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abandonner les dépêches dont ils ont la charge et la responsabilité, doivent être admis dans les voitures affectées à leur service avant la formation des trains (1) (Id.). Rés. explic. par la C. d'appel, et implic. par l'arrêt rapporté en sous-note.

Et les Comp. doivent assurer la manxuvre desdites voitures, dans lesquelles ont pris place les commis des postes, dans des conditions de nature à ne pas compromettre la sécurité de ces commis (2) (C. civ., 1382 et s.). Rés. par la C. d'appel et par l'arrêt rapporté en sous-note.

Elles sont, en conséquence, responsables des accidents occasionnés à ces commis par la maladresse et l'imprudence avec lesquelles la manoeuvre a été exécutée (3) (Id.). — Id.

Si les commis des postes ne peuvent être assimilés à des voyageurs ordinaires, et si l'accident est survenu avant la formation et le départ du train, en dehors par conséquent du transport dont la Comp. de chemins de fer s'est chargée dans son contrat avec l'Administration des postes, la Comp., obligée par le cahier des charges de sa concession, n'en est pas moins tenue de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité des agents des postes (4) (Id.).

Rés. par l'arrêt rapporté en sous-note. En tout cas, l'appreciation souveraine des juges du fond, constatant que des blessures ont été occasionnées aux agents des postes par une maladresse ou une imprudence des employés de la Comp., agissant dans l'exercice des fonctions auxquelles elle les a préposés, suffit à justifier la décision par laquelle ils ont admis la responsabilité de la Comp. de chemins de fer (5) (Id.). • Quelle que soit la valeur des critiques

nœuvres de formation du train avec toutes les précautions nécessaires lorsque la sécurité des personnes est en jeu.

La Cour de cassation n'a pas déclaré expressément, comme l'avait fait la Cour de Paris, que les commis des postes étaient en droit de s'installer dans les wagons avant la formation du train; mais cette solution paraît bien résulter de son arrêt. Cet arrêt, en effet, a reconnu que les juges da fond avaient déduit les conséquences juridiques de leurs constatations souveraines, en décidant que les agents de la Comp. étaient en faute. Or, si les commis des postes s'étaient introduits sans droit dans le wagon affecté au service des postes, cette circonstance aurait été de nature à faire écarter la responsabilité de la Comp., ou du moins à faire admettre que la faute avait été commune entre elle et l'Administration des postes; et la Cour de cassation aurait exercé sa censure sur l'arrêt de la

sur la voie où l'express de Bâle était en formation; que, par suite de l'humidité causée par la pluie, les cales mobiles, qui assujettissaient le wagon sur le chariot, glissèrent inopinément, et que le wagon des postes, n'étant plus maintenu, échappa aux agents de la Comp., et roula jus qu'au butoir, contre lequel il se heurta violemment; Considérant que, dans le choc, Berton subit des contusions et des blessures, à raison desquelles il a assigné la Comp. des chemins de fer de l'Est en dommages-intérêts; Considérant que, devant la Cour, la Comp., sans contester l'évaluation du préjudice souffert par Berton qu'ont faite les premiers juges, décline toute responsabilité, par les motifs que la manoeuvre dans laquelle Berton a été blessé avait été conduite et exécutée d'une façon normale; que l'accident est dû à l'humidité seule, c'est-à-dire à un cas de force majeure; que le choc qui s'est produit pouvait être prévu par Berton, averti d'ailleurs, par une circulaire de son chef hiérarchique des risques de la manœuvre, surtout

dirigées par le pourvoi contre des motifs surabondants (6) (L. 20 avril 1810, art. 7).

(Chem. de fer du Midi C. Marbouty et autres).

3 mai 1906, arrêt de la Cour de Paris ainsi conçu: - « La Cour; - Attendu que, le 23 nov. 1902, en gare de BordeauxSaint-Jean, les demandeurs Marbouty, Bernard et Legrand, agents du service ambulant des postes, ont été blessés au cours d'une manœuvre, consistant à passer de la voie 1 bis à la voie 5, au moyen d'un chariot électrique, la voiture du service des postes occupée par eux; que cet accident a été causé par une impulsion trop forte donnée au moyen du tracteur à la voiture occupée par les agents des postes, laquelle est passée par-dessus les cales, et est allée buter contre le heurtoir de la voie I bis; que, dès lors, l'accident et les blessures qui en sont résultées pour Marbouty, Bernard et Legrand ont été occasionnées par une maladresse ou une imprudence des agents de la Comp. des chemins de fer du Midi, agissant dans l'exercice des fonctions auxquelles elle les a préposés; - Attendu que, pour se soustraire à la réparation du préjudice résultant pour les demandeurs de la faute de ses agents, la Comp. allègue vainement que l'accident ne s'est pas produit au cours de l'exécution du transport régulier des dépêches convoyées par les intimés, mais au cours d'une manoeuvre préparatoire, pendant laquelle elle n'était pas tenue de tolérer la présence dans la voiture dont s'agit des commis de l'Administration des postes; que cette circonstance ne saurait avoir, au profit de la Comp., les consé

Cour de Paris, en vertu du pouvoir qu'elle se reconnaît pour apprécier si les faits constatés par les juges du fond constituent juridiquement une faute. V. Cass. 10 mai 1909 (S. et P. 1912.1.169; Pand. per., 1912.1.169), et la note; 28 févr. 1910 (S. et P. 1911.1.329; Pand. pér., 1911.1.329), et la note de M. Appert.

Un des motifs de l'arrêt rapporté en sous-note, quoiqu'il n'ait pas influé sur la décision de la Cour de Paris, appelle certaines observations: c'est celui où il est dit que les agents des postes ne peuvent être assimilés à des voyageurs ordinaires, et que l'accident, s'étant produit avant la formation du train, devait être considéré par suite comme étant arrivé « en dehors du transport faisant l'objet du contrat entre l'Administration des postes et la Comp. ». En principe, les accidents dont les commis des postes sont victimes entraînent à la charge de la Comp. la même respon

en temps de pluie, et qu'il pouvait en éviter les conséquences en descendant de wagon; enfin, que les agents des postes, autorisés pour leur service à pénétrer dans leurs wagons avant la formation des trains, ne sauraient être assimilés à des voyageurs ordinaires, et que Berton, qui a, comme demandeur, la charge de prouver une fante de la Comp., ne fait pas cette preuve; Mais considérant que l'accident dont il s'agit est arrivé à un agent d'un service public dans l'exercice de ses fonctions; que, si cet agent ne peut être assimilé à un voyageur ordinaire, et si l'accident est arrivé avant la formation et le départ du train, et, par conséquent, en dehors du transport qui fait l'objet du contrat entre l'Administration des postes et la Comp. de l'Est, Berton, qui ne pouvait quitter, même momentanément, la voiture ou il travaillait en même temps que tous ses collègues, et laisser sans surveillance les plis chargés contiés à sa garde, n'en était pas moins en droit de compter que la Comp., obligée par les clauses

quences qu'elle prétend lui attribuer; Attendu, en effet, qu'aux termes du cahier des charges de leur concession, les Comp. de chemins de fer, et la Comp. du chemin de fer du Midi spécialement, sont tenues d'assurer le service du transport des lettres et dépêches sur toute l'étendue des lignes faisant l'objet de leur exploitation; qu'elles sont, en conséquence, obligées de se soumettre aux prescriptions que l'autorité compétente juge nécessaires à la bonne exécution de ce service; qu'il résulte des instructions générales données par l'Administration des postes, et des prescriptions du sous secrétaire d'Etat chargé de la direction de ce service public, qu'il est indispensable que les agents des postes chargés de convoyer les dépêches prennent place dans les voitures affectées à leur service longtemps avant la formation des trains, et qu'il leur est impossible, sans manquer à leurs devoirs, d'abandonner les dépêches dont ils ont la charge et la responsabilité; qu'il suit de là qu'il entre dans les obligations de la Comp. des chemins de fer du Midi d'admettre les commis des postes dans les voitures affectées à leur service avant la formation des trains, et, en conséquence, d'assurer la manœuvre desdites voitures dans des conditions de nature à ne pas compromettre la sécurité des commis des postes, qui ont le devoir d'occuper ces voitures pendant la durée même des manœuvres; Attendu qu'il résulte de l'exposé qui précède que la manœuvre, au cours de laquelle les intimés ont été blessés, a été exécutée par les préposés de la Comp avec une maladresse et une imprudence qui engagent sa responsabilité, etc. ».

sabilité que les accidents causés à des voyageurs ordinaires; il n'en serait autrement que si l'accident avait été causé par le mauvais aménagement ou le mauvais état du wagon des postes. V. les conclusions de M. le commissaire du gouvernement Aucoc, sous Cons. d'Etat, 19 nov. 1868, Chem. de fer d'Orléans (Rec. des arrêts du Cons. d'Etat, p. 1004). D'autre part, il semble bien difficile de ne pas appliquer les règles du contrat de transport dès que les commis des postes sont entrés dans leurs wagons, fût-ce avant la formation du train; la Comp. est tenue de les recevoir des ce moment; il y a là pour elle une obligation accessoire de son contrat de transport, et qui entraîne les mêmes responsabilités que le transport lui-même. (15) V. la note qui précède.

(6) Jurisprudence constante. V. Cass. 8 mars 1910 (S. et P. 1912.1.473; Pand. pér., 1912.1.473), et le renvoi.

de son cahier des charges de concourir au service postal. prendrait toutes les mesures nécessaires pour assurer sa sécurité; qu'elle n'en a rien fait; qu'en se servant de cales mobiles qu'elle savait n'offrir en temps de pluie aucune protection serieuse aux agents des postes, au lieu d'assurer le wagon sur le chariot au moyen de cales fixes ou à crans d'arrêt, ou par tout autre moyen qui se serait présenté à l'esprit de ses ingénieurs, la Comp. a fait preuve de négligence et d'imprudence; que l'accident a eu pour cause génératrice unique le matériel défectueux dont elle s'est servie, et que la pluie est un fait trop fréquent pour pouvoir être invoqué comme un cas fortuit et de force majeure, de nature à la dégager de la responsabilité qui lui incombe, par application des art. 1382 et s., C. civ.; -Par cea motifs; -- Confirme le jugement rendu le 21 mars 1906 par le tribunal civil de la Seine, etc. Du 4 mai 1907. - C. Paris.

POURVOI en cassation par la Comp. du Midi. ARRÊT.

LA COUR; Attendu qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué qu'au cours d'une manoeuvre opérée dans la gare de Bordeaux-Saint-Jean pour rattacher le wagon de l'Administration des postes au train en formation, il s'est produit un choc qui a causé des blessures à Marbouty, Bernard et Legrand, agents ambulants des postes, occupés dans ce wagon à l'accomplissement de leur service; Attendu que, dans ses conclusions devant la Cour, pour demander l'infirmation du jugement qui l'avait condamnée à payer des dommagesintérêts aux blessés, la Comp. des chemins de fer du Midi soutenait : 1° que l'accident était le résultat d'un cas fortuit; 2o qu'il constituait un risque professionnel, auquel les agents des postes s'étaient exposés en prenant place dans le wagon avant la forination du train; 3" que les blessures reçues avaient pour cause les défectuosités de l'installation du wagon appartenant à l'Administration; Mais attendu que les juges du fond déclarent que l'accident et les blessures qui en sont résultées pour Marbouty, Bernard et Legrand ont été occasionnés par une maladresse ou une imprudence des agents de la Comp. du Midi, agissant dans l'exercice des fonctions auxquelles elle les a préposés »; que cette appréciation souveraine suffit pour justifier la décision attaquée, quelle que soit, d'ailleurs, la valeur des critiques dirigées par le pourvoi contre d'autres motifs surabondants de l'arrêt; D'où il suit qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour de Paris n'a violé aucun des textes de loi visés par le pourvoi; Rejette, etc.

Du 26 oct. 1910. Ch. civ. MM. Ballot-Beaupré, 1er prés.; Potier, rapp.; Melcot, av. gén. (concl. conf.); Cail et Coutard, av.

CASS.-Civ. 27 juin 1912. EXPROPRIATION POUR UTILITÉ PUBLIQUE, OFFRES, CONCLUSIONS NOUVELLES, COMMUNICATION AU JURY, NULLITÉ (Rép., vo Expropriation pour cause d'utilité publique, n. 2089 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 2511 et s.).

Toutes les conclusions prises devant le jury, et par lesquelles les expropriés formulent ou modifient leurs demandes à fin d'indemnité, doivent, à peine de la nullité de la décision, être placées par le magistrat directeur sous les yeux du jury (1) (L. 3 mai 1841, art. 37).

Par suite, la décision du jury doit être annulée, lorsque, le procès-verbal constatant que, au cours des débats, l'expropriant et l'exproprié ont déposé des conclusions nou

-

(1-2) Point certain. V. Cass. 5 nov. 1889 (S. 1890.1.224. - P. 1890.1.534, et la note; Pand. pér., 1890.1.251); 13 mai 1902 (S. et P. 1903.1. 359); 5 avril 1911 (2 arrêts) (S. et P. 1912.1.56; Pand. pér., 1912.1.56), les notes et renvois. Il n'est point, d'ailleurs, nécessaire que le procès-verbal déclare formellement que les conclusions nouvelles ont été mises sous les yeux du jury; il suffit

velles, aucune des énonciations de ce procès-verbal n'établit que ces conclusions aient été soumises aux jurés, ni ne relève une circonstance quelconque d'où l'on puisse induire que la formalité substantielle de Part. 37 de la loi du 3 mai 1841 a été remplie (2) (ld.).

(Préfet de la Somme C. Dame Bernard). ARRÈT.

LA COUR; Sur le moyen unique : Vu l'art. 37 de la loi du 3 mai 1841; Attendu que toutes les conclusions prises devant le jury, et par lesquelles les expropriés formulent ou modifient leurs demandes à fin d'indemnités, doivent, à peine de nullité de la décision, être placées par le magistrat directeur sous les yeux du jury; - Attendu que, s'il résulte des énonciations du procès-verbal des opérations du jury que les causes qui lui ont été soumises, et au nombre desquelles figurait celle de la dame Bernard, née Debray, ont été appelées « après que, pour chacune d'elles, le plan parcellaire et le tableau des offres et demandes eurent été remis aux jurés », il est, en même temps, constaté par le même procès-verbal que, postérieurement à cette remise, les débats de l'affaire n. 34, concernant la dame Bernard, ont été suspendus jusqu'à l'arrivée de l'ingénieur Lagrange, représentant de l'Etat, et que ce fonctionnaire, étant arrivé à l'audience, a déposé diverses conclusions; que, de son côté, après le dépôt des nouvelles conclusions de l'Etat, Touchard, conseil et représentant de la dame Bernard, née Debray, partie expropriée, a déposé des conclusions tendant à ce qu'il lui fut donné acte, ce qui a été fait, de diverses déclarations, et, notamment, de celle par laquelle, modifiant sa demande primitive, la dame Bernard la réduisait à 60.000 fr.; Attendu, cependant, qu'aucune des énonciations du procès-verbal n'établit que ces nouvelles conclusions aient été remises aux jurés, ni ne relève une circonstance quelconque d'où on puisse induire que la formalité substantielle de l'art. 37, susvisé, ait été remplie; Attendu que l'omission de cette formalité entraîne la nullité de la décision du jury, et, par voie de conséquence, celle de l'ordonnance du magistrat directeur qui l'a suivie et l'a déclarée exécutoire; Casse la décision du jury de Péronne et l'ordonnance du magistrat directeur, en date du 26 janv. 1912, etc.

Du 27 juin 1912. Ch. civ. - MM. Baudouin, fer prés.; Ditte, rapp.; Lombard, av. gén. (concl. conf.); Bernier, av.

CASS.-CIV. 11 juillet 1912. EXPROPRIATION POUR UTILITÉ publique, Ju

que l'on puisse induire l'accomplissement de cette formalité des énonciations du procès-verbal ou d'une circonstance quelconque mentionnée par celui-ci. V. Cass. 13 mai 1902, précité. V. aussi, Cass. 5 avril 1911 (2 arrêts), précités, et la note.

(3-4-5) Il est constant en jurisprudence que, si un propriétaire, qui n'est pas inscrit sur la matrice cadastrale, s'est fait connaître avant le jugement

GEMENT D'EXPROPRIATION, SOUS-SOL, SÉPULTURE, PROPRIÉTAIRE, MATRICE CADAS TRALE, NOTIFICATION (Rép., vo Expropriation pour cause d'utilité publique, n. 778 et 783; Pand. Rép., eod. verb., n. 636 et s.).

Si l'expropriation est régulièrement suivie et prononcée, en principe, contre celui dont le nom est signalé à l'expropriant par l'inscription à la matrice cadastrale, cette règle cesse d'être applicable, au cas où, avant le jugement d'expropriation, le propriétaire véritable de l'immeuble exproprié s'est fait connaitre à l'expropriant et l'a mis en mesure d'agir contre lui; c'est alors son nom qui doit figurer à la procédure et au jugement (3) (L. 3 mai 1841, art. 15).

Spécialement, lorsque le propriétaire d'une sépulture, dont le droit porte sculement sur le sous-sol, et qui n'était pas désigné à la matrice cadastrale, a signifié à la commune expropriante une protestation contre toute expropriation à laquelle il ne serait pas appelé, l'expropriation doit être prononcée contre lui,et le jugement qui a été rendu seulement contre le propriétaire de la superficie doit être cassé (4) (Id.).

La signification de ce jugement, faite au propriétaire du sous-sol, ne saurait suffire pour la régularité de la procédure (5) (Id.).

(De Luppé C. Comm. de Grisy-Suismes).ARRÊT.

LA COUR;

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Sur les deux moyens réunis : Vu l'art. 15 de la loi du 3 mai 1841; Attendu qu'il résulte de cet article que tout jugement d'expropriation pour cause d'utilité publique doit, sous peine d'encourir la nullité édictée par l'art. 20 de la loi susvisée, contenir les noms des propriétaires à l'égard desquels il est rendu; que, si l'expropriation est régulièrement suivie et prononcée, en principe, contre celui dont le nom est signalé à l'expropriant par l'inscription sur la matrice cadastrale, cette règle cesse d'être applicable, au cas où, avant le jugement d'expropriation, le propriétaire véritable de l'immeuble exproprié s'est fait connaître à l'expropriant et l'a mis en mesure d'agir contre lui; qu'en ce cas, c'est le nom de ce dernier qui doit figurer à la procédure et au jugement; Attendu que, de la procédure, il résulte que le sieur de la Grange a, par acte du 20 avril 1847, vendu aux époux Hubert une chapelle, attenant à l'église de Grisy-Suismes, dite chapelle des Marquis, réserve faite d'un caveau, construit dans le sous-sol, servant de sépulture à sa famille; Attendu que, la commune de Grisy-Suismes ayant poursuivi l'expropriation, pour cause d'utilité publique, des terrains sur lesquels s'élève la chapelle, le sieur de Luppé, représentant la famille de La Grange, protesta,

d'expropriation, l'expropriation doit être prononcée contre lui. V. Cass. 21 nov. 1894 (S. et P. 1895.1.191; Pand. pér., 1895.1.487); 28 nov. 1894 (S. et P. 1895.1.192; Pand. pér., 1895.1.512); 27 déc. 1911 (S. et P. 1912.1.232; Pand. pér., 1912.1.232), et les notes. V. aussi, Cass. 1er févr. 1910 (S. et P. 1911.1.344; Pand. pér., 1911.1.344), et la note.

par exploits des 29 sept. 1910 et 23 mars 1911, signifiés au maire de Grisy-Suismes, contre toute expropriation, et, spéciale ment par l'exploit du 23 mars, contre toute expropriation à laquelle il ne serait pas appelé; Attendu que, dans ces conditions, la commune devait suivre l'expropriation, ce qu'elle n'a pas fait, à la fois contre les consorts Dutois, ayants droit des acquéreurs de 1847, et contre les représentants de la famille de La Grange, restés, depuis la même date, propriétaires du sous-sol de la chapelle, qui était devenu ainsi l'objet d'un droit particulier et distinct; Attendu, dès lors, qu'en faisant prononcer l'expropriation contre les consorts Dutois seulement, et en se bornant à faire signifier ce jugement à de Luppé, comme représentant la famille de La Grange, la commune expropriante ne s'est pas conformée aux dispositions de la loi, et qu'en statuant comme il l'a fait, le jugement attaqué a, par suite, violé l'art. 15 susvisé; Casse le jugement du tribunal civil de Melun, du 28 juill, 1911, etc.

Du 11 juill. 1912. Ch. civ. - MM. Baudouin, ler prés.; Lénard, rapp.; Lombard, av. gén. (concl. conf.); Lefort et Raynal,

av.

CASS.-CRIM. 14 mars 1912.

1o EXPLOIT, HEURE DE NUIT, REMISE, MATIÈRE RÉPRESSIVE (Rép., v Citation, n. 49; Pand. Rép., v's Ajournement, n. 1150, 2021 et s., Appel correctionnel, n. 223 ́et s.). - 2o OutTRAGE, MAGISTRAT, OUTRAGE PAR ÉCRIT, PUBLICITÉ (DÉFAUT DE), TRIBUNAL DE POLICE CORRECTIONNELLE, COMPÉTENCE (Rép., vo Outrages Offenses, n. 98 et s., 131, 132 et s.; Pand. Rép., vo Diffamation-Injure, n. 1383 et s., 1402).

1o La disposition de l'art. 1037, C. proc., qui interdit les significations et les exécutions pendant les heures de nuit, n'est pas applicable aux actes qui se rattachent à l'exercice de la justice répressive (1) (C. proc., 1037).

2° L'outrage à un magistrat de l'ordre judiciaire à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, commis au moyen d'écrits, ne cesse d'être de la compétence de la juridiction correctionnelle que si ces écrits ont été

(1) Il a été jugé à diverses reprises que les dispositions de l'art. 1037, C. proc., ne s'appliquaient pas à la procédure pénale. V. not., Cass. 11 mai 1849 (S. 1819.1.542); 6 déc. 1850 (S. 1851.1.451. P. 1851.2.634); 6 août 1896 (S. et P. 1897.1.255; Pand. pér., 1898.1.264); 16 juin 1904 (S. et P. 1907.1 375; Pand. pér., 1905.1.321), la note et les renvois; adde, notre C. proc. annoté, par Tissier, Darras et Louiche-Desfontaines, sur l'art. 1037, n. 18. Mais ces arrêts visent l'hypothèse de significations faites un jour férié. Ils ne tranchent pas l'autre question, celle de savoir si une signification peut être faite la nuit. Toutefois, l'art. 1037 renfermant deux dispositions, l'une relative aux heures, et l'autre aux jours, il n'est pas logique, si on déclare ce texte inapplicable à la procédure pénale, de n'en prendre que la moitié, et de l'écarter pour partie seulement dans les matières répressives. Toutefois, il y a lieu d'ob

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LA COUR: - Sur le premier moyen, pris de la violation de l'art. 1037, C. proc., et de la fausse application des art. 1029 et 1030 du même Code, en ce que l'arrêt attaqué a déclaré valable la signification d'un jugement correctionnel par défaut, faite après l'heure légale : Attendu que le demandeur, alors détenu, a reçu, suivant exploit du 20 nov. 1911, fait à sa personne, la signification d'un jugement de condamnation par défaut; qu'il n'a formé opposition que le 27 novembre, après l'expiration du délai de cinq jours, imparti par l'art. 187, C. instr. crim.; qu'il a soutenu que son opposition était néanmoins recevable, pour ce motif que la signification lui avait été faite à 7 heures et demie du soir, après l'heure fixée par l'art. 1037, C. proc.; qu'elle devait, dans ces conditions, être déclarée nulle, et qu'ainsi elle n'avait pu faire courir le délai de l'opposition; Attendu qu'à bon droit, l'arrêt attaqué a déclaré la signification susénoncée non entachée de nullité; qu'en effet, la disposition de l'art. 1037, C. proc., qui interdit les significations et les exécutions entre 6 heures du soir et 6 heures du matin, du Ier octobre au 31 mars, et entre 9 heures du soir et 4 heures du matin, depuis le 1er avril jusqu'au 30 septembre, n'est pas applicable aux actes qui se rattachent à l'exercice de la justice répressive;

Sur le deuxième moyen, pris de la violation de la loi du 29 juill. 1881, des droits de la défense, et de l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810, ainsi que de la fausse application de l'art. 222, C. pén., en ce que la Cour d'appel de Paris s'est reconnue compétente pour statuer sur de prétendus outrages adressés à un magistrat au sujet de ses fonctions, alors que les écrits incriminés étaient destinés à la publicité et avaient reçu un commencement de publicité, et qu'ainsi leur auteur n'était justiciable que de la Cour d'assises: - Attendu que Silvan était poursuivi pour avoir outragé un magistrat de l'ordre judiciaire, à l'occasion de l'exercice de ses fonctions,

server qu'à défaut d'application de l'art. 1037, la défense de signifier la nuit un acte de procédure peut trouver un fondement dans le principe de l'inviolabilité du domicile. Mais cette considération ne trouvait pas d'application dans l'espèce, puisqu'il s'agissait de signification faite à un détenu incarcéré, et que la prison ne peut guère être assimilée à un domicile, et bénéficier de ses privilèges. V. Cass. 27 févr. 1908 (S. et P. 1912.1.68; Pand. pér., 1912.1.68), et la note.

(2) L'outrage par écrit, commis envers un magistrat de l'ordre judiciaire à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, est réprimé par les art. 222 et s., C. pén., et rentre par conséquent dans la compétence de la juridiction correctionnelle, s'il n'est pas public; il ne tombe sous l'application des art. 31 et 33 de la loi du 29 juill. 1881, et ne rentre dans la compétence de la Cour d'assises, que si l'écrit a été rendu public. V. Barbier, Code

par deux écrits non renaus publics, adressés, l'un directement à ce magistrat, l'autre au ministre de la justice, qui l'avait communiqué au magistrat outragé; - Attendu que ces faits constituaient le délit prévu et réprimé par l'art. 222, C. pén., de la compétence de la juridiction correctionnelle; qu'il n'en eût été autrement que s'il avait été établi que les écrits susdésignés avaient été rendus publics à une époque antérieure ou concoinitante à celle de leur réception, auquel cas, l'art. 222, précité, cessant d'etre applicable, il n'y aurait plus eu place que pour une poursuite exercée devant la Cour d'assises, en vertu des art. 31 et 33 de la loi du 29 juill 1881; Mais attendu qu'il n'appert ni de l'arrêt ni d'aucunes conclusions versées au dossier que le prévenu ait soutenu et offert de prouver que les écrits incriminés eussent été rendus publics; qu'en cet état, la Cour d'appel ne pouvait pas se déclarer incompétente; qu'elle a usé de ses pouvoirs en statuant sur la prévention; que, dès lors, le moyen ne saurait être accueilli; Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme; Rejette le pourvoi contre l'arrêt de la Cour de Paris du 26 déc. 1911, etc. Du 14 mars 1912. Ch. crim. MM. Bard, prés.; La Borde, rapp.; Eon, av. gén.; Tétreau, av.

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CASS.-CRIM. 7 décembre 1912. VENTE PUBLIQUE DE MEUBLES, Loi du 30 déc. 1906, DÉBALLAGES, LIQUIDATIONS, SOLDES, AUTORISATION DU MAIRE (DEFACT D'), MARCHAND FORAIN, MARCHAND SÉDENTAIRE, ANNONCES, RÉCLAMES, POUVOIR DU JUGE, APPRECIATION SOUVERAINE, INTENTION FRAUDULEUSÉ (Rép., v° Vente commerciale, n. 506 et s.; Pand. Rép., vo Adjudications mobilières, n. 1066 et s.).

L'art. 1er de la loi du 30 déc. 1906, en interdisant, sans une autorisation du maire, les ventes de marchandises neuves, sous forme de soldes, liquidations, ventes forcées ou déballages, vise sans exception toutes les ventes de marchandises neuves au détail, à cri public, de gré à gré, lorsqu'elles se font sous l'une des formes qui y sont énoncées (3) (L. 30 déc. 1906, art. 1er et 2).

Rés. par l'arrêt rapporté en sous-note.

expliqué de la presse, 2 éd., par Matter et Rondelet, t. 2, n. 600; Le Poittevin, Tr. de la presse, t. 3, n. 1035. La Cour de cassation a décidé à bon droit, par l'arrêt ci-dessus recueilli, que la publicité, qui est nécessaire pour faire rentrer l'outrage dans la seconde de ces deux hypothèses, doit être antérieure à l'envoi de l'écrit outrageant au magistrat attaqué, ou concomitante de cet envoi. Seule, en effet, une publicité répondant à ces conditions peut être retenue comme élément du délit une publicité postérieure ne pouvant servir à modifier la nature du délit, caractérisé au moment de sa perpétration.

(3) Il s'agissait, dans l'espèce de l'arrêt cidessus du 7 déc. 1912, d'un commerçant sédentaire (un fabricant de chaussures) (V. l'arrét attaqué de Nancy, 27 juin 1912, infra, 2o part., p. 49), prévenu d'avoir, par des ventes pour solde d'objets de sa fabrication défectueux ou démodés,

Il s'applique notamment à la vente sous forme de déballages, sans qu'il y ait lieu de rechercher si cette vente est faite par un négociant sédentaire ou par un marchand forain, ni si elle est accompagnée d'annonce ou de réclame (1) (1d.). Id.

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Les juges du fond, après avoir constaté qu'un commerçant a fait procéder, sans l'autorisation du maire, dans un de ses magasins, et dans des conditions particulières de publicité et de réclame, ayant consisté dans des annonces publiées dans les journaux et dans des pancartes exposées au-devant du magasin, à la vente de marchandises, vente présentée par les annonces comme ayant pour cause le transfert du commerce dans un autre magasin, comme étant limitée à quatre jours, et comme portant sur des marchandises déclassées, cédées avec des réductions de prix exceptionnelles, concluent à bon droit de

ces constatations souveraines que, les annonces étant autant de moyens combinés pour persuader le public qu'il s'agissait d'une occasion exceptionnelle de bon marché, et d'une baisse accidentelle et passagère de prix réduits bien au-dessous de la valeur réelle, à raison de la liquidation pour solde, déterminée par un changement de local, les faits retenus à la charge du prévenu tombaient sous l'application de l'art. 1er de la loi du 30 déc. 1906 (2) (Id.).

Ces constatations suffisent à établir l'intention frauduleuse du prévenu, qui ressort d'ailleurs nécessairement de ce que les juges du fond n'ont pas admis comme

effectuées de gré à grẻ (V. sur l'application de la loi du 30 déc. 1906 aux ventes de gré à gré, Cass., 24 juill. 1909, S. et P. 1910.1.60; Pand. pér., 1910. 1.60; Lyon, 20 janv. 1910, S. et P. 1910.2.240; Pand. pér., 1910.2.240, et les renvois. Adde, Cass. 3 nov. 1910, rapporté en sous-note [a]), dans un de ses magasins, contrevenu à la disposition de l'art. 1er de la loi du 30 déc. 1906, qui interdit les ventes de marchandises neuves, non comprises dans la prohibition de la loi du 25 juin 1841, faites, sans l'autorisation du maire, sous la forme de soldes, liquidations, ventes forcées ou déballages » Le débat, dans cette affaire, n'a pas porté, devant la Cour de cassation, sur le point de savoir si la loi du 30 déc. 1906 s'applique aux marchands sédentaires, point discuté (V. la note de M. Bourcart sous Nancy, 27 juin 1912, précité, et les renvois), mais sur lequel la jurisprudence de la Cour de cassation s'est déjà prononcée dans le sens de l'affirmative. V. Cass. 24 juill. 1909, précité, et les renvois. Adde, Cass. 3 nov. 1910, précité; Nancy, 27 juin 1912, précité. Le débat a uniquement porté sur la question de savoir si les ventes de l'espèce rentraient dans la catégorie de celles énumérées par l'art. 1er de la loi du 30 déc. 1906, soldes, liquidations ou déballages, et il convient de noter,

(a) (Rousseau). – ARRÊT.

LA COUR; Sur le moyen pris de la violation, par fausse application, de la loi du 30 déc. 1906, en ce que l'arrêt attaqué a condamné l'exposant pour vente au déballage, alors qu'il n'a fait qu'exercer son commerce de marchand forain, en vendant de gré à gré des marchan. dises neuves provenant de fabriques, dans les foires et marchés, sans annonce ni réclame, et saus employer aucun des moyens que la loi du 30 déc. 1906 a eu pour objet d'interdire, sans la permission de l'autorité municipale: - Attendu qu'aux termes de la loi du 30 déc. 1906, sur les ventes au déballage, a les ventes de marchan

justificatifs les faits desquels le prévenu entendait faire résulter sa bonne foi (3) (Id.).

(Lévy).

M. Lévy s'est pourvu en cassation de l'arrêt de la Cour de Nancy du 27 juin 1912, rapporté infra, 2o part., p. 49.

ARRET (apr. délib. en ch. du cons.).

LA COUR; Sur le moyen pris de la violation des art. 1, 2 et 3 de la loi du 30 déc. 1906 et de l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810, pour défaut de base légale, en ce que l'arrêt attaqué prononce une condamnation pour infraction aux prescriptions de la loi de 1906, non seulement sans constater l'intention frauduleuse du prétendu délinquant, mais en constatant, au contraire, des faits constitutifs de l'exercice normal et régulier du commerce et de l'industrie:

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Attendu que l'arrêt énonce que, sans avoir obtenu l'autorisation spéciale du maire, Lévy a procédé à la mise en vente de marchandises dans des conditions particulières de publicité et de réclame; que le journal Le Courrier des Ardennes, numéro du 28 févr. 1912, contenait le communiqué suivant : « Vendredi, 1er mars, grande mise en vente, articles déclassés, 53, Grande-Rue, anciens magasins de chaussures Mathieu. La vente durera 4 jours; qu'à la même époque, au magasin de la Grande-Rue, une longue bande de calicot, fixée au haut de la devan

pour fixer la portée de l'arrêt ci-dessus, que, pour rejeter le pourvoi, la Cour de cassation s'est uniquement fondée sur les constatations souveraines des juges du fait, relatant la publicité et la réclame dont les ventes avaient été précédées et accompagnées, et le caractère que, suivant leur appréciation, la publicité et les réclames imprimaient aux ventes. L'arrêt ci-dessus est donc un arrêt d'espèce, et, sans revenir sur la critique qui a été faite, dans la note précitée de M. Bourcart, de l'arrêt attaqué, on peut conclure de l'arrêt de la chambre criminelle que, si les ventes pour solde ou liquidation de ses marchandises défectueuses ou démodées, faites par un commerçant sédentaire, peuvent tomber sous l'application de la loi du 30 déc. 1906, elles ne sont pas toujours soumises aux prescriptions de cette loi, et l'arrêt semble bien ainsi donner une satisfaction partielle aux critiques de notre collaborateur.

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dises neuves non comprises dans les prohibitions de la loi du 25 juin 1841, sur les ventes aux enchères, ne pourront être faites sous la forme de soldes, liquidations, ventes forcées ou déballages, sans une autorisation spéciale du maire de la ville où la vente doit avoir lieu »;

Attendu que cet article de loi ne fait aucune distinction; qu'il vise sans exception toutes les ventes de marchandises neuves au détail, à cri public, de gré à gré, lorsqu'elles se font sous l'une des formes qui y sont énoncées; qu'il s'applique notamment aux ventes sous forme de déballage, sans qu'il y ait lieu de rechercher si cette vente est faite par un négociant sédentaire ou un mar

ture, annonçait en caractères imprimés : Les chaussures Mathieu seront transférées prochainement rue Thiers, n. 2 », et qu'il était déposé dans les vitrines diverses pancartes portant: «La vente commencera demain, à 8 heures. Avis aux amateurs. Occasions remarquables. Valeur: 10 fr. 90, soldés 5 fr. 95 ou 6 fr. 95 ; Attendu que l'arrêt ajoute : que ces diverses annonces étaient autant de moyens combinés pour persuader le public qu'il s'agissait d'une occasion exceptionnelle de bon marché, d'une baisse accidentelle et passagère de prix réduits bien au-dessous de leur valeur réelle pour solde, en raison de la liquidation occasionnée par changement de bail »; - Attendu qu'en l'état de ces constatations souveraines, la Cour a décidé, à bon droit, que les faits retenus rentraient dans les prévisions de l'art. Ier de la loi du 30 déc. 1906; Attendu, d'autre part, que lesdites constatations suffisent à établir l'intention délictueuse du prévenu; que, au surplus, cette intention s'induit nécessairement de ce que la Cour n'a pas admis comme justificatifs les faits desquels Lévy entendait faire résulter sa bonne foi; qu'ainsi il n'y a pas eu violation des articles visés au moyen; Rejette, etc.

Du 7 déc. 1912. - Ch. crim. - MM. Bard, prés.; Lecherbonnier, rapp.; Rambaud, av. gén. (concl. conf.); Mornard, av.

30 déc. 1906 applicable à une vente au déballage, << sans qu'il y ait lieu de rechercher si cette vente... est accompagnée d'annonce ou de réclame ». Dans cette dernière affaire, en effet, le caractère de la vente n'était pas discutable; il s'agissait d'une vente au déballage par un marchand forain; il importait donc peu qu'elle eût été précédée de publicité. Dans l'affaire ci-dessus, au contraire, le caractère même de la vente était en question, et, sans contredire son précédent arrêt, la chambre criminelle a pu estimer que les juges du fait étaient en droit de puiser, dans la publicité à laquelle s'était livré le prévenu, un élément de décision.

(1-2) V. la note qui précède.

(3) Il avait été déjà jugé que les infractions prévues par la loi du 30 déc. 1906 constituent des délits, pour l'existence desquels l'intention frauduleuse est nécessaire chez leur auteur. V. Lyon, 3 déc. 1907 (S. et P. 1908.2.93; Pand. pér., 1908. 2.93), et les renvois de la note. Mais cette solution, que consacre implicitement l'arrêt ci-dessus, est discutée, et l'on a soutenu que les infractions aux dispositions de la loi précitée sont punissables, indépendamment de la bonne foi de leur auteur. V. les renvois de la note sous Lyon, 3 déc. 1907, précité.

chand forain, ni si elle est accompagnée d'annonce ou de réclame; - Attendu que l'arrêt attaqué constate que Rousseau a, le 23 janv. 1910, sans avoir obtenu l'autorisation spéciale du maire, déballé sur la place publique de Ruffiac des marchandises neuves; Attendu que le fait ainsi retenu rentre dans les termes de l'art. 1er de la loi du 30 déc. 1906; - Rejette le pourvoi formé contre l'arrêt de la Cour de Rennes, du 29 juin 1910, etc. Du 3 nov. 1910. Ch. crim. MM. Bard, près.; Lecher bonnier, rapp.; Lénard, av. gen.; Le Marois, av. Nota. Du même jour, arrêt identique. - Aff. Buscai', femme Southet. - Memes magistrats et avocat.

CASS.-CRIM. 24 mai 1912.

19 TRIBUNAUX MILITAIRES, CONSEIL DE GUERRE, POURVOI EN CASSATION, COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT, USURPATION DE NOM, CONDAMNATION SOUS LE NOM D'UN TIERS, CASIER JUDICIAIRE, RECTIFICATION, FIN DE NONRECEVOIR (Rép., v Justice maritime, n. 942 et s.; Pand. Rép., vo Conseils de guerre et de revision, n. 435, 533 et s.). 20 JUGEMENTS ET ARRÈTS (EN GÉNÉRAL), MATIÈRE RÉPRESSIVE. USURPATION DU NOM D'UN TIERS, CONDAMNATION, DÉLIT COMMIS PAR LE TIERS. CASIER JUDICIAIRE, RECTIFICATION, REVISION (Rép., vis Jugement et arrêt [mat. crim.], n. 822 et s., 995, 1082, Revision des procès criminels, n. 70; Pand. Rép,, v Revision de procès, n. 119 et s.).

1o N'est pas recevable le pourvoi en cassation du commissaire du gouvernement

(1 à 4) Une difficulté, qui a paru assez sérieuse, et qui a été indirectement portée devant la Cour de cassation, a été récemment soumise au conseil de guerre de Bourges. Elle mettait en cause le domaine respectif de la revision et de la rectification du casier judiciaire, l'application de l'art. 443, C. instr. crim., et de l'art. 14 de la loi du 5 août 1899, modifiée par la loi du 11 juill. 1900.

Brièvement, voici de quoi il s'agissait. Un forçat évadé de la Guyane, nommé Dury, ayant pris les papiers et le nom d'un sieur Delépine, s'était fait condamner sous ce nom pour délit de coups et blessures et pour délit de complicité de vol. Mais Delépine était un insoumis, que la gendarmerie recherchait; trouvant Dury porteur des papiers de Delépine, elle l'arrêta, et le remit entre les mains de l'autorité militaire; et le conseil de guerre de Bourges condamna Dury, pour le délit d'insoumission de Delépine, à 15 jours d'emprisonnement. Plus tard, arrêté pour meurtre à Dijon, Dury reconnut sa véritable identité; il avoua être Dury, forçat évadé de Guyane, et non Delépine. A la suite de la vérification de l'identité de Dury, grâce à sa fiche anthropométrique et à des témoignages concordants, le procureur général près la Cour d'appel de Dijon, qui, dans le ressort, a la direction absolue du casier judiciaire (V. Aix, 28 janv. 1870, S. 1870.2.65. P. 1870.328, et la note), se pourvut d'office auprès des tribunaux qui avaient prononcé la double condamnation pour coups et blessures et pour vol, à l'effet d'obtenir la rectification, dans leurs décisions, du nom de Delépine, qui n'avait pas commis les infractions punies par ces condamnations. Il demanda pareillement, par l'intermédiaire du procureur de la République de Bourges, que le conseil de guerre procédât à la même mesure pour la condamnation qu'il avait prononcée pour le délit d'insoumission.

C'est ici qu'une difficulté surgissait. Dury, condamné par les tribunaux ordinaires, avait commis les deux infractions qui avaient été inscrites, grâce à la dissimulation de son identité, sur le casier judiciaire d'un tiers. C'était bien le cas d'appliquer l'art. 14 de la loi du 5 août 1899. Mais il n'avait pas commis, et ne pouvait pas d'ailleurs commettre, étant, en qualité de forçat, exclu de l'armée, le délit d'insoumission, pour lequel il s'était laissé condamner, afin de ne pas divulguer son identité, qu'il avait de sérieux motifs de cacher. Il ne protesta que le jour où, à nouveau condamné aux travaux forcés, il n'eut plus d'intérêt à jouer le personnage de Delépine. Il ne s'agissait donc pas, pour le conseil ANNÉE 1913. 2 cah.

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près un conseil de guerre contre le jugement qui se borne à décider que la condamnation, prononcée précédemment contre un individu sous le nom d'un tiers, ne s'applique pas à ce tiers, que le bulletin n. 1, porté au casier judiciaire du tiers, sera détruit, et que mention de cette rectification sera faite sur la minute du jugement de condamnation (1) (C. instr. crim., 409 et 410; C. just. milit., 144; LL. 5 août 1899 et 11 juill. 1900, art. 14 et 16).

En effet, le jugement attaqué ne rentre dans aucun des cas dans lesquels l'art. 144, C. instr. crim., par référence aux art. 409 et 410, C. instr. crim., autorise le commissaire du gouvernement à se pourvoir en annulation contre les jugements des conseils de guerre (2) (Id.).

D'autre part, le jugement ne saurait être considéré comme un jugement de reconnaissance d'identité, au sens de l'art. 180, C. just.

de guerre de Bourges, comme pour les deux autres tribunaux, en faisant apparaître le nom véritable du condamné, de laisser debout une condamnation légalement encourue et exactement prononcée. Il s'agissait pour lui, s'il procédait à la rectification de son erreur, de mettre en plein jour l'erreur judiciaire qu'il avait commise, en condamnant un individu pour un délit auquel il était matériellement et légalement étranger. Etait-ce bien le cas d'appliquer la procédure de l'art. 14 de la loi de 1899, à propos d'un délit que l'on ne pouvait pas dire avoir été à tort imputé à un tiers, et que l'on ne pouvait plus maintenant attribuer sous son véritable nom au condamné?

Comment sortir de ces difficultés, et rétablir la justice, blessée en même temps que la vérité ?

Il y a un moyen, et un seul, a-t-on dit, c'est de former un pourvoi en revision contre le jugement erroné du conseil de guerre. La Cour de cassation, saisie par le ministre de la justice, et reconnaissant l'erreur judiciaire, annulera le jugement, et elle ordonnera en même temps la destruction au casier judiciaire du bulletin n. 1, dressé en conformité de ce jugement: ce qui remettra tout en ordre. On ne peut pas songer ici à faire intervenir la loi du 5 août 1899. La procédure en rectification du casier judiciaire est inapplicable, parce que cette rectification aurait pour conséquence de ne rien laisser subsister à la charge de l'individu qui a usurpé le nom du tiers: ce qui serait, par une voie détournée, arriver à l'annulation de la condamnation prononcée par le conseil de guerre de Bourges, alors qu'il est de principe essentiel qu'un jugement rendu contradictoirement ne peut être annulé que par une juridiction supérieure à celle qui l'a prononcé.

Que l'on puisse, au contraire, agir par la voie de la revision, c'est de toute évidence. Entre le domaine de l'art. 443, C. instr. crim., et celui de l'art. 14 de la loi du 5 août 1899, la distinction est à faire d'après la nature de l'erreur, dont on poursuit la réparation. Au premier appartient la rectification des erreurs judiciaires; du second relève la rectification des erreurs de nom préjudiciables à des tiers, qui se sont glissées dans les décisions judiciaires. Or, c'était une erreur judiciaire que le conseil de guerre de Bourges avait commise, en condamnant sous un faux nom l'individu que lui avait remis la gendarmerie. La révélation de son identité véritable et la connaissance de sa qualité de forçat, postérieures à la condamnation, sont des faits nouveaux de nature

milit., contre lequel le commissaire du gouvernement aurait le droit de se pourvoir en cassation, la procédure suivie ayant eu uniquement pour but et pour effet l'annulation d'un bulletin n. 1, dressé au nom d'une personne sous l'état civil de laquelle une condamnation avait été indûment prononcée, c'est-à-dire la rectification d'un casier judiciaire, et non l'application de cette condamnation à un autre individu (3) (C. just. milit., 180; LL. 5 août 1899 et 11 juill. 1900, art. 14 et 16).

20 Lorsqu'un individu, qui avait usurpe le nom d'un tiers, s'est laissé condamner sous ce nom pour un délit qui avait été commis par le tiers dont il avait usurpé le nom, y a-t-il lieu de recourir à la procédure de revision ou à la procédure de rectification du casier judiciaire (4) (C. instr. crim., 443; LL. 5 août 1899 et 11 juill. 1900, art. 14)? - V. la note.

à établir son innocence, puisqu'il en résulte pour lui l'impossibilité d'être insoumis. Il importe assez peu que, par la dissimulation volontaire de son nom, il soit l'auteur véritable de l'erreur judiciaire dont il a été victime. Cette circonstance, qui peut avoir de l'importance pour l'attribution de dommages et intérêts à titre de réparation (V. S. Mayer, La question de la revision des procès criminels et correctionnels, p. 143), n'en a aucune sur la revision, qui est prononcée, non pas dans un intérêt particulier, mais par un motif d'ordre général, pour rassurer la conscience publique et affermir la force de la chose jugée, en purgeant les décisions de la justice des erreurs qui peuvent les infecter. Le cas actuel, d'ailleurs, est en tous points semblable à celui que la Cour de cassation a déjà jugé, du tirailleur Taïeb-ben-Amar, condamné pour le délit de désertion du tirailleur Chaïeb-ben-Amar, dont il avait faussement pris le nom, et qui obtint la revision de son jugement. V. Cass. 22 janv. 1898 (S. et P. 1899.1.473; Pand. pér., 1898.1.376). V. encore, dans une affaire analogue, Cass. réun., 19 juin 1899 (S. et P. 1902. 1.110, et la note; Pand. pér., 1900.1.66).

En sens opposé, on a soutenu que la procédure en rectification du casier judiciaire était admissible. C'était la voie que sollicitait le procureur général près la Cour de Dijon, et qu'a suivie le conseil de guerre de Bourges dans le jugement qui a fait l'objet du pourvoi actuel. Littéralement, l'art. 14 de la loi du 5 août 1899, a-t-on dit, est applicable. Que suppose ce texte? une seule chose, c'est qu'une mention ait été portée à tort sur le casier judiciaire d'un tiers. Or, il n'est pas contestable que la condamnation de l'individu, qu'a jugé le conseil de guerre de Bourges, ait été inexactement portée sur le casier d'un tiers, puisque celui-ci n'a pas comparu devant le conseil de guerre, et que le délit d'insoumission, d'ailleurs. n'est pas susceptible d'être jugé par défaut. Qu'a voulu encore le législateur qui a écrit cet art. 14? Il a voulu compléter la législation sur la rectification des condamnations prononcées sous un faux nom. V. S. et P. Lois annotées de 1900, p. 944, note 58. Ce qui est précisément le cas la condamnation avait eu lieu sous un nom supposé; et il n'y avait pas à rechercher si le tiers, dont le nom avait été usurpé, était l'auteur du délit pour lequel était intervenue cette condamnation; la mention de celle-ci sur son casier ne lui en causait pas moins un préjudice certain. S'il était l'auteur du délit, ce n'était ni sa culpabilité qui I PART. - 15

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