femme dotale, demander la nullité de l'obligation qu'elle aurait souscrite et qui affecterait ses biens dotaux. - Il suit de la que la donation qu'a faite la dame de Beauregard à la dame de la Ville-Leroux est valable à l'égard de celle-ci, comme le serait une obligation prise par la femme de lui payer une somme quelconque. Que la dame de Beauregard ait le droit de réclamer de son mari une indemnité pour cette donation qu'il lui a fait consentir, on peut l'admettre en principe; mais il se trouve que le mari est représenté ici par la donataire elle-même: c'est la dame de la Ville-Leroux qui serait obligée de garantir la dame de Beauregard ou ses représentants du recours que ceuxci exerceraient contre elle. Ces deux actions, comme on le voit, se neutralisant, les demandeurs ne pourraient agir contre elle sans être repoussés par une exception insurmontable. La donation de la dame de Beauregard semble donc devoir être respectée, avec d'autant plus de raison que, comme le remarque l'arrêt, ayant survécu à son mari et recueilli le mobilier en toute propriété, elle se trouve avoir donné seule les 30,000 fr., et ses représentants n'ont rien à réclamer du mari. »

Deuxième moyen. - « On peut considérer la donation dont s'agit relativement à la communauté et par rapport au don mutuel que se sont fait les deux époux par leur contrat de mariage.-La donation de 30,000 fr. à la dame de la Ville-Leroux est-elle nulle comme contraire aux règles de la communauté? Est-elle du moins sujette à rapport?-Il me semble évident qu'elle ne saurait être frappée de nullité que par ce motif qu'elle était censée faite en fraude des droits de la femme, puisque la donataire était l'héritière présomptive du mari donateur. Mais, ainsi que le rappelle la Cour de Rennes, tous les auteurs qui ont écrit sur la coutume de Paris, entre autres Lebrun et Pothier, professent cette opinion, adoptée dans la pratique, que la donation faite par le mari de quelques biens de la communauté à ses héritiers présomptifs en ligne collatérale (car il y avait exclusion pour les enfants) n'était point faite en fraude, et ne don-gén., Fabre av. nait lieu à aucune récompense, lorsque la fem- << LA COUR; Attendu, sur le premier me y avait consenti, qu'elle avait parlé au con- moyen, que la disposition de l'arrêt attaqué qui trat et donné conjointement avec son mari. M. ordonne que le rapport dû par la dame de la Troplong, qui examine la question d'après les Ville-Leroux pour le don de 1810 sera fait à dispositions de l'art. 1422 du Code, partage en- la masse immobilière de la communauté Beautièrement l'avis des deux éminents jurisconsul-regard n'est que l'exécution de la chose jugée que j'ai nommés. Et vous remarquerez qu'aux yeux de M. Troplong et de Pothier, le consentement de la femme, sa participation à la donation, a pour effet de valider la disposition faite par le mari, non seulement d'un effet mobilier appartenant à la communauté, mais même d'un immeuble : la donation d'une somme d'argent

Du 16 FÉVRIER 1852, arrêt C. cass., ch. req., MM. Mesnard prés., Hardoin rapp., Sevin av.

par l'arrêt du 22 juil. 1846, lequel, après avoir annulé ladite donation, en ce qu'elle excédait 10,000 fr., disait que la donataire rapporterait les biens à elle donnés par le sieur de Beauregard; que la Cour d'appel a décidé avec raison que la qualité de la créance est déterminée par la nature de la chose due, nonobstant

la faculté accordée au débiteur de payer en une
autre valeur; qu'ici, la créance était immobiliè-
re, puisque la chose à rapporter consistait en
immeubles; que cette interprétation donnée à
la chose jugée en 1846, par l'arrêt attaqué, n'a
rien de conforme à la loi;
que

» Sur le deuxième moyen : Attendu qu'il est constant, d'après l'arrêt attaqué, que la donation de 30,000 fr. a été faite à la dame de la Ville-Leroux conjointement par les sieur et dame Beauregard; que, de plus, ce don n'était pas excessif, eu égard à la fortune des deux époux; que cette double circonstance suffit pour que l'épouse ne puisse attaquer la libéralité à la quelle elle a concouru ; qu'en le jugeant ainsi, la Cour d'appel n'a porté aucune atteinte aux principes de la communauté; - REJETTE, etc.»

CASSATION mars 1852).

CHOSE JUGÉE, SAISIE IMMOBILIÈRE, BIENS DO-
TAUX, DISTRACTION, TESTAMENT, DONA-
TION PAR CONTRAT DE MARIAGE, OPTION,

DETTES, SURVIVANT, DOT, ATTRIBU-
TION, CRÉANCiers, ordre.

L'arrêt qui, en rejetant la demande en nullité d'une saisie pratiquée sur des immeubles dont quelques uns sont dotaux, accorde cependant à l'héritier de la femme un délai pour faire déterminer la portion des biens saisis qui pourra être distraite pour représenter les biens dotaux par lui recueillis, ne contient point la décision implicite que la distraction doive être faite, et ne met pas obstacle, comme ayant à cet égard l'autorité de la chose jugée, à ce que la demande en distraction desdits biens formée ultérieurement par cet héritier soit rejetée.

Le donataire contractuel sous certaines conditions auquel le donatour avait déjà, par testament antérieur, légué tous ses biens purement et simplement, peut, bien qu'il se soit fait envoyer en possession, après le décès du

testateur, en exécution de son testament, être considéré, non comme ayant renoncé à l'in stitution pour s'en tenir à sa qualité de légataire, mais comme s'étant au contraire con

L'héritier ou le donataire de deux époux, tenu des dettes de tous les deux, qui, sur la poursuite immobilière des créanciers, demande la distraction de la dot de la femme, peut, sans qu'il en résulte aucune violation de loi, être renvoyé à l'ordre pour y faire valoir ses droits, sans qu'il y ait lieu de liquider préalablement lesdits droits, et de lui faire l'attribution de ce qui lui revient.

COISSIN C. QUESNEL ET AUTRES.

Les époux Camus étaient mariés sous le régime dotal avec stipulation d'une communauté d'acquêts. Le 4 mars 1837, ils avaient fait l'un et l'autre, mais chacun séparément, un testament olographe par lequel ils se léguaient respectivement l'usufruit de leurs biens, et en léguaient la nue propriété à la demoiselle Neveu, nièce de la darse Camus. Quelques mois après, le 18 déc. 1837, la demoiselle Neveu se maria avec le sieur Coissin. Les époux Camus intervinrent au contrat de mariage, et firent donation à la future de tous leurs biens présents et à venir, sous la réserve de l'usufruit pendant leur vie, et imposèrent à la donatrice la condition d'acquitter, au décès du survivant d'eux, toutes les sommes dues par l'un et par l'autre, ou par le survivant seulement. D'ailleurs, la future se constituait en dot tous ses biens présents et à venir, en y comprenant ceux qui faisaient l'objet La dame de la donation des époux Camus. Camus est décédée le 24 déc. 1812, et aussitôt la dame Coissin s'est fait envoyer en possession du legs universel contenu en sa faveur dans le testament olographe fait par la défunte le 4 mars 1837. Les sieur et dame Coissin ont depuis, par acte du 1er sept. 1845, souscrit une obligation de 4,000 fr. au profit de la dame Quesnel, à laquelle ils ont consenti une hypothèque sur un de leurs immeubles, situé à Darnetal. Le sieur Camus intervint comme caution, et affecta les biens qui, au moment de son décès, devaient être la propriété de la dame Coissin, aux

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termes de l'institution contractuelle du 18 déc.

1837. A quelque temps de la, l'immeuble sur lequel le sieur Coissin avait donné une hypothèque à la dame Quesnel fut mis en vente, et adjugé, le 22 déc. 1846, au sieur Camus. - L'ordre était ouvert pour la distribution du in-prix lorsque, le 10 déc. 1847, le sieur Camus est décédé. Alors, la dame Coissin, légataire universelle, aux termes du testament olographe du 4 mars 1837, se fit envoyer en possession, comme, cinq ans auparavant, au décès de la dame Camus, elle s'était fait envoyer en possession du legs à elle fait par cette dame.

formé à l'intention du donateur de substituer
l'institution au legs, et, dès lors, être con-
damné à exécuter les conditions de ladite
stitution, alors que, dans un acte d'emprunt
fait ultérieurement en sa présence par le do-
nateur, celui-ci a déclaré, sans qu'il l'ait con-
tredit, qu'il était tenu des dettes dudit dona-
teur en vertu de l'institution, assurance sur
laquelle seulement le prêt a été consenti.
Dans le cas de donation par contrat de mariage
faite par deux époux, en faveur de l'un des
futurs, de tous leurs biens présents et à venir,
La condition mise par les donateurs que le do-
nataire acquittera, au décès du survivant

d'eux, la totalité des dettes contractées par
T'un et l'autre ou par le survivant seulement,
n'a rien de contraire à la disposition de l'art.
1086 C. Nap. (1).

Dans ces circonstances, la dame Quesnel, qui d'ailleurs produisait à l'ordre, après avoir lait commandement à la dame Coissin, comme représentant le sieur Camus, d'avoir à payer le montant de l'obligation du 1er sept. 1845, cautionnée par ce dernier au moyen de l'hy-Pothèque conférée sur tous ses biens, fit saisir des immeubles dépendant de la succession La dame Coissin des sieur et dame Camus.

-

(1) V. Rép. gén. Journ. Pal., vo Donation par con- prétendit alors que, les époux Camus ayant été mariés sous le régime dotal, il y avait lieu de trat de mariage, nos 439 et suiv.

surseoir à la saisic, qui ne pouvait atteindre les immeubles dotaux, jusqu'à ce que le partage des successions eût distingué les biens du mari de ceux de la femme, c'est-à-dire ceux qui pouvaient être aliénés de ceux qui ne pouvaient pas l'être. Mais par arrêt du 8 août 1850 (t. 2 1852, p. 324), la Cour de Rouen rejeta cette prétention, jugea que la saisie était valable, et accorda seulement un délai à la dame Coissin pour faire déterminer par les voies de droit qu'elle jugerait convenables la portion des immeubles saisis qui pourrait être détachée de la totalité pour représenter la valeur des biens dotaux par elle recueillis.

nent est sans valeur en tout ce qui est incompatible avec cette donation; Attendu qu'elle a été faite conjointement par les sieur et dame Camus; qu'aux termes de l'art. 1086, ils ont pu y mettre toutes conditions dont l'exécution dépendrait de la volonté de tous deux ou d'un seul; - Attendu que le § 7 de cette donation porte que la donataire devra payer au décès du survivant toutes les dettes des donateurs, contractées par tous deux ou par un seul; — Attendu que, si cette clause devait s'entendre seulement des dettes contractées par l'un des donateurs du vivant de l'autre, elle aurait été inutile, puisqu'ils avaient individuellement le droit de s'obliger sur les biens donnés; Attendu que cette condition de payer après le décès du survivant indique assez que, jusqu'à ce moment, tous les biens donnés restaient indistinctement grevés des dettes que le survivant pourrait contracter; Par ces motifs, déclare les époux Coissin mal fondés dans leur demande en distraction; dit qu'il n'y a lieu à expertise et partage; ordonne en conséquence que les poursuites de saisie immobilière commencées seront continuées et mises à fin sur la totalité desdits immeubles. »

Sur l'appel de la dame Coissin, le 13 fév. 1851, arrêt de la Cour de Rouen qui confirme, en adoptant les motifs des premiers juges.

Pourvoi en cassation par la dame Coissin. 1 Violation de l'art. 1351 C. Nap. et des principes sur l'autorité de la chose jugée, en ce que l'arrêt avait rejeté une demande en distraction fondée sur la dotalité de partie des biens saisis, en présence d'une décision judiciaire qui avait accordé un délai à la demanderesse pour qu'elle pût déterminer les biens à distraire, ce qui contenait la décision implicite que la distraction devait être faite.

Alors la dame Coissin, forcée d'abandonner sa demande en sursis, s'est retranchée derrière une demande en distraction. Invoquant encore l'inaliénabilité des biens dotaux, elle a soutenu que deux lots devaient être formés par experts des biens composant la succession des sieur et dame Camus, pour, l'un de ces lots, celui de la dame Camus, être distrait de la saisie, comme composé de biens inaliénables, et être attribué à la dame Coissin, représentant de la femme dotale, et l'autre rester attribué à la succession du sieur Camus. Mais la dame Quesnel a opposé la condition mise à l'institution contractuelle du 18 décembre 1837, et soutenu, en conséquence, que l'instituée, étant tenue de payer les dettes qui existeraient au décès du survivant des donateurs, ne pouvait prétendre à la donation qu'autant que préalablement elle acquitterait la dette du sieur Camus envers la dame Quesnel. La dame Coissin répliquait que l'arrêt du 8 août 1850 lui avait réservé le droit de faire déterminer les biens dépendant de la succession de la dame Camus, à l'effet de les soustraire à une saisie qui ne pouvait les atteindre en raison de leur inaliénabilité, et qu'il n'était pas possible de lui refuser les moyens d'effectuer cette détermination sans méconnaître l'autorité de la chose jugée; que d'ailleurs elle agissait aux droits des époux Camus, non point en vertu de l'institution contractuelle, mais en vertu des testaments du 4 mars 1837, par lesquels elle était instituée légataire pure et simple, sans condition ni ré- 4o Violation de ce même art. 1086, en ce que, serve; enfin que, dût-on n'avoir égard qu'à l'in-même en donnant effet à la donation contractuelstitution contractuelle, la condition qui y était apposée devait s'entendre en ce sens que chaque donateur était maître de grever de dettes les biens par lui donnés, mais qu'on ne pouvait en induire cette conséquence exorbitante que le survivant des donateurs aurait pu enlever au donataire tout ou partie de la libéralité à lui faite par l'autre donateur.

Le 21 nov. 1850, jugement du tribunal de Rouen ainsi concn:

<< Attendu que le jugement de première instance et l'arrêt de la Cour ont laissé dans leur intégrité les moyens que le saisissant voudrait opposer à la demande en distraction aujourd'hui formée par la dame Coissin; Attendu que le testament invoqué par la dame Coissin est du 4 mars 1837; que la donation contractuelle qui est soumise au jugement du tribunal est du 18 déc. 1837; qu'en conséquence, ledit testa

2o..... 3 Fausse application de l'art. 1086 C. Nap., relatif aux conditions des donatious par contrat de mariage, en ce que cet article avait été appliqué à la demanderesse, alors cependant qu'elle agissait en vertu d'un envoi en possession qu'elle avait obtenu des legs universels à elle faits par les époux Camus:

le, et en la faisant prévaloir sur les legs universels qui avaient précédé, la demanderesse ne pouvait être considérée comme tenue sur les biens qui lui provenaient du chef de la dame Camus, des dettes contractées par le sieur Ca

mus.

5o Enfin violation de l'art. 1471 C. Nap., en ce que l'arrêt attaqué avait renvoyé la demande resse à l'ordre pour le règlement de ses droits, au lieu d'ordonner à son profit la délivrance en immeubles de la dot de la dame Camus. DU 3 MARS 1852, arrêt C. cass., ch. req., MM. Mesnard prés., Hardoin rapp., Chegaray av. gén., Huet.

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