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limitée dans ses effets à la colonir el i une durée de quatre ans, est, non seulement contraire à la liberté du commerce el de l'industrie, mais encore attentatoire à la liberté humaine el au droit de vivre, et qu'ils refusent de la sanctionner, comme contraire i l'ordre public (1) (C. civ., 6, 1131, 1133, 1172, 1780; L. 2-17 mars 1791, art. 7). (Speidel et C. C. Hardegg). - ARRÈT.

Cie LA COUR; - Sur le moyen du pourvoi, pris de la violation de l'art. 7 de la loi des 2-17 mars 1791 (en ce que l'arrèt attaqui a déclaré nulle comme contraire à Tordre public une convention entre un patron et son employé, par laquelle le patron stipule que son employé, quand il le quittera, ne pourra pas, pendant quatre ans, s'établir dans une région qu'il précise, alors que l'interdiction à l'employé, étant limitée et quant au lieu et quant au temps, rentre dans le domaine des libres conventions et n'est en rien contraire à l'ordre public): - Attendu que, de l'arrêt attaque, il résulte que, le 27 sept. 1904, le sieur llardegg, employé de commerce, acceptait les conditions d'un engagement que lui offrait la maison Speidel, dans une lettre du 29 septembre précédent, où on relève la clause suivante : « Vous vous engagez à ne pas entrer dans une autre maison de cominerce de l'Indo-Chine fran. caise pendant les quatre ans qui suivront votre sortie de notre maison, de ne pas en fonder une, de vous abstenir de toute aflaire pour votre compte personnel »; Attendu que ledit arrêt constate que cet engagement contenait, de la part de Harderg, au profit des sieurs Speidel, non une interdiction d'exercer dans la colonie un commerce ou une branche de commerce similaire, de nature à leur être préjudiciable, mais une prohibition générale de

faire un commerce quelconque et même aucune affaire, soit pour son compte, soit pour autrui; que Harderg, qui est commerçant et n'a d'autre moyen d'existence que l'exercice de cette profession, était mis par une telle interdiction dans une véritable impossibilité de vivre; – Attendu que la Cour d'appel apprécie que, dans cet état des faits, cette clause, quoique limitée dans ses effets à la colonie et à une durée de quatre ans, était, non seulement contraire à la liberté du commerce et de l'in: dustrie, mais encore attentatoire à la liberté humaine et au droit de vivre; qu'en refusant de sanctionner cette clause comme contraire à l'ordre public, l'arrêt attaqué n'a violé, ni l'article invoqué, ni les prin. cipes de la matière; Rejette le pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 21 sept. 1909 par la Cour d'appel d'Indo-Chine, etc.

Du 17 mai 1911. - (h. req. MM. Tanon, prés.; Loubers, rapp.; Lénard, av. gén. (concl. conf.); Dufourmantelle, av.

TÉRÊTS, ACTION EN JUSTICE, FAUTE, CARACTERES (Rép., "Dommages-intérêts, n. 140 bis ; Pand. Rép., Vo Responsabilité civile, n. 608 et s.).

lo L'art. 8 de la loi du 25 vent. an 11, qui interdit aur notaires de recevoir des actes ils sont parties, ou qui contiennent quelques dispositions en leur faveur, ne vise que les acles dans lesquels ils sont parties, soit directement, soit par prele-nom, ou desquels un droit résulle pour eux (2) (L. 25 vent. an 11, art. 8).

On ne saurait, sans en forrer les termes, l'appliquer à un acte de prél, dont le caractère sérieux est reronnu, par la seule raison que le notaire, en vertu d'un droil distinci el personnel, ne constituant pas ume consequence obligatoire de l'acte dresse par lui, auruil ultérieurement reçu une partie des sommes impruntées en paiement de ce qui lui lait (3) (11.).

2. Au cas un emprunteur, assigne en remboursement par le préteur, a exerce une action récursoire contre le notaire rédacleur de l'acte de pret, les juges du fond derident à bon droit que cette action ne préseniuit pas les caractères d'un recours en garantie, lorsque, des conclusions de l'emprunteur, qui, à raison de leur's variations successives, prétaient à interprétation, ils ont déduit que l'action récursoire, qui anil pour base principale la détention par le notaire de partie des fonds provenant des prols el son obligation de rendre compte, n'était pas connere à l'instance principale, qu'elle procedait d'une cause et d'un contrat distincts, et que, par suite, elle aurait faire l'objet d'une demande principale (4) C. proc., 59, 181).

3. Si, par dérogation à l'art.31 de la loi du 22 frim, an 7, les juges peuvent, en certains cas, et à raison d'une faute commise

CASS,-civ. 2 décembre 1912. 1° NOTARE, ACTE NOTARIÉ, INTÉRÊT PER

SONNEL, VELITÉ, PRÊT, EMPLOI PARTIET A INDEMNISER LE NOTAIRE (Rep., v° Notaire. n. 459 et s.; Pand. Rep., Vi Actes notariés, n. 320 et s., Notaire, n. 3123 et s.). 2" GARANTIE, ACTION RECURSOIRE, PRET, ACTION EN REMBOURSEMENT, NOTAIRE, COMPTE (REDDITION DE), CONCLUSIONS, INTERPRETATION,

CONNEXITÉ (ABSENCE DE), FIN DE NON-RECEVOIR (Rép., v Garantie, n. 61 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 49 et s., 90 et s., 146 et s.j. 3. DePENS, ENREGISTREMENT (DROITS D’), LETTRE, DOMMAGES-INTERÈTS ( Rép., v Dépens, n. 2333 et s.; Pand. Rép., po Frais et dépens, n. 854 et s.). 1° DOMMAGES-IN

principes sur lesquels elle repose. Les précédents arrêts visaient des clauses prohibitives d'un seul genre de commerce ou d'industrie; ils les déclaraient valables, a la condition que la prohibition fût limitée, soit quant à sa durée, soit quant aux lieux où elle devait être appliquée, ces limitations étant jugées indispensables au respect de la liberté du commerce ou du travail. V. Cass. 2 juill, 1900 (S. et P. 1904.1.175); 14 mars 1904 (S. et P. 1904. 1.4+4), et les renvois. Adde, Limoges, 25 nov. 1910 (S. et P. 1911.2.179; Pand. per., 1911.2.179), et les renvois. Le motif qui inspire cette jurisprudence devait logiquement conduire à la solution donnée par l'arrêt ci-dessus. L'interdiction générale de faire le commerce, même si elle est restreinte à un laps de temps relativement court et à un pays déterminé, constitue une entrave complète à la liberté du travail et porte à cette liberté la plus grave atteinte, en forçant celui qui l'a souscrite à s'expatrier pour vivre, s'il n'a d'autres ressources que celles que lui procure son travail. La solution eût pu être différente, si, au lieu de s'appliquer à toute l'Indo-Chine, l'interdiction stipulée se fût appliquée seulement à une ville ou à une province de cette colonie; les raisons qui viennent d'être exposées n'auraient pas existé, en effet, en semblable hypothèse.

L'arrêt que nous rapportons mérite d'autant plus d'attirer l'attention qu'il n'existe, à notre connaissance, aucun précédent de jurisprudence sur la question même qu'il a solutionnée. On ne

peut invoquer en effet, comme la tranchant implicitement, un arrêt de Cass. 20 janv. 1891 (S.1891. 1.410. -- P. 1891.1,1084; Pand, pér., 1891.1.272), admettant que les juges du fond avaient usé de leur pouvoir souverain d'interpréter des conventions, à la condition de ne pas les dénaturer, en décidant qu'une convention, par laquelle un directeur d'établissement commercial s'était engagé, en quittant un établissement, à ne pas s'intéresser dans une autre affaire dans la même ville pendant trois années, devait être interprétée dans le sens d'une simple interdiction de faire un commerce semblable, et non d'une interdiction de faire toute espèce de commerce ; c'était simplement la portée de la convention qui était en question, et non sa validité, au cas où il aurait été admis qu'elle s'étendait à toute espèce de négoce. V. d'ailleurs, sur le pouvoir d'interprétation des juges du fond en cette matière, Cass. 20 janv. 1891, précité, et les renvois; 3 mai 1899 (S. et P. 1901.1.183); 14 mars 1904, précité, et les renvois.

(1) V. la note qui précède.

(2-3) L'arrêt ci-dessus rentre dans la jurisprudence d'après laquelle il n'y a pas disposition en faveur du notaire rédacteur d'un acte, au sens de l'art. 8 de la loi du 25 vent. an 11, par cela seul que cet acte a pu avoir pour résultat de procurer au débiteur du notaire rédacteur de l'acte des fonds à l'aide desquels le notaire a été remboursé de sa créance, s'il ne résulte pas de l'acte lui-même, pour le notaire, un droit distinct et personnel, ayant

des conséquences obligatoires. V. la note de M. Wahl sous Cass. 16 janv. 1901 (S. et P. 1902, 1.65). V. aussi la note sous Cass. 30 janv. 1911 (S. et P.1911.1.396 ; Pand. pér., 1911.1.396). Cette solution a été consacrée à différentes reprises dans l'hypothèse, qui était celle de l'arrêt ci-dessus, ou un notaire a reçu un acte de prêt dont les deniers ont été employés en partie à le désintéresser. V. Cass. 16 janv. 1901 (S. et P. 1902.1.65, et les renvois de la note de M. Wahl; l'and. pér., 1901. 1.317). V. d'aillenrs, sur le principe que l'art. 8 de la loi du 25 vent. an 11 doit être interprété restrictivement, Caen, 4 mai 1910 (S. et P. 1912,2. 106; Pand. pér., 1912.2.106), et la note.

(4) L'action récursoire, qui ne se rattache à l'action principale par aucun lien de dépendance nécessaire, ni même de connexité la plus éloignée, et dont le sort est indépendant de la solution qui sera donnée : l'action principale, n'a pas le caractère d'une demande en garantie, mais bien celui d'une demande principale et directe, qui doit, dės lors, être portée, selon le droit commun, devant le tribunal du domicile du défendeur. V. Cass, 1er août 1892 (8. et P. 1892.1.584; Pand. pér., 1893.1.254), la note et les renvois ; notre C. proc. annoté, par Tissier, Darras et Louiche - Desfontaines, sur l'art. 59, n. 469 et s.; et notre Rép. gén, du dr. fr., vo Garantie, n. 61 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 49 et 8. V. aussi la note sous Cass. 18 oct. 1909 (S. et P. 1910.1.140; Pand. pér., 1910.1. 140).

ne

par une partie, mettre à sa charge les frais | l'égard du défendeur en garantie, incon- tigieuses valables comme actes authentid'enregistrement des actes ou documents testablement générateurs d'une responsa- ques, l'arrêt attaqué n'a pas violé ledit ar. produils au cours du litige, ce ne peut bilité.

ticle; être qu'à la condition de constater une 3e Moyen. Violation de l'art. 130, C. proc.,

Sur le deuxième moyen :

Attendu que faule suffisamment caractérisée pour jus- de l'art. 1382, C. civ., et de l'art. 7 de la l'arrêt attaqué constate que la demande de tifier une condamnation à des dommages- loi du 20 avril 1810, en ce que l'arrêt atta- la dame Sallard était fondée sur les prets interêts (1) (C. civ., 1382; C. proc., 130; qué a condamné Mme de Castellan à sup- consentis, aux termes des actes précités L. 22 frim. an 7, art. 31):

porter les frais d'enregistrement d'une de 1905 et 1906, et sur l'obligation de remDoil, par suite, étre cassé l'arrêt qui Tettre du 26 janv. 1906, lesquels n'entraient boursement prise par la veuve David, dans conilamne, à titre de dommages-interéls, une pas dans les dépens légaux, sans motiver des conditions déterminées; Attendu parlie aux frais d'enregistrement d'une cette condamnation par la constatation que l'assignation du 28 déc. 1906, par lalettre produite, en se bornant à déclarer d'une faute justifiant la mise à sa charge quelle cette dernière a appelé en cause le que «

sa prétention non justifiée en a né- de ces frais, à titre de dommages-intérêts. notaire (..., tendait exclusivement à une cessité la production » (2) (Id.).

reddition de comptes; que, par les conclu4° En effet, l'action en justice est un droit,

ARRÊT,

sions qu'elle a prises en première instance, ilont l'exercice ne dégénère en faute, pouvant

LA COCR; Sur le premier moyen du le 20 févr. 1907, la veuve David a soutenu donner ouverture à des dommages-intérêts, pourvoi : Attendu que la veuve David, que les actes de prêt étaient nuls pour que s'il constitue un acte de malice ou de aujourd'hui épouse de Castellan, a argué cause d'erreur ou de violence, et à raison mauvaise foi, ou, tout au moins, une erreur de nullité les actes d'obligation contractés de l'intérêt personnel qu'ils présentaient grossière équipollente un dol (3) (C. civ., para soil, pret 17 mai 1905 et 10 avril 1906,

(

premier elle pour le notaire rédacteur; mais que, pour 1382).

avril,

le cas où ces nullités ne seraient pas adenvers différents préteurs, parmi lesquels mises, G... devrait être déclaré responsable (De Castellan C. Me G... et V've Sallard).

la dame Sallard, sous le prétexte que le du montant de l'obligation; qu'elle a deLes époux de Castellan se sont pourvus notaire G.., qui' les avait reçus, y aurait mandé au tribunal de dire et juger que les en cassation contre un arrêt de la Cour de été personnellement intéressé; — Attendu fonds provenant de l'emprunt avaient proBourges, en date du 10 nov. 1908. que, des constatations de l'arrêt attaqué, il fité au notaire, qui les avait conservés, et Jer Moyen. Violation des art. 8 et 68 de la résulte qu'une partie de la somme de que, par ce fait, le commandement de loi du 25 vent. an 11, et 7 de la loi' du 50.000 fr., ainsi empruntée, devait rester payer devait être sans effet; qu'enfin, dans 20 avril 1810, en ce que l'arrêt attaqué a entre les mains de G..., pour le désinté- les motifs de ses conclusions d'appel. en refusé de prononcer la nullité des actes resser des créances et frais qu'il prétendait date du 24 oct. 1908, elle a déclaré que, si des ler avril, 7 et 17 mai 1905 et du 10 avril faire valoir contre les époux David; mais les sommes empruntées étaient reconnues 1906, intervenus entre les époux David que l'arrêt déclare, en même temps, d'une immédiatement exigibles, à cause de l'inet Mme veuve Sallard, et passés devant un part, qu'il est constant que les tiers sertion dans les actes d'une déclaration notaire qui avait un intérêt personnel prêteurs sont réellement créanciers de mensongère relative à l'absence de toutes auxdits actes, sous prétexte que les arti- 50.000 fr., que 15.000 ont été retenus par charges antérieures, elle devrait exercer cles susvisés de la loi du 25 vent. an 11 l'un d'entre eux en paiement d'une dette un recours contre le notaire G..., et que le ne seraient applicables qu'aux obligations antérieure, que 10.000 ont servi à verser dispositif des mêmes conclusions à deoù le notaire était partie, soit personnelle- un acompte sur une acquisition de fours mandé à la Cour de dire et juger que, les ment, soit par un prête-nom, et que, d'autre à chaux; que, d'autre part, G..., sortant de fonds provenant de l'emprunt ayant profité part, les actes dont s'agit n'ont pu profiter ses attributions notariales, avait, à cette audit notaire, celui-ci devaitles rembourser, au notaire après leur confection que par époque, ouvert un véritable compte cou- et qu'il était responsable des conséquences le consentement exprès ou tacite des inté- rant aux époux David, et que, si une por

dudit acte: -- Attendu qu'à raison de leurs ressés, et cela, malgré la constatation ex- tion de l'emprunt a été appliquée au règle- variations successives, ces conclusions presse,

faite
par

l'arrêt attaqué, que partie ment de ce compte, cet emploi, postérieur prêtaient à interprétation, et que la Cour de la somme de 50.000 fr., empruntée de- au prêt, a eu lieu avec le consentement d'appel a pu déclarer que le recours, exercé vait, lors de la passation même de ces actes, de ceux-ci; Attendu que l'art. 8 de la loi sous forme d'action en garantie, avait pour rester entre les mains du notaire G..., et du 25 vent. an 11, qui interdit aux notaires base principale la détention par G... de servir à le désintéresser de créances et de recevoir les actes où ils sont parties, ou partie des fonds provenant de l'emprunt et frais qu'il prétendait faire valoir contre les qui contiennent quelques dispositions en son obligation de rendre comp'e; d'où elle époux David.

leur faveur, ne vise que les actes dans a déduit, à bon droit, que cette demande 24 Moyen. Violation des art. 1er et 3 de la lesquels ils sont parties, soit directement, n'était pas connexe à celle de la dame Salloi du 25 vent. an ll, 1188, 1319, 1382 et soit par prête-nom, ou desquels un droit lard, qu'elle procédait d'une cause et d'un 1383, C.civ., 175 et s.,C. proc., et de l'art. 7 résulte pour eux; qu'en ne saurait, sans contrat distincts, et que, par suite, les de la loi du 20 avril 1810, en ce que l'arrêt en forcer les termes, l'appliquer à un acte griefs de la dame de Castellan contre G... attaqué, méconnaissant la teneur des con- de prêt, dont le caractère sérieux est re- auraient dû faire l'objet d'une demande clusions des demandeurs en cassation, a connu, par la seule raison que le notaire, principale; - Attendu qu'en déclarant, déclaré non recevable leur demande en en vertu d'un droit distinct et personnel, dans ces circonstances, l'action récursoire garantie, sous prétexte que cette demande ne constituant pas une conséquence obli- non recevable, l'arrêt attaqué n'a violé aun'était pas fondée sur les faits qui servaient gatoire de l'acte dressé par lui, aurait ulté. cun des textes visés au moyen; de base à la demande principale, alors rieurement reçu une partie des sommes Mais sur le troisième moyen :

Vu qu'au contraire, cette demande était pré- empruntées, en paiement de ce qui lui l'art. 130, C. proc.; — Attendu que si, pardécisément et avant tout fondée exactement était dû; - Attendu qu'en déclarant, dans rogation à l'art. 31 de la loi du 2 frim.an 7, sur les inèmes faits, lesquels étaient, à ces circonstances, les deux obligations li- les juges peuvent, en certains cas, et à raison

(1-2-3) Il est constant en jurisprudence que la condamnation aux dépens ne s'étend pas aux droits perçus sur des actes dont les énonciations du jugement ou de l'arrêt ont révélé l'existence à la Régie; ces droits, dont le jugement ou arrêt n'est que la cause occasionnelle, ne peuvent être mis à la charge d'une partie, autre que la personne qui en est débitrice, d'après la loi fiscale, que par une disposition spéciale, prononçant cette condamnation à titre de dommages-intérêts, et la justifiant par la précision de la faute et du dommage éprouvé V. Cass.

25 janv. 1909 (S. et P. 1911.1.22; Pand. pér., 1911.
1.22); 29 avril 1911 (S. et P. 1911.1.332; Pand.
pér., 1911.1.832); 22 avril 1912 (S. et P. 1912.1.
388; Pand. pér., 1912.1.388), et les renvois. Cette
règle s'applique notamment aux droits d'enregis-
trement perçus sur les lettres produites au cours
des débats. V. Cass. 30 avril 1895 (sol. implic.) (8.
et P. 1895.1.407); 29 avril 1911 (sol. implic.),
précité.

La faute, dont la constatation, jointe à celle du
préjudice, permet seule de condamner une partie,

à titre de dommages-intérêts, a supporter les frais d'enregietrement des actes produits en cours de l'instance, c'est, d'après l'arrêt ci-dessus, la faute qui autorise à condamner le plaideurà des dommages-intérêts, en cas d'action téméraire; et, d'après la jurisprudence de la chambre civile, cette faute doit consister en des actes de malice ou de mauvaise foi, ou, tout au moins, d'erreur grossière équivalente au dol. V. Cass. 15 mars 1910 (S. et P. 1910.1.259; Pand. pér., 1910,1.259); 9 juill. 1912 (S. et P. 1912. 1.609; Pand. per., 1912.1.509), et les ren vois.

d'une faute commise par une partie, mettre à la charge de celle-ci les frais d'enregistrement des actes ou documents produits au cours du litige, ce ne peut être qu'à la condition de constater une faute suffisamment caractérisée pour justifier une condamnation à des dommages intérêts; Attendu que l'arrêt attaqué s'est borné à déclarer qu'il y avait lieu d'ordonner l'enregistrement de la lettre du 26 janv. 1906 aux frais de la dame de Castellan, à titre de dommages-intérêts, « sa prétention non justifiée en ayant nécessité la production); – Mais attendu que l'action en justice est un droit, dont l'exercice ne dégénère en faute, pouvant donner ouverture à des dommages-intérêts, que s'il constitue un acte de malice ou de mauvaise foi, ou, tout au moins, une erreur grossière équipollente au dol; Attendu qu'aucune cir. constance de cette nature n'est relevée par les juges du fond; que, par suite, en statuant comme ils l'ont fait, ils n'ont pas donné une base légale à leur décision, et ont violé l'article de loi ci-dessus visé; Casse..., mais seulement au chef qui a ordonné l'enregistrement de la lettre du 26 janv. 1906 aux frais de la dame de ('astellan, etc.

Du 2 déc. 1912. - Ch. civ. - MM. Baudouin, le prés.; Falcimaigne, rapp.; Lombard, av. gen. (concl. conf.); Durnerin et Auger, av.

par l'arrêt.

membres de la chambre des vacations peu- roger à cet usage, et que, s'il subissait une
vent, vu le caractère d'urgence que pré- retenue sur son salaire, cette retenue était
sente le règlement des qualités, procéder faile par le patron, agissant comme son
à ce règlement, en vertu de la plénitude mandataire, pour l'assurer contre les ac-
de juridiction dont ils sont investis, ils ne cidents pouvant survenir aux auxiliaires
peuvent cependant user de ce pouvoir que embauchés et dirigés par lui dans le travail
dans le cas où tous les magistrats, qui ont de la mise en cave (4) (Id.).
concouru à la décision judiciaire à laquelle
se rattachent ces qualités, sont absents ou

(Clémençon C. Gauthier).
empéchés, et à la condition que leur ab. M. Clémençon a formé un pourvoi en
sence ou leur empèchement soient dûment cassation contre l'arrêt de la Cour de Paris
constatés; Attendu que les qualités du du 3 juill. 1911, rapporté S. et P. 1912.
jugement rendu par le tribunal de Nice, 2.161; Pand per., 1912.2.164. – Moyen
le 3 aoùt 1909, ont été réglées, le 27 août unique. Violation de l'art. lor de la loi du
suivant, par M. Roure, et qu'il résulte des 9 avril 1898, et de l'art. 7 de la loi du 20 avril
énonciations dudit jugement que M. Roure 1810, en ce que l'arrêt attaqué a considéré
ne figurait pas parmi les magistrats qui comme ne pouvant être rattaché au travail
l'ont rendu; que, d'autre part, le règlement qui fait l'objet de l'entreprise de Gauthier
des qualités ne constate pas l'absence ou un travail accessoire, naturellement lié à
l'empèchement des magistrats qui ont pris l'exercice normal de la profession, ainsi
part au jugement attaqué; d'où il suit qu'il résultait des constatations non déniées
que ledit règlement est nul, comme in-
compétemment effectué, en violation de

ARRÊT. l'article ci-dessus visé; que cette nullité entraîne la nullité du jugement attaqué; LA COUR; Attendu que l'arrêt atta

– Casse le jugement rendu le 3 août 1909 qué déclare que Clémençon, camionneur par le tribunal civil de Nice, etc.

au service de Gauthier, a été chargé, le Du 28 janv. 1913. MM. Baudouin, 17 févr. 1910, de livrer une pièce de vin à Jer prés.; Cottignies, rapp.; Lombard, av. Vacher; qu'à la demande de ce dernier, il gén. (concl. conf.); Gault, av.

consentit à descendre le fùt dans la cave; qu'il fut alors victime d'un accident qui

l'aurait laissé atteint d'incapacité permaCASS.-Civ. 10 mars 1913.

nente ; que ledit arrêt constate, en outre, OUVRIER, ACCIDENTS DU TRAVAIL, RESPON

souverainement que l'usage, à Paris, est SABILITÉ, Loi du 9 AVRIL 1898, CAMION

que les marchandises camionnées, et noNEUR, LIVRAISON DE FUTS, MISE EN CAVE,

tamment les fûts de vin, soient livrées à la USAGES, POUVOIR DU JUGE, APPRECIATION

porte du destinataire, et qu'une mention SOUVERAINE, RETENUES SUR LE SALAIRE

expresse, portée en tête des bordereaux de (Rép., V° Responsabilité civile, n. 2145 et

livraison, rappelait cet usage; qu'il ajoute s., 2707 et s. ; Pand. Rép., vis Travail,

que Clémençon ne justifie d'aucune auton. 2454 et s., 4155 et s., Travail (appen

risation expresse ou tacite que Gauthier

lui avait donnée de déroger à cet usage, et dice), n. 193)

que, s'il subissait une retenue sur son saLes juges du fond décident à bon droit laire, cette retenue était faite par Gauthier, que l'accident, dont a été victime, à Paris, agissant comme son mandataire, pour l'as un camionneur au service d'un entreprp- surer contre les accidents pouvant surneur de transports, pendant qu'il descen- venir aux auxiliaires embauchés et dirigés dait un fül dans la cave d'un destinataire, par lui dans le travail de la mise en cave; à la demande de ce dernier, n'est survenu Attendu que, de ces constatations et inni par le fait ni à l'occasion du travail et terprétations souveraines des conventions ne donne pas lieu à l'application de la loi des parties, l'arrêt attaqué a conclu à bon du 9 avril 1898, alors qu'ils constatent sou- droit que l'accident, dont Clémençon deverainement qu'il est d'usage, à Paris, que mandait la réparation à Gauthier et au les marchandises camionnées, el notamment Syndicat lyonnais de garantie, assureur de les fûts de vin, soient livrées à la porte ce dernier, n'est survenu ni par le fait ni du destinataire, et que, dans l'espèce, une à l'occasion du travail commandé par mention expresse, portée en téle des borde- Gauthier à Clémencon, qui ne peut, par reaux de livraison, rappelail cet usage (3) suite, invoquer le bénéfice de la loi du (L. 9 avril 1898, art. ler).

9 avril 1898; Rejette, etc. ...Et alors que, par une interpretation Du 10 mars 1913. -- Ch. civ. MM. Bau souveraine des conventions des parties, douin, ler prés.; Reynaud, rapp.; Lomils déclarent que le camionneur ne justifie bard, av. gen. (concl. conf.); Jouarre et d'aucune autorisation expresse ou tacite Raynal, av. que son patron lui aurait donnée de

CASS.-Civ. 28 janvier 1913.
QUALITÉS DE JUGEMENT OU D'ARRÊT, RÈGLE-

MENT, VACATIONS, MAGISTRAT INCOMPE-
TENT, NULLITÉ (Rép., vo Jugement et arrêt
mat. civ. et comm.], n. 2644 et s.; Pand.
Rép., voJugements et arrêts, n. 1842 et s.).

Si, pendant les vacances, les membres de la chambre des vacations peuvent, vu le caractère d'urgence que présente le règlement des qualités, procéder à ce règlement, en verlu de la plenitude de juridiction dont ils sont investis, ils ne peuvent cependan! user de ce pouvoir que dans le cas tous les magistrals, qui ont concouru à la cision judiciaire à laquelle se rattachent ces qualités, sont absents ou empêches, et à la condition que leur absence ou leur empêchement soient dûment constaté's (1) (C. proc., 145).

Adelaut de quoi le règlement est nul, et sa nullité entraine également la nullité du jugement dont les qualités ont été incompriemment réglées (2) (Id.).

(Bedel frères C. Ferrieux). ARRÊT.

LA COUR; Vu l'art. 145, C. proc.; Attendu que si, pendant les vacances, les

(1.2) Jurisprudence constante. V. Cass. 18 janv. 1899 (S. et P. 1901.1.12; Pand. per., 1899.1.215); 16 févr. 1903 (S. et P. 1903.1.136; Pand. pér., 1903.1.228); 24 juin 1907 (s. et P. 1907,1.488; Pand. pér., 1907.1.316), et les renvois.

(3-4) L'application de la loi du 9 avril 1898 aux accidents survenus à un camionneur pendant la mise en cave de fûts de vins au domicile des destinataires a donné lieu à des décisions diver

gentes. V. Paris, 31 mai 1910 (S. et P. 1911.2.85;
Pand. pér., 1911.2.85); Paris, 3 juill. 1911 (S.
et P. 1912.2.164; Pand. per., 1912.2.164), rendu
dans la présente affaire, les notes et renvois. La
question n'est pas susceptible d'une solution uni-
forme. On conçoit que, s'il n'y a pas d'usage ni
de convention contraire, le patron du camionneur
puisse être déclaré responsable de l'accident sur-
venu au camionneur pendant la mise en cave (V.

en ce sens, Paris, 31 mai 1910, précité, et les renvois de la note), et qu'au contraire, l'application de la loi de 1898 doive être écartée, si l'usage, souverainement interprété par les juges du fond (V. Cass. 8 janv. 1912, S. et P. 1912.1.168; Pand. pér., 1912.1.168, et les renvois), ou la convention des parties interdisent au camionneur de se charger de l'encavage pour le compte des destinataires, V. Paris, 3 juill, 1911, précité.

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(1-2) L'arrêt ci-dessus rapporté résout la question controversée de savoir si une servitude coutumière, spéciale à la Normandie, et reconnue par un arrêt de règlement du Parlement de cette province, en date du 17 août 1751 (Basnage, Comment, sur la cout. de Normandie, 4. éd., t. 1er, appendice, arrêts de règlement, p. 19 et s.), subsiste aujourd'hui comme servitude légale, et peut être encore invoquée par les habitants de nos département de l'Ouest. La Cour de cassation vient de se prononcer pour la négative; et cette solution doit, à notre avis, être approuvée. La servitude spéciale dont il s'agit se trouve, en effet, abrogée, soit par la loi des 28 sept.-6 oct. 1791, soit par celle du 30 vent. an 12.

I. L'art. 1o, sect. 1, tit. 1°r, de la loi des 28 sept.6 oct. 1791 (S. 1'' vol. des Lois annotées, p. 169) commence par proclamer le principe de la liberté de la propriété sur tout le territoire de la France; puis l'art. 4, sect. 4, même titre, est ainsi conçu : • Le droit de clore et de déclore ses héritages résulte essentiellement de celui de propriété et ne peut être contesté à aucun propriétaire. L'Assemblée nationale abroge toutes les lois et coutumes qui peuvent contrarier ce droit ».

Cette disposition, dont la Cour de cassation a déjà, à diverses reprises, fait application, en reconnaissant ainsi qu'elle était toujours en vigueur (V. Cass. 8 mai 1828, S. et P. chr.; 19 jaill. 1837, P. 1837.2.621; 27 avril 1846, S. 1846.1.488. P. 1846.2.24), est générale ; elle pose, comme règle absolue, que tout propriétaire a le droit de clore et de déclore ses héritages; elle fait de ce droit un attribut, une conséquence du droit de propriété, et, pour en assurer le plein et complet exercice, elle déclare abroger toutes les lois et coutumes qui peuvent contrarier ce droit. V. Demolombe, Servit , t. 1o, n. 282; Laurent, Princ. de dr. civ , t. 7, n. 440; et notre Rép. gen. du dr. fr., Do Clôture, n. 4; Pand. Rép., po Clótures, n. 7 et s.

Or, l'art. 11 de l'arrêt de règlement du Parlement de Normandie du 17 août 1761 avait mani. festement pour résultat de contrarier » le droit du propriétaire de déclore ses héritages. Ce texte, en effet, interdisait au propriétaire d'une haie vive ou d'un fossé, établis sur son propre terrain, d'enlever la haie, de combler le fossé ; il lui imposait l'obligation d'entretenir toujours ces clôtures, et, s'il voulait les faire disparaître entièrement, il ne le lui permettait que pendant une courte période de l'année, et à la condition d'en avertir les voisins trois mois à l'avance.

De telles prescriptions sont, sans aucun doute, restrictives du droit, pour le propriétaire, de déc!ore ses héritages ; elles sont dès lors en opposition avec la loi des 28 sept.-6 oct. 1791, et ne peuvent survivre à son art. 4, qui déclare expressément les abroger. V. en ce sens, Daviel, Tr. des cours d'eau, t. 3, n. 856 ; et notre Rép. gen. du dr. fr., po Haie, n. 22. V. cep., Pand. Rép., verb. cit., n. 20. C'est, à notre avis, méconnaître la portée des

ANNÉE 1913. - 5° cah.

dispositions de la loi des 28 sept.-6 oct. 1791 que de soutenir, comme l'a fait M. Demolombe, op. cit., t. 1°r, n. 481, qui cite en ce sens un arrêt de la Cour de Caen du 22 janv. 1848 (Rec. de Caen, t. 12, p. 500), qu'edictée en vue de supprimer les droits de parcours et de vaine pâture, qui faisaient obstacle au droit de se clore », la loi de 1791 n'a pu abroger l'arrêt de règlement de 1761, qui gênait seulement l'exercice du droit de se déclore, sans le supprimer. Il nous paraît impossible d'interpréter aussi restrictivement la loi de 1791, qui proclame de la manière la plus absolue le droit du propriétaire de déclore ses propriétés, et n'admet pas, par suite, que ce droit puisse être non seulement supprimé, mais même gêné ou entravé.

II. Voulût-on d'ailleurs admettre, avec le savant doyen de la Faculté de droit de Caen, que loi de 1791 a une portée tout à fait limitée, et qu'elle ne statue qu'en vue du parcours et de la vaine pâture, la solution consacrée par notre arrêt n'en devrait pas moins être adoptée, et cela par appli. cation de l'art. 7 de la loi du 30 vent. an 12 (S. 1'- vol. des Lois annotées, p. 667).

Cette loi, qui réunit en un seul corps les trentesix lois de droit civil promulguées antérieurement, notamment la loi du 6 pluv. an 12, sur la propriété, et la loi du 10 du même mois, sur les servitudes, contient un article final (art. 7) ainsi conça : « А compter du jour où ces lois sont exécutoires, les lois romaines, les ordonnances, les coutumes générales ou locales, les statuts, les règlements cessent d'avoir force de loi générale ou particulière dans les matières qui sont l'objet desdites lois composant le présent Code ».

Les auteurs du Code civil, qui voulaient mettre fin à la diversité de l'ancien droit et doter la France d'une législation uniforme, ont ainsi prononcé d'une manière expresse l'abrogation en masse de tout l'ancien droit. L'art. 7, disent MM. Baudry-Lacantinerie et Houques-Fourcade (Des pers., 3e éd., t. 1, n. 67), « retire toute force obligatoire au droit ancien, non pas seulement dans la mesure où il est incompatible avec les règles nouvelles, mais dans les matières qui font l'objet du Code civil. Il suffit donc qu'une matière fasse l'objet d'une ou plusieurs dispositions de ce Code, pour que la législation ancienne, relative à cette même matière, soit abrogée complètement », Ce principe ne reçoit exception que dans le cas ou le Code civil rappelle et confirme l'ancien droit. V. en ce sens, Chabot, Quest. transit., t. 1, n.3; Aubry et Rau, 6o éd., t. 1, p. 34, § 14, texte et note 1; Laurent, op. cit., t. 1, n. 25; Huc, Comment. du C. civ., t. 1, n. 28; Planiol, Tr. élém. de dr. civ., 5° éd., t. 1, n. 82.

Or, l'art. 644, C. civ., définit la propriété « le droit de jouir et de disposer des choses de la manière la plus absolue », ce qui implique, pour le propriétaire, le droit d'exclure les tiers de la participation à l'usage ou à la disposition de ces mêmes choses.

D'un autre côté, la charge que, dans notre espèce, la defenderesse au pourvoi voulait, dans l'intérêt de son fonds, faire reser sur le fonds du propriétaire voisin, était une servitude. Or, le Code a limitativement indiqué les servitudes légales grevant les fonds ruraux ; la servitude litigieuse n'y figure pas; elle a donc cessé d'exister à titre de servitude légale.

Enfin, le Code civil a réglementé le droit de clôture : « Tout propriétaire, dit l'art. 647, peut clore son héritage »; le droit de clore comporte, en principe, celui de déclore. – Sans doute, dans les villes et faubourgs, chacun peut contraindre son voisin à contribuer aux constructions et réparacions de la clôture séparant les héritages contigus (C. civ., 663); mais cette disposition est inapplicable aux biens ruraux ; dans les campagnes, le propriétaire peut, à son gré, clore ou déclore son fonde. Il n'est tenu à entretenir une clôture que si elle est mitoyenne (C. civ., 667). Quand la clôture est sa propriété exclusive, il en peut disposer d'une manière absolue, ontretenir la haie ou la laisser dépérir, l'enlever en totalité ou en partie, combler le fossé à toute époque de l'année et sans en prévenir le voisin.

Voilà quel est, d'après le Code civil, le droit du propriétaire d'un fonds rural. Ce droit est en complète opposition avec les obligations imposées par le règlement du Parlement de Normandie du 17 août 1751.

Il est donc bien certain que l'art. 7 de la loi du 30 vent. an 12 était applicable dans notre espèce, et que la Cour de cassation aurait pu, en s'appuyant sur cet article, déclarer abrogée la servitude litigieuse. Elle a préféré s'en tenir À la loi des 28 sept.-6 oct. 1791, qui régissait expressément le droit de ciore et de déclore les biens ruraux, et avait, par conséquent, une application directe à la question soulevée par le pourvoi.

Mais la jurisprudence antérieure de la Cour de cassation démontre que, lorsqu'elle s'est trouvée en présence, non plus d'une disposition de droit intermédiaire, mais de la loi même du 30 rent. an 12, elle n'a pas hésité à l'appliquer, à en reconnaître toute la portée, et à déclarer aujourd'hui inexistantes, comme servitudes légales, les anciennes servitudes coutumières que le Code civil passe sous silence.

Ainsi, dès le 31 déc. 1810 (S. et P. chr.), elle cassait, pour violation des art. 671 et 672, C. civ., et de l'art. 7 de la loi du 30 vent, an 12, un arrêt de la Cour d'Aix qui avait déclaré encore en vi. gueur un usage pratiqué dans les environs de Monaco, et suivant lequel les propriétaires d'oliviers, de citropniers et d'orangers avaient le droit de pénétrer sur les fonds des voisins pour cueillir les fruits de ces arbres. Elle décidait, par suite, que cette servitude était abrogée.

De même, le 21 avril 1813, sur un pourvoi formé dans l'intérêt de la loi par son procureur général Merlin (S. et P. chr.), la chambre civile caseait, pour violation de l'art. 7 de la loi de vent.

Ire PART. - 33

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tendu, en effet, que cette loi, qui, dans l'art. 1er de la sect. Tre du tit. Jer, proclame la liberté, en France, de la propriété territoriale, précise, dans l'art. 4 de la sect. 4, que le droit de clore et de déclore ses héritages résulte essentiellement de celui de propriété, qu'il ne peut être contesté à aucun propriétaire, et que ledit article abroge toutes les lois et coutumes qui peuvent contrarier ce droit; d'où il suit qu'en statuant comme il l'a fait, l'arrêt attaqué a violé l'article de loi ci-dessus visé; Casse, etc.

Du 3 févr. 1913. Ch. civ. MM, Durand, prés.; Lénard, rapp.; Mérillon, av. gén. (concl. conf.); Hannotin et de Valroger, av.

CISS.-CIV. 3 février 1913.

(Patry C. V've Hardouin).

Pourvoi en cassation par M. Patry.

Moyen unique. Violation des art. 647, 663, M. Patry est propriétaire à Beauchêne, 667, 668, 697, 702, C. civ., 4, sect. 4, tit. ler, dans l'arrondissement de Doinfront (Orne), de la loi des 28 sept.-fi oct. 1791, 7 de la d'une prairie contiguë à un champ appar- loi du 30 vent. an 12 et 7 de la loi du tenant à Mme Hardouin. La prairie était 20 avril 1810, en ce que l'arrêt attaqué, entourée de haies vives, qui étaient la pro- tout en constatant que l'exposant était propriété de M. Patry. Le champ de Mme Mar- priétaire exclusif des haies entourant son douin est grevé, pour l'exploitation de la pré, et que, de plus, il avait un droit de prairie, d'une servitude de passage, qui passage non contesté sur le champ voisin, s'exerce au moyen de brèches pratiquées appartenant à la défenderesse, a déclaré dans les haies. Jusqu'en 1906, ces brèches qu'il était tenu, pour clore et déclore sa étaient munies de balises servant de propriété, de se conformer aux conditions barrières mobiles, que M. Patry ouvrait prévues par l'arrêt de règlement du Parquand il avait besoin de passer. En 1904i, iement de Normandie du 17 août 1751, il a émis la prétention de déclore ces alors que ces dispositions réglementaires brèches, en enlevant les barrières qui les ont été abrogées tant par la loi du 28 sept. fermaient. MmeHardouin lui ayant contesté 1791 que par celle du 30 vent, an 12 et ce droit, M. Patry l’a assignée devant le tri- par le Code civil. bunal civil de Domfront, à l'effet « de voir

ARRÊT. dire qu'il avait le droit de se clore et de se déclore sans réserve et sans condition; LA COUR: Sur le moyen unique du voir décider qu'il pourrait librement user pourvoi : Vu l'art. 4, sect. 4, tit. Jer, de de son droit de propriété, et qu'il pourrait la loi des 28 sept.-6 oct. 1791; Attendu notamment laisser les brèches dont il s'a- que, des qualités de l'arrêt attaqué, il régit ouvertes ou fermées, selon qu'il vou- sulte que Patry, propriétaire d'une prairie drait, et ce, même sans entente préalable située à Beauchêne (Orne), entourée de avec l'ajournée Pour faire repousser

haies et enclavée, avait un droit de pascette demande, Mme Hardouin s'est appuyée sage sur la terre contiguë, appartenant à sur un arrêt de règlement du Parlement la dame Hardouin; – Attendu que, pour de Normandie, en date du 17 août 1751, refuser à Patry le droit de détruire la haie dont l'art. Il est ainsi concil: « Les pro- plantée exclusivement sur son terrain, le priétaires d'héritages qui sont actuelle- long de la terre de la dame Hardouin, et ment clos de haies vives ou de fossés se. pour le contraindre à entretenir ladite ront tenus d'entretenir lesdites clôtures, haie en tout temps en parfait état, ainsi si mieux ils n'aiment détruire entièrement qu'à maintenir fermées, après chaque la clôture le long de l'héritage voisin, ce passage, les brèches pratiquées dans cette qu'ils auront la liberté de faire, s'il n'y a haie, l'arrêt attaqué se fonde sur l'art. 11 titre au contraire; et, néanmoins, ceux qui d'un arrêt de règlement du Parlement de voudront détruire leur clôture ne pourront Normandie, en date du 17 août 1751, qui le faire que depuis la Toussaint jusqu'à imposait au propriétaire d'un héritage Voël, après avoir averti le voisin trois mois clos de haies vives ou de fossés la charge auparavant; et, jusqu'au temps de la des- d'entretenir ces clôtures le long de l'hétruction de la clôture, ils seront obligés de ritage voisin, et ne l'autorisait à les dél'entretenir ». — La prétention de Mme Har- truire que de la Toussaint à Noël, s'il en douin a été admise successivement par un avait averti le voisin trois mois à l'avance; jugement du tribunal de Domfront et par Mais attendu que le règlement susvisé un arrêt confirmatif de la Cour de Caen n'est plus en vigueur; qu'il a été abrogé du 17 juill. 1908.

par la loi des 28 sept.-6'oct. 1791; - At

1° DERNIER RESSORT, DEMANDE INDÉTER

MINÉE, EXÉCUTION DE TRAVAUX, SERVI-
TUDE, CONTESTATION, NORMANDIE (Rép.,
vo Appel [mat. civ.], n. 222 et s ; Pand.
Rép., vo Appel civil, n. 1860 et s.).
20 CASSATION, JUGEMENT EN PREMIER RES-
SORT, FIN DE NON-RECEVOIR (Rép., po Cas-
sation (mat. civ.], n. 656 et s.; Pand. Rép.,
vo Cassation civile, n. 257 et s.).

1Lorsque le demandeur prétend avoir, en vertu de l'arrel de règlement du Parlement de Normandie du 17 août 1751, le droit de contraindre le propriétaire voisin à maintenir en bon état les clôtures, appartenant à celui-ci, qui séparent leurs heritages, droit que le defendeur soutient avoir été abrogé par les lois des 28 sept.6 oct. 1791 et 30 vent. an 12, la demande en rétablissement en bon état des clôtures, sous une contrainte de 1.000 fr., mellant en question l'existence d'un droit de servitude, est indéterminée (1) (L. 11 avril 1838, art. ler).

20' Dès lors, le jugement rendu sur cette demande étant susceptible d'appel, le pourvoi en cassation forme contre ce jugement n'est pas recevable (2) (L. 1er déc. 1790, art. 2).

an 12, un jugement du tribunal civil d'Amiens, qui avait appliqué comme encore en vigueur un ancien usage spécial à la Picardie, suivant lequel un propriétaire, qui venait d'extraire des tourbes de son terrain, pouvait, lorsque ce terrain n'était pas suffisant pour les y faire étendre et les faire sécher, les déposer sur la propriété libre des voisins, en leur payant une indemnité. V. égal., sur l'abrogation des servitudes coutumières par l'art. 7 de la loi du 30 vent, an 12, Merlin, Rép., 5e éd., vo l'oisinage, $ 4, n. VI; Pardessus, Servit., t. 2, n. 343; Aubry et Rau, 5' éd., t. 1, p. 116, § 30, texte et note 41, et t. 3, p. 4 et s., $ 238 ; BaudryLacantinerie et Chauveau, Des biens, 3e éd., n. 929; et notre Rép. gen. du dr. fr., pis Servitudes, n. 581 et 1510, Tourbières, n. 20, et Usages locaux, n. 4; Pand. Rép., vt Droit, n. 286 et s., Lois et décrets, n. 53 et s.

Ces arrêts de la Cour de cassation ont ainsi, depuis longtemps, amené l'extinction définitive de quelques servitudes coutumières.

La servitude spéciale de clôture, usitée en Normandie, a survécu plus longtemps, maintenue par la jurisprudence des tribunaux de la région, pro

tégée, si l'on en croit M. Demolombe (op, et loc.
cit.), « par l'intérêt commun des propriétaires des
prairies et des éleveurs de bestiaux qui, d'a-
près le savant auteur, en justifiait la survivance
dans la région normande. Quelle que puisse être
son utilité, un pareil motif ne nous semble pas
être suffisant pour écarter l'application de textes
formels, tels que les art. 4 de la loi des 28 sept..
6 oct. 1791 et 7 de la loi du 30 vent. an 12. Aussi
nous ne pouvons que nous rallier à la solution
que vient de consacrer la Cour de cassation, saisie
pour la première fois de la question. Il y a tout
lieu de penser que son arrêt déterminera les tribu-
naux et Cours de Normandie à se soustraire à l'in.
fluence de considérations exclusivement locales,
et à ne pas persévérer dans une jurisprudence qui,
en maintenant en vigueur d'anciennes servitudes
coutumières, se mettait en opposition manifeste
avec la pensée d'unification de la législation qui a
inspiré et le droit intermédiaire et le Code civil.

(1) En demandant, sous une contrainte de 1.000 fr.,
l'exécution de certains travaux, le demandeur avait,
il est vrai, maintenu sa prétention dans les limites
de la compétence en dernier ressort du tribunal

civil; mais, comme ces travaux étaient demandés
en vertu d'un droit de servitude, - la servitude cou-
tumière de clôture obligatoire établie par l'arrêt
de règlement du Parlement de Normandie du
17 août 1761, et qui, d'ailleurs, d'après la Cour de
cassation, n'existe plus depuis le Code civil (V.
Cass. 3 févr. 1913, qui précède), - et que ce droit
était contesté, la demande présentait un carac-
tère indéterminé. Il est, en effet, de principe que
les demandes portant sur l'existence ou l'éten-
due de servitudes ont le caractère de demandes
indéterminées. V. Cass. 10 mars 1884 (S. 1884.
1.423. · P. 1884.1.1049), et les renvois. Adde,
notre Rép. gen. du dr. fr., vo Appel (mat. civ.),
n. 222 et s.; Pand, Rép., Appel civil, n. 1860
et s. Comp. Cass. 20 avril 1886 (S. 1890.1.343.
P. 1890.1.813). Il en aurait été différemment, si
l'existence de la servitude n'avait pas été con-
testé par le defendeur. V. Cass. 27 mai 1878 (S.
1879.1.261. - P. 1879,642).

(2) Application du principe que le recours en cagsation n'est pas ouvert contre les jugements susceptibles d'appel. V. Cass. 13 juill. 1903 (S. et P. 1907.1.15), et les ren vois.

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