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tenu par suite le testament postérieur par lequel le donateur avait disposé gratuitement des biens compris dans l'institution.

Du 3 JANVIER 1843, arrêt C. cass., ch. req., MM. Zangiacomi prés., Bayeux rapp., Pascals uv. gén., Mandaroux-Vertamy av.

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«LA COUR; Attendu que le contrat de mariage qui a donné lieu au procès contient deux dispositions: la première est une donation entre vifs, claire, formelle, et qui n'a point été attaquée; la seconde est celle où l'on a prétendu voir une institution d'héritier;

Attendu que cette clause pouvait être considérée, en effet, comme contenant une institution, mais aussi comme ne présentant qu'une manière plus positive d'expliquer que, le cas de partage arrivant, le donateur entendait bien que la donation objet de la première disposition ne fût sujette à aucun rapport;

» Attendu que, dès qu'il y avait du doute sur le sens et le caractère de la disposition, la Cour a pu l'interpréter dans le sens qui lui a paru le plus conforme aux intentions des parties sans violer aucune loi; REJETTE.

COUR DE CASSATION:
(3 janvier 1843.)

Une Cour royale peut, sans sortir des limiles du pouvoir d'appréciation qui lui appartient, déclarer qu'un acte par lequel un individu s'est reconnu débiteur d'une somme déterminée en faveur des parents de sa femme, et payable après son décès, est une libéralité à cause de mort, et par conséquent révocable par un lestament postérieur (1).

BEER C. BEER.

Le sieur Béer de Turique est décédé laissant trois testaments ou codicilles faits à des dates successives.

Dans le premier de ces testaments, en date du 15 mai 1832, le testateur s'exprimait ainsi : • Voulant agir avec la plus stricte justice mon intention et ma volonté consistent à faire rentrer ma famille dans la fortune que j'ai reçue de mes parents....., comme également de - rendre à la famille de ma femme, dont j'ai toujours eu à me louer, tout ce ce que cette dernière a gagné par son travail et par son industrie.... Je suis persuadé que ma famille ne

(1) La difficulté, dans cette affaire, n'était pas précisément de savoir si une libéralité pouvait se déguiser sous la forme d'un contrat onéreux, co qui est établi par un grand nombre d'arrêts. (V. notamment Cass. 20 nov. 1826, 23 avril 1827, 12 nov. 1827; Grenoble, 14 janv. 1824, et la note. -V. aussi Delvincourt, C. de C. civ., t. 2, p. 181; Chabot, Quest. transit., vo Donation déguisée; Merlin, Quest., vo Donation, $5; Grenier, Donations, t. 1, no 180; Toullier, Dr. civ., t. 4, no 474.) Il s'agissait plutôt d'examiner si la Cour royale avait fait une juste appréciation des actes produits en reconnaissant dans l'obligation du 15 fév. 1837 un acte testamentaire et par conséquent révocable. Nous avons dû donner le texte des différents actes, afin que l'on pût se rendre compte

de la solution adoptée.

pourra se plaindre de ma manière d'agir, en faisant un partage équitable entre elle et celle de mon épouse. Elle n'ignore pas qu'en me mariant j'ai reçu en dot 13,737 fr., avec lesquels ma femme a commencé à travailler. Mes maladies et constamment ma mauvaise santé m'ont empêché de la seconder. C'est donc grâce à la Providence d'abord, et ensuite à mon épouse, que je puis rendre intacte la fortune que j'ai reçue de mes parents. Il y aurait donc injustice de ma part à ne pas rendre l'excédant à ceux qui moralement ont le droit d'y prétendre. •

Le testateur, après avoir fait l'énumération des valeurs composant sa fortune personnelle et après diverses dispositions au profit de ses parents, ajoute :

« Ayant disposé de la fortune que j'ai reçue de feu mes parents, par les douze articles qui précèdent, il me reste maintenant à en faire autant de celle acquise par ma femme. Je dispose donc en faveur de sa famille comme il suit. (Viennent plusieurs legs s'élevant à plus de 100,000 fr.)

Après avoir porté quelques modifications à ces dispositions par un testament en date des 16, 19 et 20 sept. 1836, le sieur Béer de Turique, par un testament olographe du 15 fév. 1837, institua Charles Béer son légataire universel, à la charge par lui (est-il dit dans l'acte) d'exécuter et faire exécuter toutes les dispositions que j'ai écrites dans les divers actes testamentaires rappelés, tant au profit de ma propre famille que de la famille de défunte mon épouse chérie, des legs pieux, etc...

Enfin, par acte dudit jour 15 fév. 1837, le sieur Béer se reconnut débiteur d'une somme de 118,000 fr. envers les parents de sa femme. Le billet par lui souscrit est ainsi conçu :

Je soussigné Isidore Béer de Turique déclare devoir la somme de 148,000 fr. aux parents de mon épouse, savoir:

A Madame Caroline Béer, veuve Hartogs, demeurant à Aix-la-Chapelle, en Prusse, la somme de 32,000 fr.;

A M. Hippolyte Béer, médecin, demeurant à Thionville, la somme de 20,000 fr.

A M. Charles Béer, domicilié à Lunéville, fabricant de gants, la somme de 20,000 fr.;

A Madame Bore Natham, née Béer, épouse de M. Abraham Natham, fabricant de gants à Lunéville, la somme de 20,000 fr.;

⚫A M. Cerf Béer, commis voyageur, actuellement à New-Yorck, la somme de 20,000 fr.;

A Mademoiselle Pauline Leroux, fille de Madame Hartogs, ci-dessus dénommée, la somme de 6,000 fr.;

cès seulement, et sans intérêts jusque là ; Le tout payable en bons écus, à mon démais ensuite aves intérêts au taux légal, sans retenue jusqu'au paiement.

»Fait à Nanci le 15 fév. 1837. Bon pour la somme de 118,000 fr.

Signé Isidore BÉER DE TURIQUE. » billet, la demoiselle Pauline Hartogs s'étant Quelque temps après la confection de ce mariée, le sieur Béer de Turique consentit à exigible, la somme de 6,000 fr, dont il s'était lui payer, comme si elle eût été actuellement

reconnu débiteur envers elle par l'acte qui vient d'être rapporte.

Après la mort du sieur Béer de Turique, arrivée le 6 mai 1840, et lors de l'inventaire, Charles Béer ayant produit une copie de l'ob tigation de 118,000 fr. souscrite par le défunt au profit des parents de sa femme, on refusa de reconnaitre la validité de cet engagement.

Sur ce refus, les parties indiquées comme créanciers du sieur Béer de Turique par l'acte du 15 fév. 1837 firent sommation aux héritiers du défunt de déclarer s'ils entendaient considérer les exposants comme créanciers de la succession, et s'ils voulaient en conséquence traiter avec ceux pour le paiement de la somme de 112,000 f. représentant celle de 118,000 f portée dans l'acte du 15 juil. 1837, après en avoir déduit celle de 6,000 fr. qui avait été payée à la demoiselle Hartogs lors de son mariage.

Sur cette sommation, les sieurs Léon Moïse, Isale Béer, Isaac Abraham, agissant en quali té d'exécuteurs testamentaires de Béer de Turique en vertu d'un dernier testament en date du 28 juin 1828, firent sommation à Charles Béer, nommé par le même acte, concurremment avec les susnommés, exécuteur testa mentaire, de se trouver le 26 déc. 1840 pour procéder à la liquidation de la succession du sieur Béer.

On lit dans ce dernier testament :

« Tous les actes émanés de moi antérieurement aux présentes, et par lesquels j'aurais fait distribution, emploi ou abandon quelconque de tout ou partie de ma fortune par donation entre vifs ou à cause de mort, en quelque forme que ce puisse être, sont déclarés nuls et non avenus, »

Le testateur fait ensuite aux parents de sa femme différents legs dont le total se trouve être d'une somme de beaucoup inférieure à celle portée dans la reconnaissance du 15 fév. 1837.

En conséquence, toutes les parties indiquées dans cet acte comme créanciers du défunt assignèrent les héritiers de celui-ci en paiement de la somme de 112,000 fr. restant due sur la somme de 418,000 fr. dont le sieur Béer de Turique s'était reconnu débiteur. Ils déclarérent en même temps qu'ils n'entendaient point cumuler le bénéfice résultant pour eux de cet acle de 1837 avec les avantages stipulés en leur faveur dans le testament olographe du 28 juin 1838.

La cause en cet état, jugement du tribunal de Nanci qui rejette la demande.

Sur l'appel, arrêt confirmatif de la Cour royale de Nanci, en date du 19 août 1841, ainsi motivé :

• « Considérant que l'acte du 15 fév. 1837, par Jequel Isidore Béer s'engage seul envers les parents de sa femme qui y sont dénommés à leur payer la somme de 118,000 fr., est régulier en la forme, aux termes de l'art. 1326 C. civ.; Que, suivant les art. 1131, 1132 et 1133, l'obligation qu'il renferme n'est pas moins valable, quoique la cause n'en soit pas exprimée, si, en réalité, il en existe une qui ne soit ni prohibée par la loi ni contraire aux bonnes mœurs ou à l'ordre public;

» Considérant qu'il peut exister une double cause à une obligation de cette nature portant reconnaissance de devoir une somme déterminée, ou engagement de la part des titulaires au souscripteur de l'acte d'une somme ou d'une valeur équivalente à la somme énoncée en l'acte, ou bien l'intention de la part de celuici de faire à ceux-là la libéralité de cette somme;

» Considérant que cette intention de la part d'Isidore Béer de gratifier d'une partie de ses biens les appelants parents de sa femme résulte des testaments antérieurs des 15 mai 1832, 16, 19 et 20 sept. 1836, et encore du testament olographe du même jour que l'acte en litige (15 fév. 1837), produit par les appe lants, testament dont l'acte du 15 fév. ne fait que reproduire avec quelques modifications les dispositions principales ;

Considérant, d'un autre côté, quant à la forme, que d'après l'art. 914 C. civ., et la jurisprudence que plusieurs arrêts de la Cour royale de Nanci ont contribué à établir, des dispositions à titre gratuit permises à celui qui les consent et en faveur de ceux qui les reçoivent, ainsi qu'il échet au cas particulier entre les appelants et Isidore Béer, qui pouvait disposer à leur profit de l'universalité de ses biens, peuvent être valablement faites, sans recourir aux règles prescrites pour les donations entre vifs et testaments, sous la forme du contrat à titre onéreux;

» Que ces dispositions à titre gratult ainsi déguisées doivent recevoir leur exécution.... Puis la Cour prononce, par suite, la révoca tion par testament postérieur.

Pourvoi basé sur un excès de pouvoir, sur la violation des art. 1134 et 894 C. civ., et sur la fausse application de l'art. 1035 du même Code DU 3 JANVIER 1843, arrêt C. cass., ch. req., MM. Zangiacomi prés., Joubert rapp., Pascalis av. gen., Mandaroux-Vertamy av.

LA COUR ; · Attendu que l'arrêt attaqué n'a fait autre chose, par la décision qu'il contient, qu'interpréter les uns par les autres les actes présentés à son appréciation, et qu'en cela il n'a fait qu'user du pouvoir discrétionnaire qui lui appartient dans cette circonstance; REJETTE, etc. »

COUR ROYALE DE PARIS.

(3 janvier 1843.)

L'héritier bénéficiaire d'un colon de SaintDomingue est tenu de rendre comple des neuf dixièmes de l'indemnité non compris dans la saisie-arrêt pratiquée par les créanciers, el, par suite, il peut être astreint à fournir caution (1). C. civ. 803; 808; L. 30 avril 1826, art. 9.

(1) Cette solution sur une question long-temps controversée est conforme au dernier état de la jurisprudence. V. Cass. 13 mai 1840.

HÉRITIERS DE VAUCRESSON

C. DE BOUTEiller.

Ainsi jugé par le tribunal civil de la Seine le 16 juil. 1843, en ces termes :

Le tribunal; Sur la demande subsi

diaire à fin de caution: — - Attendu que la loi du 30 avril 1826 n'a pas décidé que les colons seraient libérés par la remise aux créanciers du dixième de leur créance; qu'ainsi la position du débiteur et des créanciers est, quant à l'exercice du surplus de leur créance, régie par le droit commun:

Que le colon et son héritier simple peuvent être poursuivis pour les 9 autres 40 de la créance sur tous les biens personnels dans lesquels l'indemnité se confond; que, lorsque la succession est acceptée sous bénéfice d'inventaire, la séparation de patrimoines qui en est la conséquence maintient à la succession bénéficiaire la propriété du surplus de l'indemnité ;

Qu'en conséquence l'héritier bénéficiaire doit comprendre ce qu'il reçoit de cette in demnité dans son compte de bénéfice d'inven ́taire, et qu'il peut même être obligé de fournir caution pour ce qu'il a reçu ou pour ce qu'il demande à recevoir sur le montant de

l'indemnité;

»Ordonne que les héritiers de Vaucresson fourniront caution de toutes les sommes et valeurs provenant de l'indemnité qu'ils auraient touchée ou qu'ils toucheraient à l'avenir, etc. »

Appel par les héritiers de Vaucresson.

DU 3 JANVIER 1843, arrêt C. roy. Paris, MM. Séguier er prés., Nouguier av. gén. (concl. conf.), Bautier et Caubert av. Adoptant les motifs des pre miers juges, CONFIRME. D

.LA COUR,

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BERNADAC ET SOURNAIN

C. POUBILLE ET AUTRES.

La société des mines et forges de Ria avait donné ces usines à bail aux sieurs Bernadac et Sournain, maîtres de forges, et dans l'acte ceux-ci avaient fait élection de domicile à Paris pour l'exécution du bail.

Plusieurs créanciers de la société, au nombre desquels se trouvait le sieur Poubille, ayant formé une saisie-arrêt entre les mains de Bernadac et Sournain, et la déclaration affirmative qui suivit ayant été contestée, les tiers saisis demandèrent leur renvoi devant le tribunal de Prades, lieu de leur domicile, conformément aux dispositions de l'art, 570 C. proc. civ.

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Appel par Sournain et Bernadac.

dans le bail à eux consenti ne faisait pas déro Ils soutenaient que l'élection de domicile gation au droit commun. Cette élection, en effet, n'avait rapport qu'à l'exécution du bail, trangers à cet acte, ne pouvaient invoquer une et ne devait pas s'appliquer aux tiers, qui, é clause dont le bénéfice n'appartenait qu'aux parties qui y avaient figuré.

DU 3 JANVIER 1843, arrêt C. roy. Paris, 1o ch., MM. Séguier 1er prés., Nouguier av. gén. (concl. conf.), Marie, Fontaine et de Goulard

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COUR ROYALE D'ORLEANS.

Une société de commerce qui n'a point élé
(3 janvier 1843.)
constatée par écrit ne peut être prouvée
par témoins, même entre les prétendus
associés, alors même qu'il existerait un
commencement de preuve par écrit (1).
C. comm. 39, 41 et 42.

Mais s'il résulte des fails el circonstances
que des rapports d'intérêts communs se
sont établis entre les parties, el si celle
communauté a produit des avantages
pour l'une d'elles ou des pertes pour l'au-
tre, celle dernière a droit à des domma-
ges-intérêts qui, en cas de difficultés,
doivent être réglés par les tribunaux

(1) L'ord. de 1673, art. 1, tit. 4, exigeait que toute société fût rédigée par écrit.

Nonobstant cette disposition, qui semblait exclusive de toute preuve testimoniale, il était de jurisprudence constante qu'on pouvait prouver par témoins l'existence d'une société commerciale non rédigée par écrit, lorsqu'il y avait un commencement de preuve par écrit. V. Merlin, Répert. de jurispr., t. 12, p. 681, no 2. Mais, dit le même jurisconsulte (p. 697, no 2), on ne le pourrait plus, sous le Code de commerce, que relativement aux tiers. Pour les associés entre eux rien ne peut, sous ce Code, tenir lieu de l'acte de société ; c'est la conséquence nécessaire de l'art. 42.

En effet, 1° exiger à peine de nullité, comme le fait cet article, qu'un extrait de l'acte de société soit transcrit au greffe du tribunal de commerce c'est nécessairement, et aussi à peine de nullité,

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exiger que l'acte de société soit rédigé par écrit, puisque autrement cette disposition serait inexécutable. A quoi bon d'ailleurs admettre le demandeur à faire preuve d'une convention qui serait nulle à défaut de cette transcription, et qui dès lors ne pourrait produire aucun effet légal ? Frustra probatur quod probatum non relevat.

Il est vrai que l'art. 2 de l'ordonnance de 1673 exigeait également que l'acte de société fùt transcrit au greffe, et que malgré cela on ne prononçait pas la nullité des actes de société à l'égard desquels cette formalité n'avait pas été observée; mais pourquoi cela? Parce que, dit encore Merlin (p. 695, no 4), la disposition de l'art. 2 de l'ordonnance de 1675 était tombée en désuétude et ne s'observait plus; c'est-à-dire, conséquemment, par un motif qui est sans force et sans valeur aujourd'hui, attendu que, dans l'état de notre législation, la désuétude n'est plus une cause d'abrogation des lois.

20 Quand il s'agit d'achats et de ventes entre négociants, Tart. 109 C. comm. déclare qu'ils peuvent être prouvés notamment par la preuve tes timoniale dans le cas où le tribunal croira detoir l'admettre. Or l'art. 39 du même Code ne dispose pas de la même manière à l'égard des sociétés : donc il l'a rejetée.

Il est vrai encore que l'art. 1347 C. civ., qui forme le droit commun, permet d'admettre la preuve testimoniale dans tous les cas où il existe un commencement de preuve par écrit; mais prenons garde que les rédacteurs du Code de commerce, qui dans Part. 41 ont répété les dispositions de l'art. 1341 C. civ., ce qui était complétement inutile s'ils eussent entendu laisser les sociétés commerciales sous l'empire du droit commun, n'ont pas rappelé l'art. 1347. D'où la conséquence qu'ils ont voulu l'exclure, car Inclusio unius est exclusio alterius.

5. Enfin il est certain que la question a été soumise au conseil d'état lors de la discussion de l'art.39, et que, si elle n'a pas été formellement tranchée, c'est parce qu'on a reconnu qu'elle se rattachait moins à l'art. 41 qu'à l'art. 42; « attendu qu'en ordonnant la remise au greffe d'un extrait des actes de société, cet article supposait que tous ces actes devaient être rédigés par écrit, en sorte que cette induction toute naturelle remplaçait le principe, qui n'était pas formellement posé, de l'obligation d'écrire de tels contrats.»> D'où M. Locré conclut que puisque le conseil d'état a confondu la question de savoir quel serait, relativement à la preuve de l'association, l'effet de l'absence de tout acte écrit, et celle qui concernait le nullité faute de publication, il est évident que la décision intervenue sur cette dernière question résout également l'autre. V. Esprit C. comm., t. 1er, p. 162.

Tel est aussi l'avis de M. Pardessus. «Celui qui voudrait, dit-il, contraindre son adversaire à exécuter, jusqu'à l'époque convenue pour sa dissolution, une société dont l'acte n'aurait pas été rédigé, ne pourrait être admis à la prouver, soit à l'aide d'un commencement de preuve par écrit, soit en produisant un acte auquel il ne manquerait que d'avoir été affiché dans la forme et les délais prescrits. La rédaction et l'affiche ayant paru d'un grand intérêt, on a voulu contraindre les associés Is'y conformer à peine de nullité à leur égard :

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LA COUR;· Attendu que la demande introductive d'instance a pour objet, de la part du sieur Dhomme contre la veuve Priot et contre le sieur Priot fils, une condamnation solidaire au paiement de 50,000 fr. à titre de dommages-intérêts résultant de l'inexécution d'un contrat de société commerciale en nom collectif, qu'il prétend être intervenu entre eux le 25 avril 1844 ;

» Attendu qu'à défaut d'un acte écrit et régulier constatant l'existence de cette convention, le sieur Dhommè en offre la preuve à l'aide de la correspondance, des déclarations judiciaires des parties, et d'autres commencements de preuves par écrit ;

» Mais attendu, en droit, que le Code de commerce, plus sévère encore que l'ordonnance de 1673, exige formellement, par l'art. 39, que les sociétés en nom collectif on en commandite soient constatées par des actes publics ou sous signature privée ;

Que, par l'art. 41, il est déclaré qu'aucune preuve par témoins ne sera admise contre et outre le contenu dans les actes de société, ni sur ce qui serait allégué avoir été dit avant l'acte, lors de l'acte ou depuis, encore qu'il s'agisse d'une somme au dessous de 150 fr.;

Que l'art. 42 du même Code prescrit la remise, dans la quinzaine de sa date, d'un extrait de l'acte de société au greffe du tribunal de commerce dans l'arrondissement duquel se trouve l'établissement social, pour être transcrit sur un registre et affiché pendant trois mois dans la salle des audiences;

Que le législateur moderne a attaché une telle importance à la rédaction par écrit des actes de société et à leur publicité, que par le décret du 12 février 1844 et la loi du 31 mars 1833 il a encore ajouté aux moyens ci-dessus énoncés l'insertion dans les journaux de la localité d'un extrait desdits actes de société, et qu'en cas d'inobservation de ces formalités il a même prononcé la peine de nullité à l'égard des associés, tout en respectant les droits des tiers, qui ne doivent pas souffrir de la négligence ou de la collusion de ceux-ci :

Attendu que toutes ces dispositions relatives à la rédaction par écrit et à la publicité des contrats de société n'ont pas eu pour objet l'intérêt privé des associés, qui, sans le secours de ces moyens, connaissent parfaitement les conventions qu'ils ont formées ;

» Qu'au contraire, elles ont été détermi

il n'est donc pas juste qu'ils aient, lorsqu'ils n'ont pas obéi à la loi, les mêmes avantages que s'ils s'y étaient conformés; la nullité est en ce cas une peine.

« Ce que l'équité commande ici, ajoute-t-il, et ceci se rattache notre seconde question, n'est donc pas de maintenir, pour l'avenir, des actes dont les contractants n'ont pas mérité d'obtenir l'execution, mais de déterminer les rapports passés d'après les règles de l'équité, qui ne permet pas que personne s'enrichisse aux dépens d'autrui, et qui veut que toute réunion d'intérêts, même fortuite, établisse des rapports et donne des droits respectifs pour se provoquer à un règlement en partage.»> V. Cours de droit commercial, l. 4, p. 80, no 1008, et Cassation, 2 juil. 1817.

nées par des vues d'intérêt public et pour prévenir les fraudes dont les tiers pourraient être victimes;

. Qu'on ne peut donc suppléer par aucun moyen à la rédaction de l'acte écrit et à sa publicité ;

⚫ Qu'aussi la sanction pénale attachée aux dispositions ci-dessus relatées est absolue et d'ordre public; qu'il ne dépend pas des parties ou de l'une d'elles de s'en affranchir, soit par une confirmation expresse, soit par une ratification tacite résultant de l'exécution plus ou moins longue d'un contrat de société, infecté dans son principe d'un vice qui ne peut être réparé ;

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Qu'il suit de là qu'un traité de société qui n'a pas été rédigé par écrit ou publié dans les formes prescrites, est nul ab initio à l'égard des prétendus associés ; qu'il n'en peut résulter aucun lien de droit entre eux, et par suite aucun préjudice à réparer pour l'inexécution d'une convention qui, par leur faute, n'a pas eu d'existence légale ;

› Attendu, néanmoins, que si des rapports d'intérêts communs se sont établis entre les parties sur l'espérance ou la foi d'une association aussi irrégulièrement formée; si de cette communauté de fait sont résultés des avantages pour l'une ou un préjudice pour l'autre, il appartient aux magistrats d'en apprécier les conséquences, d'après les principes de l'équité, qui ne permettent pas de s'enrichir aux dépens d'autrui ou de causer un dommage à qui que ce soit, sans être tenu de le réparer;

• Attendu, en fait, que de la correspondance des parties, des déclarations judiciaires faites par la dame veuve Priot, tant dans son interrogatoire sur faits et articles, que dans sa comparution personnelle devant la Cour, à l'audience du 28 décembre dernier, il résulte la preuve qu'au commencement de l'année 1840 des propositions d'association ont été adressées au sieur Dhomme par la dame Priot pour l'exploitation en commun d'une filature possédée par celle-ci dans la ville de Loches;

Qu'après de longs pourparlers, les parties arrêtèrent à Tours les bases principales d'un traité d'association qui fut même formulé par écrit le 25 avril 1841;

• Qu'à la vérité cet écrit ne fut point signé par les parties et ne reçut par suite aucune publicité, d'abord parce que le sieur Dhomme voulut, dans l'intérêt de tous, consulter préalablement un avocat de Paris sur la validité de cet acte tant en la forme qu'au fond, et se condement parce que la dame veuve Priot espérait lever très prochainement certaines difficultés qui ne permettaient pas à son fils de figurer ostensiblement dans le pacte social et rendaient nécessaire le concours clandestin d'une contre-lettre pour constater les droits de celui-ci comme associé ;

Attendu........;

» Attendu que si, d'après les principes cidessus énoncées, il ne peut résulter de tous ces faits et actes la preuve d'un contrat de Société légalement formé entre les parties;

Que si le sieur Dhomme n'a pas, comme associé, le droit de demander le partage des machines et des laines achetées avec les fonds

de la veuve Priot; que s'il n'est pas fondé à réclamer des dommages-intérêts pour la priva tion des bénéfices qu'il eût pu retirer de la société si elle eût été réalisée, il est juste du moins qu'il soit indemnisé 1° du préjudice résultant de l'abandon de la position avanta geuse qu'il avait dans l'usine du sieur Roard, de Clichy;

» 2o Des dépenses qu'il a été obligé de faire dans ses nombreux voyages de Paris à Tours, à Loches, à Reims et autres villes ;

3o Des peines et soins qu'il a consacrés pendant près de six mois aux opérations préparatoires de l'association projetée, à la direction des changements faits au mécanisme de la fabrique de Loches, et ce, dans l'intérêt de la dame Priot;

• Et attendu d'ailleurs que les documents du procès fournissent les éléments nécessaires à l'appréciation de cette indemnité; qu'elle n'a pas été fixée par les premiers juges dans une juste proportion avec le dommage à réparer; qu'il y a lieu dès lors par la Cour de procéder à une nouvelle évaluation ;

a Par ces motifs, · CONDAMNE la veuve Priot à payer au sieur Dhomme la somme de 6,000 fr. à titre d'indemnité. »

COUR ROYALE DE POITIERS.
(3 janvier 1843.)

Un acte sous seing privé renfermant des conventions synallagmatiques, mais qui n'a point été rédigé en double original, conformément à l'art. 1325, n'est pas entièrement nul; s'il ne prouve pas la convention d'une manière complète, il vaut du moins comme commencement de preuve par écrit.

GROLLEAU C. GROLLEAU.

DU 3 JANVIER 1843, arrêt C. roy. Poitiers, 2 ch., MM. Macaire prés., Calmeil et Lahen nec (du barreau de Nantes) av.

«LA COUR; Sur la question principale : Attendu que par acte sous seing privé du 7 oct. 1841 Prosper Grolleau aurait vendu à Auguste Grolleau son domaine de la Puisonnière pour la somme de 70,000 fr.;

» Attendu que, se fondant sur l'art. 1325 C. civ., portant que l'acte sous seing privé qui ne contient pas la mention qu'il a été fait en autant d'originaux qu'il y a de parties ayant un intérêt distinct n'est pas valable, les parties de Jolly persistent à prétendre, ainsi qu'elles ront soutenu en première instance, que la vente dont il s'agit est restée dans les termes d'un simple projet et doit être considérée com

me non avenue;

» Mais attendu que l'écriture n'est pas de l'essence du contrat de vente; qu'aux termes de l'art. 1583, la vente est parfaite entre les parties et la propriété acquise à l'acheteur à l'égard du vendeur dès qu'on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n'ait point encore été livrée ni le prix payé ; qu'il ne résulte ni du contenu de l'acte sous seing

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