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fait d'être la mère de la fille née le 10 décembre et qui a reçu les nom et prénoms de Julie-Adélaïde Léon; qu'au surplus, la reconnaissance du sieur de Gordes ne puise pas sa validité dans l'indication de maternité qu'elle contient, parce que cette indication n'est pas de son essence, et qu'elle pourrait tout au plus être reconnue inexacte en ce qui la concerne;

part essentiellement d'une autre source, de l'impulsion de la nature, de la conscience, qui doivent se porter et se portent intentionnelle ment sur l'objet quand il existe; — La vérité, dans cela, est dans le fait, et non dans l'opinion qu'on en a; Que, d'ailleurs, appliquer les art. 1109 et 1110 C. Nap. à la question actuelle, c'est vouloir leur faire régir une matière qu'ils ne paraissent point avoir en vue, parce que la paternité et la filiation naturelles ne sont pas, ne peuvent même pas être, le sujet d'une convention; elles puisent leur raison d'être dans un ordre de choses supérieur à celui qu'embras-l'art. 341 C. Nap., qu'autant qu'il existe un comse la législation humaine; elles ne peuvent pas même être l'objet d'un accord, puisqu'elles ont leur germe dans un fait préexistant à la naissance de l'enfant, et qui produit des effets naturels, indépendamment de toute volonté, et des effets civils, par la seule déclaration du père: tout ce que la loi peut sur elles c'est de leur donner autorité, force et exécution;

» Attendu, quant à la preuve testimoniale subsidiairement offerte par le sieur de Gordes, que, par les motifs qui viennent d'être exprimés au sujet de l'erreur dont il se fait un moyen, elle ne serait pas concluante; qu'elle ne doit done pas être ordonnée;

>> Attendu que la preuve testimoniale de la maternité, que Julie Adélaïde Léon demande à faire pour justifier qu'elle est née d'Anne Léon, n'est à la vérité permise, suivant la teneur dé mencement de preuve par écrit, et qu'Anne Léon n'a nullement pris part à l'acte de naissance du 10 déc. 1823 qui la désigne comme mère de l'enfant pour lequel cet acte de naissance a été dressé; mais qu'Anne Léon avoue dans l'instance actuelle qu'elle est la mère de cet enfant, et que cet aveu est un vrai commencement de preuve par écrit qui autoriserait Julie-Adélaïde Léon à la recherche de la maternité d'Anne Léon, laquelle n'a pas besoin d'être prouvée, puisque cette femme reconnaît comme lui convenant celle qui est énoncée dans cet acte; qu'il ne s'agit donc pour Julie Adélaïde Léon que de prouver qu'elle est identiquement la personne qui est fille d'Anne Léon; qu'il n'est pas désavoué qu'elle est née à Grasse le 10 déc. 1823, qu'elle a été au service de la dame Allard et d'autres personnes à Marseille, que, dès lors, ces points de fait n'ayant pas besoin d'être prouvés, et la preuve testimoniale offerte par elle devant se borner à justifier une identité, cette preuve est admissible et concluante, etc. >>

Appel par le sieur de Gordes et par la dame Anne Léon.

Du 22 DÉCEMBRE 1852, arrêt C. Aix, aud. sol., MM. Bédarrides av. gén., Guieu, Pascal Roux et Tavernier père av.

>> Attendu, en ce qui concerne la demande incidente d'Anne Léon, qu'on ne peut refuser à cette femme l'acte qu'elle veut se faire concéder de la déclaration de ne pas reconnaître la demoiselle Julie-Adélaide Léon, qui est en cause et qui se trouve au service de la dame Allard à Marseille, pour être la personne de ce nom, née à Grasse le 10 déc. 1823, et désignée comme sa fille naturelle dans l'acte de naissance dressé le lendemain par l'officier de l'état civil; -Attendu, quant à l'interdiction qu'elle demande qu'il soit fait à cette fille de prendre son nom non plus que la qualité de sa fille, et à la nullité de l'acte de reconnaissance du 21 juin 1848 dans lequel le sieur de Gordes a attribué «LA COUR ; - Considérant que, dans le cours à Anne Léon la fille dont il s'est déclaré père de l'année 1841, de Gordes connut à Marseille, naturel; que, bien que cette femme déclare ne chez la femme Roustau, lingère, une de ses oupas reconnaitre que la demoiselle Julie-Adélaï- vrières qui portait le nom d'Adèle Léon et que de Léon, fille d'Anne Léon, ayant servi comme l'on croyait être Julie-Adélaïde Léon, née à Grasse domestique chez la dame Allard, à Marseille, le 10 déc. 1823, fille naturelle d'Anne Léon, soit la fille à laquelle s'applique l'acte de nais-journalière demeurant dans cette ville; Que sance du 10 décembre, cette Julie-Adélaïde cette croyance était fondée sur ce que, avant Léon ne peut néanmoins être dépossédée du d'habiter Marseille, cette enfant, placée en nournom et de la qualité que lui donne cet acte rice par l'hospice de Grasse chez la femme Bonqu'après qu'il aura été tenu pour constant qu'ils homme à Ayglues, y avait reçu diverses fournine lui conviennent pas; mais que cette dernière tures envoyées par Anne Léon; que la jeune fille, offrant de prouver que c'est elle que cet acte revenue à Grasse après l'âge de douze ans, avait concerne, l'interdiction de prendre les nom, été reçue par Anne Léon, qui l'avait gardée chez prénoms et qualités sous lesquels elle se pré-elle pendant quelques années, la traitant comme sente ne saurait être prononcée avant qu'il ait été reconnu qu'ils ne sont pas réellement les siens; que la nullité de l'acte de reconnaissance du 21 juin 1848, qui résulterait suivant elle de ce que le sieur de Gordes lui a faussement attribué la maternité de la fille dont il s'est déclaré le père naturel, n'existe pas; qu'au contraire, si cette fille se trouve être réellement celle qu'elle reconnaît avoir mise au monde le 10 déc. 1823, l'indication de maternité faite par le sieur de Gordes se trouvera confirmée par l'aveu qu'elle

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sa fille, et l'avait présentée comme telle aux parrain et marraine de Julie-Adélaïde Léon; Qu'en l'année 1843, la femme Roustau quitta Marseille; que de Gordes, ne voulant pas laisser à l'abandon la jeune fille qu'il protégeait, lui fit louer un appartement à Marseille, lui donna une domestique et des maîtres d'écriture et de français; qu'en l'année 1845, de Gordes est venu lui-même demeurer avec Adèle Léon, et que depuis cette époque ils n'ont pas cessé d'avoir une habitation commune; qu'en 1847, de Gor

des exprima l'intention d'adopter Adèle Léon, de la traiter comme sa fille; que, vers le mois de mai de la même année, alors que depuis douze ans les qualités de mère et de fille étaient respectivement acceptées par Anne et par Adèle Léon, cette dernière, étant tombée malade, témoigna le désir de voir sa mère, qui, sur l'invitation que lui adressa de Gordes, se rendit chez lui, de Grasse à Marseille, auprès de sa fille; qu'elle y demeura plusieurs jours, et ne partit qu'après le rétablissement d'Adèle Léon; qu'au mois de juin 1848, de Gordes, voulant réaliser son projet d'adoption, se rendit à Grasse, avec cette même fille qui demeurait avec lui depuis plus de trois ans, qui toujours avait été connue à Grasse, comme à Marseille. sous le nom d'Adèle ou d'Adélaïde Léon, qu'il croyait enfin être Julie-Adélaïde Léon, et passa l'acte de reconnaissance du 21 juin 1848, qui n'était, dans sa pensée, qu'un mode d'adoption; - Que de Gordes, qui, depuis cet acte, avait continué de garder près de lui celle qu'il regardait comme sa fille adoptive, fut informé, au mois d'août 1851, qu'une fille, au service de la veuve Allard, à Marseille, prétendait être JulieAdélaïde Léon; que l'acte de naissance récemment demandé par elle pour son mariage portait en marge que de Gordes s'en était déciaré le père, quoiqu'il ne l'eût jamais yue; mais que de Gordes affirma qu'il n'avait eu, à aucune époque, des rapports avec Anne Léon, et que la reconnaissance du 21 juin 1848 n'aurait eu pour but que d'adopter indirectement la fille qui demeurait avec lui depuis six ans, et qui se trouvait alors présente; que, peu de jours après, de Gordes revint avec elle à Grasse, où il découvrit que cette fille, nourrie à Ayglues, par l'épouse Bonhomme, est Marie Lilas, née à Grasse le 19 mai 1823, de parents inconnus; Considérant qu'en regard de tous ces faits dont il serait frustratoire d'ordonner la preuve, puisqu'ils sont de notoriété publique et ne sont point sérieusement contestés par la femme Weber, il est important de signaler certains aveux de celle-ci : il résulte, en effet, des conclusions motivées, signifiées à sa requête le 12 déc. 1851, qu'avant d'avoir connu son acte de naissance, qui lui a été délivré le 14 août 1851, jamais elle ne s'était enquise de sa mère, et qu'elle avait encore moins soupçonné qu'elle eût un père dans la personne de de Gordes; Qu'ainsi, bien qu'au mois d'août 1851, l'acte de reconnaissance du 21 juin 1818 remon tât à plus de trois années, la soi-disant JulieAdélaïde Léon, l'enfant qui se prétend l'objet de la reconnaissance, ignorait l'existence de cet acte, et ne connaissait pas même de nom de Gordes qui l'avait souscrit;

>> Considérant que de l'ensemble des faits qui précèdent, et qui sont dès à présent établis, il résulte, jusqu'à la dernière évidence, que l'enfant que de Gordes a voulu reconnaître par l'acte du 21 juin 1848 est Marie Lilas, née le 19 mai 1823, qu'il connaissait et protégeait depuis 1841 sous le nom d'Adèle ou d'Adélaïde Léon, à laquelle il prodiguait depuis 1843 des soins non interrompus, avec laquelle il habitait

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depuis 1845; -- Qu'il est déraisonnable de prétendre que de Gordes a eu la volonté de se reconnaître le père de la soi-disant Julie-Adélaïde Léon, aujourd'hui femme Weber, qu'il n'avait jamais vue, qui lui était inconnue, et dont il s'est empressé de repousser énergiquement les prétentions du moment où on les lui a fait connaître; Qu'on ne saurait pas davantage admettre que de Gordes a eu la volonté de se reconnaître le père de l'enfant, quel qu'il fût, dont Anne Léon était accouchée le 10 déc. 1823, puisqu'il est hors de doute que la reconnaissance a porté sur un être déterminé, la personne de Marie Lilas, alors connue sous le nom d'Adèle ou d'Adélaïde Léon, et l'objet de ses soins, de son affection, depuis plusieurs années avant l'acte du | 21 juin 1848;

» Considérant que c'est dans cet état de choses que de Gordes demande que l'acte de reconnaissance soit déclaré nul, et qu'il soit annulé, 1o parce que cet acte est le fruit de l'erreur sur l'identité de la personne en faveur de laquelle il a fait sa déclaration de paternité; 2o parce qu'il est encore le fruit de l'erreur sur le fait de la paternité, vu que de Gordes n'a jamais eu aucun rapport avec Anne Léon, et que la déclaration de paternité qu'il a faite n'était, dans sa pensée, qu'un mode d'adoption en faveur de l'enfant objet spécial et déterminé de cette déclaration; Considérant que, de son côté, Anne Léon demande pareillement la nullité de l'acte de reconnaissance, comme contenant l'énonciation évidemment fausse que de Gordes est le père de Julie-Adélaïde Léon dont elle est accouchée le 10 déc. 1823, et qui a été inscrite le lendemain sur les registres de l'état civil

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>> En ce qui touche l'erreur sur l'identité de la personne - Considérant que la maxime Non videntur qui errant consentiri consacrée par l'art. 1109 C. Nap., suivant lequel il n'y a point de consentement valable si le consentement n'a été donné que par erreur, est un principe de droit naturel qui domine toutes les matières de droit, et non pas seulement celles des conventions; en effet, nul ne peut être lié par un acte, si cet acte n'est le résultat d'une volonté entière, libre, éclairée; or, comment concevoir qu'une convention dont l'objet est une chose quelconque pourra être attaquée et annulée pour cause d'erreur, tandis qu'on ne pourrait revenir contre la reconnaissance d'un enfant naturel, acte dont l'objet est toujours d'une haute importance, et qui d'ailleurs crée des rapports, des obligations, des empêchements?.. Il est évident que plus l'acte est grave plus l'erreur vicie le consentement; d'où il suit que c'est à tort que le jugement dont est appel déclare que les art. 1109 et 1110 ne peuvent s'appliquer à l'espèce actuelle, parceque, dit-il, la paternité et la filiation naturelles ne sont pas, ne peuvent même pas être le sujet d'une convention; Considérant qu'aux termes de l'article 1110 C. Nap., l'erreur n'est une cause de nullité de la convention que lorsqu'elle tombe sur la substance même de la chose qui en est l'objet ; Considérant que, dans le langage

du droit, la substance est ce sur quoi la volonté s'est fixée, c'est le rapport principal sous lequel la chose a été envisagée; - Considérant qu'on peut, il est vrai, reconnaître l'enfant d'une femme déterminée, en souvenir d'affection, sans avoir vu l'enfant, avant sa naissance et même après sa mort, et alors la substance de l'acte est certainement l'enfant de cette femme; mais si l'on a reconnu un enfant déterminé, qu'on a élevé, qu'on aime, sans se préoccuper de la mère, croyant qu'il avait un certain nom, quand il en avait un autre, cet enfant seul est l'objet de l'acte, sa substance; or, on l'a vu plus haut, la reconnaissance du 21 juin 1848 a porté sur un enfant déterminé, la personne de Marie Lilas, alors connue sous le nom d'Adèle ou Adélaïde Léon, et l'objet des soins non interrompus, de l'affection, de de Gordes, l'auteur de la reconnaissance; ici la personne de Marie Lilas se confond avec la substance de l'acte, et c'est elle qui a été la cause déterminante, la seule cause de la reconnaissance; -- Par consé quent la demande en nullité de l'acte de reconnaissance du 21 juin 1848 pour cause d'erreur substantielle sur l'identité de la personne est tout à la fois recevable et fondée;

>> En ce qui touche l'erreur sur le fait de la paternité, erreur invoquée tant par de Gordes que par Anne Léon: Considérant que nul ne peut déroger aux lois qui intéressent l'ordre public; que tout ce qui touche à l'état des personnes est placé en dehors du caprice des hommes; Que le législateur n'a pu permettre de créer arbitrairement des rapports de parenté, de se donner un fils qui peut-être ne pourra pas établir sa non-filiation, de s'attribuer sur lui la puissance paternelle, de créer des rapports de successibilité, des incapacités de mariage, etc. etc.; que la loi, en autorisant la reconnaissance d'un enfant naturel, a entendu autoriser l'aveu, et non le mensonge, de la paternité; que la loi, qui suppose alors le fait préexistant de la paternité, n'a voulu que sanctionner les liens naturels du sang; qu'en un mot la paternité est l'œuvre de la nature seule, et que la reconnaissance légale n'en est que la manifestation; Qu'il suit de la que la reconnaissance du 21 juin 1848 est un acte contraire à l'ordre public, s'il est vrai que de Gordes n'a jamais eu aucun rapport avec Anne Léon, et n'a pu dès lors avoir un enfant d'elle; que l'affirmation de de Gordes a ce sujet se trouve corroborée par la déclaration formelle d'Anne Léon, qui affirme également qu'il est notoire qu'avant la conception et la naissance de l'enfant dont elle est accouchée le 10 déc. 1823, elle n'avait jamais quitté la ville de Grasse, et que de Gordes était inconnu dans cette ville, où il n'a paru qu'en 1847, c'est à-dire vingt-quatre ans après l'accouchement; Considérant qu'il existe pour les magistrats des présomptions graves précises et concordantes, qui leur donnent la conviction qu'il n'a jamais existé aucun rapport entre Anne

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de Gordes, et que, dès lors, celui-ci ne peut être le père de l'enfant dont elle est accouchée le 10 déc. 1823, présomptions qui sont admissibles, puisqu'il s'agit ici d'un cas où la loi ad

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met la preuve testimoniale;-Considérant enfin que la qualité de mère place Anne Léon au premier rang des personnes à qui la loi confie le droit de contester une déclaration de paternité faite en son absence et sans son concours; que sa demande sur ce chef est donc recevable, et qu'elle est encore fondée d'après les présomp-tions graves, précises et concordantes, dont il vient d'être parlé;

>> En ce qui touche les dispositions du jugement par lesquelles il est donné acte à Anne Léon de son aveu de maternité, et ordonné que la femme Weber prouvera qu'elle est identiquement la même que l'enfant dont Anne Léon est accouchée le 10 déc. 1823:-Adoptant les motifs des premiers juges;

>>Par ces motifs, statuant sur l'appel du sieur de Gordes, est appel au néant; émendant, Dir que MET l'appellation et ce dont passé à la mairie de Grasse, le 21 juin 1848, l'acte dans lequel de Gordes a déclaré étre le père de Julie-Adélaïde Léon, née le 10 et inscrite le 11 déc. 1823 sur le registre des naissances de la ville de Grasse, comme fille d'Anne Léon, journalière à Grasse, est le fruit de l'erreur, tant sur le fait de la paternité lui-même, vu que de Gordes n'a jamais eu aucun rapport avec Anne Léon, que sur l'identité de la personne en faveur de laquelle de Gordes a fait cette déclaration de paternité, qui n'était, dans sa pensée, qu'un mode d'adoption; en conséquence, DECLARE nul et ANNULE ledit acte du 21 juin 1848, et, de même suite, FAIT INHIBITIONS et défenses à ladite femme Weber de se dire fille naturelle reconnue par de Gordes, de porter le nom de ce dernier et de le prendre dans quel-, que acte que ce soit, à peine de tous dépens, dommages et intérêts, et même de poursuites criminelles; Ayant tel égard que de raison à l'appel d'Anne Léon à l'encontre de la femme Weber, MET, quant à ce, l'appellation et ce dont est appel au néant; émendant, Déclare pareillement nul et annulé ledit acte de reconnaissance passé le 21 juin 1848 devant l'officier civil de Grasse, comme contenant l'énonciation, entièrement fausse, que Jacques-Joseph-François-Louis-Théodore de Gordes est le père de Julie-Adélaïde Léon, dont Anne Léon est accouchée le 10 déc. 1823, et qui a été inscrite le lendemain dans les registres de l'état civil de Grasse;... CONFIRME le jugement dout est appel 1° en ce qu'il concède acte à Anne Léon de ce qu'elle ne reconnaît pas que Julie-Adélaïde Léon (qui a été au service de la veuve Allard) soit la personne de ce nom née à Grasse le 10 déc. 1823, désignée comme étant sa fille naturelle; 2° en la veuve Allard à faire la preuve, ce qu'il admet ladite fille qui a été au service de même par témoins, des faits par elle articulés, et tendant à établir qu'elle est identiquement le même enfant que celui dont Anne Léon est accouchée le 10 déc. 1823,... etc. »

PARIS (4 juillet 1853).
DÉSAVEU D'Enfant, acte de NAISSANCE, PÈRE
ET MÈRE INCONNUS, RECONNAISSANCE ET LÉ-

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sance et la légitimation sont le résultat de manœuvres dolosives imaginées pour prévenir les effets d'un désaveu. C. Nap. 322.

En conséquence, le mari est recevable à prouver, en pareille circonstance, que l'enfant dont il s'agit est vraiment né de sa femme (1). C. Nap. 341.

Il peut d'ailleurs trouver dans les lettres écrites par celle-ci à un tiers un commencement de preuve par écrit, rendant vraisemblables ses allégations à cet égard (motifs de l'arrêt).

Nous avons dit que cette question était neuve encore pour la doctrine. Il est vrai qu'on a cité M. Demolombe comme admettant implicitement notre solution au no 160 de son tome 5; mais c'est à tort, et les explications de l'honorable professeur contiendraient bien plutôt la solution contraire. Dans le passage qu'on a présenté comme conforme à l'opinion que nous adoptons ici, M. Demolombe dit, il est vrai: " Rien n'empêche les héritiers du mari de prendre l'offensive et de former l'action en désaveu, avant même que l'enfant les ait troublés dans la possession de l'hérédité : l'enfant pourrait vouloir attendre le dépérissement des preuves, le décès des témoins, l'altération des souvenirs. etc. »; mais ces paroles n'ont nullement le sens qu'on leur a prêté. L'auteur n'a pas voulu dire que les héritiers du mari pourraient intenter le désaveu mème contre celui qui n'a pas la possession d'enfant de l'épouse de ce mari; il entend seulement, et tout au contraire (comme le prouvent l'ensemble et la marche de ses développements), que ces héritiers pourraient agir même contre l'enfant, qui, ayant celle possession, ne l'invoque cependant pas quant à présent. Avant tout, M. Demolombe suppose constant l'état d'enfaut de la femme du mari. « L'action en désaveu, dit-il au no 103, est celle par laquelle on prétend que l'enfant d'une femme mariée n'est pas des œuvres du mari. Le mariage, la maternité de la femme, l'identité de l'enfant, tout cela est alors reconnu; ce qui est contesté, c'est la paternité du mari... Le désaveu s'attaque à l'enfant qui a en sa faveur la présomption légale : Pater est quem nuptiæ demonstrant; il tend à chasser l'enfant de la famille, mais par cela même il suppose que cet enfant s'y trouve, qu'il possède son état.» Ailleurs, et en examinant la question de savoir s'il est toujours nécessaire que le mari à qui la femme a caché la naissance de l'enfant agisse en désaveu, sous peine de déchéance, dans les deux mois à partir de la découverte de la fraude, M. Demolombe prévoit positivement le cas qui nous occupe ici, celui d'un enfant pour lequel la maternité de la femme n'est pas établie, et il décide qu'alors le délai ne court pas, parce qu'il n'y a pas lieu au désareu!... « Pour que le délai de l'action en désaveu puisse courir, dit notre ancien collaborateur de la Revue critique, il faut avant tout qu'il y ait lieu à cette action. Le désaveu a pour but de dépouiller l'enfant de

(1) Nous trouvons ici la question, neuve en doc- que que nul ne peut contester l'état de celui qui a une trine, que nous avons annoncée, pour le cas d'en- possession conforme à son titre de naissance. C'était fants nés en mariage, dans la note de l'arrêt quila, ce semble, de graves difficultés contre l'admisprécède. sion du désavea. Néanmoins il a été admis, non seuUne femme mariée accouche d'un enfant dont elle lement dans la précédente espèce, et par l'arrêt d'apcache soigneusement la naissance, et qu'elle fait in- pel et par l'arrêt de cassation, mais aussi dans l'esscrire aux actes de l'état civil sous des noms suppo-pèce actuelle; et nous pensons que c'est avec raison. sés et comme né de père et mère inconnus; puis, menacée d'une action du mari, elle obtient de l'excessive complaisance d'un homme et d'une femme célibataires qu'ils reconnaissent cet enfant, et qu'ils se marient ensuite pour lui conférer la légitimation... Le mari de cette femme pourra-t-il, en présence de ces faits, ou du moins en alléguant ces faits et offrant de les prouver, être reçu à désavouer l'enfant? La question, qui n'est (à notre connaissance du moins) prévue par aucun auteur, ne s'était pas non plus présentée jusqu'ici devant les tribunaux dans les termes et avec les complications qu'elle offre ici. Déjà, toutefois, dans l'affaire Burthe, successivement jugée par la Cour de Paris et par la Cour de cassation (V. Paris, 6 janv. 1849 [t. 1 1849, p. 649]; Cass., 4 fév. 1851 [t. 2 1851, p. 374]), il s'était présenté une question très voisine de celle-ci, et dont la solution devait conduire à celle que consacre le nouvel arrêt qui nous occupe car, des diverses difficultés que sonlève la question actuelle, deux se trouvaient déjà dans la précédente. Dans l'espèce que nous rappelons, l'enfant, également inscrit sous de faux noms, n'avait été ni légitimé, ni reconnu; mais la première circonstance suffisait déjà pour autoriser à prétendre 1° que, puisque l'enfant n'occupait ni ne réclamait aucune place dans la famille du mari, il ne pouvait dès lors y avoir lieu à un désaveu de celui-ci; et 20 que ce désaveu se trouvait d'autant plus inadmissible, que le mari ne pourrait l'intenter que sous la condition de prouver tout d'abord que l'enfant était bien né de l'épouse à la quelle l'acte de naissance le disait étranger, et que lui permettre une semblable preuve ce serait admettre au profit d'un tiers et contre l'enfant une recherche de maternité qui n'est autorisée par la loi que dans l'intérêt de cet enfant.... Ainsi, deux objections fort sérieuses étaient faites contre la possibilité du désaveu en pareil cas: il violerait, disaiton, les art. 312 et 313, qui, en permettant au mari de désavouer l'enfant conçu pendant le mariage, n'entendent évidemment parler que d'un enfant pour lequel la maternité de la femme est dès à présent constante; et il violerait de même les art. 341 et 342, puisque ces articles, d'une part, ne permettent la recherche de la maternité qu'à l'enfant, et, d'autre part, ne la permettent jamais quand elle doit avoir pour résultat la constatation d'un adultère.... A ces objections, il s'en joint une nouvelle dans l'es-la présomption légale de légitimité que son titre on pèce de l'arrêt qui est ici recueilli. L'enfant ayant été reconnu et légitimé par d'autres époux, et occupant ainsi, dans une famille autre que celle du mari qui voulait le désavouer, une place justifiée tout à la fois par ses titres et par la possession d'état, c'était le cas, disait-on, de la seconde disposition de l'art. 322, qui déclare de la manière la plus énergi

sa possession lui donne; or l'enfant qui n'a titre ni possession n'a pas en sa faveur cette présomption; aussi faut-il qu'il réclame son état, il ne le possède pas: donc il n'y a pas lieu de le désavouer » (no 145, p. 138). On voit par là que M. Demolombe serait bien plutôt l'adversaire que le partisan de la doctrine que nous venons défendre, et qu'on s'est gravement

D'H... C. D'H...

Le 24 déc. 1852, jugement du tribunal civil de la Seine ainsi conçu :

seil de famille qu'il appartient de lui nommer un tuteur ad hoc, pour défendre en son nom à l'action en désaveu formée par d'H.......; qu'ainsi la procédure est régulière; Attendu qu'un acte dressé le 28 mars 1848, à la mairie du dixième arrondissement de la ville de Paris, sur la dé

<< Attendu qu'en raison de la position exceptionnelle où se trouve l'enfant appelé Fernand de Walhstein, c'est au tribunal, et non à un con-claration d'Angélique Tonnelier, sage-femme,

trouve installé, de même il doit m'être permis d'attaquer celui dans les mains duquel je trouve une clef de ma maison, et de lui enlever cette clef qu'il n'a pas le droit d'avoir. C'est le cas de dire, comme le fait M. Demolombe lui-même pour une autre hypothèse, que l'enfant pourrait vouloir attendre pour agir le décès des témoins, le dépérissement des preuves; et la pensée de la loi ne peut pas être de mettre ainsi moi et les miens à sa discrétion. Remarquons bien, en effet, que l'enfant qu'on a fait inscrire sous de faux noms pour le soustraire au désaveu du mari pourra très souvent avoir de sa mère des lettres ou autres preuves écrites au moyen desquelles il lui sera facile d'établir quand il le voudra, et à toute époque qu'il lui plaira, la maternité de la femme, tandis que la preuve de la non-paternité du mari reposera seulement sur des témoignages que le temps finira par rendre impossibles; en sorte que la mère et l'enfant seraient presque toujours sûrs de réussir dans leur fraude. N'est-il pas évidemment impossible d'admettre un tel résultat ?

La seconde objection, qui se tire des art. 341, 342, et qui est pour ainsi dire double, reçoit dans chacune de ses parties une réponse également facile.-On dit d'abord que, la recherche de la maternité n'étant permise par l'art. 341 qu'au profit de l'enfant, le mari dès lors n'a pas le droit de l'exercer, et que l'action en désaveu se trouvant ici subordonnée par la force même des choses cette recherche du mari (puisque la maternité n'est pas dès à présent établie, et que c'est par sa constatation que le mari doit débuter), cette action est par conséquent inadmissible. - On ajoute que, quand même cette recherche de la maternité par un autre que l'enfant serait possible généralement, elle ne le serait toujours pas ici, puisqu'elle tend alors à conduire à la constatation d'une filiation adultérine, ce que l'art. 342 ne permet jamais.

mépris quand on a cru pouvoir invoquer son nom à l'appui de cette doctrine. Il est bien vrai, en effet, que l'honorable professeur n'a pas spécialement traité la question au point de vue précis qui nous occupe ici; il n'a pas été jusqu'à dire positivement que, tant que l'enfant ne se présente pas comme enfant de l'épouse, l'action du mari serait rigoureusement non recevable, et c'est ce qui nous a permis de signaler la question comme étant neuve encore en doctrine. Mais on ne voit pas trop comment les idées émises par M. Demolombe permettraient une autre conclusion. Dire que l'action en désavcu suppose que l'enfant se trouve dès à présent dans la famille et possède son état, expliquer que tant qu'il n'en est pas ainsi il n'y a pas lieu au désaveu, enseigner que le délai de deux mois imparti au mari par l'art. 316 ne peut pas courir dans ce cas, d'après le principe que nulle prescription ne court contre celui qui ne peut pas agir, c'est bien dire sous une autre forme que cette action n'est pas possible alors pour le mari, qu'elle n'est pas encore ouverte, et que, par conséquent, l'époux y doit être déclaré non recevable. Aussi, bien loin de pouvoir devenir dans nos mains une arme au profit de notre thèse, l'explication de M. Demolombe, au contraire, forme une nouvelle objection qu'il nous faudra joindre à celles que nous avons indiquées déjà pour les discuter toutes successivement. Ces objections se trouvent être ainsi au nombre de quatre et même de cinq (si l'on veut diviser les deux partics de la seconde).-La première consiste à dire, comme le faisait M. l'avocat général Moulin devant la Cour de Paris lors de l'arrêt du 6 janv. 1849, et comme le fait M. Demolombe dans le passage cidessus, que les art. 312, 313, quand ils permettent au mari de désavouer un enfant, n'entendent parler que de l'enfant pour lequel la maternité de l'é pouse est un fait reconnu : le désaveu, dit-on, n'a et ne peut avoir pour but de la part du mari que de faire sortir de la famille un enfant qui lui est étranger; or, pour qu'il puisse être question de l'en faire sortir, il faut avant tout qu'il y soit, il faut qu'il se trouve dès à présent légalement rattaché à là fem-loi permettant au iari de se garantir contre l'invame mariée par un acte de naissance ou une posses- sion d'enfants étrangers, elle lui permet virtuellesion d'état dont le désaveu viendra détruire les ef- ment par là même, et d'après ce principe de raison, fets. Tant que cet acte ou cette possession n'existent Qui veut la fin veut les moyens, les preuves prélimipas, le désaveu n'a pas d'objet, il n'a rien à com- naires que les circonstances peuvent rendre nécesbattre, il est impossible par la nature même des saires, et notamment celle de la dissimulation de la choses. L'idée sur laquelle repose cette première maternité, quand cette maternité a été dissimulée. objection n'est au fond qu'une pétition de principe, C'est donc dans les art. 312, 313, et nullement dans une solution de la question par la question même l'art. 341; c'est dans un principe qui lui est propre car la question est précisément de savoir si l'objet et que la loi a posé pour lui contre l'enfant, que le du désaveu est seulement d'exclure de la famille ce- mari puise ici son droit, comme l'a fort bien remarlui qui s'y trouve déjà placé, ou aussi d'en fermer qué l'arrêt ici recueilli. Et ce qui le prouve bien clail'accès à celui qui, sans y être actuellement, a durement, c'est que personne ne songerait certainement moins le moyen d'y entrer. Ne peut-on repousser que l'enfant qui se trouve au foyer de fait et ostensiblement? ou ne peut-on pas repousser de même celui qui s'y trouve, du moins virtuellement, par ce fait même (non constaté encore, il est vrai, mais réel pourtant) que l'épouse est vraiment bien sa mère? Telle est la question; et comme c'est précisément l'objet de cette question qui fait la base de l'objection, celle-ci n'est dès lors rien autre chose qu'une pétition de principe.-Quant à la solution de la question, celle qu'admet la jurisprudence nous paraît la plus juste. De même qu'il m'est permis d'attaquer, pour l'expulser de ma demeure, l'étranger que j'y

Or voici la réponse:- Quant à l'art 341, ce n'est pas dans cet article, mais bien dans les art. 312, 313, et dans les principes généraux, que le mari trouve son droit de constater la maternité de la femme : la

à exiger ici du mari un commencement de preuve par écrit (dont le tribuna!, dans l'espèce actuelle, a eu soin, il est vrai, de constater l'existence, mais bien surabondamment). Or ce commencement de preuve par écrit est, au contraire, absolument indispensable dans le cas de l'art. 341. C'est qu'en effet nous sommes ici dans un cas de fraude; c'est une série de fraudes que le recel de la naissance de l'enfant, son inscription sous de faux noms, et autres précautions prises par la femme: or on sait qu'en présence de la fraude tous les principes se taisent, pour laisser pleine et entière latitude à la preuve de celui contre qui cette fraude est dirigée: Fraus omnia corrumpit.—Ďeux ré

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