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1837.1.105.

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P. 1837.1.255) s'exprime ainsi : Attendu qu'aux termes de l'art. 2262, C. civ., toutes actions, tant réelles que personnelles, sont prescrites par trente ans; que cette disposition, conçue en termes absolus, n'admet aucune exception; que, si la péremption d'instance ne court qu'autant qu'une loi particulière l'a prononcée, c'est que la péremption est une prescription spéciale, qu'on doit renfermer dans un cercle étroit, tandis que la prescription trentenaire est de droit commun, et s'applique par conséquent à toutes les actions, à moins d'une disposition formelle contraire; Attendu que, si aucune loi n'admet la péremption d'instance pour la procédure en cassation, aucune loi, non plus, ne l'exempte des effets de la prescription trentenaire ; qu'ainsi, cette prescription court en cassation et éteint l'action par son accomplissement ». Même décision, Cass. civ. 31 mars 1869 (S. 1869.1.320. - P. 1869.790): Attendu qu'aux termes de l'art. 2262, C. civ., toutes les actions, tant réelles que personnelles, sont prescrites par trente ans; que ce principe est général, absolu, et embrasse, dès lors, le droit de recours en cassation ».

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Que suit-il de là, et quelles conséquences, pour la solution de la cause actuelle, faut-il tirer de la doctrine des auteurs et de la jurisprudence de vos arrêts? C'est que la péremption, courte prescription soumise à des règles particulières, ne fait pas obstacle à la prescription longi temporis, c'est-àdire de trente ans, qui est générale, et que cette prescription s'applique aux instances, et, par voie de conséquence, aux actes de procédure, qui ne sont pas autre chose que les moyens légaux d'exercer les droits que les instances ont pour objet de faire valoir en justice. En un mot, il est inadmissible que le droit d'appel ne soit pas atteint par la prescription, lorsque l'instance est prescrite. Le deuxième moyen du pourvoi n'est donc pas fondé, et nous vous proposons de le rejeter.

3 Moyen. Mais, si le droit d'appel est susceptible de prescription pour non-usage pendant trente années, le cours de la prescription, dans la cause, n'a-t-il pas été interrompu par l'assignation en constitution de nouvel avoué, délivrée le 22 déc. 1883, à la requête de la commune d'Urtaca, aux communes de Santo-Pietro et San-Gavino, dont l'avoué avait démissionné, et par la constitution de nouvel avoué qui en a été la suite? Tel est l'objet du troisième moyen, qui invoque, comme motif de cassation, la violation de l'art. 399, C. proc., en ce que l'arrêt attaqué a jugé qu'un acte émané de la partie qui oppose la prescription n'est pas interruptif de la prescription.

L'argumentation du pourvoi est la suivante : la prescription trentenaire de l'instance et du droit d'appel n'est pas autre chose qu'une péremption d'instance longi temporis; elle ne diffère de la péremption proprement dite, régie par les art. 397 et 401, C. proc., que par la durée seulement. Or, s'il est vrai, en thèse générale, que les actes accomplis par la partie qui invoque la prescription ne peuvent pas lui être opposés, non seulement à raison de la règle, invoquée par l'arrêt, que: « nul ne se forclot soi-même », mais encore et surtout parce que ces actes n'impliquent pas la volonté de la partie adverse de maintenir ses droits, il en est autrement quand il s'agit de la péremption ou de la prescription d'une instance. En pareille matière, c'est l'art. 399, C. proc., qui est toujours applicable, et la prescription d'une instance, comme la péremption, se couvre par les actes valables faits par l'une ou par l'autre des parties.

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La réfutation de ce système nous paraît être extrêmement simple et facile. La péremption est

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bien, en effet, une prescription, mais une prescription spéciale aux instances. Non seulement elle est d'une moindre durée que la prescription extinctive des droits et actions de droit commun, mais elle en diffère par bien d'autres points. Ainsi, s'écartant des principes du droit civil (C. civ., 2252), la péremption court contre les mineurs, alors que la minorité est une cause de suspension des prescriptions ordinaires. Elle n'a pas lieu de plein droit et doit être demandée par requête d'avoué à avoué. Vous avez remarqué, en entendant les citations de jurisprudence que nous avons faites, que vous avez maintes fois jugé que la péremption est soumise à des règles particulières, et notamment qu'à la différence de la prescription, elle ne peut pas être opposée par voie d'exception. La disposition de l'art. 399, que la péremption se couvrira par les actes valables faits par l'une ou l'autre des parties », peut d'autant moins être transportée du domaine de la péremption dans celui de la prescription générale que cette disposition a été insérée dans le Code de procédure civile à titre de dérogation au droit commun. Si l'on se reporte aux travaux préparatoires, on voit, en effet, que la question était controversée dans l'ancien droit et résolue diversement par les coutumes. Le Code de procédure civile a consacré législativement la jurisprudence du Parlement de Paris. Il était, en effet, rationnel que le législateur se montrât moins exigeant sur les causes d'interruption d'une courte prescription que sur celles de la prescription longi temporis. C'est ce qu'explique très clairement Merlin (Rep., vo Prescription, sect. 3, § 8), qui écrivait au moment où le Code de procédure nouvellement promulgué venait de mettre fin aux controverses de l'ancien droit. Il s'exprime ainsi : « On ne doit point confondre, en fait d'instances, la péremption avec la prescription. Une instance est périmée par le laps de trois ans, mais elle n'est prescrite qu'après une cessation de procédure pendant tout le temps requis pour la prescription ordinaire... Le Code civil soumet les instances à la prescription de trente ans par cela seul qu'il y soumet les actions

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Comment, d'ailleurs, l'acte du 22 déc. 1883, qui n'a même pas couvert la péremption, puisque la péremption doit être demandée, et qu'en fait, elle ne l'a pas été dans la cause, aurait-il pu couvrir la prescription trentenaire? Faisons remarquer, enfin, qu'une assignation en constitution de nouvel avoué, qui n'est qu'un incident de procédure, n'est pas un acte interruptif de la prescription. L'énumération des causes d'interruption civile de la prescription, contenue dans les art. 2244 et s. est, en effet, limitative. Enfin, et quand même une assignation en constitution de nouvel avoué pourrait être assimilée à une citation, seule la partie de qui cet acte émane serait fondée à s'en prévaloir. C'est ce que M. Laurent (Princ. de dr. civ., t. 32, n. 145) met excellemment en lumière, en opposant les effets de l'interruption naturelle, qui profite à tous, à ceux de l'interruption civile, qui ne profite qu'à celui qui a agi. Il s'exprime ainsi : A la différence de l'interruption naturelle, qui procède d'un fait, l'interruption civile procède d'un acte judiciaire; or, un fait existe à l'égard de tous, tandis qu'un acte judiciaire n'existe qu'à l'égard de ceux qui y figurent comme parties, de même qu'une convention n'a d'effet qu'entre parties, car les actes judiciaires ont toujours été assimilés aux contrats. C'est pourquoi la prescription est interrompue à l'égard de la partie qui agit, mais non à l'égard de celle qui n'a pas agi». C'est pourquoi, toujours en admettant, par hypothèse, qu'une assignation en constitution de nouvel

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Mais

LA COUR: Sur le premier moyen : Attendu que le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir violé le principe que le droit de propriété ne se perd pas par simple nonusage, en déclarant prescrite une action judiciaire ayant pour objet la reconnaissance d'un droit de propriété ; attendu que ledit arrêt s'est borné à déclarer irrecevable, comme éteint par la prescription trentenaire, l'appel interjeté le 12 mars 1909 par les communes demanderesses d'un jugement interlocutoire rendu le 23 mars 1863 par le tribunal de Bastia, dans une instance en revendication de la propriété d'une partie de forêt, pendante entre elles et la commune d'Urtaca;

--

Attendu que le droit de déférer, par la voie de l'appel, un jugement à la juridic tion supérieure constitue un droit nouveau, qui nait du contrat judiciaire qui s'est formé entre les parties par l'effet de l'instance liée entre elles, et est essentiellement distinct de celui qui fait l'objet de l'action; d'où il suit qu'il n'est ni expressément, ni implicitement jugé que les droits de propriété, objet de l'action, sont eux-mêmes prescrits, et qu'ainsi le moyen manque en fait;

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Sur les deuxième et troisième moyens réunis : Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que le jugement du 23 mars 1863, ordonnant avant faire droit le transport d'un juge assisté d'un expert sur les lieux litigieux, n'a jamais été ni signifié, ni exécuté à la requête de l'une ou de l'autre des parties, et qu'entre le jour du jugement et le 12 mars 1909, jour de l'appel, il s'est écoulé plus de trente ans sans qu'il ait été fait aucun acte valable interruptif de la prescription; Attendu, d'une part, que. les parties ayant la faculté d'exercer leur droit d'appel dès avant la signification du jugement, l'absence de signification du jugement du 23 mars 1863 n'a pas empêché la prescription de courir; Attendu, d'autre part, que c'est par une exacte application des art. 2244 et s., C. civ., qu'il a été jugé par la Cour d'appel de Bastia qu'une assignation en constitution de nouvel avoué, adressée le 22 déc. 1883 par la commune d'Urtaca aux communes démanderesses, n'avait pas interrompu la prescription, la reprise d'instance n'étant pas au nombre des actes spécifiés auxdits articles, dont l'énumération est limitative, et qu'au surplus, l'interruption civile de la prescription ne pouvait être invoquée que par la partie qui a agi; Attendu que, si la péremption d'instance, qui constitue une prescription spéciale, soumise à des règles

particulières, peut se couvrir par des actes valables faits par l'une ou par l'autre des parties avant qu'elle soit demandée, il n'en est pas de même de la prescription de trente ans, qui n'admet d'autres causes d'interruption que celles spécifiées aux art. 2241et s., C. civ.; que cette prescription est générale, s'applique à tous les droits et à toutes les actions, et peut, dès lors, être invoquée contre celui qui reprend par voie d'appel une instance interrompue pendant trente années, comme elle pourrait être opposée à toute autre action; qu'ainsi, l'arrêt attaqué n'a ni violé, ni faussement appliqué, soit les articles, soit les principes visés aux moyens; Rejette, etc.

Du 29 avril 1912. Ch. req MM. Tanon, prés.; Feuilloley, rapp.; Blondel, av. gén. (concl. conf.); Aguillon, av.

CASS.-Civ. 8 janvier 1913.

LOUAGE DE SERVICES, TRAVAIL AUX PIÈCES, TRAVAIL EN COURS, REFUS D'ACCEPTER D'AUTRES TRAVAUX, CONGÉDIEMENT, ABUS DU DROIT (Rép., vo Louage d'ouvrage, de services et d'industrie, n. 226 et s., 316 et s.; Pand. Rép.. eod. verb., n. 694 et s.).

En cas de travail aux pièces, il y a autant de contrats successifs que de travaux distincts à réaliser, et la subordination, acceptée par l'ouvrier à l'égard du patron, ne régit que les engagements en cours, laissant intact le droit pour l'ouvrier de n'en pas contracter de nouveau (1) (C. civ., 1780).

En conséquence, il y a abus du droit de résiliation, de la part du patron, qui, au cours de l'exécution d'un travail aux pièces, congédie l'ouvrier, sur le motif que celui-ci a refusé un nouveau lot d'objets à ouvrer, el le patron est à bon droit condamné à

(1-2) L'arrêt ci-dessus n'a pas eu à se prononcer sur le point de savoir dans quels cas le contrat, par lequel un ouvrier s'est engagé à travailler aux pieces, doit être considéré comme un louage de services ou comme un louage d'ouvrage. V. sur cette distinction, la note sous Cass. 18 mai 1903 (S. et P. 1909.1.484; Pand. pér., 1909.1.484), et les renvois. Le contrat a été envisagé comme un louage de services, sans que la question ait été discutée; du reste, on y rencontrait, d'après l'arrêt ci-dessus, la subordination » de l'ouvrier au patron, qui est la caractéristique du louage de services. V. la note précitée.

Mais la question se posait de savoir si l'ouvrier engagé aux pièces pouvait, au cours du travail qui lui avait été confié, refuser d'en accepter un autre, sans fournir au patron un juste motif de congédiement. L'arrêt précité du 18 mai 1909 avait déjà décidé qu'en cas de travail aux pièces, le contrat doit être considéré comme prenant tin avec la confection de chaque lot de marchandi-es à ouvrer, en telle sorte que le patron ne doit aucune indemnité de congédiement à l'ouvrier, qu'il a avisé, lors de la remise d'un lot de marchandises, qu'il n'avait plus de travail à lui donner. Le présent arrêt, envisageant l'hypohèse inverse, où, en cours de l'exécution d'un ravail, le patron a congédié brusquement l'ouvrier

payer à l'ouvrier le salaire intégral que celui-ci eut touché, s'il avait pu terminer le travail en cours d'exécution (2) (Id.).

(Comp. des Compteurs Aron C. Maggiore). ARRET.

LA COUR; Sur le premier moyen : Attendu qu'il résulte des motifs et du dispositif du jugement attaqué que Maggiore, ouvrier mécanicien, était engagé, par la Comp. des Compteurs Aron, à un travail aux pièces; qu'ayant été congédié, il réclama le salaire intégral qu'il eût touché, s'il avait pu terminer le travail en cours d'exécution; que, pour accueillir sa demande, le tribunal à déclaré que la Comp. avait fait un exercice abusif de la faculté de résiliation stipulée par les parties, le congédiement de l'ouvrièr ayant été motivé par le légitime refus d'un nouveau lot d'objets à ouvrer:- Attendu que, en statuant ainsi, le jugement attaqué n'a pas violé Part. 131, C. civ.; Attendu, en effet, que, s'agissant de travaux aux pièces, le tribunal de la Seine a jugé, à bon droit, qu'il y avait, dans l'espèce, autant de contrats successifs que de travaux distincts à réaliser: et que la subordination, acceptée par Maggiore à l'égard de la Comp., ne régissait que les engagements en cours, laissant intact le droit pour l'ouvrier de n'en pas contracter de nouveau;

Sur le deuxième moyen:.... .... (sans intérêt); Rejette le pourvoi formé contre le jugement rendu le 21 sept. 1912 par le tribunal civil de la Seine, etc.

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pour avoir refusé un nouveau lot d'objets à ouvrer, décide que le congé donné dans ces conditions. est un abus du droit de résiliation. Le motif en est que l'ouvrier engagé aux pièces n'est pas engagé pour une durée indéterminée, pour tout le temps pendant lequel il conviendra au patron de confier du travail à l'ouvrier, et à l'ouvrier d'en accepter, ce qui emporterait la conséquence que le droit de résiliation réciproque ne pourrait s'exercer que dans les termes de l'art. 1780, C. civ., et avec observation du délai de prévenance, si l'usage ou la convention en prévoient. Il y a, dit avec raison la Cour de cassation dans l'arrêt ci-dessus, autant de contrats successifs que de travaux distincts à réaliser ». Le patron et l'ouvrier ne sont donc pas engagés à durée indéterminée; l'engagement a une durée déterminée, l'achèvement de la tâche, durée dont le terme est seul incertain. V. en ce sens Trib. comm. de Lyon, 20 déc. 1898 (Monit. jud. de Lyon, 4 janv. 1899); Trib. de la Seine, 9 mai 1906 (Journ. La Loi, 21 juin 1906). Mais V. en sens contraire, les autorités citées dans la note sous Cass. 18 mai 1909, précité. Ce principe entraîne comme conséquence que l'ouvrier ne commet aucune violation du contrat en refusant d'accepter un nouveau travail, et il y a, par suite, abus du droit de résiliation, de la part du patron, qui se fonde sur ce refus pour congédier brusquement l'ouvrier, sans

SALARIE, FAUTE, PERTE, ACTION EN DOMMAGES - INTÉRÈTS, PRESCRIPTION ANNALE (Rép., v Commissionnaire de transports, n. 417 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 454

et s.).

Lorsque le transporteur maritime, qui, à l'arrivée du navire à destination, avait accepté du porteur du connaissement, moyennant commission, le mandat de déposer la marchandise en son nom dans un entrepôt, l'a entreposée, non pas au nom du porteur du connaissement, mais en son nom personnel, ce qui a permis à un tiers de se la faire remettre indument, les juges peuvent, par une appréciation des circonstances de la cause qui échappe à la censure de la Cour de cassation, décider que, le contrat de transport ayant pris fin par la livraison de la marchandise à l'entrepôt, et la faute imputée au transporteur ayant été commise dans l'exécution du mandat salarié reçu par lui à la suite et en dehors du contrat de transport, la prescription d'un an de l'art. 433, C. comm., ne pouvait être opposée à l'action en responsabilité formée par le porteur du connaissement (3) C. comm., 433).

(Comp. des Messageries maritimes C. ARRÈT. Banque sino-belge).

LA COUR; Sur le moyen unique, pris de la violation des art. 433, C. comm., et 7 de la loi du 20 avril 1810 (en ce que l'arrêt attaqué a refusé d'appliquer la prescription annale à l'action intentée à la Comp. exposante par la Banque sinobelge, pour délivrance irrégulière des marchandises transportées, sous prétexte que la Comp., en acceptant les connaissements munis de l'ordre de la Banque pour le dépôt des colis dans les wharfs à Shangai, serait devenue responsable desdits colis, après l'arrivée du navire, à titre de dépositaire, et non de transporteur, alors

attendre que le contrat en cours soit terminé par l'exécution du travail aux pièces que l'ouvrier s'était engagé à exécuter.

(3) Lorsque le transporteur maritime se charge, en outre du transport par mer, d'opérations accessoires qui sont étrangères à ce transport, il peut se faire que ces opérations accessoires soient accomplies en vertu même du contrat de transport maritime et en exécution de ce contrat, en telle sorte que la Comp. soit engagée par un contrat unique, soumis aux règles du transport maritime. V. Cass. 16 juill. 1912 (S. et P. 1912.1. 579; Pand. pér., 1912.1.579), et la note. Mais il peut arriver aussi que l'engagement pris par le transporteur maritime d'accomplir ces opérations accessoires soit indépendant du contrat de transport; et, en ce cas, on ne saurait lui appliquer les règles du transport maritime. C'est ce que la Cour de cassation a déjà admis pour des actes accomplis par le transporteur maritime avant la signature du connaissement (V. Cass. 29 mars 1909, S. et P. 1909.1.462; Pand. pér., 1909.1.462, et la note), et c'est ce qu'elle reconnaît par l'arrêt ci-dessus, en ce qui concerne les actes accomplis par le transporteur maritime, après que le transport maritime a pris fin, et en exécution d'une convention spéciale de mandat, distincte du contrat de transport maritime.

At

que le contrat de transport ne prend fin qu'avec la livraison des marchandises au destinataire, et que, dès lors, les dispositions qui règlent la responsabilité du transporteur comme tel restent applicables jusqu'au moment de la livraison) : tendu qu'aux termes de deux connaissements à ordre, la Comp. des Messageries maritimes a pris en charge à Marseille six caisses de tissus à transporter à Shangai; qu'à l'arrivée du navire, la Banque sino-belge, porteur des connaissements, lui donna l'ordre de délivrer en son nom les marchandises, après paiement de tous les frais, aux magasins de Chang-kah-Pangwharf; que la Comp. des Messageries accepta ce mandat, pour l'exécution duquel elle réclama une commission; mais qu'au lieu de déposer les caisses au nom de la Banque sino-belge, elle les entreposa en son nom; que cette circonstance permit ensuite à un sieur Girault de se les faire remettre au détriment du légitime possesseur; Attendu que, saisie, à raison de ces faits, d'une action en responsabilité, la Cour de l'Indo-Chine a pu décider que le contrat de transport maritime conclu à Marseille avait pris fin par la livraison des marchandises à la Comp. des docks de Shangaï, et que la faute dont la Comp. des Messageries maritimes était tenue, ayant été commise dans l'exécution du mandat salarié reçu par elle à la suite et en dehors du contrat de transport, n'était pas couverte par la prescription d'un an de l'art. 433; que cette appréciation des circonstances de la cause échappe à la censure de la Cour de cassation; Rejette le pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 13 mai 1910 par la Cour d'appel d'Indo-Chine, etc.

MM. Ta

Du 13 janv. 1913. - Ch. req. non, prés.; Letellier, rapp.; Blondel, av. gén. (concl. conf.); Hannotin, av.

CASS.-CIV. 5 mars 1913.

1 PRESCRIPTION, DOMAINE PUBLIC, EXCEPTION DE DOMANÍALITÉ, CONTESTATION ENTRE PARTICULIERS, SERVITUDE (Rép., v Prescription mat. civ.], n. 98 et s.; Pand. Rép., v Domaine, n. 1056 et s.). 2o PRO

(1) La règle de l'imprescriptibilité du domaine public ne peut être invoquée que par l'Etat, les départements et les communes; les particuliers, dans leurs rapports entre eux et dans leur intérêt privé, ne sont point admis à s'en prévaloir. V. Cass. 20 nov. 1877 (S. 1878.1.64. P. 1878. 139), et les renvois; 6 mars 1878 (S. 1879.1.18. P. 1879.18); 11 juill. 1883 (S. 1885.1.118. P. 1885.1.262); 19 févr. 1889 (S. 1889.1.208. P. 1889.1.506; Pand. pér., 1889.1.303); 6 juill 1896 (S. et P. 1897.1.446); Laurent, Princ. de dr. civ., t. 32, n. 258; Guillouard, Prescript., t. 1", n. 395; Baudry-Lacantinerie et Tissier, Id., 3° éd., n. 156; notre C. civ. annoté, par Fuzier-Herman et Darras, sur l'art. 2226, n. 17, et Suppl., par Griffond, eod. loc., n. 19; et notre Rép. gén, du dr. fr., Prescription (mat. civ.), n. 98; Pand. Rep., vo Domaine, n. 1056 et s., 1061 et s. Le particulier, qui a possédé un immeuble dépendant du domaine public pendant qu'il y était incorporé, peut

PRIÉTAIRE PROPRIÉTÉ, REVENDICATION, PREUVE, TITRES, PROPRIÉTÉ DU DESSUS, BALCON EN SAILLIE, DEMOLITION, SERVITUDE, AGGRAVATION (ABSENCE DE), PRÉJUDICE (DÉFAUT DE) (Rép., v Propriété, n. 36; Pand. Rép., eod. verb., n. 53).

1° L'imprescriptibilité du domaine public municipal, étant établie dans l'intérêt de la commune, ne peut être opposée par l'acquéreur d'un immeuble ayant fait partie de ce domaine public à celui qui prétend avoir acquis par prescription une servitude de vue sur cet immeuble (1) (C. civ., 690, 2226, 2229).

20 Celui qui prétend être propriétaire d'un fonds peut invoquer vis-à-vis des tiers les titres émanant de ses auteurs qui sont translatifs de propriété, aux termes de l'art. 711, C. civ.: il n'y a pas lieu de faire application à ce cas de l'art. 1165, C. civ., suivant lequel les conventions n'ont d'effet qu'entre les contractants (2) (C. civ., 71, 1165, 1315).

Le propriétaire d'un terrain, obligé de subir une servitude de balcon en saillie, acquise par prescription trentenaire au profit du propriétaire voisin, tient de son seul droit de propriété la faculté d'exiger, en vertu de l'art. 552, C. civ., la suppres sion de l'agrandissement de ce balcon, réalisé depuis moins de trente ans (3) (C. civ., 544, 552, 690).

Doit donc être cassé l'arrêt qui, pour repousser une pareille demande, déclare que l'agrandissement du balcon ne constitue pas une aggravation de la servitude, et qu'il n'en résulte aucun préjudice pour le demandeur (4) (C. civ., 544, 552, 702).

(Cons. Giudicelli C. Vve Musso).

Me Musso est propriétaire, à Sartène, du deuxième étage d'une maison qui sert d'hôtel de ville. Au deuxième étage de cette maison existe, depuis cinquante ans environ, un balcon en saillie sur un terrain qui était affecté au violon municipal, et qui a été aliéné par la ville, en 1904, au profit des consorts Giudicelli. En 1907, ceux-ci ont assigné Mme Musson en suppression du balcon, qu'elle avait agrandi en 1902, avant leur acquisition. — Par juge

donc se prévaloir de sa possession, vis-à-vis d'un autre particulier qui a acquis l'immeuble après sa désaffectation, à l'effet d'invoquer la prescription. En effet, la possession de choses dépendant du domaine public n'est précaire qu'au regard de l'Etat, du département ou de la commune, qui, seuls, peuvent se prévaloir de la précarité de la possession. V. la note sous Cass. 1er avril 1890 (S. et P. 1893.1.509), et les renvois.

(2) Jurisprudence constante. V. Dijon, 2 déc. 1901 (8. et P. 1904.2.214), la note et les renvois; Cass. 23 juin 1903 (S. et P. 1904.1.163; Pand. pér., 1901.1.92); 28 juill. 1903 (2 arrêts) (S. et P. 1907.1.451), et les renvois.

(3-4) Le propriétaire d'un terrain, ayant la propriété du dessus, est autorisé à demander la démolition des ouvrages qui, d'une hauteur quelconque, empiètent sur cet espace (V. Cass. 15 juill. 1901, S. et P. 1902.1.217,et la note de M. Naquet; Pand,

ment du tribunal civil de Sartène, du 16 nov. 1908, les consorts Giudicelli ont été déboutés de leur demande, par ce double motif, d'une part, que les demandeurs n'avaient pas rapporté la preuve de leur droit de propriété, et, d'autre part, que Me Musso avait, tout au moins, acquis par possession trentenaire une servitude de balcon, servitude modifiée et agrandie, mais non aggravée par les récents travaux exécutés par elle. Sur l'appel des consorts Giudicelli, la Cour de Bastia a confirmé par arrêt du 27 juin 1910.

POURVOI en cassation par les consorts Giudicelli. — 1er Moyen. Violation ou fausse application des art. 1165, 711, 552, 555, 678, C. civ., et de l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810, en ce que, après avoir admis que la ville de Sartène avait aliéné au profit des héritiers Giudicelli, par la transaction de 1904, la propriété de l'emplacement triangulaire, situé entre la maison Giudicelli et la maison Bartoli, l'arrêt attaqué refuse aux héritiers Giudicelli le droit d'exiger la suppression par la dame Musso du nouveau balcon qu'elle avait édifié depuis huit ans environ dans la maison Bartoli, au-dessus dudit emplacement, sous le prétexte que le titre de propriété des héritiers Giudicelli ne pouvait etre opposé à un tiers tel que la dame Musso, alors que la disposition de l'art. 1165, C. civ., ne saurait être invoquée en pareille matière, et sous le prétexte encore que le nouveau balcon, construit à l'effet d'agrandir une petite galerie, pour laquelle la dame Musso serait fondée à invoquer la prescription trentenaire, ne porterait aucun préjudice aux vues droites de la maison Giudicelli, alors que les héritiers Giudicelli tenaient de leur seul droit de propriété sur le terrain triangulaire la faculté d'exiger la suppression de la servitude résultant du nouveau balcon construit au-dessus dudit terrain, ou tout au moins de l'agrandissement dudit balcon. même s'il ne portait aucun préjudice aux vues droites de leur maison d'habitation.

20 Moyen. Violation de l'art. 2226, C. civ., et de l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810, en ce que les héritiers Giudicelli étaient fondés à exiger, non seulement la suppres.

pér., 1902.1.505), et notamment des saillies, telles que balcons, corniches ou auvents. V. la note de M. Naquet, précitée, et les renvois; adde, notre Rip. gen. du dr. fr., v Propriété, n. 36; Pand. Rep., eod. verb., n. 53. Et les tribunaux ne peuvent pas se refuser à ordonner cette démolition, sous le prétexte que l'empiétement serait minime et ne troublerait pas d'une manière appréciable la jouissance du demandeur. V. Cass. 15 juill. 1901, précité, et la note de M. Naquet. En se plaçant sur le terrain de l'art. 552, C. civ., il était donc du devoir des juges du fond, dans l'espèce, d'ordonner la démolition du balcon en saillie litigieux, dans les limites où la prescription trentenaire ne le protégeait pas, quelque minime que tút le préjudice éprouvé par le demandeur, et à supposer même que le changemeut apporté à la servitude de vue n'eût pas aggravé la condition du fonds servant, au sens de l'art. 702, C. civ.

sion de l'extension donnée par la dame Musso, depuis huit ans seulement, à la servitude de balcon, établie au-dessus du terrain leur appartenant, mais même la suppression de tout le balcon, aucune prescription de servitude n'ayant pu s'accomplir au-dessus dudit terrain, occupé avant 1904 par le violon municipal, et faisant ainsi partie du domaine public imprescriptible de la ville de Sartène, et en ce que les héritiers Giudicelli, au profit desquels la ville avait aliéné ledit violon municipal en 1904, étaient fondés à se prévaloir de l'imprescriptibilité de l'emplacement, puisqu'ils étaient aux droits de la ville.

ARRET (apr. délib. en ch. du cons.).

LA COUR;-Sur le deuxième moyen: Attendu que, des constatations de l'arrêt attaqué, il résulte que la veuve Musso est propriétaire du deuxième étage de la maison servant d'hôtel de ville à la commune de Sartene; qu'à cet étage existe, depuis cinquante ans environ, un balcon, permettant d'exercer une servitude de vue droite sur un terrain triangulaire, dont la commune de Sartène, suivant transaction du 14 févr. 1904, a aliéné la propriété au profit des consorts Giudicelli, qui possédaient une maison contigue à ce terrain; Attendu que, la veuve Musso ayant opposé la prescription trentenaire à la demande introduite par les consorts Giudicelli et tendant à faire ordonner la suppression du balcon, ces derniers ont soutenu qu'aucune servitude n'avait pu être établie par prescription sur le terrain triangulaire qui était occupé, jusqu'en 1904, par le violon municipal, et, par suite, imprescriptible, comme faisant partie du domaine public communal: Attendu que la Cour de Bastia a décidé à bon droit que les consorts Giudicelli ne pouvaient se prévaloir de l'imprescriptibilité d'une partie du domaine public, le bénéfice de cette imprescriptibilité étant réservé à la commune pour la défense de ses intérêts; qu'en statuant ainsi, elle n'a violé aucune loi; Rejette le deuxième moyen;

Mais sur le premier moyen : Vu les art. 552 et 1165, C. civ.; — Attendu que celui qui soutient être propriétaire d'un fonds peut invoquer vis-à-vis des tiers les

(1-2) L'art. 196, § 2, du décret du 25 mars 1911 (S. et P. Lois annotées de 1911. p. 75; Pand. pér., Lois annotées de 1911, p. 75), poctant règlement d'administration publique pour l'exécution de la loi du 5 avril 1910 (S. et P. Lois annotées de 1911, p. 1; Pand. pér., Lois annotées de 1911, p. 1), sur les retraites ouvrières et paysannes, non modifié par le décret du 6 août 1912 (S. et P. Lois annotées de 1913, p. 425; Pand. per., Lois annotées de 1913, p. 425), dispose que le juge de paix statue sans frais ni forme de procédure, sur simple avertissement donné par ses soins au préfet et à l'intéressé, cinq jours au moins à l'avance sans que la sentence soit susceptible d'opposition, sur les réclamations formées au sujet de l'inscription aux listes d'assurés. L'art. 197, § 3, du même décret, qui réglemente la procédure d'appel, et auquel le décret du 6 août 1912 n'a pas davantage apporté de modification, dispose égale

titres qui sont translatifs de propriété. aux termes de l'art. 711, C. civ., et qu'il n'y a pas lieu de faire application à ce cas de l'art. 1165 du même Code, suivant lequel les conventions n'ont d'effet qu'entre les contractants; - Attendu qu'après avoir constaté que, depuis huit ans, la veuve Musso a transforiné et agrandi le balcon établi au-dessus du terrain triangulaire aliéné par la ville de Sartène au profit des consorts Giudicelli, l'arrêt attaqué a refusé d'ordonner la suppression de l'agrandissement du balcon, en se fondant sur ce que le titre de propriété de ceux-ci ne pouvait être opposé à la dame Musso, qui est un tiers: - Attendu, d'autre part, l'arrêt a déclaré que l'agrandissement que du balcon ne constituait pas une aggravation de la servitude, et qu'il n'en résultait aucun préjudice pour les vues droites de la maison appartenant aux consorts Giudicelli, et contiguë au fonds servant; mais que les consorts Giudicelli tenaient de leur seul droit de propriété du terrain triangulaire la faculté d'exiger, en vertu de l'art. 552, C. civ., la suppression de l'agrandissement du balcon, établi au-dessus dudit terrain: qu'il suit de là qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour de Bastia a violé les articles ci-dessus visés: -Casse, mais seulement en ce que la Cour de Bastia a repoussé la demande en suppression de l'agrandissement du balcon opéré par la veuve Musso, etc.

Du 5 mars 1913. MM. Baudouin, 1er prés.; Douarche, rapp.; Mérillon, av. gén. concl. contr.); Cordoën et Talamon,

av.

CASS.-Civ. 5 mars 1913.

RETRAITES OUVRIÈRES ET PAYSANNES, JUGEMENT CONTRADICTOIRE, COMPARUTION (DÉFAUT DE), CONCLUSIONS, APPEL, PRÉFET (Rép., vo Retraites ouvrières, n. 1 et s.; Pand. Rép., vo Retraites et pensions, n. 1654 et s.).

En matière de retraites ouvrières et paysannes, les parties peuvent, pour lier contradictoirement le débat, se borner à transmettre aux juges leurs conclusions et moyens de défense (1) (DD. 25 mars 1911, art. 196 et 197: 6 août 1912).

a

ment que l'appel est instruit et jugé sommairement et sans frais ni forme de procédure Le décret du 25 mars 1911 s'est visiblement inspiré de la disposition de l'art. 22 du décret organique du 2 févr. 1852, d'après lequel, en matière électorale, le juge de paix statue sur l'appel des décisions de la commission municipale, sans frais ni forme de procédure ». Or, en matière électorale, la jurisprudence de la Cour de cassation est depuis longtemps fixée en ce sens que, par dérogation aux règles ordinaires, pour que le jugement soit contradictoire, il n'est pas nécessaire que la partie comparaisse en personne ou par mandataire; il suffit qu'elle fasse parvenir au juge de paix ses conclusions ou moyens de défense. V. Cass. 18 nov. 1884 (S. 1886.1.221. P. 1886. 1.528), et les renvois; 30 mars 1896 (S. et P. 1897. 1,358), la note et les renvois. Adde, Faye, Man. de dr. elect.. n. 203, p. 242; Greffier, Format.

|

En conséquence, le tribunal civil, saisi de l'appel formé par le préfet contre une décision du juge de paix ordonnant une inscription sur la liste des assurés obligatoires, ne peut débouter le préfet de son appel, sur le motif qu'il n'a comparu, ni en personne, ni par mandataire, sans faire état des conclusions qu'à l'appui de son appel, le préfet avait fait parvenir au greffe du tribunal (2) (DD. 25 mars 1911, art. 197: 6 août 1912).

(Préfet de l'Aveyron C. Carrière).
ARRET.

LA COUR; - Vu l'art. 197 du décret du 25 mars 1911, portant règlement général d'administration publique pour l'exécution de la loi sur les retraites ouvrières et paysannes, modifié par le décret du 6 août 1912: Attendu qu'aux termes de cet article, l'appel est instruit et jugé sommairement et sans frais ni forme de procédure; qu'il suit de là qu'à la différence des matières ordinaires, où les parties doivent être entendues en personne ou par un fondé de pouvoirs, les parties peuvent, en matière de retraites ouvrières et paysannes, se borner à transmettre au tribunal leurs conclusions et moyens de défense pour lier contradictoirement le débat; Attendu que, des pièces réguliè rement produites, il résulte que le préfet de l'Aveyron a interjeté appel d'une décision du juge de paix de Saint-Affrique. ordonnant l'inscription de Carrière Marguerite-Elise), femme Olombel, sur la liste des assurés obligatoires de la commune de Vabres; qu'à l'appui de son appel, il a fait parvenir au greffe du tribunal civil de Saint-Affrique des conclusions écrites, qui ont été visées par le président; Attendu que, sans faire état de ces conclusions, le tribunal s'est fondé sur ce que le préfet n'avait comparu, ni en personne, ni par mandataire, pour le débouter de son appel; qu'en statuant ainsi, il a violé l'article ci-dessus visé; Casse le jugement du tribunal civil de Saint-Affrique du 7 janv. 1913, etc.

Du 5 mars 1913.

Ch. civ. - MM. Baudouin, le prés.; Douarche, rapp.; Mérillon, av. gén. concl. conf.).

et revis. ann. des listes élect., 4o éd., n. 430. Elle admet même que, pour que le jugement soit contradictoire, il n'est pas nécessaire que les conclusions ou moyens de défense aient été déposés au greffe de la justice de paix, avant l'audience indiquée par l'avertissement. Il suffit que les conclusions ou moyens de défense aient été envoyés au juge de paix par la poste (V. Cass. 18 nov. 1881 ct 30 mars 1896, précités), ou même par voie télégraphique. V. Cass. 20 mai 1886, cité par M. Greffier, op. et loc. cit. De la similitude des dispositions du décret de 1852 et du décret du 25 mars 1911, l'arrêt ci-dessus tire avec raison la conséquence que les mêmes règles doivent être appliquées en matière de retraites ouvrières, et que, par suite, le jugement est contradictoirement rendu, si le juge a été saisi des conclusions ou moyens de défense d'une partie, encore bien qu'elle n'ait pas comparu à son audience.

CASS.-CIV. 20 février 1911.

PRIVILÈGE, PRIVILÈGE DU BAILLEUR, SOUSLOCATION, MEUBLES DU LOCATAIRE, VENTE AU SOUS-LOCATAIRE (Rép., vis Bail [en général], n. 1921 et s., Privilèges, n. 336 et s.; Pand. Rép., vis Bail en général, n. 1806 et s., Privilèges et hypothèques, n. 1377 et s.).

La sous-location, par elle seule, n'entraine pas l'extinction du privilège du bailleur, laquelle ne saurait résulter que du déplacement des meubles garnissant les lieux loués, non suivi de revendication dans le délai légal, ou bien de la renon

(1-2-3) Le privilège du bailleur, sur les meubles qui garnissent la maison ou la ferme louée, s'applique, en cas de sous-location, même à ceux qui sont la propriété du sous-locataire. Mais, vis-à-vis du sous-locataire, il est admis communément que ce privilège n'a pas la même étendue que vis-à-vis du locataire; il ne s'applique qu'à concurrence du montant de la dette du sous-locataire à l'égard du locataire principal, quelque inférieure que soit cette dette à celle contractée envers le bailleur par le locataire. V. Cass. 2 avril 1806 (S. et P. chr.); Laurent, Princ. de dr. civ., t. 29, n. 426; Anbry et Rau, 5o éd., t. 3, p. 235, § 261; Pont, Priv. et hyp., t. 1, n. 119; Guillouard, Priv. et hyp., t. 1, n. 302 et 307; Baudry-Lacantinerie et de Loynes, Du nantiss., des priv. et hyp., 3o éd., t. 1er, n. 374; et notre Rép. gen. du dr. fr., vo Privilèges, n. 336; Pand. Rep., v° Privilèges et hypothèques, n. 1777. On se demande seulement si cette restriction, qu'à défaut de texte formel, on n'hésite pas à déduire des art. 1753, C. civ., et 820, C. proc., combinés, s'impose en toute hypothese, quelle que soit l'origine des meubles du sous-locataire, ou s'il faut au contraire l'écarter, lorsque les meubles, garnissant la maison louée dès avant la souslocation, ont été cédés par le locataire au souslocataire. Dans cette hypothèse particulière, le privilège du bailleur ne doit-il pas grever les meubles entre les mains du sous-locataire aussi lourdement qu'entre celles du locataire principal? $ 1.

une

A cette question, la Cour de cassation avait déjà, dans des circonstances spéciales, répondu par l'affirmative. En présence d'un contrat de bail retirant expressément au locataire le droit de souslouer, et d'une sous-location effectuée au mépris de cette prohibition, elle avait jugé qu' telle situation ne saurait être régie par l'art. 1753, C. civ., et que le bailleur gardait intact son privilège sur les meubles vendus, au moment de la sous-location, par le locataire au sous-locataire. V. Cass. 11 avril 1892 (S. et P. 1892.1.433, et la note de M. Labbé; Pand. pér., 1893.1.145). V. aussi, Trib. d'Auxerre, 22 juill. 1897 (Gaz. Pal., 1897.2.532). Mais, cette solution, qui a recueilli l'approbation de la doctrine (V. not., Aubry et Rau, loc. cit., note 17; Guillouard, op. cit., t. 1er, n. 304; Baudry -Lacantinerie et de Loynes, op. cit., t. 1, n. 375; et notre Rép. gén. du dr. fr., verb. cit., n. 337; Pand. Rep., verb. cit., n. 1383), convenait-il de l'étendre au cas d'une sous-location permise? C'est le problème, assez délicat, qui se posait dans l'espèce actuelle.

Certains considérants de l'arrêt précédemment rendu par la Cour, interprétés a contrario, laissaient croire qu'elle se prononcerait pour la négaANNÉE 1913. 1° cah.

ciation expresse ou tacite du bailleur (1) (C. civ., 1753, 2102, 1o).

Par suite, lorsque le locataire a vendu au sous-locataire les meubles qu'il avait apportés dans l'immeuble, la propriété de ces meubies n'a été transmise au souslocataire qu'avec la charge du privilège du bailleur, et, s'ils viennent à être revendus, le bailleur doit être colloqué sur le prix provenant de cette revente, non seulement pour les loyers dus par le souslocataire, mais aussi pour les loyers restant dus par le locataire principal (2) (Id.).

Il n'importe d'ailleurs que le bailleur ait connu la sous-location, qu'il ait touché

tive. Elle a préféré, suivant l'avis des juges du fait, suivant aussi l'opinion déjà consacrée dans un ancien arrêt de la Cour de Paris, du 28 déc. 1832 (S. 1832.2.482. - P. chr.), autoriser, dans ce cas comme dans le cas précédent, le bailleur à exercer son privilège sur les meubles du sous-locataire pour le montant total de sa créance, comme si ces meubles étaient restés en la possession du locataire originaire.

$ 2.

Sa décision nous semble sage. Les objections que, par avance, certains auteurs (V. Laurent, op. cit., t. 29, n. 427; Guillouard, op. cit., t. 1or, n. 305) ont formulées sont loin d'être irréfutables.

L'art. 1753, C. civ., a-t-on dit, déclare en termes généraux que « le sous-locataire n'est tenu envers le propriétaire que jusqu'à concurrence du prix de sa sous-location ». L'interprète ne peut pas, sans violer la loi, établir une distinction qu'elle ignore. Il est facile de répondre que l'art. 1753 n'a pas la portée absolue qu'on lui prête, qu'il comporte certaines réserves. La preuve en est qu'on n'hésite pas à l'écarter dans l'hypothèse de sous-location défendue. Pourquoi ne l'écarterait-on pas aussi bien dans l'hypothèse de souslocation permise, lorsque font défaut les motifs par lesquels il se justifie? L'art. 1753, en plaçant le sous-locataire dans une situation analogue, sinon identique, à celle où l'aurait mise un contrat direct passé avec le bailleur (V. Ulpien, L. 11, § 5, Dig., De pigneratitia actione, liv. 13, tit. 7), n'a entendu le protéger qu'en qualité de sous-locataire. Ce serait en méconnaître l'esprit et en exagérer la valeur que de l'appliquer dans un cas où le sous-locataire est poursuivi, non pas en tant que sous-locataire, mais en tant qu'acquéreur de meubles possédés par le locataire.

Il est vrai qu'à cette assertion, l'on oppose une seconde critique : Le privilège du bailleur,« privilège mobilier, n'affecte pas les meubles comme l'hypothèque affecte l'immeuble» (Laurent, loc. cit.). Mais comment soutenir qu'il n'est pas muni d'un droit de suite? Le Code civil lui-même, dans l'art. 2102-1°, n'en atteste-t-il pas l'existence, en permettant au bailleur de saisir les meubles, lorsqu'ils ont été déplacés sans son consentement? V. au surplus, Moissenet, Etude sur le droit de suite en matière de privilèges mobiliers, th. Dijon, 1901, spécialement p. 126 et s.

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Pour donner force à l'objection, il la faut présenter sous une autre forme (Guillouard, loc. cit.): Le bailleur a bien un droit de suite. Mais son droit de suite est susceptible de s'éteindre par l'effet d'une renonciation. Cette renonciation n'est pas nécessairement expresse. Elle est le plus souvent tacite. Et cette renonciation

directement du sous-locataire des loyers dus par lui au locataire principal, et qu'il ait accordé une réduction de prix au souslocataire, si, suivant l'appréciation souveraine des juges du fond, ces fails n'impli quaient, de la part du bailleur, aucune renonciation à son privilège (3) (Id.).

(Boivin C. Alliaume et autres).

Le tribunal civil de Fougères avait rendu, le 20 janv. 1906, le jugement suivant : Le Tribunal; Attendu que, le 14 avril 1902, par acte au rapport de Mo Berthelot, notaire à Fougères, Dascher a vendu aux époux Roussel, moyennant un prix de 15.000 fr., dont 6.000 seule

tacite peut résulter d'autre chose que de l'assentiment donné par le bailleur au déplacement des meubles servant d'assiette au privilège. Pourquoi ne l'induirait-on pas de ce simple fait que le bailleur a permis la sous-location et connu la cession de meubles qui en a été l'accessoire? - Mais, sur ce terrain encore, il est aisé de répliquer que les renonciations ne se présument pas facilement. Qu'importe que le bailleur ait connu la sous-location, s'il ne pouvait pas l'empêcher, et qu'il n'ait pas protesté contre la cession, s'il était tenu de la respecter? De ce qu'il n'a pas interdit la sous-lo cation au moment du bail principal, comment conclure qu'il s'est résigné à perdre, par l'effet d'une transmission des meubles du locataire principal au sous-locataire, le bénéfice de son privilège ?

La solution de la Cour suprême n'est pas seulement la plus conforme aux principes. Elle est la seule équitable.

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Lorsque le locataire cède ses meubles à un tiers, le bailleur a la ressource d'une saisie-revendication. Lorsqu'il les cède au sous-locataire, pas de saisie-revendication possible. Appliquer dans ce cas l'art. 1753, C. civ., ce serait, comme le remarque le tribunal de Fougères, admettre que le bailleur pourrait être dépouillé de son privilège pour tous les loyers antérieurs à la vente et à la cession par le fait du preneur principal, sans que la loi lui donne », sauf peut-être en présence d'un concert frauduleux prouvé, - - aucun moyen de le sauvegarder ». Ce serait détruire l'équilibre du système législatif.

L'art. 1753 n'est pas une arme tournée contre les propriétaires. C'est une vérité d'évidence pour ceux qui, suivant la doctrine dominante, le considèrent comme le siège d'une action directe ouverte au bailleur vis-à-vis du sous-locataire, et qui s'impose même aux yeux des partisans de la thèse contraire (V. sur cette controverse, dans le sens de l'action directe, Cass. 2 juill. 1873, motifs, S. 1873.1.323. P. 1873.795, et les renvois;

13 janv. 1892, S. et P. 1892.1.89, et la note; Pand. pér., 1893.1.129; et notre Rep. gén. du dr. fr., v Bail [en général], n. 1921 et s.; Pand. Rép, verb. cit., n. 1381 et s.; et, en sens opposé, BaudryLacantinerie et Wahl, Du contrat de louage, 3o éd., t. 1, n. 1145); en facilitant les sous-locations, les sous-locations partielles surtout, il s'est proposé de favoriser les intérêts des locataires, mais sans nuire à ceux des propriétaires. Il ne convient pas d'en tirer une solution qui sacrifie les droits respectables des propriétaires aux calculs louches des locataires.

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