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JURISPRUDENCE FRANÇAISE

1853

CASSATION (24 mai 1853).
COUR DE CASSATION, POUVOIR D'APPRÉCIATION,
TESTAMENT AUTHENTIQUE, SIGNATURE, IMPOS-
SIBILITÉ, MENtion, lecture.

La Cour de cassation a, quelles que soient les
appréciations à cet égard des juges du fond,
le droit de rechercher elle-même si les men-
tions d'un testament authentique sont confor-
mes aux dispositions de la loi (1).

Ainsi elle peut, contrairement aux appréciations et déclarations de l'arrêt attaqué, décider qu'un testament authentique constate suffisamment que lecture a été donnée au testateur de la déclaration par lui faite que son état de faiblesse l'empêche de signer (2).

PICART ET Autres C. Veuve Picart.

Un arrêt de la Cour de Paris, du 14 juil. 1851, que nous avons rapporté au t. 2de 1852,

V., à cet égard, les arrêts, que nous rapportons immédiatement après celui-ci, des Cours d'Aix du 16 février, de Dijon du 2 mars, et de Douai du 24 mai 1853, ainsi que la note qui les accompagne.

(1-2) Cette solution paraît avoir soulevé d'assez vives réclamations, et il faut convenir qu'elle contrarie, dans une certaine mesure, par l'application qu'elle en fait, les principes relatifs aux attributions eta la mission de la Cour de cassation, tels, du moins, Le premier moyen, disons-nous, était tout à la qu'ils sont le plus généralement compris. La fois sans fondement, et, d'ailleurs, non recevable, Cour de cassation n'est point, on le sait, un tribunal comme ne soulevant qu'une question de fait. Que ordinaire, et, proprement dit, un nouveau degré de portait, en effet, l'arrêt d'appel sur ce point, et sur juridiction, devant lequel on puisse remettre les cho- quels motifs se basait-il? Il se basait sur ces deux ses en question et discuter de nouveau l'ensemble motifs, se corroborant mutuellement et inséparables de l'affaire, comme on le fait en appel après l'a- l'un de l'autre, que, d'une part, le testament n'exvoir fait en première instance; elle est au contraire primait pas qu'il eût été donné lecture au testateur exclusivement chargée d'assurer le respect des prin- de sa déclaration de ne pouvoir signer, et que, d'un cipes légaux, en cassant les jugements qui contien- autre côté, il résultait des faits du procès que ce tesnent quelque violation des règles du droit, et tateur, après de vains efforts pour signer, et sa démaintenant tous ceux qui s'y sont conformés, si mau- claration d'impossibilité, était tombé en syncope, que vais, si vicieux, si faux, qu'ils puissent être quant son état s'était ensuite aggravé, et qu'il était mort quelau fait. Le droit est le domaine exclusif de la Cour ques heures après. Or la force de ces deux motifs de cassation; le fait est une sphère inférieure au des- réunis n'est-elle pas saisissante? Quand les juges du sus de laquelle elle plane sans y pouvoir pénétrer: fait, en constatant que le testateur, après sa déclatoute violation de la loi, déférée à la Cour suprême, ration de ne pouvoir signer, tombe en syncope et doit entraîner une cassation; mais un mal-jugė, si meurt, remarquent que le testament énonce bien grave et si manifeste qu'il soit, ne le peut jamais. qu'il a été fait une lecture postérieure à ladite dé-Or la Cour de cassation, dans l'arrêt que nous re- claration, mais sans expliquer à qui cette lecture a cueillons ici, n'a-t-elle point méconnu ce principe en été donnée, la conclusion, par eux déduite de ces révisant, comme l'eût pu faire une nouvelle Cour deux prémisses, que rien ne prouve que la lecture d'appel, les appréciations de fait du procès; cela est ait été donnée au testateur et entendue de lui n'està craindre, et d'autant plus regrettable que, sans re- elle pas rigoureusement logique, et ne semble-tcourir à une appréciation de fait contestable au dou-elle pas pouvoir défier la critique. Sans doute, ble point de vue de sa juridicité et de son exactitude, elle pouvait, ce nous semble, arriver à la cassation par un moyen de droit, dont l'examen, du moins, lui appartenait sans difficulté. L'arrêt de la Cour de Paris, en effet, était attaqué par deux moyens, savoir: 10 pour avoir jugé que le testament de J. Picart ne constatait pas que lecture eût été faite au testateur de sa déclaration d'impossibilité de signer; 2 pour avoir jugé que cette lecture et sa constatation dans l'acte étaient exigées à peine de nullité. Or, tandis que le premier de ces deux moyens, qui est celui que la Cour accueille, semblait devoir être écarté comme mal fondé, et d'ailleurs non recevable en ce qu'il ne soulevait qu'une question de fait, le second, au contraire, celui dont la Cour ne s'est pas occupée, présentait une question de pur droit, et avait, à notre avis, grande chance d'être accueilli.

comme l'a très bien fait remarquer le défendeur à la cassation, si la circonstance toute particulière que signale l'arrêt d'appel, c'est-à-dire l'évanouissement du testateur après sa tentative pour signer, n'avait pas existé, s'il s'était agi d'un testateur ayant conservé sa connaissance jusqu'à la fin de l'opération, il eût été tout naturel d'admettre que la mention d'une dernière lecture devait s'entendre, même sans explication à cet égard, d'une lecture faite à tout le monde et comprise par tout le monde du moment que tout s'est fait sans désemparer, et toujours en présence du testateur et des témoins, la circonstance que le testateur est présent d'esprit comme de corps donne à la mention de la lecture, sans autre explication, le sens d'une lecture faite au testateur comme aux témoins, puisqu'on ne peut pas supposer gratuitement, et sans preuves précises, que pour don

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ner cette lecture on ait eu l'idée de faire sortir le
testateur ou de s'éloigner de lui. Mais quand, au
contraire, il est établi en fait par les enquêtes et
contre-enquêtes qu'au moment de signer, le testa-
teur, en suite de la faiblesse qui l'a empêché de le
faire, a perdu connaissance, et que son état d'éva-
nouissement et de prostration, loin de se dissiper,
s'est aggravé et a été suivi de la mort, la raison,
la logique, disent qu'il est plus que douteux qu'une
lecture ait été faite au testateur; il y a donc alors
nécessité, pour qu'on puisse croire à une telle lec-
ture, que le notaire la constate expressément; et,
par conséquent, si cet officier public s'est, en pareil
cas, borné à mentionner qu'il a été fait lecture, mais
sans dire à qui, sans expliquer si cette lecture a pu se
faire, et s'est faite, pour le testateur comme pour les
témoins, ou pour ceux-ci seulement, on se trouve na-
turellement, rationnellement, conduit à conclure,
comme l'avait fait la Cour de Paris, que rien ne
prouve que la lecture donnée l'ait été au testateur. —
Comme on le voit, la circonstance particulière de
la syncope du testateur, qui vient donner ici une si
grande force à la solution de la Cour de Paris, fait,
par contre, naître le doute sur l'exactitude de celle
de la Cour suprême. C'est elle aussi qui donne à
penser, quel que soit d'ailleurs le mérite respectif des
deux appréciations contraires, que la Cour de cas-
sation pouvait n'avoir pas mission pour substituer
J'une à l'autre.-Si la Cour d'appel n'eût pas trouvé
d'autres éléments d'appréciation et de décision que
ceux fournis par le contexte même du testament, on
comprendrait que la Cour suprême, jugeant à son tour,
la loi d'un côté et l'acte testamentaire de l'autre,
usât de son droit de rechercher elle-même, comme le
dit son arrêt, si les mentions du testament sont confor-
mes aux dispositions de la loi; le système du deman-
deur eût alors été admissible, quand il disait que la
question était question de droit en même temps
que de fait, et la jurisprudence par lui invoquée
l'eût été logiquement. Mais il n'en était pas ainsi;
ce n'était pas seulement dans le texte du testa-
ment que la Cour d'appel avait puisé ses éléments
d'appréciation, c'était encore, et surtout, comme il
était de son droit et de son devoir de le faire, dans
les enquêtes et contre-enquêtes, qui lui avaient ré-
vélé la syncope du testateur à la suite de la faiblesse
qui l'avait empêché de signer, syncope suivie d'une
aggravation continue de l'état du malade, et, bientôt,
de sa mort. Or la Cour de cassation pouvait-elle
suivre la Cour d'appel sur un pareil terrain;
vait-elle compulser après elle ces faits et circonstan-
ces pris en dehors du testament, discuter de nouveau
les enquêtes (ce qui emporterait le droit d'en faire
faire d'autres), et réviser des appréciations toutes
matérielles? Nous avons peine à l'admettre.
Mais, dit la Cour de cassation, les attestations du
notaire doivent être acceptées jusqu'à inscription de
faux; et comme l'inscription de faux, dirigée d'a-
bord contre le testament en ce qu'il énonçait la sa-
nité d'esprit du testateur, a été rejetée, force est
donc de croire à ces deux mentions de l'acte que

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Nap., en ce que l'arrêt a annulé le testamen sous prétexte qu'il ne résultait pas des énonciations de cet acte qu'il avait été donné lecture au testateur de sa déclaration de ne pou voir signer. - Rappelons d'abord, a-t-on dit à l'appui de ce moyen, deux règles aujourd'hui certaines en jurisprudence. La première, c'est que la question de savoir si les énonciations d'un testament.constatent l'accomplissement des formalités voulues par la loi n'est pas du domaine exclusif des juges du fait ; que c'est une question de droit soumise à l'appréciation de la Cour de

le testateur était sain d'esprit, mémoire et entendement, et que la lecture de sa déclaration de ne pouvoir signer a été faite.-Ceci, nous devons en convenir, ne nous paraît pas parfaitement concluant: car la confection du testament notarié se terminant par la signature du testateur ou sa déclaration de ne pouvoir signer, il s'ensuit que le notaire avait fort bien pu constater la sanité d'esprit et entendement du testateur, sans contredire en rien la perte de l'enténdement causée par une syncope survenue seulement après la déclaration de ne pouvoir signer; en sorte qu'on n'attaquait point la véracité du notaire, soit en affirmant la syncope à ce moment, soit en niant (ou seulement en mettant en doute, ce qui suffisait) que la mention de cette déclaration eût été lue au testateur, puisque le notaire s'était contenté de dé clarer que la lecture en avait été faite, sans dire à qui. Rien ne s'opposait donc, ce semble, à ce que la Cour d'appel admit, malgré le rejet de l'inscription de faux, le fait de la syncope et les conséquences logiques qu'elle eu déduisait, sans que la Cour de cassation dût s'en croire plus autorisée à se faire juge du fait.

Nous regrettons que la Cour suprême en ait décidé autrement. Nous le regrettons d'autant plus que sa décision implique presque la solution, dans un sens que nous ne saurions admettre, de la question de droit qu'elle déclare ne pas examiner. Elle dit bien en effet, dans son dernier considérant, qu'il n'est pas besoin de statuer sur le second moyen, c'est-à-dire sur la question de savoir si la lecture de la déclaration d'impossibilité de signer, et la mention de cette lec-ture, sont ou non exigées par la loi; mais il est assez difficile de concilier ceci avec sa discussion du premier moyen, discussion dont l'objet, comme le dit l'arrêt lui-même dans son premier considérant, est de rechercher si les mentions du testament en ce qui touche cette constatation de la lecture donnée au tes-tateur de sa déclaration șONT CONFORMES A LA DISPO➡ sITION DE LA LO?... Dire, comme le fait ainsi l'arrêt à son début, qu'il va rechercher si les mentions du testament sont, quant à cette constatation de la lecture de la déclaration, conformes aux dispositions de la loi, puis expliquer ensuite, par d'autres considérants, que ces mentions sont en effet conformes à la loi parce qu'elles constatent la lecture donnée au testateur, n'est-ce pas admettre virtuellement que les dispositions de la loi exigent cette lecture et sa mention? n'est-ce pas dès lors résoudre implicitement la question de droit ? - Nous pou-sommes disposés à penser que la Cour n'a pas voulu donner une pareille portée à son arrêt, et le dernier considérant démontre assez qu'elle a entendu, à cet égard, réserver son opinion; mais, qu'elle l'ait voulu ou non, il n'en est pas moins vrai qu'on peut s'autoriser du rapprochement que nous signalons, et en conclure un préjugé favorable à une solution repoussée, justement à notre avis, par une jurisprudence et par une doctrine presque unanimes. V., à cet égard, Aix, 16 février; Dijon, 2 mars, et Douai, 24 mai 1853 (qui suivent, et la note.-V. aussi Rep. gen. Journ. Pal., vo Testament, nos 601 et 740.

| se dans le cas où aucun fait de syncope ne serait allégué, devient abusive et inadmissible dans le cas où, l'évanouissement du testateur étant constaté, sa présence n'implique plus la faculté d'entendre. Ce moyeu tombe donc devant ces deux motifs de l'arrêt: «Que le testament ne constate pas qu'il ait été donné lecture au testateur de la déclaration par lui faite, etc.; et que, d'un autre côté, il résulte des faits de la cause qu'après d'inutiles efforts pour signer, le testateur est tombé en syncope, que son état s'est aggravé, et qu'il est mort quelques heures après.»

Du 24 MAI 1853, arrêt C. cass., ch. civ., MM. Bérenger prés., Lavielle rapp., Vaisse av. gén. (concl. contr.), Roger, Fabre et Lebon av.

cassation (Voir notamment trois arrêts émanés de cette Cour, les 24 juin 1811, 15 déc. 1819 et 22 juil. 1829). La seconde, c'est qu'il n'est pas nécessaire que telle formalité exigée par la loi pour la validité du testament y ait été constatée d'une manière expresse et directe (1); qu'il suffit que cette constatation résulte de l'ensemble de l'acte. - Ces principes posés, il suffit de se reporter aux énonciations par lesquelles se termine le testament de J.-A. Picart (V. ces énonciations rapportées avec l'arrêt attaqué; V. aussi le texte de l'arrêt que nous recueillons). Il en résulte que le testament a été lu trois fois: une première après les dispositions testamentaires; une seconde après le fait et passé et la date; enfin, une troisième après que le testateur, qui avait d'abord déclaré pouvoirsigner, eut fait d'inutiles efforts pour y parvenir, et déclaré que son « LA COUR (après délib. en ch. du cons.); état de faiblesse et de fièvre l'en empêchait. Sur le premier moyen : - - Vu les art. 972, 973 Comment donc l'arrêt attaqué a-t-il pu dire que et 1001 C. Nap.;-Attendu que, bien qu'il soit le testament ne constate pas que lecture ait été déclaré dans l'arrêt attaqué que le testament du donnée au testateur, en présence des témoins, de 3 déc. 1848 ne constate pas qu'il ait été donné sa déclaration de ne pouvoir signer?... La Cour lecture au testateur de la déclaration par lui d'appel ne déclare pas en fait qu'il est certain faite que son état de fièvre et de faiblesse l'emque lecture n'a pas été donnée au testateur de pêchait de signer l'acte, cette appréciation de sa déclaration; elle dit seulement qu'il résulte l'arrêt ne saurait empêcher la Cour de recherdes faits de la cause qu'après d'inutiles efforts cher elle-même si les mentions du testament pour signer, le testateur est tombé en syncope; sont conformes aux dispositions de la loi; — que son état s'est aggravé, et qu'il est mort quel- | Attendu, à cet égard, que le notaire, après ques heures après..... Elle ne dit pas que cette avoir écrit le testament sous la dictée du testatroisième lecture au testateur n'a pas eu lieu, teur et en présence des témoins, fait, au moelle ne la nie pas; elle prétend seulement que ment de clore l'acte, la constatation suivante : le testament ne la constate pas... Le testament « Ici le testateur, ayant déclaré qu'il pourrait endit: après une nouvelle et entière lecture de tout >> core signer audit notaire en présence des quace qui précède. Or, où, quand, à qui et devant » tre témoins, a fait d'inutiles efforts pour y quelles personnes, a donc eu lieu cette nouvelle » arriver, à leur vu; enfin, a déclaré que l'état et entière lecture de tout l'acte, si ce n'est dans >> de faiblesse et de fièvre où il était en ce mola chambre du malade, le 3 déc. 1848, au testa- >>ment l'empêchait absolument de pouvoir siteur lui-même et devant les quatre témoins qui »gner, de ce interpellé de nouveau par ledit noont signé cet acte? Evidemment les énonciations »taire en précence desdits quatre témoins; du testament ne permettent aucune hypothèse » quant auxdits témoins et au notaire, ils ont contraire. Il faudrait donc que cette hypothèse » signé après une nouvelle et entière lecture de contraire fût prouvée en dehors de l'acte et con- » tout ce qui précède»; — Attendu que cette tre l'acte, et que l'arrêt constatât cette preuve nouvelle et entière lecture de tout ce qui précéen fait. Or, encore une fois, l'arrêt ne contient dait se réfère non seulement aux dispositions rien de semblable. testamentaires dictées par le défunt, mais encore à sa déclaration qu'il ne pouvait signer, et à la cause qui l'en empêchait; Attendu qu'on ne saurait admettre que cette dernière et nouvelle lecture n'ait pas été faite, comme les précédentes, au testateur et aux témoins, dont la présence continue et simultanée est plusieurs fois constatée dans l'acte; - Attendu qu'il conOn répond, sur le premier moyen, dans l'in-state également que le testateur était sain d'estérêt de la dame Picart, qu'il repose sur une extension illogique de la portée des termes du testament. On veut que la lecture donnée aux témoins soit, à raison de la présence constatée du testateur, l'équivalent d'une lecture donnée au testateur. Or il est manifeste que cette extension, qui pourrait tout au plus être admi

Deuxième moyen. - Violation de l'art. 973, et fausse application des art. 1001 et 972, en ce que l'arrêt attaqué a décidé qu'il devait être donné lecture au testateur, à peine de nullité du testament, de la déclaration par lui faite qu'il était dans l'impossibilité de signer.

Troisième moyen.

-..

(Sans intérêt.)

(1) Ceci est inexact: la constatation doit être ex

Presse; seulement elle n'a rien de sacromentel. L'ar

rét du 22 juil. 1829 Ini-même dit que l'art. 972 ne consacre pas de termes sacramentels, et qu'il suffit que la mention soit clairement expriméc.

-

prit, mémoire et entendement, ainsi que le notaire et les quatre témoins soussignés ont pu s'en convaincre par ses paroles et discours; attendu que cette mention avait été vainement attaquée par une inscription de faux, qui a été définitivement rejetée comme n'ayant aucun fondement; - D'où il suit qu'en annulant le testament d'Ambroise Picart par le motif qu'il ne fut

des témoins, de sa déclaration qu'il ne pouvait pas donné lecture au testateur, en présence signer et de la cause qui l'en empêchait, l'arrêt attaqué a faussement appliqué les art. 972 et 1001 C. Nap., et violé l'art. 973 même

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(1) V. conf. Rennes, 1er août 1827; Douai, 6 mars 1833; Montpellier, 3 juin 1833, rapporté avec Cass. 3 juil. 1834, et ce dernier arrêt; - Toullier, Dr. civ., t. 5, no 444 (implicit.); Zachariæ, Cours de dr. civ., S 670, note 43.

Contr. Paris, 14 juil. 1851 (t. 2 1852, p. 193); Dict. du notar., t. 6, p. 657.

V., au surplus, Rép.gén. Journ. Pal., vo Testament, nos 601 et 740.

-

ment authentique, la lecture au testateur de sa déclaration de ne savoir ou de ne pouvoir signer, et de la cause qui l'en empêche; non plus que la mention dans l'acte de l'accomplissement de cette formalité: il suffit que le notaire en fasse mention à la fin de l'acte (1), C. Nap. 972 et 973.

Il en est de même de la mention expresse de la présence réelle des témoins à la signature du testateur ou à sa déclaration de ne pouvoir signér, laquelle mention n'est pas, non plus,

lecture du testament et la mention de cette lecture. Oui, sans doute; mais qu'est-ce que cet article entend par le testament? Est-ce l'ensemble complet de toutes les parties de l'acte, c'est-à-dire non seulement le corps de cet acte, mais aussi le préambule qui se met en tête de tout acte authentique, puis la signature ou la mention qui doit la remplacer, tout enfin? Assurément non; c'est seulement l'ensemble des dispositions, des volontés exprimées par le disposant, et on en trouve dans l'économie de la loi trois preuves pour une. D'une part, en effet, il s'agit là du testament dicté par le testateur, et que le notaire doit écrire tel qu'il est dicté. Or le testateur ne dicte que ses volontés; il ne dicte pas sa signature quand il peut sirégner, ui la mention d'impossibilité quand il ne le peut pas. Sans doute c'est lui qui doit déclarer cette impossibilité, mais ce n'est plus la une dictée.... Certes, la signature de celui qui peut signer fait aussi bien partie de son testament que la mention d'impossibilité; or l'art. 972 ne parle assurément pas d'elle, cette signature ne peut pas être dictée par le testateur, elle ne peut pas être écrite par le notaire, et l'article, dès lors, n'entend ainsi le mot testament que dans son sens restreint, pour signifier l'ensemble des dernières volontés, indépendamment des diverses parties qui n'en sont que l'entourage.... Où donc s'arrêterait-on avec la singulière théorie de l'arrêt? Qu'on y réfléchisse, et on va voir qu'en entendant l'art. 972 comme l'entend l'arrêt de Paris, le testament authentique, grâce aux deux dernières formalités de cet art. 972, se trouverait un acte interminable, d'une rédaction impossible à finir, et tournant dans un cercle vicieux éternel. En effet, la mention de la lecture donnée au testateur, et qui constitue la quatrième et dernière formalité de cet art. 972, fait aussi partie du testament. Donc, il faudrait que cette mention fat lue au testateur comme le corps méme de ce testament. Et maintenant, comme le fait de cette lecture devrait être mentionné, puisqu'il faut faire mention du tout, il faudrait donc faire en second lieu la mention de la lecture de cette première mention; puis, comme cette seconde mention ferait toujours partie du testament, il faudrait donc encore en donner lecture; puis faire en troisième lieu mention de cette lecture, et ainsi de suite. C'est-à-dire que, chaque lecture nécessitant une mention, puis chaque mention une lecture, on tournerait ainsi dans le même cercle jusqu'à la fin du monde, et au delà.»> Quant aux considérations invoquées par l'arrêt de Paris sur la prétendue nécessité des formalités en question pour la sincérité des testaments, M. Marcadé répond, avec les arrêts que nous rapportons, que, d'une part, autant il était important de faire lire au testateur la rédaction des dispositions par lui dictées, dispositions souvent longues, compliquées, et pouvant facilement donner lieu à des erreurs et malentendus, autant il l'était peu d'exiger cette même formalité pour le second cas, puisqu'il n'y a pas d'erreur ni de confusion possibles dans la déclaration d'un fait matériel aussi simple que l'impossibité de signer; et, d'autre part, que quand même on croirait ces formalités aussi nécessaires ici qu'el

L'arrêt précité de la Cour de Paris, cassé, du reste, par un arrêt du 24 mai 1853 (qui précède), mais sur un point étranger à la question qui nous occupe, a été de la part de M. Marcadé, dans l'examen qu'il en a fait au t. 2, p. 337 et suiv. (no de juin 1852) de la Revue critique de jurisprudence, l'objet d'une futation qui nous paraît péremptoire, et qui, ajoutant de nouveaux arguments à ceux invoqués par les arrêts que nous rapportons, complète la démonstration de la thèse qu'ils consacrent, et nous engage, par ce motif, à en reproduire les principaux passages. « Cet arrêt, dit M. Marcadé, décide que, quand le testateur, dans un testament authentique, se trouve dans l'impossibilité de signer l'acte, il faut, à peine de nullité, non pas seulement qu'il soit fait mention dans l'acte de la déclaration du testateur de son impossibilité de signer et de la cause de cette > impossibilité, mais aussi, et en plus, 1o qu'il soit donné lecture de cette mention au disposant, et 20 qu'il soit encore fait mention de cette lecture. Or c'est là, nous n'hésitons pas à le dire, ajouter arbitrairement à la loi et créer de nouvelles causes de nullité en dehors de celles dont le Code a cru devoir entourer les testaments. Les formalités exigées par la loi dans le testament authentique, par les art. 972, 973, formalités dont toute inobservation emporte nullité de l'acte aux termes de l'art. 1001, sont que le testament soit dicté par le testateur; qu'il soit écrit par le notaire ou l'un des notaires tel qu'il est dicté; qu'il en soit donné lecture au testateur en présence des témoins; qu'enfin il soit fait mention de l'accomplissement de ces trois faits (art. 972); que si le testateur ne peut pas signer, il faut que son impossibilité de signer soit déclarée par luimême, et qu'il soit fait mention tant de sa déclaration de ne pouvoir signer que de la cause qui l'en empêche (art. 973). Voilà tout ce que demande la loi; elle n'exige rien autre chose. Six formalités sont ainsi exigées pour le testament authentique que le testateur ne peut signer, savoir: 1o la dictée par le testateur; 2o l'écriture conforme par le notaire; 3o la lecture donnée par celui-ci; 40 la constatation de ces trois faits; 50 la déclaration du testateur de ne pouvoir signer et de la cause d'empêchement; 6o enfin la mention de cette déclaration. Encore une fois, c'est là tout ce que demande la loi; et quand au lieu de de ces six formalités on en exige huit, en demandant en plus LA LECTURE de cette dernière mention, puis encore LA MENTION de la lecture de cette mention, ce n'est plus appliquer la loi, c'est la refaire, c'est la corriger et l'augmenter, et l'augmenter de la manière la plus grave de toutes: en y ajoutant des nullités!.... L'art. 972, dit-on, exige la

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