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La nullité d'une émission, pour défaut de souscription de la totalité des actions émises, est couverte, lorsqu'une assemblée générale extraordinaire a limité au chiffre réellement

au nom de la société (V. Cass. 23 févr. 1885, S. 1885.1,337. P. 1885.1.819; 31 juill. 1895, sol. implic., précité, et les notes sous ces arrêts; Rennes, 23 mars 1909, S. et P. 1910.2.65; Pand. pér., 1910.2.65, rendu dans la présente affaire, et la note de M. Wahl, 8 col.), de même, elle ne peut être intentée que sous les conditions auxquelles la loi la subordonne entre les mains des représentants de la société.

a

IV. Au reste, c'est d'une manière absolue que la loi exige, comme condition de la responsabilité des gérants dans la société en commandite par actions, ou des fondateurs et premiers administrateurs, dans la société anonyme, l'annulation préalable de la société : « Lorsque la société est annulée aux termes de l'article précédent...», porte l'art. 8, relatif aux sociétés en commandite. « Lorsque la nullité de la société ou des actes et délibérations a été prononcée aux termes de l'article précédent...", dit l'art. 42 pour les sociétés anonymes. Cette responsabilité est prononcée envers « la société par l'art. 8, envers a les actionnaires par l'art. 42. Les actionnaires qui l'intentent doivent se conformer à la condition d'annulation préalable. L'arrêt ci-dessus recueilli le reconnaît. Il exige spécialement cette condition dans le cas d'augmentation du capital, et cela n'est pas contestable.

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L'arrêt attaqué de Rennes, 23 mars 1909, précité, avait également décidé que l'action en responsabilité ne peut être intentée que si la nullité a été d'abord prononcée. Nous avons, tout en approuvant cette solution, fait remarquer (V. la note sous l'arrêt attaqué, 3 col.) qu'on avait interprété à tort en sens contraire un arrêt de la Cour de cassation du 13 févr. 1907 (S. et P. 1910. 1.138; Pand. pér., 1910.1.138). En rejetant le pourvoi dans la présente affaire, la chambre des requêtes n'a donc pas eu à répudier sa jurisprudence antérieure. Il y a, d'ailleurs, indépendamment même des textes, une raison déterminante pour que l'action en responsabilité soit subordonnée à l'annulation; c'est que, s'il n'y a pas eu annulation, il n'y a pas eu non plus, suivant les termes des art. 8 et 42, de dommage résultant de l'annulation ». Une action en responsabilité suppose un préjudice; lorsque, malgré les causes de nullité, la société n'a pas été annulée, elle a fonctionné comme si elle était valable, et, par conséquent, la nullité n'a causé aucun préjudice. V. les notes de M. Wahl sous Rennes, 23 mars 1909, et Cass. 26 déc. 1910, précités. C'est pourquoi aussi la disposition de l'art. 8, qui maintient pendant un certain temps la responsabilité après que la nullité a été réparée, n'a pas, suivant nous, d'application pratique. V. les notes sous les arrêts précitée.

Dans l'espèce, la nullité résultait, d'après notre arrêt (V. cep. la note suivante), du défaut de souscription intégrale. C'était une nullité pour vice de constitution; elle n'avait pas été prononcée; donc l'action en responsabilité ne pouvait être intentée,

V. La société étant dissoute lors de l'exercice de l'action en responsabilité, le pourvoi prétendait que la dissolution avait éteint l'action en nullité. La Cour de cassation décide, à juste titre, que la dissolution n'était pas un obstacle à l'exercice de l'action en nullité. Dès lors qu'un action

souscrit le montant des souscriptions, et, usant des pouvoirs qu'elle tenait des statuts, a réduit du cinquième le capital social, tel qu'il avait été fixé lors de l'émission liti

naire a intérêt à faire annuler la société dissoute (et ici, par hypothèse, il y a intérêt, parce que l'annulation est une condition préalable de l'action en responsabilité), il a le droit de faire prononcer la nullité. V. Cass. 23 avril 1907 (S. et P. 1911.2.267, ad notam; Pand. per., 1911.2.267, ad notam); et la note sous Cass. 26 déc. 1910, précité, 1re col. A-t-il encore ce droit après que la liquidation est terminée? Cette question nouvelle ressortait des faits de l'espèce; la société avait fusionné avec une autre société, moyennant l'attribution d'actions émises par celle-ci et qui avaient été distribuées entre les actionnaires de la première. C'est l'un de ces actionnaires qui intentait ensuite l'action en responsabilité, sans avoir demandé la nullité; la Cour de cassation, en repoussant cette action, semble reconnaître (bien qu'elle s'appuie, comme nous le dirons, sur une considération spéciale tirée de ce qu'il y avait eu fusion) que la nullité peut encore être demandée après la liquidation.

La Cour de Paris a autrefois admis que l'action en nullité n'est plus susceptible d'être intentée après la reddition des comptes du liquidateur. V. Paris, 4 janv. 1899, Journ. des soc., 1899, p. 411). Mais la portée de cet arrêt est restreinte par le fait qu'il s'appuie sur ce qu'en acceptant les comptes, les actionnaires avaient tacitement renoncé à l'action en nullité. Dans l'espèce aussi, on aurait pu se demander si la nullité n'avait pas été également couverte par la liquidation, d'autant plus que la Cour d'appel a reconnu que l'actionnaire, en acceptant des actions de la société absorbante, avait implicitement renoncé à son action en responsabilité contre les administrateurs. V. la note, in fine, sous l'arrêt attaqué. La question n'a pas été posée dans ces termes; si elle avait été ainsi formulée, on pourrait soutenir qu'elle aurait dû être résolue négativement. Car on admet que la nullité d'une société ou d'une augmentation de capital est d'ordre public, et, par suite, ne s'éteint pas par la confirmation. V. la note de M. Perroud, sous Cass. 22 oct. 1906 (S. et P. 1909.1.521; Pand. pér., 1909.1.521). Mais, en ce qui concerne l'action en nullité basée sur ce qu'une souscription a été insuffisamment couverte (ce qui était le cas dans l'espèce), la Cour de cassation a décidé qu'elle est, en ce qui concerne chaque actionnaire, éteinte par sa ratification. V. Cass. 30 mars 1908 (S. et P. 1910.1.193; Pand. pér., 1910.1.193), et la note.

VI. Quoi qu'il en soit, la question qui a été posée dans l'espèce a été uniquement de savoir si, après la liquidation, l'action en nullité peut encore être intentée.

Théoriquement, on ne voit pas pourquoi elle ne le pourrait pas. S'il s'agissait de demander la nullité pour en tirer des conséquences au point de vue du partage, c'est-à-dire pour revenir sur le partage antérieur, quel est le texte ou le principe qui empêcherait les associés de le faire? L'art. 64, C. comm., fait allusion aux actions intentées après la liquidation contre les associés, sans distinguer suivant que ces actions sont formées par les autres associés ou par les tiers; la jurisprudence reconnaît même que les actions entre associés peuvent être intentées après le délai de cinq ans fixé par ce texte (V. Cass. 22 mars 1905, S. et P. 1905.1.308, et la note). D'autre part, l'art. 64 s'applique aux sociétés anonymes comme aux autres sociétés. V.

gieuse, et lorsque tous les souscripteurs de la nouvelle émission, au nombre desquels se trouvait le demandeur en nullité, ont accepté la réduction de l'émission votée par

Cass. 24 janv. 1894 (S. et P. 1895.1.497), et la note de M. Wahl; Thaller et Pic, Des soc. comm., t. 1. n. 660 et 661. V. toutefois en sens contraire, Lyon-Caen et Renault, op. cit., t. 2, 1re part., n. 429 et 545. Mais les actionnaires ne peuvent demander la nullité en vue d'une rectification de la liquidation, les règles de la liquidation étant les mêmes en cas d'annulation qu'en cas de dissolution. V. la note de M. Wahl, sous Cass. 26 déc. 1910, précité. Cela n'empêche pas que, pour les mêmes motifs, ils ne puissent la demander, si, à un autre point de vue, ils y ont intérêt, notamment pour exercer une action en responsabilité contre les fondateurs.

On ne peut opposer la jurisprudence d'après laquelle la faillite de la société, qui peut être demandée après la dissolution (V. Trib. comm. de Poitiers, 27 avril 1908, sous Poitiers, 29 juin 1908, S. et P. 1911.2.33; Pand. pér., 1911.2.33, et la note), ne peut plus l'être après la fin de la liquidation (même jugement, et la note). Si elle peut être demandée après la dissolution, c'est que la personnalité morale subsiste pour les besoins de la liquidation; si elle ne peut pas l'être après la fin de la liquidation, c'est que l'on considère que la faillite est un état d'insolvabilité dans lequel seules les personnes existantes peuvent se trouver. Ces considérations ne s'appliquent pas aux demandes en annulation.

Mais, pratiquement, contre qui serait demandée cette nullité? Ce n'est pas contre les administrateurs, dont les pouvoirs ont déjà pris fin par la mise en liquidation et la désignation des liquidateurs (V. Lyon, 2 févr. 1864, S. 1865.2.259. P. 1865.1015; Nîmes, 8 mai 1908, Journ. des soc., 1910, p. 63); quant aux liquidateurs, ils ont euxmêmes cessé leurs fonctions après la fin de la liquidation, et, leurs comptes une fois rendus, ils cessent de représenter la société.

Mais, dans l'espèce, suivant la Cour de cassation, la société dissoute et liquidée avait un représentant, contre lequel l'action en nullité pouvait être intentée; c'était la société dans laquelle elle s'était absorbée par voie de fusion, et qu'elle « s'était substituée activement et passivement ". L'arrêt veut-il prendre parti dans le sens de l'affirmative sur la question, si délicate et si peu élucidée encore, de savoir si une société qui absorbe une autre société est tenue de plein droit des dettes de celle-ci? V. Paris, 23 janv. 1912, et Trib. comm. de la Seine, 9 avril 1910 (S. et P. 1912.2.297; Pand. pér., 1912.2.297), et la note de M. Wahl. Il fait plus probablement allusion à une clause du contrat de fusion, dans laquelle la succession aux dettes était formellement stipulée. Mais, que la succession aux dettes soit de plein droit ou qu'elle soit convenue, la société absorbante estelle bien, vis-à-vis des demandeurs en nullité, le représentant de la société absorbée? On peut le soutenir, et cela nous paraît même certain, dans l'opinion d'après laquelle la succession est de plein droit; cette opinion part de l'idée que la société absorbante est un ayant cause à titre universel, une sorte d'héritier; non seulement l'héritier est tenu des dettes, mais toutes les actions qui étaient susceptibles d'être intentées contre le défunt peuvent l'être contre lui. Au contraire, si la société absorbante n'est qu'un ayant cause à titre particulier, elle n'est pas, même si par une clause for

l'assemblée générale (1) (L. 24 juill. 1867, art. 1er, 7, 24 et 41).

En pareil cas, l'action en responsabilité, dirigée contre les administrateurs à raison de la nullité de l'émission, n'est pas recevable, alors qu'il s'est écoulé plus de trois ans depuis cette assemblée générale (2) (L. 24 juill. 1867, art. 8 et 42).

Il appartient aux juges du fond, par une appréciation souveraine des intentions et de la volonté d'un actionnaire, de décider qu'en consentant, sans contrainte ni manoeuvre d'aucune sorte, à la réduction d'une

melle elle est chargée des dettes de la société absorbée, qualifiée pour répondre à une action en nullité de cette dernière; la nullité ne donne pas naissance à une dette; la société absorbante n'est aucunement intéressée à combattre une demande de ce genre, dont les conséquences ne rejaillissent pas sur elle. Soutiendra-t-on que l'acquéreur d'un fonds de commerce doit répondre à une action en nullité d'un acte passé par son prédécesseur dans l'exploitation de son fonds?

Il y a beaucoup moins de difficulté, si l'on admet avec nous que les fondateurs échappent à l'action en responsabilité, dès lors qu'il n'y a pas préjudice, ce qui est conforme au droit commun. Dès la dissolution de la société, et bien que cette dissolution ne soit pas un obstacle à l'action en nullité, il n'y a plus de responsabilité, si la nullité n'a pas été antérieurement prononcée; la société, en effet, a été dissoute pour des faits indépendants de la nullité; la nullité n'a donc eu aucune influence fâcheuse sur la direction de la société; alors même qu'elle serait prononcée, les actionnaires n'obtiendraient pas des administrateurs une réparation pécuniaire, puisqu'ils n'ont pas subi de préjudice à raison de la nullité.

(1-2) Une émission d'actions est nulle, si l'émission n'a été couverte qu'en partie. V. Cass. 18 juill. 1906 (3 arrêts) (sol. implic.) (S. et P. 1907.1.265), et la note de M. Naquet. Adde, Bordeaux, 16 févr. 1903 (S. et P. 1910.1.193, ad notam; Pand. pér., 1910.1.193, ad notam). Il n'en est autrement que vis-à-vis des souscripteurs qui ne se sont pas préoccupés du montant du capital. V. Paris, 27 déc. 1899 (S. et P. 1910.1.195, ad notam: Pand. pér., 1910.1.195, ad notam).

Toutefois, les statuts décident valablement que la souscription pourra être réduite par l'assemblée constitutive ou le conseil d'administration au chiffre qui sera effectivement obtenu. V. Cass. 13 nov. 1907 (S. et P. 1908.1.65; Pand. pér.. 1908.1.65), et la note de M. Lyon-Caen. D'autre part, l'émission, en dehors même d'une clause de ce genre, peut être réduite au chiffre obtenu, avec le consentement de tous les souscripteurs. V. Bordeaux, 16 févr. 1903, précité. Adde, la note de M. Lyon-Caen, sous Cass. 13 nov. 1907, précité. Enfin, chaque souscripteur peut, en ce qui le concerne, renoncer à l'action en nullité. V. la note qui précède.

Dans l'espèce, la Cour de cassation constate, d'une part, que les statuts autorisaient l'assemblée générale à limiter l'émission au nombre d'actions qui serait souscrit, et que l'assemblée l'avait effectivement limitée à ce nombre, et, d'autre part, que tous les souscripteurs avaient accepté que l'émission fût réduite. Il y avait donc deux raisons pour que l'émission ne fût pas nulle.

Mais la nullité n'était invoquée qu'en vue d'obtenir contre les administrateurs une condamnation à des dommages-intérêts (V. la note qui précède). La Cour de cassation repousse l'action

émission d'actions non entièrement souscrites, et en acceptant l'échange des actions par lui souscrites contre des actions d'une société nouvelle substituée à celle dont il avait souscrit des actions, cet actionnaire renonce à se prévaloir du préjudice causé par les actes quasi delictueux des administrateurs lors de l'émission des actions (3) (C. civ., 1382 et 1383; L. 24 juill. 1867, art. 44). (Dupin C. Administrateurs de la Soc. des voiliers de Saint-Nazaire).

M. Dupin s'est pourvu en cassation contre

en responsabilité, d'abord parce que la nullité n'avait pas été demandée judiciairement (V. la note qui précède), ensuite, par application de l'art. 8 de la loi de 1867, modifié par la loi de 1893, d'après lequel l'action en responsabilité est non recevable, lorsque, avant l'introduction de la demande, la cause de nullité a cessé d'exister et, en outre, que trois ans se sont écoulés depuis le jour où la nullité était encourue ». Malgré la formule employée par l'arrêt, il n'est pas douteux qu'il n'a pas voulu dire que la nullité était encourue au jour où elle avait été couverte par l'assemblée générale, mais bien que, trois ans s'étant écoulés depuis qu'elle avait été couverte, il y avait nécessairement plus de trois ans qu'elle avait été encourue. Il ne peut faire difficulté, en effet, que c'est du jour où la nullité a commencé d'exister qu'elle est encourue, au sens de l'art. 8. Le rapport à la Chambre des députés donne du texte de l'art. 8 un commentaire précis, et conforme au sens naturel des mots, en disant que le fondateur reste tenu, a pendant trois ans, après l'infraction commise », bien que l'irrégularité ait été réparée (S. et P. Lois annotées de 1893, p. 574, note 7). Sans doute, on peut se demander à quel moment existe la nullité, et l'on conçoit deux opinions. D'une part, en effet, on peut dire qu'en droit, tant que la société n'est pas définitivement constituée, il n'y a qu'un projet, et que, par suite, la nullité n'est pas encourue. V. Bouvier-Bangillon, Loi de 1893, p. 97 et s.; Houpin, Tr. gén. des soc., 4° éd., t. 1, n. 613; Arthuys, Tr. des soc. comm.. t. 1, n. 399. On peut dire, d'autre part, que la nullité est encourue du jour où a été accomplie la formalité irrégulière. Sans doute, en droit, il ne peut y avoir de nullité de société avant la constitution de la société; mais la loi a voulu établir la responsabilité contre les administrateurs qui n'ont pas réparé l'irrégularité; or, ils ont pu la réparer immédiatement. Cette seconde opinion paraît être conforme au passage précité des travaux préparatoires. La première paraît cependant plus juste, non seulement parce qu'elle est conforme aux principes, mais aussi et surtout parce que les mots sujets à interprétation ont certainement ce sens dans un autre texte, l'art. 42, qui déclare responsables des vices de constitution, avec les fondateurs auxquels la nullité est imputable, « les administrateurs en fonctions au moment où elle a été encourue ». Comme il n'y a pas d'administrateurs avant la constitution de la société, c'est des administrateurs en fonctions au moment où la société se constitue qu'il s'agit ici. V. Paris, 28 mai 1869 (S. 1870.2.69. - P. 1870.335); Trib. comm. de la Seine, 8 déc. 1910 (Journ. des soc., 1911, p. 814). V. aussi, Cass. 8 nov. 1886 (sol. implic.) (S. 1887. 1.353. P. 1887.1.881), et la note de M. Labbé, n. III, b. Mais, quoi qu'il en soit de cette discussion, il est bien certain que la nullité existe et peut servir de point de départ au délai de l'art. 8. au plus tard lorsque la société est constituée.

l'arrêt de la Cour d'appel de Rennes du 23 mars 1909, rapporté S. et P. 1910.2.65; Pand. per., 1910.2.65. Jer Moyen. Violation ou fausse application des art. 1865, 1872, 1873, C. civ., 8 et 42 de la loi du 24 juill. 1867, modifiée par la loi du 1er août 1893, en ce que l'arrêt attaqué a déclaré non recevable l'action en responsabilité intentée par l'exposant à l'encontre des anciens administrateurs, à raison de la nullité de la sixième émission, pour le motif qu'elle n'avait pas été précédée d'une action préalable en nullité de cette

L'art. 8 devait-il d'ailleurs recevoir application dans l'espèce? Cet article a trait aux nullités pour vices de constitution. Sans approfondir ici une question qui n'a pas été agitée dans l'espèce, on peut soutenir que la nullité, basée sur ce qu'une émission n'a pas été couverte, au cas où les statuts autorisent la réduction des émissions non entièrement souscrites, n'est pas une nullité pour défaut de souscription intégrale, mais une nullité fondée sur le défaut de consentement des souscripteurs, qui n'ont pas entendu s'engager, si tout le capital estimé nécessaire à l'exploitation sociale n'est pas réuni. C'est pourquoi, à la différence des nullités pour vices de constitution, celle dont nous parlons ici n'est pas d'ordre public (V. la note qui précède); c'est pourquoi aussi, au lieu d'exiger, pour être couverte, comme le veut l'art. 8, l'accomplissement régulier de la formalité mal accomplie, — à savoir que les titres qui n'ont pas été souscrits trouvent des souscripteurs, elle exige simplement que les intéressés se déclarent satisfaits; et c'est pourquoi encore les souscripteurs, qui n'ont pas compté sur la souscription des autres titres, n'ont pas d'action en nullité. Or, l'art. 8 ne s'applique pas aux nullités pour vices de consentement (V. Wahl, Journ. des soc., 1911, p. 127).

D'autre part, y avait-il nullité dans l'espèce? C'est encore un point délicat. Quand les statuts laissent à l'assemblée générale le soin de réduire l'émission au montant des souscriptions, c'est cette assemblée qui, en réalité, fixe le chiffre de l'émission, et, si elle déclare se contenter des souscriptions obtenues, il n'y a jamais eu nullité, et, par suite, il n'y a jamais eu responsabilité. Il est, d'ailleurs, inadmissible que les administrateurs soient responsables, pendant trois ans, d'une émission insuffisamment couverte, qu'ils n'avaient le droit d'écarter eux-mêmes comme insuffisante, pas obligés qu'ils étaient de solliciter une délibération de l'assemblée.

Nous rappelons, pour terminer, que l'art. 8. suivant nous, en ce qui concerne le maintien de la responsabilité des administrateurs après la réparation de l'irrégularité, n'a pas de portée, le préjudice n'existant pas. V. les notes sous l'arrêt attaqué de Rennes, 23 mars 1909 (S. et P. 1910.2. 65; Pand. per., 1910.2.65), et sous Cass. 26 déc. 1910 (S. et P. 1912.1.89; Pand. pér., 1912.1.89).

ALBERT WAHL.

(3) En déclarant que le demandeur n'était pas recevable dans son action en responsabilité, parce qu'il avait accepté d'abord les actes qu'il prétendait maintenant incriminer, les juges du fon 1 s'étaient livrés à une appréciation de ses intentions qui échappait au contrôle de la Cour de cassation. V. la note, in fine, sous l'arrêt attaqué de Rennes, 23 mars 1909 (S. et P. 1910.2.65; Pand. per., 1910.2.65). Comp. sur une espèce analogue, Cass. 25 janv. 1881 (S. 1881.1.451. P. 1881.1 1170).

émission, alors qu'avant l'introduction de l'instance en responsabilité, la société avait été dissoute et avait fusionné avec une autre société à laquelle elle avait apporté son actif et son passif, et que, par suite, une action en nullité de l'emission n'était pas le préalable nécessaire de l'action en responsabilité contre les adminis

trateurs.

2 Moyen. Violation des art. 1338, 1340, 1382, C. civ., manque de base légale, défaut et contrariété de motifs, et violation de l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810, en ce que, tout en constatant à la charge des défendeurs éventuels l'existence de fautes susceptibles de donner ouverture, au profit de l'exposant, à une action individuelle en responsabilité, l'arrêt attaqué, sans répondre aux constatations du jugement dont appel, à la confirmation duquel l'exposant avait conclu, et sans constater, en fait, de la part de celui-ci, une intention de renonciation à son action individuelle, a cependant déclaré cette action non recevable, par l'unique motif que l'exposant avait concouru par mandataire à une assemblée qui avait voté la dissolution de la société et l'apport de son actif et de son passif à la Société d'armement, qui s'était ainsi trouvée substituée à la Société des voiliers, et qu'il avait ensuite déposé ses actions pour en faire l'échange avec celles de la nouvelle société, alors, d'une part, que, si l'actionnaire qui aliène ses titres se rend par là même non recevable à exercer l'action sociale, cette aliénation ne lui fait perdre en quoi que ce soit son action individuelle, et alors, d'autre part, que, si l'on peut admettre que la substitution de la Société d'armement à la Société des voiliers pouvait faire obtacle, à l'encontre de cette dernière, à l'exercice d'une action en responsabilité, à raison des manoeuvres ayant déterminé la souscription de l'exposant, cet obstacle ne portait aucune atteinte à l'action personnelle et distincte qu'il avait aux mêmes fins contre les défendeurs éventuels, auteurs personnels de ces ma

nœuvres.

ARRÊT,

LA COUR; Sur le premier moyen du pourvoi: Attendu, en droit, que si, d'après le troisième alinéa de l'art. 8 de la loi du 24 juill. 1867, modifiée par la loi du 1er août 1893, l'action en responsabilité, pour les faits dont la nullité de la société résultait, demeure ouverte pendant trois ans à partir du jour où cette nullité était encourue, lorsque sa cause a cessé d'exister avant l'introduction de la demande, ladite action ne peut être exercée, en dehors de ce cas spécial, aux termes des art. 8 et 42, qu'à la condition que la nullité dont elle résulte ait été préalablement prononcée;

Attendu, en fait, qu'il est constant que la Société anonyme des voiliers de SaintNazaire n'a jamais été mise en cause, et que la nullité de la sixième émission de ses actions, sur laquelle se fondait l'action en

(1) V. conf., Cass. 25 juin 1907 (S. et P. 1907. 1.455; Pand. pér., 1907.1.286); Paris, 24 nov. 1910 (S. et P. 1911.2.183; Pand. pér., 1911.2.183), et les renvois.

responsabilité de Dupin contre les administrateurs de cette société, n'a pas été prononcée; que, dès lors, c'est à bon droit que l'arrêt attaqué a repoussé comme irrecevable cette action sociale, exercée individuellement par le susnommé; - Attendu que vainement le pourvoi objecte qu'au moment où elle a été intentée, la Société des voiliers était dissoute; que cette circonstance ne mettait pas obstacle à l'action en nullité; qu'elle pouvait d'autant moins en paralyser l'exercice que ladite société s'était substitué activement et passivement la Société d'armement, avec laquelle elle avait fusionné, et qui, par suite, la représentait; Attendu, au surplus, que Dupin avait lui-même assigné les administrateurs pour voir dire nulle la sixième émission des actions de la Société des voiliers de Saint-Nazaire et ses souscriptions à cette émission, par le motif que la totalité des actions émises, qui s'élevaient à 1.600 000 fr., n'avaient été souscrites qu'à concurrence de 600.000 fr.: - Or, atten iu qu'il est constaté par les juges du fond, non seulement que l'assemblée générale extraordinaire du 10 juill. 1902 a limité à ce dernier chiffre le montant des souscriptions, et, usant du pouvoir que lui conférait l'art. 49 des statuts, réduit ainsi à 4 millions le capital social, qui devait être porté à 5 millions par l'émission litigieuse, mais encore que tous les souscripteurs de ladite émission, au nombre desquels se trouvait Dupin, ont accepté qu'elle fût réduite à 600.000 fr.; qu'il s'ensuit que la nullité dont il s'agit a été couverte au mois de juillet 1902; tendu que, la demande du susnommé ayant été introduite dans le courant du mois d'octobre 1907, il s'est écoulé plus de trois années entre le jour où la nullité était encourue et celui de l'assignation; que l'action en responsabilité, dans le système du pourvoi, était par conséquent irrecevable, et que cette partie du dispositif de l'arrêt attaqué serait donc encore, de ce chef, légalement justifiée: que, par conséquent, à quelque point de vue qu'on se place, loin de violer les articles de loi visés au moyen, l'arrêt en a fait une juste application;

At

Sur le deuxième moyen: Attendu qu'après avoir reconnu que l'action individuelle de Dupin, basée sur les quasi-délits commis par les membres du conseil d'administration de la Société des voiliers à l'origine de la sixième émission, devrait être accueillie, si les droits du demandeur étaient demeurés intacts, la Cour d'appel constate que celui-ci, ayant consenti, sans contrainte ni manoeuvre d'aucune sorte, à ce que cette émission fùt réduite après coup à 600.000 fr., et, lorsqu'il aurait pu demander le remboursement de ses quarante actions, optant pour l'autre alternative, a, librement et en pleine connaissance de cause, accepté de les échanger contre celles de la Société d'armement, substituée, comme il est dit ci-dessus, à la Société des voiliers par délibération de l'assemblée générale du 28 juill. 1902, s'exposant ainsi

Dans l'espèce, il y avait faute du débitant, mais la circonstance de mauvaise foi n'était pas relevée. Par conséquent, il s'agissait, non pas d'un fait de

de son plein gré à l'aléa d'une situation qui pouvait lui procurer des avantages; Attendu que, de l'ensemble de ces faits personnels à l'exposant, et par une appréciation souveraine de ses intentions et de sa volonté qui échappe au contrôle de la Cour de cassation, la Cour de Rennes a déduit qu'il avait renoncé à se prévaloir des droits résultant pour lui du préjudice causé par les actes quasi délictueux dont, après un silence prolongé, il poursuivait aujourd'hui la réparation; qu'en statuant comme elle l'a fait, elle a donné une base légale à sa décision, dont les motifs suffisants n'ont entre eux rien de contradictoire, et qu'elle n'a contrevenu à aucune des dispositions invoquées par le pourvoi; - ReJette, etc.

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Du 16 mars 1910. Ch. req. MM. Tanon, prés.; Michel-Jaffard, rapp.; Lombard, av. gén. concl. conf.); Boivin-Champeaux, av.

CASS.-REQ. 30 décembre 1912. CONCURRENCE DÉLOYALE OF ILLICITE. DÉBITANT, PRODUIT DEMANDÉ, PRODUIT SIMILAIRE, SUBSTITUTION, ACTE ILLICITE, PRÉJUDICE (Rép., v Concurrence déloyale. n. 457 et s.; Pand. Rép.. v Marques de fabrique, n. 671, 990 et s.).

Un débitant de boissons ne peut, sans prévenir le consommateur, substituer, au produit qui lui est demande, un produit d'une autre marque. En agissant ainsi, il commet un acte illicite, et doit réparation du préjudice par lui causé de ce chef au fabricant du produit qui avait été demandé par le consommateur (1) (C. civ., 1382). (Chollet C. Soc. Saint-Raphaël).

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ARRÊT.

LA COUR; Sur le moyen unique du pourvoi. pris de la violation des art. 1382 et 1383, C. civ., et 7 de la loi du 20 avril 1810: Attendu qu'il est constaté par l'arrêt attaqué que Chollet a versé à des consommateurs, qui lui demandaient un Saint-Raphaël-Quinquina, une boisson qui n'était pas le produit demandé; que la Cour déclare qu'en substituant, sans prévenir le consommateur, un autre produit au Saint-Raphaël-Quinquina, Chollet a commis un acte illicite; Attendu qu'en décidant, en l'état de ces constatations et déclarations souveraines, que Chollet avait causé à la Société Saint Raphaël un préjudice dont il lui devait réparation, la Cour de Paris, dont l'arrêt est suffiamment motivé, n'a violé aucun des articles de loi susvisés; Rejette le pourvoi contre l'arrêt rendu par la Cour de Paris, le 4 mai 1911, etc.

Du 30 déc. 1912. Ch. req MM. Tanon, prés.; Bulot, rapp.; Blondel, av. gén. (concl. conf.); Durnerin, av.

concurrence déloyale, mais simplement d'un fait de concurrence illicite. V. la note sous Cass. 25 juin 1907, précité.

CASS.-CIV. 11 février 1913.

FAILLITE, ANCIEN COMMERCANT, CHANGEMENT DE DOMICILE, JUGEMENT DÉCLARATIF, LIEU DE LA RÉSIDENCE, PUBLICITÉ, INSERTIONS DANS LES JOURNAUX, AFFICHAGE, LIEU D'EXPLOITATION DU COMMERCE, OPPOSITION, DELAI, POINT De départ, Double appel, REJET DE L'OPPOSITION, MAINTIEN DU JUGEMENT DÉCLARATIF, GREFFIER DU TRIBUNAL DE COMMERCE, PROCÈS-VERBAL, RÉDACTION, CONCOMITANCE (Rép., vo Faillite, n. 4153 et s.; Pand. Rép., vo Faillite, liquidation judiciaire, etc., n. 1404 et s.).

Lorsqu'un commerçant, après avoir cessé son commerce et quitte les lieux où il l'exploitait, a été déclaré en faillite, à la requête de quelques-uns de ses créanciers, par le tribunal du lieu de sa résidence, il suffit, pour que les prescriptions de l'art. 442, C. comm., soient observées, que les formalites d'affichage et d'insertion du jugement déclaratif par extraits dans les journaux aient été effectuées au lieu où la faillite a été déclarée; il n'est pas nécessaire qu'elles aient également été remplies dans les lieux où le failli avait exercé son commerce (1) (C. comm., 442).

En conséquence, d'une part, le délai d'opposition au jugement déclaratif de faillite court de la date des seules insertions dans les journaux du lieu où a été prononcé le jugement déclaratif de faillite (2) (C. comm., 580).

Et, d'autre part, la publicité, qui a pu

(1 à 4) Il importe de bien préciser le double appel dont la Cour de Paris était saisie, et sur lequel elle a statué par un même arrêt. Le tribunal de commerce de la Seine avait déclaré la faillite par jugement en date du 17 mai 1907, et, par un second jugement du 22 avril 1908, il avait rejeté comme non recevable, à raison de sa tardiveté, l'opposition formée par des créanciers au jugement déclaratif. Ces deux décisions des 17 mai 1907 et 22 avril 1908 avaient été frappées d'appel. La jonction des deux appels avait été prononcée. La Cour avait d'abord statué sur l'opposition, et, comme cette opposition ne s'était pas produite dans le délai imparti par la loi, les créanciers avaient été déboutés de leur appel de ce chef. La conséquence nécessaire du rejet de l'opposition avait été le maintien du jugement du 22 avril 1908, et la confirmation de ce jugement avait entraîné du même coup le maintien et la confirmation du jugement déclaratif de faillite du 17 mai 1907.

Le pourvoi soutenait que, pour confirmer le jugement déclaratif de faillite, il aurait fallu, de toute nécessité, que la Cour commençât par statuer sur la question de compétence, parce que c'était celle qui dominait tout le débat. Suivant lui, le tribunal de commerce de la Seine, dans le ressort duquel résidait le failli, ancien commerçant, n'était pas compétent, la déclaration de faillite n'ayant pu être prononcée que par le tribunal dans le ressort duquel le négociant avait exercé son commerce, c'està-dire celui de Saint-Malo. V. sur la question, Cass. 25 mai 1903 (S. et P. 1904.1.29), et la note. C'est sur ce point que le pourvoi a fait porter tout l'effort de sa discussion. L'arrêt ci-dessus rapporté de la chambre civile ne l'a pas suivi sur ce terrain, et avec juste raison.

Le délai accordé pour former opposition au jugement déclaratif de faillite varie suivant que le jugement est attaqué par le failli ou par toute

être ultérieurement donnée à la faillite dans les lieux où le failli avait exploité son commerce, en vue d'appeler les intéressés à faire valoir leurs droits de créance, n'a pas eu pour effet de faire courir de nouveaux délais d'opposition, en dehors de ceux précé demment courus (3) (Id.).

En cas de double appel, portant, l'un sur le jugement déclaratif de faillite, et fondé sur l'incompétence du tribunal qui a déclaré la faillite, l'autre sur le jugement qui déboutait des créanciers du failli de leur opposition au jugement déclaratif, il suffit que l'opposition soit déclarée non recevable pour qu'il n'y ait plus lieu de rechercher si le jugement déclaratif a été rendu par un tribunal competent; le rejet de l'opposition entraine, en effet, par voie de conséquence, le maintien de ce jugement (4) (Id.).

La preuve de l'affichage par extraits du jugement déclaratif de faillite dans l'auditoire du tribunal de commerce, et de la concomitance de cet affichage avec le procès-verbal qui en a été dressé par le greffier du tribunal de commerce, est suffisamment constatée par l'arrêt qui déclare qu'il résulte d'un procès-verbal dressé par le greffier que l'affichage a eu lieu le lendemain du jour où le jugement déclaratif a été rendu (5) (C. comm., 442).

(Jenart et Legendre C. Synd. Cuvelier,

Jacquemart et autres).

M. Cuvelier, ancien hôtelier à DinardSt-Enogat, après avoir vendu son fonds de

autre partie intéressée. A l'égard du failli, le délai est de huitaine seulement; pour les autres parties, il est d'un mois (C. comm., 580). Vis-à-vis de tous, il commence à courir du jour où les formalités de l'affichage et de l'insertion par extraits du jugement ont été remplies, conformément aux dispositions de l'art. 442, C. comm. ; cette publicité équivaut à une signification. V. Cass. 22 mai 1895 (motifs) (S. et P. 1895.1.326, et les renvois; Pand. pér., 1895.1.321). Adde, notre C. comm. annote, par Cohendy et Darras, sur les art. 580-581, n. 26 et s.; et notre Rép. gén. du dr. fr., vo Faillite, n. 4153; Pand. Rép., vo Faillite, liquidation judiciaire, etc., n. 1404 et s. Ces formalités mettent en demeure d'agir ceux qui auraient intérêt à contester la déclaration de faillite, soit quant à la compétence du tribunal qui l'a prononcée, soit quant aux raisons qui l'ont provoquée. Dans tous les cas, les intéressés sont avertis, et ils le sont à peine de déchéance; s'ils laissent passer le délai sans formuler leur opposition, le jugement déclaratif de faillite reste acquis; il ne pourra plus être contesté. Il importera peu que le tribunal qui l'aura prononcé n'ait pas été compétent; cette question n'aurait pu être examinée que si l'opposition avait été reconnue recevable; dès l'instant qu'elle est écartée comme tardive, tout est terminé; le débat ne peut plus se rouvrir sur les conditions dans lesquelles est intervenu le jugement déclaratif de faillite. Autrement, on pourrait se demander quel serait l'effet d'un jugement de débouté d'opposition en matière de faillite, si le jugement déclaratif n'était pas maintenu en sa forme et teneur, ainsi que l'a décidé avec juste raison la Cour de Paris; le jugement de débouté serait alors comme s'il n'avait pas été rendu, puisque les intéressés pourraient encore remettre en discussion la déclaration de faillite. C'est ce que la loi n'a pas voulu; elle a fixé un délai pour l'opposition, passé lequel

commerce et quitté la commune, pour fixer sa résidence à Paris, a été, à là requète de quelques-uns de ses créanciers, MM. Jacquemart et autres, déclaré en état de faillite, par un jugement du tribunal de commerce de la Seine, en date du 17 mai 1907. Ce jugement a été affiché et inséré, par extraits, dans les journaux judiciaires, à Paris, le 18 mai suivant. Ultérieurement, les 6 et 7 mars 1908, des extraits de ce jugement ont été insérés dans les journaux d'annonces légales de l'arrondissement de Saint-Malo, où M. Cuvelier avait exercé son commerce d'hôtelier. Par exploits des 12 et 13 du même mois, d'autres créanciers de M. Cuvelier, MM. Jenart et Legendre, ont formé opposition au jugement déclaratif de faillite. Ils ont, en conséquence, assigné le syndic Hécaen et MM. Jacquemart et autres devant le tribunal de commerce de la Seine, pour voir dire que le jugement déclaratif de faillite serait mis à néant. Ils excipaient de l'incompétence du tribunal de commerce de la Seine pour déclarer la faillite de leur débiteur, parce que ce tribunal n'était pas celui dans le ressort duquel M. Cuvelier avait eu son domicile commercial. Par jugement du 22 avril 1908, le tribunal a déclaré cette opposition tardive et non recevable, par le motif qu'elle n'avait pas été formée dans le délai d'un mois, prescrit par l'art. 580, C. comm., à partir de la publication du jugement dans les journaux d'annonces légales du lieu de la déclaration de faillite. MM. Jenart et Le

les contestations ne peuvent plus se produire. (5) De ce que l'inobservation des délais de l'op position au jugement déclaratif emporte déchéance, il est nécessaire que le point de départ en soit établi d'une manière certaine. Ainsi, la preuve de l'accomplissement de la formalité de l'affichage, notamment, ne pourrait être abandonnée à l'appréciation par le juge des circonstances d'où il croirait pouvoir la faire résulter. V. Cass. 22 mai 1895 (S. et P. 1895.1.326; Pand. pér., 1895.1.321), et les autorités citées en note. Adde, Aix, 7 avril 1886 (Journ. des faill., 1888, p. 27); Lyon-Caen et Renault, Tr. de dr. comm., 3° éd., t. 7, n. 138, p. 130; Ruben de Couder, Dict. de dr. comm., v° Faillite, n. 1109 et s., et Suppl., eod. verb., n. 535. Il faut qu'un procès-verbal régulier soit dressé par le greffier du tribunal de commerce, le jour même où le jugement déclaratif de faillite est affiché. V. Aix, 7 avril 1886, et Cass., 22 mai 1895, précités. Un certificat délivré par cet officier public plusieurs mois après l'événement, et attestant que la formalité a été régulièrement remplie à sa date, serait, d'après l'opinion dominante, insuffisant pour faire courir les délais de l'opposition. V. Cass. 22 mai 1895, précité, et la note; adde, notre C. comm. annoté, par Cohendy et Darras, sur les art. 580-581, n. 31; et notre Rep. gén, du dr. fr., v Faillite, n. 4155; Pand. Rep., v Faillite, liquidation judiciaire, n. 1404. Cette insuffisance résulterait encore, à plus forte raison, d'une simple affirmation du syndic. V. Lyon, 31 mars 1878 (Journ. Le Droit 22 mai 1878); Ruben de Couder, Dict, de dr. comm., vo Faillite, n. 1110, in fine.

Le pourvoi ne contestait pas ces solutions; au contraire, il prétendait s'en prévaloir. Mais ce moyen n'aurait pu triompher que si la concomitance du procès-verbal et de l'affichage n'avait pas été nettement affirmée par l'arrêt attaqué. Sur ce point, le moyen manquait en fait.

gendre ont interjeté appel des deux jugements du 17 mai 1907 et du 22 avril 1908. - 3 août 1999, arrêt de la Cour de Paris, qui confirme les deux jugements tant par des motifs nouveaux que par ceux non contraires des premiers juges.

POURVOI en cassation par MM. Jenart et Legendre. Moyen unique. Violation, fausse application et fausse interprétation des art. 138, 442, 580, 581, 582, C. comm., 7 de la loi du 20 avril 1810, pour défaut de motifs, et manque de base légale, en ce que l'arrêt attaqué considère, sans donner de motifs, comme compétent pour déclarer la faillite d'un commerçant, non le tribunal du lieu où ce commerçant avait son domicile commercial et où il a cessé ses paiements, mais celui du lieu où il a sa résidence au moment où il est l'objet d'une demande de déclaration de faillite, et en ce que, d'autre part, il déclare non recevable l'opposition par des créanciers à un jugement de déclaration de faillite prononcée par un tribunal qui n'était pas celui du lieu où le commerçant avait son domicile et son exploitation commerciale au moment de la cessation des paiements, alors que l'opposition de ces créanciers a été bien faite dans le mois de l'affichage du jugement au lieu réel de la faillite, sinon dans le mois de l'affichage au lieu de la nouvelle résidence du failli, et alors, en outre, qu'il n'est pas constaté par l'arrêt attaqué que la preuve de l'affichage en ce dernier lieu résulte d'un procès-verbal concomitant à cet affichage.

ARRÊT.

LA COUR; Statuant par défaut sur le moyen du pourvoi:- Attendu que, de l'arrêt attaqué, il résulte que Cuvelier, ancien commerçant à Dinard, demeurant à Paris, a été, à la requête de quelques-uns de ses créanciers, déclaré en état de faillite par jugement du tribunal de commerce de la Seine, en date du 17 mai 1907; que ce jugement a été affiché et inséré par extrait dans les journaux judiciaires à Paris, le lendemain 18 mai; qu'il a reçu ultérieurement, les 6 et 7 mars 1908, une publicité plus étendue par des insertions dans les journaux d'annonces légales de l'arrondissement de Saint-Malo; que les sieurs Jenart et Legendre, autres créanciers de Cuvelier, ont, les 12 et 13 du même mois, formé oppositition audit jugement; mais que, cette opposition ayant été déclarée non recevable, comme tardive, par jugement du 22 avril 1908, ils ont interjeté appel des deux jugements tant du 17 mai

(1-2-3) Lorsque, pour appeler à sa succession, en qualité de légataires, des parents collatéraux, le testateur, au lieu de les indiquer nominativement, s'est servi d'une expression ayant un sens légal, on doit présumer qu'il a entendu employer cette expression dans le sens que la loi lui attribue (V. Cass. 1 mars 1897, motifs, S. et P. 1897.1.272; Pand. pér., 1897.1.428), et, par suite, admettre à bénéficier du legs les collatéraux auxquels s'applique la désignation légale (V. pour le cas où le testateur a institué ses cousins germains, Cass. 19 nov. 1895, S. et P. 1896.1.121; Pand. pér., 1896.1.140; et pour le cas où il a institué ses cou

1907 que du 22 avril 1908; qu'à l'appui de la validité de leur opposition, ils ont soutenu, d'une part, que le tribunal de commerce de la Seine, n'étant pas celui du lieu où Cuvelier avait son domicile et son exploitation commerciale au moment de la cessation de ses paiements, était incompétent pour statuer sur la mise en état de faillite de ce commercant; que, par suite, les formalités de l'affichage et des insertions, remplies irrégulièrement à Paris, n'avaient pu faire courir les délais de l'opposition, dont le point de départ avait été fixé par la date seule des insertions dans les journaux de l'arrondissement de SaintMalo; que, d'autre part, en admettant même la compétence du tribunal de commerce de la Seine, le jugement déclaratif de faillite était encore susceptible d'opposition au moment où ce recours a été introduit, à défaut par le syndic de rapporter la preuve de l'affichage par extrait de ce jugement dans l'auditoire du tribunal de commerce, au moyen de la rédaction d'un acte concomitant à l'accomplissement de cette formalité; Mais attendu, sur ce dernier point, que l'arrêt attaqué déclare qu'il résulte d'un procès-verbal dressé par le greffier en chef du tribunal de commerce de la Seine que l'affichage et les insertions du jugement déclaratif de faillite dans les journaux judiciaires ont eu lieu le 18 mai 1907; que, par suite, le moyen, de ce chef, manque en fait; Attendu, sur le premier point, que, si l'art. 442, C. comm., exige que les formalités d'affichage et d'insertion par extraits dans les journaux soient remplies tant au lieu où la faillite a été déclarée que dans tous les lieux où le failli a des établissements commerciaux, l'arrêt attaqué décide que Cuvelier ne possédait plus, au moment où la faillite a été déclarée, aucun établissement commercial dans le ressort du tribunal de Saint-Malo, et que la publicité, qui a pu être ultérieurement donnée à la faillite dans cette dernière localité, en vue d'appeler les intéressés à faire valoir leurs droits de créance, n'a pas eu pour effet de faire courir de nouveaux délais d'opposition, en dehors de ceux qui avaient pris fin le 19 juin 1907, par suite de l'accomplissement des formalités à Paris, lieu de la déclaration de la faillite; Attendu qu'en statuant ainsi, l'arrêt attaqué n'a violé aucun des textes de loi invoqués par le pourvoi, et qu'il a légalement justifié sa décision sur les deux appels; qu'en effet, du moment où l'opposition était déclarée non recevable, il n'y avait plus lieu de rechercher si le jugement déclaratif de faillite avait été

sins issus de germains, Cass. 3 janv. 1888, S. 1888.1.70. P. 1888.1.150, et les conclusions de M. l'avocat général Desjardins; Pand. pér., 1888. 1.73; 7 juill. 1910, S. et P. 1911.1.29; Pand. pér., 1911.1.29), à moins qu'il ne soit démontré que le testateur a entendu attribuer à ces expressions un sens différent. V. Cass. 1er mars 1897, précité; Poitiers, 29 juill. 1907 (S. et P. 1908.2.235; Pand. pér., 1908.2.235), et la note; adde, les notes sous Cass. 19 nov. 1895 et sous Cass. 7 juill. 1910, précités. Mais l'expression petits-cousins » n'a pas de signification précise dans le langage du droit. Comme le fait observer avec raison l'arrêt ci-des

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rendu par un tribunal compétent; que le rejet de l'opposition entrainait, par voie de conséquence, le maintien de ce jugement;

Rejette le pourvoi formé contre l'arrêt de la Cour de Paris du 3 août 1909, etc.

Du 11 févr. 1913. Ch. civ. - MM. Baudouin, ler prés.; Ruben de Couder, rapp.; Lombard, av. gén. (concl. conf.); Mornard,

av.

CASS.-REQ. 13 février 1912. TESTAMENT (EN GÉNÉRAL), INTERPRÉTATION, PETITS-COUSINS, DÉFINITION LÉGALE (ABSENCE DE), INTENTION DU TESTATEUR, POUVOIR DU JUGE (Rép., vo Testament, n. 1719 et s. Pand. Rép, vo Donations et testaments, n. 7980 et s.).

Les mots petits-cousins » n'ont pas légalement une signification précise, et ne doivent pas être entendus uniquement des cousins qui suivent immédiatement, dans l'ordre de parenté, les cousins germains (1) C. civ., 736, 738.

Il appartient donc aux juges du fait, en présence d'un testament par lequel un testateur a fait des legs aux petits-cousins ▾ et petites-cousines de sa femme, issus de trois personnes désignées par lui, de rechercher et de déclarer quelle a été, par l'emploi de cette expression, l'intention du testateur (2) (Id.).

Et de décider notamment qu'en employant des expressions qui, dans le langage courant, désignent les parents trop éloignés pour avoir une appellation particulière, le testateur a eu l'intention de gratifier tous les parents issus des personnes désignées au testament, quels que fussent leur nombre et leur degré de parenté avec leur auteur (3) (Id.).

(Billoit C. Cons. Depret.

ARRÈT.

LA COUR; - Sur le moyen pris de la violation des art. 736 et 738, C. civ., et des dispositions légales qui définissent la parenté (en ce que l'arrêt attaqué a étendu le sens légal du terme petits-cousins » à tous les parents, même au delà des cousins issus de germains, au lieu de l'entendre, précisément, de ceux qui suivent immédiatement, dans l'ordre de parenté, les cousins germains) Attendu que, par l'une de ses dispositions testamentaires, le sieur Meuret léguait aux petits-cousins et petitescousines de sa femme 500 fr. pour chacun d'eux, spécifiant que ces parents étaient les descendants de trois personnes désignées par le testateur; Attendu que les mots « petits-cousins » n'ont pas légale

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sus, elle ne désigne pas un degré de parenté défini. Lors donc que, comme dans l'espèce, le testateur a institué ses « petits-cousins », la portée de cette disposition ne peut être déterminée que par la recherche de l'intention du testateur, recherche que les juges du fond peuvent faire, s'agissant d'établir quelles personnes le testateur a entendu gratifier, non seulement par l'interprétation des termes du testament, mais encore à l'aide des autres circonstances de la cause. V. Cass. 10 déc. 1906 (S. et P. 1907.1.223, et le renvoi; Pand. pér., 1907.1 153). Adde, la note sous Cass. 7 juill. 1910, précité.

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