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ment de ses funérailles a la même force qu'une disposition testamentaire relative aux biens, et qu'elle est soumise aux mêmes règles quant aux conditions de révocation; qu'il s'ensuit que cette révocation peut être tacite, et qu'elle devra être admise, quand le changement de volonté résultera formellement d'un ensemble de faits précis et concordants, démontrant que les dispositions testamentaires sont inconciliables avec les actes postérieurs du défunt; qu'il s'ensuit encore qu'aucune violation, soit de ce texte de loi, soit des autres visés au pourvoi, ne peut être utilement relevée contre le jugement du juge de paix du 8e arrondissement de Paris, confirmé ordonnance du président du tribunal de la Seine, qui, en reconnaissant que, dans son testament, non révoqué expressément, du 2 août 1890, Georges Level avait énoncé sa volonté d'être enterré civilement, a néanmoins ordonné que ses obsèques seraient célébrées religieusement, par ce motif qu'il était établi que, dans les jours qui ont précédé sa mort, le défunt, en état de complète lucidité d'esprit, avait, par son attitude générale, par ses paroles et par ses actes, manifesté l'intention de rétracter ses volontés antérieures concernant le caractère de ses obsèques et l'abandon de ces dispositions; - Rejette le pourvoi contre l'ordonnance du président du tribunal civil de la Seine du 5 nov. 1911, etc.

Du 23 avril 1912. - Ch. req.· MM. Tanon, prés.; Denis, rapp.; Lénard, av. gén. (concl. conf.); Balliman, av.

CASS.-REQ. 20 avril 1912.

ENFANT NATUREL, ALIMENTS, OBLIGATION NATURELLE, TRANSFORMATION, OBLIGATION CIVILE, PREUVE, LETTRES MISSIVES, POUVOIR DU JUGE (Rép., vis Enfant naturel, n. 449 et s., Obligations, n. 322; Pand. Rép., v Obligations, n. 83 et s., 7705).

Les juges du fait, qui, par une appréciation souveraine, constatent que, de la vo

(1-2-3) Avant la modification apportée à l'art. 340, C. civ., qui interdisait la recherche de la paternité, par la loi du 16 nov. 1912, sur la reconnaissance judiciaire de la paternité naturelle (S. et P. Lois annotées de 1913, p. 430; Pand. pér., Lois annotées de 1913, p. 430), la jurisprudence s'était fixée en ce sens que l'interdiction de la recherche de la paternité ne mettait pas obstacle à ce que l'on tint pour licite et obligatoire, en tant qu'ayant pour cause un devoir de conscience, l'engagement pris par le père d'un enfant né hors mariage de subvenir aux besoins de cet enfant. V. Cass. 27 mai 1862 (S. 1862.1.566. P. 1862.1037), et les renvois; Angers, 11 août 1871 (S. 1872.2.198. P. 1872.820); Cass. 15 janv. 1873 (S. 1878.1. 29. P. 1873.46); 3 avril 1882 (S. 1882.1.404. P. 1882.1.1010), et les renvois; 30 juill. 1900 (S. et P. 1901.1.259); Chambéry, 17 mars 1908 (S. et P. 1909.2.309; Pand. pér., 1909.2.309), et les renvois. Ce devoir de conscience a, en effet, le caractère d'une obligation naturelle, qui peut servir de base à une obligation civile, par la volonté

-

lumineuse correspondance échangée entre la mère d'une enfant naturelle et celui auquel est attribuée la paternité de l'enfant, il ressort d'une façon certaine que celui-ci n'a jamais songé à contester que l'enfant ful sa fille, qu'il a, dans ses lettres, manifesté l'intention de pourvoir aux besoins de l'enfant, et n'a pas cessé d'envoyer à la mère les sommes nécessaires, ont pu en conclure que le père avait persévéré à reconnaitre et à acquitter l'obligation naturelle qui lui incombait envers la mère de l'enfant (1) (C. civ., 340).

en

Et ils ont pu trouver la preuve d'un engagement du prétendu père de subvenir aux besoins de l'enfant, engagement transformant l'obligation naturelle une obligation civile, seule susceptible de créer un lien de droit entre les parties, dans une lettre du prétendu père, non datée, mais écrite à la mère à la veille d'une rupture, et ainsi conçue « J'irai chercher la petite la semaine prochaine et vous porterai vos fonds; préparez toutes les affaires de l'enfant; je l'emmènerai, et vous en serez débarrassée » (2) (C. civ., 340, 1235).

En statuant ainsi, par appréciation d'une correspondance dont ils n'ont ni dénature les termes ni faussé la portée, les juges du fond n'ont, ni méconnu la nécessité du consentement de la partie qui s'oblige, ni tiré des faits par eux souverainement constatés des conséquences juridiques qui n'en découlaient pas (3) (Id.).

ARRÊT.

(Gabillon C. Dile Pinard). LA COUR; Sur le moyen de cassation pris de la violation des art. 340, 1108, 1134, 1235, 1342, C. civ., et 7 de la loi du 20 avril 1810 (en ce que l'arrêt attaqué, pour condamner l'exposant à servir une pension à la défenderesse éventuelle, s'est fondé sur le devoir moral qui lui incomberait et sur un prétendu engagement de subvenir aux besoins d'une enfant, alors que l'accomplissement du devoir allégué ne pouvait lui être imposé, et que, pour faire résulter l'engagement prétendu de sa correspondance, la Cour a dù en dénaturer le sens clair et précis) : - Attendu que le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dénaturé

libre et spontanée de l'auteur de la promesse. V. Cass. 15 janv. 1873 et 30 juill. 1900, précités, et la note; adde, notre Rép. gén. du dr. fr., v Obligations, n. 822, et Enfant naturel, n. 449 et s.; Pand. Rep., v Obligations, n. 83 et s., 7705.

La loi du 16 nov. 1912 n'a pas enlevé à cette question son intérêt; cette loi n'a trait, en effet, qu'à la déclaration judiciaire de la paternité naturelle, et l'action qu'elle autorise ne peut être exercée qu'au nom de l'enfant naturel ou par lui, et dans les conditions qu'elle détermine. Il peut se faire que l'action en déclaration de paternité ne puisse réussir, faute de satisfaire aux prescriptions de la loi du 16 nov. 1912; il peut se faire également que, les conditions exigées par la loi du 16 nov. 1912 étant réunies, la mère de l'enfant veuille néanmoins se prévaloir des droits que lui reconnaissait la jurisprudence antérieure pour obtenir condamnation en son nom personnel, en vertu de l'engagement que le père de l'enfant a pris vis-à-vis d'elle de subvenir à ses besoins. Dans l'un et l'autre cas, la jurisprudence antérieure trou

le sens clair et précis de la correspondance du demandeur, pour lui imposer l'obligation de subvenir aux besoins d'une enfant, alors qu'il ne résultait de cette correspondance aucun engagement à cet égard; Or, attendu que les déclarations souveraines dudit arrêt révèlent que, de la volumineuse correspondance échangée entre Gabillon et la demoiselle Pinard, il ressort, d'une façon certaine, que le demandeur n'a jamais songé à contester que la petite Marie Georgette ne fùt sa fille, qu'il a, dans ses lettres, manifesté sa volonté de pourvoir aux besoins de cette enfant, et qu'il est constant et non dénié que, jusqu'en 1902, il a envoyé à la demoiselle Pinard les sommes nécessaires pour suffire à cet entretien; que, de ces constatations, la Cour, comme elle en avait le droit, a conclu que le demandeur avait persévéré à reconnaître et à acquitter l'obligation naturelle qui lui incombait envers ladite demoiselle, mère de l'enfant : Attendu que le juge du fait s'est ensuite appliqué à rechercher comment et dans quelle mesure cette obligation naturelle a pris le caractère d'une obligation civile, seule susceptible de créer un lien de droit entre les parties; tendu que la Cour d'appel a pu trouver la preuve d'un engagement de cette nature dans une lettre non datée, mais écrite à la veille d'une rupture, et où Gabillon s'exprimait en ces termes : « J'irai chercher la petite la semaine prochaine et vous porterai vos fonds; préparez toutes les affaires de l'enfant, je l'emmènerai, et vous en serez débarrassée »; que, dans ces conditions, la Cour a pu également, sans s'exposer à encourir le reproche de tirer des faits par elle souverainement constatés une conséquence juridique qui n'en découlait pas, et sans méconnaître la nécessité du consentement de la partie qui s'oblige, considérer que le demandeur s'était formellement engagé à subvenir aux besoins de Marie Georgette, tant qu'elle n'aurait pas atteint l'àge où elle pourrait vivre du produit de son travail : qu'en statuant ainsi, par appréciation d'une correspondance dont elle n'a ni dénaturé les termes ni faussé la portée, la Cour d'appel,

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vera à s'appliquer. V. la note 1, n. IV, sous la loi précitée du 16 nov. 1912 (S. et P. Lois annotées de 1913, p. 432, 1 col.; Pand. pér., Lois annotées de 1913, p. 432, 1re col.).

Dans l'espèce, le pourvoi ne contestait pas les principes admis par la jurisprudence; il se bornait à soutenir que la transformation de l'obligation naturelle en obligation civile, dont la preuve devait être rapportée d'après les règles du droit commun (V. Bordeaux, 11 mars 1896, S. et P. 1898.2.141, et la note; Cass. 30 jaill. 1900, précité), ne résultait pas de la correspondance invoquée par les juges du fond. La question qui se posait devant la Cour de cassation consistait uniquement à rechercher si les juges du fond avaient ou non dénaturé la portée des lettres du prétendu père, sur lesquelles ils avaient fondé leur décision. Or, c'est un point certain qu'il appartient aux juges du fond d'apprécier les lettres missives invoquées devant eux, à la condition de n'en pas dénaturer le sens. V. Cass. 2 févr. 1892 (S. et P. 1892. 1.511).

dont la décision est motivée, n'a violé aucun des textes invoqués ; Rejette le pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 22 nov. 1910 par la Cour d'Amiens, etc.

Du 20 avril 1912. Ch. req. MM. Tanon, prés.; Loubers, rapp.; Blondel, av. gén. (concl. conf.); Raynal, av.

CASS. REQ. 21 février 1912. 1o ACTE AUTHENTIQUE, FOI, SIMULATION, PREUVE CONTRAIRE (Rép., v° Acte authentique, n. 283 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 49 et s.). 20 SIMULATION, ACTE AUTHENTIQUE, FOI, PREUVE CONTRAIRE, PRÉSOMPTIONS, POUVOIR DU JUGE, SOCIÉTÉ EN NOM COLLECTIF, COMMANDITE, PRET HYPOTHÉCAIRE (Rép., v° Acte authentique, n. 283 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 49 et s.). 1° La foi attachée aux actes authentiques, en ce qui concerne la réalité et la sincérité des fails juridiques qu'ils constatent, ne leur est due que jusqu'à preuve contraire (1) (C. civ., 1319).

2° Elle ne fait pas obstacle à ce que les conventions, dispositions ou déclarations qu'ils contiennent puissent être arguées de simulation, soit par des tiers, soit par l'une des parties (2) (C. civ., 1319).

Spécialement, il rentre dans les pouvoirs des juges du fond d'apprécier les faits et les présomptions d'où ressort la preuve qu'un contrat de société, dans lequel un des associés a pris la qualité de commanditaire, et les actes authentiques constatant des prêts hypothécaires par cel associé à la société, sont simulés et procèdent d'une entente manifeste entre les associés et un tiers pour permettre au prétendu comman ditaire de dissimuler sa véritable situation d'associé en nom collectif et de se faire rembourser les avances qu'il avait faites à la société (3) (Id.).

(Morrow C. Murat et autres). ARRÊT.

LA COUR; Sur le moyen unique, pris dans ses deux branches, et tiré de la violation des art. 27, 28, 41, 446, 447 et 448, C. comm., 1134, 1319, C. civ., 7 de la loi du 20 avril 1810: Attendu que la foi attachée aux actes authentiques, en ce

(1-2-3) Si l'acte authentique fait pleine foi jusqu'à inscription de faux des constatations qu'il renferme, ce n'est que relativement aux faits qui y sont énoncés par l'officier public comme s'étant passés en sa présence; mais la sincérité ou la vérité intrinsèque des déclarations des parties peut toujours être combattue par la preuve contraire. V. Cass. 25 mai 1898 (S. et P. 1901.1. 27; Pand. pér., 1898.1.343); 28 déc. 1904 (8. et P. 1905.1.422); 8 janv. 1907 (S. et P. 1907.1.168), et les renvois.

Les déclarations et conventions contenues dans un acte authentique peuvent être arguées de simulation, soit par les tiers, soit même par l'une des parties. V. Cass. 10 janv. 1900 (S. et P. 1904.1.270); 30 mai 1900 (S. et P. 1901.1.27; Pand. pér., 1900.1.332); 2 mars 1904 (S. et P. 1904.1.260), et les notes. Et la déclaration des juges du fond que l'acte est simulé, fondée sur des considérations de fait, échappe au contrôle de la Cour de cassation. V. Cass. 10 janv. 1900, précité, et

qui concerne la réalité et la sincérité des faits juridiques qu'ils constatent, ne leur est due que jusqu'à preuve contraire; qu'elle ne fait point obstacle à ce que les conventions, dispositions ou déclarations qu'ils contiennent puissent être arguées de simulation, soit par des tiers, soit par l'une des parties; Attendu que l'arrêt attaqué, tant par ses propres motifs que que par ceux du jugement du tribunal de commerce de Toulon du 5 nov. 1909, qu'il a adoptés, déclare que le contrat de société, dans lequel Morrow avait pris la qualité de commanditaire, et les actes authentiques constatant des prêts hypothécaires par Morrow à la société, sont simulés et le résultat d'une entente manifeste entre Murat, Morrow et une tierce personne, pour permettre à Morrow de dissimuler sa véritable situation d'associé en nom collectif et de se faire rembourser les avances qu'il avait faites à la société; Attendu que le jugement et l'arrêt font résulter cette simulation d'un ensemble de documents et de circonstances, et notamment de la correspondance de Morrow et de la direction prépondérante qu'il n'a cessé d'exercer sur les affaires de la société ; Attendu qu'il rentrait dans les pouvoirs des juges du fond d'apprécier les faits et les présomptions d'où ressortait la preuve que, dès l'origine, la qualité de commanditaire prise par Morrow était simulée; que la décision attaquée, dùment motivée, a pu, par suite, sans violer aucun des textes de loi visés au moyen, écarter du passif de la liquidation de la Société Murat et Cie la production faite par Morrow, soit à titre privilégié, soit à titre chirographaire;

Rejette le pourvoi formé contre l'arrêt de la Cour d'Aix du 7 juill. 1910, etc. Du 21 févr. 1912. — Ch. req. - MM. Tanon, prés.; Malepeyre, rapp.; Blondel, av. gén. (concl. conf.); Talamon, av.

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CASS.-CIV. 15 novembre 1911 et 15 janvier 1913. OUVRIER, ACCIDENTS DU TRAVAIL, RESPONSABILITÉ, LOI DU 9 AVRIL 1898, ACCIDENTS DONNANT LIEU A INDEMNITE, LOUAGE DE SERVICES, EXPIRATION, PAIEMENT DU SA

la note; 23 janv. 1901 (S. et P. 1901.1.407), et les renvois.

(4 à 7) L'application de la loi du 9 avril 1898 aux accidents dont sont victimes des ouvriers et employés suppose essentiellement l'existence d'un contrat de louage de services entre le chef d'entreprise, d'une part, et l'ouvrier ou employé victime de l'accident, d'autre part. V. Cass. 8 déc. 1909 (8. et P. 1912.1.517; Pand. pér., 1912.1.517); 2 mars 1910 (S. et P. 1911.1.187; Pand. pér., 1911. 1.187); 22 mai 1912 (2 arrêts) (S. et P. 1912.1.517; Pand. pér., 1912.1.517), et les renvois. De cette règle découle la double conséquence que l'accident survenu à un ouvrier ou employé, avant qu'il soit dans les liens du contrat de louage de services, ou après que le louage de services a pris fin, n'est pas à la charge du chef d'entreprise en vertu de la loi du 9 avril 1898. C'est ce que la Cour de cassation avait déjà reconnu pour l'accident survenu après que le louage de services a pris fin, V. Cass. 27 juill. 1903 (S. et P. 1905.1.270). Adde,

LAIRE, OUVRIER EMBAUCHÉ POUR LE LENDEMAIN (Rép., v Responsabilité civile, n. 1898 et s.; Pand. Rép., v Travail, n. 2417 et s.).

L'accident dont un ourrier est victime, dans l'intérieur de l'usine, au cours de démarches faites pour recevoir du chef d'entreprise le salaire convenu, doit être considéré comme survenu à l'occasion du

travail, sans qu'il y ait lieu de rechercher si le contrat de louage de services qui liait les parties subsistait ou non au moment de l'accident; en effet, l'ouvrier, en demandant le règlement de son compte, agit en vertu du contrat, dont il a, pour sa part, rempli les conditions, alors que le chef de l'entreprise ne l'aura complètement exécuté que par le paiement du salaire (4) (L. 9 avril 1898, art. 1er). - Ire espèce.

Dès lors, le contrat de louage de services, sans détermination de durée, auquel l'ouvrier a mis fin par sa volonté, subsistant pour le passé, l'ouvrier, obligé de se rendre à l'usine pour toucher le salaire que lui doit le chef d'entreprise, est en droit de se prévaloir de la loi du 9 avril 1898 à raison de l'accident dont il est victime au cours de cette démarche (5) (Id.). Id.

Mais, si le bénéfice de la loi du 9 avril 1898 peut être réclamé par l'ancien ouvrier qui a été victime d'un accident, dans l'usine ou ses dépendances, alors qu'il y était venu pour obtenir le règlement de son compte, il ne saurait être appliqué à l'ouvrier qui, venu à l'usine pour demander du travail, et embauché pour le lendemain seulement, a élé blessé, alors qu'au lieu de quitter l'usine, il y était demeuré pour causer avec d'autres ouvriers (6) (Id.). 2o espèce.

En effet, l'art. 1er de la loi du 9 avril 1898, qui ne met à la charge des chefs d'entreprises que les seuls accidents survenus à leurs ouvriers et employés au lieu et à l'heure du travail, suppose un contrat de louage de services en cours d'exécution (7) (Id.). Id.

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Baudry-Lacantinerie et Wahl, Du louage, 3° éd., t. 2, 1re part., n. 1866 et s. Et c'est ce qu'elle admet très justement dans le second des arrêts ci-dessus rapportés, pour le cas où l'ouvrier a été blessé avant que le contrat de travail, déjà conclu entre le chef d'entreprise et lui, ait pu recevoir exécution. L'ouvrier, embauché par le chef d'entreprise pour le lendemain, au lieu de quitter le chantier après avoir arrêté avec le chef d'entreprise les conditions de son engagement, y était demeuré pour causer avec d'autres ouvriers; l'accident dont il avait été victime dans ces circonstances ne pouvait être considéré comme un accident du travail, puisque les relations contractuelles entre le chef d'entreprise et l'ouvrier n'existaient pas encore, et ne devaient prendre naissance que le lendemain.

Dans l'espèce du premier des arrêts ci-dessus, le contrat de louage de services avait pris fin, lorsque l'ouvrier avait été blessé dans l'usine, ou il était revenu pour faire régler son compte; la Cour de cassation décide néanmoins que l'accident

dont un ouvrier est victime, dans l'intérieur de l'usine, au cours de démarches faites pour recevoir du chef d'entreprise le salaire convenu, doit être considéré, au sens de la loi du 9 avril 1898, comme survenu à l'occasion du travail, sans qu'il y ait lieu de rechercher si le contrat de louage de services qui liait les parties subsistait ou non au moment de l'accident; que l'ouvrier, en effet, en demandant le règlement de son compte, agit en vertu du contrat, dont il a, pour sa part, rempli les conditions, alors que le chef de l'entreprise ne l'aura complètement exécuté que par le paiement du salaire; Attendu

que l'arrêt attaqué constate que, le 24 sept. 1908, Bauer, ouvrier de la Comp. des forges et aciéries de la marine et d'Homécourt, a été victime d'un accident, à l'intérieur de l'usine, alors qu'il se disposait à aller chercher au dehors une pièce exigée par le comptable pour le règlement de son compte; Attendu que ledit arrêt déclare irrecevable l'action dirigée contre la Comp. par Bauer, qui, se prétendant atteint d'incapacité permanente, demandait l'allocation de la rente déterminée par l'art. 3 de la loi du 9 avril 1898, par ce motif que Bauer avait cessé d'être l'ouvrier de la Comp. avant de demander le règlement de son compte, c'est-à-dire avant l'accident; Mais attendu que, si Bauer avait pu, par la seule manifestation de sa volonté, mettre fin, pour l'avenir, au contrat de louage de services, fait sans détermination de durée, qui le liait à la Comp., ce contrat subsistait pour le passé; que la Comp. lui devait le prix de son travail, et qu'obligé de se rendre à l'usine pour le toucher, Bauer y devait être protégé dans les mêmes conditions que celles sous l'empire desquelles il y avait travaillé; d'où il suit qu'en statuant comme il l'a fait, l'arrêt attaqué a violé l'article susvisé; Casse l'arrêt rendu le 9 avril 1909 par la Cour de Nancy, etc..

Du 15 nov. 1911. Ch. civ. MM. Sarrut, prés.; Reynaud, rapp.; Lombard, av. gén. (concl. conf.); Passez et de Ségogne, av.

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survenu dans ces conditions donne lieu à l'application de la loi du 9 avril 1898. On pourrait être tenté de penser que cette solution contredit la règle ci-dessus rappelée qu'il n'y a accident du travail, au sens de la loi du 9 avril 1898, qu'autant qu'il existe un contrat de louage de services entre la victime et le chef d'entreprise, puisque l'accident se plaçait à un moment où il n'y avait plus contrat de louage de services. Mais la Cour de cassation fait observer que, si l'ouvrier est dégagé de toute obligation vis-à-vis du chef d'entreprise, il n'en est pas de même de celui-ci vis-à-vis de l'ouvrier, puisque, tant que l'ouvrier n'est pas payé, le contrat n'est pas complètement exécuté. Pour que cette exécution soit complète, le chef d'entreprise doit régler le compte de l'ouvrier, et celui-ci est obligé de venir à l'usine pour ce règlement; en faisant cette démarche, il agit en vertu du contrat de travail, et il doit être protégé contre les

myėlitique, qui a nécessité l'ablation de la jambe, s'est déclaré quelques jours après une contusion recue au cours du travail, l'ouvrier est à bon droit débouté de sa demande en allocation d'une rente par l'arrêt qui constate que l'ostéomyélite aiguë s'est produite sans aucune intervention traumatique (1) (L. 9 avril 1898, art. 1er).

(Emerelle C. Pinchon). - ARRÊT.

LA COUR; violation des

qué constate que Lamy venait d'être embauché, le 3 mars 1910, pour travailler à partir du lendemain aux carrières Brasseur, lorsque, au lieu de quitter le chantier, où il s'était rendu pour arrêter les conditions du contrat de travail qu'il se proposait de contracter, il s'arrêta près d'un groupe d'ouvriers occupés à dégrossir un bloc de pierre; qu'il s'assit et se mit à causer avec eux; qu'au bout d'un certain temps, le bloc glissa et l'atteignit à la jambe, qu'il fractura en deux endroits; Attendu que ledit arrêt a déclaré Lamy irrecevable à invoquer le bénéfice des dispositions de la loi du 9 avril 1898: qu'en statuant ainsi, il n'a violé aucun des articles visés au pourvoi; - Attendu, en effet, que l'art. 1er de la loi du 9 avril 1898 ne met à la charge des chefs d'entreprise que la responsabilité des seuls accidents survenus à leurs ouvriers et employés au lieu et à l'heure du travail; qu'il suppose un contrat de louage de services en cours d'exécution, et que, s'il peut être appliqué à l'accident dont est victime, dans l'usine ou dans ses dépendances, un ancien ouvrier qui y est venu pour obtenir le règlement de son compte, il ne saurait être étendu à l'accident survenu à un ouvrier embauché pour le lendemain seulement, qui n'est, au moment où il est blessé, ni sur le lieu ni à l'heure du travail, et dont rien alors ne justifie la présence sur le chantier, qu'il aurait dù quitter bien avant le glissement du bloc: latent; Rejette le pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 18 mai 1911 par la Cour de Nancy, etc.

Du 15 janv. 1913. — Ch. civ. - MM. Baudouin, er prés.; Reynaud, rapp.; Lombard, av. gén. (concl. conf.); Le Marois et Pérouse, av.

CASS.-REQ. 7 janvier 1913.

OUVRIER, ACCIDENTS DU TRAVAIL, RESPONSABILITÉ, LOI DU 9 AVRIL 1898, MALADIE, OSTEOMYELITE, RELATION DE CAUSE A EFFET (ABSENCE DE) (Rép., vo Responsabilité civile, n. 1626 et s.; Pand. Rép., vo Travail, n. 1853 ets., 1886 et s.).

Bien qu'il soit constaté qu'un abcès ostéo

accidents, au même titre qu'il le serait si, en de. hors des heures ou du lieu du travail, il était blessé pendant qu'il reçoit ou qu'il attend son salaire. V. Sachet, Tr. des acc. du travail, 5 éd., t. 1er, n. 394.

Il résulte de là que l'on ne doit pas donner une interprétation trop stricte à la règle que l'ouvrier n'est protégé par la loi du 9 avril 1898 que pendant la durée du louage de services. Cette règle, très exacte en principe, implique que les parties sont libérées de toute obligation réciproque par la rupture ou l'expiration du contrat. Mais, si des obligations subsistent à la charge de l'une ou de l'autre, les accidents auxquels l'ouvrier est exposé pendant l'exécution de ces obligations demeurent à la charge du chef d'entreprise; ce sont là des accidents survenus à l'occasion du travail, au sens de l'art. 1er de la loi du 9 avril 1898.

(1) Dans l'espèce, d'après les constatations des

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Sur le moyen pris de la art. 1er et s. de la loi du 9 avril 1898 : Attendu qu'Emerelle, ouvrier zingueur, s'est fait, le 4 nov. 1910, en travaillant sur le toit d'une maison pour le compte de son patron Pinchon, une contusion au genou gauche; que, quelques jours après, un abcès osteomyelitique s'étant déclaré, il devint nécessaire de procéder à la désarticulation et à l'enlèvement de la cuisse gauche; que la Cour d'Amiens, par arrêt du 19 juill. 1911, infirmant un jugement de première instance, a débouté le demandeur de ses prétentions à obtenir de Pinchon une rente annuelle et viagère à raison de son incapacité permanente et partielle de travail; que le pourvoi critique cette décision, en ce sens qu'elle aurait refusé à tort toute indemnité a Emerelle, sans avoir recherché si ce n'était pas le traumatisme subi par le demandeur qui aurait amené l'explosion d'une maladie restée jusque-là à l'état Mais attendu qu'il résulte des termes de l'arrêt attaqué que la Cour a basé sa décision sur le rapport de l'expert commis par elle dans son arrêt interlocutoire du 28 févr. 1911 pour examiner Emerelle, qui a conclu à l'existence chez celui-ci d'une ostéomyélite aiguë, qui s'était produite sans aucune intervention traumatique; qu'en repoussant, dans ces conditions, les prétentions du demandeur, la Cour, dont l'arrêt est motivé, n'a violé aucun des textes visés au moyen; Rejette le pourvoi contre l'arrêt rendu le 19 juill. 1910 par la Cour d'Amiens, etc. Du 7 janv. 1913. Ch. req. non, prés.; Bonnet, rapp.; Eon, av. gén. (concl. conf.); Bernier, av.

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juges du fond, la maladie était sans rapport avec l'accident éprouvé par l'ouvrier; il n'y avait donc pas à tenir compte de l'incapacité dont l'ouvrier était atteint à la suite de l'opération que la maladie avait nécessitée, l'incapacité ne pouvant donner droit à indemnité que si elle est la conséquence d'un accident de travail. V. dans le même sens, Cass. 19 févr. et 1er mai 1911 (S. et P. 1911. 1.327; Pand. pér., 1911.1.327), et les renvois. Dans ces conditions, la question ne se posait pas de savoir si et à quelles conditions une maladie, qui s'est développée ou aggravée à la suite d'un accident, peut ou doit être prise en considération pour l'allocation d'une indemnité. V. sur la question, Cass. 27 juill. 1905 (S. et P. 1908.1. 284; Pand. pér., 1908.1.284); 12 avril 1907 (S. et P. 1910.1. 446; Pand. pér., 1910.1.446); 21 févr. 1912 (S. et P. 1912.1.391; Pand. pér., 1912.1.391), et les notes sous ces arrêts.

CASS.-CIV. 3 avril 1913.

DU

1 DOMICILE, DOMESTIQUE, DOMICILE MAÎTRE, SERVICE OU TRAVAIL HABITUEL, COHABITATION, DURÉE (Rép., v Domicile, n. 350 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 236 et s.). 20 ELECTIONS (EN GÉNÉRAL), LISTES ÉLECTORALES, INSCRIPTION, DOMESTIQUE, DOMICILE DU MAÎTRE, COHABITATION, JUGEMENT, CONSTATATIONS, DÉFAUT DE BASE LEGALE, CASSATION (Rép., v° Elections, n. 403 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 813 et s.).

1o Pour qu'un domestique ait le méme domicile que son maître, deux conditions

(1 à 4) Cette question ne s'était jamais posée avec cette netteté, et aucun précédent de jurisprudence ne saurait être invoqué, à notre connaissance du moins. Il y a d'autant plus lieu de s'en étonner que le cas est très fréquent de maîtres réclamant l'inscription de leurs domestiques sur la liste électorale de la commune où ils ont, eux, leur domicile réel, et où ils exercent leurs droits électoraux, bien qu'ils n'y séjournent qu'à de rares intervalles, et qu'ils passent la plus grande partie de l'année, avec leur personnel, dans des résidences où les retiennent leurs plaisirs, leurs occupations, la surveillance ou la direction de leurs intérêts. Cette situation se complique, lorsque, à raison, soit de la cherté des loyers, soit de l'exiguïté des logements, les domestiques, du moins certaines catégories d'entre eux, dans ces lieux de résidence, telles les grandes villes, ne demeurent pas avec leurs maîtres dans la même maison. Et c'était bien là le cas de l'espèce actuelle.

Il s'agissait, en effet, d'un maître habitant à Paris le quartier des Champs-Elysées, où il passait neuf mois de l'année sur douze, ne séjournant à son domicile réel, situé en province, que trois mois seulement. A Paris, ne logeaient sous le même toit que lui que ceux de ses domestiques qui étaient le plus directement attachés au service de sa personne, par exemple, les valets de chambre; les autres, comme le cuisinier chef, le cocher, habitaient au dehors. Lorsque le maître se déplaçait, pour se rendre à son domicile réel, il emmenait avec lui tout son personnel, et c'est alors seulement que la cohabitation sous le même toit, exigée par l'art. 109, C. civ., se trouvait réalisée, mais pendant trois mois, pour la catégorie de serviteurs non logés chez lui à Paris. La durée de cette cohabitation, relativement courte, devait-elle être prise en considération pour déterminer le domicile de ces domestiques, et autoriser le maître ou un tiers électeur à réclamer leur inscription sur la liste électorale de la commune où le maître avait son domicile réel? Le juge de paix n'a pas pensé qu'une cohabitation exceptionnelle, accidentelle en quelque sorte, pût remplir le vœu de la loi; il a refusé l'inscription, parce qu'il était constant, formellement reconnu même, que les domestiques ne demeuraient pas habituellement avec leur maître, dans la même maison. Les raisons qui peuvent être données à l'appui de cette décision méritent d'être examinées.

De ce que l'art. 109, C. civ., n'attribue aux majeurs le même domicile que celui de la personne qu'ils servent, ou chez laquelle ils travaillent, que s'ils servent ou travaillent habituellement chez cette personne, et s'ils demeurent avec elle dans la même maison, ne peut-on pas concluré que les deux conditions restent intimement liées l'une à l'autre, que la cohabitation doit être, comme le service on ANNÉE 1913. - 4 cah.

doivent être remplies; il faut : 1o que le domestique serve ou travaille habituellement chez son maître; 2o qu'il habite avec lui (1) (C. civ., 109).

Et, quant à cette dernière condition, il n'y a pas à tenir compte de la durée plus ou moins longue de la cohabitation (2) (İd.).

2o Il suffit donc, pour que le domestique ait le droit de se faire inscrire sur les listes électorales de la commune où son maitre a son domicile, que la cohabitation existe effectivement et soit constatée au moment où la demande d'inscription est formée (3) (L. 5 avril 1884, art. 14).

Par suite, doit être cassé pour manque de base legale le jugement qui, pour re

le travail, habituelle et non accidentelle; il y a là un même ordre d'idées. L'attribution aux serviteurs du même domicile que leur maître s'explique et se justifie par la nature même du travail, qui exige une présence presque continue, à raison des rapports incessants que provoquent les nécessités du service. Le domestique doit rester sous la main du maître, à son entière disposition; la nature des choses veut que tous les deux mènent, par conséquent, une existence qui les rapproche le plus possible l'un de l'autre, et c'est pour cette raison que l'art. 109 exige qu'ils demeurent ensemble dans la même maison. Les deux personnalités se fusionnent alors pour ainsi dire; celle du maître, l'emportant, assure au domestique un domicile légal qui est celui de ce maître. Aussi la jurisprudence s'est-elle toujours refusée appliquer le bénéfice de l'art. 109 aux individus travaillant pour le compte d'une personne morale, hospices, collèges, etc. V. Cass. 24 avril 1901 et 25 mars 1908, cités par Faye, Man. de dr. élect., Appendice, n. XXIII, p. 489 et 490, note 2. V. aussi, Cass. 5 mai 1903 (S. et P. 1906.1.358). V. cep. la note sous cet arrêt. Si le législateur, dans l'art. 109, ne s'est pas expressément expliqué sur la durée plus ou moins longue de la cohabitation, c'est donc qu'il a cru, en voulant que le service ou le travail fût habituel, imposer à la cohabitation un caractère identique, et que tout rappel de la même condition lui a paru une redite inutile. Cette conception n'est certainement plus en rapport avec les idées actuellement en cours, mais elle est bien celle qui était généralement admise lors de la promulgation du Code civil. On aurait pu, en effet, se rattacher à un système plus logique en apparence, et laisser aux gens de service, quels que soient leurs pérégrinations et les changements de maison dont ils usent, un domicile fixe, invariable, leur domicile d'origine. Mais des inconvénients sérieux s'élèveraient, en ce cas, au sujet du domicile électoral, qui n'est pas distinct et indépendant de l'autre ; il en résulterait de graves entraves apportées à l'exercice du droit de vote.

Il ne s'agit pas de savoir ce que la loi aurait pu faire, mais ce qu'elle a fait, et l'argumentation présentée dans le sens du jugement cassé, si logique qu'elle puisse paraître, se concilie difficilement avec le texte de l'art. 109, qui n'impose aucune condition de durée pour l'habitation du domestique sous le même toit que son maître; ce serait ajouter à la loi que d'y suppléer. Donc, il suffit que la cohabitation soit effective et constatée pour que l'attribution de domicile s'opère de plein droit. Et la jurisprudence décide que ce domicile ainsi attribué à ces personnes leur fait perdre immédiatement leur domicile antérieur, malgré toute manifestation de volonté contraire, et qu'il ne saurait dépendre d'elles de s'en attri

pousser la demande d'inscription, sur la liste électorale d'une commune où le maitre a lui-même son domicile réel, de deux citoyens, en qualité de domestiques de ce maitre, se fonde sur ce que ces électeurs, bien qu'ils servent ou travaillent habituellement chez leur maître, ne demeurent pas habituellement avec lui dans la même maison, et n'habitent avec lui qu'accidentellement et pendant trois mois seulement de l'année, alors que ledit jugement ne s'explique pas, ainsi qu'il aurait dù le faire, sur la seule considération décisive, à savoir si les domestiques, à la date où leur inscription a été réclamée, demeuraient ou non avec leur maitre dans la même maison (4) (Id.).

buer un autre. V. Cass. 19 mars 1913, qui suit, et la note. Poussant encore plus loin les conséquences de cette attribution de domicile par l'application de l'art. 109, la Cour de cassation, dans un arrêt du 11 août 1890 (Bull. civ., n. 169), a jugé que ce domicile, une fois établi, se conserve, même pour le serviteur qui a quitté son maître et qui a cessé de résider dans la commune, jusqu'à ce qu'il soit démontré qu'il en a acquis un nouveau. Cette solution a été critiquée par certains auteurs (V. not. Faye, op. cit., n. 46, p. 70, texte et note 16); elle se déduit cependant rigoureusement de ce principe qu'un domicile une fois établi se conserve tant que l'intéressé ne lui en a pas substitué un autre. V. Cass. 3 et 10 avril 1906 (S. et P. 1907.1.142 et 192); 7 avril 1908 (S. et P. 1910.1.591; Pand. pér., 1910.1.591), et les renvois. V. aussi, Cass. 24 mars 1908 et 15 mars 1909 (S. et P. 1912.1.470; Pand. pér., 1912.1.470).

Mais à quel moment l'existence effective de la cohabitation doit-elle être prouvée pour justifier une demande d'inscription sur la liste électorale? L'arrêt que nous rapportons décide que c'est au moment où la demande d'inscription est formée. C'est là une application de ce principe, d'une portée générale, qui veut que, pour vérifier le bien ou mal fondé d'une action, on se place au jour où cette action a été introduite. V. Cass. 24 déc. 1889 (S. 1891.1.455.-P. 1891.1.1111), et la note; 15 avril 1913, aff. de Narbonne-Lara C. de Panat et autres (arrêt inédit). En matière électorale, comme en toute autre matière, on ne saurait être admis à réclamer un droit que l'on ne possède pas encore; la cohabitation dont on peut se prévaloir est donc celle qui existe au moment où la réclamation est faite. V. Cass. 1 avril 1912 (S. et P. 1912.1.286; Pand. pér., 1912.1.286), et la note. Seules les conditions d'âge et de résidence non encore immédiatement réalisées, mais qui s'accompliront avant la clôture des listes, font exception. V. Cass. 1, 29 et 30 avril 1912 (S. et P. 1912.1.286; Pand. pér., 1912.1.286) et la note. Ainsi donc, l'habitation du domestique sous le même toit que son maître doit être effective pour que l'attribution du domicile puisse produire ses effets quant à l'inscription sur la liste électorale. Mais qu'adviendrait-il, si, dans l'intervalle qui s'écoule entre la réclamation et le jugement de l'affaire, le domestique ne remplissait plus la condition de cohabitation, par exemple, s'il était retourné au lieu où le maître a une résidence, et où il séjourne la plus grande partie du temps? La solution ne saurait être douteuse; la cohabitation a existé, fût-ce un instant de raison; cela suffit pour l'acquisition du domicile, et, par conséquent, pour justifier l'inscription électorale. Faut-il aller plus loin? Une hypothèse embarrasI PART. 28

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LA COUR; Vu l'art. 109, C. civ.; Attendu qu'aux termes de cet article, les majeurs qui servent ou travaillent habituellement chez autrui ont le même domicile que la personne qu'ils servent ou chez laquelle ils travaillent, lorsqu'ils demeurent avec elle dans la même maison; que de ce texte il résulte que, pour qu'un domestique ait le même domicile que son maitre, et puisse, en conséquence, être inscrit sur la liste électorale de la commune du domicile de celui-ci, deux conditions doivent être remplies: 1° que le domestique serve ou travaille habituellement chez son maître; 2° qu'il habite avec lui; que, sur ce dernier point, il n'y a pas à tenir compte de la durée plus ou moins longue de la cohabitation; qu'il suffit qu'elle existe effectivement et soit constatée au moment où la demande d'inscription est formée; Attendu que, pour refuser d'ordonner l'inscription, sur la liste électorale de Montreuil-Bellay, des sieurs Courcier et Texier, en qualité de domestiques d'un maitre qui a lui-même. son domicile dans cette commune, le jugement attaqué s'est fondé à tort sur ce que ces citoyens, bien que servant ou travaillant habituellement chez leur maître, ne demeurent pas habituellement avec lui dans la même maison, qu'ils n'habitent avec lui qu'accidentellement et pendant trois mois seulement de l'année; que ledit jugement ne s'explique pas, ainsi qu'il aurait dû le faire, sur la seule considération décisive, à savoir si ces domestiques, à la date où leur inscription a été réclamée, demeuraient ou non avec leur maître dans la même maison; qu'en statuant ainsi, il n'a pas légalement justifié sa décision; Casse le jugement rendu le 25 févr. 1913 par le juge de paix de Montreuil-Bellay, etc. Du 3 avril 1913. — Ch. civ. - MM. Bau

sante se présente naturellement à l'esprit la demande d'inscription est introduite; le lendemain, le domestique quitte son maître ou même il est renvoyé par lui; il cesse de résider dans la commune; il ne se replace pas immédiatement. La jurisprudence, nous l'avons vu plus haut, lui conserve son ancien domicile tant qu'il n'est pas prouvé qu'il en a acquis un nouveau. La conséquence s'impose : même dans ce cas, le juge devra ordonner l'inscription. Cela peut surprendre, mais c'est légal, et il semble difficile de décider autrement, d'autant que, la revision des listes électorales ne s'opérant qu'annuellement et dans des conditions de délai déterminées, l'intéressé pourrait se trouver dans l'impossibilité d'obtenir son inscription sur une autre liste, et, par suite, d'exercer ses droits électoraux.

Nous ne nous dissimulons point les abus que de telles solutions peuvent faciliter, dans une matière où ils ne sont plus à compter. Les inscriptions des mêmes individus sur deux listes à la fois, en des communes différentes, s'en trouveront augmentées, et avec elles les facilités de fraude. Il appartient aux électeurs et aux administrations de veiller au fonctionnement régulier des opérations électorales. Le double vote, et même la double inscription, lorsqu'elle est le fait de l'électeur, sont sévèrement réprimés par la loi pé

douin, ler prés.; Ruben de Couder, rapp.; Lombard, av. gén. (concl. conf.).

CASS.-CIV. 19 mars 1913.

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1° DOMICILE, DOMESTIQUE, DOMICILE DU MAÎ TRE, DOMICILE D'ORIGINE (Rép., vo Domicile, n. 350 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 236 et s.). 20 ELECTIONS (EN GÉNÉRAL), LISTES ÉLECTORALES, INSCRIPTION, DOMESTIQUE, DOMICILE DU MAITRE, DOMICILE D'ORIGINE (Rép., vo Elections, n. 403 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 813).

1o Les majeurs qui servent ou travaillent habituellement chez autrui, et qui demeurent dans la même maison que leur maitre, perdent immédiatement tout droit de se réclamer d'un autre domicile, notamment de leur domicile d'origine (1) (C. civ., 109).

2° Par suite, ils ne peuvent plus réclamer leur inscription sur la liste électorale de la commune de leur domicile d'origine (2) (L. 5 avril 1884, art. 14).

(Poingt). ARRÊT.

LA COUR; - Attendu que, pour refuser d'ordonner l'inscription de Béranger et Daviau sur la liste électorale de MontreuilBellay, leur commune d'origine, le jugement attaqué s'est fondé sur ce que Béranger était domestique à Pamaux, commune de Méran, et Daviau, domestique à Daury, commune d'Epieds; qu'il a ajouté que ces serviteurs demeurent avec leur maitre dans la même maison; Attendu qu'en statuant ainsi, le jugement attaqué a fait une exacte application de l'art. 109, C. civ.; qu'en effet, le domicile, attribué aux domestiques par la loi, leur fait perdre immédiatement tout droit de se réclamer d'un autre domicile, notamment de leur domicile d'origine; Rejette le pourvoi contre le jugement du juge de paix de Montreuil-Bellay, en date du 25 févr. 1913, etc.

nale (Décr. organ.,

févr. 1852, art. 31 et 33). J. RUBEN DE COUDER.

(1-2) Les majeurs qui servent ou travaillent habituellement chez autrui, et qui demeurent dans la même maison que leur maître, perdent leur domicile antérieur, et cela immédiatement, malgré toute manifestation de volonté contraire (V. Cass. 29 mars 1904, S. et P. 1905.1.47; 18 avril 1904, S. et P. 1905.1.414, et les renvois; Faye, Man. de dr. élect., n. 46, p. 69 et 70; et notre Rép. gén. du dr. fr., v Elections, n. 412 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 827 et s.), pour cette raison que nul ne peut avoir en même temps plusieurs domiciles. V. Cass. 4 août 1896 (S. et P. 1900.1.515; Pand. pér., 1898.1.229), et les renvois. Adde, la note sous Cass. 24 mars 1908 et 15 mars 1909 (S. et P. 1912.1.470; Pand. pér., 1912.1.470). Ils doivent donc cesser d'être inscrits sur la liste électorale de la commune où se trouvait cet ancien domicile. V. Cass. 29 mars 1904, précité, et le renvoi. A plus forte raison ne pourraient-ils se prévaloir de leur domicile d'origine pour réclamer leur inscription sur la liste électorale de la commune de ce domicile. V. Cass. 18 avril 1904, précité. Mais les domestiques, comme tous ceux qui sont inscrits au rôle des contributions directes ou au rôle des prestations d'une commune, ont le droit de réclamer

Du 19 mars 1913. Ch. civ.MM. Baudouin, ler prés.; Ruben de Couder, rapp.; Mérillon, av. gén. (concl. conf.).

CASS.-CIV. 8 avril 1913. 1o ET 30 ÉLECTIONS (EN GÉNÉRAL), APPEL, AVERTISSEMENT, TIERS ÉLECTEUR, MANDATAIRE, MANDANT, DÉLAI DE L'AVERTISSEMENT, POURVOI EN CASSATION, MOYEN, RECEVABILITÉ, LISTES ÉLECTORALES, RADIATION, DOMICILE, CHANGEMENT, POUVOIR DU JUGE, CONTRIBUTIONS DIRECTES, INSCRIPTION AU ROLE, PREUVE, CERTIFICAT DU MAIRE (Rép., vo Elections n. 1414 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 1601 et s., 1748 et s.). 2o DOMICILE, CHANGEMENT, INTENTION (Rép., vo Domicile, n. 113 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 271 et s.).

1o Le tiers électeur, qui ne s'est présenté devant le juge de paix que comme mandataire d'électeurs contestés et pour conclure en leur nom, et qui n'a figuré qu'en cette seule qualité dans la requête en cassation et dans la notification du pourvoi à d'autres tiers électeurs constitués parties aux débats, est sans qualité pour demander la nullité du jugement qui est intervenu, à raison d'un grief qui lui est personnel, notamment parce que l'avertissement, qui doit, aux termes de l'art. 22 du décret organique du 2 févr. 1852, être donné à toutes parties intéressées, ne lui aurait pas été donné par le juge de paix (3) (Décr. organ., 2 févr. 1852, art. 22).

La nullité résultant du défaut d'avertissement ne saurait non plus être invoquée par lui dans l'intérêt dès mandants, électeurs contestés, qui, eux, ayant reçu l'avertissement, n'ont éprouvé aucun préjudice personnel de l'inaccomplissement de cette formalité à l'égard du tiers électeur, leur mandataire (4) (Id.).

Est recevable le moyen de cassation tiré de la nullité de l'avertissement, à raison de l'inobservation du délai imparti par la loi

leur inscription, à ce titre, sur la liste électorale d'une commune où ils sont inscrits aux rôles, s'ils ne sont pas encore portés sur la liste électorale, ou d'être maintenus sur cette liste, s'ils y figurent déjà. V. Cass. 13 mai 1901 (sol. implic.) (S. et P. 1901.1.421; Pand. pér., 1901.7.80); 29 mars 1904, précité.

(3-4) Il est certain, d'une part, que le tiers électeur, qui ne s'est présenté devant le juge de paix que comme mandataire d'électeurs contestés et pour conclure en leur nom, et qui n'a figuré qu'en cette seule qualité dans la requête en cassation et dans la notification du pourvoi à d'autres tiers électeurs, constitués adversaires aux débats, eat sans qualité pour attaquer personnellement le jugement, à raison d'un grief qui le touche seul, et qui ne saurait être invoqué dans l'intérêt de ses mandants. V. en ce sens, Cass. 8 mai 1878 (motifs) (S. 1878.1.428. - P. 1878.1100); Faye, Man. de dr. élect., n. 223. D'autre part, c'est un principe constant que la nullité pour défaut d'avertissement ne peut être demandée que par la partie à l'égard de laquelle les prescriptions de la loi n'ont pas été observées, et non par les autres intéressés qui, ayant reçu l'avertissement, n'ont éprouvé aucun grief personnel de l'inaccomplissement de la formalité. V. Cass. 29 avril 1912 (S. et P. 1912. 1.285; Pand. pér., 1912.1.285), et la note,

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