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d'application en matière de partage de succes sion;

» Attendu que le tribunal de la Réole a pu en ne consultant que ses propres lumières, fixer la valeur des fruits dont s'agit, et qu'en la fixant au taux de 2 et demi p. 100, il s'est conformé au produit ordinaire que donnent les immeubles dans son arrondissement;

Attendu que Bouillac est d'autant moins fondé à se plaindre du taux de 2 et demi p. 100, adopté par les premiers juges, que ce taux fait ressortir les fruits à une valeur supérieure à celle qui résulte du rapport des experts et de celui du notaire liquidateur;

» Sans avoir égard au moyen de nullité proposé par Bouillac, à la fin de non-recevoir opposée par les intimés, et à la preuve testimonialé offerte par Tedit Bouillac, qui sont et demeurent rejetés; CONFIRME, etc..>

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En conséquence une procuration dans la quelle un nolaire a, à la connaissance du mandant, fail insérer le nom de son principal clerc afin de pouvoir, sous ce nom, administrer les affaires de son client, el dresser comme nolaire les acles intéressant celui-ci, est un acte simulé qui n'engage point la responsabili lé du prête-nom, et la laisse peser loul entière sur le notaire (1).

BRILLARD. C. PETIT-DUMOTEUX.

Me Pardessus, notaire à Blois, avait toute la confiance d'un sieur Petit-Dumoteux; et, après la mort de ce dernier, cette confiance lui fut continuée d'abord par la veuve, comme tutrice de son fils mineur, et plus tard par celui-ci.

En 1838, le sieur Petit-Dumoteux fils ayant eu besoin de faire un emprunt, Me Pardessus fut chargé de lui procurer la somme qui lui était nécessaire. Four y parvenir, ce notaire rédigea lui-même un modèle de procuration générale qu'il remplit du nom du sieur Brillard, son principal clerc, et qu'il envoya à Nantes au notaire du sieur Petit-Dumoteux, en le chargeant de lui donner la forme authentique. Il est utile de faire remarquer ici que dans la lettre d'envoi de ce modèle de procuration Me Pardessus annonçait que, s'il y avait fait figurer le nom de son maître clerc, c'était afin de pouvoir continuer de rédiger comme no taire les actes dans lesquels son client serait intéressé, circonstance que ce dernier n'a pas ignorée.

Muni du brevet de cette procuration, qu'il a fait déposer en son étude, Me Pardessus a

(1) Cet arrêt semble avoir justifié d'avance les dispositions de l'art. 12 de l'ordonnance du 4 janv. 1843, qui défend aux notaires de se servir de prôte-nom pour aucun acte quelconque.

seul administré la fortune du sieur Petit-Dumoteux; seul il a reçu le remboursement de ses capitaux et des intérêts, seul il a corre-* spondu avec lui; et, après sa mort, c'est à ses héritiers que le sieur Petit-Dumoteux s'est adressé pour obtenir le remboursement des sommes reçues pour son compte par leur auteur, sans jamais rien demander au sieur Brillard, avec lequel il n'a eu d'ailleurs aucune espèce de rapport.

Enfin, aussitôt après ce décès, il s'est empressé de transférer ses pouvoirs à un sieur de Saint-Vincent, sans même notifier au sieur Brillard la révocation des siens.

Plus tard, et lorsque le désastre de la fortune de Me Pardessus lui a fait craindre de perdre une partie de la sienne, le sieur PetitDumoteux s'est adressé au sieur Brillard, et il l'a assigné devant le tribunal de Blois pour se voir condamner à lui rendre compte à l'amiaBle ou en justice de la gestion et administration qu'il avait eues de ses affaires en vertu de sa procuration du 26 janv. 1838; sinon, à lui payer la somme de 40,000 fr.

Le 4 août 1842 jugement du tribunal de Blois qui statue en ces termes :

Attendu que Brillard, homme d'un âgemûr, versé depuis long-temps dans la pratique des affaires, premier clerc depuis plus de quin ze ans dans une étude importante, a librement et de son plein gré accepté le mandat résul→ tant pour lui de la procuration du 26 janvier; qu'il ne peut donc être reçu à arguer de sa qualité de clerc et de la dépendance qu'elle lui imposait pour s'excuser des obligations exécuté; et que, loin de là, les rapports jour créées par un mandat qu'il a connu, accepté, naliers existant entre lui et son patron_lui rendaient plus obligatoire, en la lui rendant plus facile, la stricte exécution du mandat et la surveillance du remploi des fonds du mandant;

» Attendu que dans un pareil étal de choses Brillard, chargé de surveiller l'emploi des. fonds, n'a pu ni dû ignorer que le placement n'en avait pas été fait conformément au mandat;

» Attendu que Brillard articule vainement que les fonds versés par les débiteurs de Petit-Dumoteux l'ont été dans la caisse de Pardessus, et non entre ses mains, puisqu'en ce cas il a à se reprocher d'en avoir consenti quittance, et qu'il ne peut se faire un moyen de défense du peu de soin qu'il a apporté à sa gestion;

>Attendu qu'aux termes des art. 1991, 1992 et 1993, C. civ., le mandataire est tenu d'ac complir le mandat tant qu'il en demeure chargé; qu'il répond des fautes qu'il commet dans sa gestion; qu'il est tenu de rendre compte, et qu'il répond des dommages-intérêts résul tant de 1 inexécution du mandat;

Par ces motifs, le tribunal condamne Bril lard à rendre compte, sinon à payer 30,000 fr. Appel par Brillard.

On a dit pour lui: Il ne s'agit pas dans la cause de savoir si le mandataire doit compte au mandant de l'exécution du mandat. Si telle eût été la question à juger, elle n'aurait fait aucun doute, et le jugement rendu serait à l'abri de toute critique. Il s'agit uniquement.

de décider si un clerc de notaire qui, cédant à l'influence que son patron exerçait nécessairement sur lui, lui a prêté son nom pour qu'il pût rester notaire en devenant le mandataire de son client, est tenu de rendre compte du mandat qui a été exercé sous son nom; si, en d'autres termes, un madataire qui ne l'a été que de nom est responsable d'un mandat qu'on n'a pas voulu lui donner et qu'il n'a jamai eu l'intention d'accepter. Or, envisagée sous ce point de vue, la question ne souffre pas plus de difficulté.

En droit, il est de principe que, lorsqu'une simulation vient à être prouvée, elle cesse de produire son effet. La vérité reprend alors son empire, et la réalité l'emporte sur la fiction: In contractibus rei veritas potiusquam scriptura perspici debet, dit la loi re, au Code, liv. 4, tit. 22, et ce principe se trouve reproduit dans l'art. 1146 C. civ., qui porte que dans les conventions on doit rechercher quelle a été la commune intention des parties contractantes, plutôt que de s'arrêter au sens littéral des termes. Si donc il est démontré que la procuration du 26 janv. 1838 n'est qu'un acte simulé, et qu'en réalité le véritable mandataire a été M Pardessus, il demeurera prouvé que c'est ce dernier qui doit rendre compte.

En fait, il résulte de toutes les circonstances de la cause, et notamment de la lettre d'envoi à Nantes du modèle de la procuration dont il s'agit, ainsi que de la position de dépendance dans laquelle était le sieur Brillard vis-àvis de son notaire, que, bien que son nom ait été inséré dans ladite procuration, c'est Me Pardessus tout seul que le sieur Petit a enten du investir de son mandat. C'est en effet lui seul qui a correspondu avec celui-ci, qui a reçu et encaissé les fonds de son client, et qui, en un mot, a seul administré les affaires de ce dernier. Quant au sieur Brillard, témoin passif de tout ce que faisait son patron, forcé par sa position de signer aveuglément tout ce qu'on lui présentait, il ne s'est immiscé en quoi que ce soit dans les affaires du sieur Petit-Dumoteux; il l'aurait même inutilement tenté, attendu que Me Pardessus ne l'aurait pas souffert. Il ne peut donc être responsable des faits de son notaire, et d'autant mieux que le sieur Petit-Dumoteux est non recevable à se plaindre des conséquences d'une simulation qu'il n'a pas ignorée, et à laquelle il s'est volontairement prêté.

De la part du sieur Petit-Dumoteux il a été répondu : Le sieur Brillard, homme d'un âge mûr, et très versé dans les affaires, n'était pas un principal clerc ordinaire : à raison de son intelligence et de sa capacité il jouissait de toute la confiance de son notaire, qui se déchargeait sur lui d'une grande partie de ses affaires; c'est donc lui personnellement, et à raison de la garantie qu'il offrait tant sous le rapport de la moralité que de la capacité, que le sieur Petit-Dumoteux a investi de son mandat, et c'est même par ce motif qu'au lieu d'être envoyé en blanc à Me Pardessus, sauf à lui à le remplir de tel nom qu'il jugerait convenable, il a été rempli à Nantes du nom du sieur Brillard. Or que devait faire celui-ci dans une pareille circonstance ? Il ne

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pouvait pas l'ignorer; il devait ou renvoyer la procuration si, trouvant la charge trop lour de pour lui, il ne voulait pas des pouvoirs qui lui étaient confiés, ou, s'il les acceptait, rem plir toutes les obligations que lui imposait sa qualité de mandataire, c'est-à-dire accomplir fidèlement son mandat. Or a-t-il renvoyé la procuration ? Non, car il en a fait lui-même le dépôt en l'étude de M° Pardessus après l'avoir certifiée sincère et véritable. A-t-il accepté les pouvoirs du sieur Petit-Dumoteux? Oui, car en vertu de la procuration du 26 janvier il a touché et reçu les fonds de ce dernier, donné quittance, etc.: donc il doit compte de sa gestion. C'est en vain qu'il cherche à se retrancher derrière Me Pardessus en alléguant que c'est lui seul qui a géré et administré sous son nom. Que résulterait-il, en effet, de cette circonstance en la supposant prouvée ? Qu'en consentant à ce que Me Pardessus administrat en son lieu et place, il l'a substitué tacitement dans son mandat, quoique la procuration ne lui en donnât pas le droit, et qu'ainsi il serait encore responsable, aux termes de l'art. 1994 C. civ., qui porte que le mandataire répond de celui qu'il s'est substitué, notamment quand il n'a pas reçu le pouvoir de se substituer quelqu'un.

DU 7 JANVIER 1843, arrêt C. roy. Orléans, MM. Travers de Beauvert 1er prés., Diard 1er av. gén. (concl. contr.), Legier et Boscheron Desportes av.

Attendu

LA COUR (après partage); qu'il résulte de toutes les pièces et documents produits que, soit avant la procuration don née par Petit-Dumoleux à Brillard, soit au moment où il l'a donnée, soit dans les faits qui l'ont suivie, l'intention manifeste de PetitDumoteux a toujours été de constituer le notaire Pardessus comme son véritable mandataire, et que celui-ci a toujours agi et s'est toujours considéré comme seul chargé de gérer les affaires de Petit-Dumoteux;

D

» Qu'en effet, dès avant 1838, Pardessus avait dressé les différents comptes de tutelle rendus à Petit-Dumoteux, et que depuis cette époque celui-ci lui avait toujours continué sa confiance et avait correspondu avec lui seul, sans avoir jamais de relations avec Brillard;

»>Que c'est Pardessus qui a rédigé le modèle de la procuration du 26 janv. 1838, euregistrée, et qu'en l'envoyant au notaire de Nantes chargé de lui donner la forme authentique il disait dans sa lettre du 20 janv. 1838, enregistrée : « Je vous envoie le modèle de procuration qui m'est nécessaire tant pour cette affaire (la recette d'un remboursement de capital) que pour recevoir les intérêts des » capitaux. Je mets cette procuration au nom »de mon principal clerc (le sieur Brillard), parce que je ne pourrais pas figurer comme notaire dans les actes si j'étais mandataire. »;

>Que c'est avec la pleine connaissance que Brillard n'était que le prête-nom du notaire Pardessus que Petit-Dumoteux a signé et fait remettre à Pardessus ladite procuration;

Que jusqu'au décès de Pardessus, arrivé en 1841, c'est toujours à celui-ci qu'il s'est adressé pour lui demander soit les intérêts, soit

les capitaux qu'elle donnait pouvoir de toucher;

» Qu'après cette époque, ce sont encore la veuve et les héritiers de Pardessus qui ont été interpellés de verser les fonds reçus pour lui par leur auteur;

Qu'il a tellement considéré que le décès de Pardessus faisait cesser les effets de la procuration du 26 janv, 1838, que, sans en notifier la révocation au mandataire apparent qui y était nommé, il s'est empressé de transférer le même mandat au sieur de Saint-Vincent par acte authentique enregistré du 18 août 1841, et qu'en vertu de ce mandat ce dernier s'est adressé aux héritiers Pardessus pour en toucher diverses sommes que celui-ci avait reçues pour le compte de Petit-Dumoteux par suite de la procuration. donnée au nom de Brillard;

Qu'il suit de tous ces faits que Brillard n'a été, du consentement de Petit-Dumoteux, que le prête-nom de Pardessus, et que celui-ci est seul responsable, comme ayant seul géré les affaires de Petit-Dumoteux;

» Considérant enfin que, si la simulation par laquelle Brillard était constitué mandataire apparent, tandis que le notaire Pardessus restait le mandataire réel, tendait à donner à celui-ci la possibilité de recevoir des actes pour une personne dout il était le véritable représentant, et ce contrairement au vou de

la loi, Petit-Dumoteux a lui-même autorisé celte fraude par le consentement tacite qu'il y a donné; que dès lors il ne peut s'en plaindre, d'après ce principe, que personne ne peut être entendu lorsqu'il allègue sa propre fraude; qu'ainsi il doit subir les conséquences de la simulation qu'il a approuvée, approbation qui résulte des faits ci-dessus déduits;

» Par ces motifs, · DECLARE Petit-Dumoteux mal fondé dans sa demande en reddition de compte formée contre Brillard. »

COUR ROYALE DE ROUEN.

(7 janvier 1843.)

Les propriétaires d'usines situées sur un cours d'eau dont la police a été réglée par ordonnance royale n'ont pas qualité pour poursuivre d'une manière absolue et en dehors de leur intérêt personnel l'exécution de cette ordonnance (1).

Dès lors ils ne peuvent s'adresser aux tribunaux pour demander qu'un usinier soit - contraint à l'accomplissement des travaux prescrits par cette ordonnance, si l'inexécution de ces travaux ne leur a causé aucun préjudice (2).

(1-2) Le droit de réglementer les cours d'eau appartient à l'administration, qui est seule chargée de suivre l'accomplissement des mesures tendant à un but d'utilite générale.-V. Solon, Rép. des jurid., t. 3, no 57 et suiv.-V. aussi Cons. d él., 9 mai 1834. Mais ce n'est que lorsque les contraventions au règlement des eaux interessent les parties privées qu'elles peuvent les déférer aux tribunaux. Cons, d'ét., 25 avril 1812, el 9 janv. 1828.-Cormenin, p.551 et 532,

DELAMARE C. HAUCHARD,

Du 18 mars 1842, jugement du tribunal civil de Pont-Audemer en ces termes :

« Attendu que sur des difficultés depuis longtemps élevées par les demandeurs, relativement à l'exécution d'un arrêt administratif de l'an X, et d'autres décisions administratives qui réglaient le régime des eaux sur le bras de la rivière de Resle, où sont établis le moulin des Mangeans, appartenant aux frères Delamarre, et le moulin de Glos, appartenant à Hauchard, il est intervenu, le 23 mars 1838, une ordonnance royale portant règlement des eaux entre les deux usines, et qui détermine les travaux à faire par les propriétaires de ces deux moulins, pour conserver leurs droits respectifs;

» Attendu qu'une ordonnance en pareille matière embrasse non seulement l'intérêt particulier des propriétaires des usines, mais encore l'intérêt général; que la surveillance de son exécution appartient à l'administration; qu'aussi l'art. 12 de cette ordonnance porte que les travaux prescrits seront faits sous la surveillance de l'ingénieur de l'arrondissement, dans le délai de six mois à partir de la notification aux intéressés ;

» Attendu que les frères Delamare, qui se plaignent aujourd'hui de ce que Hauchard n'aurait pas exécuté cette ordonnance en ce qui le concernait, sont ceux qui ont mis le plus de lenteur à se conformer aux obligations qui lorsque M. l'ingénieur se transporta sur les leur é aient imposées, puisque, le 25 juil. 1840, lieux et constata les travaux faits par Hauchard à son usine, ce fonctionnaire ne put opérer sur l'usine des frères Delamare, ceux-ci n'ayant encore fait aucuns travaux, sous prétexte que l'ordonnance ne leur avait pas été notifiée.

» Attendu que, snivant leur assignation introductive d'instance, les frères Delamare préten dant que Hauchard de son usine n'avait rien fait sur ce ce qui lui était prescrit par l'ordonnance royale, commune entre eux, ont allégué qu'ils en avaient éprouvé et en éprouveraient chard fût condamné: 1° sous contrainte de 10,000 encore un préjudice, et conclu à ce que Haufr., à faire, dans les huit jours de la signification du jugement à intervenir, les travaux dont parle cette ordonnance, et que, faute de ce faire, ils seraient autorisés à les faire faire eux-mêmes au moyen de ladite contrainte; 2° en 2,000 fr. de dommages-intérêts envers eux, faute par Hauchard d'avoir exécuté lesdits travaux dans le délai fixé par l'ordonnance, et pour réparation du préjudice qu'ils auraient éprouvé ;

» Attendu que, Hauchard soutenant qu'il avait, en ce qui le concernait, rempli ses oblisurveillance de M. l'ingénieur, et que, dans gations selon le vœu de l'ordonnance, sous la tous les cas, les frères Delamare n'avaient é sable pour le tribunal de faire vérifier les fails prouvé aucun préjudice, il devenait indispenpar un expert;

» Attendu que, par jugement du 8 janvier dernier, M. Chologe, architecte-voyer à Bernay, a été choisi par le tribunal pour remplir cette mission ;

› Attendu qu'il résulte du rapport de cet expert, en date du 26 mai dernier, en ce qui concerne l'usine des frères Delamare, que ceux-ci se sont mis plus qu'à devoir, et ont plus que satisfait à l'ordonnance royale; et en ce qui concerne l'usine de Hauchard, que sur les points principaux il s'est conformé à l'ordonnance; que sur quelques points il existe des différences, mais qu'elles sont si peu importantes qu'il n'y a pas lieu de s'y arrêter, et que d'ailleurs l'état des choses ne peut nuire à l'usine des frères Delamare, et qu'ils n'en ont éprouvé et n'en éprouvent aucun préjudice ;

Attendu que ce rapport doit inspirer toute confiance au tribunal, à raison de la probité et de l'expérience de celui qui l'a rédigé; qu'il n'y a pas lieu à nouvelle expertise;

Attendu que l'intérêt est la base de toute action, et qu'en toute circonstance nul individu ne peut être admis à se plaindre en justice du fait d'autrui, s'il n'en éprouve un préjudice quelconque ;

Attendu que dans l'espèce les frères Delamare, qui se sont bornés à poursuivre Hauchard pour la stricte exécution de l'ordonnance royale du 23 mars 1838, n'ont aucunement indiqué les faits particuliers qui leur auraient causé dommage; qu'ils n'ont pas établi qu'à une époque quelconque ces eaux aient été tenues au dessus du repère du moulin de Hauchard, et que conséquemment aucun préjudice ne leur a été causé ;

» Le tribunal, sans avoir égard aux conclusions des frères Delamare, tendant à obtenir une nouvelle expertise, les déclare non recevables et mal fondés dans leur action. »

Appel

DU 7 JANVIER 1843, arrêt C. roy. Rouen, 2o ch., MM. Gesbert prés., Chassan av. gen., Deschamps et Senard av.

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LA COUR; Attendu qu'un règlement sur la police des eaux touche à l'intérêt général, mais que les parties n'ont pas qualité pour en poursuivre l'exécution d'une manière absoJue et en dehors de leur intérêt personnel; qu'elles ne peuvent s'adresser aux tribunaux pour demander l'accomplissement des travaux ordonnés par l'administration, qu'autant que l'inexécution de ces travaux leur a causé quelque préjudice;

»Attendu qu'il résulte de divers documents du procès, et notamment du procès-verbal de l'expert Cloloye, que les appelants n'éprouvent aucun préjudice appréciable de ce que l'ordonnance royale du 23 mars 1838 n'a pas reçu une exécution littérale; —Que, dans un tel état de choses, il devient inutile d'avoir recours à une nouvelle expertise; et adoptant, au surplus, les motifs qui ont déterminé les premiers juges, sans avoir égard aux conclusions subsidiaires, qui sont rejetées ; — CONFIRME, etc..

COUR ROYALE DE CAEN.
(8 janvier 1843.)

DOT, REMPLOI, ACQUÉREUR, PRESCRIPTION. L'immeuble acquis par une femme en remploi de propres dolaux doit être libre de toutes charges; autrement l'acquéreur de ces propres peut ajourner le paiement de son prix jusqu'à la mainlevée des charges existantes (1).

DESHAYES C. Bardel.

DU 8 JANVIER 1843, arrêt C. roy. Caen, 4 ch., MM. Binard prés., Sorbier av. gén., G. Simon et Feuguerolles av.

« LA COUR; · Considérant qu'en traitant le 11 juil. 1832 avec la dame Bardel, la dame Deshayes eut pour but d'opérer le remplacement d'immeubles dotaux déjà aliénés, et d'autres qu'elle se proposait d'aliéner; que l'acquêt qu'elle faisait devait donc être complétement libre de charges pour qu'elle pût obtenir des tiers auxquels elle vendait elle-même le prix par eux dù;

» Considérant que le contrat d'acquêt de la dame Deshayes fut transcrit au bureau de Lisieux le 4 août 1832; que le certificat délivré sur transcription indiqua l'existence de diverses inscriptions dont la mainlevée devait être apportée par la dame Bardel; que, sous ce premier rapport, la dame Deshayes était en droit d'ajourner le versement de son prix jusqu'à ce que mainlevées eussent été fournies;

» Considérant que dix années se sont écou❤ lées depuis la transcription du 4 août 1832; que les inscriptions alors existantes n'ont pas été renouvelées, et qu'il en a été donné mainlevée ; qu'ainsi cette première cause de trouble disparaît aujourd'hui ;

» Considérant qu'il pouvait exister sur les biens transmis à la dame Deshayes des priviléges fonciers au profit de précédents propriétaires, ou par suite de délégations données aux précédents acquéreurs, ou quelques irrégulari tés dans les titres de propriété, ainsi qu'il a été expliqué dans les soutiens du procès ; mais qu'il a été justifié que ces charges avaient été acquittées, et que, si la justification n'a pas été complète pour la moindre partie, la prescription courue tant au profit des précédents propriétaires qu'au profit de la dame Deshayes, qui depuis plus de dix années jouit par le titre et sans trouble, la met à l'abri de toute espèce d'inquiétude, même en ce qui concerne les ir régularités signalées; qu'il suit de là que les immeubles acquis le 14 juil. 1832 sont aujourd'hui, dans les mains de la dame Deshayes, dégrevés de toutes charges, et que rien ne s'oppose à ce qu'elle puisse les offrir définitivement en remplacement aux acquéreurs de

(1) C'est un point constant que l'acquéreur d'un immeuble dotal est garant du remploi, et peut conséquemment refuser de payer son prix d'acquisition si le remploi n'a pas lieu ou se trouve insuffisant. V. Rouen, 24 avril 1828; Paris, 9 juil. 1828; Cass. 23 août 1830; Montpellier, 13 mai 1831; Agen, 28 mars 1832; Cass. 12 déc. 1833; Aix, 20 juin 1834; Toulouse, 22 déc. 1834; Riom, 26 juin 1859,

ses biens dotaux; que même l'inscription en garantie donnée par le sieur Ferrètre devient aujourd'hui sans objet;

Considérant, en ce qui touche le mérite de la consignation, qu'elle fut faite sur la demande de la dame Bardel, ainsi qu'il résulte des écrits par elle signifiés les 14 déc. 1842 et 1er janv. 1843; qu'il est reconnu que la somme consignée était suffisante pour libérer la dame Deshayes; qu'en conséquence cette consignation doit être déclarée valable et libératoire 'pour la dame Deshayes, sauf à la dame Bardel à s'en saisir avec les intérêts qu'elle a pu produire;

» Considérant, quant aux dépens, que ceux de première instance ont été compensés par le jugement dont est appel; qu'il y a lieu de le confirmer sur ce point; que, quant à ceux faits devant la Cour, la dame Deshayes ayant été dans la nécessité de demander de nouvelles justifications, qui lui ont été faites, et ayant pensé d'ailleurs qu'un premier degré de juridiction ne serait pas suffisant pour consolider son acquisition, surtout alors que son acquét devait servir de remploi à des conditions exprimées dans l'acte de vente arrêté avec la dame Bardel, il paraît juste de faire une masse des dépens d'appel, et d'ordonner qu'ils se ront supportés par moitié entre les parties;

--

»Par ces motifs, en déclarant que les biens acquis le 11 juil. 1832 par la dame Deshayes de la dame Bardel sont aujourd'hui libres de toutes charges hypothécaires ou foncières, CONFIRME le jugement du tribunal civil de Lisieux au chef où il a ordonné le paiement du prix de cet acquêt, et COMPENSE les dépens de première instance; DECLARE la dame Deshayes valablement libérée du prix de son acquisition, tant en principal qu'intérêts et accessoires, par la quittance de consignation du 25 fév. 1843; AUTORISE la dame Bardel à se saisir de cette consignation comme étant sa propriété; DIT qu'il sera fait masse des dépens d'appel. »

COUR DE CASSATION.

(9 janvier 1843.)

L'arrêt qui nomme des experts pour vérifier si plusieurs portions de terre voisines d'un cours d'eau et appartenant au méme individu ont fait originairement partie de la même propriété, afin de décider si ces portions de terre ont droit au bénéfice d'irrrigation établi par l'art. 644 du Code civil, ne contient rien de définilif, et ne saurait par conséquent être l'objet d'un recours en cassation, puisqu'un tel arrêt laisse subsister en entier

V. aussi Rouen, 5 déc. 1840; Cass. 25 et 27 avril et 18 mai 1842, et les notes; Paris, 23 mars 1844.

Spécialement l'acquéreur peut se refuser à payer son prix tant que les conditions du remploi n'ont pas été exécutées telles qu'elles sont déterminées par le contrat de mariage. V. Bordeaux, 9 avril 1845. —V. également Rouen, 1er juil. 1846,

la question d'altribution de la jouissance des eaux (1).

LEBRUN C. Verne.

Sur une contestation relative à l'usage des propriétaires d'un moulin, et le sieur Lebrun, eaux de la Sorne entre les héritiers Verne, propriétaire de prés riverains, intervint, à la date du 11 avril 1838, un jugement du tribunal de Lons-le-Saulnier qui, après avoir statué définitivement sur différents points, s'est exprimé ainsi :

« Considérant, relativement au pré des Mouilles, ancien à la famille du défendeur, contigu à celui qui vient de la dame Magaud, connu sous le nom du pré de la Chapelle, et que les demandeurs ont persisté à soutenir que le pré n'est pas riverain; que les inductions que le défendeur a fait résulter du plan du cadastre et d'autres plus anciens ne sont pas suffisantes pour détruire les allégations des demandeurs; que ce point de fait doit être respectivement produits, et dont l'application vérifié par experts à vue des titres qui seront fera connaître l'emplacement de ce pré et de celui acquis de la dame Magaud; qu'ainsi c'est la vérification sollicitée par les demandeurs ; le cas, avant faire droit sur ce chef, d'ordonner

procédé à un règlement d'eau entre les parties » Qu'ainsi il y a lieu d'ordonner qu'il sera conformément à l'art. 645 C. civ., pour déterminer la proportion dans laquelle elles devront participer à l'usage desdites eaux; déclare néanmoins que dans tous les cas l'irrigation ne sera pratiquée par le défendeur au moyen de la prise d'eau qu'il a établie sur le pré acquis de la dame Magaud qu'à charge par lui d'empêcher les eaux de retomber dans le canal des moulins du demandeur, et qu'il ne pourra en aucun temps pratiquer des prises d'eau dans le même canal; le déclare mal fondé à prétendre à l'usage des eaux pour le pré des Mouilles venant de madame de Champagne, qui n'est pas riverain, sauf à lui à profiter de l'excédant des eaux nécessaires aux besoins des moulins, comme il a été dit cidessus, et avant faire droit sur le point de savoir si le pré des Mouilles venant de sa famille, et connu anciennement sous le nom du pré de la Chapelle, doit participer au bénéfice du partage des eaux, comme le pré Magaud, qui est riverain ;

Ordonne que par les sieurs ......., experts nommés d'office, et qui prêteront serment devant le président du tribunal, il sera procédé à l'application des titres de propriété des parties, à l'effet de vérifier si le pré de la Chapelle est riverain de la rivière de Sorne;

» Que les experts ci-dessus nommés procéderont en outre à toutes les reconnaissances qui

(1) Les jugements simplement préparatoires ne sont pas susceptibles de pourvoi en cassation. Quant aux arrêts interlocutoires, le recours n'est admis que lorsqu'ils préjugent le fond d'une manière définitive. Cette distinction ressort surtout d'un arrêt de la chambre civile du 28 mai 1827. - V. aussi Cass. 4 janv. 1831; Bruxelles, 31 mai 1823. - V. Bioche et Goujet, Dict. de proc., v Cassation, no 64.

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