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Considérant que l'acte du 23 juin 1829 est complétement muet à cet égard; qu'au contraire Lemercier, en disant dans cet acte qu'il révoquait purement et simplement le testament du 20 mai 1820, fait en faveur d'Anne Jeanne, semblait annoncer que c'était seulement quant à la libéralité par lui exercée au profit de cette fille qu'il entendait que l'acte du 20 mai 1820 fût regardé comme non avenu, et non quant à la révocation qu'il avait faite du testament de 4848;

⚫ Considérant que, si Lemercier eût voulu rendre l'existence à ce testament de 1848, il aurait été d'autant plus nécessaire qu'il s'en expliquát, 1° qu'il résulte de celui de 1820 que ce n'était pas Olympe Joubin qui venait exclusivement après Anne Jeanne dans l'ordre de ses affections, puisqu'en cas de prédécès de celle-ci il voulait que sa succession passat à tous ses héritiers moins un; 2o qu'Anne Jeanne, légataire universelle dans le testament révoqué de 1820, avait été instituée légataire à Litre particulier dans le testament de 1818, et qu'il devenait au moins très douteux, par le fait même de la révocation de 1829, qu'il voulût lui laisser encore une partie de sa fortude;

Considérant que dans cet état de choses il est inati e de s'occuper de la preuve offerte par les appelants.

Pourvoi basé sur la fausse interprétation des art. 1035 et 971 C. civ. en ce que l'arrêt attaqué avait refusé de donner effet à un testament dont la révocation, contenue dans un second testament, avait elle-même été révoquée par un acte conforme aux dispositions de l'art. 1035, alors que cette dernière révocation devait avoir pour effet de faire revivre le pre

mier testament.

COUR DE CASSATION.
(7 février 1843.)

Encore bien que les faits de jouissance et
de possession promiscue exercés par un
habitant sur des landes possédées par
la commune soient insuffisants pour faire
acquérir à cet habitant un droit de pro-
priété sur lesdites landes, ils lui permet-
tent cependant de conserver le droit que
ses titres lui confèrent, et d'empêcher que
la commune n'acquière par prescription
la propriété exclusive des landes (1). C.
civ. 2262.

La loi du 10 juin 1793, en déclarant l'é-
lat propriétaire des biens ayant appar-
lenu aux corporations religieuses, a en-
tendu respecter les aliénations qu'il en
avail déjà faites. En conséquence l'ac-
quéreur de ces biens a le droit de les re-
vendiquer contre le tiers détenteur, sans
que ce dernier soit fondé à lui opposer
que son titre d'acquisition a été anéanti
par la loi de 1793, el que par suite il
n'a qu'une action récursoire à exercer,
s'il y a lieu, contre l'étal. L. 10 juin
1793, sect. 4, art. 12.

COMMUNE DE VIEILLEvigne ET AUTRES
C. HÉRITIERS Brunet.

Les communes de Vieillevigne, de Montbert, et de Saint-Philibert-de-Bouaine, étaient lorsque les héritiers Brunet revendiquèrent la en possession des landes de Bouaine (Vendée), soutenaient avoir appertenu dans le principe propriété d'une portion de ces landes, qu'ils à l'ancienne abbaye de Geneston, aux droits de laquelle ils se trouvaient aujourd'hui,

Du 7 FÉVRIER 1843, arrêt C. cass., ch. req., MM. Zangiacomi prés., Joubert rapp., Delangle av. gén. (concl. conf.), Nachet av. • LA COUR ; Attendu que, si l'art. 1035 C. civ. déclare que le testament ne peut être Ces communes opposèrent la prescription, révoqué en totalité ou en partie que par un et ajoutèrent que dans tous les cas les héritestament postérieur ou par un acte portant tiers Brunet auraient dû former leur action déclaration du changement de volonté, il ap- contre l'état, déclaré par la loi du 10 juin partient aux Cours royales de juger souverai- 1793, sect. 4, art. 12, propriétaire des communement si un testateur qui a changé de volon-naux autrefois possédés par des corporations té a entendu faire revivre par ses dernières religieuses. dispositions le testament qu'il avait révoqué; Attendu que dans l'espèce la Cour royale a décidé que le troisième testament, du 23 jain 1829, révoquant le deuxième, du 20 mai 1820, ne contient rien qui exprime ou qui fas se présumer que le testateur a eu l'intention le faire revivre ses premières dispositions testamentaires;

Attendu qu'elle a jugé, d'après l'ensemble des actes soumis à son examen, que cette intention n'était pas évidente, et qu'au contraire il résultait des circonstances que le testateur n'avait pas voulu rendre à son premier testament l'effet que cet acte avait perdu par la ré vocation contenue dans l'acte du 20 mai 1820; » Attendu qu'en déclarant par voie de conséquence la demanderesse mal fondée à se pré tendre légataire universelle, la Cour royale n'a violé aucune disposition de loi; · RE

JETTE.

vaient joui promiscuement avec la commun Les héritiers Brunet répondirent qu'ils a de la portion de landes en question; que cetle jouissance, basée sur des titres, ne pouvai être réputée simple tolérance, et qu'elle avait empêché toute prescription. Relativement à l'exception fondée sur la loi de 1793, ils la repoussèrent par la production d'un acte d'adjudication que l'état leur avait consentie le 26 mai 1791, antérieurement à cette loi, de la portion des landes qu'ils réclamaient; d'où ils concluaient que l'état eût été sans qualité pour répondre à leur action.

Bourbon-Vendée qui écarte la double fin de Le 24 déc. 1839, jugement du tribunal de non-recevoir proposée par ces communes.

Appel. Le 10 dec. 1840, arrêt confirmatif de la Cour royale de Poitiers ainsi motivé:

(1) V. Cass. 50 déc. 1829.

D

« Attendu que la demande formée par les intimés est une action en partage qui ne nécessite pas la preuve préalable de la possession; que ce serait aux appelants, s'ils veulent exciper d'une possession exclusive, à l'établir pour repousser les titres qu'on leur oppose;

»Attendu que, loin d'offrir cette preuve, les communes reconnaissent que les intimés ont joui des landes de Bouaine comme les autres habitants; mais que cette possession, n'ayant pas été caractérisée par des faits particuliers, n'a pas empêché la prescription des titres;

Attendu que, la possession des intimés n'étant pas niée, cette possession, qui a été réduite au fait de pacage en commun, et sans doute à l'enlèvement de broussailles qui croissent sur ces landes, aurait été insuffisante pour acquérir un droit particulier sur la propriété ; mais que cette possession, qui ne pouvait pas être d'une autre nature que celle qui a été exercée sur des landes ou friches, étant appuyée sur des titres, a conservé la force de ces titres, et en a empêché la prescription;

» Attendu que l'art. 4 de la loi du 10 juin 4793 ne peut avoir pour objet d'annuler des aliénations faites par l'état; que cette loi a seulement eu pour effet de régulariser des possessions de fait ou usurpations, moyennant une redevance au profit des communes; mais que les intimés, ayant un titre, ne peuvent voir repousser leur demande sur cette exception;

» Attendu qu'il résulte du titre du 24 mai 1791 qu'avec le domaine de La Barillerie, l'état a vendu les droits qui appartenaient à l'abbaye de Geneston sur les landes de Bouaine.

Pourvoi des communes de Vieillevigne, Montbert et Saint-Philbert de Bouaine, pour 1° violation de l'art. 2262 C. civ., et fausse application des règles de la prescription, en ce que la Cour royale a refusé de prononcer la prescription opposée aux héritiers Brunet, sous le prétexte que, ceux-ci ayant possédé comme les autres habitants de la commune, cette jouissance, bien que ne se distinguant en rien de la jouissance des autres habitants, suffisait à elle seule pour arrêter le cours de la prescription. On disait à l'appui de ce moyen: Ces communes ont possédé utilement la totalité des landes de Bouaine, et cependant les héritiers Brunet prétendent être propriétaires exclusifs du quart de ces landes. Pourquoi ces derniers n'ont-ils manifesté pendant un laps de temps de plus de trente ans l'existence de leurs droits par aucun acte contradictoire des faits de propriété exercés par les communes? L'indivision existante peut-elle être une cause suspensive de la prescription, lorsque la possession des communes indique une idée exclusive de jouissance pro- Loin de s'opposer à la jouissance des communes, les héritiers Brunet ont au contraire fait comme tous les autres habitants: ils ont joui de la même manière qu'eux, ni plus ni moins; et l'on voudrait que ces actes de simple jouissance, qui tiraient leur origine de la qualité d'habitant, établissent des droits de propriété au détriment des communes ! De tels faits sont insuffisants pour couvrir le silence si long-temps prolongé des propriétaires. 2o Fausse application de l'art. 12, sect. 4,

miscue ?

de la loi du 10 juin 1798, qui a déclaré la nation propriétaire des biens autrefois possédés par les corporations religieuses. En vertu de cet article, les héritiers Brunet auraient dû adresser leur demande à l'état, et non aux communes; et, d'autre part, ils ne pouvaient invoquer l'acte d'adjudication du 26 mai 1791, puisqu'à cette époque l'état ne pouvait aliéner des biens dont il n'était pas encore propriétaire.

MM. Lasagni cons. f. f. prés., Hervé rapp., Delangle av. gén. (concl. conf.), Dupont

DU 7 FÉVRIER 1843, arrêt C. cass., ch. req.,

Withe av.

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LA COUR; Vu l'art. 16, tit. 3, de la loi des 29 sept.-6 oct. 1791; l'art. 1er de la loi du 16 flor. an IV; l'art. 10, § 1o, et l'art. 11, de la loi du 16 juin 1824; Attendu, en droit, que la loi du 16 juin 1824, par son art. 11, a rendu commune aux commissaires-priseurs l'obligation imposée aux notaires par l'art. 16, tit. 3, de la loi des 29 sept.-6 oct. 1794, et par l'art. 4er de la loi du 16 flor. an IV, de déposer au greffe du tribunal civil de l'arrondissement leurs répertoires dans les deux premiers mois de l'année qui suit celle à laquelle les répertoires se rapportent; que seulement l'amende proportionnelle de 100 fr. par chaque mois de retard qui était prononcée par les art. 16 et 1er des deux lois déjà citées est réduite au taux fixe de 10 fr. par l'art. 10, $1er, de la loi du 16 juin 1824;

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Attendu, en fait, qu'il est constaté par le

procès-verbal du vérificateur de l'enregistrement à la date du 1er mars 1841, et reconnu par le jugement attaqué, qu'audit jour les quatre défendeurs n'avaient pas déposé au greffe du tribunal civil de la Seine les répertoires relatifs aux actes de leur ministère qu'ils avaient faits dans l'année 1840; - Qu'en refusant de prononcer contre chacun des retardataires une amende de 10 fr., sous le prétexte que l'obligation du dépôt des répertoires n'était imposée que par l'ordonnance royale des 26 juin-22 juil. 1846, qui ne contient aucune sanction pénale, le jugement attaqué a manifestement violé les articles visés ; CAS

SE

COUR ROYALE DE TOULOUSE.

(7 février 1343. )

Les poursuites disciplinaires dirigées contre un notaire à la requête du ministère public étant d'ordre public, l'acquiescèment que la partie citée donnerait au jugement, méme non définitif, qui intervient sur ces poursuites, ne peut lui étre opposée comme fin de non-recevoir dans son appel (1).

(1) Nous avons également soutenu, dans notre Rép., v Acquiescement, no 670, que l'inculpé ne pouvait, par son acquiescement, se priver de la faculté de l'appel lorsqu'il était encore dans les délais. V., loc. cit., de nombreuses applications de ce principe.

Toutefois la question est encore aujourd'hui vivement controversée, parce qu'on est porté naturellement à appliquer au criminel les règles de la procédure civile, et peut-être en effet y a t-il quelques distinctions à faire.

Ainsi, tout en reconnaissant qu'au grand criminel, et pour ce qui est des actions qui constituent une voie de recours, on ne peut, en principe, arguer de l'acquiescement de la partie, il faut bien reconnaitre que cet acquiescement peut lui être opposé dans le cours de la procédure ou de l'instruction dans une foule de circonstances qui ont leur importance.

Il est aujourd'hui hors de toute controverse que le prévenu, par exemple, qui ne s'est point opposé à l'audition d'un témoin, à la lecture de pièces, a renoncé par cela même à se prévaloir de ce que cette audition ou cette lecture aurait pu présenter d'irrégulier. On lui oppose son acquiescement comme établissant contre lui une fin de nonrecevoir in armontable.

On pourrait même, en relevant les espèces, arriver à poser pour règle cette décision indiquée par Legraverend, Traité de législation criminelle, i. 2, ch. 2, § 1, p. 165, note 2o, col. 2, que la Cour de cassation, s'est érigée à cet égard, en Cour souveraine, et qu'elle decide à son gré, par appréciation, que l'acquiescement en matière criminelle peut être opposé à l'accusé dans telle ou telle circonstance, alors qu'il ne peut pas lui être opposé dans telle autre, et qu'ainsi elle peat à son gré casser ou maintenir.

L'acquiescement se réduirait ainsi, en matière criminelle comme en matière civile à une simole appréciation de fait; mais e principe serait le même,

Le jugement qui, sur des poursuites disciplinaires intentées contre un notaire pour avoir écrit des actes sur du papier ayant déjà servi dans l'étude, mais lavé par un procédé chimique, nomme des experts pour en faire la vérification, est un jugement interlocutoire, susceptible d'appel avant le jugement du fond (2).

Mc M... C. Ministère public.

Un vérificateur de l'enregistrement avait dressé contre Me M.., notaire, un procès-verbal constatant que plusieurs actes de l'étude de ce notaire étaient écrits sur des feuilles de papier timbré ayant déjà servi, et remis à neuf par un lavage chimique. Le ministère public auquel ce procès-verbal fut transmis, cita le notaire devant le tribunal civil de sa résidence par voie disciplinaire, et prit des conclusions tendantes

Ce systeme d'interprétation a même été étendu par la Cour de cassation aux voies mêmes da recours directs; spécialement, lorsqu'il s'agit du défaut de notification de l'arrêt de renvoi et de l'acte d'accusation en délai utile pour faire courir les délais du recours en cassation, elle a jugé d'abord que le prévenu pourrait renoncer à co recours en donnant son consentement formel l'ouverture des débats, et bientôt elle a décidé que, si ce consentement n'était pas formellement exprimé il pouvait se présumer. Cass. 13 oct. 1813.

Voilà donc l'acquiescement, même tacite, appliqué, au grand criminel, à une voie de recours, c'est-à-dire une application directe des règles de la procédure civile.

Ne sera-t-on pas porté plus facilement encore à faire cette même application à la procédure devant les tribunaux correctionnels, et, à plus forte raison encore, aux tribunaux civils prononçant en matière di-ciplinaire?

l'ac

Du reste, l'arrêt que nous rapportons, tout en consacrant de la manière la plus nette et la plus précise le principe qu'en matière disciplinaire comme en matière criminelle ou correctionnelle, quiescement ne peut jamais être opposé à l'inculpé comme fin de non-recevoir dans son appel, échappait, en définitive, à la discussion de droit, par ce dernier motif que, dans tous les cas, il s'agissait, non d'une décision définitive, mais d'un était recevable, par cela seul qu'il pouvait exerjugement interlocutoire à l'égard duquel l'appel cer une certaine influence sur le jugement du fond.

Or, il est de règle, même en procédure civile, que l'exécution d'un jugement interlocutoire qui ne préjuge pas nécessairement le jugement du fond n'emporte pas fin de non-recevoir contre l'appel.

Les tribunaux ont d'ailleurs, relativement aux poursuites disciplinaires, un pouvoir d'appréciation que l'on peut considérer, en quelque sorte, comme étant sans limites.

C'est ainsi que la Cour de cassation, par arrêt du 15 déc. 1846, a décidé qu'en matière disciplinaire (à l'occasion de poursuites dirigées contre un notaire), le tribunal saisi de la poursuite avait un pouvoir discrétionnaire pour apprécier les faits, et que le ministère public ne pouvait se faire un moyen de cassation de ce qu'il n'aurait pas été admis à la preuve de ceux qu'il signalait comme pertinents.

(2) Y. conf. Orléans, 24 avril 1845.

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-

« LA COUR ; Attendu que la juridiction disciplinaire est une juridiction tout exceptionnelle, et qu'elle participe de la juridiction ci vile par le tribunal qui doit connaître de l'action, et de la juridiction correctionuelle ou répressive par la nature des peines à infliger; Que la suspension, la destitution et même l'amende, qui peuvent être prononcées, sont de véritables peines, puisqu'elles ont pour résultat d'enlever à un officier mini-tériel sa profession, quelquefois aussi son honneur ; Que ces poursuites, faites surtout à la requête du ministère public, sont d'ordre public, et que sous ce rapport, tout acquiescement de la part de la partie citée devant la justice ne peut lui être opposé comme fin de non-recevoir dans son appel:

Attendu que le jugement rendu par le tribunal civil de Montauban ne peut être rangé dans la classe des simples jugements préparatoires ou d'instruction, puisque le résultat de l'opération chimique ordonnée peut fournir la preuve que non seulement les actes ont été passés sur du papier lavé, mais encore sur du papier timbré şortant de l'étude de M et sur des actes rédigés par lui; que, sous ce rapport, le jugement est interlocutoire, et qu'il peut exercer une certaine influence sur le jugement du fond; Qu'ainsi ce jugement est susceptible d'appel avant le jugement sur le fond de l'affaire; Au fond, etc..

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COUR DE CASSATION.

(8 février 1843. )

A moins de volonté contraire exprimée par le lestaleur, le légalaire particulier de l'usufruil est tenu de contribuer aux delles de la succession lorsque les biens libres ne suffisent pas pour les acquiller. Celle contribution s'opère par voie de réduction entre lui et le légalaire de la nue propriété, conformément à l'art. 1024 C. civ. combiné avec les art. 926 el 612 C. civ., el non d'après la va

leur de l'usufruil fixée eu égard à l'âge de l'usufruilier (1).

DE GRAS-PRÉVILLE

C. MARESCOT ET AUTRES.

Le testament de la dame de Gras-Préville contenait disposition de l'usufruit de plusieurs immeubles en faveur de son mari, et de la nue propriété de ces immeubles en faveur d'autres personnes. La valeur des biens restés libres étant insuffisante pour payer les dettes, il devint nécessaire, pour arriver à ce paiement, de recourir à une réduction proportionnelle des legs. Le sieur de Gras-Préville prétendit qu'il résultait des art. 641 et 612 C. civ. que le légataire à titre particulier en usufruit ne pouvait jamais être tenu de contribuer aux dettes; que dès lors la réduction ne pouvait porter sur les legs particuliers d'usufruit qu'a

(1) La question de savoir si l'usufruitier même universel ou à titre universel est tenu de contribuer aux dettes de la succession est entre les auteurs l'objet d'une controverse. M. Proud'hon, Des droits d'usufruit, t. 4, no 1797, est d'avis de l'affirmative, et, pour soutenir cette opinion,

se fonde 1o sur la maxime Bona non intelliguntur nisi deducto ære alieno; 2o sur un argument d'analogie puisé dans l'art. 1409 C. civ.; sur les art. 871 et 612 du même Code. - M. Toullier, t. 3, no 432, paraît être d'un avis contraire, et cette doctrine a été adoptée par un arrêt de Toulouse du 14 juil. 1840) (t. 1 1841, p. 283). Nous ferons toutefois observer sur cet arrêt que M. le conseiller Félix Faure, dans son rapport sur le procès qui nous occupe, dis dit

'arrêt cité de la Cour royale de Toulouse décide des questions de préférence entre des legs de diverses natures ou des questions d'interprétation de deux testaments consécutifs; il me paraît peu applicable à la cause. »

Reste à examiner si, même en supposant l'usu fruitier universel ou à titre universel tenu des dettes, cette solution devrait s'étendre au legataire usufruitier à titre particulier.

Dans le sens de la négative, on cite Proud'hon, De l'usufruit, Toullier, Duranton, t. 4, no 653; Hennequin, t. 2, p. 457. — Voici les observations qu'a faites M. le rapporteur relativement à ces autorités : « L'art. 611 s'applique évidemment au cas le plus ordinaire, celui d'une succession non obérée et acceptée purement et simplement, cas auquel l'héritier acceptant est tenu de toutes les dettes, tandis que le légataire particulier, qui (relativement à l'héritier) est lui-même une sorte de créancier, ne peut être tenu des deltes de la succession. Ainsi, soit le texte de l'art. 611, soit les autorités citées, me paraissent s'appli quer à une espèce qui n'est pas celle de la cause, à une espèce où, les biens étant suffisants pour le paiement des dettes, il s'agissait de savoir si les usufruitiers légataires à titre universel ou particu lier seraient tenus du paiement de ces dettes pour une part quelconque. Dans l'espèce du pourvoi actuel, au contraire, il est convenu entre les parties, et le demandeur l'a proclamé mier, qu'il y a insuffisance de biens libre le paiement des dettes de la succession.- un autre côté, la succession n'a point été acceptée purement et simplement; il y a un héritier béréficiaire. »

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près épuisement entier des .egs de nue propriété. Jugement du tribunal de Montpellier qui re- ́ pousse ce système et décide « qu'en principe, quand les biens libres d'une succession sont insufisants pour le paiement des dettes générales, il y a lieu à retranchement sur les legs particuliers (C. civ., art. 4024); que ce retranchement atteint la nue propriété, et, par suite, l'usufruit, car il ne s'agit pas d'une simple avance à faire pour une dette hypothécaire, selon l'art. 874, mais d'une diminution des reveDus, c'est-à dire de l'usufruit; que, dans ce cas, l'art. 1024 renvoie évidemment à l'art. 926, qui assimile les legs particuliers aux legs universels; que, dès lors, le légataire particulier d'usufruit est également assimilé au légataire universel; les dispositions de l'art. 612 C. civ. leur deviennent communes, et c'est d'après les bases de cet article que la réduction de la

contribution aux dettes doit avoir lieu.

Sur l'appel du marquis de Gras-Préville, arret confirmatif de la Cour royale de Nîmes du 2 mars 1841, dans les termes suivants :

■ Attendu, quant à la question de savoir si les légataires d'usufruit doivent contribuer, que, d'après la combinaison des art. 641, 870, 871, 873, 926, 927, 1024, C. civ., il est évident que le légataire à titre particulier de l'usufruit est tenu de contribuer aux dettes générales de la succession, lorsque les biens libres ne suffisent pas pour les acquitter, et qu'il y a lieu, pour y parvenir, de procéder à la réduction de tous les legs, et qu'il convient sur ce point d'adopter les motifs qui ont détermi né les premiers juges, comme justes et rationnels;

› Attendu, quant à la quotité pour laquelle les usufruits doivent contribuer, que la raison indique que l'on doit recourir par analogie aux dispositions de l'art. 612 C. civ., en expliquant toutefois, pour prévenir toute difficulté ultérieure, que tant l'usufruitier que le nupropriétaire pourront jouir dans toute leur étendue des facultés et des droits que leur confèrent les dispositions de l'article précité. Pourvoi en cassation du marquis de Gras Préville.

Premier moyen.

Violation de l'art. 611,

et fausse application des art. 612, 870, 871, 873, même Code.

C'est & tort, disait-on, qu'il a été jugé que le légataire à titre particulier d'usufruit pouvait être tenu de contribuer au paiement des dettes de la succession, concurremment avec le légataire de la nue propriété. Qu'est-ce donc, en effet, que le legs d'usufruit, sinon une charge, une condition du legs de nue propriété? Et, s'il en est ainsi, conçoit-on que tant que la nue propriété n'a pas été épuisée, le legs d'usufruit puisse être atteint (1)? Ce qui prouve que l'usufruitier à titre particulier ne peut (tre tenu des dettes, c'est que, lorsqu'il a été contraint de payer celles hypothécaires, il a un recours contre le nu propriétaire (art. 611).

(1) On invoquait le droit romain, L. 53, ff., tit. 2.- Proud'hon, Usufr., t. 4, no 1889; Toullier, 1.3, no 432; Hennequin, t. 2, p. 487.

Du 8 FÉVRIER 1843, arrêt C. cass., ch. req., MM. Zangiacomi prés., Faure rapp., Delangle av. gén., Béchard av.

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« LA COUR; Sur le premier moyen, attendu que, dans l'espèce de la cause, de l'a ́veu même du demandeur en cassation, et d'a

près ses propres conclusions, il s'agissait d'une réduction de tous les legs, sans distinction entre les legs d'usufruit ou autres, réduction rendue nécessaire par l'insuffisance des biens libres pour le paiement des dettes de la succession et pour échapper aux poursuites des créanciers ;

» Attendu que l'arrêt attaqué, en déclarant, dans de telles circonstances de fait, que tous les legs, à moins que le testateur n'eût manifesté clairement une préférence pour un des légataires particuliers, devaient être soumis au paiement des dettes, suivant la nature et la force de leur émolument, loin de violer les articles invoqués, a fait des principes sur la matière la plus juste application;

» Sur le deuxième moyen :

Attendu

qu'une fois le principe admis de la réduction proportionnelle des legs, et ne s'agissant plus que de son application à deux légataires, l'un de l'usufruit, l'autre de la nue propriété d'un même objet, l'arrêt attaqué, en prenant pour base de sa répartition entre l'usufruitier et le nu propriétaire les règles renfermées dans l'art. 612 C. civ., n'a violé aucune loi et s'est conformé aux principes généraux du droit; · REJETTE. 2

COUR DE CASSATION. (8 février 1843.)

La procédure d'ordre et les incidents auxquels elle peut donner naissance doivent être considérés comme sommaires (1). La demande formée devant le tribunal en distribution d'un prix d'immeuble lorsqu'il n'existe que trois créanciers inscrils, a le même caractère (2). C. proc. civ. 778.

Dès lors les frais auxquels peuvent donner lieu cette procédure ou cette demande doivent être laxés comme en matière sommaire.

(1) La Cour de cassation avait déjà jugé en ce sens le 25 août 1828 V. cet arrêt rapporté à sa date), et le renvoi.

(2) Cette solution n'est pas sans difficultés.

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