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sous l'application des dispositions de simples présomptions, même en l'absence est souveraine (7) (C. civ., 1315, 1353). l'art. 1477, C.civ., el la penalité civile, pro- de tout commencement de preuve par Il importe peu qu'ils aient puisé un arnoncée par ce texte, atteint, après le décès écrit (4) (C. civ., 1348).

gument d'analogie dans l'art. 1569, C. civ., du mari, ses héritiers ou légataires, alors En effet, dans cette hypothèse, la femme qui édicte au profit de la femme dotale du moins que ceux-ci, connaissant le diver- demeurant étrangère à la réception de la une présomption de paiement de la dot tissement commis par leur auteur, n'ont pas dot et n'ayant pas, dès lors, légalement la après dix années écoulées depuis l'échéance spontanément déclaré les objets divertis ou possibilité de se procurer la preuve écrite fixée pour son versement, s'ils n'ont point recélés (1) (C. civ., 1477).

de ce fait, est fondée à se prévaloir des basé leur décision sur ce terte, qu'ils ont En conséquence, les juges du fond, après dispositions de l'art. 1348, C. civ. (5) (Id.). même déclaré expressément n'élre appliavoir constaté, d'une part, que le mari a Et celle règle s'applique aussi bien au cable qu'au régime dolal (8) (C. civ., frauduleusement détourné des valeurs de- régime de la communauté qu'au régime 1569). pendant de la communauté, dans le but de dotal (6) (C. civ., 1499, 1502, 1569). frustrer sa femme d'une partie de ses Spécialement, lorsque les juges du fond,

(Epoux Cheveau C. V've Minguin). droits, et, d'autre part, qu'après le décès pour accueillir la demande formée par M. Minguin, qui avait épousé en 1875 du mari, le légataire universel de celui-ci une veuve, mariée sous le régime de la com- Mlle Puchalsky, est décédé en 1906, ayant a omis sciemment de déclarer les effets munauté d'acquéts, contre la légataire uni- institué pour sa légataire universelle divertis, font à bon droit application au verselle de son mari, en reprise de la dot Mme Cheveau. Aux termes du contrat de légataire universel des dispositions de en argent qui lui avait été constituée par mariage des époux Minguin, portant adopl'art. 1477, C. civ. (2) (Id.).

sa mère, se sont fondés, d'une part, sur ce tion du régime de la communauté réduite La femme n'est admise à réclamer la qu'il résultait du contrat de mariage que aux acquêts, Mme Puchalsky, mère de la restitution de la dot qu'à charge de prouver ia dot devrait être versee aussitôt après la future, avait constitué en dot à celle-ci qu'elle en a reçu le montani (3) (C. civ., célébration du mariage, et, d'autre part, une somme de 6.000 fr., s'obligeant à 1315).

sur ce que, depuis cet événement, et durant « livrer à la future épouse, sa fille, entre Mais, à défaut de stipulations particu

une période de trente années, le mari n'a- les mains du futur époux, savoir : 1.900 fr. lières du contrat de mariage, elle peul, vait jamais formulé de réclamation au en meubles meublants et effets mobiliers, dans le cas la dot a été promise par un sujet de la dot, leur déclaration que cette et 5.000 fr. en argent comptant ou en vatiers, en établir le paiement, à l'encontre

dernière circonstance constituait « leurs au porteur au cours du jour du du mari ou de ses héritiers, à l'aide de présomption grave et décisive de paiement » mariage, au choix de la donatrice ». L'état droits de la femme, et celle-ci peut, lors de la li- cit., t. 2, n. 1164. Mais l'héritier ou le légataire en- Rép., po Mariage, n. 11363 et s. La raison en est quidation, faire porter à l'actif de la communauté court les pénalités de l'art. 1477, lorsque, ayant que, la dot étant, dans ce dernier cas, versée diles valeurs qu'elle justifie avoir été frauduleuse

connaissance du divertissement commis par son rectement au mari, qui a seul qualité pour la rement dissimulées ou diverties par le mari au cours

auteur, il n'a pas spontanément fait la décla- cevoir (C. civ., 1549), la femme s'est trouvée dans de son administration. V. Cass. 11 nov. 1895 (S. ration des objets divertis ou recélés (V. Cass. l'impossibilité morale de se procurer une preuve et P. 1896.1.281, la pote de M. Houpin et les ren- 3 mai 1848, s. 1849.1.363. · P. 1848.2.512), écrite du versement (C. civ., 1848). V. la note vois; Pand. pér., 1897.1.217). Mais là ne se aussi bien que dans l'hypothèse où il a lui-même précitée de M. Wahl. La distinction ainsi faite rebornent pas les droits de la femme; suivant une

commis le détournement du vivant de son au- posant sur l'application des règles du droit comdoctrine et une jurisprudence constantes, la pé

teur. V. sur cette hypothèse, Cass. 15 nov. 1911, mun en matière de preuve, il n'y a pas de raison, nalité de l'art. 1477, O. civ., est applicable & précité.

par suite, pour ne pas l'étendre aux autres régimes, l'époux coupable d'actes de recélé, antérieurs à la (1-2) V. la note qui précède.

et notamment au régime de la communauté (V. en dissolution du mariage, accomplis en vue de cette (3 à 7) La femme n'est, en principe, admise à ce sens, Caen, 10 janv. 1855, S. 1855.2.273, - P. dissolution. V, les renvois de la note sous Cass. réclamer la restitution de sa dot qu'à charge de 1855.1.138), et au régime de la communauté ré15 nov. 1911 (S. et P. 1912.1.111; Pand. pér., prouver que son mari l'a reçue. V. la note sous duite aux acquêts, lorsqa'il s'agit des rapports 1912.1.111). Par suite, la femme peut demander Cass. 26 avril 1909 (S. et P. 1912.1.514; Pand. entre les époux ou leurs héritiers, les règles resque le mari soit privé de sa part dans les effets pér., 1912.1.514), et les renvois ; Aubry et Rau, trictives tant de la preuve des apports de la par lui divertis on recélés au cours du mariage. 4. éd., t. 5, p. 625, $ 540; Baudry-Lacantinerie, Le femme que de leur versement au mari, édictées

La femme peut-elle faire valoir le même droit Courtois et Surville, Contr. de mar., 3e éd., t. 3, par les art. 1499 et 1510, C. civ., et 563, O. comm., vis-à-vis des héritiers du mari? L'affirmative n'est n. 1888. C'est là l'application d'une règle de droit ne pouvant être invoquées par l'un des conjoints pas douteuse. On admet, en effet, que l'action à commun en matière de preuve (O. civ., 1315), et ou ses héritiers à l'encontre de l'autre conjoint laquelle donne lieu le divertissement ou récel, qui, faute d'un texte contraire, s'impose à la femme, ou de ses héritiers. V. Cass. 1er août 1910 (S. et constituant une action civile en réparation du pré- sous quelque régime que les époux soient mariés. P. 1911.1.319; Pand. pér., 1911.1.319); Nancy, judice causé l'époux lésé, peut être exercée Mais à l'aide de quels moyens la femme peut- 1er juill. 1911 (S. et P. 1912.2.55; Pand. pér., contre l'héritier ou le légataire de l'époux coupa- elle faire cette justification ? En ce qui concerne la 1912.2.55), et les renvois. ble. V. Paris, 24 juin 1843 (S. 1843.2.331.

femme dotale, on fait généralement une distinc- (8) L'art. 1669, C. civ., qui autorise la femme 1843.2.179), et, sur pourvoi, Cass, 4 déc. 1844 (S. tion. S'agit-il pour elle de prouver la réception dotale, après dix ans écoulés depuis l'échéance 1845,1.191); Cass. 11 nov. 1895, précité, et la d'une dot qu'elle s'est constituée elle-même, la fixée pour le paiement de la dot, á en exiger la note de M. Houpin; adde, Aubry et Rau, 4. ed., preuve doit être faite, au-dessus de 150 fr., confor- restitution, sans avoir à prouver que le mari l'a t. 6, p. 429, § 319; Laurent, Princ. de dr. civ., mément au droit commun (C. civ., 1341, 1348), reçue, est une dérogation au droit commun, et ne t. 23, n. 35; Huc, Comment. du C. civ., t. 9, n. 326; c'est-à-dire par un écrit, ou par un commencement peut, par suite, être appliqué sous le régime de Planiol, Tr. élém. de dr. civ., 5e éd., t. 3, n. 1326 ; de preuve par écrit, complété à l'aide de présomp- communauté. V. Dijon, 11 mai 1888 (8. 1888.2.239. Guillouard, Contr. de mar., t. 3, 0. 1364; Bau- tions ou de la preuve testimoniale. V. Caen, 23 oct. P. 1888.1.1241), et les renvois. Adde, Baudry. dry-Lacantinerie, Le Courtois et Surville, Id., 1907 (S. et P. 1909.2.286; Pand, pér., 1909.2. Lacantinerie, Le Courtois et Surville, Contr. de 3e éd., t. 2, n. 1168; Rodière et Pont, Id., t. 2, 286), et les renvois; adde, la note, 9e col., de mar., t. 3, n. 1892; notre C. civ. annoté, par Fuziern. 1104; notre C. civ. annoté, par Fuzier-Herman M. Wahl sous Cass. 28 oct. 1908 (S. et P. 1911. Herman et Darras, sur l'art. 1428, n. 18; et notre et Darras, sur l'art. 1477, n. 1 et s., et Suppl., par 1.89; Pand. pér., 1911.1.89). S'agit-il, au con- Rép. gen. du dr. fr., verb. cit., n. 2713; Pand. Rep., Griffond, eod. loc., n. 3; et notre Rép. gen. du dr. traire, d'une dot constituée à la femme par un

verb. cit., n. 11869. Mais les juges, qui peuvent fr., po Communauté conjugale, n. 2090 et 8.; Pand. tiers, la preuve de la remise au mari peut être retenir de simples présomptions pour établir la Rép., po Mariage, n. 6713 et s.

faite par tout mode de preuve. V. la note, 10% col., preuve de la réception par le mari d'une dot consCependant, d'après l'opinion dominante, l'héri- de M. Wahl sous Cass. 28 oct. 1908, précité, avec tituée par un tiers de la femme mariée sous le rétier ou le légataire peuvent exciper de leur bonne les renvois. Adde, Aubry et Rau, loc. cit.; Planiol, gime de la communauté (V. la note qui précède) foi, lorsqu'ils ont spontanément offert de restituer Tr. élém. de dr. civ., 5° éd., t. 3, n. 1644; Rodière ne méconnaissent pas ce principe, lorsque, tirant avant toute poursuite. V. la note de M. Houpin et Pont, Contr. de mar., t. 3, n. 1917; Guillouard, une présomption de versement du long temps et les renvois sous Cass. 11 nov. 1896, précité ; Id., t. 4, n. 2131 ; Baudry-Lacantinerie, Le Cour. écoulé depuis le mariage sans réclamation de la adde, Rouen, 20 févr. 1897 (S. et P. 1899.2.241); tois et Surville, op. cit., t. 3, n. 1899, p. 742; et part du mari, ils invoquent, simplement à titre Baudry-Lacantinerie, Le Courtois et Surville, op. notre Rép. gen. du dr. fr., vo Dot, n. 2689; Pand. d'analogie, la disposition de l'art. 1569.

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- P.

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liquidatif de la communauté MinguinPuchalsky, dressé après le décès de M. Minguin, a fait de la part de sa veuve l'objet de plusieurs contestations, qui ont été portées devant le tribunal de Saumur. Mme veuve Minguin a demandé notamment: lo qu'il fut rétabli à l'actif de la communauté deux sommes de 23.699 fr. 30 et de 10.513 fr. 65, provenant de la vente, en 1903 et en 1905, de différentes valeurs que M. Minguin avait diverties à son profit, et dont il devait être privé, par application de l'art. 1477, C. civ.; 2° que, parmi ses reprises, figurat la somine de 5.000 fr., qui lui avait été constituée en dot par sa mère en argent ou en valeurs, et que le notaire liquidateur n'avait pas fait figurer, sous le prétexte qu'il n'était pas établi que le mari eùt recu cette somme. Ces deux rectifications ont été admises par jugement du 30 nov. 1907, ainsi conçu :

a Le Tribunal; – En ce qui concerne les deux premiers contredits, relatifs à l'aliénation par le mari sans remploi de deux valeurs de la communauté, l'une de 23.699 fr. 30, l'autre de 10.543 fr. 65 :

- Attendu que ces aliénations, aux dates et dans les conditions indiquées par la demanderesse, ainsi que le défaut de remploi par le mari, résultent suffisamment des documents de la cause; qu'ils ne sont pas d'ailleurs autrement contestés par les défendeurs, qui se bornent å alléguer qu'aucune justìtication n'est apportée à l'appui de la fraude invoquée contre les droits de la femme; Attendu que, s'il était établi que le mari a fait disparaître les valeurs dans un but d'hostilité vis-à-vis de sa femme, et pour la frustrer, lors de la dissolution de la communauté, de son droit de reprise sur ces valeurs, ces dernières devraient, sans nul doute, être rétablies dans l'actif de la communauté, et qu'en outre, suivant les dispositions de l'art. 1477, C. civ., le mari devrait être privé de sa portion dans lesdites valeurs; Attendu que cette privation ne constitue pas une pénalité ayant un caractère exclusivement personnel, mais bien plutôt la réparation du dommage causé, et qu'à ce titre, les héritiers ou légataires universels de l'époux doivent l'encourir du chef de leur auteur;

Attendu que, dès l'année 1903, date de l'aliénation des valeurs autrichiennes, il est démontré, par les pièces versées aux débats, que les époux Minguin vivaient en mauvaise intelligence, et qu'il est inutile à cet égard de recourir à un plus ample informé; qu'en déshéritant par testament sa femme de son usufruit légal, Minguin a affirmé de facon indiscutable son aversion à l'égard de celle-ci; qu'il est donc certain qu'en soustrayant à la communauté de pareilles sommes, sa préoccupation unique a été de diminuer, autant qu'il le pouvait, les reprises de son épouse; qu'il est impossible d'y assigner un autre motif plausible, et notamment d'admettre, ainsi qu'il a été plaidé, que le montant de ces ventes a pu servir à payer les dépenses occasionnées par des frais exceptionnels ou de maladie; Attendu, en effet, que les époux Minguin ont toujours mené une existence des plus simples, des plus économes; qu'il n'apparait pas

qu'un événement, susceptible d'occasion ner d'aussi forts déboursés, ait traversé leur vie à un moment quelconque; Attendu que l'esprit de fraude est encore plus flagrant en ce qui concerne la seconde aliénation, qui a eu lieu quelques mois seulement avant le décès du mari; - Attendu, en conséquence, qu'il y a lieu de faire figurer les deux sommes à l'actif de communauté, et d'en priver les époux Cheveau, ces valeurs ayant été détournées ou diverties par leur auteur;

« En ce qui concerne les reprises de Mme Minguin : Attendu, relativement à la dot de 5.000 fr., constituée par sa mère, Mme Puchalsky, qu'il résulte du contrat de mariage, dressé le 1er avril 1875, que cette dot était payable sans terme, et qu'en admettant que le mari ne l'ait pas reçue au commencement du mariage, il lui appartenait de la faire rentrer, en sa qualité d'administrateur des biens de sa femme; - Attendu qu'il n'est pas justifié que, pendant les trente années qu'a duré la communauté, le mari ait fait aucune diligence à cet égard, ou qu'il ait formulé quelque réclamation, ce qui implique qu'il n'avait point à en faire; que c'est d'ailleurs le lieu d'appliquer, au profit de la femme, la présomption de l'art. 1569, C. civ., et de l'admettre, en conséquence, à exercer la reprise de cette dot mobilière;... Par ces motifs, etc. ».

Sur appel des époux Cheveau, la Cour d'Angers a confirmé par un arrêt du 28 juill. 1908, ainsi conçu : « La Cour; En ce qui touche le divertissement des valeurs de communauté (23.699 fr. 30 et 10.513 fr. 65) : — Adoptant les motifs des premiers juges; Et attendu que les circonstances de fait par eux relevées démontrent, non seulement une intention de fraude, mais un divertissementfrauduleux, définitivement consommé avant la mort du sieur Minguin; que la répétition de deux ventes de titres russes et autrichiens à trois années d'intervalle, et l'impossibilité d'admettre pour la dernière (qui n'a précédé la mort que de deux mois) des dépenses extraordinaires, établissentque ces deux actes ont le même caractère frauduleux; qu'ainsi, Minguin a fait disparaitre le tiers de l'émolument de la communauté; Attendu que l'art. 1477, C. civ., prive celui des époux qui a diverti ou récélé des effets de communauté de sa portion dans cesdits effets; Attendu que le jugement a, avec raison, considéré que cette disposition ne constitue pas une pénalité ayant un caractère personnel, mais plutôt la réparation d'un dommage causé; qu'à ce titre, les héritiers de l'époux décédé doivent l'encourir du chef de leur auteur; que, dans l'opinion contraire, on arriverait

ce résultat inadmissible que, si l'époux qui a commis le divertissement est décédé, l'héritier profitera du produit de la fraude, ou tout au moins l'acte frauduleux n'aura pas de sanction; Attendu que la dame Cheveau, légataire universelle de Minguin, représente ce dernier; qu'à ce titre, la veuve Minguin est fondée à lui opposer tous les moyens opposables à son auteur; que, sans doute, l'art. 1422, C. civ., permet au mari, administrateur de la com

munauté, de disposer à titre gratuit des effets mobiliers, mais pourvu que ce soit sans fraude; que l'art. 1167, C. civ., permettrait encore à la veuve d'atteindre les actes frauduleux; - Attendu qu'il résulte des documents de la cause que la dame Cheveau a omis sciemment, dans les diverses occasions qu'elle a eues d'être sincère, de déclarer les valeurs détournées;

En ce qui touche la reprise par la dame Minguin de la partie de sa dot constituée à son profit en argent par sa mère :

Adoptant également les motifs des premiers juges; Et attendu qu'il n'est pas contesté que la remise des meubles meublants, portion de la même dot, a été effectuée au mari aussitôt le mariage; que le contrat de mariage (art. 5) indique, par sa rédaction, qu'il devait en être de même de la dot en argent ou valeurs ; Attendu que, si l'art. 1569 est spécial au régime dotal, et dispense la femme, après dix ans écoulés depuis l'échéance du terme pris pour le paiement de la dot, de prouver que le mari a reçu la dot, la circonstance que trente années se sont, en l'espèce, écoulées, sans réclamation du mari relativement à la dot, constitue une présomption grave et décisive des paiements;... - Par ces motifs, etc. ).

Pourvoi en cassation par les époux Cheveau. - 1er Moyen. Violation des art. 1119, 1421, 1422 et 1177, C. civ., 7 de la loi du 20 avril 1810, et défaut de base légale, en ce que l'arrêt attaqué applique les peines du recel, édictées par l'art. 1477, à l'héritier d'un mari prétendu recéleur, alors que l'arrêt, d'une part, ne constate pas les éléments constitutifs du recel, c'est-à-dire la dissimulation des biens faisant partie de la masse commune, mais seulement la disposition par le mari de biens de la communauté, et alors, d'autre part que, s'agissant pour l'héritier d'un préjudice à réparer à l'égard de la femme, à raison de l'administration du mari, cet héritier ne pouvait être condamné à payer une somme double de la perte éprouvée et du gain manqué par la femme.

20 Moyen. Violation des art. 1315, 1341, C. civ., par fausse application de l'art. 1569 du même Code, de l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810, et défaut de base légale, en ce qu'appliquant au régime de communauté l'art. 1569, qui déroge au droit commun pour le régime dotal, l'arrêt attaqué dispense une femme commune, réclamant restitution de sa dot, de l'obligation de rapporter une preuve légale du paiement de cette dot au mari.

ARRÊT. LA COUR; Sur le premier moyen : Attendu que, si le mari a, aux termes des art. 1421 et 1422, C. civ., le droit de disposer des biens de la communauté, il ne peut les détourner en fraude des droits de sa femme; qu'un détournement de cette nature tombe sous le coup des dispositions de l'art. 1477, C. civ., et que la pénalité civile prononcée par ce texte atteint, après le décès du mari, ses héritiers ou légataires, alors du moins que ceux-ci, connaissant le divertissement commis par leur

pourvoi :

auteur, n'ont pas spontanément déclaré qu'elle déclarait même expressément n'être son nom à celui de Gailly sur le chapeau les objets divertis où recélés ; Attendu

applicable qu'au régime dotal; D'où il des roues, adapté aux essieux qu'il avait que l'arrêt attaqué constate, d'une part, suit qu'en statuant comme il l'a fait, l'arrêt dù remplacer, Fourgeaud n’a commis que Minguin a frauduleusement détourné

attaqué n'a violé aucun des textes visés aucune infraction à la loi précitée, pouvant des valeurs dépendant de la communauté, dans le second moyen; – Rejette, etc. donner lieu à l'allocation de dommagesdans le but de frustrer sa femme d'une Du 8 juill. 1912. — Ch. civ. – MM. Bau- intérêts au profit de Gailly; qu'il n'appapartie de ses droits, et, d'autre part, douin, le prés.; Rau, rapp.; Lombard, av. rait pas que, par la même raison, il ait qu'après le décès dudit Minguin, la dame gén. (concl. conf.); Mornard et Chabrol, fait acte de concurrence déloyale; Par Cheveau, sa légataire universelle, a sciem- av.

ces motifs, etc. ». ment omis de déclarer les effets divertis; qu'en présence de ces constatations, c'est

Pourvoi en cassation par M. Gailly. å hon droit que l'arrêt attaqué a, relative

CASS-REQ. 15 mai 1912.

Moyen unique. Violation des art. Ier de la loi ment aux valeurs litigieuses, fait applica

du 28 juill. 1824, 1382, C.civ., et 7 de la loi tion à la dame Cheveau des dispositions de

NOM ET PRÉNOMS, NON COMMERCIAL, Usur- du 20 avril 1810, manque de base légale, l'art. 1477, précité; qu'en statuant ainsi,

PATION, FABRICANT, SUBSTITUTION DE NOM, en ce que la Cour a déclaré licite, et non il n'a violé aucune loi;

VOITURE, TRANSFORMATION, ACTION EN susceptible de donner ouverture à une Sur le deuxième moyen :

Attendu DOMMAGES-INTÉRÊTS, CONCURRENCE DÉ- action en dommages-intérêts, le fait, par un que la femme n'est admise à réclamer la LOYALE (Rép., v° Nom (et prénoms), n. 183 fabricant, d'acheter d'occasion un objet restitution de la dot qu'à charge de prouver

et s.; Pand. Rép., v° Nom commercial, fabriqué par un concurrent, et, après que le mari en a reçu le montant; mais

n. 217 et s.).

avoir fait subir à cet objet une transforqu'à défaut de stipulations particulières

mation quelconque, de substituer, sur cet du contrat de mariage, elle peut, dans le

Les juges du fond, qui constatent que, par objet ainsi modifié, son propre nom à celui cas où la dot a été promise par un tiers,

suite des transformations qu'un commerçant du fabricant, qui y figurait auparavant. en établir le paiement, à l'encontre du mari

a fail subir à une voilure qu'il avait acheou de ses héritiers, à l'aide de simples tée, celle voiture ne peut plus être considérée

ARRÊT. présomptions, même en l'absence de tout comme un objet exclusivement fabriqué par

LA COUR; commencement de preuve par écrit; qu'en le constructeur originaire, qu'elle a perdu,

Sur l'unique moyen du

Attendu tout au moins, le type caractéristique que effet, dans cette hypothèse, la femme, de

que les juges du fond meurant étrangère à la réception de la son auteur lui avait donné, et que, d'ail.

ont constaté que, par suite des transfor

mations que fourgeaud avait fait subir à dot, et n'ayant pas, dès lors, légalement la leurs, s'est borné à son

la voiture fabriquée Gailly, possibilité de se procurer la preuve écrite de ce fait, est fondée à se prévaloir des des roues, adapté aux essieux qu'il a di

revendue ensuite au sieur Carré, cette dispositions de l'art. 1348, C. civ.; et que

remplacer, repoussent à bon droit l'action cette règle s'applique aussi bien au réen dommages-intérêts, intentie par le fa

voiture ne pouvait plus être considérée bricant contre cet acquéreur, pour infrac

comme un objet exclusivement fabriqué gime de la communauté qu'au régime dotal;

par Gailly; qu'elle avait perdu tout au Attendu que, dans le litige engagé

lion à la loi du 28 juill. 1824 el concurs entre la dame Puchalsky, veuve de Pierre rence déloyale (1) (C. civ., 1382;L. 28 juill,

moins le type caractéristique que son auMinguin, avec lequel elle était mariée sous 1824, art. Zer).

teur lui avait donné; que Fourgeaud s'était

borné à substituer son nom à celui de le régime de la communauté, et la dame

(Gailly C. Fourgeaud).

Gailly sur le « chapeau des roues », adapté Cheveau, légataire universelle de ce der

aux essieux qu'il avait dù remplacer; nier, la Cour d'Angers, pour accueillir la La Cour d'Alger avait rendu, le 2 mai Attendu qu'en l'état de ces constatations, demande de la veuve Minguin, en reprise 1911, un arrêt ainsi conçu : - « La Cour;.. l'arrêt attaqué, qui est motivé, a, sans violer d'une somme de 5.000 fr., montant de la Attendu que l'interdiction de la loi du aucun des textes visés au pourvoi, rejeté dot en argent à elle constituée par sa mère, 28 juill. 1824 vise le fait, soit d'apposer, soit à bon droit la demande de Gailly; s'est fondée, d'une part, sur ce qu'il ré- de faire apparaître par addition, retran- Rejette, etc. sultait du contrat de mariage que cette chement ou par une altération quelconque, Du 15 mai 1912.

MM. Tasomme devait être soldée aussitôt après la sur des objets fabriqués, le nom d'un fa- non, prés.; Birot-Breuilh, rapp. ; Blondel, célébration du mariage, et, d'autre part, bricant autre que celui qui en est l'au- av. gen. (concl. conf.); Auger, av. sur ce que, depuis cet événement, et du

teur ; Attendu que, par suite de transrant une période de trente années, le mari formations que Fourgeaud a fait subir à n'avait jamais formulé de réclamation au la voiture fabriquée par Gailly, qu'il avait sujet de la dot; — Attendu que ladite Cour, achetée du sieur Coutaya, et qu'il a re

CASS.-REQ. 4 décembre 1912. en déclarant que cette dernière circons- vendue ensuite au sieur Carré, transfor- BAIL (EN GÉNÉRAL), PERTE DE LA CHOSE, tance constituait « une présomption grave mations qui sont établies par le procès- PERTE PARTIELLE, PERTE TOTALE, INCENet décisive de paiement », n'a fait qu'user verbal de l'huissier Beausse, du 7 oct. DIE, RESILIATION, POUVOIR DU JUGE, du pouvoir souverain d'appréciation qui 1909, enregistré, cette voiture ne pouvait APPRÉCIATION SOUVERJINE, MOTIFS IMPLIlui appartenait, et a donné une base légale plus être considérée comme un objet CITES (Rép., vo Bail (en général], n. 2174; à sa décision, et que, si elle a puisé un ar- exclusivement fabriqué par Gailly; qu'elle

Pand. Rép., vo Bail en général, n. 1171). gument d'analogie dans l'art. 1569, C. civ., avait, en partie tout au moins, perdu le elle n'a nullement, comme le soutient le type caractéristique que son auteur lui Il appartient aux juges du fond d'apprépourvoi, fondé sa décision sur ce texte, avait donné; que, dès lors, en substituant cier, d'après les circonstances de la cause,

noms d'celule din fabricant sur le chapean schreiter et breire putaya, ex qu'il avait

Ch. req.

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(1) Au nombre des fraudes qu'il prévoit, l'art. 1er de la loi du 28 juill. 1824 punit, suivant l'opinion dominante, l'apposition par an fabricant de son nom sur un objet fabriqué par un autre (V. Paris, 9 août 1894, S. et P. 1895.2.278, et la note de M. Lallier), notamment par substitution de son nom à celui du fabricant. V. Paris, 9 août 1894, précité; Pouillet, Tr. des marques de fabr. et de la concurrence déloyale, 5° éd., par Taillefer et Claro, n. 413 ter. Mais encore faut-il, pour que cette substitution constitue l'usurpation de nom, et puisse donner lieu à une action civile en dommages-intérêts, que l'objet sur lequel

est apposé le nom d'un autre que celui du fabri-
cant soit bien demeuré le même, au moins dans
ses éléments essentiels, que celui sur lequel le fa.
bricant avait placé son nom. Or, dans l'espèce, il
résultait des constatations des juges du fait que
la voiture achetée d'occasion avait été complète-
ment transformée, qu'elle avait perdu le type
caractéristique que lui avait donné son fabricant,
en telle sorte que l'on se trouvait en présence d'une
voiture toute différente de celle qui était sortie
des mains da fabricant originaire, et qu'il n'y
avait pas eu usurpation de nom dans le fait par
l'acheteur d'avoir fait apparaître son nom sur des

pièces qu'il avait dû remplacer. Dans ces conditions, le délit prévu et puni par la loi du 28 juill. 1824, n'était pas caractérisé, et l'action civile en dommages-intérêts basée sur ce délit ne pou. vait être accueillie. On ne pouvait davantage considérer le fait incriminé comme acte de concurrence déloyale, puisque la transformation de la voiture avait été de telle nature que la voiture avait perdu les caractères qui auraient révélé son origine, en telle sorte qu'il ne pouvait naître, de l'apposition du nom du défendeur sur la voiture, aucune confusion avec les types de voitures creés par le demandeur.

si les détériorations de la chose louée la rendent inapte à remplir sa destination, et présentent ainsi le caractère d'une perte totale ou simplement partielle (1) (C. civ., 1722, 1741).

Il leur appartient, par suite, par une appreciation souveraine, qui échappe au controle de la Cour de cassation, de décider, après un incendie qui a détruit le premier et le deuxième étages ainsi que la toiture d'une maison, qu'il y avait lieu de prononcer la résiliation du bail (2) (Id.).

Ce motis implique suffisamment que la destruction de la chose, quoique partielle, était, eu égard à sa destination, assez grave pour équivaloir à la perte totale (3) (C. civ., 1722, 1741; L. 20 avril 1810, art. 7).

(Pillet C. de Monti-Rossi). A la suite d'un incendie survenu dans une maison donnée à bail par M. de MontiRossi à M. Pillet, incendie qui avait détruit le premier et le second étages et la toiture, ne laissant intacts que le rez-de-chaussée et les quatre murs, M. de Monti-Rossi, bailleur, a assigné M. Pillet devant le tribunal civil de Calvi en 6.000 fr. de dommages-intérêts et en résiliation du bail. Cette demande a été repoussée par un jugement du 28 juill. 1910, décidant que l'incendie était dû à un vice de construction. - Mais, sur appel de M. de Monti-Rossi, la Cour de Bastia, reconnaissant que la responsabilité de l'incendie incombait au locataire, a infirmé, par arrêt du 8 mai 1911, à condamné M. Pillet à 2.500 fr. de dommages-intérêts, et a prononcé la résiliation du bail, avec expulsion, si besoin était, du preneur.

Pourvoi en cassation par M. Pillet. Moyen unique. Violation et fausse application des art. 1722, 1728, 1733, 1741, C. civ., et 7 de la loi du 20 avril 1810, pour défaut de motifs et manque de base légale, en ce que, après avoir déclaré le demandeur responsable de l'incendie survenu dans une partie de l'immeuble dont il était locataire, en vertu de la présomption établie par l'art. 1733, C. civ., l'arrêt attaqué a prononcé la résiliation du bail

dudit immeuble, sans en donner aucun motif, basé, soit sur le fait de n'en avoir pas joui en bon père de famille, soit sur la perte de la chose louée, mettant ainsi la Cour de cassation dans l'impossibilité d'exercer son contrôle.

ARRÊT. LA COUR; Sur le moyen unique du pourvoi : Attendu qu'il appartient aux juges du fond d'apprécier, d'après les circonstances de la cause, si les détériorations de la chose louée la rendent inapte à remplir sa destination, et présentent ainsi le caractère d'une perte totale ou simplement partielle; – Attendu qu'après avoir constaté qu'un incendie, qui s'était déclaré le 12 févr. 1910 dans une maison à usage d'habitation, donnée à bail au demandeur par le défendeur éventuel, avait en tièrement détruit les premier et deuxième étages, ainsi que la toiture, l'arrêt attaqué a pu, par une appréciation, souveraine, qui échappe au contrôle de la Cour de cassation, dire qu'en l'état des choses actuel, il y avait lieu de prononcer la résiliation du bail;

; que ce motif implique suffisamment que la destruction de la chose, quoique partielle, était, eu égard à sa destination, assez grave pour équivaloir à la perte totale; - D'où il suit que l'arrêt attaqué, qui est régulièrement motivé, n'a ni violé ni faussement appliqué les textes visés au pourvoi; - Rejette, etc. Du 4 déc. 1912.

MM. le cons. Lardenois, prés. ; Feuilloley, rapp:; Blondel, av. gen. (concl. conf.); AguilJon, av.

assister à l'enquête, afin de contrôler les dires des témoins, et de faire toutes réquisitions et observations qu'elles peuvent juger utiles à leurs intérèls, ces dispositions de loi n'édictent pus la nullité en cas d'inobservation de ces formalités; la nullité n'est encourue que dans le cas la présence de la partie élait indispensable à sa défense, qui serait par son absence gravement alieinte (4) (C. proc., 315 et s.). (Aillaud et Cerutti C. Touscoz). ARRÈT.

LA COUR; Sur le premier moyen : ... (sans intérêt);

Sur le deuxième moyen, pris de la violation des art. 315 et s., 1034, C. proc., 7 de la loi du 20 avril 1810 (en ce que la Cour s'est fondée, pour prononcer la condamnation des demandeurs, sur une expertise aux opérations essentielles de laquelle ceux-ci n'avaient pas été convoqués, et a rejeté, sans donner de motifs exprès ou implicites à l'appui de ce rejet, les conclusions prises devant elle par les demandeurs, et dans lesquelles ceux-ci invoquaient expressément cette nullité) : - Attendu que, si les art. 315 et s., C. proc., prescrivent, en matière d'expertise, certaines formalités, notamment la convocation des parties pour assister à l'enquête, afin de contrôler les dires des témoins, de faire toutes réquisitions et observations qu'elles peuvent juger utiles à leurs intérêts, ces dispositions de loi n'édictent pas la nullité en cas d'inobservation de ces formalités; que la nullité n'est encourue que dans le cas où la présence de la partie était indispensable à sa défense, qui serait par son absence gravement atteinte; qu'il n'apparaît pas qu'aucune atteinte ait été portée à la libre defense d'Aillaud et Cerutti; que ce second moyen n'est pas plus fondé que le premier; Sur le troisième moyen :

(sans intéret); Rejette le pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 22 mai 1911 par la Cour d'Alger, etc. Du 3 févr. 1913.

MM. Tanon, prés.; Bonnet, rapp.; Eon, av. gen. (concl. conf.); Auger, av.

Ch. req.

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Ch. req:

(1-2-3) En cas de perte totale de la chose louée, le hail est résolu de plein droit, faute d'objet (C. civ., 1722, 1741); et le droit de se prévaloir de cette résolution appartient au bailleur comme au preneur. V. Poitiers, 19 févr. 1894 (S. et P. 1894.2.201, et la note, 6e col., de M. Surville, avec les renvois; Pand. pér., 1894.2.335). Au contraire, en cas de perte partielle, le bail n'est pas résolu de plein droit; l'art. 1722 accorde au preneur une option entre la résiliation ou la continuation avec diminution de prix. Mais, bien que la chose ne soit pas détruite entièrement, il y a, suivant l'opinion généralement admise, perte totale, si elle ne peut plus remplir sa destination. V. Aubry et Rau, 4e éd., t. 4, $ 369, p. 495, et 59 éd., t. 5, 2 369, p. 344; Laurent, Princ. de dr. civ., t. 25, n. 410; Planiol, Tr. élém. de dr. civ., 5° éd., t. 2, n. 1734; Troplong, Échange et louage, t. 14, n. 231; Guillouard, Louage, t. 14, n. 392; et notre Rép. gen. du dr. fr., po Bail (en général), n. 2174; Pand. Rép., po Bail en général, n. 1171. V. cep., Baudry

Lacantinerie et Wahl, Louage, 3o éd., t. 1or, n. 527. Ainsi, il a été jugé que l'incendie, qui a détruit dans son objet principal la chose louée, a pour effet de résoudre le bail, alors que le surplus de l'immeuble doit être considéré comme un simple accessoire. V. Nancy, 9 août 1849 (S. 1851. 2.129. · P. 1850.2.395); Metz, 25 juill. 1855 (P. 1857.960); Riom, 24 août 1868 (motifs), sous Cass. 9 nov. 1869 (s. 1870.1.60. · P. 1870,131); Trib. de Tours, 7 mars 1905 (Gaz. Pal., 1905.1. 568); et la note sous Cass. 19 juill. 1876 (S. 1877. 1.53. P. 1877.119). O'est d'ailleurs aux juges du fond qu'il appartient d'apprécier souverainement si les détériorations subies par l'immeuble loué présentent le caractère d'une perte totale ou partielle. V. Cass. 16 nov. 1898 (S. et P. 1900.1. 20; Pand. pér., 1900.1.78).

(4) C'est un point certain en jurisprudence que l'observation des formalités prescrites en matière d'expertise par les art. 315 et s., O. proc., n'est pas prescrite à peine de nullité, et que cette nullité ne doit être prononcée que lorsque l'irrégula

rité commise a eu pour conséquence de porter atteinte à la libre défense des parties. V. Cass. 10 juill. 1907 (S. et P. 1907.1.440; Pand. pér., 1907.1.309), et les renvois. Il en est ainsi spécialement de la convocation des parties aux opérations de l'expertise; l'omission de cette formalité n'entraîne nullité de l'expertise que lorsqu'elle a eu pour effet d'enlever å une partie la possibilité de faire aux experts les observations et réquisitions utiles à ses intérêts (V. Cass. 19 oct. 1898, S. et P. 1899.1.32 ; Pand. pér., 1898.1.515; 15 févr. 1899, S. et P. 1899.1.371; Pand. pér., 1900.6.6 ; 19 févr. 1907, S. et P. 1907.1.80, et les renvois), et non lorsque le défaut de convocation n'a pas eu pour résultat d'enlever aux parties la possibilité de faire toutes observations utiles, de leur causer un préjudice et d'entraver leur droit de défense (V. Cass. 15 févr. 1899, précité), ou lorsqu'il ne s'agit que d'opérations accessoires. V. Cass. 12 mai 1897 (8. et P. 1897.1.320), et les renvois. V. aussi, Cass. 20 janv. 1891 (S. 1891.1.57. – P. 1891,1. 126), et la note.

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CASS.-REQ. 9 janvier 1911.

ALGERIE, VENTES DOMANIALES, VENTE AUX

ENCHÈRES, GOUVERNEUR GÉNÉRAL, Refus D'APPROBATION, LÉGALITÉ, DÉFAUT DE CONSENTEMENT, ACTION EN DÉLAISSEMENT, AUTORITÉ JUDICIAIRE, COMPÉTENCE, SURSIS (Rép., vo Compétence administrative, n. 56 et s., Suppl., vo Algérie, n. 2123 et s.; Pand. Rép., vis Autorité administrative [actes de l'], n. 139 et s., Colonisation de l'Algérie, n. 213 et s.).

dant un délai de deux mois, de refuser

saisie d'une demande en déguerpissement son approbation à la vente, soit pour vice formée par l'Etat contre l'adjudicataire, de forme, soit pour inobservation des dis- et competente pour statuer sur les effets positions de l'art. 4 du même décret, qu'en d'une vente de celle nature, ne peut, après application de l'arrêté du gouverneur géné- avoir constaté le défaut de consentement ral réglant les conditions de la mise en de l’Elat, partie venderesse, qu'en déduire vente, et qui dispose que, « lorsque l'appro- l'inexistence de la vente, quel qu'ait pu être bation est refusée, la vente doit être consi- le motif du refus d'approbation du gouverdérée comme nulle et non avenue », doit, en neur général (2) (Id.). cas de refus d'approbation par le gouver- Elle n'a donc pas à surseoir à staluer neur général dans le délai de deux mois, sur la demande en délaissement jusqu'à ce imparti par le décret du 13 sept. 1904, étré qu'il ait éli prononcé par l'autorité admiconsidérée comme n'étant pas définitive, nistrative sur la légalité du motif invoqué à défaut de consentement de l'Etat ven- par la décision du gouverneur général, deur (1) (Décr., 13 sept. 1904, art. 6 et 8; dont la régularité, quant à la forme, n'est Arr. gouv. gen., 8 déc. 1905, art. 15). pas contestée, et dont le sens est clair et

C'est une consequence nécessaire du précis (3) (LL. 16-24 août 1790, tit. 2, refus d'approbation, ei la juridiction civile, art. 13; 16 fruct, an 3).

Lorsqu'une vente d'immeubles appartenant à l'Etat, en Algerie, a été faite aux enchères, cette vente, tant par application de l'art. 8 du décrei du 13 sept. 1904, qui donne au gouverneur général le droit, pen

(1-2-3) L'arrêt ci-dessus présente une réelle importance, aussi bien pour la détermination des pouvoirs du gouverneur général de l'Algérie, en matière de ventes de terres domaniales en vue de la colonisation, qu'en ce qui concerne la compétence des tribunaux civils pour statuer sur les contestations qui peuvent s'élever sur la validité de ces ventes; il se fonde sur des motifs dont quelques-uns sont critiquables, et il importe, en conséquence, de bien préciser ce que la Cour de cassation a décidé, et les objections que soulèvent les solutions de son arrêt.

Les aliénations des terres domaniales affectées à la colonisation en Algérie sont actuellement réglementées par le décret du 13 sept. 1904 (Bull. off, 2579, n. 45143; Pand. pér., 1905.3.33), V. Larcher, Tr. élém, de législ. algér., 2e éd., t. 3, n. 1045 et s.; et notre Rép. gen. du dr. fr., Suppl., po Algérie, n. 2123 et s.

Les ventes de ces terres se font, soit à bureau ouvert, à des prix déterminés à l'avance par l'Administration des domaines (Décr. 13 sept. 1904, art. 6), soit aux enchères, par voie d'adjudication, dans le cas où deux ou plusieurs concorrents se présentent pour le même lot offert à prix fixe, ou dans le cas où l'Administration a opté dès l'origine pour la vente aux enchères (même décret, art. 3 et 6); ce n'est qu'exceptionnellement que les ventes peuvent avoir lieu de gré å gré (Décr. 13 sept. 1904, art. 3). La vente à prix fixe ou aux enchères est, aux termes de l'art. 8 du décret, soumise à l'approbation du gouverneur général » ; mais ce même article précise les conditions dans lesquelles peut s'exercer le pouvoir du gouverneur général : « La décision du gouverneur général doit intervenir dans le délai de deux mois à dater de la signature de la vente ou du procès-verbal d'adjudication. Passé ce délai, l'acquéreur entre en possession, et la vente produit son plein et entier effet. L'approbation ne peut être refusée que pour vice de forme ou violation des dispositions de l'art. 4 », aux termes duquel ; « Ne peuvent être admis comme acquéreurs, soit à titre onéreux, soit à titre gratuit, que les Français d'origine européenne et les Européens naturalisés jouissant de leurs droits civils, et qui n'ont jamais été acquéreurs, concessionnaires ou cessionnaires, à quelque titre que ce soit, de terres de colonisation, sous réserve de l'exception prévue à l'art. 11 (relatif aux concesbions gratuites). Préalablement à l'adjudication, à la signature de la vente où à la concession, le soumissionnaire, l'acquéreur ou le demandeur en concession doit signer une déclaration portant qu'il remplit les conditions ci-dessus. Aucune personne ne peut d'ailleurs acquérir deux lots dans

ANNÉE 1913. 6e cah.

une même vente à prix fixe ou aux enchères ».

C'est sur le dernier paragraphe de l'art. 8 que s'est élevée la difficulté sur laquelle le tribunal de Sétif, la Cour d'Alger et enfin la chambre des requêtes ont eu successivement à se prononcer.

Une adjudication de terres domaniales ayant eu lieu en Algérie, en application du décret de 1904, et en exécution d'un arrêté du gouverneur général du 8 déc. 1905, qui fixait les dates d'adjudication, et déterminait les clauses et conditions des ventes, en spécifiant, dans son art. 15, que,

lorsque l'approbation du gouverneur général est refusée, la vente doit être considérée comme nulle et non avenue », il avait été révélé que l'adjudicataire s'était livré à des manæuvres coupables portant atteinte à la liberté des enchères, et qui ont d'ailleurs entraîné contre lui des poursuites suivies de condamnation (C. pen., 412). Se fondant sur ce motif, le gouverneur général avait, dans le délai de deux mois, à lui imparti par l'art. du décret du 13 sept. 1904, refusé son approbation, et les représentants de l'Etat avaient actionné l'acquéreur en délaissement.

Si la demande en nullité avait été basée sur le dol au moyen duquel l'adjudicataire avait écarté ses concurrents, il n'aurait pu faire doute que l'autorité judiciaire, saisie de la demande en nullité, eût en pleine et entière compétence pour statuer. Il est, en effet, de jurisprudence aujourd'hui constante qu'en Algérie, les tribunaux civils sont compétents pour connaître du contentieux des domaines nationaux. V. Trib. des conflits, 20 juill. 1889, Jumel de Noireterre (S. 1891.3.87. – P.chr.); Cass. 4 août 1891 (S. et P. 1892.1.385, et la note de M. Tissier; Pand. pér., 1892.1.49). V. égal., comme application, Cass. 5 mai 1897 (S. et P. 1901.1.491); 21 déc. 1903 (8. et P. 1908.1.211; Pand. per., 1908.1.211), et le renvoi. C'est qu'en effet, comme l'a dit l'arrêt de Cass. 4 août 1891, précité, l'Etat, aliénant, par une convention de droit civil, une partie de son domaine, ne fait pas acte d'autorité, mais concourt à un contrat formé par l'accord de, deux volontés, et qui n'a pas le caractère d'un acte administratif.

Mais tel n'était pas le fondement de la demande en délaissement; elle s'appuyait uniquement sur le refus d'approbation de l'adjudication par le gonverneur général, refus d'approbation dont l'acquérear contestait la légalité, parce qu'il aurait été pris en dehors des cas où le décret du 13 sept. 1904 autorise le gouverneur général å refuser son approbation. Ce qui était ainsi en cause, c'était, non pas la validité de la vente elle-même, question rentrant dans la compétence des tribunaux civils, mais la légalité du refus d'approbation, et le point de savoir si cet acte n'était pas entaché d'excès

de pouvoirs, car l'autorité judiciaire ne pouvait admettre ou rejeter la demande en délaissement sans se prononcer sur le point de savoir si le gouverneur général était ou non, en refusant son approbation, demeuré dans la limite de ses pouvoirs. Il semble bien qu'il y avait là une question préjudicielle, qui devait être au préalable soumise à l'autorité administrative, juge de l'excès de pouvoirs, l'autorité judiciaire ne pouvant accueillir la demande en délaissement que si, sur le sursis par elle prononcé, l'autorité administrative avait décidé, comme l'a fait d'ailleurs, dans la présente affaire, le Conseil d'Etat, sur le sursis ordonné par le tribunal de Sétif, en reconnaissant que le motif allégué par le gouverneur général était bien un vice de forme, au sens de l'art. 8 du décret du 13 sept. 1904 (V. Cons. d'Etat, 25 nov. 1910, Deverdun, infra, 3° part., p. 53, et la note. V. сер., Larcher, Tr. de lėgisl, algér., 2° éd., t. 3, n. 1054, p. 443, et Rev, algér., 1911, p. 101 et 231-232), que le refus d'approbation n'était pas entaché d'excès de pouvoirs. V. sur l'obligation pour l'autorité judiciaire, saisie d'une question de propriété, de surgeoir, lorsqu'une question préjudicielle s'éléve, Boit sur la régularité, soit sur l'interprétation d'un acte administratif, Trib, des conflits, 25 févr. 1888, Comm. de La Seyne (S. 1890.3.15. P. chr.); Cass. 15 juin 1892 (S. et P. 1893.1,16); 17 déc. 1895 (S. et P. 1897.1.492); 11 janv. 1898 (S. et P. 1902.1.38), et les renvois.

La Cour d'Alger, d'abord, et, à sa suite, la chambre des requêtes, ont cependant décidé que l'autorité judiciaire avait compétence pour admettre de plano la demande en délaissement formée par l'Etat, sans avoir à se préoccuper des motifs du refus d'approbation et de leur légalité, et sans avoir par conséquent å surgeoir.

La Cour d'Alger et la chambre des requêtes en donnent pour motif que la vente, faute d'approbation du gouverneur général, représentant l'Etat vendeur, était inexistante, pour défaut de consentement de l'une des parties; c'était là une conséquence nécessaire du refus d'approbation, parce que l'arrêté du gouverneur, qui avait prescrit la mise en vente des terrains à aliéner, et qui avait déterminé les clauses et conditions de la vente, disposait expressément que, « lorsque l'approbation est refusée, la vente doit être considérée comme nulle et non avenue », en telle sorte que la Cour d'appel, après constatation du défaut de consentement du gouverneur général, résultant du refus d'approbation, n'avait fait que déduire la conséquence de cette constatation, en proclamant l'inexistence de la vente, sans avoir å surseoir jusqu'à décision de l'autorité administrative sur la légalité de l'arrêté de refus d'approbation, dont

[** PART. 10

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