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responsabilité pécuniaire ou morale des differends ou procès auxquels la publication pourrait donner lieu, de telle sorte que Tallandier ne pourra être recherché, qu'il ait ou non apposé sa firme; - Considérant que, par cette clause d'un caractère exceptionnel et conçue en termes généraux, Tallandier a entendu se décharger de toute responsabilité, de quelque nature qu'elle fut, et Vigne a pris à sa charge la pleine responsabilité de cette publication, et s'est engagé à garantir Tallandier des conséquences, quelles qu'elles soient, qui pourraient en résulter; que cette disposition vise aussi bien les poursuites devant la juridiction répressive que celles qui seraient intentées devant la juridiction civile; que, malgré les conventions des parties, que Tallandier ait ou non apposé sa firme sur ces œuvres, les personnes qui se prétendraient lésées par cette publication n'en pourraient pas moins poursuivre Tallandier comme auteur principal du délit qui aurait été commis, et obtenir contre lui des dommages-intérêts, en réparation du préjudice qu'elles auraient éprouvé, à condition de prouver, au cas où son nom ne figurerait pas sur les euvres publiées, qu'il en est effectivement l'éditeur; que cette clause ainsi comprise, et qui ne peut être autrement entendue, est contraire à la loi; que nul ne peut, en effet, se soustraire aux responsabilités qu'un fait délictueux par lui commis peut lui faire encourir, ni se faire relever au moyen d'un recours en garantie des condamnations qui peuvent être prononcées contre lui par suite de l'infraction dont il est personnellement l'auteur; que l'obligation prise par Vigné est, du reste, d'une réalisation impossible en ce qui concerne les condamnations pénales, qui ne peuvent être exécutées que contre ceux-là mêmes qui les ont encourues; que cette clause est donc nulle; - Considérant que le contrat intervenu entre les parties est un contrat bilatéral, dans lequel chacune d'elles prend des obligations qui sont la contre-partie, et, par suite, la cause des engagements que l'autre partie a consentis; que Tallandier s'est engagé à publier les œuvres prérappelées de Vigné, en payant à ce dernier une redevance par chaque exemplaire vendu; que, de son côté, Vigné lui a cédé le droit exclusif de publier ces dites œuvres, et s'est engagé, en outre, à prendre à sa charge les responsabilités pécuniaires ou morales que cette publication pourrait entrainer: que, cette dernière obligation étant nulle, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, sa nullité doit

(1-2) La Régie s'était inclinée devant un arrêt du 26 nov. 1850 (S. 1851.1.50. - P. 1851.1.411), par lequel la Cour de cassation avait décidé que son droit de requérir une expertise, pour contrôler le prix d'une mutation immobilière et déterminer si ce prix n'est pas inférieur à la valeur réelle de l'immeuble, est limité par l'art. 17 de la loi du 22 frim. an 7 aux ventes volontaires, et ne s'étend pas aux adjudications en justice. Si la Cour de cassation s'est, depuis, prononcée une seconde fois en ce sens, c'est incidemment, dans les motifs d'un arrêt, qui, conformément aux prétentions de

avoir pour conséquence la nullité du contrat susvisé, dont toutes les clauses essentielles forment un ensemble indivisible et sont solidaires entre elles; qu'il échet, en conséquence, et sans qu'il y ait lieu d'examiner si le second moyen invoqué par Tallandier, et tiré du caractère diffamatoire que présenterait, d'après lui, le livre intitulé Compan du Var au regard de tiers, est ou non fondé, d'infirmer le jugement entrepris, de décharger Tallandier des dispositions et condamnations prononcées contre lui; Par ces motifs: Infirme, etc. ».

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POURVOI en cassation par M. Vigné d'Octon. Moyen unique. Violation et fausse application des art. 1108, 1131, 1133, 1134, 1157, 1172, C. civ., 23, 29. 32, 33, 42, 43 de la loi du 29 juill. 1881, sur la liberté de la presse, et 7 de la loi du 20 avril 1810, en ce que la Cour a prononcé la nullité d'un contrat entre auteur et éditeur au sujet de la publication d'une œuvre littéraire, sous prétexte que la publication était subordonnée à la condition illicite que l'éditeur serait déchargé de toute responsabilité même pénale, alors que la convention porte seulement que l'auteur supportera la pleine responsabilité pécuniaire et morale des différends ou procès auxquels la publication pourrait donner lieu, de telle sorte que l'éditeur ne pourrait être recherché de ce chef, qu'il ait ou non apposé sa firme sur l'édition; que la convention ainsi formulée n'est illicite, pas et qu'elle était en conséquence susceptible d'exécution.

ARRÊT.

LA COUR; Sur le moyen unique : Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que la clause de garantie, qui fait l'objet de l'art. 7 des conventions intervenues entre les parties, avait pour but d'exonérer Tallandier de toute responsabilité, de quelque nature qu'elle fût, à raison de la publication des œuvres de Vigné, qu'il s'était engagé à éditer, et de mettre à la charge de celui-ci toutes les conséquences des poursuites auxquelles cette publication pourrait donner lieu de la part des tiers contre l'éditeur; Attendu qu'usant du pouvoir d'interprétation qui leur appartenait, les juges du fond déclarent que cette clause visait aussi bien les poursuites exercées devant la juridiction répressive que celles qui seraient intervenues devant la juridiction civile; que cette interprétation ne dénature nullement ni le sens ni la portée de la stipulation dont il s'agit, et qu'en

la Régie, reconnaissait que la règle exceptionnelle adoptée pour les adjudications en justice ne concerne pas les adjudications devant notaire, dont le prix est susceptible d'être contrôlé par la Régie au moyen d'une expertise. V. Cass. 3 juill. 1855 (S. 1855.1.840.-P. 1855.2.235), et la note. V. du reste, sur la question, la note sous le jugement attaqué du tribunal de la Seine, 20 juill. 1906 (S. et P. 1909.2.157; Pand. pér., 1909.2.157).

Dans l'espèce, la Régie a essayé de revenir sur la question; sans d'ailleurs demander très nettement à la Cour de cassation de lui accorder le

prononçant dès lors, vu son caractère illicite, la nullité du contrat qui la contenait, l'arrêt attaqué, qui est dùment motivé, n'a ni violé, ni faussement appliqué les dispositions invoquées par le pourvoi; Rejette, etc.

Du 25 oct. 1909. Ch. req. - MM. Tanon, prés.; Michel-Jaffard, rapp.; Lombard, av. gén. (concl. conf.); Clément,

av.

CASS.-REQ. 28 mai 1910. ENREGISTREMENT, Vente JUDICIAIRE D'IMMEUBLES, RENTE VIAGERE, DÉCLARATION ESTIMATIVE, EXPERTISE (Rép., v° Enregistrement. n. 4831 et s.; Pand. Rép., v° Expert-Expertise, n. 1226 et s.).

Si les art. 17 et 18 de la loi du 22 frim. an 7 et 5 de la loi du 27 vent, an 9 s'appliquent à tous les actes volontaires translatifs de propriété, à titre onéreux, de biens immeubles, et permettent de recourir à l'expertise, lorsque le prix énoncé paraît inférieur à la valeur vénale de ces immeubles au jour de la vente, on ne doit pas assimiler à ces actes les adjudications en justice, qui sont de véritables jugements, soumises à une publicité réglée par la loi et à une concurrence sérieuse, et dans lesquelles, par conséquent, ne sauraient se produire les dissimulations de prix qui sont possibles dans un acte passé entre les parties directement (1) (LL. 22 frim. an 7, art. 17; 27 vent. an 9, art. 5).

Par suite, lorsque l'adjudication d'un immeuble est prononcée en justice moyennant un prix principal, comprenant, en sus des charges, l'obligation de servir une rente annuelle et viagère constituée antérieurement au profit de tiers sur l'immeuble adjuge, et que ni le prix ni l'évaluation du capital de la rente ne résultent d'un accord préalable entre le vendeur et l'acheteur, puisque le prix se trouve constitué, pour le paiement du droit de mutation, par le montant de la somme consignée au jugement. augmentée des charges diverses évaluées en capital, il ne saurait appartenir à la Régie, même sous prétexte que les charges formeraient la portion la plus importante du prix, et que l'évaluation de certaines d'entre elles émanerait de la partie au profit de laquelle l'adjudication a été prononcée, de provoquer une expertise, pour établir que la valeur en capital attribuée à la rente viagère, dans la déclaration estimative faite par l'avoué de l'adjudicataire, augmentée du prix en argent et des autres charges, est inférieure à la valeur vénale de l'immeuble (2) (Id.).

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droit d'expertise en matière d'adjudication judiciaire, elle a cherché à montrer que ce droit devrait lui être reconnu. L'arrêt de 1850 s'était appuyé, principalement, sur l'idée que l'expertise, qui est accordée seulement à la Régie pour les actes ou contrats, ne peut être exercée vis-à-vis des adjudications, qui sont des jugements; ces jugements, disait l'arrêt, ne sont pas des actes, ni à plus forte raison des contrats; la loi, quand elle veut assimiler les jugements aux actes, ne manque pas de le dire dans une disposition formelle.

La Régie a fait justement remarquer qu'en règle

(Enregistrement C. Maunoury).

L'Administration de l'enregistrement s'est pourvue en cassation contre un jugement rendu par le tribunal civil de la Seine, le 20 juill. 1906, au profit de M. Maunoury, et rapporté, S. et P. 1909.2.157; Pand. per., 1909.2.157. Moyen unique. Violation des art. 4, 15-6", et 17 de la loi du 22 frim. an 7, en ce que le jugement attaqué a décidé que, lorsqu'un immeuble à été adjugé à la barre du tribunal, moyennant un prix en argent, et, entre autres charges, celle de continuer le service d'une rente viagère déterminée, l'Administration n'a pas le droit de requérir l'expertise dudit 'immeuble pour établir que la valeur en capital, attribuée à la rente viagère par l'avoué de l'adjudicataire, aux termes d'une déclaration estimative, augmentée du prix en argent et des autres charges, est inférieure à la valeur vénale dudit immeuble au jour de l'adjudication, motif pris de ce que l'art. 17, susvisé, autorisant l'expertise, ne s'applique pas aux adjudications judiciaires d'immeubles, même lorsque le prix consiste principalement en une charge dont l'estimation en capital n'est pas fixée par le jugement, l'Administration n'ayant, en pareille ma

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générale, au contraire, d'après une jurisprudence qui s'est fortement affirmée postérieurement à l'arrêt de 1850, les jugements sont soumis aux dispositions concernant les actes. V. not., Cass. 24 août 1874 (S. 1875.1.129. P. 1875.295); 17 févr. 1890 (S. 1891.1.181. P. 1891.1.415; Pand. pér., 1890.6.11); 15 juin 1905 (S. et P. 1906.1.102), et les notes sous ces arrêts. Il y a, a-t-elle ajouté, d'autant plus de raison d'admettre cette assimilation, dans l'interprétation de l'art. 17, que les textes soumettent au droit de mutation << tous les actes civils ou judiciaires portant translation de propriété ou d'usufruit à titre onéreux (L. 22 frim. an 7, art. 15, n. 6), montrant ainsi que, pour la loi fiscale, les jugements sont des actes.

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En droit, comme nous l'avons montré en note sous le jugement attaqué (p. 158, 1re col.), cette argumentation est extrêmement forte. Aussi a-t-elle fait une impression visible sur la Cour de cassation. Le rapprochement de notre arrêt avec celui de 1850 en fournit la preuve évidente. Aujourd'hui, la Cour de cassation cesse de s'appuyer sur cette idée qu'un jugement ne serait pas un acte. Elle invoque, comme argument unique, l'idée que l'adjudication en justice, soumise à la publicité et à la concurrence, exclut toute possibilité de dissimulation de prix, les parties ne fixant pas elles-mêmes le prix, qui résulte des enchères. C'était la considération invoquée subsidiairement par l'arrêt de 1850. Elle a une très grande valeur. V. la note sous le jugement attaqué, loc. cit.

Mais, ceci dit, la Régie, qui ne peut contrôler par l'expertise le prix fixé par les enchères, peutelle soumettre à cette mesure l'évaluation donnée à une charge imposée à l'adjudicataire? Il aurait peut-être été bon de poser à la Cour de cassation une question préalable, celle de savoir si, d'une manière générale, le droit d'expertise attribué à la Régie pour contrôler le prix stipulé peut s'exercer à propos d'une évaluation donnée à une charge. Nous avons essayé de démontrer que la négative doit être admise. V. la note sous le jugement attaqué.

tière, d'autre droit que celui de contrôler les évaluations des parties par les moyens ordinaires de preuve que la loi fiscale a laissés à sa disposition.

ARRÊT.

LA COUR: Sur le moyen pris de la violation des art. 4, 15-60 et 17 de la loi du 22 frim, an 7: Attendu qu'à l'audience des criées du tribunal de la Seine du 11 févr. 1904, Maunoury a été déclaré adjudicataire, à la suite d'une surenchère, d'un immeuble dépendant de la faillite de la Société la Rente viagère, moyennant le prix principal de 4.050 fr., en sus des charges, comprenant l'obligation de servir une rente annuelle et viagère de 14.000 fr., constituée antérieurement au profit de tiers sur l'immeuble adjugé ; Attendu

que, pour le paiement du droit proportionnel de mutation, le capital de la rente viagère a fait l'objet d'une déclaration estimative, souscrite par l'avoué de l'adjudicataire, et a été fixé à 140.000 fr., ce qui portait le prix de l'adjudication à 146.702 fr.; - Attendu que l'Administration de l'enregistrement, estimant que cette somme ne représentait pas la valeur réelle de l'immeuble, a, par application des art. 17 et 18 de la loi du 22 frim. an 7, demandé au

Mais la question n'a pas été posée; donc, en admettant par hypothèse l'affirmative sur ce dernier point, la Cour de cassation a eu à se demander si, du fait que, dans les adjudications en justice, le prix ne peut être contrôlé par l'expertise, il résulte que l'évaluation d'une charge ne peut pas l'être davantage.

Nous avons exposé, en note sous le jugement attaqué, les doutes que nous inspire cette solution. Ces doutes, déjà sérieux en présence de l'arrêt de 1850, nous paraissent avoir encore beaucoup plus de raison d'être en présence de l'arrêt ci-dessus recueilli.

Lorsque la Cour de cassation s'appuyait principalement, pour refuser l'expertise à la Régie visà-vis d'une adjudication prononcée en justice, sur ce que le jugement n'est pas un acte, et par suite n'est pas visé par l'art. 17 de la loi de l'an 7, on pouvait dire que, la charge étant comprise dans le prix, et par conséquent l'obligation d'exécuter la charge, comme celle d'acquitter le prix, résul tant du jugement, la Régie, en contrôlant par l'expertise l'évaluation de la charge, aurait étendu son droit d'expertise à une mutation qui ne résultait pas d'un acte; peut-être l'argumentation n'eût-elle pas été décisive (V. la note sous le jugement attaqué, p. 158, 2° col.); elle eût mérité, en tout cas, d'être examinée.

Si la solution qui refuse à la Régie le droit d'expertiser l'évaluation de la charge nous a paru douteuse, c'est parce que le second argument donné par l'arrêt de 1850, le seul sérieux, suivant nous, ne s'appliquait plus du tout à cette question : Un jugement d'adjudication, dit l'arrêt de 1850, avec toutes les garanties qui l'environnent, présente la véritable valeur de l'immeuble pour la perception du droit, et la Régie ne peut être admise à la contrôler par la voie de l'expertise ». Ceci est très juste pour le prix, et l'est également pour la fixation d'une charge: en d'autres termes, si, par exemple, comme dans l'espèce, outre le prix, l'adjudicataire doit payer une rente viagere de 14.000 fr., la Régie ne peut établir par

tribunal d'ordonner une expertise; que, déboutée de sa demande par le jugement attaqué, elle soutient en son pourvoi que le mot acte, dans l'art. 17 précité, comprend, comme dans d'autres dispositions de la même loi, à la fois les actes judiciaires et les actes civils proprement dits; que, si une distinction était à faire, l'exemption ne pourrait porter que sur le prix fixé par le jugement, et non sur la portion du prix qui résulte d'une déclaration des parties;

Mais attendu que, si les art. 17 et 18 de la loi du 22 frim. an 7 et 5 de la loi du 27 vent. an 9 s'appliquent à tous les actes volontaires translatifs de propriété, à titre onéreux, de biens immeubles, et permettent de recourir à l'expertise. si le prix énoncé parait inférieur à la valeur vénale de ces immeubles au jour de la vente, on ne doit pas assimiler à ces actes les adjudications en justice, lesquelles sont de véritables jugements, soumis à une publicité réglée par la loi et à une concurrence sérieuse; que l'expertise et la peine du double droit ont pour but d'atteindre les dissimulations de prix, possibles dans un acte passé entre les parties directement, mais qui ne sauraient se produire dans une adjudication à la barre du tribunal: Attendu, en l'espèce, que ni le prix ni l'évaluation du ca

l'expertise que cette rente viagère, dans son montant, ne représente pas, ajoutée au prix, la véritable valeur de l'immeuble, et qu'elle doit, pour la perception du droit, être fixée à 18 ou 20.000 fr. Ce serait aller contre les énonciations du jugement; ce serait discuter une valeur assignée à l'immeuble par le jugement; ce serait indirectement contrôler par l'expertise le prix fixé.

Mais les parties, pour la perception du droit, ont estimé en capital la valeur de la rente. Cette estimation n'émane pas du tribunal; elle n'est environnée d'aucune garantie; elle est l'œuvre unique des parties. La considération sur laquelle se fondait en second lieu l'arrêt de 1850 ne s'applique plus. Or, cette considération est la seule qui figure dans notre arrêt. La Cour de cassation répond, en effet : « Ni le prix ni l'évaluation du capital de la rente ne résultent d'un accord préa lable entre le vendeur et l'acheteur. Sans doute; mais l'évaluation ne résulte pas non plus d'un jugement soumis à une publicité réglée par la loi et à une concurrence sérieuse, comme le dit la Cour de cassation. L'évaluation des parties ne fournit aucune garantie; elle est arbitraire, plus arbitraire encore que la fixation d'un prix dans une vente volontaire; elle est l'œuvre de l'adjudicataire, comme elle serait l'oeuvre de l'acquéreur dans une vente volontaire; à supposer qu'elle puisse être contrôlée par l'expertise dans cette vente volontaire, elle doit pouvoir l'être également dans l'adjudication judiciaire.

Dans la suite de son arrêt, la Cour de cassation paraît croire que la Régie, en proposant une distinction entre le prix et les charges, veut indirectement se faire reconnaître dans les adjudications judiciaires le droit d'expertise que la jurisprudence lui refuse. Cette crainte serait très justitiee, si la Régie émettait la prétention d'établir par l'expertise l'insuffisance du montant annuel de la rente; mais la Régie demande seulement à contrôler par l'expertise les bases assignées par les parties pour l'évaluation de la rente viagere, ce qui est tout différent. V. du reste la note sous le jugement attaqué.

pital de la rente ne résultent d'un accord préalable entre le vendeur et l'acheteur; que le prix s'est trouvé constitué, pour le paiement du droit de mutation, par le montant de la somme consignée au jugement, augmentée des charges diverses évaluées en capital; qu'il ne saurait, par suite, être permis à la Régie, même sous prétexte que les charges formeraient la portion la plus importante du prix, et que l'évaluation de certaines d'entre elles émanerait de la partie au profit de laquelle l'adjudication a été prononcée, de faire des distinctions entre les différents éléments du prix, dans le seul but de parvenir à une expertise, en une matière où ce moyen de contrôle ne lui est pas formellement accordé; qu'il suit de là que le jugement attaqué, en déboutant la Régie de sa demande, loin de violer la loi, en a fait une juste application; Rejette, etc. Du 28 mai 1910. Ch. req. MM. Tanon, prés.; Malepeyre, rapp.; Feuilloley, av. gen. (concl. conf.); Coche, av.

CASS.-REQ. 12 juillet 1910.

1o EXPLOIT, HUISSIER, IMMATRICULE (Rép., vo Exploit, n. 305 et s.; Pand. Rép., vo Ajournement, n. 271 et s.). - 2o ENREGISTREMENT, EXPERTISE, EXPERT DE LA PARTIE, DESIGNATION D'OFFICE PAR LE TRIBUNAL, OPPOSITION, RENONCIATION, ACQUIESCEMENT, POUVOIR DU JUGE, APPRÉCIATION SOUVERAINE (Rép., vo Enregistrement, n. 5020 et s.; Pand. Rép., vo Expert-Expertise, n. 1159 et s.).

n.

1o La mention d'un exploit d'ajournement, ainsi conçue: « Signifié par nous, X..., huissier à y demeurant, rue soussigné, ne laisse aucun doute, ni sur la qualité de l'huissier, ni sur son domicile, ni sur sa compétence territoriale, et, par suite, ne saurait entrainer la nullité de l'exploit comme désignant insuffisamment l'immatricule de l'huissier (1) (C. proc., 61). 2o Du $ 3 de l'art. 18 de la loi du 22 frim. an 7, d'après lequel, en matière d'enregistrement, en cas de refus par la partie de nommer son expert, sur la sommation qui lui aura été faite d'y satisfaire dans les trois jours, il lui en sera nommé un d'office par 1 tribunal, il résulte que la partie, lors qu'elle a été ainsi formellement mise en demeure de désigner l'expert de son choix, et a été touchée par la sommation à elle faite dans ce but, doit être réputée avoir renoncé au droit qui lui était accordé, si elle n'a pas fait cette désignation dans le délai

(1) L'immatricule de l'huissier, c'est-à-dire la désignation du tribunal auquel il est attaché, est exigée dans les exploits, suivant l'art. 61, C. proc., à peine de nullité. V. Cass. 3 avril 1901 (S. et P. 1902.1.136; Pand. pér., 1902.1.440); Trib. de la Seine, 4 avril 1912 (Infra, 2° part., p. 95), et les notes. Son but est de faire connaître si l'huissier est compétent pour signifier l'exploit. La simple indication de la demeure de l'huissier ne suffit pas, puisqu'elle n'établit pas que l'huissier exerce ɛes fonctions au même lieu. V. Glasson, Précis de proc., 2° éd., par Tissier, t. 1er, n. 353. Mais la mention huissier à demeurant y est suffi

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imparti (2) (L. 22 frim. an 7, art. 18).

La nomination d'office de l'expert, en cas d'abstention de l'intéressé, est imposée au tribunal par la disposition formelle et impérative de ce texte, dans le but de ne pas retarder les opérations d'expertise (3) Id.).

Et une telle décision, qui n'a pas le caractère d'un véritable jugement, ne saurait étre rétractée par la voie de l'opposition (4) (Id.).

Les juges du fond décident souverainement en fait, par une appréciation qui échappe au contrôle de la Cour de cassation, si la partie, contre laquelle l'Administration de l'enregistrement a demandé l'expertise, n'a pas ignoré les travaux faits sur sa propriété par les experts commis, et a ainsi, par son acquiescement donné à l'exécution de la décision qui a désigné l'expert, couvert les nullités de la signification, à supposer qu'elles puissent être invoquées (5) (C. proc., 155 et 156).

(Vve Delpit C. Enregistrement).

Mme veuve Delpit s'est pourvue en cassation contre un jugement du tribunal civil de Bordeaux du 9 mars 1908. - 1er Moyen. Violation de l'art. 61, C. proc., ainsi que de l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810, en ce que le jugement attaqué a considéré comme désignant suffisamment l'immatricule de l'huissier, et, dès lors, comme conforme aux prescriptions du n. 2 de cet article, qui veut que l'exploit contienne, à peine de nullité, les noms, demeure, immatricule de l'huissier, la formule: Nous, huissier à ..., laquelle, cependant, ne désigne, ni expressément, ni par équipollent, l'immatricule de celui-ci, que le législateur n'a pas entendu confondre avec sa demeure, puisqu'il exige impérieusement l'indication de l'une et de l'autre.

ce que le tribunal a considéré comme un acquiescement tacite à l'exécution du jugement par défaut, couvrant, le cas échéant, la nullité de la signification, la connaissance présumée que le défaillant aurait eue de ce jugement, en raison de ce que les experts auraient pris des renseignements auprès de son régisseur, d'ailleurs sans mandat pour les donner, et, de leur propre aveu, rencontré par hasard par eux, alors que ces circonstances sont manifestement exclusives d'un acquiescement tacite certain, et que, du reste, l'acquiescement n'était pas possible, la commission d'huissier étant d'ordre public, et les actes d'exécution du jugement étant, à défaut de cette commission, destitués d'existence juridique au regard du défaillant.

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ARRÊT.

LA COUR; Sur le premier moyen :

Attendu que le jugement attaqué relate que l'exploit d'ajournement du 27 nov. 1905, dont la dame Delpit poursuivait la nullité, pour violation du § 2 de l'art. 61, C. proc., contient cette mention : « Signifié par nous, Albert Rodanet, gradué en droit, huissier à Libourne, y demeurant, rue Thiers, 48, soussigné »; Attendu que cette mention de l'acte lui-même ne laisse aucun doute, ni sur la qualité de l'huissier, ni sur son domicile, ni sur sa compétence territoriale; que, par suite, le jugement attaqué, qui est dûment motivé, en refusant de prononcer la nullité de cet exploit, n'a violé aucune des dispositions de loi visées au moyen;

Sur le second moyen: Attendu que le $ 3 de l'art. 18 de la loi du 22 frim. an 7 porte qu'en cas de refus par la partie de nommer un expert, sur la sommation qui lui aura été faite d'y satisfaire dans les trois jours, il lui en sera nommé un d'office par le tribunal; Attendu que la partie, lorsqu'elle a été ainsi formellement mise en demeure de désigner l'expert de son choix, et touchée par la sommation à elle faite dans ce but, doit être réputée avoir renoncé au droit qui lui était accordé, lorsqu'elle n'a pas fait cette dési gnation dans le délai imparti; Attendu que la nomination d'office de l'expert, en cas d'abstention de l'intéressé, est im posée au tribunal par la disposition formelle et impérative du texte précité de la loi du 22 frim. an 7, dans le but de ne pas re

2o Moyen. Violation de l'art. 156, C. proc., et du principe que la voie de l'opposition est ouverte contre les jugements par défaut toutes les fois qu'elle n'est pas interdite par un texte spécial, ainsi que de l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810, en ce que le tribunal a décidé qu'un jugement, qu'il dit, d'ailleurs à tort, s'être borné à nommer un expert, à défaut par la partie de l'avoir fait elle-même, mais qui, en réalité, a tout d'abord ordonné, ainsi qu'il devait le faire, l'expertise demandée par l'Administration de l'enregistrement, était prépara toire, et ne pouvait, par suite, être attaqué par la voie de l'opposition, que, dès lors, cetarder les opérations d'expertise; qu'une jugement n'avait point à être signifié par huissier commis.

3o Moyen. Violation des art. 155 et 156, C. proc., et 7 de la loi du 20 avril 1810, en

sante, car elle se rapporte au lieu d'exercice des fonctions en même temps qu'à la demeure.

(2 à 5) Dans l'espèce, le fait que la partie avait acquiescé au jugement nommant d'office son expert, faute par elle de l'avoir désigné, et d'avoir ainsi renoncé à l'opposition, pouvait dispenser la Cour de cassation de se prononcer sur le point de savoir si ce jugement est ou non susceptible d'opposition. Plusieurs tribunaux s'étaient déjà prononcés en faveur de la négative, qu'admet également la Cour de cassation. (V. Trib. de Bordeaux, 3 mai 1843, Journ. de l'enreg., n. 1827; Trib. do la Seine, 15 juill. 1887, Rev. prat. de l'enreg., n. 2511;

telle décision, qui n'a pas le caractère d'un véritable jugement, ne saurait être rétractée par la voie de l'opposition; — Attendu que le jugement attaqué mentionne

Trib. de Bordeaux, 9 mars 1908, rendu dans la présente affaire, Journ. de l'enreg., n. 27535: Rép. pér. de Garnier, n. 12231; Trib. de Nice. 2 déc. 1908, Rev. de l'enreg., n. 4870), et qui ne peut plus faire doute aujourd'hui, depuis que l'art. 5 de la loi de finances du 27 févr. 1912 (S. et P. Lois annotées de 1913, p. 379; Pand. per., Lois annotées de 1913, p. 379), qui a pour objet de simplifier les formes de l'expertise, porte qu' cas de refus par la partie de nommer son expert, sur la sommation qui lui aura été faite d'y satisfaire dans les trois jours, il lui en sera nommé un d'office par jugement non susceptible d'opposition ».

en

que la décision du 11 déc. 1905 se bornait à nommer un expert, à défaut, par la veuve Delpit, de l'avoir fait elle-même; qu'il a donc décidé, à bon droit, que la demanderesse était mal fondée en son opposition contre cette décision;

Sur le troisième moyen : - Attendu que le jugement décide, par une appréciation souveraine en fait, qui échappe au contrôle de la Cour de cassation, que la demanderesse n'a pas ignoré les travaux d'expertise faits sur la propriété par les experts commis, et que les nullités de la signification, à supposer qu'elles puissent être invoquées, étaient couvertes par l'acquiescement donné à l'exécution de la décision; Rejette, etc.

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Du 12 juill. 1910. Ch. req. MM. Tanon, prés.; Malepeyre, rapp.; Feuilloley, av. gén. (concl. conf.); Lefort, av.

CASS.-CIV. 29 octobre 1912 (4 ARRÊTS). 1 CHEMIN DE FER, WAGONS-RÉSERVOIRS, CONTRAT DE TRANSPORT, AVARIES, RESPONSABILITÉ, TARIFS, RESPONSABILITÉ (CLAUSE DE NON-), NULLITÉ, RETARD, INDEMNITÉ, RECOURS CONTRE LE LOCATEUR DES WAGONS, FORCE MAJEURE, VICE PROPRe, Preuve, APPRÉCIATION SOUVERAINE (Rép., vo Chemin de fer, n. 4212; Pand. Rép., eod. verb., n. 5806 et s.). 2 DOMMAGES-INTÉRÊTS, FAUTE, PREJUDICE, CONSTATATION (Rép., vis Dommages-intérêts, n. 140 bis, Responsabilité civile, n. 117 et s.; Pand. Rép., v Responsabilité civile, n. 608 et s.).

La convention. par laquelle une Comp. de chemins de fer s'engage envers un expéditeur ou destinataire à transporter un wagon-réservoir, avec la marchandise qu'il contient, constitue un contrat de transport, aussi bien en ce qui concerne le wagon-réservoir, que l'expéditeur ou destinataire a pris en location de celui qui en est propriétaire, et qui, malgré son immatriculation à la Comp. de chemins de fer, est demeuré la propriété du locateur, qu'en ce qui concerne la marchandise elle-même (1). Ire et 3e espèces.

Il en est de même, d'ailleurs, lorsque le wagon-réservoir voyage à vide (2). — 2o espèce (sol. implic.).

(1 à 10) Nous avons exposé, dans la note sous Montpellier, 26 janv., 20 févr. et 6 mai 1911 (S. et P. 1911.2.241; Pand. pér., 1911.2.241), les questions parfois délicates que fait naître l'emploi, devenu très fréquent, pour le transport de certaines marchandises par chemin de fer, de wagons-réservoirs appartenant à des tiers, qui sont admis sur les lignes de chemins de fer, après immatriculation par les Comp., et que leurs propriétaires donnent en location aux expéditeurs pour le transport de leurs marchandises. Nous avons rappelé que les règles ordinaires du contrat de transport devaient s'appliquer sans difficulté dans les rapports de l'expéditeur, qui a pris en location un wagon-réservoir, ou du destinataire, avec la Comp. de chemins de fer qui se charge du transport du wagon avec la marchandiee qu'il contient, parce que la Comp., au regard de l'expéditeur ou du destinataire, joue le rôle d'un transporteur, aussi bien en ce qui concerne le wagon-réservoir qu'en

Par suite, la Comp. de chemins de fer, en transportant le wagon-reservoir, accomplissant une opération de transport, aucune clause de tarif ne peut l'exonérer de la responsabilité incombant au voiturier à raison du transport, ni intervertir l'ordre de la preuve mise à sa charge pour établir sa libération (3) (C. comm., 103; Tarif spécial commun P. V., n. 129). — 1re, 2o et 3o espèces.

Ainsi, lorsqu'une avarie est survenue, en cours de route, à un wagon-réservoir circulant à vide, la Comp. de chemins de fer ne saurait se refuser à payer au propriétaire du wagon-réservoir une indemnité pour le chômage du wagon et à lui rembourser les frais de transport aux ateliers de réparation, sans faire la preuve du vice propre auquel elle attribue l'avarie, et sur le motif que, d'après ses tarifs, l'entretien des wagons-réservoirs est à la charge des personnes qui ont obtenu l'immatriculation, et qu'aucune indemnité n'est due par la Comp. pour le chômage des wagons pendant la réparation (4) (Id.). 2o espèce.

De même, au cas où une avarie survenue en cours de route au wagon-réservoir a occasionné un retard, la Comp. de chemins de fer ne saurait, pour réclamer au propriétaire du wagon le remboursement de l'indemnité qu'elle a dù payer au destinataire de la marchandise, et s'exonérer des frais de réparation du wagon, invoquer les stipulations du tarif special qui établit la responsabilité des propriétaires de wagonsréservoirs et met à leur charge l'entretien de ces wagons, si elle ne rapporte pas la preuve que l'avarie ait été occasionnée par force majeure ou par le vice propre de la chose (5) (ld.). 3e espèce.

-

Juge également, par application des mêmes principes, que la preuve d'une avarie survenue en cours de route à un wagonréservoir, et sur laquelle se fonde la Comp. de chemins de fer pour demander au propriétaire du wagon-réservoir de l'indemniser du montant des dommagess-intérêts qu'elle a dù verser au destinataire, locataire de ce wagon-réservoir, à raison d'un retard qui aurait pour cause celle avarie, ne saurait, par application des stipulations du tarif, résulter des simples affirmations des agents de la Comp., mais doit être faite

ce qui concerne la marchandise. V. en ce sens, Cass. 29 avril 1907 (S. et P. 1907.1.360), et la note; Montpellier, 26 janv. 1911 et 6 mai 1911 (sol. implic.), précités, les notes et les renvois.

Mais la nature du lien de droit qui existe entre la Comp. de chemins de fer et le propriétaire du wagon-réservoir est au contraire controversée; les uns y ont vu un contrat de prêt, d'autres un contrat de louage, d'autres encore un contrat de dépôt; la Cour de Montpellier, par son arrêt du 26 janv. 1911, précité, avait décidé qu'il s'agissait, dans l'espèce, d'un contrat d'une nature spéciale. Il nous a paru qu'aucune de ces opinions n'était satisfaisante, et que, sauf le cas, dont la Cour de cassation n'a pas eu à se préoccuper dans les arrêts ci-dessus, où le wagon-réservoir, libre de toute location, séjourne pour le compte de son propriétaire dans une gare (V. la note précitée), le contrat qui régit les rapports du propriétaire du wagon-réservoir et de la Comp. de chemins de

selon les formes ordinaires du droit commun (6) (Id.). Ire espèce.

D'ailleurs, est souveraine l'appréciation des juges du fond, décidant que la Comp. de chemin de fer ne fait pas la preuve de la force majeure (3o espèce) ou du vice propre du wagon-réservoir (2o et 3° espèces) qu'elle allègue pour établir que l'avarie survenue à ce wagon ne lui est pas imputable (7) (Id.). 2e et 3° espèces.

Spécialement, est légalement justifiée la décision qui condamne une Comp. de chemins de fer à indemniser l'expéditeur d'un wagon-réservoir du retard occasionné par une avarie survenue en cours de route à ce wagon, et qui déclare la Comp. mal fondée dans le recours par elle exercé contre le propriétaire duquel l'expéditeur tenait le 'wagon en location, lorsque, des constatations souveraines de cette décision, il résulte que la Comp. n'a pas fait la preuve que l'avarie provenait d'un vice de construction du wagon, et qu'il est établi, au contraire, que les arrêts du wagons ont été occasionnés par le chauffage des parties en frottement, produit par le défaut de graissage, opération qui, en cours de route, incombe aux agents du chemin de fer, en vertu du tarif spécial au transport des wagons-réservoirs (8) (Id.). 4o espèce.

Le tarif spécial P. V., n. 129, ne réglemente que les rapports entre les Comp. de chemins de fer et les propriétaires des wa gons-réservoirs immatricules; il ne s'ap plique pas aux accords intervenant librement entre les propriétaires et les locataires de wagons-reservoirs (9) (Tarif spécial commun P. V. n. 129). 3o espèce.

Par suite, lorsqu'une avarie, survenue en cours de route, a immobilisé un wagon-réservoir, en occasionnant un retard dans la livraison de ce wagon au destinataire qui l'avait pris en location, la Comp. de chemins de fer ne peut se refuser à indemniser le destinataire des loyers supplémentaires qu'il a dù verser au propriétaire du wagon, sous le prétexte que le tarif spécial au transport des wagons-réservoirs stipulerait qu'il n'est dû aucune indemnité par le chemin de fer pour le chômage des wagonsréservoirs pendant leur réparation (10) (Id.). Id.

20 Doit être cassé le jugement qui, après

fer, qui reçoit et transporte ce wagon, est uniquement un contrat de transport. V. la note précitée. Nous constatons avec satisfaction que c'est à cette solution que la Cour de cassation s'est ralliée. Nous n'avons pas à revenir sur les motifs qui la justifient, mais seulement à indiquer quelles sont les conséquences qu'entraîne, au point de vue de la responsabilité de la Comp., tant vis-à-vis de l'expéditeur et du destinataire que du propriétaire du wagon-réservoir, le principe, une fois admis, que le contrat en vertu duquel est tenue la Comp. est un contrat de transport.

De ce principe, il résulte que la loi du 17 mars 1905, qui a refusé tout effet aux stipulations qui exonéreraient le transporteur de la responsabilité des avaries survenues en cours de route aux ob

jets transportés, ou mettraient le fardeau de la preuve à la charge du destinataire ou de l'expéditeur (V. Trib. de paix de Saint-Vivien, 15 mai 1907, S. et P. 1908.2.145; Pand. pér., 1908.2.145,

avoir alloué la réparation intégrale du préjudice dont il détermine les éléments, condamne, en outre, une Comp. de chemins de fer à une certaine somme de dommagesintérêts, sans spécifier ni la faute généra trice du dommage, ni le préjudice à raison duquel est accordée cette indemnité supplé mentaire (1) (C. civ., 1382; L. 20 avril 1810, art. 7). 2o espèce. Ire Espèce.

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(Monnin C. Chem. de fer de l'Est).

M. Monnin s'est pourvu en cassation contre un jugement du tribunal de commerce d'Epinal, en date du 24 déc. 1907.

Moyen unique. Violation des art. 1147 et 1148, 1315, C. civ., et des règles sur la charge de la preuve, de l'art. 103. nouveau. C. comm.; fausse interprétation des dispositions du tarif spécial commun P. V. n. 129, en ce que le jugement attaqué s'est fondé, pour condamner le demandeur au pourvoi a garantir la Comp. de l'Est du montant des réparations allouées à M. Popp, sur plusieurs articles du tarif P. V. n. 129, dont les dispositions, ou bien n'avaient aucunement la portée que leur attribue le tribunal, ou devaient être en tout cas considérées comme inopérantes, par application de l'art. 103, in fine, C. comm. (L. 17 mars 1905); violation de l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810, en ce que le tribunal, saisi de conclusions expresses de M. Monnin, tendant à ce qu'il ne fut en tout cas déclaré responsable que de trois jours sur le retard total, a condamné T'exposant à supporter la responsabilité de l'intégralité des onze jours de retard, sans donner aucun motif à l'appui de cette décision.

ARRÈT.

LA COUR; Sur le moyen unique du pourvoi, envisagé dans ses trois branches: - Vu l'art. 103, C. comm.; - Attendu qu'aux termes de cet article, le voiturier ne se libère de la responsabilité des avaries qu'en établissant qu'elles proviennent

et la note de M. Bourcart; Cass. 15 mars et 17 mai 1909, S. et P. 1910.1.185; Pand. pér., 1910.1.185, et la note de M. Bourcart; Douai, 3 juill. 1909, S. et P. 1911.2.51; Pand. pér., 1911.2.51, et la note), régit les relations des Comp. de chemins de fer avec les propriétaires de wagons-réservoirs circulant sur leurs lignes, aussi bien qu'avec les expéditeurs ou destinataires qui ont pris les wagons-réservoirs en location, de leurs propriétaires, pour le transport de leurs marchandises, et que, dès lors, les Comp. doivent être déclarées responsables des avaries subies par ces wagons vis-à-vis de leurs propriétaires, à moins qu'elles ne fassent la preuve, qui leur incombe en vertu de l'art. 103, C. comm. (V. Cass. 19 nov. 1906 et 26 nov. 1907, S. et P. 1908.1.149 et 480; Pand. pér., 1908.1.149 et 480; 15 mars et 17 mai 1909, précités, et la note de M. Bourcart; adde, les conclusions de M. le procureur général Sarrut, sous Cass. 27 janv. 1913, supra, 1re part., p. 177), qu'il y a eu force majeure, vice propre de la chose, ou faute du propriétaire des wagons avariés.

Nos arrêts fournissent de ces solutions de principe des applications qui les mettent pleinement en lumière. Ainsi, le destinataire d'un wagon- réservoir n'a, par suite d'une avarie survenue au wagon en

de la force majeure, du vice propre de la chose, ou de la faute de l'expéditeur; que toute clause contraire, insérée dans toute lettre de voiture, tarif, ou autre pièce quelconque, est nulle; Attendu qu'il résulte des constatations du jugement attaqué que, le 26 janv. 1907, Azémar a remis à la gare de Béziers, pour être expédié, par petite vitesse, au tarif le plus réduit, à Popp, négociant à Epinal, un wagon-réservoir contenant 128 hectolitres de vin; que ce wagon, immatriculé au nom de Monnin, qui l'avait loué au destinataire, n'a été livré à ce dernier, par suite d'une avarie survenue en cours de route, que le 23 février, avec un retard de onze jours; Attendu que le tribunal de commerce d'Epinal, après avoir condamné la Comp. des chemins de fer de l'Est à payer à Popp la somme de 384 fr., pour le préjudice que lui avait causé ce retard, a décidé que Monnin devait garantir la Comp. de l'Est des condamnations prononcées contre elle, en principal, jusqu'à concurrence de 314 fr., et pour la totalité des intérêts et des frais, par les motifs :

que le retard, qui est résulté de l'avarie survenue en cours de route, est bien imputable à Monnin, qui, par application de l'art. 5, 4, du tarif spécial commun P. V.,

n.

129, aurait dû approvisionner des pièces de rechange nécessaires les ateliers de la Comp., le wagon-réservoir litigieux étant d'un type spécial; que c'est à tort que Monnin prétend que la Comp. est responsable de l'avarie survenue en cours de route à son wagon; qu'en effet, d'après les termes mêmes du tarif spécial P. V., n. 129, art. 4, § 3, l'expéditeur et le destinataire doivent, à défaut de constatation contradictoire, s'en rapporter aux déclarations des agents de la Comp., qui font foi jusqu'à preuve du contraire; qu'en fait, les agents de la Comp., en constatant l'avarie survenue au wagon litigieux, ont déclaré que la tige avariée présentait des cassures anciennes sur toute la surface; qu'ainsi, selon toute apparence, l'accident

cours de route, reçu les marchandises qu'il attendait qu'avec un fort retard (1o, 3o et 4° espèces); il a dû payer au propriétaire des journées supplémentaires de location (3o espèce); la Comp. de chemins de fer, responsable du retard, devra, en outre de l'indemnité pour retard, lui rembourser le prix des journées supplémentaires, sans quoi le destinataire ne serait pas complètement indemnisé.

La Comp. de chemins de fer se retourne alors vers le propriétaire du wagon-réservoir, et lui demande le remboursement des sommes qu'elle a ainsi payées, à raison du retard occasionné par l'avarie survenue à ce wagon, ou les frais de réparation de l'avarie. C'est ici que se pose la question de savoir quel est le contrat qui lie la Comp. de chemins de fer et le propriétaire du wagonréservoir; car, si ce contrat est un louage, un dépôt, un prêt, ou un contrat innommé, l'art. 103, C. comm., n'est pas applicable. C'était ce que soutenaient les Comp. de chemins de fer dans les espèces ci-dessus; elles prétendaient, notamment, dans la 1re espèce, en attribuant au contrat qui intervient entre les Comp. et les propriétaires des wagons-réservoirs le caractère d'un contrat de louage,

qu'elles étaient en droit d'invoquer les clauses des tarifs spéciaux P. V., n. 129, relatifs à l'imma

est du plutôt à un vice propre du wagon qu'à une faute imputable à la Comp.; que l'art. 103, C. comm., est inapplicable dans l'espèce, puisqu'il s'agit d'une avarie survenue, non à une marchandise transportée, mais à un wagon circulant sur le réseau de la Comp., et ce, non en vertu d'un contrat de transport, mais d'un contrat de louage »; Mais attendu, d'une part, que l'art. 5. 4, du tarif spécial commun P. V.. n. 129, impose seulement aux propriétaires des wagons-réservoirs immatriculés, l'obligation d'avoir un certain nombre de pièces de rechange prêtes à être mises à la disposition du chemin de fer »; que. dans ses conclusions, insérées aux qualités du jugement attaqué, la Comp. de l'Est reconnait que Monnin a expédié, le 19 févr 1907, la tige de tampon qu'elle lui avait réclamée le 18 février seulement; que ce dernier ne saurait donc supporter aucune responsabilité découlant des dispositions précitées, auxquelles il s'est conformé; Attendu, d'autre part, que, pour l'exécution du contrat de transport intervenu entre elle et l'expéditeur, la Comp. de chemins de fer était tenue d'acheminer le wagon-réservoir, contenant 128 hectolitres de vin, de la gare expéditrice à la gare destinataire; que ce contrat avait pour objet, aussi bien le wagon loué par le destinataire, et demeuré, malgré l'immatriculation, la propriété de Monnin, que la marchandise expédiée; que, la Comp., accomplissant ainsi une opération de trans port, aucune clause du tarif spécial P. V., n. 129, ne pouvait, à peine de nullité, édictée par l'art. 103, C. comm., soit exonérer la Comp. de chemins de fer de la responsabilité incombant au voiturier, soit intervertir l'ordre de la preuve, mise à la charge de celui-ci, pour établir sa libération; qu'il en résulte que la preuve des causes d'une avarie, survenue en cours de route à un wagon-réservoir, ne saurait être basée sur les simples affirmations des agents de la Comp., et qu'elle ne peut être faite par le transporteur que selon les

triculation, à l'entretien, à la circulation et au transport des wagons-réservoirs, qui mettent l'entretien des wagons-réservoirs à la charge des propriétaires de ces wagons, qui spécifient qu'aucune indemnité n'est due par le chemin de fer pour le chômage des wagons pendant leur réparation, ou aux termes desquelles l'expéditeur et le destinataire de wagons-réservoirs doivent, en cas d'avarie et à défaut de constatation contradictoire, s'en rapporter aux déclarations des agents de la Comp. faisant foi jusqu'à preuve contraire. Cette thèse eût été juridique, s'il se fût agi effectivement d'un contrat de louage; mais, étant donné qu'il s'agissait d'un contrat de transport, les clauses susénoncées devaient être écartées, en vertu de la loi du 17 mars 1905, et la Comp., pour dégager sa responsabilité et réussir dans son recours contre le propriétaire du wagon-réservoir, devait faire, par les modes du droit commun, la preuve (qu'il appartient aux juges du fond d'apprécier souverainement. V. Cass. 1er déc. 1902, S. et P. 1903.1.147; Pand. pér., 1903.1.454), que l'avarie était due à un vice propre du wagon ou à la force majeure.

(1) Jurisprudence constante. V. Cass. 9 juill. 1912 (S. et P. 1912.1.509; Pand. pér., 1912.1. 509), et la note.

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