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douin, ler prés.; Ditte, rapp.; Lombard, av. gén. (concl. conf.).

CASS.-CRIM. 19 mai 1911.

CHEMIN DE FER, VOITURES, VOYAGEURS, ANIMAUX, CHIEN, INTRODUCTION, InfracTION, FORCE MAJEURE, Motifs dE JUGEMENT OU D'ARRET, MOTIFS SUFFISANTS (Rép., vo Chemin de fer, n. 1625; Pand. Rép., Suppl., eod. verb., n. 402 et s.).

L'interdiction d'admettre des animaux dans une voiture servant au transport des voyageurs, formulée par l'art. 62 du décret du 1er mars 1901, implique nécessairement l'interdiction de les y introduire (1) (Décr., 1er mars 1901, art. 62).

Par suite, l'infraction à l'art. 62 du décret du 1er mars 1901 peut être relevée aussi bien contre les voyageurs que contre les agents des Comp. (2) (Id.).

Les juges qui, à des conclusions invoquant l'exception de force majeure, tirée par le voyageur inculpé de ce qu'il n'aurait introduit le chien dans une voiture de voyageurs que parce que la niche affectée au transport des chiens n'était pas désinfectée, répondent que cette circonstance, fut-elle établie, n'aurait pu constituer une contrainte irrésistible autorisant le prévenu à violer une règle de police, répondent ainsi par des motifs suffisants aux conclusions du prévenu, et justifient le rejet de l'exception de force majeure (3) (L. 20 avril 1810, art. 7; Décr., 1er mars 1901, art. 62).

(Petit).

M. Petit a été, par jugement du tribunal de police correctionnelle de Caen, qui a été confirmé par la Cour de Caen, le 26 mai 1900, condamné à 16 fr. d'amende, pour avoir, le 18 déc. 1909, à la gare de Caen, introduit avec lui un chien de chasse dans un compartiment où il avait pris place. L'arrêt de la Cour de Caen ayant été cassé pour défaut de motifs, par un arrêt du 8 déc. 1910 (Bull. crim., n. 609), la Cour de Rouen, saisie du renvoi, a rendu, le 27 janv. 1911, un arrêt, qui répond, par les motifs suivants, à une exception de force majeure, tirée par le prévenu de ce

(1-2-3) L'art. 67 de l'ordonnance du 15 nov. 1846 portait : « Aucun chien ne sera admis dans les voitures servant au transport des voyageurs ». L'art. 62 du décret du 1er mars 1901 (S. et P. Lois annotées de 1901, p. 33 ; Pand. pér., 1901.3.60 et 1902. 3.145), qui a modifié l'ordonn. du 15 nov. 1846, reproduisant cette défense, et l'étendant à tous les animaux, dispose: Aucun animal ne sera admis dans les voitures servant au transport des voyageurs.

Ce texte, pris stricto sensu, vise l'admission des animaux dans les voitures, c'est-à-dire le fait des agents de la Comp. de chemins de fer, auxquels il appartient de donner aux voyageurs l'accès des wagons; le voyageur, qui se présente avec un animal et le fait pénétrer dans un wagon, n'admet pas l'animal dans la voiture; il l'y introduit. Cette distinction, qui peut paraître subtile, est importante en matière pénale, où tout est de droit étroit, et où il est de principe que les peines ne

que, dans le train qu'il avait pris, la niche réservée aux chiens dans le fourgon n'aurait pas été désinfectée : : - « La Cour; -- Attendu que Petit, à défaut d'un compartiment pour chasseurs, n'avait que deux moyens légaux de ne pas se séparer de son chien: ou le faire voyager convenablement enfermé, en supposant, ce qui n'est pas prouvé, qu'il put être considéré comme un animal d'assez petite taille pour rentrer dans les prévisions du $3 de l'art. 62 du décret du 1er mars 1901, et que l'autorisation expresse exigée par cet article fut donnée, ou se réclamer de la faculté accordée par l'art. 36, 3, de l'instruction générale n. 3, lequel est ainsi concu: Enfin, les chefs de gare sont autorisés à placer dans des compartiments spéciaux les voyageurs qui ne voudraient pas se séparer de leurs chiens, lorsqu'ils en expriment le désir et offrent de payer le nombre de places fixé par l'art. 266 de l'instruction générale n. 2 »;

Attendu que Petit n'est pas fondé à invoquer un cas de force majeure; que, si la niche du fourgon n'était pas, ce qui paraît invraisemblable et n'est pas justifié, disposée de façon qu'un chien de chasse put y être logé convenablement, Petit n'avait qu'à adresser une réclamation à ce sujet, en temps utile; qu'il aurait été fondé peut-être à demander des dommages-intérêts; mais que rien ne pouvait l'autoriser à violer une règle formelle de police; qu'il allègue des prétextes et non une contrainte; qu'il n'en a subi aucune qui l'obligeat à faire monter son chien dans le compartiment de voyageurs où il l'avait mis; qu'il devait avoir recours à un des moyens réguliers ci-dessus énoncés; Par ces motifs; - Confirme, etc. ». POURVOI en cassation par M. Petit contre ce nouvel arrêt.

ARRET (apr. délib. en ch. du cons.).

LA COUR; Sur le premier moyen, pris de la violation de l'art. 62 du décret du 1er mars 1901, modifiant l'ordonnance du 15 nov. 1846, et du principe: nulla pœna sine lege, ainsi que de l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810, en ce que l'arrêt attaqué a condamné le demandeur pour avoir fait entrer un chien dans un compartiment

doivent pas être étendues par voie d'interprétation.

La Cour suprême, cependant, décide que l'interdiction d'admettre les animaux dans les voitures servant au transport des voyageurs implique nécessairement la défense de les y introduire ; cela paraît, en effet, logique, et conforme à l'intention des auteurs tant de l'ordonnance de 1846 que du décret de 1901, qui n'ont pas certainement entendu laisser sans sanction le fait par un voyageur d'introduire un animal dans une voiture de voyageurs, et qui ont dû tenir compte de ce que l'interdiction formulée par eux resterait dans la plupart des cas lettre morte, si une contravention ne pouvait pas être relevée contre le voyageur qui a introduit un animal dans un wagon. Toutefois, il eût été préférable que le texte fût rédigé d'une manière différente, et qu'il eût interdit en termes exprès aussi bien l'introduction que l'admission des animaux.

Le prévenu, dans l'espèce, invoquait une excep

servant au transport des voyageurs, alors que le texte susvisé prévoit seulement une obligation à la charge des Comp., celle de ne pas admettre d'animal dans les voitures servant au transport des voyageurs, et n'impose aucune obligation avec sancAttendu tion pénale aux voyageurs :que l'art. 62 du décret du 1er mars 1901 porte qu'aucun animal ne sera admis dans les voitures servant au transport des voyageurs ; que l'interdiction d'admettre des animaux dans une voiture servant au transport des voyageurs implique nécessairement l'interdiction de les y introduire qu'en conséquence, l'infraction à cette interdiction peut être relevée aussi bien contre les voyageurs que contre les agents des Comp. de chemins de fer; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé;

Sur le second moyen, pris de la violation de l'art. 64, C. pén., de l'art. 16 de la loi du 21 juill. 1881, du décret du 2 déc. 1902, de la loi du 12 janv. 1909 et de l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810, en ce que l'arrêt attaqué a écarté à tort l'exception de force majeure invoquée par le demandeur, et n'a pas répondu aux conclusions formelles prises par lui pour justifier cette force majeure: Attendu que

les conclusions du demandeur, relatives à la force majeure par lui alléguée, étaient prises de ce que la niche affectée au transport des chiens n'avait pas été désinfectée;

Mais attendu qu'à cette articulation, dont la preuve n'a été ni administrée ni mème offerte, la Cour d'appel a répondu que cette circonstance, à la supposer établie, n'aurait pas constitué une contrainte morale irrésistible, pouvant autoriser Petit à violer une règle de police; Attendu que la Cour d'appel a ainsi répondu complètement aux conclusions prises sur ce point par le demandeur, et que, loin d'avoir violé les textes visés au moyen, elle en a fait, au contraire, une exacte application; Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme, et que la peine a été légalement appliquée; - Rejette, etc.

Du 19 mai 1911.-Ch. crim. -- MM. Bard, prés.; Bourdon, rapp.; Eon, av. gén.; Talamon, av.

tion de force majeure; il prétendait faire résulter la force majeure de ce que la niche, installée dans le fourgon des bagages, dans laquelle régulièrement son chien aurait dû être placé, n'ayant pas été désinfectée, il avait été dans la nécessité d'introduire l'animal dans une voiture de voyageurs. Il ne pouvait faire difficulté que le prévenu n'était pas dans le cas d'invoquer la disposition de l'art. 64, C. pén., d'après laquelle il n'y a ni crime ni délit, lorsque le prévenu « a été contraint par une force à laquelle il n'a pu résister ». On ne pouvait faire rentrer dans l'application de cette disposition, et considérer comme une contrainte morale irrésistible, excluant toute responsabilité pénale, le danger que pouvait faire courir au chien le transport dans un fourgon qui n'aurait pas été désinfecté. L'arrêt attaqué fait observer d'ailleurs que le prévenu avait à sa disposition des moyens réguliers pour faire donner à son chien une place où il aurait été en sécurité.

CASS.-CRIM. 2 mars 1912. CASIER JUDICIAIRE, USURPATION DU NOM D'UN TIERS, RÉTRACTATION SPONTANÉE (Rép., vo Casier judiciaire, n. 213; Pand. Rép., Suppl., eod. verb., n. 1 et s.).

Celui qui, inculpé d'un délit, a pris le

(1) A deux reprises différentes, dans les notes sous les arrêts de Limoges, 21 mars 1901 (S. et P. 1902.2.29), et de Dijon, 17 mars 1904 (S. et P. 1906.2.33), nous nous sommes prononcés sur la question résolue par l'arrêt actuel, et nous avons indiqué nos préférences pour une opinion opposée à celle qu'il adopte. Malgré les raisons très sérieuses qui nous avaient conduit à penser que la rétractation du prévenu au cours de l'instruction ne laisse pas place au délit de l'art. 11 de la loi du 5 août 1899, modifié par la loi du 11 juill. 1900, nous devons reconnaître que le problème qui se posait devant la Cour de cassation est particulièrement délicat, et nous ne pouvons mieux faire, pour mettre nos lecteurs à même d'en connaitre tous les éléments, que de publier les observations suivantes, dans lesquelles notre distingué collaborateur M. Roux développe les motifs qui peuvent être invoqués en faveur de la doctrine de la Cour de cassation :

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La loi du 11 juill. 1900 attire à nouveau l'attention sur elle.

On sait que son art. 11 est ainsi conçu : « Quiconque aura pris le nom d'un tiers, dans des circonstances qui ont déterminé ou auraient pu déterminer l'inscription d'une condamnation au casier de ce tiers, sera puni de six mois à cinq ans d'emprisonnement.

Ce texte est-il applicable à l'individu qui, après avoir pris l'état civil d'un autre, se rétracte spontanément, et indique de lui-même son identité, avant qu'il en soit résulté aucun préjudice pour celui dont le nom a été usurpé? Dans l'espèce portée devant la Cour de cassation, il s'agissait d'un individu, poursuivi pour délit, qui avait donné le nom de son frère dans une enquête devant un commissaire de police, puis dans un interrogatoire d'identité devant un juge de paix, et qui s'était ensuite rétracté dès sa comparution devant le juge d'instruction. Peut-être paraîtra-t-il qu'en dépit d'une certaine persistance de la fraude, le délit, si délit il y a, était assez mince pour qu'on pût le laisser impuni, sans beaucoup troubler l'ordre social. Mais, des poursuites ayant été engagées, il devenait nécessaire de donner la signification de la loi du 11 juill. 1900. La Cour de cassation l'a fait, en affirmant l'existence du délit c'est ce qui nous semble exact.

En législation, c'est cependant à une solution opposée qu'il conviendrait de se rallier. Celui qui, après avoir usurpé le nom d'un tiers, se rétracte avant que sa fraude ait causé de préjudice, mérite de bénéficier d'une cause absolutoire. Il y a là un cas particulier d'une théorie plus générale, que la doctrine, principalement la doctrine étrangère, appelle théorie du repentir actif (V. not., C. Stoos, Die Grundzüge des Schweizerischen Strafrechts, t. 1, p. 466), et dont on trouve plusieurs applications dans notre Code pénal. La plupart des excuses absolutoires admises par ce Code reposent, en effet, sur la considération que les coupables bénéficient de celles-ci, lorsqu'ils ont effacé le tort que leur délit avait causé. Sans signaler l'art. 247, C. pén., qui n'applique que partielle. ment cette idée, puisqu'il ne se préoccupe pas, ANNÉE 1913. - 4° cah.

nom d'un tiers au cours d'une enquête faite par un commissaire de police, puis, après mandat d'arrêt décerné, dans l'interrogatoire d'identité par lui subi devant un juge de paix, tombe sous l'application de l'art. 11, sler, de la loi du 5 août 1899, modifié par la loi du 11 juill. 1900, alors même qu'il

pour éteindre l'action publique, de la personne qui a repris les prisonniers évadés, l'idée de repentir sert de fondement aux art. 108, 138, 144 et 266, C. pén., en matière de complots, de crimes de fausse monnaie, de faux, et d'association de malfaiteurs, pour exonérer de peine l'auteur de ces crimes, qui en révèle l'existence à l'autorité publique, ou lui facilite l'arrestation des coupables. On aperçoit la même idée de repentir, mais pour produire des effets moindres, et avec le caractère d'une excuse atténuante, dans l'art. 343, C. pén., en cas de crime d'arrestation illégale ou de séquestration, lorsque, avant le dixième jour, le criminel rend à la liberté la personne arbitrairement arrêtée ou séquestrée. Avec des effets au contraire plus étendus, à cause de l'absence de préjudice, c'est sur une présomption de repentir que l'art. 2, C. pén., déclare non punissable la tentative qui a été suspendue par une circonstance dépendante de la volonté de son auteur; que les art. 100 et 213, C. pén., exemptent de peines les auteurs de crimes de sédition ou de rébellion, qui se sont retirés dès le premier avertissement; et qu'enfin, l'art. 361, C. pén., laisse au faux témoin, qui s'est parjuré en faisant une déposition mensongère, le moyen de se rétracter avant la clôture des débats.

De ces applications, qui montrent qu'il a été souvent tenu compte du repentir, ou réel ou présumé, du délinquant, quoique peut-être d'une manière encore insuffisante, puisqu'elles sont toutes étrangères au domaine des infractions contre la propriété, la dernière hypothèse mérite de retenir l'attention. Il y a, en effet, entre le faux témoignage et la fausse déclaration d'identité, une certaine analogie. Les deux faits sont de nature voisine, et constituent des infractions pareilles : ce sont des délits contre l'administration de la justice, caractérisés par un manque de respect à son égard. Lorsque le faux témoignage est commis en faveur de l'accusé, il renferme, de plus, une aide donnée à un malfaiteur pour le faire échapper à une répression méritée. Or, c'est également pour éviter ou pour prévenir une aggravation méritée de peine que le malfaiteur, connaissant son passé ou prévoyant son avenir, prend le nom d'un tiers et se laisse condamner sous ce nom d'emprunt. Si donc l'indulgence de la loi est acquise au faux témoin qui se rétracte, bien qu'il soit tenu à un devoir plus étroit envers la justice, par son serment et par l'absence d'intérêt dans le procès, a fortiori cette même indulgence doit être accordée au dissimulateur, qui a commis son délit sous l'empire de sentiments plus naturels, puisqu'il y cherchait sa défense, et qui le répare à son propre détriment, en aggravant sa situation. L'existence d'une excuse absolutoire parait donc se justifier.

:

Mais il ne s'agit pas d'une question de législation il s'agit de l'interprétation de la loi positive, et, sur ce terrain d'examen, l'hésitation est permise; elle est même possible, puisque des divergences se sont produites en jurisprudence. V. dans le sens de l'arrêt ci-dessus, Dijon, 17 mars 1901, précité. Mais V. en sens contraire, Limoges, 21 mars 1901, précité, et la note sous Dijon, 17 mars 1904, précité.

Il est, en effet, certain que le législateur, lorsqu'il a modifié l'art. 11 de la loi du 5 août 1899,

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qu'il jugeait insuffisant, et qu'il l'a complété, dans la loi du 11 juill. 1900, par l'adjonction des mots : ou auraient pu déterminer, n'a pas vu la portée que prenait la modification du texte. Il a songé au cas où la fraude serait découverte, au cours de la procédure, malgré le coupable. Il n'a pas songé au cas où celui-ci, de lui-même, révélerait sa véritable identité. Il y aurait eu, en effet, de l'injustice à confondre ces deux hypothèses, même si on devait les punir toutes les deux, par une répression commune. Mais les travaux préparatoires s'opposent à cette confusion. Ils parlent de culpabilité qui n'est pas moindre que celle de l'individu dont la dissimulation a déterminé l'inscription de la condamnation sur le casier d'un autre, et de la nécessité de la même répression. Ce qui peut être dit pour le dissimulateur démasqué, non pour celui qui se rétracte volontairement. V. la note sous Dijon, 17 mars 1904, précité. Il n'en est pas moins vrai que les termes de la loi sont généraux, qu'ils ne distinguent pas, parmi les circonstances qui ont empêché l'inscription erronée d'avoir lieu, celles qui dépendent du prévenu, et qu'ils disent d'une manière aussi absolue que possible: dans des circonstances qui... auraient pu déterminer l'inscription au casier judiciaire » ; ce qui comprend tout individu qui a usurpé l'état civil d'un tiers, quelle que soit sa conduite ultérieure.

a

Il y a donc, entre l'esprit de la loi et sa lettre, une disparité manifeste; et l'on conçoit que l'on ait été embarrassé en pratique et même en doctrine.

Il est cependant un point que l'on peut, semblet-il, accepter. Si l'on est en présence d'un délit déjà consommé, quand, au cours de la poursuite, le dissimulateur avoue sa fraude, il ne saurait être question d'attacher à cet aveu, quelque spontané qu'il soit, la moindre diminution, même partielle, de peine. C'est qu'en effet, par hypothèse, un délit a été accompli; une responsabilité pénale est donc encourue. Pour que celle-ci disparaisse, il est nécessaire de trouver dans la loi une excuse. Il n'y a, en effet, d'excuse, absolutoire ou atténuante, que dans le cas où la loi l'a indiqué. C'est ce que dispose l'art. 65, C. pén., qui refuse au juge le pouvoir d'excuser le délit ou de mitiger la peine dans les autres cas. Or, l'art. 11 de la loi du 11 juill, 1900 ne contient aucune excuse en faveur de l'usurpateur qui se repent: il est muet à son égard. D'un autre côté, le repentir actif n'est pas un de ces principes de justice, dont on puisse dire, comme pour la démence et la contrainte, que leur admission dans certaines hypothèses implique virtuellement leur reconnaissance générale, et permet de leur donner leur domaine naturel, malgré les lacunes de la loi, comme on l'a fait sans hésiter pour l'art. 64, C. pén., étendu aux contraventions de simple police (V. Cass. 13 mars 1863, sol. implic., Bull. crim, n. 89; notre C. pén, annoté, par Garçon, sur l'art. 61, n. 5). Le repentir actif a été consacré par le législateur dans quelques cas seulement, et non pas même sous son nom: on ne saurait donc prétendre que celui-ci y a vu un principe général. C'est ce qu'a reconnu, d'une manière implicite, la Cour de cassation, dans une hypothèse qui mérite d'être rappelée, parce qu'elle présente une certaine analogie avec celle dont il s'agit ici. La circonstance que IT PART.

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violation de l'art. 11, 1er, de la loi du 5 août 1899, modifié par la loi du 11 juill. 1900: Vu l'art. II, 1er, de la loi du 11 juill. 1900, lequel dispose: Quiconque aura pris le nom d'un tiers, dans des circonstances qui ont déterminé ou auraient pu déterminer l'inscription d'une condamnation au casier judiciaire de ce tiers, sera puni d'une peine de six mois à cinq ans d'emprisonnement, sans préjudice des poursuites à exercer pour le crime de faux, s'il y échet »; Attendu que l'arrêt attaqué expose que, le 20 sept. 1911, Marquer (René), né le 31 janv. 1881 à

le faussaire, qui avait dissimulé son identité en prenant le livret militaire d'un tiers, s'était rétracté, n'a pas été retenue comme motif d'exonération de la responsabilité qu'il avait légalement encourue; et, en effet, il n'était pas possible de la retenir, dans le silence de la loi. V. Cass. 15 janv. 1898 (sol. implic.) (S. et P. 1899.1.64; Pand. pér., 1899.1.175).

Une objection toutefois peut être soulevée; c'est l'art. 361, C. pén., qui la fournit. Le faux témoin est exempt de toute peine, lorsque, déposant devant le tribunal, il rétracte ses déclarations mensongères avant la clôture des débats. C'est une solution qui ne fait de doute pour personne. V. Cass. 19 avril 1839 (S. 1839.1.325. P. 1839.2.71); 20 nov. 1868 (S. 1869.1.331. — P. 1869.807); 23 févr. 1871 (S. 1872.1.91. P. 1872. 183); 15 juin 1877 (S. 1878.1.329.- P. 1878.803); Grenoble, 24 avril 1896 (S. et P. 1897.2.239), et la note. Adde, Garraud, Tr. du dr. pén. fr., 2o éd., t. 5, n. 2018, p. 30 et 305; F. Hélie, Prat. crim., 2o éd., par Depeiges, 2° part., n. 831; notre C. pén. annoté, par Garçon, sur les art. 361 à 364, n. 84 et s.; et notre Rép. gén. du dr. fr., v° Faux témoignage, n. 101 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 72 et s. Cependant, il n'y a, ni dans ce texte ni dans un autre, aucune mention d'une excuse absolutoire.

Mais il convient d'observer que, dans la conception de notre droit positif, c'est moins sur une excuse absolutoire qu'est fondée l'impunité accordée au faux témoin que sur l'idée, moins bonne assurément, qu'il n'y a pas eu de consommation de délit, tant que la déposition n'est pas devenue irrévocable. Le témoin, qui, avant ce moment, revient sur ses déclarations, volontairement ou non, n'a pas commis de délit. Il est donc naturel que, malgré l'absence de toute excuse dans la loi, il échappe à une répression qui n'a été édictée que pour le délit consommé.

Pour étendre la même solution à l'hypothèse de l'art. 11 de la loi du 11 juill. 1900, il faudrait soutenir que le délit n'est pas encore consommé quand, avant l'inscription de la condamnation sur le casier d'un autre, le dissimulateur se rétracte. Ce qui amène à examiner la question, qui, à vrai dire, constitue toute la difficulté: A quel moment se consomme le délit de l'art. 11?

Il est un moment trop prématuré, à ce qu'il semble, qu'il convient d'abord d'écarter. On ne saurait, en effet, parler de consommation du délit, tant que le dissimulateur n'a pas pris l'identité d'un tiers au cours d'une poursuite judiciaire. En dehors de cette circonstance, la dissimulation pourra constituer un crime de faux, être punie sous cette qualification, mais elle ne tombera pas sous l'application de l'art. 11 de la loi du 11 juill. 1900; elle ne constitue pas le délit prévu par ce texte. Le contraire a cependant été affirmé par la Cour de cassation. V. Cass. 17 juin 1911 (S. et P. 1912.

Plouisy, a. dans une enquête faite par le commissaire de police de Saint-Amand, pris l'état civil de son frère Marquer (YvesMarie), né à Plouisy le 3 janv. 1883; que, mis en état d'arrestation, en exécution d'un mandat d'arrêt décerné contre lui par le juge d'instruction de Saint-Amand, sous prévention de complicité de vol, il a, dans un interrogatoire d'identité, subi, le 9 novembre, devant le juge de paix de Brezolles, donné ce même état civil; Attendu que ces constatations renferment les éléments constitutifs du délit prévu par le texte de loi précité; - Attendu, ce

1.65; Pand. pér., 1912.1.65). Mais il ne paraît pas que cet arrêt, déjà critiquable dans une de ses solutions, ait sainement interprété la loi de 1900 en ce qui concerne les éléments du délit que celleci réprime. Si la personne, devant qui la fausse déclaration d'identité est faite, magistrat instructeur ou officier de police judiciaire, importe assez peu, encore faut-il que la dissimulation se produise dans une information judiciaire ouverte; car ce n'est pas une hypothèse de faux en général que la loi de 1900 a entendu réprimer, mais un faux commis à la face de la justice, un manque de respect à son égard, ou, comme nous l'avons dit, un délit contre l'administration de la justice. V. aussi la note sous l'arrêt du 17 juin 1911, précité. En l'espèce, cette condition se trouvait réalisée. L'auteur de la dissimulation était sous le coup d'un mandat d'arrêt, lorsqu'il avait donné au juge de paix, chargé de vérifier son identité, le nom de son frère.

Au contraire, c'est prendre cette fois un moment trop tardif que de reculer la consommation du délit à l'instant où se produit le préjudice pour le tiers dont le nom a été usurpé. Cette condition, qui figurait dans la loi du 5 août 1899, n'est plus, depuis la loi du 11 juill. 1900, dans les éléments du délit. Les mots : ou auraient pu déterminer, ajoutés par cette dernière, exigent simplement un préjudice possible, un préjudice éventuel, comme il est d'ailleurs exigé, d'une manière générale, dans les crimes de faux. V. Cass. 22 mars 1890 (S. 1891. 1.48. P. 1891.1.77); 7 juill. 1899 (S. et P. 1902. 1.300; Pand. pér., 1901.1.305); 24 sept. 1908 (S. et P. 1912.1.606; Pand. pér., 1912.1.606), et la note. Pourrait-on cependant soutenir que cette éventualité du préjudice, qui suffit ordinairement à constituer le délit, cesse d'être punissable, parce qu'elle est inoffensive, quand elle disparaît par la volonté même du dissimulateur? Si la déclaration frauduleuse est incriminée à titre de délit consommé, il ne semble pas, à notre avis du moins, qu'il soit possible de répondre affirmativement; car les mêmes éléments matériels se rencontrent, et ils sont de tous points pareils, soit que le préjudice soit empêché par la découverte de la dissimulation, soit qu'il disparaisse par l'aveu du dissimulateur. Pareilles dans leur matérialité, ces deux hypothèses doivent être réunies dans leur traitement, comme elles le sont d'ailleurs dans le délit de faux témoignage, qui échappe à la répression, que la rétractation soit volontaire de la part du faux témoin, ou qu'elle soit amenée sur les observations du président du tribunal. V. Cass. 19 avril 1839, 20 nov. 1868, 23 févr. 1871, et Grenoble, 24 avril 1896, précités. Or, les joindre ici, c'est abolir la réforme législative accomplie en 1900, et revenir à la solution de la loi de 1899, c'est-à-dire exiger la réalité du préjudice. Si donc on est en face d'un délit consommé, il ne saurait dépendre du délinquant d'effacer la responsabilité qu'il a encourue,

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pendant, que l'arrêt attaqué a renvoyé Marquer René) de la poursuite, par le motif que, devant le juge d'instruction, il s'est spontanément rétracté, et que, par cette rétractation, il a lui-même fait manquer son effet à la tentative par lui commise; Mais attendu que l'art. 11, § 1or, de la loi du 11 juill. 1900 ne prévoit en aucune façon la rétractation du prévenu, et que celle-ci ne peut avoir d'effet sur le délit consommé; que, d'autre part, ledit article ne prévoit non plus, contrairement à ce qu'énonce l'arrêt, aucune tentative de délit, mais qu'il punit, comme auteur

dans le silence de la loi, et en dehors des hypothèses d'excuses autorisées par elle.

Mais, et c'est le dernier point qui reste à examiner, est-ce bien à titre de délit consommé que la loi du 11 juill. 1900 a incriminé l'usurpation du nom d'un tiers dans l'hypothèse qu'elle a ajoutée à la loi de 1899? Non, a-t-on prétendu, c'est à titre de tentative qu'elle l'a poursuivie, puisque aucun préjudice n'a été causé. Si la réponse est exacte, en voici les conséquences: il devient possible d'appliquer l'art. 2, C. pén., de séparer sans difficulté la tentative, qui a été suspendue par un fait volontaire de son auteur, et de réserver la répression pour le dissimulateur qui s'est obstiné dans la fourberie, en un mot, de mettre notre droit positif d'accord avec l'équité, et avec la solution rationnelle que l'examen du problème nous avait montrée. Or, cette réponse trouve un fondement dans les travaux préparatoires de la loi de 1900, qui, en visant l'hypothèse ajoutée au texte primitif. mentionnent expressément le terme de tentative. V. le rapport de M. Bérenger au Sénat (S. et P. Lois annotées de 1900, p. 1140, note 24).

Quelque sérieuses que soient les considérations qui précèdent, il n'a pas paru à la Cour de cassaqu'elle pouvait s'y rallier; elle ne l'a pas fait dans l'arrêt que nous reproduisons; et elle a eu raison. Assurément, il était possible, il était même préférable et plus simple que le législateur de 1900 réprimât seulement comme tentative l'usurpation de nom qui n'avait pas abouti à une inscription sur le casier judiciaire. Mais il s'agit de savoir s'il l'a fait, et s'il a réalisé l'intention que manifeste, très incidemment d'ailleurs, M. Bérenger dans son rapport. Or, rien ne permet de retrouver dans l'art. 11 la preuve de cette solution. D'une part, le mot de tentative ne figure pas dans son texte : ce qui eût été nécessaire. D'autre part, on a vu que l'éventualité du préjudice n'était pas, dans les crimes de faux, exclusive de la consommation du délit; et c'est une espèce de faux que réprime l'art. 11. Enfin, et ceci paraît décisif, la loi de 1900 a placé la seconde hypothèse qu'elle prévoyait, à côté de celle qui était déjà incriminée, comme un nouveau délit, et sans en faire la phase initiale de l'exécution d'une autre infraction; les deux parties du § 1er de l'art. 11 doivent donc être envisagées isolément, séparément, comme renfermant deux hypothèses distinctes de délit.

En somme, la solution de la jurisprudence paraît juridiquement exacte. Ce n'est pas qu'elle soit satisfaisante ou heureuse; et la conclusion qui se dégage de la discussion qui précède, c'est que le législateur ferait bien de revenir une seconde fois sur cette disposition de la loi du 5 août 1899 : en 1899, il n'avait pas été assez loin; l'année suivante, il a dépassé le but: l'arrêt actuel le lui montre nettement »,

J.-A. ROUX,

d'un délit consommé, quiconque aura pris le nom d'un tiers dans des circonstances qui auraient pu déterminer l'inscription d'une condamnation au casier judiciaire de ce tiers; qu'il s'ensuit qu'en déclarant que le prévenu ne tombait pas sous le coup de l'art. 11 de la loi du 11 juill. 1900, tout en établissant qu'il avait pris le nom d'un tiers dans une information ouverte contre lui du chef de complicité de vol, l'arrêt attaqué s'est mis en contradiction avec ses propres constatations, et a violé le texte visé au moyen; - Casse l'arrêt du 11 janv. 1912, par lequel la Cour d'appel de Bourges a acquitté Marquer (René), etc.

Du 2 mars 1912. Ch. crim. - MM. Bard, prés.; Herbaux, rapp.; Eon, av. gén.

CASS.-CRIM. 29 décembre 1910.

PARTIE CIVILE, ARRÈT DE NON-LIEU, POURVOI EN CASSATION, RECEVABILITÉ, POURVOI DU MINISTÈRE PUBLIC (Rép., v° Action civile, n. 824 et s.; Pand. Rép., v° Action publique, n. 62 et s., 179 et s.).

Si la partie civile est sans qualité pour former seule un pourvoi contre les arrêts de non-lieu rendus par la chambre des mises en accusation, sauf le cas où il s'agirait de faire tomber des condamnations civiles prononcées à son encontre, elle est, au contraire, recevable, en principe, à se pourvoir contre ces arrêts, lorsqu'ils sont attaqués par le ministère public, dont l'in

(1) Sur le droit pour la partie civile d'user des voies de recours, spécialement de l'appel, contre un jugement de relaxe, lorsque l'action publique est éteinte faute de recours formé par le ministère public, V. la note de M. Roux sous Cass. 30 janv. 1909 (S. et P. 1912.1.233; Pand. pér., 1912.1.233). Une question analogue se pose à propos des décisions des juridictions d'instruction; l'arrêt actuel la soulève relativement aux arrêts de non-lieu de la chambre des mises en accusation. La Cour de cassation y rappelle d'abord le principe, consacré par un très grand nombre d'arrêts, que, hormis le cas où une condamnation à des dommages et intérêts a été prononcée contre la partie civile, celle-ci est irrecevable à se pourvoir isolément contre un arrêt de non-lieu. V. not., Cass. 28 avril 1892 (S. et P. 1892.1.428), et les renvois; 29 avril 1893 (S. et P. 1893.1.336); 2 janv. et 1er mai 1896 (S. et P. 1896.1.112 et 300; Pand. pér., 1897.1.303 et 44); 2 sept. 1898 (S. et P. 1901.1.199); 12 mai 1899 (S. et P. 1900.1.544); 9 mai 1901 (S. et P. 1904.1.207; Pand. per., 1901.1.308), les notes et renvois; 27 janv. et 24 nov. 1910 (Bull. crim., n. 34 et 581). Mais, à cette solution, la Cour de cassation apporte une exception nouvelle, et admet encore, dans l'arrêt actuel, le pourvoi de la partie civile, lorsque le ministère public s'est lui-même pourvu contre l'arrêt de non-lieu; alors, l'action publique n'étant pas éteinte, grâce au pourvoi du ministère public, la partie civile échappe à la fin de non-recevoir déduite de l'art. 3, C. instr. crim.

Le nouveau tempérament apporté par la jurisprudence à la règle de la non-recevabilité du pourvoi de la partie civile contre les arrêts de non-lieu paraît donc logique; et, certainement, il conduit à un résultat pratiquement satisfaisant,

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LA COUR; Sur la recevabilité du pourvoi formé par Berger, partie civile : Attendu que, si la partie civile est sans qualité pour former seule un pourvoi contre les arrêts de non-lieu rendus par la chambre des mises en accusation, sauf le cas où il s'agirait de faire tomber des condamnations civiles prononcées à son encontre, elle est au contraire recevable, en principe, à se pourvoir contre ces arrêts, lorsque ceux-ci sont attaqués par le ministère public, dont l'intervention met obstacle à l'extinction de l'action publique; Et attendu que le procureur général près la Cour d'appel de Riom s'est pourvu contre l'arrêt de la chambre des mises en accusation de cette Cour, disant qu'il n'y avait lieu de suivre contre Bouchet; Déclare recevable le pourvoi formé par Berger, partie civile, contre ledit arrêt, en date du 12 juill. 1910, etc.

Du 29 déc. 1910. Ch. crim.- MM. Bard, prés.; Bourdon, rapp.; Eon, av. gén.; Durnerin et Tétreau, av.

:

CASS.-CRIM. 5 août 1911. CASSATION, MATIÈRE REPRESSIVE, POURVOI, FORMES, DÉLAI, MISE EN LIBERTÉ, LETTRE MISSIVE, DÉCLARATION AU GREFFE (DÉFAUT DE), FIN DE NON-RECEVOIR (Rép., v° Cassapuisqu'il conserve à la partie civile le bénéfice de l'action qu'elle a introduite devant la juridiction répressive, et que, de plus, il maintient, aux côtés du ministère public, la partie civile, qui peut lui faciliter la démonstration de la culpabilité du prévenu. Une raison de douter se présente cependant c'est qu'il est de principe que les droits d'une partie d'exercer une voie de recours dépendent de la nature de ces droits, ainsi que du ca ractère du jugement qui est attaqué, et non pas de l'exercice qu'une autre partie ferait de ses propres droits. Comp. Cass. 13 nov. 1833 (S. 1834. · P. chr.); Rodière, Cours de compét, et de proc., 4o éd., t. 2, p. 70; Garsonnet, Tr. de proc., 2 éd., par Cézar-Bru, t. 5, p. 781, § 2046. Cet exercice peut bien, à la vérité, influer sur l'exercice que la première pourrait faire de ses propres droits (arg. C. instr. crim., 3); mais il ne peut exercer d'influence sur l'existence même de ces droits, dont l'attribution est faite par le législateur, lequel, dans le cas particulier dont il s'agit, a refusé à la partie civile, non condamnée, de se pourvoir contre un arrêt de non-lieu (arg. C. instr. crim., 299 et 412). Dans l'opinion adoptée par la Cour de cassation, le droit de la partie civile de se pourvoir, ne lui appartenant donc pas en propre, hormis le cas où une condamnation à des dommages et intérêts a été prononcée contre elle, résulterait, en réalité, du pourvoi formé par le ministère public. L'objection n'a pas paru décisive à la jurisprudence; elle existe cependant.

1.23.

(2-3) Il semble qu'une solution différente aurait pu être soutenue. Il est, sans doute, de principe que les condamnés non détenus doivent déclarer au greffe leur intention de se pourvoir en cassation contre l'arrêt qui les condamne, et que rien ne supplée cette formalité, qui assure l'authenticité

tion [mat. crim., n. 214 et s.; Pand. Rép., vo Cassation criminelle, n. 479 et s.).

Le condamné mis en liberté avant l'expiration du délai fixé par l'art. 373, C. instr. crim., doit former son pourvoi conformement à l'art. 417 du même Code (2) (C. instr. crim., 417).

Une lettre, adressée par le condamné détenu au procureur de la République avant sa mise en liberté, et manifestant l'intention de se pourvoir, ne saurait tenir licu de la déclaration au greffe, alors qu'il n'apparait pas que le condamné se soit trouvé, après sa sortie de prison, dans l'impossibi lité de remplir, dans le délai prescrit, cette formalité (3) (Id.).

(Calbrix). ARKET.

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LA COUR: Vu l'art. 417, C. instr. crim.: Attendu que, par lettre du 23 juin 1911, Berthe Calbrix a fait connaitre au procureur de la République près le tribunal de Rouen qu'elle entendait se pourvoir en cassation contre un jugement du 22 juin, par lequel ce tribunal l'a condamnée à sept amendes de 2 fr. et à sept peines d'un jour d'emprisonnement; que la demanderesse était alors détenue, mais qu'elle a été mise en liberté le 25 juin, avant l'expiration du délai fixé par l'art. 373, C. instr. crim.: que, néanmoins, elle ne s'est pas présentée au greffe pour y réaliser, conformément à l'art. 417, C. instr. crim., l'intention de se pourvoir, qu'elle avait manifestée; que, d'ailleurs, il n'apparaît pas que Berthe Calbrix se soit trou

de la déclaration, ni lettre missive ni télégramme adressé au procureur général ou au greffier. V. Casɛ. 5 déc. 1896 (S. et P. 1897.1.423; Pand. pér., 1898. 1.368); 28 oct. et 4 nov. 1899 (2 arrêts) (S. et P. 1902.1.207); 13 juill. 1900 (S. et P. 1908.1.104: Pand. pér., 1903.1.368); et le rapport de M. Ruben de Couder sous Cass. réun., 10 févr. 1909 (S. et P. 1909.1.116; Pand. pér., 1909.1.116). V. aussi, Cass. Belgique, 17 janv. 1910 (S. et P. 1910.4.16; Pand. pér., 1910.4.16), et la note. Mais il est reconnu également que cette règle est tempérée pour les condamnés détenus, et que, si ceux-ci ne sont pas amenés au greffe, l'intention de se pourvoir, qu'ils manifestent dans les délais au moyen d'une lettre adressée au greffier ou au ministère public, équivaut à la déclaration au greffe. V. Cass. 5 déc. 1896, précité, et la note. Adde, le rapport précité de M. Ruben de Couder. Or, le bénéfice de cette exception apportée à la règle pourrait, semble-t-il, être étendu à celui qui est détenu au moment de sa condamnation, encore qu'il soit remis en liberté avant l'expiration du délai fixé dans l'art. 373, C. instr. crim. En manifestant son intention de se pourvoir, par lettre adressée au procureur général, alors qu'il était détenu, il a fait un acte utile; il ne peut donc pas se faire que cet acte utile se transforme en acte inutile, ex post facto, par la mesure prise par le ministère public. Comp. Cass. 29 déc. 1906 (S. et P. 1907.1.63). Mais la Cour de cassation applique restrictivement l'exception qu'elle a jusqu'ici apportée à l'art. 417, C. instr. crim. il n'y a pas pour le condamné impossibilité absolue de satisfaire à l'exigence de cet article; remis en liberté avant l'expiration du délai imparti pour se pourvoir, il pouvait se présenter au greffe et y renouveler sa déclaration dans les formes légales.

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Si, aux termes de l'art. 151, C. instr. crim., l'opposition emporte citation à la première audience, et si elle est réputée non avenue, lorsque l'opposant ne s'y présente pas, la déchéance, pour être encourue, a besoin d'être prononcée; el, s'il n'est pas intervenu, à cette première audience, de jugement de débouté d'opposition, l'opposant qui ne s'y est pas présenté ne peut être débouté ultérieurement de son opposition qu'après avoir été régulièrement cité à comparaitre à une autre audience (1) (C. instr. crim., 151, 188).

(Robert). ARRÊT

(apr. délib. en ch. du cons.).

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LA COUR; Sur le moyen pris de la violation des art. 145, 151, C. instr. crim., et des droits de la défense, en ce que, le demandeur ayant déclaré opposition le 24 déc. 1910, sa déclaration valait citation seulement pour la plus prochaine audience, qui a été tenue le 7 janv. 1911, et non pour celle du 21 janv. 1911, où, néanmoins, sans autre citation préalable, est intervenu le jugement de débouté d'opposition; Vu lesdits articles; Attendu, en droit, que si, aux termes de l'art. 151, C. instr. crim., l'opposition emporte citation à la première audience, et si elle est réputée non avenue, lorsque l'opposant ne s'y présente pas, la déchéance, pour être encourue, a besoin d'être prononcée; que, s'il n'est alors intervenu ni débouté d'opposition, ni remise à jour déterminé, l'opposant n'est pas tenu de se présenter à toutes les audiences qui suivent; que le principe général, qui veut que

(1) Bien que l'art. 151, C. instr. crim., en matière de simple police, — et, en matière correctionnelle, l'art. 188,-- déclarent que l'opposition emportera de droit citation à la première audience, et qu'elle sera non avenue, si l'opposant n'y compaparaît pas, néanmoins, il est admis que la déchéance, pour être encourue, a besoin d'être prononcée. V. Cass. 4 juin 1829 (S. et P. chr.); 26 avii! 1860 (S. 1860.1.926. - P. 1861.1121); 9 mars 1889 (S. 1889.1.446.-P. 1889.1.1087; Pand. pér., 1889. 1.242). Adde, la note sous Cass. 23 nov. 1906 (S. et P. 1908.1.439; Pand. pér., 1908.1.439). Dès lors, la déchéance n'est encourue que si elle est requise par les parties adverses. V. Cass. 4 juin 1829, et 26 avril 1860, précités. Et, d'autre part, si l'affaire n'a pas été appelée à cette audience,

--

nul ne soit jugé sans être entendu ou appelé, reprend toute sa force, aussi bien en faveur de l'opposant qu'à l'égard des autres parties; Attendu, en conséquence, que, si l'opposant ne s'est pas présenté à la première audience, il ne peut être débouté de son opposition qu'après avoir été réguliè rement cité à comparaître; Attendu, en fait, que Robert, condamné par défaut à 1 franc d'amende par jugement du tribunal de simple police de Nice, du 11 juin 1910, a fait opposition à ce jugement le 24 déc. 1910: qu'il ne s'est pas présenté le 7 janv. 1911, à la première audience qui a suivi son opposition, et que, ledit jour, la déchéance n'a pas été prononcée, ni l'affaire remise à un jour déterminé; Attendu que, sans qu'aucune citation lui ait été donnée pour le 21 janv. 1911, le demandeur a été cependant débouté par défaut de son opposition, sans avoir su qu'il était appelé à comparaitre à cette date devant le tribunal de simple police de Nice, et sans avoir pu présenter ses moyens de défense; D'où il suit qu'en déclarant non avenue, dans les circonstances prérappelées, l'opposition de Robert au ju gement par défaut du 11 juin 1910, le jugement du 21 janv. 1911 a formellement violé les dispositions légales visées au moyen et les droits de la défense;

Casse le jugement rendu le 21 janv. 1911 par le tribunal de simple police de Nice, etc.

Du 19 oct. 1911. Ch. crim. MM. Bard, prés.; Bourdon, rapp.; Séligman, av. gén.

CASS.-CRIM. 17 novembre 1911.

1° CASSATION, POURVOI, JUGEMENT DU TRIBUNAL DE SIMPLE POLICE, MÉMOIRE SUR PAPIER LIBRE, FIN DE NON-RECEVOIR (Rép., vo Cassation [mat. civ.], n. 1866; Pand. Rép., v Cassation [timbre et enregistrement], n. 18, 25). 20 RÈGLEMENT DE POLICE OU MUNICIPAL, ARRÊTÉ MUNICIPAL, MANIFESTATIONS RELIGIEUSES, INTERDICTION, SOCIÉTÉ DE GYMNASTIQUE, MINISTRE DU CULTE, FÈTE DE JEANNE D'ARC, CONTRAVENTION (ABSENCE DE) (Rép., vo Règlement de police ou municipal, n. 571 et s.; Pand. Rép., v Arrêté municipal, n. 304, 395 et s.).

1 En matière de simple police, sont non recevables les moyens de cassation formulés

ou la déchéance requise, l'opposition ne peut être vidée qu'après que l'opposant aura été régulièrement appelé au moyen d'une citation. V. Cass. 9 mars 1889, précité, et les renvois. C'est ce que décide à nouveau l'arrêt ci-dessus en matière de contravention de simple police.

(2) En matière de simple police (V. Cass. 2 févr. 1907, Bull. crim., n. 60), comme en matière correctionnelle (V. Cass. 12 janv. 1901, S. et P. 1904.1.251; Pand. per., 1902.1.445, et la note), les requêtes en pourvoi doivent être réligées sur timbre, à défaut de quoi elles ne sont pas recevables mêmes arrêts. Adde, Maguéro, Tr. des dr. d'enreg., 2e éd., t. 1, v° Cassation (Cour de), n. 13. Mais la Régie admet que la formalité peut être donnée en débet, au moyen du visa pour

par le condamné dans une requête non écrite sur papier timbré (2) (L. 13 brum. an 7, art. 24).

20 Ne constitue pas une contravention à un arrêté municipal interdisant les manifestations religieuses sur la voie publique le fait par un prêtre, d'avoir, le jour de la féle de Jeanne d'Arc, à l'issue de la grand'messe, à laquelle assistait une société de gymnastique, reformé cette société devant la porte de l'église, et d'avoir, accompagné par ses membres et par d'autres personnes, regagné le presbytère au son des tambours et des clairons (3) (C. pén., 471, n. 15).

Pour l'application de l'arrêté municipal. le parcours effectué par la société de gymnastique sur la voie publique ne devait être envisagé qu'en lui-même, et indépendamment de toute circonstance extrinsèque, et il est demeuré licite, dès lors qu'il n'a été accompagné d'aucune démonstration extérieure de croyances religieuses (4) (Id.).

(Abbé Robillard).

ARRÊT

(apr. délib. en ch. du cons.).

LA COUR; Vu la requête produite par le demandeur; Attendu qu'aux termes de l'art. 1er de la loi du 13 brum. an 7, la contribution du timbre est établie sur tous les papiers destinés aux actes judiciaires; que l'art. 24 de la même loi défend aux juges de prononcer aucun jugement sur un acte écrit sur papier non timbré; Attendu que le demandeur a présenté ses moyens dans une requête écrite sur papier non timbré; qu'il y a donc lieu de déclarer ces moyens non recevables; Déclare non recevables les moyens proposés par Robillard à l'appui de son pourvoi;

Mais sur le moyen relevé d'office, et pris de la violation, par fausse application, de l'art. 471, n. 15, C. pén., et de l'art. 1er de l'arrêté du maire de la commune de Carrouges, du 12 oct. 1909, en ce que les faits retenus à la charge du demandeur n'auraient pas constitué une manifestation religieuse pouvant tomber sous l'application dudit arrêté; — Vu l'art. 1er de cet arrêté, lequel est ainsi conçu : • Toute procession, toute manifestation religieuse, sauf en ce qui concerne les convois funèbres et le port du viatique, est, jusqu'à nouvel ordre, interdite sur le territoire de la commune de Carrouges »; Attendu qu'après avoir constaté, en fait, qu'il résulte d'un procès-verbal de gendarmerie, dressé

timbre, lorsqu'il n'y a pas de partie civile poursuivante. V. Sol. Régie, 18 juill. 1881 (Journ. de l'enreg., n. 22094; Rép. pér. de Garnier, n. 5826).

(3-4) La Cour de cassation décide, avec raison, semble-t-il, que le caractère d'une manifestation doit être recherché uniquement dans les faits qui la constituent, et non pas dans des circonstances extrinsèques qui la précèdent (ou la suivent); distinctes de la manifestation, ces circonstances ne sauraient, en effet, lui être incorporées, ni servir à déterminer sa nature. V. Cass. 20 mars 1902 (S. et P. 1963.1.380), la note et les renvois. V. aussi, dans une hypothèse fort voisine, Cass. 20 janv. 1888 (S. 1888.1.141. P. 1888.1.316; Pand. pér., 1888.1.131).

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