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LA COUR:- Sur le moyen unique, pris de la violation de l'art. 580, C. proc., de l'art. 1er de la loi du 21 vent. an 9, et de l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810: tendu que, lorsqu'elle a soustrait en majeure partie à l'action de ses créanciers le traitement du fonctionnaire public, la loi du 21 vent. an 9 a eu pour but d'assurer convenablement les moyens d'existence de ce fonctionnaire et ceux de sa famille, qui se confondent avec les siens propres; qu'ainsi, ayant un caractère essentiellement alimentaire, la portion réservée du traitement constitue, le cas échéant, au même titre que la partie saisissable, et dans la mesure qu'il appartient aux tribunaux de déterminer, le gage des créanciers d'aliments », qui ne sauraient être assimilés à des créanciers ordinaires, ni

premiers 1.000 fr., d'un quart sur les 5.000 fr. suivants, et d'un tiers sur le surplus; mais elle n'a rien spécifié quant au droit de saisie des créanciers à l'égard desquels existe une obligation alimentaire. La chambre des requêtes, et avec grande raison, n'en a pas moins reconnu à la femme d'un fonctionnaire, créancière d'une pension pendant l'instance en divorce, le droit de saisir la moitié de la portion insaisissable du traitement de son mari; elle décide que ce traitement tout entier, et notamment la partie insaisissable, a pour but d'assurer l'existence du fonctionnaire et de sa famille, et que la femme et les enfants, créanciers d'aliments, ne peuvent se voir opposer une règle établie à leur profit comme au profit du fonctionnaire lui-même. Cette solution est très exacte. Il est certain, en effet, que les aliments dus à la femme et aux enfants doivent être prélevés sur le traitement entier, et non seulement sur la portion saisissable; la portion que la loi de l'an 9 a rendue insaisissable a pour but de sauvegarder l'existence, non des seuls fonctionnaires, mais aussi de leurs familles; si un droit de saisie n'existait pas sur tout le traitement au profit de la femme et des enfants du fonctionnaire, la loi de l'an 9 aboutirait à exonérer en fait celui-ci presque complètement, au cas d'abandon de fait ou d'instance en divorce ou en séparation, des charges de famille qui lui sont imposées par le Code civil. La solution que vient d'admettre la chambre des requêtes a été déjà admise, d'ailleurs, par plusieurs arrêts de Cours d'appel et par la plupart des auteurs. V. Paris, 18 août 1842 (S. 1844.2.187.

P. 1843.1.152) (pension alimentaire après séparation de corps); Bordeaux, 12 juill. 1880 (S. 1881.2.106.-P. 1882.1.577) (pension alimentaire pendant l'instance en séparation de corps); Alger, 29 févr. 1912 (Infra, 2° part., p. 54) (pension alimentaire pendant l'instance en divorce). Adde, les auteurs cités en note sous Cass. Belgique, 14 janv. 1892 (S. et P. 1892.4.34); et Garsonnet, Tr. de proc., 2e éd., par Cézar-Bru, t. 4, § 1292; Dodo, op. cit., n. 110. V. au surplus, notre C. proc. annoté, par Tissier, Darras et Louiche-Desfontaines, sur l'art. 580, n. 25 et s.; et notre Rép. gén. du dr. fr., v° Saisie-arrêt, n. 413 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 870 et s.

La solution contraire a cependant été préférée par la Cour de cassation de Belgique, dans son arrêt du 14 janv. 1892, précité (pension alimentaire après séparation de corps). Adde dans le même sens, Paris, 10 août 1882 (S. 1883.2.125. P. 1883.1.696) (pension alimentaire pendant l'ins

se voir opposer une interdiction destinée à leur profiter comme au fonctionnaire luimême; Attendu qu'il suit de là qu'en validant, à concurrence de la moitié des quatre cinquièmes, non frappés d'opposition, du traitement de percepteur de l'exposant, les saisies arrêts pratiquées à la requête de sa femme, pour avoir paiement de la pension à elle allouée au cours de son instance en divorce, afin de subvenir à ses besoins et à ceux des enfants issus du mariage, dont la garde lui avait été confiée, l'arrêt attaqué, qui est dûment motivé, n'a violé aucun des articles de loi visés au moyen; Rejette le pourvoi formé contre l'arrêt rendu par la Cour de Dijon le 25 juill. 1910, etc.

Du 27 avril 1911. Ch. req. - MM. Tanon, prés.; Michel-Jaffard, rapp.; Blondel, av. gén. (concl. conf.); Balliman, av.

tance en séparation de corps); Trib. de la Seine, 10 févr. 1899 (Journ. des avoués, 1899, p. 470); et Roger, Saisie-arrêt, 2o éd., n. 302; Leurquin, op. cit., n. 602. On s'est d'abord appuyé, pour la soutenir, sur le texte de la loi de l'an 9, qui, a-t-on dit, ne contient aucune distinction. Mais l'argument est sans valeur, si on admet, comme nous, qu'il y a un principe supérieur d'affectation de tout traitement ou salaire à la subsistance, non du seul fonctionnaire, employé ou ouvrier, mais encore de sa famille. Qu'importe, des lors, qu'il n'y ait pas de texte formel donnant le droit de saisie à la femme du fonctionnaire? Tout le droit n'est pas dans les textes: il n'est pas besoin d'un texte pour dire que le traitement du fonctionnaire, comme le salaire de l'ouvrier, doit servir à faire vivre la femme et les enfants, et que, par suite, la femme et les enfants ont un droit exceptionnel de saisie.

Mais on a insisté surtout sur ce que le traite. ment du fonctionnaire n'a été rendu insaisissable que dans l'intérêt public, en vue d'assurer la continuité du fonctionnement des services publics, malgré les saisies faites par les créanciers des fonctionnaires; on invoque à cet égard les déclarations faites lors du vote de la loi du 21 vent. an 9. V. ces déclarations, citées par M. le procureur général Mesdach de ter Kiele dans ses conclusions, reproduites avec Cass. Belgique, 14 janv. 1892, précité. V. aussi, Leurquin, op. cit., n. 590. Ce motif n'a rien de probant. Sans doute, on a voulu, en établissant l'insaisissabilité partielle du traitement, assurer au fonctionnaire, poursuivi par ses créanciers, les moyens de subsister et de continuer son service; mais l'intérêt public de la continuité du service n'exclut en rien l'affectation familiale du traitement; l'insaisissabilité les sauvegarde à la fois l'un et l'autre. Il n'est pas nécessaire, pour que le service public soit assuré, que le fonctionnaire garde pour lui seul la partie insaisissable de son traitement, en abandonnant sa femme et ses enfants. La loi a voulu que le fonctionnaire endetté pût, en même temps, continuer son service et entretenir sa famille. C'est au juge d'apprécier quelle doit être, en cas de séparation de fait ou de séparation de corps, ou d'instance en divorce ou en séparation, l'étendue du droit de saisie de la femme et des enfants; comme aussi ce serait à lui d'apprécier quel devrait être le droit de saisie des ascendants auxquels des aliments seraient dus; le juge pourrait même, dans certains cas, en présence des charges de famille du fonctionnaire ou de l'employé, refuser tout

CASS.-REQ. 12 juin 1907.

ACTE DE COMMERCE, ÉLEVAGE DE poulets POUR LA VENTE, COMMERÇANT, FAILLITE, POUVOIR DU JUGE (Rép., vis Acte de commerce, n. 156 et s., Commerçant, n. 80 et s.; Pand. Rép., vis Acte de commerce. n. 167 et s., Commerçant, n. 106 et s.).

Les juges du fond, qui constatent que l'industrie d'un individu consiste dans l'élevage et la vente de poulets, sans que cette industrie constitue l'exploitation d'un fonds agricole, et qu'il achète tout ce qui lui est nécessaire pour l'élevage et la nourriture des animaux qu'il vend, en se livrant ainsi à un véritable trafic, déduisent à bon droit de ces constatations souveraines que cet individu est commerçant, et peut être déclaré en faillite (1) (C. comm., 1, 437, 632, 638).

droit de saisie aux ascendants. La saisie faite par les créanciers d'aliments ne produit d'effet que dans la mesure fixée par le juge; ce contrôle du juge est une garantie que le fonctionnaire conservera ce qui est indispensable pour sa subsistance, et par suite pour la continuité du service.

Si quelque doute a pu exister sur l'interprétation de la loi du 21 vent. an 9, quant au droit de saisie de la femme ou des enfants du fonctionnaire sur le traitement de leur mari ou de leur père, il nous semble, en tous cas, qu'aucune hésitation n'est plus possible depuis la loi du 13 juill. 1907; cette loi pose une règle générale, qui s'applique aux fonctionnaires, employés, ouvriers, comme aux autres travailleurs; elle permet de saisir une part, fixée par le juge, dans le produit du travail de l'époux qui n'exécute pas spontanément les obligations résultant pour lui du mariage. Cette règle générale doit mettre fin à toute discussion! La femme d'un fonctionnaire peut saisir une part du traitement de son mari, même de la portion qui est insaisissable à l'égard des créanciers ordinaires. Elle peut user pour cette saisie de la procédure simple et rapide établie par la loi du 13 juill. 1907. Dans l'espèce ci-dessus, la pension alimentaire une fois fixée pour la durée de l'instance en divorce, la femme aurait pu, au lieu de suivre la procédure ordinaire de saisie-arrêt, demander au juge de paix d'ordonner la saisie d'une partie du traitement de son mari. V. la note sous Trib. de paix de Saint-Nazaire, 26 juill. 1909 (S. et P. 1910.2.322; Pand. pér., 1910.2.322). ALBERT TISSIER.

(1) L'élevage, combiné, comme il l'est généralement, avec l'exploitation d'un domaine agricole, n'a point le caractère commercial. V. Orléans, 28 juill. 1887 (S. 1890.2.42. P. 1890.1.231). Adde, notre Rép. gén. du dr. fr., vo Commerçant, n. 80; Pand. Rep., eod. verb., n. 112. Il en est notamment ainsi des opérations du propriétaire ou du fermier d'un domaine agricole, qui achète des animaux pour les revendre après les avoir engraissés au moyen des produits de ses terres. V. Cass. 7 avril 1869 (S. 1869.1.312. - P. 1869.776); Dijon, 11 mars 1881 (S. 1881.2.156. P. 1881.1.822; Pand. chr.); Bourges, 9 févr. 1885 (S. 1885.2.216.

P. 1885.1.1249; Pand. chr.), les notes et les renvois. Adde, Lyon-Caen et Renault, Tr. de dr. comm., 4o éd., t. 1o, n. 116, p. 130, note 1; notre C. comm. annoté, par Cohendy et Darras, sur l'art. 638, n. 11 et s.; et notre Rép. gén. du dr. fr., v° Acte de commerce, n. 156; Pand. Rép., eod. verb., n. 167 et s. La

(De Fossey C. Synd. de Fossey).

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ARRÊT.

LA COUR; Sur le moyen unique du pourvoi, pris de la fausse application de l'art. 632, C. comm., et manque de base légale : Attendu qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que de Fossey exploite à Saint-Servan une industrie consistant dans l'élevage et la vente de poulets d'une race spéciale, qu'il prétend avoir créée; que cette industrie ne constitue pas l'exploitation d'un fonds agricole; que de Fossey est obligé d'acheter tout ce qui lui est nécessaire pour l'élevage et la nourriture des animaux qu'il vend, et qu'il se livre ainsi à un véritable trafic; Attendu

que, de ces constatations souveraines, l'arrêt a pu conclure à juste titre que le demandeur était commerçant, et confirmer par suite le jugement qui avait prononcé sa faillite; que, ce faisant, loin de violer l'article de loi susvisé, l'arrêt en a fait une juste application; Rejette le pourvoi formé contre l'arrêt rendu par la Cour de Rennes, le 2 avril 1906, etc.

Du 12 juin 1907. Ch. req. MM. Tanon, prés.; Bulot, rapp.; Bonnet, av. gén. (concl. conf.); de Lalande, av.

CASS.-civ. 9 avril 1913.

1o ET 3° CASSATION, CONTRARIÉté de jugeMENTS, APPEL, Désistement, ACCEPTATION (DÉFAUT d'), Pièces nouvelles, ProducTION (Rép., v° Cassation [mat. civ.], n. 3447 et s.; Pand. Rép., vo Cassation civile,

raison en est que ce sont là des opérations qui sont l'accessoire de l'exploitation agricole des terres et qui participent de son caractère. V. Cass. 7 avril 1869; Dijon, 11 mars 1881; Bourges, 9 févr. 1885, précités.

Mais l'élevage ou l'engraissement des animaux prend un caractère commercial, quand ces opérations, pratiquées dans un but purement spéculatif, ne sont pas l'accessoire d'une exploitation agricole. C'est ce qui a été jugé pour le marchand de bestiaux qui achète des bêtes maigres pour les revendre engraissées, alors que, ses propres herbages ne suffisant pas pour nourrir et engraisser tous ces bestiaux, il en prend à ferme de beaucoup plus considérables dans cet unique but (V. Caen, 14 janv. 1840, S. 1840.2.201. P. 1843.1.547); et pour le meunier qui achète des porcs pour les revendre après les avoir engraissés des résidus de son moulin. V. Rouen, 9 août 1861, cité par notre Rép. gén. du dr. fr., v° Acte de commerce, n. 157. V. aussi, Lyon-Caen et Renault, op. et loc. cit. A plus forte raison doit-on décider de même, lorsque, comme dans l'espèce ci-dessus, un éleveur n'exploite aucune propriété immobilière, et est obligé d'acheter tous les produits nécessaires à la nourriture des animaux qu'il vend.

(1-2-3) On discute, pour l'application de l'art. 504, C. proc., d'après lequel la contrariété des jugements rendus en dernier ressort, entre les mêmes parties et sur les mêmes moyens, en différents tribunaux, donne ouverture à cassation de même que pour l'application de l'art. 480, 6, C. proc., qui admet la requête civile, s'il y a contrariété de jugements en dernier ressort, entre les mêmes parties et sur les mêmes moyens, dans les mêmes Cours et tribunaux », sur le point de savoir si, pour la recevabilité, soit du recours en cassation, soit de la requête civile, il est nécessaire que les deux déci

n. 1101 et s.). 20 FAILLITE, COMPÉTENCE, SOCIÉTÉ DE MINES, SIÈGE SOCIAL, ASSEMBLÉES GÉNÉRALES, RÉUNIONS DU CONSEIL D'ADMINISTRATION, COMPTABILITÉ, PRINCIPAL ÉTABLISSEMENT, LIEU D'EXPLOITATION, CENTRE D'EXPLOITATION, OPÉRATIONS COMMERCIALES, ADMINISTRATEUR DÉLÉGUÉ, CRÉANCIERS (Rép., vo Faillite, n. 442 et s.; Pand. Rép., vo Faillite, liquidation judiciaire, n. 1048 et s.).

1o La contrariété de jugements ne donnant ouverture à cassation qu'autant qu'il s'agit de jugements en dernier ressort, il n'y a pas contrariété de jugements, et, par suite, lieu à cassation, lorsque, l'une des décisions ayant été frappée d'appel, il n'est pas justifie qu'il ait été statue sur cet appel (1) (C. civ., 1350, 1351; C. proc., 504).

Spécialement, il n'y a pas contrariété de jugements, lorsqu'un même différend, relatif à la mise en faillite d'une société, ayant été porté devant deux tribunaux de commerce différents, ressortissant à des Cours d'appel différentes, lesquels tribunaux de commerce se sont tous deux déclarés compétents pour en connaitre, et appel ayant été respectivement interjeté des deux décisions, l'une des Cours d'appel a rendu contradictoirement un arrêt confirmatif, statuant définitivement aussi sur le fond, tandis que l'autre Cour d'appel n'a pas encore statué (2) (Id.). Il importe peu qu'il y ait eu désistement de l'appel interjeté devant cette dernière Cour, si ce désistement n'a été accepté, ni par l'intime, ni par les parties intervenan

sions soient en dernier ressort, ou s'il suffit que soit en dernier ressort celle à l'occasion de laquelle le recours prévu par les art. 504 et 480, 6°, est exercé, pourvu que l'autre soit passée en force de chose jugée. V. dans le sens de cette dernière opinion, Boitard et Colmet d'Aage, Leç. de proc., 15o éd., t. 2, n. 734; Garsonnet, Tr. de proc., 2o éd., par CézarBru, t. 6, p. 453, § 2353; Glasson, Précis de proc., 2 éd., par Tissier, t. 2, n. 1063. Mais V. dans le sens de la première opinion, Carré et Chauveau. Lois de la proc., t. 4, quest. 1751; Bioche, Dict. de proc., v° Requête civile, n. 76; Crépon, Pourvoi en cass., t. 3, n. 476; et notre Rép. gén. du dr. fr., v° Cassation (mat. civ.), n. 3447; Pand. Rép., v Cassation civile, n. 1101 et s. En tout cas, quel que soit le parti que l'on adopte sur cette question, il faut reconnaître et c'est l'hypothèse de l'arrêt ci-dessus qu'il n'y a pas contrariété de jugements, donnant ouverture à cassation, dans les termes de l'art. 504, C. proc., lorsque, un seul des jugements étant définitif, soit faute de recours, soit parce que, comme dans l'espèce, il a été confirmé sur appel, l'autre est frappé d'un appel sur lequel il n'a pas encore été statué; dans ce cas, en effet, il est impossible, tant qu'une décision ne sera pas intervenue sur l'appel, de savoir s'il y a contrariété de jugements, la décision rendue sur l'appel pouvant faire disparaître cette contrariété.

Il importait peu qu'il y eût eu désistement de l'appel interjeté; dès lors que ce désistement n'avait pas été accepté, et qu'il n'avait pas été statué par la juridiction d'appel sur la validité de ce désistement, l'appel devait être tenu par la Cour de cassation comme subsistant. C'est déjà en invoquant ce dernier motif que la chambre des requêtes avait déclaré non recevable une demande en règlement de juges présentée dans la même

tes, car c'est aux juges du fait seuls qu'il appartient de se prononcer sur la validité du désistement (3) (Id.).

2o Le tribunal de commerce competent pour déclarer la faillite d'une société (dans l'espèce, une société de mines) n'est pas celui dans le ressort duquel cette société a son siège social, bien que ce soit à ce siège que se tiennent les assemblées générales d'actionnaires et les réunions du conseil d'administration, et que se trouvent centrali sées la correspondance et la comptabilité générale, mais celui du lieu où est fixé le centre d'exploitation unique, où tout le travail de la société est concentré, et où sont effectuées toutes ses opérations de commerce, en telle sorte que la société a dans ce lieu son principal établissement (4) (C. proc., 59; C. comm., 438).

Il en est ainsi, d'ailleurs, alors qu'il est déclaré par les juges du fond, dont les constatations sont souveraines, que l'administrateur-directeur de l'entreprise, au lieu d'exploitation a reçu, en vertu d'une délibération régulière du conseil d'administration du siège social, pour les exercer au siège de l'exploitation, tous les pouvoirs d'administration et de gestion attribués par l'assemblée générale à ce conseil (5) (Id.). Que c'est dans ce même lieu que se trouvent la plus grande partie de l'actif à réaliser, le plus grand nombre des créanciers et les plus importants d'entre eux (6) (Id.).

...

Et qu'il est de l'intérêt bien entendu des créanciers que les opérations de la faillite y soient suivies (7) (Id.).

affaire. V. Cass. 22 juin 1909 (S. et P. 1910.1.302; Pand. pér., 1910.1.302), et la note.

(4 à 7) En principe, c'est au tribunal du lieu du siège social indiqué par les statuts qu'il appartient de prononcer la déclaration de faillite d'une société. V. Cass. 15 avril 1885 (S. 1886.1.304. - P. 1886. 1.731); Dijon, 5 juin 1905 (S. et P. 1906.2.93); Cass. 31 juill. 1905 (S. et P. 1906.1.270; Pand. pér., 1906.1.129), et les renvois. Adde, Thaller et Percerou, Faillites et banqueroutes, t. 1o, n. 264 et s.

Mais la jurisprudence n'attribue pas à cette règle un caractère absolu. En dehors même du cas où le siège social indiqué aux statuts est purement fictif (V. Cass. 26 nov. 1906, S. et P. 1909. 1.893; Pand. pér., 1909.1.393, la note de M. Perroud et les renvois), elle admet que les circonstances de chaque affaire doivent être prises en considération pour déterminer si le principal établissement n'est pas distinct du siège social indiqué par les statuts, en telle sorte que le tribunal du lieu de ce principal établissement serait compétent pour déclarer la faillite. V. les arrêts cités dans la note de M. Perroud sous Cass. 26 nov. 1906, précité.

Cette tendance, qui a été critiquée par des auteurs, d'après lesquels il y a lieu, pour la détermination du tribunal compétent à l'effet de déclarer la faillite, de prendre en considération uniquement le lieu du siège social (V. Thaller et Percerou, op. cit., t. 1, n. 265), s'accuse encore dans l'arrêt ci-dessus, qui s'attache, pour reconnaître à un tribunal autre que celui du siège social compétence pour déclarer la faillite, non pas au fait que le siège social était purement fictif, mais à diverses circonstances, déjà relevées dans de précédents arrêts (V. les arrêts cités dans la note de M. Perroud sous Cass. 26 nov. 1906, précité), en vue d'établir que le principal établissement de la

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30 On ne peut produire devant la Cour de cassation des documents qui n'ont pas été soumis aux juges du fond (1).· Motifs. (Syndic de la Soc. des charbonnages de la Nouvelle-Calédonie et Monteux C. Berthelin).

La Société dite des charbonnages de la Nouvelle-Calédonie, dont le siège est à Paris, et qui était entrée, en 1907, en liquidation amiable, a été assignée en déclaration de faillite, le 23 juill. 1907, par l'un de ses créanciers, M. Berthelin, devant le tribunal de commerce de Nouméa, en la personne de son directeur de l'exploitation dans la colonie, M. Jacques, et de son liquidateur amiable, M. Monteux. La société a opposé l'incompétence du tribunal saisi, comme n'étant pas celui du siège social.

Par jugement en date du 25 juill. 1907, l'exception d'incompétence a été repoussée et la faillite prononcée. M. Colardeau a été nommé syndic provisoire. Sur appel de la Société des charbonnages, ce jugement a été confirmé par arrêt de la Cour de Nouméa du 14 sept. 1907. Pendant que ce litige était porté devant les tribunaux de la Nouvelle-Calédonie, le tribunal de commerce de la Seine, en tant que tribunal du siège social, était saisi par MM. Maestrati et Huet, créanciers de la société, d'une demande semblable, qui a été accueillie par jugement, en date du 16 août 1907, nommant M. Faucon syndic. Appel a été interjeté de ce jugement par M. Monteux, en sa qualité de liquidateur amiable de la société. Sur cet appel sont intervenus, devant la Cour de Paris, MM. Massé, Guégen et Tarbé des Sablons, créanciers de la société, afin de s'opposer à la déclaration de faillite en France. M. Monteux s'est désisté de son appel, mais ce désistement n'a pas été accepté par MM. Maestrati et Huet, les intimės, ni par MM. Massé, Guégen et Tarbé des Sablons, intervenants, et il n'a pas été statué.

C'est en cet état que MM. Faucon, ès qualités, et Monteux, ès qualités, ont introduit devant la Cour de cassation une demande en règlement de juges, en formant subsidiairement un pourvoi contre l'arrêt de la Cour de Nouméa du 14 sept. 1907. Par arrêt du 22 juin 1909 (S. et P. 1910.1.302; Pand. per., 1910.1.302), la chambre des requêtes a repoussé la demande en règlement de juges, et admis le pourvoi subsidiaire, qui invoquait deux moyens. 1er Moyen. Violation des art. 1351, C. civ., 504, C. proc., et 437, C. comm., en ce que l'arrêt attaqué a déclaré la faillite de la Société des charbonnages de la Nouvelle-Calédonie, alors qu'un jugement du tribunal de commerce de la Seine, passé en force de chose jugée, avait lui-même antérieurement prononcé la faillite de la même société.

2e Moyen. Violation des art. 438, C. comm., et 3 de la loi du 4 mars 1889, en ce que l'arrêt attaqué a attribué compétence, pour déclarer la faillite d'une société,

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au tribunal dans le ressort duquel est un centre d'exploitation, alors que le tribunal compétent était celui du siège social.

ARRÊT.

LA COUR; Sur le premier moyen du pourvoi : Attendu que la contrariété de jugements, aux termes de l'art. 504, C. proc., ne donne ouverture à cassation qu'autant qu'il s'agit de jugements rendus en dernier ressort; qu'il n'y a plus contrariété de jugements, et, par suite, lieu à cassation, lorsque l'une des décisions a été frappée d'appel, et qu'il n'est pas justifié qu'il ait été statué sur cet appel;

Attendu, en fait, qu'un même différend, relatif à la mise en faillite de la Société des charbonuages de la Nouvelle-Calédonie, avait été porté à la fois devant le tribunal de commerce de Nouméa et devant le tribunal de commerce de la Seine, qui s'étaient déclarés tous deux compétents pour en connaître, et avaient prononcé la faillite de la société, tant à Nouméa qu'à Paris; mais que, tandis que, par arrêt du 14 sept. 1907, la Cour d'appel de Nouméa a confirmé la décision rendue par le tribunal de commerce de cette même ville, et définitivement statué aussi sur le fond, la Cour de Paris, saisie par voie d'appel de la décision rendue par le tribunal de commerce de la Seine, n'a pas encore statué sur cet appel; Attendu, il est vrai, que les demandeurs en cassation, le syndic Faucon et le liquidateur Monteux, soutiennent que, ce dernier s'étant désisté de l'appel dont il avait saisi la Cour de Paris, le jugement rendu par le tribunal de commerce de la Seine était devenu définitif et avait acquis l'autorité de la chose jugée; que, par suite, la Cour de Nouméa ne pouvait, sans méconnaître cette autorité, déclarer, par une décision ultérieure, cette même société en faillite:

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Mais attendu que, le désistement dont il s'agit n'ayant été accepté, ni par les intimés, ni par les créanciers qui sont intervenus en appel à l'effet de s'opposer à la déclaration de faillite de la société par le tribunal de commerce de la Seine, c'est aux juges du fond qu'il appartient de se prononcer sur sa validité ou sur la légitimité des motifs que les intimés et les intervenants peuvent avoir à le refuser; qu'il échet, par conséquent, de rejeter le premier moyen;

Sur le deuxième moyen : - Attendu que, de l'arrêt attaqué, il résulte que, si les assemblées générales d'actionnaires et les réunions du conseil d'administration de la Société des charbonnages de la NouvelleCalédonie se tiennent au siège social à Paris, si même la correspondance et la comptabilité générale y sont centralisées, cette société a été constituée pour exploiter le charbon des mines qu'elle possède à Nondoué en Nouvelle-Calédonie; qu'elle y a un centre d'exploitation unique, où tout le travail de la société est concentré; que c'est là qu'elle se livre à toutes les opérations de commerce, que l'administrateur

les circonstances et à raison de la nature des inté rêts engagés, était le mieux en situation d'assurer le meilleur règlement de la faillite. V. Cass. 26 janv. 1903 (S. et P. 1906.1.86).

directeur sur les lieux, le sieur Jacques, a reçu du conseil d'administration, suivant délibération du 31 janv. 1905, tous les pouvoirs d'administration et de gestion en Nouvelle-Calédonie attribués au conseil d'administration du siège social par l'as

semblée générale ; Attendu que le

même arrêt ajoute que la plus grande partie de l'actif à réaliser, le plus grand nombre des créanciers et les plus importants d'entre eux sont en Nouvelle-Calédonie... qu'en fait, le principal établissement de la société se trouve bien dans cette colonie, et qu'il est de l'intérêt bien entendu des créanciers que les opérations de la faillite y soient suivies »; Attendu, il est vrai, que les demandeurs en cassation contestent l'exactitude des faits reconnus par ledit arrêt, et produisent à l'appui de leurs affirmations des documents nouveaux; mais qu'il n'y a pas lieu de s'arrêter à l'examen de ces documents, qui n'ont pas été soumis aux juges du fond; - D'où il suit qu'en déclarant, dans ces circonstances de la cause, par elle souverainement constatées, que le tribunal de commerce

de Nouméa était seul en situation d'assurer le meilleur règlement de la faillite, comme étant celui du lieu où la société a son principal établissement, la Cour d'appel de Nouméa a légalement justifié sa décision. et n'a violé aucun des textes de loi invoqués par le pourvoi; Rejette, etc. Du 9 avril 1913. MM Baudouin, 1er prés.; Ruben de Couder, rapp.; Mérillon, av. gén. (concl. conf.); Cail et Boulard, av.

CASS.-REQ. 5 août 1912.

MINES, OUVRIERS MINEURS, PENSIONS DE RETRAITE, MAJORATION, CONVENTIONS D'ARRAS, LOIS DU 31 MARS 1903 ET DU 31 DEC. 1907, INTERPRÉTATION (Rép., v Mines. minières et carrières, n. 1370; Pand. Rép.. eod. verb., n. 3413 et s.).

Les lois du 31 mars 1903 et du 31 déc. 1907, qui ont accordé des majorations de pensions de retraite aux ouvriers mineurs remplissant certaines conditions d'âge et de durée de services, n'ont en rien porté atteinte aux conventions, dites conventions d'Arras, intervenues antérieurement entre les mineurs et les Comp. de mines du département du Pas-de-Calais, et par lesquelles ces Comp. se sont engagées à porter au chiffre de 600 ou 550 fr. les pensions de leurs ouvriers, liquidées à partir du 1er janv. 1903 (2) (Ć. civ., 1134; LL. 31 mars 1903, art. 84 et s.; 31 déc. 1907, art. 48 et 49).

Notamment, le silence gardé par la loi du 31 déc. 1907, en ce qui concerne les mineurs régis par les conventions d'Arras, implique que les auteurs de la loi n'ont pas entendu décharger les Comp., signalaires de ces conventions, des pensions par elles promises, jusqu'à concurrence des majorations résultant de la loi de 1907, que leurs ouvriers devraient préalablement solliciter de l'Etat (3) (Id.).

(1) Point certain. V. Cass. 17 déc. 1894 (S. et P. 1895.1.220; Pand. pér., 1895.1.130), et les renvois. (2-3) Pour saisir la portée du débat dont la Cour de cassation était saisie, il est indispensable

Et les Comp. elles-mêmes ont si peu songé à interpréter en ce sens la loi du 31 déc. 1907 qu'après sa promulgation, elles ont prorogé sans réserves les conventions d'Arras (1) (Id).

En conséquence, un ouvrier, qui remplit les conditions d'âge et de services prévues par les conventions d'Arras, est fondé à réclamer à la Comp. qui l'employait la majoration destinée à porter sa pension au chiffre fixé par les conventions, sans subir une déduction à raison de la majoration

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de rappeler aussi brièvement que possible dans quelles conditions est née la question que l'arrêt ci-dessus a eu à résoudre.

A la suite de la grève des mineurs de 1902, les Comp. de mines du département du Pas-de-Calais, parmi lesquelles figure la Comp. des mines de Courrières, ont signé, le 5 nov. 1902, avec les représentants de leurs ouvriers, un accord, connu sous le nom de Conventions d'Arras, par lequel, elles s'engagèrent à « majorer, à partir du 1er janv. 1903, et ce, pendant une durée de cinq ans, ou jusqu'au jour où une loi nouvelle interviendrait à ce sujet avant l'expiration de ce délai, les pensions de retraite acquises par les ouvriers mineurs du Pas-de-Calais..., dont la pension sera liquidée à partir du 1er janv. 1903. Il était stipulé, en outre, dans l'accord, que la majoration ne pourrait en aucun cas, excéder les sommes nécessaires pour porter le total de la retraite à 600 fr. », ou à 550 fr., selon les cas. Cet accord laissait hors de ses prévisions les mineurs dont la pension avait été liquidée avant le 1er janv. 1903, et qui se trouvaient, par suite, dans une situation très inférieure à celle des bénéficiaires des conventions, dont les retraites étaient liquidées après cette date. C'est alors qu'intervint la loi du 31 mars 1903 (S. et P. Lois annotées de 1903, p. 570; Pand. pér., 1903.3. 52), qui, par ses ait. 84 et s., a disposé qu'une majoration, ne pouvant élever la pension au delà de 360 fr., y compris tous autres revenus, serait accordée aux retraites des mineurs, dépassant 50 fr., acquises ou en instance de liquidation au 1er janv. 1903, sur partie d'un fonds d'un million, inscrit au budget, chaque année, à cet effet. La loi du 31 mars 1903, qui ne pouvait en rien influencer la situation des bénéficiaires des conventions d'Arras, puisqu'elle s'adressait à une autre catégorie de mineurs retraités, avait, à la vérité, rétabli l'équilibre, dans une certaine mesure, entre les divers ouvriers retraités des houillères du Pas-de-Calais : ceux dont les retraites étaient liquidées depuis le 1er janv. 1903 bénéficiant des conventions, et les autres de la loi de 1903; mais, pour les mineurs des autres régions, l'inégalité de traitement était flagrante entre les ouvriers retraités avant le 1er janv. 1903, qui bénéficiaient de la majoration accordée par la loi, et les ouvriers retraités après cette date, qui ne pouvaient y avoir droit. La loi du 31 déc. 1907 (S. et P. Lois annotées de 1908, p. 706; Pand. pér., Lois annotées de 1908, p. 706) a eu pour but, dans ses art. 48 et 49, qui modifient les art. 84 et s. de la loi de 1903, de faire cesser cette inégalité. Le fonds annuel a été porté d'un million à 1.500.000 fr., et, désormais, tout ou vrier mineur, dont la pension dépassant 50 fr. est liquidée ou en instance de liquidation au 1er janv. de chaque année, a droit à une majoration, qui ne peut pas porter le chiffre global de la pension à plus de 360 fr., « y compris toutes autres ressources tant de l'intéressé que de son conjoint, mais indépendamment de tout salaire régulier en argent ou en nature n'excédant pas 50 fr. par mois ».

de pension à laquelle il pourrait prétendre en application de la loi du 31 déc. 1907 (2) (Id.).

(Comp. des mines de Courrières
C. Cuvelier).

Le tribunal civil de Béthune a, le 8 mars 1910, rendu le jugement suivant -:< Le Tribunal; Attendu que Cuvelier, titulaire d'une rente annuelle et viagère de 59 fr. sur la Caisse nationale des retraites, à dater du 1er déc. 1908, réclame à la

Entre temps, les conventions d'Arras, qui devaient produire effet seulement pendant cinq années, et dont l'effet devait par suite expirer au 1er janv. 1908, avaient été, le 5 mai 1905, prorogées pour une nouvelle durée de cinq ans, expirant au 1er janv. 1913.

Le rapprochement de la loi du 31 déc. 1907 avec les conventions d'Arras pouvait faire naître deux questions d'abord, les conventions d'Arras devaient-elles continuer à s'appliquer depuis la loi de 1907? En second lieu, et à supposer cette question résolue affirmativement, les Comp. de mines n'étaient-elles pas autorisées à déduire, des majorations par elles accordées en vertu des conventions, les majorations auxquelles les intéressés pourraient prétendre en vertu de la loi du 31 déc. 1907 ? La Cour de cassation n'a pas eu à se prononcer sur la première question, qui eût pu faire difficulté, car les conventions originaires du 5 nov. 1902, prorogées le 5 mai 1905, portaient expressément que les conventions produiraient effet jusqu'à la date prévue, ou jusqu'au jour où une loi nouvelle interviendrait à ce sujet avant l'expiration de ce délai. On pouvait dire que la loi du 31 déc. 1907 avait réalisé l'éventualité ainsi prévue par les conventions, puisqu'elle s'appliquait aux mêmes catégories d'intéressés que les conventions, en telle sorte que la loi aurait eu pour effet de rendre caduques les conventions. Les Comp. n'ont pas soulevé ce moyen, et ont continué à appliquer, depuis la loi de 1907 comme auparavant, les conventions d'Arras, qu'elles ont d'ailleurs expressément prorogées, comme nous l'avons vu.

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Elles se sont bornées, et c'est sur ce point que portait le débat actuel, à soutenir que, depuis la loi de 1907, on devait faire entrer en compte, pour le calcul des majorations de pension dues en vertu des conventions, les majorations fixées par application de la loi de 1907. C'est cette thèse que la Cour de cassation, après le tribunal de Béthune et la Cour de Douai, a expressément condamnée. V. dans le même sens, Douai, 31 oct. 1910 et 24 janv. 1911 (Rev. de la législ. des mines, 1912, p. 168 et 177). La Cour de cassation invoque à l'appui de la solution qu'elle consacre deux arguments 1° la loi de 1907 n'est pas applicable aux mineurs du Pas-de-Calais, dont elle n'a pu, par son silence, modifier la situation; 2° les Comp.ont elles-mêmes, ainsi que le constatait l'arrêt attaqué, déclaré, en 1908 et 1909, par conséquent après la loi de 1907, que le statu quo ante serait maintenu.

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Le premier argument n'est nullement probant. Sans doute, la loi de 1907 a été faite pour les ouvriers mineurs, et non pas, comme le rappelle l'arrêt ci-dessus, pour faire profiter les Comp. « des sacrifices qu'elle imposait aux contribuables. Mais c'est une loi générale, qui s'applique, par suite, sur toute l'étendue du territoire, et dont les conséquences ne dépendent pas des prévisions ou de l'intention de ses auteurs. D'ailleurs, il est inexact de prétendre que la situation faite par la loi aux mineurs du Pas-de-Calais n'ait pas été envisagée devant le Parlement. Bien loin qu'il en soit ainsi,

Comp. de Courrières la majoration de cette rente d'une somme de 491 fr.; Attendu qu'il invoque, à l'appui de cette demande qu'il a plus de cinquante-cinq ans d'âge et plus de trente ans de services dans les mines du Pas-de-Calais, et excipe des conventions, dites d'Arras, du 5 nov. 1902, par lesquelles les Comp. houillères du Pas-de-Calais ont déclaré majorer, à partir du 1er janv. 1903, les pensions de retraites acquises par les ouvriers mineurs du Pas-de-Calais réunissant la dou

M. Puech, dans un rapport sur une proposition tendant au même objet que les art. 48 et s. de la loi du 31 déc. 1907, avait exprimé la crainte que le vote de cette proposition n'eût pour effet de priver les mineurs du Pas-de-Calais du bénéfice des conventions d'Arras (J. off. de mai 1906, doc. parl. de la Chambre des députés, p. 206), et, au contraire, à la séance de la Chambre des députés du 21 mai 1906, l'un des auteurs de la proposition, M. de Ramel, déclarait que les ouvriers du Pasde-Calais resteraient bénéficiaires, jusqu'à concurrence du chiffre résultant de la convention, des avantages qui sont stipulés en leur faveur » (J. off. du 23 mars 1906, déb. parl. de la Chambre des députés, p. 1567, 2° col.).

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En revanche, la Cour de cassation était fondée à tirer argument de ce que les Comp. se sont engagées, postérieurement à la loi de 1907, à maintenir, au profit de leurs ouvriers, le statu quo ante. Il y a là, de leur part, une interprétation de la convention sur laquelle il ne leur est pas possible de revenir. Sans doute, les Comp. prétendaient que, cet engagement, elles l'avaient pris uniquement pour que la situation de leurs ouvriers ne fût pas diminuée par la substitution au maximum de majoration des conventions d'Arras (550 et 600 fr.) du maximum, très inférieur (360 fr.), de la loi de 1907; que cela seul importait aux ouvriers, et que cet engagement n'impliquait aucun préjugé, en ce qui concerne le point de savoir si l'application des conventions devait être combinée avec l'application de la loi de 1907, en telle sorte qu'elles restaient en droit de demander que, de la pension calculée d'après les conventions, fût déduite la majoration résultant de la loi de 1907. - Cette argumentation ne pouvait être admise en présence des termes de l'art. 49 de la loi de 1907: La majoration ne pourra élever la pension majorée au delà du chiffre de 360 fr., y compris toutes autres ressources, tant de l'intéressé que de son conjoint.... Par le fait même que les Comp. ne se sont pas considérées comme dégagées de leurs engagements par la loi de 1907, elles sont restées tenues d'assurer à leurs ouvriers une retraite de 550 fr., retraite supérieure au maximum de ressources que l'ouvrier mineur ne doit pas dépasser pour avoir droit à une allocation de l'Etat. Jamais les revenus de l'ouvrier mineur ne doivent dépasser 360 fr. pour que la majoration prévue par la loi de 1907 puisse lui être allouée. Or, en vertu des conventions d'Arras, l'ouvrier mineur touchera une retraite de 550 ou 600 fr.; il est donc en dehors des cas d'application de la loi du 31 déc. 1907. C'est en ce sens, mais en ce sens seu lement, qu'il est exact de dire que la loi de 1907 n'est pas applicable aux mineurs du Pas-de-Calais. Les Comp., en consentant à ne pas profiter de l'abrogation totale des conventions d'Arras que leur procurait la loi de 1907, ont exclu leurs ouvriers du bénéfice de cette loi, puisqu'elles ont élevé leurs revenus à un chiffre qui ne permet pas aux onvriers d'avoir droit aux majorations de la loi de 1907. (1-2) V. la note qui précède.

At

ble condition de cinquante-cinq ans d'âge et de trente ans de services dans les mines du Pas-de-Calais, ayant cessé de travailler, et dont la pension serait liquidée à partir du 1er janv. 1903; - Attendu que la société défenderesse reconnaît que Cuvelier a satisfait aux conditions exigées par la convention d'Arras; qu'il est agé de cinquante-six ans depuis le 13 juill. 1909; qu'il a travaillé plus de trente-sept ans comme mineur dans les houillères du Pasde-Calais; qu'il a cessé de travailler le 24 nov. 1908; qu'il a une pension de 59 fr. sur la Caisse nationale des retraites à majorer; mais qu'elle soutient que Cuvelier a droit, par application de la loi du 31 déc. 1907, modifiant celle du 31 mars 1903, à une allocation de crédit budgétaire, dit Million et demi des mineurs », et que, par suite, elle ne consent à majorer la pension de Cuvelier que sous déduction de cette allocation; Attendu que la prétention de la Comp. de Courrières ne saurait être accueillie; tendu, en effet, que la loi du 29 juin 1894, concernant les caisses de retraites et de secours des ouvriers mineurs, a assuré à ces ouvriers, à partir du 1er juill. 1895, moyennant certains versements et dans des conditions prévues par cette loi, des droits à la retraite; Attendu que, cette loi n'ayant point d'effet rétroactif, il advint que beaucoup d'ouvriers mineurs n'avaient point de retraite ou une retraite minime, soit, les uns, qu'ils n'eussent jamais participé à aucune caisse de retraite ou de prévoyance, soit, les autres, que, participants à des caisses de prévoyance ou de retraites instituées dans les Comp. au service desquelles ils travaillaient, ils aient vu leurs droits acquis transformés par la loi de 1894 et leurs retraites atteindre un chiffre dérisoire; que ce fut en 1902, lors de la grève des mineurs de l'arrondissement de Béthune, que les Comp. houillères du Nord et du Pas-de-Calais prirent des engagements, dits « Conventions d'Arras, pour relever, à partir du 1er janv. 1903, les retraites des ouvriers, liquidées à partir de cette date; mais que les Comp. n'en firent rien pour les retraites liquidées antérieurement; qu'en 1903, le législateur, dans une pensée d'apaisement et de justice sociale, s'est préoccupé de ceux qui ne bénéficiaient pas de cette faveur consentie par les Comp., et, par la loi du 31 mars 1903, a cherché à assurer une situation supportable aux vieux serviteurs de la mine; qu'à ces fins, un crédit d'un million, appelé le million des mineurs, fut institué, et affecté, pour un tiers, à la majoration des pensions d'âge ou d'invalidité de plus de 50 fr., acquises ou en instance de liquidation au 1er janv. 1903, et, pour les deux autres tiers, à des allocations en faveur de tous mineurs français âgés de cinquante-cinq ans au moins au 1er janv. 1903, et justifiant, à cette date, de trente ans de travail salarié dans les mines françaises; qu'il fut décidé que le budget de l'Etat fournirait 666,666 fr., et les Comp. 333.344 fr.; Attendu que la loi du 31 déc. 1907 a modifié, en l'élargissant, celle du 31 mars 1903; qu'elle a élevé d'un million à un million

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et demi (dont un million à la charge de l'Etat et 500.000 fr. à la charge des Comp.) le crédit primitivement fixé par la loi de 1903, et a ouvert le bénéfice de la majoration et de l'allocation aux ouvriers qui atteindraient cinquante-cinq ans au ler janvier de chaque année; Attendu que, vainement, la Comp. de Courrières, excipant de ce que, comme toutes les Comp. houillères, elle paye sa part dans le million et demi des mineurs, soutient que Cuvelier doit obtenir sur le million et demi des mineurs l'allocation prévue par les lois de 1903 et 1907, qu'il ne pourrait, tout au plus, réclamer à la Comp. de Courrières que la majoration supplémentaire pour parfaire les 550 fr. prévus par les engagements d'Arras; Attendu, en effet, d'une part, que les lois précitées ne se sont point préoccupées des conventions d'Arras; qu'elles n'en parlent point; que, dans leur silence à cet égard, le tribunal ne peut y suppléer; - Attendu, d'autre part, qu'il se peut faire que des ouvriers de Courrières ne soient point dans les conditions d'Arras; qu'ils peuvent cependant être en droit de réclamer une allocation maxima de 240 fr. sur le million des mineurs; qu'ainsi donc, si la Comp. de Courrières contribue pour une part dans le million et demi des mineurs, certains de ses ou> vriers, qui ne bénéficient pas des conventions d'Arras, peuvent bénéficier de l'allocation prévue par les lois de 1903 et 1907; mais qu'elle ne saurait à bon droit prétendre qu'un ouvrier ne peut invoquer la convention d'Arras que sous déduction de sa part du million des mineurs; Attendu qu'il est établi par les documents versés au procès et qu'il ne peut être dénié que l'effet des conventions a été prorogé jusqu'au 31 déc. 1912; - Par ces motifs; - Dit que Cuvelier remplit les conditions d'àge et de services pour bénéficier de la majoration prévue par la convention d'Arras; - Condamne la Comp. de Courrières à majorer de 491 fr., à dater du 1er déc. 1908 jusqu'au 1er janv. 1913, la pension de Cuvelier de 59 fr. sur la Caisse nationale des retraites;

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Dit qu'il n'y a pas lieu de déduire de cette majoration les droits que Cuvelier peut avoir sur le million et demi des mineurs ».

Sur appel de la Comp. des mines de Courrières, la Cour de Douai a confirmé ce jugement par un arrêt du 20 juill. 1910, ainsi concu: -La Cour; -Adoptant les motifs des premiers juges; Et attendu que le législateur, en votant les lois d'assistance du 31 mars 1903 et du 31 déc. 1907, n'a jamais eu la pensée de rendre caducs les engagements pris par les Comp. houillères, le 5 nov. 1902, dans les conventions dites d'Arras; que, bien au contraire, il ressort des déclarations passées lors de la discussion de ces lois qu'elles n'avaient pas d'autre objet que de faire disparaître des inégalités choquantes dans les pensions de retraites des ouvriers mineurs et d'assurer une situation supportable et analogue, précisément à ceux qui ne bénéficieraient pas des avantages concédés par les Comp. dans les conventions précitées; Attendu que la prétention actuelle de la Comp. des mines de Courrières est, non seulement contraire au texte

et à l'esprit des conventions, mais encore à l'application constante qui en a été faite, tant par la commission chargée de la répartition des fonds votés par ces lois que par la Comp. elle-même; Attendu. enfin, qu'il est puéril de soutenir aujourd'hui, après que plusieurs années se sont écoulées depuis la mise en vigueur de ces lois, que leur vote a rendu caduques les conventions dites d'Arras, alors qu'en 19081909, au cours d'entrevues entre les représentants des Comp. et ceux des ouvriers, il a été formellement déclaré que le statu quo serait maintenu, et qu'enfin, en janvier 1910, le président du Comité des houillères du Nord et du Pas-de-Calais renouvelait solennellement l'assurance que les Comp., au nom de qui il parlait, étaient toujours liées par les conventions d'Arras; Par ces motifs; Confirme, etc. ».

Pourvoi en cassation par la Comp. des mines de Courrières. Moyen unique. Violation des art. 84 et s. de la loi du 31 mars 1903, modifiés par les art. 48 et 49 de la loi du 31 déc. 1907, 1134, C. civ., 7 de la loi du 20 avril 1810, en ce que l'arrêt attaqué a refusé à la Comp. exposante le droit de déduire des sommes versées aux anciens ouvriers mineurs, par application des conventions d'Arras de 1902, le montant des majorations et des allocations prévues par la loi du 31 déc. 1907, sous le prétexte que les ouvriers bénéficiaires desdites conventions, renouvelées et toujours obligatoires pour les Comp. signataires, n'auraient pas droit de participer à la répartition du crédit voté par la loi précitée, alors que le législateur de 1907 a appelé, d'une facon générale, au bénéfice de cette répartition, tous les ouvriers mineurs remplissant les conditions de la loi, et que, d'autre part, les Comp. ne se sont engagées en 1902 que sous réserve d'une réglementation législative postérieure.

-

ARRÊT.

LA COUR; Sur le moyen unique : Attendu que, par les conventions dites d'Arras, signées le 5 nov. 1902, les Comp. houillères du Pas-de-Calais se sont engagées, jusqu'au jour où une loi interviendrait, à majorer les pensions de retraite acquises au 1er janv. 1903 à ceux de leurs ouvriers qui auraient à cette époque cinquante-cinq ans d'âge et trente ans de services; que cette majoration devait, suivant les cas, porter le chiffre de la retraite à 550 ou 600 fr.; Attendu qu'il est reconnu que la loi du 31 mars 1903, affectant un crédit d'un million tant à la majoration des pensions de plus de 50 fr., acquises aux mineurs le 1er janvier précédent, qu'à des allocations en faveur de ceux d'entre eux qui n'auraient pas droit à une retraite. n'a point été faite pour les ouvriers qui bénéficiaient des conventions de 1902; qu'il convient d'en dire autant de la loi du 31 déc. 1907, qui, en élevant le crédit à 1.500.000 fr., a appelé à en profiter les mineurs dont les droits s'ouvriraient au 1er janvier de chaque année; qu'en effet, aucune disposition de cette dernière loi, édictée pour toute la France, ne permet de dire que le législateur ait entendu modifier les conventions passées entre les

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