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adopte les motifs du jugement et le confirme, décide, par là même, implicitement, que l'inexactitude relevée reste indifférente au proces et n'influe en rien sur sa solution; il satisfait ainsi aux prescriptions de l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810 (1) (L. 20 avril 1810, art. 7).

Spécialement, lorsqu'un mari demande l'infirmation d'un jugement qui a validé une saisie-arrêt faite par la femme sur le traitement du mari pour avoir paiement d'une pension alimentaire, sur ce motif que la femme, dans la procédure, a pris la qualité de femme séparée de corps, au lieu de celle de femme divorcée, qu'elle avait réellement, l'arrêt, qui adopte les motifs du jugement et le confirme, décide par là même implicitement que, pour déterminer la quotité de la pension alimentaire et les moyens de la recouvrer, il est sans intérêt de distinguer suivant que la femme avait obtenu la separation de corps ou le divorce; et il répond ainsi aux conclusions de l'appelant (2) (ld.).

2o La limitation apportée par l'art. 580, C. proc., et la loi du 21 vent, an 9 au droit de saisir-arrêter les traitements dus par l'Etat, a pour objet, non seulement d'assurer la marche régulière des services publics, mais aussi de permettre aux fonctionnaires de pourvoir à leurs besoins et à ceux de leur famille (3) (L. 21 vent. an 9; C. proc., 580).

En effet, du principe que les provisions alimentaires peuvent être saisies (C. proc., 582), et de celle autre règle que, malgré la réduction au dixième de la portion saisissable des traitements ne dépassant pas 2.000 fr., ces traitements peuvent être saisis pour le paiement des dettes alimentaires (C. trav., liv. ler, art. 61 et 63), il résulte, à plus forte raison, que les traitements qui excedent 2.000 fr., et qui permettent aux fonctionnaires de disposer de ressources plus amples pour faire face aux obligations alimentaires dont ils sont tenus, sont susceptibles d'être saisis, même pour la portion non déclarée saisissable (4) (C. proc., 582; C. trav., tit. 1er, art. 61 et 63).

En conséquence, la femme d'un fonction

(1-2) Application du principe que des motifs implicites suffisent à justifier le rejet d'un chef de conclusions. V. Cass. 8 mars 1905 (S. et P. 1905. 1.517); 2 févr. 1910 (S. et P. 1912.1.302; Pand. per., 1912.1.302); 22 janv. 1912 (S. et P. 1912.1. 141; Pand. pér., 1912.1.141), et les renvois.

(3-4-5) La chambre civile, en décidant que l'insaisissabilité partielle du traitement des fonctionnaires ne peut être opposée aux membres de la famille, créanciers d'aliments, donne son adhésion à la doctrine qui avait été déjà admise par la chambre des requêtes. V. Cass.-req. 27 avril 1911 (Supra, 1 part., p. 233), et la note de M. Tissier. Adde, Alger, 29 févr. 1912 (Infra, 2° part., p. 54), et les renvois.

Le principe admis, son application la pension alimentaire accordée à la femme au cours de l'instance en séparation de corps ou en divorce ne peut faire sérieuse difficulté. V. en ce sens, Cass. 27 avril 1911, précité, la note de M. Tissier et les renvois; Alger, 29 févr. 1912, précité, et les renvois. Mais, lorsqu'il s'agit d'une pension alimentaire allouée à la femme divorcée, en vertu de

naire, au profit de laquelle le divorce a été prononcé par conversion de séparation de corps, peut poursuivre, par voie de saisiearrêt, sur la portion du traitement de son mari soustraite à la mainmise des créanciers ordinaires et déclarée insaisissable, le recouvrement de la pension qui lui a été allouée par justice, lors de la séparation de corps, tant pour subvenir à ses besoins qu'à ceux de l'enfant dont elle a la garde, cette pension n'étant que la représentation des aliments que lui aurait dus son mari, si le mariage avait duré (5) (Id.).

(Vienne C. Dame Bernaud).

La séparation de corps a été prononcée entre les époux Vienne-Bernaud par jugement du tribunal civil d'Arras du 5 mars 1902, et convertie en divorce par jugement du même tribunal, en date du 2 août 1906. Cette dernière décision a maintenu à 1.800 fr. la pension alimentaire qui avait été allouée à Mme Bernaud par le jugement de séparation, tant pour elle que pour l'enfant né du mariage qui était confié à sa garde. Sur le refus par M. Vienne de payer cette pension, Mme Bernaud avait, le 30 août 1905, avant la conversion, fait pratiquer, entre les mains du trésorier-payeur de la Guyane, une saisie-arrêt sur l'intégralité du traitement de M. Vienne, vétérinaire sanitaire à Cayenne; cette saisiearrêt a été validée par jugement du tribunal civil de Cayenne du 14 mai 1907, qui a ordonné que Mme Bernaud toucherait, à valoir sur sa créance, la moitié du montant de la portion insaisissable du traitement de M. Vienne.

Appel par M. Vienne. Dans ses conclusions devant la Cour, il a soutenu que Mme Bernaud s'était à tort qualifiée d'épouse séparée de corps dans les actes de la procédure qui avaient précédé et suivi le jugement frappé d'appel; qu'étant donnés le caractère et les motifs du procès actuel, on était en droit de se demander si cette qualification d'épouse séparée de corps n'avait pas été prise exprès et dans un`but favorable à la dame Bernaud », et il a demandé à la Cour de dire que le jugement du 14 mai 1907 était nul en la

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l'art. 301, C. civ., la question est beaucoup plus délicate. Ne peut-on pas dire que, l'union conjugale étant dissoute par le divorce, la femme, qui ne fait plus partie de la famille, ne peut plus invoquer le droit que la jurisprudence reconnaît aux membres de la famille du fonctionnaire de saisir-arrêter, pour aliments à eux dus, la partie insaisissable du traitement du fonctionnaire? V. la note, in fine, sous Alger, 29 févr. 1912, précité. Peut-on écarter cette objection, en faisant valoir que la pension alimentaire, accordée en vertu de l'art. 301, C. civ., n'a pas seulement le caractère d'une indemnité allouée en réparation des torts de l'époux contre lequel le divorce a été prononcé, qu'elle a un caractère mixte, et qu'elle se lie très étroitement aux obligations qui naissent du mariage et au mariage lui-même (V. en ce sens, la note de M. Gaudemet sous Cass. 15 déc. 1909, S. et P. 1912.1,313; Pand. pér., 1912.1.313), en telle sorte que, même divorcée, la femme peut encore, à raison de la pension alimentaire que lui doit son mari, pour réparation des torts qu'il a eus vis-à-vis d'elle pendant le mariage, être considérée comme faisant

forme, et qu'il avait été mal jugé au fond; en conséquence, voir ordonner que ledit jugement serait annulé, ou en tout cas infirmé, et que le sieur Vienne serait libéré des condamnations prononcées contre lui, etc. ». 13 déc. 1907, arrêt de la Cour d'appel de la Guyane, conçu dans les termes suivants : « La Cour; Adoptant les motifs du premier juge; Considérant, aù surplus, que la portion insaisissable du traitement des fonctionnaires et employés est réservée pour leurs besoins et ceux de leur famille; que la pension accordée à une femme séparée de corps n'est que la représentation des aliments qui lui sont dus par son mari; qu'ainsi, en cas d'insuffisance de la portion saisissable, elle peut et doit même être prélevée sur la portion réservée par la loi pour les besoins communs; qu'il y a d'autant plus raison de décider ainsi qu'on doit (C. civ., 301), par analogie, tirer argument de l'art. 582, C. proc., qui permet de saisir-arrêter pour aliments ce que la loi déclare insaisissable pour toute autre créance; - Considé rant, en conséquence, qu'il y a lieu de confirmer en principe la décision du premier juge, et de valider la saisie-arrêt pratiquée par la dame Bernaud, en tant qu'elle devrait porter aussi bien sur la partie saisissable que sur la portion insaisissable du traitement de Vienne; qu'il échet aujourd'hui, d'après les circonstances actuelles, de déterminer les conditions dans lesquelles elle devra produire effet; - Considérant que, si le premier juge a eu raison de fixer à la moitié de la portion insaisissable le quantum à retenir pour satisfaire au paiement des arrérages arriérés de la pension alimentaire, il y a lieu, aujourd'hui que, par suite des retenues faites au Trésor, la plus grande partie de cet arriéré se trouve remboursé, de réduire ce quantum, dont l'application rigoureuse risquerait de porter à Vienne un préjudice; que la Cour, vu la situation des parties, croit pouvoir fixer ce quantum à 1.200 fr.; Par ces motifs; Confirme dans son principe le jugement entrepris; en conséquence, déclare valable la saisiearrêt du 30 août 1905; dit néanmoins que,

partie de la famille du mari, et saisir-arrêter, en cette qualité, le traitement de celui-ci ?

C'est cette dernière solution que paraît bien admettre l'arrêt ci-dessus, en déclarant que <la pension accordée à la femme au profit de laquelle le divorce a été prononcé n'est que la représentation des aliments que lui aurait dus son mari, si le mariage avait duré ». Mais, pour limiter la portée de l'arrêt à ce qu'il a jugé, il convient d'observer, d'une part, que la saisie-arrêt, bien que sa validité ait été reconnue par justice postérieurement au jugement de conversion qui avait maintenu la pension, avait été formée alors que la femme n'était pas encore divorcée; d'autre part, que la pension avait été allouée à la femme tant pour subvenir à ses besoins qu'à ceux de l'enfant commun; et, en tant que la pension était afférente à l'entretien de l'enfant, il ne pouvait faire doute, étant admis que les membres de la famille peuvent saisir-arrêter, pour aliments à eux dus, la partie insaisissable du traitement du fonctionnaire, que la saisie-arrêt frappait utilement la portion insaisissable du traitement.

pour l'avenir la dame Bernaud touchera directement du trésorier, par trimestre, à valoir sur sa pension, la somme annuelle de 1.200 fr. sur la portion insaisissable du traitement de son mari, sans préjudice de ses autres droits, tant pour la même créance alimentaire que pour ses reprises et accessoires et frais de procès, pour lesquels elle viendra concurremment avec d'autres créanciers, s'il y en a, sur la portion saisissable dudit traitement, et ce jusqu'à complète liquidation de l'arriére dû pour pension alimentaire, etc. ».

POURVOI en cassation par M. Vienne. 1er Moyen. Violation de l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810, de l'art. 61, C. proc., en ce que l'arrêt attaqué n'a pas répondu aux conclusions prises par l'exposant, à fin de déclaration de nullité de la procédure suivie au nom de Mme Bernaud en une qualité qui ne lui appartenait plus.

2e Moyen. Violation de l'art. 580, C. proc., en ce que l'arrêt attaqué a déclaré saisissable pour cause de pension alimentaire la portion de traitement déclarée insaisissable par la loi du 21 vent. an 9, sur le traitement des fonctionnaires publics.

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ARRÊT.

LA COUR; Sur le premier moyen du pourvoi: Attendu que, dans le dispositif de ses conclusions d'appel, Vienne a demandé à la Cour de dire que le jugement du 14 mai 1907 était nul en la forme », et que, dans les motifs de ces mêmes conclusions, il a fait résulter cette nullité de ce que, dans tous les actes de la procédure qui avaient précédé et suivi ledit jugement, la dame Bernaud avait pris la qualité de femme séparée de corps, au lieu de celle de femme divorcée, qui lui était définitivement attribuée par un jugement du tribunal civil d'Arras du 2 août 1906; mais qu'il expliquait que cette nullité était invoquée, parce qu'« étant donné le caractère et les motifs du procès..., on était en droit de se demander si cette qualification d'épouse séparée de corps n'avait pas été prise exprès et dans un but favorable à la dame Bernaud »; qu'il ajoutait que premier juge n'avait pas fait et n'avait pu faire une juste appréciation des droits des parties litigantes, leurs véritables qualités respectives lui étant restées inconnues par la faute volontaire ou involontaire de Mme Bernaud » ; Attendu que ces motifs confondaient indivisiblement, dans un seul et même grief, les deux questions concernant la qualité inexacte prise par l'une des parties et l'appréciation du litige quant au fond, à raison de l'influence que la première aurait pu exercer sur la solution de la seconde; que, dans ces circonstances, en adoptant les motifs des

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(1-2) La Cour de cassation a déjà à plusieurs reprises affirmé le principe que c'est la nature de l'entreprise dans laquelle est employé un ouvrier (V. Cass. 9 déc. 1908, S. et P. 1912.1.28; Pand. pér., 1912.1.28; 29 déc. 1908, S. et P. 1910.1.208; Pand. pér., 1910.1.208; 20 mars 1912, S. et P. 1912. 1.399; Pand. pér., 1912.1.399), et non la nature du travail exécuté par l'ouvrier (V. Cass. 9 déc. et

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premiers juges, et en confirmant leur décision, l'arrêt attaqué a, par là même, décidé que, pour déterminer la quotité de la pension alimentaire et les moyens de la recouvrer, il était sans intérêt de distinguer suivant que la femme avait obtenu la séparation de corps ou le divorce; qu'il a ainsi répondu implicitement aux conclusions du sieur Vienne, et satisfait aux prescriptions de l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810; Sur le second moyen : Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que la dame Bernaud a, par exploit du 30 août 1905, fait pratiquer une saisie-arrêt sur l'intégralité du traitement du sieur Vienne, vétérinaire sanitaire à Cayenne, pour avoir paiement de la pension alimentaire qui lui avait été allouée, tant pour elle-même que pour son enfant mineur, confié à sa garde, par jugement du tribunal civil d'Arras, en date du 2 août 1906; que cette saisie a été validée quant aux effets qu'elle avait produits jusqu'au jour où il a été statué par ledit arrêt, et qu'en outre, la dame Bernaud a été autorisée à toucher directement du trésorier-payeur, à valoir sur sa pension, la somme annuelle de 1.200 fr., sur la portion insaisissable du traitement du sieur Vienne; Attendu qu'en le décidant ainsi, la Cour d'appel de la Guyane n'a violé aucun principe de droit;

Attendu, en effet, que la limitation apportée par l'art. 580, C. proc., et la loi du 21 vent. an 9 au droit de saisir-arrêter les traitements dus par l'Etat a pour objet, non seulement d'assurer la marche régulière des services publics, mais aussi de permettre aux fonctionnaires de pourvoir à leurs besoins et à ceux de leur famille; que, d'une part, la loi impose au père l'obligation de nourrir, d'entretenir et d'élever ses enfants; que, d'autre part, la pension accordée à la femme, au profit de laquelle le divorce a été prononcé, n'est que la représentation des aliments que lui aurait dus son mari, si le mariage avait duré; qu'ainsi, l'exécution de ces obligations peut être poursuivie sur la portion du traitement du fonctionnaire soustraite à la mainmise des créanciers ordinaires, et déclarée insaisissable; Attendu que la preuve de cette faculté résulte, en outre, tant de l'art. 582, C. proc., qui permet de saisir, pour cause d'aliments, même les provisions alimentaires, que des art. 61 et 63, C. trav., qui, tout en réduisant à un dixième la portion saisissable des traitements ne dépassant pas 2.000 fr., exceptent de cette restriction les saisies faites pour le paiement des dettes alimentaires prévues par les art. 203, 205, 206, 207, 214 et 349, C. civ.; qu'à plus forte raison, il convient de décider de même à l'égard des fonctionnaires dont le traitement excède

29 déc. 1908, précités), qui détermine l'assujettissement à la loi du 9 avril 1898.

La chambre civile en conclut logiquement, dans l'espèce ci-dessus, qu'un ouvrier, occupé à la cueillette de fruits, travail essentiellement agricole, peut se réclamer de la loi de 1898, s'il est employé à ce travail par un marchand de fruits, assujetti, en qualité de commerçant, au risque pro

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CASS.-CIV. 11 mars 1913.

OUVRIER, ACCIDENTS DU TRAVAIL, RESPONSABILITÉ, TRAVAUX AGRICOLES, CUEILLETTE DE FRUITS, MARCHAND DE FRUITS, LOI DU 12 AVRIL 1906 (Rép., v Responsabilité civile, n. 1507 et s.; Pand. Rép., Suppl., vỡ Travail, n. 447 et s.).

L'assujettissement à la loi du 9 avril 1898 dérive, non de l'occupation de l'ouvrier ou employé, mais bien de la profession du patron (1) (LL. 9 avril 1898, art. ler).

Dès lors, lorsqu'un ouvrier, employé par un marchand de fruits à la cueillette des fruits achetés par celui-ci pour les besoins de son commerce, a été victime d'un accident, doit être cassé l'arrêt qui le déclare irrecevable à invoquer contre son patron le bénéfice de cette loi, par ce motif que le fait de cueillir des fruits ne constituerait pas un acte de commerce (2) (LL. 9 avril 1898, art. 1er; 12 avril 1906).

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(Corbisiez C. Hameaux). ARRÊT (apr. délib. en ch. du cons.). LA COUR; Vu l'art. 1er de la loi du 9 avril 1898; Attendu que l'assujettissement à la loi du 9 avril 1898 dérive, non de l'occupation de l'ouvrier ou employé, mais bien de la profession du patron; Attendu, d'autre part, qu'aux termes de l'art. 1er de la loi du 12 avril 1906, la législation sur les responsabilités des accidents du travail a été étendue à toutes les entreprises commerciales; Attendu que l'arrêt attaqué constate que Jules Corbisiez, employé par Hameaux à cueillir des fruits achetés par ce dernier pour les besoins de son commerce de marchand de fruits, a été, le 7 oct. 1909, victime d'un accident du travail; qu'il le déclare irrecevable à invoquer contre son patron le bénéfice de la loi du 9 avril 1898, par ce motif que le fait de cueillir des fruits ne constituerait pas un acte de commerce; qu'en statuant ainsi, sans tenir compte du commerce de Hameaux, l'arrêt attaqué a violé l'article susvisé; Casse l'arrêt rendu le 1er févr. 1911 par la Cour de Douai, etc.

Du 11 mars 1913. - Ch. civ. - MM. Baudouin, 1er prés.; Reynaud, rapp.; Lombard, av. gén. (concl. contr.); Coutard et Retouret, av.

fessionnel, en vertu de la loi du 12 avril 1906. On peut toutefois se demander si cette solution est en parfaite harmonie avec la jurisprudence qui refuse le bénéfice de la loi de 1898 à l'ouvrier employé dans une exploitation forestière par un marchand de bois, dans l'intérêt de son commerce. V. Cass. 20 mars 1912 (3 arrêts) (S. et P. 1912.1.279; Pand. pér., 1912.1.279), la note et les renvois.

CASS.-civ. 7 mai 1913. RETRAITES OUVRIÈRES ET PAYSANNES, ASSURÉS FACULTATIFS, ART MÉCANIQUE, Métier MANUEL, RESSOURCES PRINCIPALES, PROFESSEUR DE MUSIQUE OU DE DANse, Petit PATRON, SALARIÉ, ASSURÉS OBLIGATOIRES (Rép., vo Retraites ouvrières, n. 1 et s.; Pand. Rép., vo Retraites et pensions, n. 1654 et s.):

L'artisan, que l'art. 36 de la loi du 5 avril 1910, sur les retraites ouvrières et paysannes, modifiée par la loi du 27 févr. 1912, admet au bénéfice de l'assurance fa

(1 à 4) Par cet arrêt, la Cour de cassation s'est nettement réservé son contrôle en ce qui concerne la qualification d'artisan, attribuée, dans chaque espèce, par les juges du fond aux intéressés qui demandent, à ce titre, à être inscrits sur la liste des assurés facultatifs, appelés, en vertu de l'art. 36, § 1er, de la loi du 5 avril 1910, sur les retraites ouvrières et paysannes (S. et P. Lois annotées de 1911, p. 1; Pand. pér., Lois annotées de 1911, p. 1), à bénéficier des dispositions de cette loi. Il aurait encore moins d'hésitation relativement à l'exercice du même contrôle, s'il s'agissait de fermiers et de métayers, qui sont également visés par le même texte de loi. Des dispositions précises de nos Codes nous renseignent amplement sur ces deux dernières catégories de personnes, à qui doivent être restitués leur véritable caractère et leur qualification propre lorsqu'ils ont été méconnus par une inexacte appréciation en droit.

Il n'en est plus de même, au contraire, des cultivateurs et petits patrons, également dénommés dans le § 1er de l'art. 36, précité. Ces expressions relèvent plutôt du langage usuel que de la terminologie juridique. Aussi a-t-il été décidé avec juste raison que, quant à ces catégories d'intéressés, dont l'état n'est défini par aucun texte, les décisions qui interviennent n'engageant nul principe de droit, ne constituent que des décisions d'espèce. Les juges du fond se prononcent donc en toute souveraineté sur le point de savoir si un demandeur en inscription, au titre d'assuré facultatif, est ou non un cultivateur, est ou non un petit patron. V. conf., en ce qui concerne les cultivateurs, Cass. 26 juin, 11 et 13 nov. 1912 (S. et P. 1912.1.553; Pand. pér., 1912.1.553); et en ce qui concerne les petits patrons, Cass. 13 mars 1912 (S. P. 1912.1.325; Pand. pér., 1912.1.325).

L'arrêt de la Cour de cassation, que nous rapportons ci-dessus, consacre le système antérieurement exposé et développé dans nos observations sous les arrêts précités des 26 juin, 11 et 13 nov.

1912.

Cette démarcation des pouvoirs de contrôle de la Cour de cassation ainsi nettement établie, la définition qui a été donnée de l'artisan nous paraît rigoureusement exacte dans sa généralité. L'artisan est essentiellement un homme de métier, tels le charpentier, le serrurier, le forgeron, etc. V. la note précitée de M. Ruben de Couder (1re col.), et les renvois. Ce n'est pas à dire que, dans l'application et suivant la complexité de certaines espèces, des difficultés ne se présenteront pas. A chaque jour suffit sa peine. Le principe une fois posé, il est toujours plus aisé d'en déduire les conséquences. Dans l'affaire actuelle, l'hésitation n'était pas permise. Un maître de danse, un professeur de musique, relèvent plutôt des professions libérales, qui sont restées en dehors des prévisions de la loi du 5 avril 1910, lorsqu'elles ANNÉE 1913. - 6e cah.

cultative, est celui qui exerce un art mécanique ou un métier manuel (1) (LL. 5 avril 1910, art. 36, § ler; 27 févr. 1912).

En conséquence, n'est pas un artisan, au sens dudit article, l'individu qui tire ses principales ressources des leçons de musique el de danse qu'il donne aux personnes qui s'adressent à lui (2) (Id.).

Le maitre de danse où le professeur de musique, qui, au lieu d'exercer sa profession comme patron indépendant, l'exerce sous la direction et au compte d'autrui, moyennant un salaire ou un traitement convenu, rentre-t-il dans la catégorie des

s'exercent d'une façon indépendante (V. Cass. 27 févr. 1912, motifs, S. et P. 1912.1.334; Pand. pér., 1912.1.334; Sachet, Tr. de la législ. des retraites ouvrières et paysannes, n. 168; Pothémont, La législ. des retraites ouvrières, n. 260, p. 150; Salaün, Les retraites ouvrières et paysannes, 2o éd., n. 1, p. 60, texte et note 1, n. 8, p. 70 et s., et n. 337, p. 476, note 1), et l'on ne voit pas les points de contact qui pourraient les faire assimiler à ceux qui pratiquent un métier manuel ou un art mécanique.

De ce rapprochement avec les personnes qui exercent des professions libérales, le jugement attaqué avait tiré cette conséquence absolument exacte que, si le maître de danse ou le professeur de musique, au lieu d'agir avec la pleine indépen dance d'un patron vis-à-vis des élèves qui s'adressent à lui pour avoir des leçons, ne se comportait que comme un agent subordonné à une direction, procédant pour le compte d'autrui, moyennant une rétribution convenue, il devrait, en tant que salarié des professions libérales, être compris dans la catégorie des assurés obligatoires, définis par l'art. 1er de la loi du 5 avril 1910. Mais, s'il en est ainsi, c'est que la loi s'en explique expressément. Les assurés obligatoires comprennent les salariés, sans distinction entre les carrières de l'industrie, du commerce, de l'agriculture et les professions libérales (V. en ce sens, S. et P., Lois annotées de 1911, p. 15, note 2, III, 18°; Pand. pér., Lois annotées de 1911, p. 15, note 2, III, 13°; Sachet, op. cit., n. 168), tous ceux qui sont attachés à un patron par un lien de subordination, qui se trouvent sous une dépendance, sous une direction, qui reçoivent des ordres à exécuter, dont le temps est acquis au prix d'une rémunération fixée à l'avance et pour un travail déterminé. V. Cass., 6 août 1912, aff. Préfet des Deux-Sèvres C. D Aoustin (qui sera publié ultérieurement). Au contraire, l'art. 36 de la loi du 5 avril 1910, non modifié sur ce point par la loi du 27 févr. 1912 (S. et P. Lois annotées de 1913, p. 379; Pand. pér., Lois annotées de 1918, p. 379), s'applique à des catégories de personnes qu'il énumère limitativement, aux fermiers, métayers, cultivateurs, artisans et petits patrons, qui travaillent seuls ou avec un seul ouvrier, et avec des membres de leur famille, salariés ou non, ainsi qu'aux femmes et veuves non salariées des assurés obligatoires ou facultatifs et aux salariés dont le salaire annuel est supérieur à 3.000 fr., mais ne dépasse pas 5.000 fr. Quiconque ne rentre pas dans cette énumération ne peut être admis à réclamer son inscription sur la liste de la commune au titre d'assuré facultatif. Or, le maître de danse ou le professeur de musique, lorsqu'il ne relève que de lui-même, peut bien, comme tout autre travailleur, tirer de ses talents les principales ou même les seules ressources de son existence, mais son travail ne se rattache ni à l'industrie, ni au

salariés de l'industrie, du commerce ou des professions libérales, et doit-il, comme tel, être inscrit sur la liste des assurés obligatoires, en vertu de l'art. 1er de la loi du 5 avril 1910 (3) (L. 5 avril 1910, art. 1er)? Rés. affirm. par le Trib.

Le professeur de danse et de musique pourrait-il se prévaloir, pour réclamer son inscription sur la liste des assurés facultatifs, de la qualité de petit patron, à raison du profit pecuniaire par lui retiré de l'exercice de sa double profession (4) (LL. 5 avril 1910, art. 36, § 1er; 27 févr. 1912)? — V. la note.

commerce, ni à l'agriculture; il ne le classe donc pas dans la catégorie des bénéficiaires appartenant ces professions. Faisons encore cette remarque que l'art. 36, à la différence de l'art. 1or, ne s'occupe pas des professions libérales (V. la note de M. Sachet sous Cass. 13 mars 1912, précité), et que leur exercice ne donne pas accès à l'assurance facultative, ainsi qu'il le procure, pour l'assurance obligatoire, en ce qui concerne les salariés.

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Mais le maître de danse ou le professeur de musique serait-il autorisé, à raison du profit pécuniaire que lui procure l'exercice de sa profession, à se prévaloir de la qualité de petit patron »? Nous ne le pensons pas. L'expression petit patron » a un sens spécial; elle sert à désigner, dans l'industrie, mais surtout dans le commerce, celui qui travaille habituellement seul où avec un ouvrier ou employé. Il est vrai que, parfois, le mot patron est usité, même dans les professions libérales, pour qualifier celui sous la direction duquel on est occupé ; il marque alors plutôt un lien de collaboration, de respectueuse déférence, qu'un lien de dépendance proprement dite, résultant d'un contrat de louage ordinaire de services. Mais jamais, en pareil cas, en aucune circonstance, et si peu relevée que se présente la profession, il ne serait permis d'employer, pour définir de tels rapports, les mots « petits patrons ; c'est le patron seul qui existe, et l'appellation de petits patrons constituerait une inconvenance qui ne serait jamais tolérée. D'ailleurs, dans cet ordre d'idées, on n'est patron que lorsqu'on l'est au regard de quelqu'un; on ne peut être à soi-même son propre patron. Ainsi donc, le petit patron n'existe, en réalité, que dans l'industrie, ou plutôt dans le commerce, et jamais dans les carrières libérales.

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Mais qu'adviendrait-il, si, après avoir constaté, comme dans l'espèce actuelle, la nature de la profession, avec un caractère tel qu'il en résulterait avec évidence l'impossibilité absolue pour l'intéressé de figurer dans la catégorie des personnes mentionnées dans l'énumération de l'art. 36, les juges du fond, afin d'étendre à cet intéressé le bénéfice de l'assurance facultative, lui attribuaient la qualification de petit patron»? La Cour de cassation se trouverait-elle désarmée, ou pourrait-elle rentrer dans l'exercice de son droit de contrôle? Nous n'hésitons pas à adopter ce dernier parti; car, si étendu que soit, en pareille matière, le pouvoir souverain des tribunaux, ils ne peuvent tirer des faits qu'ils relèvent des conséquences juridiques qui dépassent la portée de leurs constatations. Que, dans l'industrie ou le commerce, ils puissent ranger tels ou tels travailleurs dans la catégorie des petits patrons, il n'y a qu'à s'incliner, en l'absence de critérium absolu, et à leur laisser toute latitude afin de décider, suivant les cas particuliers, d'après les résultats de leurs investigations. La Cour de cassation sortirait maniI PART. 11

(Préfet d'Ille-et-Vilaine C. Métivier).

8 mars 1912, jugement du tribunal civil de Saint-Malo, ainsi conçu : • Le Tribunal: Attendu que Métivier, prétendant, à raison du métier de professeur de danse et de musique qu'il exerce à Dinard, devoir être rangé parmi les artisans, a requis son inscription sur la liste communale des bénéficiaires facultatifs de l'assurance sur la vieillesse, et a vu sa demande rejetée; que, sur ce refus, il a, conformément à la loi, saisi de sa demande M. le juge de paix de Dinard, lequel, par décision du 21 févr. 1913, a rejeté également sa demande, par ce motif que le réclamant exerçait une profession libérale; qu'appel de cette décision a été interjeté devant le tribunal civil; qu'il échet pour le tribunal d'apprécier sí le travail auquel se livre habituellement Métivier permet de le considérer, soit comme artisan, soit comme petit patron; - Attendu que l'artisan est par définition celui qui exerce un métier; que Métivier, qui dit tirer ses principales ressources des leçons de danse et de musique qu'il donne aux personnes qui s'adressent à lui, est un véritable artisan, dans le sens large et général de ce terme; que sa situation ne diffère guère de celle d'un maitre ou professeur de gymnastique, d'escrime, de sport quelconque; que si, au lieu d'exercer sa profession comme patron indépendant, il Texerçait commer salarié, sous la direction et au compte d'autrui, il aurait incontestablement le droit de requérir son inscription sur la liste des assurés de la première catégorie (salariés de l'industrie, du commerce, des professions libérales); que le fait d'exercer sa profession indépendamment de tout patron ne saurait changer la nature de son travail et le placer, sous le rapport de l'assurance, dans une situation moins fa

festement de ses attributions, et empiéterait sur le terrain du fait, qui n'est pas le sien, si elle se laissait entraîner à apprécier elle-même la situation sociale, ainsi que la nature, le chiffre et l'importance des affaires de l'intéressé, pour décider s'il est ou non un petit patron, dans le sens de l'art. 36, § 1er. Loin de grandir en prestige, elle perdrait, au contraire, de son autorité, et ne ferait que s'amoindrir, si elle s'arrêtait aux contingences, aux infinies variétés des espèces. Mais, d'un autre côté, elle a pour mission supérieure de veiller à ce que les lois soient rigoureusement observées et de casser les décisions judiciaires qui en constitueraient des violations. Or, comme l'a déjà fait observer M. Sachet, dans sa note sous Cass. 13 mars 1912, ci-dessus mentionné, le domaine de l'assurance obligatoire et le domaine de l'assuranee facultative sont complètement distincts l'un régi par l'art. 1er de la loi du 5 avril 1910, l'autre par l'art. 36 de la même loi, modifiée par celle du 27 févr. 1912; le premier de ces textes concédant le bénéfice de l'assurance obligatoire aux salariés des professione libérales, le second ne comprenant plus, à aucun titre, ceux qui exercent des professions libérales dans les catégories d'assurés facultatifs qu'il énumère limitativement. Il ne saurait donc dépendre des tribunaux de supprimer la démarcation bien nette qui sépare ces deux ordres d'assurés, et de les appeler, au moyen de qualifications purement

:

vorable, et le priver des avantages qu'elle doit procurer aux travailleurs; que le législateur, en organisant le régime de l'assurance, a eu pour but de stimuler l'épargne et la prévoyance, en assurant aux travailleurs n'ayant que des ressources restreintes une retraite pour leur vieillesse :

Par ces motifs; Dit et ordonne que Métivier sera inscrit sur la liste des assurés facultatifs ».

POURVOI en cassation par le préfet d'Illeet-Vilaine, pour violation de l'art. 36 de la loi du 5 avril 1910, modifiée par la loi du 27 févr. 1912. Si, a dit le préfet, dans son mémoire à l'appui du pourvoi, le législateur, en organisant le régime de l'assurance en vue de la retraite ouvrière, a eu pour but de stimuler l'épargne et la prévoyance, en assurant aux travailleurs n'ayant que des ressources restreintes une retraite pour la vieillesse, ce même législateur, d'autre part, s'est soigneusement attaché à déterminer, en les précisant autant que possible, les conditions auxquelles il entendait subordonner l'accession à l'assurance par lui ainsi instituée. En effet, d'après l'art. 36, ler, de la loi sur les retraites ouvrières et paysannes, sont admis à se constituer facultativement une retraite de vieillesse les petits producteurs, soit de l'agriculture (fermiers, métayers, cultivateurs), soit de l'industrie (artisans), soit enfin du commerce (petits patrons). De cette classification rigoureusement limitative sont nécessairement et ont été intentionnellement exclus par le législateur tous les titulaires indistinctement des professions dites libérales, tels que les professeurs de musique, de danse et des autres arts libéraux ou d'agrément, exigeant surtout l'action de l'intelligence, soit que les intéressés donnent leurs leçons au domicile de leurs

arbitraires, à bénéficier indistinctement de l'une ou de l'autre assurance. Prenons des exemples. Voici un travailleur indépendant; sa situation, il est vrai, n'est guère supérieure à celle des salariés de l'industrie et du commerce; cependant, comme il n'est pas attaché spécialement à une maison ou à un patron dont il reçoive les ordres pour l'exécution de son ouvrage, il n'est pas un salarié, au sens de l'art. 1o, mais bien un petit patron, selon la prévision de l'art. 36; la décision qui, sous prétexte qu'il touche de ses clients une rémunération qui l'assimilerait à un salarié, ordonnerait son inscription sur la liste des assurés obligatoires, encourrait à coup sûr la cassation. A l'inverse, c'est un médecin ou un avocat, qui exerce, soit seul, soit avec le concours d'un aide ou d'un secrétaire; les circonstances de fait sont constatées par le jugement et ne laissent aucun doute sur le caractère de la profession; un tel individu, ne relevant que de lui-même, sans lien de dépendance aucun avec autrui, ne rentre pas certainement dans la catégorie des salariés appelés au bénéfice de l'assurance obligatoire. V. en ce sens, Cass. 25 mars 1912, aff. Préfet du Loiret C. Poisson (qui sera publié ultérieurement), en ce qui concerne le clerc d'avoué, qui, d'après les constatations des juges du fond, exerce cette fonction, non dans le but de se procurer des moyens d'existence, mais uniquement en vue de se préparer à une profession libérale, alors que les modiques rémunérations qu'il peut

élèves, soit qu'ils joignent à l'exercice de leur art ou profession la direction d'un établissement. La décision du tribunal de Saint-Malo s'appuie principalement sur ce fait, que l'artisan, étant, par définition, celui qui exerce un métier, Métivier, qui dit tirer ses principales ressources des lecons de danse et de musique qu'il donne aux personnes qui s'adressent à lui, et dont la situation ne diffère guère de celle d'un maitre ou professeur de gymnastique, d'escrime, de sport quelconque, est un véritable artisan, dans le sens large et général de ce terme ». Mais, si l'artisan est bien, par définition, celui qui exerce un métier, ce mot artisan», par son étymologie même, sert à compléter la définition; il s'applique à l'homme exerçant un métier considéré comme art mécanique, et qui, à défaut d'emploi des machines, exige surtout le travail à la main. Tel n'est évidemment pas le cas de Métivier, qui, après s'être, au surplus, recommandé pour la première fois devant le juge d'appel de la qualité de professeur de danse, en même temps que de celle de professeur de musique, ne saurait, en tout cas, revendiquer davantage, à aucun de ces deux titres, la qualité de petit patron du commerce, nonobstant le profit pécuniaire par lui retiré de l'exercice de cette double profession.

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recevoir ont le caractère de simples gratifications; et Cass. 27 févr. 1912 (S. et P. 1912.1.334; Pand. pér., 1912.1.334), en ce qui concerne les greffiers près les tribunaux civils, qui ne sont pas liés en vers l'Etat par un contrat de travail qui les placerait directement sous ses ordres. Mais le juge du fond pourrait-il s'autoriser du peu d'importance de la clientèle, de la modicité des ressources de l'intéressé, pour, vu l'identité de sa situation avec celle d'un petit patron, le considérer comme tel, malgré la profession libérale qu'il exerce, et lui accorder son inscription sur la liste communale, au titre d'assuré facultatif? Ce ne seraient plus là des appréciations de fait, mais bien des violations formelles de la loi; les tolérer constituerait de la part de la Cour de cassation une abdication contraire au principe même de son institution. Aussi, pour ne pas permettre à l'arbitraire du juge de s'exercer sans contrôle, faut-il exiger, que, même en ce qui concerne les cultivateurs et petits patrons, les décisions soient sérieusement motivées, qu'elles mettent bien en relief, dans chaque espèce, les circonstances de nature à caractériser le métier ou la profession des réclamants, s'ils travaillent seuls ou avec des ouvriers et le nombre de ces derniers, s'ils sont sous la dépendance d'autrui ou s'ils sont leurs maitres. Faute des renseignements utiles, il y aurait lieu à un recours en cassation pour manque de base légale.

J. RUBEN De Couder.

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CASS.-REQ. 11 avril 1907.

SAISIE IMMOBILIÈRE, PEREMPTION, DEMANDE, QUALITÉ POUR AGIR (DÉFAUT DE), VENTE, PROPRIÉTÉ, RÉSOLUTION, TIERS ACQUÉREUR, CASSATION, EFFETS (Rép., vis Cassation [mat. civ.], n. 4984 et s., Saisie immobilière, n. 2192 et s.; Pand. Rép., vis Cassation civile, n. 1841 et s.), Saisie immobilière, n. 1029 et s.).

La déchéance édictée par l'art. 693, C. proc., à défaut d'adjudication dans les dix ans de la transcription de la saisie, ne peut être invoquée par celui qui ne justifie pas d'un intérêt à la faire prononcer (1) (C. proc., 693; L. 2 juin 1881).

Spécialement, la déchéance ne peut être invoquée par celui qui, au cours de la poursuite, a acquis l'immeuble saisi d'un parent du saisi, dont la demande en distraction avait été accueillie par arrêt de la Cour d'appel, si cet arrêt, frappé de pourvoi au moment de la vente, ayant été ensuite cassé, il a été reconnu par la Cour de renvoi, à l'encontre du vendeur, que la propriété appartenait bien au saisi (2) (C. civ., 1184; C. proc., 693; L. 2 juin 1881).

(Botokristo Ghoche C. Srimany et autres).

En 1892, les consorts Srimany avaient fait procéder à la saisie des immeubles de leur débiteur, M. Zoegopal Nondy. L'un des immeubles a été revendiqué par la bru du saisi, Mme Nistarinie Dachie, et cette demande a été accueillie par un jugement du tribunal civil de Chandernagor, confirmé par arrêt de la Cour de Pondichery du 19 juin 1894. Ultérieurement, et alors que

(1-2) C'est l'application à une hypothèse particulière du principe que, pour pouvoir agir en justice, il faut y avoir intérêt. V. sur ce principe, Garsonnet, Tr. de proc., 2e éd., par Cézar-Bru, t. 1, p. 496, § 296; Glasson, Précis de proc., 2° éd., par Tissier, t. 1, n. 229; et notre Rép. gén. du dr. fr., v° Action en justice, n. 64 et s. Dans l'espèce, le défaut d'intérêt du tiers détenteur, mis en cause dans la poursuite de saisie, à exciper de la disposition de l'art. 693, C. proc., modifié par la loi du 2 juin 1881, d'après lequel la saisie immobilière transcrite cesse de plein droit de produire effet, si, dans les dix ans de la transcription, il n'est pas inter

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cet arrêt était frappé de pourvoi, Mme Nistarinie Dachie a, le 6 sept. 1894, vendu l'immeuble litigieux à M. Botokristo Ghoche. L'arrêt de la Cour de Pondichery, du 19 juin 1894, ayant été cassé pour vice de forme, le 31 janv. 1899 (Bull. civ., n. 20), et la Cour de Pondichery, statuant comme Cour de renvoi, ayant décidé, par arrêt du 15 avril 1902, que l'immeuble vendu était la propriété du saisi, et ayant ordonné la continuation des poursuites de saisie, les poursuivants ont, par exploit du 4 juin 1903, mis en cause l'acquéreur, M. Botokristo Ghoche, qui a excipé de la déchéance de l'art. 693, C. proc., à défaut d'adjudication dans les dix ans de la transcription de la saisie. Mais ce moyen a été déclaré mal fondé par jugement du tribunal de Chandernagor du5 sept. 1903, confirmé par arrêt de la Cour de Pondichéry du 5 nov. 1904, motif pris de ce que M. Botokristo Ghoche était sans intérêt et sans qualité à le faire valoir.

POURVOI en cassation par M. Botokristo Ghoche. Moyen unique. Violation des art. 693, C. proc., 1350 et 1351, C. civ., et 7 de la loi du 20 avril 1810, pour contradiction de motifs, en ce que la Cour a rejeté une exception de déchéance de saisie, opposée, postérieurement à son acquisition, parl'acquéreur d'un immeuble compris dans la saisie, sous le prétexte que l'excipant, dépossédé de son droit sur l'immeuble, n'avait aucun intérêt à cette déchéance, alors qu'au contraire, la déchéance de la saisie, rendant inefficaces, à l'égard des poursuivants, toutes les décisions intervenues à son occasion, notamment celle qui avait réintégré l'immeuble dans la masse des biens saisis, assurait audit excipant le maintien de son droit de propriété, et lui donnait toute qualité pour formuler son exception.

ARRÊT.

LA COUR; Sur l'unique moyen du pourvoi : — Attendu qu'il est constant, en fait, que, le 6 sept. 1894, Botokristo Ghoche avait acquis de la dame Nistarinie Dachie, Vve Mohendronatte Nondy, une maison avec jardin, sise à Chandernagor; que ledit immeuble avait été compris, en 1892, dans une saisie immobilière pratiquée à la

arrêt entraîne de plein droit la nullité de tous les actes faits en vertu de la décision cassée. V. Cass. 11 janv. 1899 (S. et P. 1901.1.358; Pand, pér., 1899.1.184). Spécialement, la cassation d'un arrêt affirmant le droit de propriété d'une personne sur un immeuble, suivie d'un arrêt sur renvoi qui déclare inexistant le droit de propriété reconnu par l'arrêt cassé, a pour effet de frapper d'inefficacité les actes par lesquels, à la suite de l'arrêt cassé, la personne reconnue propriétaire par cet arrêt avait aliéné les immeubles dont la propriété lui avait été attribuée. V. en ce sens, pour la vente volontaire, Bordeaux, 14 août 1809 (S. et P. chr.); Cass. 26 juill. 1826 (S. et P. chr.); Orléans, 8 juin 1827 (S. et P. chr.); Garsonnet, op. cit., t. 6, p. 558, texte et note 10, § 2422; Crépon, Pourvoi en cassation, t. 3, n. 2076 et s.; Faye, La C. de cass., n. 269; notre C. proc. annoté, par Tissier, Darras et Louiche-Desfontaines, t. 2, p. 828 et 329, n. 1482; et notre Rép. gén, du dr. fr., v

requête des sieurs Srimany comme appartenant à leur débiteur Zoegopal Nondy, beau père de la dame Nistarinie Dachie, et que la question de propriété soulevée à cette occasion était pendante devant la Cour de cassation au moment de la vente effectuée par la dame Nistarinie Dachie à Botokristo Ghoche; Attendu qu'après cassation d'un premier arrêt de la Cour de Pondichery, et renvoi de l'affaire devant la même Cour autrement composée, ladite Cour a rendu, le 15 avril 1902, un nouvel arrêt, qui a définitivement attribué à Zoegopal Nondy, débiteur saisi, la propriété de l'immeuble précédemment vendu par la Vve Mohendronatte Nondy à Botokristo Ghoche, et a ordonné la continuation de la procédure d'adjudication; Attendu qu'assigné comme tiers détenteur de l'immeuble pour voir procéder à ladite adjudication, Botokristo Ghoche a excipé de la péremption, faute de renouvellement dans le délai légal de la transcription de la saisie dont l'immeuble litigieux avait été frappé, mais qu'il a été débouté de son opposition, comme étant sans droit ni qualité, par suite de la résolution de la vente qui lui avait été consentie; tendu que le pourvoi se fonde sur le même moyen pour prétendre que Botokristo Ghoche avait intérêt et qualité pour opposer une déchéance de saisie, qui devait avoir pour conséquence d'assurer le maintien de son droit de propriété; - Or, attendu que, par l'effet de la cassation du premier arrêt de la Cour de Pondichery et de l'attribution définitive par le deuxième arrêt de cette Cour de la propriété de l'immeuble litigieux au sicur Zoegopal Nondy, la vente, consentie à Botokristo Ghoche dans les conditions susénoncées, se trouvait annulée de plein droit; qu'en vendant l'immeuble dont s'agit pendant l'instance en cassation, la dame Nistarinie Dachie n'avait pu transmettre à son acquéreur que des droits subordonnés au sort de ladite instance; qu'il suit de là que l'arrêt attaqué, en déclarant non recevable, par les motifs de droit et de fait ci-dessus déduits, l'opposition du sieur Botokristo Ghoche, dans la circonstance, n'a violé aucune des dispositions légales visées par le pourvoi; Rejette, etc. Du 11 avril 1907. Ch. req. MM. Ta

At

Cassation (mat. civ.), n. 4984 et s.; Pand. Rep., ▾ Cassation civile, n. 1841 et s. V. égal., pour la vente judiciaire, Paris, 6 févr. 1836 (S. 1836. 2.129. - P. chr.); Cass. 8 janv. 1838 (S. 1838. 1.646. P. 1838.2.282); Crépon, op. cit., t. 3,

n. 2080 et s.; Faye, loc. cit.; notre C. proc. annoté, t. 2, p. 329, n. 1485; et notre Rép. gén. du dr. fr., verb. cit., n. 4989 et s.; Pand. Rep., loc. cit. Dans l'espèce, le titre à la propriété de l'immeuble saisi, que le vendeur tenait de l'arrêt cassé, se trouvant résolu par l'effet de la cassation, les droits qu'il avait transmis à son acquéreur étaient également résolus par voie de conséquence; et l'acquéreur était sans qualité, et par suite sans intérêt, pour invoquer la déchéance de l'art. 693, C. proc., puisque, cette déchéance prononcée et la saisie anéantie, il n'aurait pu faire valoir aucun droit sur l'immeuble qui lui avait été vendu.

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