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parties saisies et M. Sachsé, subrogé dans la poursuite. Le 2 oct. 1906, M. de Panat, qui demandait à être subrogé à son tour, est intervenu dans la poursuite. Par jugement du 19 juill. 1907, le tribunal de Foix, en même temps qu'il admettait la demande en subrogation, a débouté la Comp. Couserans Mines de sa demande en distraction, par le motif que de Panat, en sa qualité de subrogé à la poursuite de saisie, a, tout comme l'aurait eu le premier saisissant, le droit de s'opposer à cette demande ». Il a donné acte à M. Sachsé de ce qu'il s'en rapportait à justice.

La Comp. Couserans Mines limited a interjeté appel de ce jugement, en soutenant que M. de Panat, créancier né et inscrit postérieurement à la transcription de son acte d'acquisition, était à son égard un tiers, qui ne pouvait se prévaloir de la nullité édictée par l'art. 686, C. proc., et que son acquisition se trouvait d'ailleurs consolidée par ce fait qu'antérieurement au jugement de l'instance en distraction, tous les créanciers liés à la poursuite au moment de la transcription de son acte d'acquisition avaient consenti mainlevée.

- At

30 juill. 1908, arrêt de la Cour de Toulouse, qui repousse toute distinction entre les créanciers inscrits, soit avant, soit après la transcription de l'acte d'aliénation des biens saisis; admet M. de Panat, créancier né et inscrit après cette transcription, à se prévaloir de la nullité édictée par l'art. 686, C. proc., et, en conséquence, confirme le jugement de première instance, avec adoption de motifs. Cet arrêt est conçu dans les termes suivants : << La Cour; tendu que les motifs indiqués par les premiers juges à l'appui de leur décision la justifient, et que la Cour les adopte; qu'ils ont justement décidé que de Panat, subrogé à la poursuite, a, comme tel, tous les droits du premier créancier saisissant pour sauvegarder les intérêts des créanciers inscrits et les siens propres ; qu'il a, en effet, le droit de prétendre aux sommes consignées, en vertu de l'art. 687, C. proc., alors même qu'il serait créancier chirographaire; que, créancier inscrit, non sommé, mais créancier subrogé à la poursuite, il a le droit de s'opposer à la demande en distraction introduite à la requête de la Société Couserans Mines; qu'à la transcription de la vente faite par les consorts de Narbonne-Lara à ladite société, et qui est à la date du 16 sept. 1898, de Panat, subrogé à la poursuite par arrêt en date du 25 juillet 1898, peut valablement opposer la transcription de la saisie, qui remonte à une époque antérieure, au 4 août de la même année; Attendu, au surplus, et à un autre point de vue, que la Société Couserans Mines, le jour où elle a acquis, des débiteurs saisis, les immeubles qui ont fait l'objet des actes des 12 sept. 1898 et 27 mai 1899, contractait l'engagement de désintéresser le poursuivant et les créanciers inscrits, en capital, intérêts et frais; que l'aliénation consentie par les débiteurs saisis, nulle aux termes de l'art. 686, C. proc., pouvait cependant recevoir son exécution, si, avant le jour de l'adjudication, la société acquéreur avait

consigné somme suffisante pour acquitter, en principal, intérêts et frais, la créance des créanciers inscrits et celle du saisissant, ainsi que les frais de poursuite (C. proc., 687); qu'en admettant que la main

de la saisie, donnée par les créanciers inscrits, puisse être considérée comme une équivalence des obligations de consignation qui lui étaient imposées par l'art. 687, C. proc., il faut remarquer que l'acte du 27 mai 1899 constituait une vente sous condition suspensive, qui ne devenait définitive qu'après l'exécution de la condition; que la mainlevée de certains créanciers, dont la dernière, celle de Darquier, n'a été fournie que le 3 juin 1907, et le paiement des frais de poursuite de la saisie, effectué le 6 juill. 1907, sont postérieurs à l'inscription hypothécaire de de Panat, qui remonte au 5 août 1905, et à la notification de sa demande en subrogation, qui se place au 2 oct. 1906, et qui le rend partie jointe à la procédure en saisie immobilière; que ces constatations permettent d'affirmer qu'au moment où de Panat est intervenu dans la procédure de saisie, et a été placé au nombre des créanciers inscrits, la vente de 1899 n'était point parfaite, et que son droit de s'opposer à la demande en distraction des immeubles qui en font l'objet est justifié tant qu'il ne sera pas payé de sa créance en capital, intérêts et frais; que la transcription de la saisie, antérieure à la transcription de la vente, protège ses droits, tant comme créancier inscrit que comme saisissant, en vertu de la subrogation aux poursuites qu'il a obtenue de la Cour;

Par ces motifs, et ceux des premiers juges, etc. ».

POURVOI en cassation par la Comp. Couserans Mines limited. Moyen unique. Violation des art. 686, C. proc., 3 et 6 de la loi du 23 mars 1855, 722 et s., C. proc., et 7 de la loi du 20 avril 1810, en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande en distraction formée par un acquéreur de biens saisis, en accueillant, en vertu de l'art. 686, C. proc., l'opposition d'un créancier subrogé aux poursuites, mais né, inscrit et étant intervenu postérieurement à la transcription de l'acte d'acquisition, alors que la nullité édictée par ledit art. 686 n'existe qu'au profit exclusif des créanciers liés à la procédure au moment de la transcription de l'acte d'acquisition, créanciers qui, d'ailleurs, étaient reconnus, dans l'espèce, avoir tous donné mainlevée de la saisie. 2o ARRÊT.

LA COUR; Sur la fin de non-recevoir opposée au pourvoi : (sans intérêt); Au fond: Sur l'unique moyen du pourvoi : Vu les art. 686, 687 et 693, C. proc.; Attendu que, malgré les termes absolus de l'art. 686, C. proc., la nullité de la vente d'immeubles, frappés d'une saisie suivie de transcription du procèsverbal, ne peut pas être invoquée par d'autres créanciers de la partie saisie que ceux dont les droits sont garantis par une hypothèque inscrite, puisque c'est à ces derniers seulement qu'il appartient, d'après l'art. 693 du même Code, de s'opposer à la radiation de la saisie, et qu'aux termes

de l'art. 687, il est loisible à l'acheteur de purger ladite nullité en désintéressant les créanciers inscrits; que, par créanciers inscrits, il faut donc entendre ceux-là seuls dont l'hypothèque a été inscrite antérieurement à la transcription de l'aliénation, en conformité des dispositions de l'art. 6 de la loi du 23 mars 1855; qu'en effet, cette transcription a arrêté par elle-même le cours des inscriptions, et mis obstacle à toute action de la part des tiers; - Attendu, en fait, que, des constatations de l'arrêt attaqué il résulte que la Comp. Couserans Mines a, par actes notariés des 12 sept. 1898 et 27 mai 1899, transcrits les 16 sept. 1898 et 14 juin 1899, acquis, des consorts de Narbonne-Lara, diverses propriétés et concessions, situées dans l'arrondissement de Foix; que ces biens avaient fait antérieurement l'objet d'une saisie immobilière, pratiquée par un sieur Lacomme, transcrite le 4 août 1898, et suivie des sommations prescrites par l'art. 692. C. proc., avec mention de ces sommations en marge de la transcription du procèsverbal de saisie, suivant l'art. 693 du même Code; qu'ultérieurement, divers créanciers sont venus, en vertu de jugements de subrogation, prendre la place du premier saisissant et des poursuivants, restés inactifs ou qui s'étaient retirés de la procédure; qu'à la date du 6 juill. 1904, la Comp. Couserans Mines a introduit une demande en distraction de saisie quant aux immeubles qui lui avaient été vendus; que le sieur de Panat, qui était devenu créancier des consorts de Narbonne-Lara. parties saisies, en vertu d'un jugement du tribunal civil de Foix du 3 août 1905, et qui avait pris inscription de ce chef le 5 août suivant, est intervenu dans l'instance pour y défendre; qu'il a soutenu que, bien que créancier postérieur, il avait, en sa qualité de créancier inscrit, le droit de se faire subroger dans les poursuites de saisie, de sauvegarder, tout comme l'aurait pu le premier saisissant, les intérêts des créanciers indistinctement et les siens propres, et d'invoquer, à cet effet, la nullité de l'aliénation consentie par la partie saisie à la Comp. Couserans Mines, par application de l'art. 686, C. proc.; tendu que, tout en reconnaissant que tous les créanciers liés à la poursuite originaire avaient consenti la radiation de leur hypothèque et la mainlevée de la saisie, la Cour d'appel de Toulouse a, néanmoins, fait droit aux conclusions de de Panat, par le motif que celui-ci figurait au nombre des créanciers, et que la transcription de la saisie, antérieurement à la transcription de l'acquisition de la Comp. Couserans Mines, avait protégé les droits de de Panat, tant comme créancier inscrit que comme saisissant, en vertu de la subrogation aux poursuites qu'il avait obtenue; qu'en statuant ainsi, l'arrêt attaqué a violé les art. 687 et 693, C. proc., et faussement appliqué l'art. 686 du même Code; Casse, etc.

At

Du 16 avril 1913. — Ch. civ. - MM. Baudouin, ler prés.; Ruben de Couder, rapp.; Lombard, av. gén. (concl. conf.); Bonnet et Bressolles, av.

1o COMPTE COURANT, NOVATION, INTENTION DES PARTIES, EFFETS DE COMMERCE, AVAL (Rép., v° Compte courant, n. 351 et s., 360 et s., 373; Pand. Rép., eod. verb., n. 431 et s.). 2° EFFETS DE COMMERCE, EFFETS DE COMPLAISANCE, PRET MUTUEL DE CRÉDIT, CAUSE LICITE (Rép., vo Lettre de change, n. 249 et s; Pand. Rép., v° Effets de commerce, n. 4223 et s.).

1o Les créances portées en compte courant perdent leur individualité pour deve

(1-2) La question soumise, d'abord au tribunal de commerce de Chatellerault, puis à la Cour de Poitiers, enfin à la Cour de cassation, était de savoir s'il y avait lieu d'appliquer l'effet novatoire du compte courant à deux billets, d'ensemble 17.500 fr., souscrits par un commerçant au profit de son correspondant, et avalisés par un tiers; si, en conséquence, on devait prononcer, dans les termes de l'art. 1281, C. civ., la libération de l'aval, caution commerciale. La décision sur le second point était la suite inévitable de la décision sur le premier. C'est donc sur le premier que se concentrait la difficulté.

L'effet novatoire du compte courant est une de ces théories qui paraissent infiniment simples et nettes de loin, et dont les contours s'altèrent, lorsqu'on les serre de plus près. Cela est d'autant plus compréhensible que le compte courant est une matière façonnée uniquement par la pratique, sans intervention du législateur; qu'en outre, dans notre espèce, la remise consistait en effets de commerce, ce qui appelle des observations et produit une certaine complication.

Aujourd'hui, on ne doute plus de l'effet novatoire du compte courant. V. Lyon-Caen et Renault, Tr. de dr. comm., 4° éd., t. 4, n. 823 et s.; Thaller, Tr. élém. de dr. comm., 4° éd., n. 1664, p. 808 et s.; Feitu, Tr. du compte courant, n. 199 et s.; ment, Compte courant, n. 117; de Beaurepaire, CléCompte courant, p. 131 et s.; Dupont, De la novation et de l'indivisibilité en matière de compte courant, p. 19 et s. Mais cette doctrine était loin d'être acceptée unanimement, il y a une quarantaine d'années. V. Feitu, op. et loc. cit.; May, Du compte courant, p. 87 ets. V. aussi, Arnoux, Du compte courant, p. 70 et s. C'est qu'à prendre les choses dans leur sens strict. la novation du compte courant répond imparfaitement à la définition habituelle de la novation, qui est le remplacement d'une créance par une autre. Or, ici, la créance, entrée en compte courant, est remplacée par un crédit; et un crédit n'est pas proprement une créance, puisque son essence est de ne pas être exigible, et que la créance ancienne a d'ailleurs perdu sa physionomie distincte, et s'est fondue dans un ensemble indivisible. Ce n'est que le solde, à l'arrêté de compte, qui reprendra figure de créance; de manière que la substitution de la créance nouvelle à l'ancienne n'est pas immédiate, instantanée; elle passe par une phase intermédiaire, amorphe, tout comme la chenille ne se métamorphose en papillon qu'après avoir été enfermée dans l'état intermédiaire de chrysalide. Il faut donc élargir un peu la notion ordinaire de la novation, la dilater dans le temps. Mais cette extension n'est pas de nature à arrêter les juristes. S'il y a, en fait, une légère altération de la notion habituelle, elle n'en conserve pas moins le caractère juridique d'une novation. Il y a un rapport juridique remplacé par un rapport juridique différent, un titre remplacé par un autre ANNÉE 1913. - 5 cah.

nir de simples articles de crédit, et cette novation a pour effet de leur enlever les sûretés ou garanties qui y étaient attachées, à moins que les parties ne soient convenues de les maintenir au profit du solde (1) (C. civ., 1278).

En conséquence, doit être cassé l'arrêt qui, tout en constatant que des billets à ordre, avalisés par un tiers, ont formé l'un des articles du compte courant existant entre le souscripteur et le bénéficiaire, et en reconnaissant même que l'indivisibilite du compte met obstacle à ce que l'on consi

titre, et les deux titres sont incompatibles entre eux. On a aperçu une autre difficulté. La novation n'est pas une chose automatique, mécanique. Elle implique l'intention de nover; et l'intention de nover ne se présume pas; il faut qu'elle résulte clairement de l'acte (C. civ., 1273). Il est donc certain que deux correspondants en compte courant pourraient parfaitement, par une manifestation de volonté formelle, éviter la novation. Il leur suffirait, dans ce but, d'exclure du compte courant une remise déterminée, de lui donner une affectation spéciale. La possibilité d'exclure une remise du compte courant ne fait aucun doute; l'exclusion peut même résulter des circonstances. V. Cass. 29 mars 1886 (S. 1886.1.301. 1.727); Toulouse, 26 juill. 1893 (Journ, des trib. de comm., 1894, p. 645); Lyon, 29 oct. 1896 (Id., 1897, p. 795); Trib. de la Seine, 1er févr. 1898 (Journ. Le Droit, 23 avril 1898). Comp. Paris, 2 déc. 1898 (Journ. des trib. de comm., 1899, p. 452); Douai, 28 nov. 1901 (Id., 1903, p. 754); Nancy, 6 mars 1900 (motifs) (Id., 1908, p. 655).

P. 1886.

Ou discute seulement la question de savoir si cette exclusion, qui est, en somme, une dérogation à la convention initiale de compte courant, peut résulter de la volonté unilatérale de l'un des correspondants, ou s'il ne faut pas exiger, à chaque fois, un accord de volontés. Cette dernière opinion est soutenue par de très éminents auteurs. V. Lyon-Caen et Renault, op. cit., t. 4, n. 803; de Beaurepaire, op. cit., p. 76. L'opinion contraire nous paraît cependant préférable, notamment en présence de l'art. 574, O. comm., qui semble bien impliquer que l'affectation spéciale, et, par suite, l'exclusion du compte courant, sont le fait unilatéral de l'endosseur (argument tiré des mots : « ou lorsqu'elles auront été, de sa part, spécialement affectées déterminés). Au surplus, chacun des correspondes paiements dants est libre de ne point faire de remises. Il semble qu'il soit logique de l'autoriser, lorsqu'il fait la remise, à l'exclure du compte courant. D'autre part, l'autre correspondant peut avoir des motifs légitimes de refuser l'entrée en compte courant de telle ou telle remise. V. en ce sens, Feitu, op. cit., n. 106 et 8. ; Clément, op. cit., n. 34 et s. Tout le monde tombe d'ailleurs d'accord que l'entrée en compte courant est, à défaut de volonté contraire, la suite naturelle de l'existence de ce compte, et qu'elle doit se présumer.

Mais une question délicate se posait. Si la novation ne se produit pas mécaniquement, en ce sens qu'il est loisible à la volonté des parties d'exclure du compte courant une remise déterminée, du moins ne se produira-t-elle pas mécaniquement toutes les fois qu'il n'y aura pas exclusion, et par le seul fait de l'insertion au compte courant? Sur cette question délicate, la doctrine est hésitante, et la jurisprudence est bien vague et indécise. L'hésitation, l'indécision, sont d'autant plus com

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dère ses divers éléments comme constituant autant de créances distinctes, condamne cependant le donneur d'aval, comme tenu en vertu de son aval, au paiement des billets, sans s'expliquer sur un accord des parties qui aurait réservé au solde du compte la garantie résultant de l'aval, et en se fondant sur ce seul motif que le créditeur d'un compte courant « a le droit de se prévaloir, jusqu'à due concurrence, des sûretés, et notamment des cautionnements qui lui auraient été successivement consentis » (2) (Id.). 2o Les effets de commerce échangés entre

préhensibles qu'il s'agit de remises en effets de commerce, qui admettent de certaines particularités au sujet des conséquences habituelles du compte courant. La conséquence fondamentale, le transfert de propriété, ne se produit que sous la condition expresse ou sous-entendue, caissement ». V. Lyon-Caen et Renault, op. cit., sauf ent. 4, n. 810 et s.; Feitu, op. cit., n. 130 et s.; May, op. cit., p. 63 et s.; Clément, op. cit., n. 50 et s. D'autre part, ce qui nous touche de plus près, la remise en compte courant n'anéantit pas véritablement la nature de l'effet; il demeure un effet de commerce, avec ses avantages et ses conditions. L'intention des parties, et spécialement le fonctionnement de la clause sauf encaissement qui est une des manifestations de cette intention, le veulent ainsi. Lorsque la remise consiste en un effet de commerce, le récepteur a eu parfaitement l'intention d'utiliser cette remise avec son caractère antérieur d'effet de commerce, de le négocier, de le toucher à l'échéance, de recourir contre les signataires, qui sont garants solidaires, enfin, en cas de non-paiement à l'échéance, de contrepasser, tout en demeurant, selon la jurisprudence, maître de cumuler les deux moyens, la contrepassation et la poursuite des garants solidaires. C'est précisément à cette hypothèse que fait allusion un arrêt de Douai du 14 nov. 1901 (Rec. de Douai, 1902, p. 109), quand il déclare que, en cas de non-paiement, l'insertion d'une traite dans le compte courant est restée sans effet, et n'a pas pu, par une novation qui ne s'est pas réalisée, la dépouiller des sûretés qui y étaient attachées. Il ne serait pas à propos, selon nous, de voir dans cet arrêt de Douai une opposition à la théorie commune sur l'effet novatoire du compte courant. L'arrêt constate simplement que, par suite du jeu de la clause sauf encaissement la novation ne s'est pas

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produite.

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Mais il faut faire bien attention que les observations ci-dessus supposent que la remise en effets de commerce a donné lieutà un crédit. Or, il est des cas, et précisément dans notre espèce actuelle, où le montant de l'effet de commerce est passé en débit. C'est ce qui arrive dans le cas « où le porteur de l'effet est en compte avec le tiré, et où, à l'échéance, il débite le tiré du montant de l'effet cette passation équivaut alors à paiement; elle libère le tireur et les différents signataires; le tiré lui-même ne pourra plus être poursuivi en vertu de la lettre de change ». V. Dupont, op. cit., p. 37. Et il en est de même dans le cas, qui est celui de l'arrêt actuel, d'effets que l'un des correspondants peut avoir souscrits au profit de l'autre, et qui sont passés en compte courant avant l'échéance (Dupont, eod. loc.). Si le banquier, qui reçoit l'effet, l'inscrit au crédit du client, l'exigibilité de cet effet à l'échéance est maintenue. Mais, si le banquier, renvoyant l'effet au client, en porte le montant à son débit, ⚫ cette passation vaudra Ire PART.

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deux correspondants en compte courant, qui se livrent à des échanges de signatures, en vue de se procurer du crédit et des res

paiement; l'exigibilité du billet disparaîtra; toute action sera éteinte ». V. Dupont, op. cit., p. 88. Et cet auteur ajoute : . En résumé, suivant les circonstances, suivant que le montant de l'effet aura été passé au crédit ou au débit du souscripteur, on reconnaîtra que les parties ont voulu, soit maintenir, soit faire disparaître son exigibilité (ubi supra).

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Il y a donc des particularités, et, il faut le reconnaître, assez subtiles, qui tiennent à ce fait que la remise consiste en effets de commerce. Ces particularités compliquent la question, qui était le fond même du débat, de savoir si l'inscription matérielle d'une créance dans le compte, autrement dit si la passation d'écritures suffit à entrainer novation, Assurément, si l'inscription a été faite par erreur, ou, en sens inverse, si, par erreur, on a omis de faire une inscription, si on a fait entrer dans le compte des écritures qui ne devaient pas y entrer, ou si on a emis des écritures qui devaient y être comprises, l'erreur, dans un sens ou dans l'autre, doit être rectifiée. V. Delamarre et Lepoitevin, Dr. comm., t. 3, n. 328; Clément, op. cit., n. 23. Mais écartons le cas d'erreur. L'inscription matérielle d'une créance dans un compte courant emporte-t-elle, en ce qui concerne l'effet novatoire, une présomption juris et de jure, ou seulement la présomption ordinaire, juris tantum? L'hésitation est permise; et il est malaisé, comme nous l'allons voir, de se guider à travers le dédale des arrêts, dont chaque décision est intimement liée au fait.

On a invoqué, dans le sens de l'effet novatoire de l'inscription au compte courant, les arrêts de la Cour de cassation du 19 déc. 1859 (S. 1861.1.77. P. 1860.759) et du 15 déc. 1897 (S. et P. 1899. 1.393; Pand. pér., 1898.1.264); dans l'opinion, qui voit dans le débat une question de fait, le jugement du tribunal civil de Bastia, du 20 févr. 1903, les arrêts de la Cour de Bastia, du 27 juill. 1903, et de la Cour de cassation, du 28 juin 1904 (S. et P. 1909. 1.194; Pand.pér., 1909.1.194); et l'on pourrait alors se demander si notre arrêt du 25 avril 1910 ne consacre pas une solution absolue, dans le sens de la novation. En réalité, ces arrêts, d'autres encore, que l'on a fait intervenir dans la question, ne se prêtent pas à une interprétation aussi simple. L'arrêt de la Cour de cassation, du 19 déc. 1859, précité, déclare que le privilège de l'Administration des douanes ne peut pas suivre la marchandise en mains tierces, et qu'il ne peut pas s'exercer sur le prix, parce qu'il a été réglé en compte courant. Ce n'est donc pas tant l'idée de novation, qui est à la base de cet arrêt, que l'idée commerciale et toute pratique que régler en compte courant, comme, du reste, régler en valeurs, c'est payer. Un arrêt de la Cour de cassation du 29 nov. 1871 (S. 1872.1.70. P. 1872.148; Pand, chr.) a été rendu dans l'hypothèse d'un compte général, dans lequel on avait fait figurer des créances d'origine et de nature différentes, en vue d'en présenter l'ensemble; mais il n'y avait, entre les parties, aucune convention de compte courant. Ce compte ne présentait donc pas le caractère d'un compte courant; et, par conséquent, il était naturel que le simple fait d'avoir porté une créance dans ce compte n'entraînât point novation et ne détruisît pas le caractère privilégié de cette créance. Il n'y a point à faire état d'un arrêt de la Cour de cassation du 1er déc. 1878 (S. 1874.1,82. P. 1874.169), qui indique

sources chez les banquiers pour les besoins de leurs opérations commerciales, sont-ils dénués de cause, et constituent-ils des effets

simplement qu'en matière commerciale, les juges du fond peuvent décider, par appréciation des circonstances de la cause, que les actes produits présentent le caractère d'une véritable novation par changement de créancier. Ces derniers mots démontrent à l'évidence que cet arrêt est étranger à notre matière. Dans l'arrêt de la Cour de cassation du 3 févr. 1892 (S. et P. 1896.1.411; Pand. pér., 1893.1.70), il y avait deux comptes distincts, un compte courant et un autre compte. La volonté de les maintenir séparés ressortait des constatations. On ne pouvait alléguer, en sens contraire, que le fait matériel que la banque avait présenté en un seul état les deux comptes séparés ; ce fait a été jugé insuffisant. L'arrêt de la Cour de cassation du 12 août 1873 (S. 1875.1.315. P. 1875.749) vise un cas d'exclusion d'une remise du compte courant. Il déclare que, lorsque l'un des correspondants est débiteur envers l'autre d'une somme déterminée laissée en dehors du compte courant, les versements effectués par le débiteur ne peuvent être imputés sur ladite dette, quoiqu'elle soit la plus onéreuse, alors que ces versements constituent, non des paiements, mais des remises faites en compte courant. Comp. un arrêt de Cass. 27 juill. 1909 (S. et P. 1911.1.73; Pand. per, 1911.1.73, avec note de M. Lyon-Caen), qui ne statue pas en matière de compte courant, et fait seulement une allusion à l'effet novatoire que présenterait un compte courant.

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Peut-on induire des arrêts précités que la jurisprudence estime que l'effet novatoire dans le compte courant est une question de fait, laissée à l'appréciation du juge du fond, qu'il est à la volonté des parties de consentir, d'une part, à faire figurer des créances dans le compte courant, d'autre part, à en empêcher la novation? V. Feitu, op. cit., n. 206. Comp. la note de M. Wahl sous Cass. 15 déc. 1897, précité. L'analyse des décisions précitées ne conduit pas à cette conclusion. Il est vrai qu'il y a d'abord l'arrêt de la Cour de cassation du 6 nov. 1888 (S. 1891.1.207. P. 1891.1.505; Pand. pér., 1889.1.13), et l'arrêt de la Cour de Bastia du 27 juill. 1903, sous Cass. 28 juin 1904, précité. Le premier déclare que la seule inscription d'un article dans un compte courant non arrêté ne saurait emporter novation. L'arrêtiste explique (note 4) que cela ne contredit pas le principe que l'inscription en compte courant emporte novation. Seulement cette novation doit satisfaire à des conditions: il faut que la passation ait été acceptée par l'autre partie, car il faut le concours des deux volontés pour remplacer une obligation par une autre. Quoi qu'il en soit de l'explication, dont les termes, en tout cas, sont un peu forcés, cet arrêt trahit un doute et du flottement. Quant à l'arrêt de la Cour de Bastia du 27 juill. 1903, il avait donné une décision tout à fait normale et indiscutable, en déclarant Attendu que la novation ne se présume pas; qu'elle doit être expresse, ou tout au moins résulter clairement de l'intention commune des parties et des circonstances de la cause; or, dès l'origine du litige, à toutes les phases de la procédure, les intimés ont toujours nettement formulé leur volonté ferme de conserver, pour leur créance, le bénéfice de l'inscription hypothécaire; ...de leur côté, les débiteurs ont, eux-mêmes, manifesté une intention identique... ». Il ne pouvait donc y avoir aucun doute. Même en admettant la novation, l'art. 1278, C. civ., reconnaît la faculté

de complaisance, nuls en vertu de l'art. 1131, C. civ. (1) (C. civ., 1131; C. comm., 110. 115, 188)? V. la note.

de réserver les privilèges et hypothèques. V. comme application, Cass. 15 juill. 1912 (Supra, 1re part., p. 36), et la note. Il n'y a donc pas lieu de s'en tenir à la formule du jugement du tribunal civil de Bastia, du 20 févr. 1903, portant que le fait, par un créancier, d'avoir compris ou laissé comprendre sa créance dans un compte courant ouvert entre lui et son débiteur, n'emporte pas novation, s'il est constant que les parties n'ont pas eu l'intention d'opérer cette novation....

On le voit, l'analyse minutieuse des documents de jurisprudence, à l'exception de ce jugement du tribunal civil de Bastia, et de l'arrêt, peut-être hasardeux, de la Cour de cassation, du 6 nov. 1888, laisse intacte la thèse que l'inscription en compte courant opère novation. Cette solution est consacrée par l'arrêt précité de la Cour de Douai du 28 nov. 1901, par un arrêt de Rennes, 3 mars 1910 (S. et P. 1912.2.21; Pand. pér., 1912.2.21), et, nous le voyons aussi, par l'arrêt précité de Cass. 15 déc. 1897. Ainsi, toute passation en compte courant emporte novation; et la novation est un effet essentiel du compte courant, puisque l'essence même du compte courant, c'est le versement dans un ensemble, dont les éléments ne sont plus distincts et reconnaissables, mais se fondent en un tout indivisible.

Est-ce à dire, pour en revenir à notre point de départ, que toute inscription matérielle dans le compte soit une passation en compte courant? Assurément non; et c'est là que se trouve la solution du problème. Comme le dit M. Dupont, op. cit., p. 27 et 28, il ne s'agit pas de rechercher si les parties ont voulu nover en passant écriture; il s'agit, pour les juges du fait, de rechercher si les parties ont voulu faire réellement entrer en compte courant la créance, de laquelle on discute si elle a été novée ou non Toute inscription matérielle n'est pas forcément une passation en compte courant. Pour s'en convaincre, il suffit de se référer à l'espèce de l'arrêt de la Cour de cassation du 3 févr. 1892, précité. Mais, du moment qu'il y a passation en compte courant, il y a novation; la novation est forcée, car il y a incompatibilité entre le titre ancien et le titre actuel. V. Lyon-Caen et Renault, op. cit., t. 4, n. 823; Clément, op. cit., n. 119 et s.; Dupont, op. cit., p. 27 et s. Suivant l'expression très juste de M. Clément, la créance ne garde son caractère originaire que si elle est, en réalité, un article étranger à ce compte (p. 181, n. 120).

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La novation reconnue, il ne peut y avoir aucun doute sur ses conséquences juridiques, aux termes des art. 1278 et s., 1281, C. civ. Dans l'espèce cidessus, puisqu'il s'agissait d'un aval, c'était l'art. 1281 dont l'application était en jeu ; cet article exige l'adhésion de la caution, pour que la créance demeure munie de cette garantie. V. la note et les renvois sous Cass. 15 juill. 1912, précité. Adde, Lyon-Caen et Renault, op. cit., t. 3, n. 825; Thaller, op. cit., n. 1664, p. 809; May, op. cit., p. 103 et s.; de Beaurepaire, op. cit., p. 157, 158; Feitu, op. cit., n. 224 et s.; Clément, op. cit., n. 132 et s.; Dupont, op. cit., p. 32 et s. Or, dans l'espèce, il n'était même pas argué du consentement de l'avaliseur au maintien de son aval.

(1) Une autre difficulté avait été soulevée, qui n'a été tranchée implicitement, ni par la Cour d'appel, ni par la Cour de cassation. Il suffira donc de l'effleurer; mais elle est trop intéressante pour

MM. Bergeon père et David, associés de fait pour le commerce des biens, étaient en compte courant, et se livraient entre eux à des échanges de signatures, dans le but de se procurer des ressources pour les besoins de leurs opérations commerciales. C'est ainsi que, le 11 déc. 1899, M. Bergeon père a souscrit, à l'ordre de M. David, deux billets s'élevant à la somme de 17.500 fr., qui ont été avalisés par M. Bergeon fils. Ces billets, qui avaient été escomptés par la banque Labbé-Duvau, ont été portés au débit de M. Bergeon père, dans le compte courant qui existait entre les associés Bergeon-David, compte dont le solde créditeur en faveur des consorts Gervais, ayants cause de M. David, a été fixé à la somme de 30.289 fr. 60. par jugement du tribunal civil de Châtellerault du 3 août 1903, confirmé par arrêt de la Cour de Poitiers du 13 juill. 1904. C'est dans ces circonstances que M. et Mme Gervais ont assigné, devant le tribunal de commerce de Châtellerault, MM. Bergeon père et fils en paiement de la somme de 17.500 fr., montant des effets susdits. Par jugement du 7 oct. 1905, le tribunal a débouté les époux Gervais de leur demande, motifs pris de ce qu'une novation s'était opérée dans la créance, à raison de la confusion des billets dans le compte courant David-Bergeon, dont le solde créditeur devait demeurer ultérieurement le seul titre des ayants cause de M. David. Sur appel des époux Gervais, la Cour de Poitiers, par arrêt du 7 mai 1906,

a

réformé ce jugement. et condamné M. Bergeon fils, comme donneur d'aval, à payer aux époux Gervais la somme de 17.500 fr., en se fondant notamment sur ce que l'indivisibilité du compte courant ferait obstacle à ce qu'on considère ses divers éléments comme constituant autant de créances distinctes, susceptibles d'être éteintes isolément par la voie de l'imputation, de la compensation ou de la novation; qu'ils concouraient, au contraire, à créer une créance unique, qui se dégagerait, à la

la passer entièrement sous silence. Le souscripteur des billets avait articulé que lesdites valeurs étaient sans cause réelle, comme n'ayant été souscrites que pour se procurer des fonds dans les banques. En effet, le souscripteur des effets litigieux et son correspondant se livraient entre eux à des échanges de signatures, en vue de se procurer des ressources pour les besoins de leurs opérations commerciales. La Cour de Poitiers et la Cour de cassation ne se sont point arrêtées à cette articulation. Elles ne l'ont même pas mentionnée; mais la Cour de Poitiers, en admettant la novation, l'a implicitement repoussée. Il y a là une nou velle manifestation de cette distinction, fort délicate, mais, à coup sûr, bien intéressante, entre les effets de complaisance et les effets de circulation. V. Lyon-Caen et Renault, Tr. de dr. comm., 4o éd., t. 4, n. 537, spécialement, p. 447, note 1; Thaller, Tr. élém. de dr. comm. 4° éd., n. 1436, p. 688; Hémard, Des effets de complaisance, p. 8 et s. En somme, le crédit est un des éléments de la fortune du commerçant, élément toujours fort important et, à de certains moments, tout à fait prépondérant. Il est naturel qu'il use de cet élément de sa puissance financière, et, tant qu'il n'en use pas

clôture du compte, au profit de celui qui
demeurerait créditeur, et qui aurait droit
de se prévaloir, jusqu'à due concurrence,
des sûretés, et notamment des cautionne-
ments qui lui auraient été successivement
consentis »

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POURVOI en cassation par MM. Bergeon
père et fils. Moyen unique. Violation
des art. 1271, 1278 et 1281, C. civ., des
principes en matière de novation et de
compte courant, et de l'art. 7 de la loi du
20 avril 1810, pour défaut de motifs et
manque de base légale, en ce
attaqué, sans répondre à un chef précis du
que l'arrêt
dispositif des conclusions de l'appelant,
tendant à faire écarter l'action des défen-
deurs éventuels par une fin de non-rece-
voir absolue, s'est fondé, pour condamner
un donneur d'aval vis-à-vis du porteur du
billet, qui n'en était détenteur qu'en vertu
d'un compte courant, sur ce qu'en droit,
l'entrée d'une créance dans un compte
courant ne produirait pas novation, et lais-
serait subsister, pour garantir parte in qua
la créance résultant du solde dudit compte,
toutes les sûretés attachées aux créances
entrées en compte, alors qu'en principe, la
remise d'une créance en compte courant
emporte novation, et fait disparaître, au
préjudice du créancier, toutes les sûretés
qui assortissaient la créance primitive,
sauf le cas d'une manifestation contraire
et expresse de volonté des parties, que
l'arrêt ne relève pas en la cause.

ARRÊT (apr. délib. en ch. du cons.).
LA COUR; Sur la fin de non-rece-
voir ... (sans intérêt);

Au fond Sur la deuxième branche
de l'unique moyen du pourvoi:
l'art. 1278, C. civ.;
Vu
créances portées en compte courant per-
Attendu que les
dent leur individualité pour devenir de
simples articles de crédit, et que cette no-
vation a pour effet de leur enlever les sû-
retés ou garanties qui y étaient attachées, à
moins que les parties ne soient convenues
de les maintenir au profit du solde;

dans le but de tromper les tiers et de s'attribuer
un crédit fictif, on ne peut pas dire qu'il ontre-
passe les bornes du commerce légitime. Cela sera
exact surtout lorsque l'échange des signatures se
base sur un mouvement réciproque d'affaires qui,
d'ailleurs, ne coïncident pas mathématiquement, et
ne peuvent pas toujours coïncider mathématique-
ment avec la création des effets. Que l'on veuille
bien se rappeler que la provision consiste dans
une créance du tireur contre le tiré, et que, pour
en assurer la souplesse, l'art. 116, C. comm., ne
l'exige qu'à l'échéance. Des effets créés dans ces
conditions ne sont pas dépourvus de provision;
ils ne sont pas des effets fictifs; ils ont un carac-
tère sérieux. Il y a déjà, sur cette matière, une ju-
risprudence intéressante. Un jugement du tribunal
de commerce de Honfleur, du 24 août 1898, sous
Caen, 30 mai 1899 (S. et P. 1900.2.163), déclare :
« Attendu que la création de valeurs de circula-
tion, pas plus que l'escompte de ce papier par le ban-
quier, ne constitue un acte illicite, prohibé par la
loi; que c'est, au contraire, un moyen légitime de cré-
dit, dont le commerce peut faire usage; - Attendu,
en effet, qu'il ne cause aucun dommage aux tiers,
à moins qu'il n'ait pour but de cacher une situa-

267

Attendu que l'arrêt attaqué constate que les billets litigieux ont formé l'un des articles du compte courant au débit de Bergeon père; qu'il reconnait même que l'indivisibilité du compte courant met obstacle à ce que l'on considère ses divers éléments comme constituant autant de créances distinctes, mais, au contraire, comme concourant à créer une créance unique au profit de celui qui, à la clôture du compte, reste créditeur; que, cependant, sans s'expliquer sur un accord des parties qui aurait réservé au solde du compte la garantie attachée aux billets, il a condamné Bergeon fils, comme tenu, en vertu de son aval, à en opérer le remboursement, par ce motif que le créditeur d'un compte couranta le droit de se prévaloir, jusqu'à due concurrence, des sûretés, et notamment des cautionnements qui lui auraient été successivement consentis »; qu'en statuant ainsi, ledit arrêt a violé le texte de loi précité; Casse, etc.

Du 25 avril 1910. · Ch. civ. MM. Ballot Beaupré, 1er prés.; Ruben de Couder, rapp. Melcot, av. gén. (concl. conf.); Labbé et Chabrol, av.

CASS.-CIV. 18 décembre 1912. PRUD'HOMMES, DEMANDES SUCCESSIVES, FIN DE NON-RECEVOIR, JUGEMENT, NULLITÉ (Rép., v Prud'hommes. n. 72 et s.; Pand. Rép., Suppl., vo Conseils de prud'hommes, n. 86).

Lorsqu'un employé congédie, qui avait assigné ses anciens patrons devant le conseil des prud'hommes en paiement d'une somme de 1.000 fr. pour salaires, commissions et indemnité de brusque renvoi, a, cette première instance ayant été terminée par un jugement rendu sur appel, assigné ses anciens patrons en paiement de commissions lui restant dues, manque de base légale la décision du conseil des prud'hommes, qui déclare cette nouvelle demande recevable et fondée, sans constater que les causes de

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tion commerciale mauvaise et de retarder une faillite imminente... ». Un arrêt d'Amiens, du 9 janv. 1903 (S. et P. 1903.2.241, avec note de M. Hémard), porte : Les traites ou billets, échangés entre deux commerçants, à titre de réciprocité ou de complaisance, sans que leur valeur corresponde à celle d'affaires faites entre eux, ne sont pas sans cause, dans le sens de l'art. 1131, C. civ., puisque les billets souscrits par l'un ont précisément pour cause la souscription de billets par l'autre, pour une valeur égale... L'échange de billets à ordre,... entre L... et D..., qui étaient en relations d'affaires suivies, comme entreprenenrs, ne constitue pas, indépendamment de toute autre circonstance de fait, un contrat ayant une cause illicite... On peut n'y voir qu'un prêt mutuel du crédit...; les affaires entre les parties auraient pu, jusqu'à l'échéance..., prendre assez d'extension pour constituer provision et rendre vraie la mention : « valeur reçue en travaux et fournitures diverses ». V. dans le même ordre d'idées et dans le même sens, Cass. 17 nov. 1909, qui sera ultérieurement reproduit.

G. BOURCART, Professeur de droit commercial à l'Université de Nancy.

la nouvelle demande étaient postérieures à l'introduction de la première instance ou n'avaient été connues du demandeur que depuis (1) (L. 27 mars 1907, art. 33, § 5).

(Lévy C. Chevalier).

M. Chevalier, placier au service de MM. E. et A. Lévy, congédié par ses patrons à la date du 28 févr. 1911, a assigné ceux-ci, le 8 mai suivant, devant le conseil des prud'hommes de la Seine, en paiement d'une somme de 1.000 fr., pour commissions, remboursement de retenues sur commissions et indemnité de brusque renvoi. Il a obtenu contre eux un jugement de condamnation, qui a été confirmé partiellement, sur appel de MM. E. et A. Lévy, par un jugement du tribunal civil de la Seine du 6 juin 1912, dont le dispositif était ainsi conçu : « Confirme le jugement dont est appel, du chef de l'indemnité de renvoi, fixée à 250 fr., et du chef de retenues sur commissions, fixées à 180 fr.; Ordonne que, dans cette mesure, ledit jugement sortira effet;... Donne acte à Chevalier de ses réserves relativement à une somme de 138 fr. 45 pour commissions. — Le 2 juill. 1912, M. Chevalier a assigné à nouveau ses anciens patrons devant les prud'hommes en paiement de 150 fr., pour erreur sur compte de commissions; mais il s'est désisté de sa demande à l'audience du 4 juillet. Après ces deux instances, M. Chevalier en a introduit une troisième, à la date du 19 oct. 1912, en assignant MM. E. et A. Lévy, devant la même juridiction, en paiement de 135 fr. 50 « pour commissions ». Les défendeurs ont invoqué la fin de non-recevoir tirée de l'art. 33, § 5, de la loi du 27 mars 1907; mais, par jugement du 24 oct. 1912, le conseil de prud'hommes a repoussé cette exception, et a fait droit à la demande.

POURVOI en cassation par MM. E. et A. Lévy, pour violation de l'art. 33, § 5, de la loi du 27 mars 1907.

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(1) La loi du 27 mars 1907, sur les conseils de prud'hommes (S. et P. Lois annotées de 1907, p. 490; Pand. pér., 1907.3.213), dispose, dans son art. 33, § 5, que << toutes les demandes dérivant du contrat de louage, entre les mêmes parties, doivent faire l'objet d'une seule instance, à peine d'être déclarées non recevables, à moins que le demandeur ne justifie que les causes des demandes nouvelles ne sont nées à son profit ou n'ont été connues de lui que postérieurement à l'introduction de la demande primitive ». Cette disposition, qui apporte une dérogation à la règle générale d'après laquelle, sauf le cas où il s'agit de demandes qui ne sont pas entièrement justifiées par écrit (V. à cet égard, Dijon, 18 juill. 1910, infra, 2o part., p. 33, les conclusions de M. l'avocat général Le Soudier, et la note de M. Wahl), tout demandeur est libre de joindre ou de séparer les

d'être déclarées non recevables, à moins que le demandeur ne justifie que les causes des demandes nouvelles ne sont nées à son profit ou n'ont été connues de lui que postérieurement à l'introduction de la demande primitive; Attendu, en fait, que Chevalier a, le 8 mai 1911, assigné ses anciens patrons E. et A. Lévy devant le conseil de prud'hommes, en paiement d'une somme de 1.000 fr., pour salaires, commissions et indemnité de brusque renvoi; que cette première instance a été terminée sur appel le 6 juin 1912; que Chevalier, ayant, le 2 juillet suivant, assigné de nouveau E. et A. Lévy en paiement de commissions, a, le 4 juillet, déclaré retirer sa demande, et que le conseil de prud'hommes lui a donné acte de son désistement; que, le 19 oct. 1912, Chevalier a introduit une nouvelle instance contre ses anciens patrons, aux fins de les entendre condamner à lui payer la somme de 135 fr. 50 pour commissions; Attendu qu'en déclarant

cette dernière instance recevable et fon

dée, alors qu'il ne résulte pas des constatations du jugement attaqué que Chevalier ait justifié que les causes de sa nouvelle demande ne sont nées à son profit ou n'ont été connues de lui que postérieurement à l'introduction de sa précédente instance, le conseil de prud'hommes n'a pas donné de base légale à sa décision, et a violé l'article de loi susvisé; - Casse, etc. Du 18 déc. 1912. - Ch. civ. - MM. Baudouin, ler prés.; Boutet, rapp.; Lombard, av. gén. (concl. conf.).

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CASS.-CIV. 23 avril 1913 (2 ARRÊTS). RETRAITES OUVRIÈRES ET PAYSANNES, POURVOI EN CASSATION, DÉCLARATION AU GREFFE, LETTRE MISSIVE, FIN DE NON-RECEVOIR (Rép., vo Retraites ouvrières, n. 1 et s.; Pand. Rép., vo Retraites et pensions, n. 1654 et s.).

La disposition de l'art. 198 du décret du 25 mars 1911, d'après lequel le pourvoi en cassation contre les jugements rendus en appel par les tribunaux de première instance, statuant en matière de retraites ouvrières et paysannes, « est formé par simple déclaration au greffe de ces tribunaux », édicte une formalité substantielle, qui ne

diverses demandes qu'il peut avoir à formuler contre le même défendeur (V. Aix, 8 juin 1896, motifs, infra, 2o part., p. 33, ad notam), a pour but d'éviter des frais et des lenteurs, et aussi d'empêcher que le demandeur ne cherche à soustraire sa demande au deuxième degré de juridiction, en la fractionnant. V. le rapport supplémentaire de M. Strauss au Sénat, S. et P. Lois annotées de 1907, p. 503, note 61. Adde, Bloch et Chaumel, Tr. des conseils de prud'hommes, n. 620; Popineau, La loi du 27 mars 1907, p. 63 et s.

En accueillant la nouvelle demande, fondée sur le même contrat de louage que la première, sans constater, malgré la fin de non-recevoir, tirée de l'art. 33, § 5, de la loi du 27 mars 1907, qui était opposée par les défendeurs, que les causes de la nouvelle demande étaient nées ou n'avaient été connues du demandeur que postérieurement à la

peut être remplacée par aucun équivalent, à moins que la partie n'ait été empêchée par un cas de force majeure (2) (DD., 25 mars 1911, art. 198; 6 août 1912).

Et, si aucune formule particulière n'est prescrite pour la déclaration, dont le greffier doit dresser acte dans le délai fixé par la loi, du moins l'accomplissement de cette formalité implique nécessairement l'intervention du demandeur en cassation ou de son fondé de pouvoir spécial, venant en personne faire la déclaration de pourvoi à l'officier public (3) (Id.).

Le pourvoi n'est donc pas recevable, s'il a été formé par lettre missive, remise à la poste à l'adresse du greffier, qui, à la réception, en a dressé procès-verbal (4) (Id.). (Dame Didier).

ARRÊT.

LA COUR; Sur la fin de non-recevoir relevée d'office:- Attendu qu'aux termes de l'art. 198 du décret du 25 mars 1911, rendu pour l'exécution de la loi du 5 avril 1910, sur les retraites ouvrières et paysannes, le pourvoi en cassation contre les jugements, rendus en appel par les tribunaux de première instance, est formé par simple déclaration au greffe de ces tribunaux; Attendu que cette déclaration doit être reçue par le greffier compétent, qui en dresse acte dans le délai fixé par la loi; que l'accomplissement de cette formalité implique nécessairement l'intervention du demandeur en cassation ou de son fondé de pouvoir spécial, venant en personne faire la déclaration de pourvoi à l'officier public; que c'est là une condition essentielle, qui ne peut être remplacée par aucun équivalent, à moins que la partie n'ait été empêchée par un cas de force majeure; qu'aucune formule particulière n'est prescrite pour cette déclaration; Attendu que le pourvoi de la dame Didier a été formé par lettre missive, remise à la poste à l'adresse du greffier du tribunal de première instance de Montmédy, qui, à la réception, en a dressé procès-verbal, à la date du 9 janv. 1913; Attendu que, dans cette forme, le pourvoi n'est pas recevable; Déclare le pourvoi, formé contre le jugement du tribunal de Ire instance de Montmédy du 29 janv. 1913, irrecevable, etc.

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première demande, les juges du fond avaient violé la disposition de l'art. 33, § 5, précité.

Auraient-ils dû opposer d'office à la seconde demande la fin de non-recevoir tirée de l'art. 33, § 5, alors même qu'ils n'y auraient pas été conviés par les conclusions du défendeur? La question revient à savoir si la disposition de l'art. 33, § 5, est d'ordre public. MM. Bloch et Chaumel, op. cit., n. 621, enseignent la négative. La même question s'est posée en ce qui concerne la portée de l'art. 1346, C. civ., qui prescrit de former par un même exploit toutes les demandes qui ne sont pas entièrement justifiées par écrit, et elle est controversée. V. Dijon, 18 avril 1910, précité, la note de M. Wahl et les renvois.

(2-3-4) V. conf., Cass. 4 nov. 1912 (2 arrêts) (Supra, 1re part., p. 88), et la note avec les renvois.

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