Images de page
PDF
ePub
[blocks in formation]

LA COUR; Sur le moyen pris de la violation des art. 1er et 3 de la loi du 1er août 1905 et 7 de la loi du 20 avril 1810, en ce que l'arrêt attaqué a puni des peines prévues pour le délit de falsification un fait qui ne peut constituer qu'un autre délit : Vu l'art. 3 de la loi du 1er août 1905; Attendu que la loi du 1er août 1905, sur la répression des fraudes dans la vente des marchandises et des falsifications des denrées alimentaires et des produits agricoles, punit, dans son art. 3, ceux qui falsifieront des denrées servant à l'alimentation..., des boissons et des produits agricoles ou naturels destinés à être vendus, et les punit des peines portées en l'art. ler; Attendu que la falsification ainsi prévue consiste dans un fait dont les conséquences seraient éventuellement de nature à tromper l'acheteur; Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que Léger, garçon livreur au service d'une laiterie, a, en vie d'écarter la concurrence du garçon livreur d'une autre laiterie, introduit de la présure en poudre dans les pots de lait livrés par ce dernier à la dame Dangles, crémière, et que celle-ci a vendus dans l'ignorance de l'acte commis par Léger; que la substance ainsi introduite dans le lait avait pour effet de le cailler dès que les acheteurs le faisaient bouillir; Attendu que les faits ainsi précisés n'ont pas le caractère de fraude commerciale, prévu par la loi de 1905, mais celui d'une détérioration de marchandises, prévu par l'art. 443, C. pén.;

Attendu, toutefois, que la peine d'un mois de prison et 50 fr. d'amende, prononcée contre le prévenu, ne saurait être considérée comme justifiée, par application de l'art. 411, C. instr. crim., l'art. 8 de la loi du 1er août 1905 portant que toute poursuite exercée en vertu de la présente loi devra être continuée et terminée en vertu des mêmes textes »; Casse l'arrêt de la Cour d'appel de Paris, en date du 20 avril 1912; renvoie devant la Cour de Rouen, etc.

Du 9 nov. 1912. Ch. crim. -- MM. Bard, prés.; Herbaux, rapp.; Mallein, av. gén.; Balliman, av.

dans la qualification du délit privât l'inculpé des garanties plus grandes, surtout en matière d'expertise, que lui offre la loi de 1905. V. Cass. 25 nov. 1911 (S. et P. 1912.1.480; Pand. pér., 1912. 1.480), et la note. Adde, Monier, Chesney et Roux, Tr. sur les fraudes et falsif., t. 1o, n. 536 et s., et n. 738. Or, lorsque la nouvelle qualification est l'œuvre de la Cour de cassation, pour justifier une décision, on aperçoit mal en quoi les garanties de la liberté de la défense sont diminuées par la substitution d'un délit à un autre. Il reste, à la vérité, que les juges correctionnels n'auraient pu connaître, en vertu de l'acte qui les avait saisis, du délit tel qu'il aurait dû être légalement qualifié, puisque l'art. 8 de la loi de 1905 leur a enlevé le droit, qui leur appartient en règle générale, de modifier la qualification des faits qui leur sont déférés. V. Cass. 25 avril 1907 (S. et P. 1908. 1.63; Pand. pér., 1908.1.63), et les renvois. Et, dans ces conditions, la Cour de cassation a estimé

CASS.-CRIM. 22 novembre 1912.

CONTRIBUTIONS INDIRECTES, DISTILLERIE, FRUITS, COMPTEURS ALCOOMÉTRIQUES (Rép., vo Distillateurs-Distilleries, n. 63 et s.; Pand. Rép., vo Alcools, n. 47 et s.).

La disposition de l'art. 7 du règlement d'administration publique du 15 avril 1881, qui autorise la Régie à faire installer dans les distilleries des compteurs pour le mesurage a des quantités de liquide alcoolique qui coulent des appareils à distiller ou à rectifier », est générale, et trouve son application, quelle que soit la substance qui est soumise à la distillation, et même lorsqu'il n'est procédé qu'à des opérations de rectification (1) (Décr., 15 avril 1881, art. 7).

Doit donc être cassé l'arrêt qui a relaxé, sous prétexte qu'il ne distillait que des fruits, le directeur d'une distillerie, poursuivi pour s'être refusé à laisser la Régie installer un compteur alcoométrique dans son usine (2) (Id.).

(Admin. des contrib. indir. C. Labbé).

L'Administration des contributions indirectes s'est pourvue en cassation contre l'arrêt de la Cour de Besançon du 22 mai 1912, rapporté S. et P. 1912.2.304; Pand. pér., 1912.2.304.

ARRÈT.

LA COUR; Sur l'unique moyen, pris de la violation de l'art. 7 du décret du 15 avril 1881, ensemble des art. 3 de la loi du 21 mars 1874 et 1er de la loi du 28 févr. 1872; violation de l'art. 11 de la loi de finances du 26 déc. 1908, ainsi que de l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810, en ce que l'arrêt attaqué a restreint arbitrairement l'obligation de laisser établir un compteur pour mesurer les quantités de liquides coulant d'un appareil à distiller aux seules distilleries traitant des matières liquides, à l'exclusion des fruits: -- Vu les art. 3 de la loi du 21 mars 1874, 1er et 7 du décret du 15 avril 1881; Attendu que le règlement d'administration publique du 15 avril 1881, intervenu, en exécution de l'art. 3 de la loi du 21 mars 1874, pour déterminer les mesures nécessaires à la

[blocks in formation]

(1-2) La chambre criminelle casse l'arrêt de la Cour de Besançon du 22 mai 1912 (S. et P. 1912. 2.304; Pand. pér., 1912.2.304), qui lui était déféré, et dont la doctrine nous avait paru contestable. Dès lors, en effet, que le décret du 15 avril 1881 (S. Lois annotées de 1881, p. 136. — P. Lois, décr., etc. de 1881, p. 228) a, dans son art. 1er, déclaré ses dispositions applicables notamment aux distilleries de vins, cidres, poirés, lies, maïs et fruits, qui ne se trouvent pas dans les conditions prévues par la loi du 14 déc. 1875, il était arbitraire de prétendre

[ocr errors]

At

perception de l'impôt dans les distilleries, est, aux termes de son art. Ier, applicable aux distilleries de vins, cidres, poírés, lies, marcs et fruits, autres que celles prévues par la loi du 14 déc. 1875; que l'art. 7 du même règlement dispose : « L'Administration a la faculté de faire installer, à ses frais et dans les conditions qu'elle déterminera, des compteurs destinés à mesurer les vins, les cidres ou poirés introduits dans les alambics, et les quantités de liquide alcoolique qui découlent de chaque appareil à distiller ou à rectifier »; tendu que cet article renferme deux dispositions distinctes et indépendantes l'une de l'autre; que la première, relative au mesurage des liquides avant leur introduction dans les alambics, ne s'applique qu'aux vins, cidres ou poirés, tandis que la seconde, relative au mesurage de l'alcool qui découle des appareils à distiller ou à rectifier, et reproduisant les dispositions des art. 12 du décret du 18 sept. 1879 et 11 de celui du 19 du même mois, qui réglementent l'un et l'autre les distilleries où l'on ne distille ni vins, ni cidres, ni poirés, est générale, et trouve son application, quelle que soit la substance qui a été soumise à la distillation, et même lorsqu'il n'a été procédé qu'à des opérations de rectification; Attendu, en fait, que Labbé, directeur d'une distillerie, poursuivi pour s'être refusé à laisser installer dans son usine par la Régie, et aux frais de la Régie, un compteur alcoométrique, a été relaxé par ce motifqu'il ne distille que des fruits, et que l'art. 7, visant exclusivement les usines où l'on distille des vins, cidres ou poirés, est inapplicable à celles où l'on ne distille que des fruits; Attendu que la Cour d'appel de Besançon a ainsi confondu les conditions dans lesquelles s'appliquent les deux dispositions que renferme l'art. 7 du décret du 15 avril 1881, et faussement interprété ce texte; Casse l'arrêt rendu, le 22 mai 1912, par la Cour de Besançon, etc. Du 22 nov. 1912. Ch. crim. MM. Bard, prés.; Petitier, rapp.; Ramband, av. gén.; Aubert et Boivin-Champeaux, av.

que la seconde prescription de l'art. 7 de ce décret, qui est formulée en termes généraux, ne concernait pas les distilleries de fruits. La véritable interprétation était, au contraire, que cette prescription était applicable à toutes les distilleries, quelle que fût la matière première traitée. Sans doute, la première prescription de l'art. 7, formulée en termes limitatifs, ne vise et ne concerne que les usines distillant des vins, cidres et poirés. Mais établir un lien, entre la première et la seconda mesure ordonnées par cet article, ce n'est pas seulement faire violence à l'art. 1o, mais c'est encore aboutir à un système bien peu raisonnable; car on n'apercevrait pas le motif pour lequel le législateur aurait imposé l'emploi du compteur alcoometrique dans les usines distillant le vin, le cidre ou le poiré, et en aurait dispensé les fabriques distillant le grain ou les fruits. V. au surplus, les observations qui accompagnent l'arrêt précité de la Cour de Besançon.

CASS.-Civ. 4 mars 1913.

ASSOCIATIONS, FONCTIONNAIRES PUblics, DéFENSE DES INTÉRÊTS DE CARRIÈRE, OBJET LICITE, ACTION EN JUSTICE, INTÉRÊTS DE LA FONCTION, DROITS DE L'ADMINISTRATION SUPÉRIEURE, ILLEGALITÉ, INSTITUTEURS, FONCTIONNEMENT DE L'ENSEIGNEMENT PRI · MAIRE, OBJET ILLICITE, EVÊQUE, LETTRE PASTORALE, ACTION EN DOMMAGES-INTÉRÊTS, FIN DE NON-RECEVOIR (Rép., v° Syndicat professionnel, n. 91 et s., 248 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 104 et s., 211 et s.).

A la différence de la loi du 21 mars 1884, sur les syndicats professionnels, la loi du 1er juill. 1901, sur les associations, n'a formulé aucune restriction, soit quant aux personnes qui peuvent former entre elles un contrat de cette nature, soit quant à l'objet qu'elles peuvent se proposer en s'associant, sous la seule réserve des prohibitions édictées par l'art. 3 (1) (L. 1er juill. 1901, art. 3).

Il est donc loisible aux fonctionnaires de constituer des associations pour l'étude et la défense de leurs intérêts professionnels, pourvu que le but qu'ils leur assignent soit licite (2) (Id.).

D'autre part, il résulte de l'ensemble des dispositions de l'art. 6 de ladite loi du 1er juill. 1901 que la capacité civile des associations régulièrement déclarées et leur droit corrélatif d'ester en justice sont limités aux actes nécessaires à l'accomplissement de l'objet en vue duquel elles ont été contractées, et qui doit être défini par leurs statuts (3) (L. 1er juill. 1901, art. 6).

(1 à 9) Le Conseil d'Etat admet à plaider devant lui les associations que des fonctionnaires ont créées pour la défense de leurs intérêts professionnels. V. Cons. d'Etat, 11 déc. 1908, Assoc. des employés civils du ministère des colonies (sol. implic.) (S. et P. 1909.3.17; Pand. pér., 1909.3.17), avec les conclusions de M. le commissaire du gouvernement Tardieu, et la note de M. Hauriou; 10 déc. 1909, Lépinay et autres (Rec. des arrêts du Cons. d'Etat, p. 972); 1er juill. 1910, Empis et Assoc. profess. du personnel civil de l'administration centrale du ministère de la marine (sol. implic.) (S. et P. 1911.3.89; Pand. pér., 1911.3.89); 17 févr. 1911, Gontaut et Assoc. profess. des employés de la Caisse des dépôts et consignations (sol. implic.) (Rec. des arrêts du Cons. d'Etat, p. 212); 17 mars 1911, Assoc. gen. des percepteurs de France (sol, implic.) (Id., p. 358); 16 juin 1911 (et non 1910), Empis, président de l'Assoc. profess. du personnel civil de l'administration centrale du ministère de la marine (Infra, 3° part., p. 33), et la note de M. Hauriou. Statuant sur les recours de ces collectivités, le Conseil reconnaît implicitement qu'elles ont la vie légale, et leur existence a paru démontrée aussi à la plupart des juridictions judiciaires, devant lesquelles les Amicales d'instituteurs avaient poursuivi les archevêques ou évêques signataires de la Lettre pastorale. V. Paris, 4 janv. 1911 (sol. implic.); Douai, 17 mai 1911 (sol. implic.), et Trib. de Cahors, 13 juill. 1910 (S. et P. 1912.2.1; Pand. pér., 1912.2.1). V. toutefois en sens contraire, Trib. de Nancy, 18 mars 1910 et Trib. de Rodez, 9 févr. 1911 (S. et P. 1912.2.1; Pand. pér., 1912.2.1).

Après toutes ces décisions, on attendait celle do la chambre civile de la Cour de cassation, saisie ANNÉE 1913. 7-8 cah.

En conséquence, les fonctionnaires, en s'associant,peuvent légitimement se proposer de défendre leurs intérêts de carrière, et il leur appartient alors de poursuivre l'annulation des mesures prises en violation des dispositions législatives ou réglementaires et susceptibles de causer un dommage soit tous, soit à chacun d'entre eux (4) (L. 1er juill. 1901, art. 1er, 3 et 6).

Mais ils ne sauraient, sans usurper les attributions essentielles de l'Etat, assumer, à l'encontre des tiers, la protection des intérêts généraux de la fonction qu'ils exercent, et dont l'administration supérieure doit demeurer seule juge el gardienne exclusive (5) (Id.).

En effet, leur reconnaitre une pareille prérogative serait assimiler les associations, qui leur sont permises, aux syndicals, qui leur sont interdits (6) (Id.).

Par suite, des associations d'instituteurs régulièrement déclarées n'ont pas qualité pour déférer à la justice des attaques qui ne peuvent avoir pour résultat de mettre en péril les intérêts professionnels de leurs membres, et qui sont dirigées, sans considération de personnes, contre le fonctionnement de l'enseignement primaire public et laïque de France (7) (Id.).

Spécialement, doit être cassé l'arrêt qui déclare recevable et fondée l'action en dommages-intérêts formée contre un évêque par une Association départementale d'institutrices et d'instituteurs publics et la Fédération des associations amicales d'ins titutrices et instituteurs publics de France, ayant pour objet, d'après leurs statuts, la première, de resserrer les liens de con

après admission par la chambre des requêtes du pourvoi contre l'arrêt de Paris du 4 janv. 1911. On se demandait si la chambre civile consacrerait la solution presque unanimement adoptée jusqu'ici, ou si elle aurait égard aux objections que suscite la légalité des groupes de défense établis dans le personnel des administrations. V. notre note sous les jugements et arrêts précités.

Ces objections n'ont pas convaincu la Cour. Elle déclare, en effet, que, à la différence de la loi du 21 mars 1884, sur les syndicats professionnels, celle du 1er juill. 1901, sur les associations, n'a formulé aucune restriction, soit quant aux personnes qui peuvent former entre elles un contrat de cette nature, soit quant à l'objet qu'elles peuvent se proposer en s'associant, sous la seule réserve des prohibitions édictées par l'art. 3; que, par suite, il est loisible aux fonctionnaires de constituer des associations pour l'étude et la défense de leurs intérêts professionnels, pourvu que le but qu'ils leur assignent soit licite... L'arrêt ne qualifie donc pas d'illégales a priori les associations de fonctionnaires ayant pour objet la lutte; il ne les soumet que dans des cas exceptionnels aux rigueurs de l'art. 3, dont la disposition, dit-il, n'empêche pas, en général, les agents des services publics de se grouper comme bon leur semble.

La règle est ainsi posée en termes très clairs. Mais, si la chambre civile tient pour existantes les associations qui nous occupent, elle ne leur permet qu'une activité restreinte; elle leur interdit précisément les demandes que les premiers juges avaient retenues.

Pour comprendre cette distinction, il importe de ne point perdre de vue les circonstances de l'affaire. Le procès était fait par l'Association frater

fraternité et de solidarité entre les institutrices et instituteurs et les élèves de l'école normale du département, de prendre part aux congrès d'instituteurs et aux réunions organisées en faveur de l'instruction populaire, et d'étudier les questions touchant aux intérêts matériels et moraux des instituteurs et aux œuvres d'éducation sociale et postscolaire, la seconde, de travailler à la défense des intérêts moraux et matériels des instituteurs, de resserrer les liens de confraternité entre eux, et de faci liter l'échange de leurs vues en matière d'éducation et d'enseignement, - à raison des attaques contenues dans une lettre pastorale, dont les passages, relevés dans l'assignation et retenus par l'arrêt, ne visent pas spécialement les membres des deux associations en cause, mais bien l'ensemble des instituteurs et institutrices laïques de France, et sont de nature à compromettre la considération du personnel entier de l'enseignement primaire, et à diminuer ainsi l'autorité d'un service public, dont la direction et la surveillance incombent à l'Etat (8) (Id.).

L'arrêt, en déclarant que les dispositions susvisées des statuts, définissant l'objet des associations en cause, sont relatives, non seulement aux intérêts de carrière, mais encore à la défense de tout ce qui contribue moralement à la prospérité de l'enseignement primaire et au bien de ses maîtres, dans leurs rapports avec les personnes étrangères à l'école comme avec leurs chefs, attribue aux associations, par cette interprétation des statuts, un objet incompatible avec les lois relatives à l'organisation de la fonction publique, et par suite illicite (9) (Id.).

nelle des instituteurs de la Marne et la Fédération des Amicales d'instituteurs, qui reprochaient au cardinal archevêque de Reims d'avoir lésé les intérêts collectifs de leurs membres, en présentant sous un jour défavorable les pratiques suivies dans les écoles. Ces associations plaidaient, en un mot, la cause de l'enseignement laïque, afin de sauver du discrédit ceux qui le donnent. Or, appartient-il aux maîtres de s'ériger en champions de l'école ? Appartient-il aux fonctionnaires, quels qu'ils soient, de repousser les attaques dirigées contre le service auquel ils concourent? Tout indique que ce rôle n'est pas le leur. Le fonctionnaire doit remplir sa fonction et laisser à ses chefs le soin d'en protéger l'exercice. Que deviendrait une administration dont les moindres membres prendraient sur eux de venger ses injures? Des poursuites inopportunes la déconsidéreraient bientôt, et, de plus, ruineraient sa discipline, en habituant les agents à de fâcheuses initiatives. Le résultat de ce régime serait l'anarchie. Si on ne veut point en venir là, il faut que l'autorité qui conduit chaque service ait seule le droit de le défendre; que, seule, elle défère aux tribunaux les tiers dont les actes, les écrits ou les paroles semblent de nature à compromettre le service lui-même.

[ocr errors][merged small][merged small]

(Cardinal Lucon, archevêque de Reims, C. Association fraternelle des institutrices et instituteurs de la Marne et Fédération des Amicales des institutrices et instituteurs de France et des colonies).

Le cardinal Luçon, archevêque de Reims,

tions ont, aussi peu que chacun d'eux pris isolément, le droit de partir en guerre contre les personnes qui nuisent au corps administratif. En face de ces personnes, l'Administration n'a point d'autre représentant que ses chefs.

Il suffit d'appliquer le raisonnement à l'espèce pour justifier la cassation de l'arrêt de Paris. Les associations d'instituteurs prétendaient combattre pour l'école. Elles défendaient les mesures prises par l'Administration bien plus que les actes personnellement accomplis par les maîtres. Car elles faisaient grief à l'archevêque d'avoir signalé, d'une part, comme immoraux, les établissements scolaires qui réunissent des enfants des deux sexes, et, d'autre part, comme irréligieux, les livres qu'on impose aux élèves. Or, la création d'une école mixte n'est possible qu'en vertu d'une décision du conseil départemental, soumise, dans le mois de sa date, à l'approbation du ministre de l'instruction publique (L. 30 oct. 1886, art. 11, alin. 4, et Décr., 18 janv. 1887, art. 11). Quant aux livres de classes, la liste en est arrêtée par le recteur, sur les propositions des instituteurs de chaque canton, revisées par une commission départementale, composée de membres de l'enseignement (Arr. min. instr. publ., 18 janv. 1887, art. 21 et 22; S. Lois annotées de 1887, p. 211. P. Lois, décr., etc. de 1887, p. 363, et Décr., 1er juill. 1913; J. off., 27 juill. 1918, p. 6684. Comp. Circul. min. instr. publ., 16 févr. 1900, dans Gréard, La législ. de l'enseig. prim., t. 5, p. 778, et t. 6, p. 912); le ministre a, en outre, le droit d'interdire, après avis de la section permanente du conseil supérieur de l'instruction publique, ceux des livres figurant dans les listes des recteurs qui semblent peu recommandables (L. 27 févr. 1880, art. 4, et décret précité du 1er juill. 1913, art. 6, alin. 2). V. sur ces points, Cons. d'Etat, 20 janv. 1911 (1re et 2e espèces), Dame Chapuis et Porteret (S. et P. 1911.8.49; Pand. pér. 1911.3 49), avec la note de M. Hauriou et les conclusions de M. le commissaire du gouvernement Pichat; 8 avril 1911, Rosselin, et 8 déc. 1911, Dame Rousseaux (Rec. des arrêts du Cons. d'Etat, p. 480 et 1168). C'est donc, en définitive, l'autorité dirigeante qui détermine les ouvrages à mettre entre les mains des élèves, comme c'est elle qui permet l'installation des écoles mixtes, d'où il résulte qu'elle était vraiment attaquée par les prélats français, et que les associations soutenaient sa cause. Nous convenons volontiers que les demanderesses travaillaient aussi pour les instituteurs eux-mêmes, auxquels la lettre pastorale avait imputé un enseignement oral et mille autres industries susceptibles d'outrager la foi. Mais, l'instituteur ne pouvant enfreindre la neutralité qu'avec l'assentiment ou la tolérance de ceux qui le surveillent, l'accusation portée contre les maîtres atteignait l'Administration plus que les maîtres. Là encore, l'Administration était découverte; les agents prenaient en main ses intérêts, intentaient des poursuites qu'elle n'avait pas estimées utiles, et substituaient leur action à la sienne. Cette substitution a paru, avec raison, inacceptable à la Cour régulatrice.

Le tribunal de Nancy avait auparavant jugé de même. V. Trib. de Nancy, 18 mars 1910 (mo

s'est pourvu en cassation contre l'arrêt rendu par la Cour d'appel de Paris, le 4 janv. 1911, au profit de l'Association des instituteurs de la Marne et de la Fédération des Amicales des instituteurs de France, et rapporté S. et P. 1912.2.1; Pand. per., 1912.2.1.1er Moyen...

20 Moyen. Violation des art. 6 de la loi

tifs), précité. Il avait dit que, dans l'état actuel de la législation et de l'organisation administrative, les pouvoirs publics seuls assurent la direction et la défense des services. Notre arrêt reprend cette idée et l'exprime en termes plus précis. Il s'approprie donc l'opinion qui s'était déjà manifestée dans l'un des tribunaux judiciaires précédemment saisis.

D'un autre côté, il ne contredit nullement la jurisprudence du Conseil d'Etat; les actions qu'il écarte sont toutes différentes de celles qu'elle estime recevables. La juridiction administrative, en effet, a toujours statué sur des recours que les associations de fonctionnaires introduisaient, non contre des personnes étrangères à l'Administration, mais contre ses chefs. Ces querelles intérieures ont occupé le Conseil d'Etat, dont les décisions tendent toutes à mettre les agents à l'abri de l'arbitraire de l'autorité. Or, autre chose est une procédure qui se déroule entre subordonnés et supérieurs devant le plus élevé des juges administratifs, autre chose, une demande par laquelle, sans l'aveu ou contre le gré de leurs supérieurs, les subordonnés attaquent, à la barre d'un tribunal judiciaire, les gens du dehors. Nous avons montré, dans la note précitée sous Paris, 4 janv. 1911 et autres décisions (p. 5), quelles raisons on a de repousser la deuxième action, même si on reçoit la première. La Cour de cassation voit la différence et la marque très nettement; elle sépare des intérêts généraux de la fonction, que l'Administration sauvegarde, les intérêts de carrière, pour lesquels les fonctionnaires associés pourraient agir. Ces intérêts de carrière, dont la chambre civile autorise la défense, sont ceux qu'on fait valoir contre les chefs. Notre arrêt se trouve donc en harmonie avec la doctrine du Conseil d'Etat. Loin de condamner les associations de fonctionnaires, il leur donne le droit de vivre; il les cantonne seulement entre des limites qu'elles ne doivent pas franchir.

Cette solution, qui essaie de tout concilier, estelle entièrement satisfaisante? Nous ne le croyons pas. Même bornée à la carrière, l'activité des associations demeure scabreuse, et nous ne lisons pas sans appréhension les considérants par lesquels la Cour de cassation la déclare légitime dans cette mesure. Nous regrettons que l'arrêt ait pris parti sur l'existence des groupements de combat qui naissent dans les administrations publiques. Il n'avait pas à résoudre le problème, puisqu'il empêchait d'agir ceux de ces groupements qui étaient en cause. Dès lors, ne pouvait-il employer une des formules prudentes dont la pratique est coutumière à la Cour de cassation, et dire, par exemple, que, à supposer qu'elles aient une existence légale, les associations d'instituteurs ne sont pas recevables à poursuivre les tiers ayant fait tort au service de l'enseignement? Peut-être trouvera-t-on que nous discutons avec trop de minutie les détails d'une décision bonne en soi. On comprendra pourtant nos réserves, si on considère l'importance qu'a l'opinion de la Cour de cassation. En approuvant, comme elle vient de le faire, la jurisprudence du Conseil d'Etat, la chambre civile encourage les juges administratifs à suivre, plus que jamais, la

du 1er juil.. 1901, 1134, C. civ., 30, 33 et 47 de la loi du 29 juill. 1881 et 7 de la loi du 20 avril 1810, en ce que l'arrêt attaqué a déclaré les associations demanderesses recevables et fondées dans leur demande de dommages-intérêts, alors que les éléments de préjudice retenus par l'arrêt concernaient exclusivement, soit les ins

voie où ils sont entrés. Or, nous craignons que cette voie ne mène loin. Les derniers volumes du Recueil des arrêts du Conseil d'Etat ne laissent aucun doute sur la multiplication des recours formés par des groupes d'agents contre les ministres, préfets et autres supérieurs; dans nombre d'administrations, les actes de celui qui commande sont couramment contrôlés et mis en question par une puissance rivale de la sienne. A cette puissance, que les agents ont suscitée et qui grandit de jour en jour, rien ne résistera, si l'on n'y prend pas garde. Le Conseil d'Etat, assurément, réfrène certains abus: quand des sociétés de secours matuels, créées entre fonctionnaires, veulent s'écarter de leur objet et entreprendre la défense de leurs membres contre les supérieurs hiérarchiques, on leur rappelle que la loi du 1er avril 1898 s'oppose à un pareil envahissement. V. Cons. d'Etat, 2 juin 1911, Mouton, prés. de l'Assoc. des fonctionnaires des préfectures (Rec. des arrêts du Cons. d'Etat, p. 668); 10 nov. 1911, Mouton, prés. de l'Assoc. des fonctionnaires des préfectures, et autres (2 arrêts) (Infra, 3° part., p. 33), avec la note de M. Hauriou. Mais, partout où cette fin de non-recevoir ne peut être invoquée, les recours des associations sont jugés recevables. V. les arrêts du Conseil d'Etat, cités au début de la présente note. Il faudrait fermer les yeux à l'évidence pour croire que l'Administration ne souffre pas d'avoir tant à lutter: tout cela, quoi qu'on fasse et quoi qu'on dise, prépare un avenir menaçant. Aussi aurions-nous souhaité que le Conseil d'Etat arrêtât net le mouvement. Si nul ne conteste aux fonctionnaires le droit de s'associer, et si ce droit a même été rappelé, pour les instituteurs, dans une récente discussion du Sénat (V. discours de M. Barthou, président du conseil, à la séance du Sénat du 28 mai 1913; J. off. du 29 mai, déb. parl., p. 720), leurs associations deviennent, à notre avis, illégales, dès qu'elles affaiblissent l'autorité des chefs par la constitution d'un organe que les lois n'ont pas prévu. V. notre note précitée, p. 3, 2° et 8° col.

Peu importe que cet organe s'interdise toute participation directe aux actes des supérieurs. Du moment qu'il a la mission permanente de les surveiller, il introduit dans le corps administratif un élément de désordre qui n'y a pas sa place. Notre éminent collègue, M, Haurion, s'élève, il est vrai, avec force, contre cette conclusion. V. la note précitée de M. Hauriou sous Cons. d'Etat, 16 juin et 10 nov. 1911, Mouton, prés. de l'Assoc. des fonctionnaires des préfectures, et autres. Selon lui, autant l'Administration est protégée par la loi dans ses prérogatives de décision et d'action, autant la loi elle-même l'oblige à subir largement le contrôle ». Or, les associations de fonctionnaires se bornent à contrôler, et, par suite, ne font rien d'illégal. Mais ce n'est point notre sentiment. Nous n'apercevons que deux contrôles compatibles avec la hiérarchie administrative, telle que les lois l'ont instituée : celui des individus (agents ou tiers) qui agissent pour leur compte particulier, et celui des organes créés par le législateur, qui opèrent dans l'intérêt général. Il nous paraît impossible, sans fausser le système, de surajouter à ce double contrôle la surveillance de collectivités dépour

tituteurs individuellement, au nom desquels les associations ne sauraient agir, soit l'Administration, préposée au service public de l'enseignement primaire, qu'elles n'ont pas davantage qualité pour repré

senter.

3o, 4o et 5o Moyens...

ARRÊT (apr, délib, en ch. du cons.).

LA COUR; Statuant sur le second moyen du pourvoi: Vu les art. 1er et 3 de la loi du 1er juill. 1901; Attendu qu'à la différence de la loi du 21 mars 1884, sur les syndicats professionnels, la loi du 1er juill. 1901, sur les associations, n'a formulé aucune restriction, soit quant aux personnes qui peuvent former entre elles un contrat de cette nature, soit quant à l'objet qu'elles peuvent se proposer en s'associant, sous la seule réserve des prohibitions édictées par l'art. 3; que, par suite, il est loisible aux fonctionnaires de constituer des associations pour l'étude et la défense de leurs intérêts professionnels, pourvu que le but qu'ils leur assignent soit licite; Attendu, d'autre part, que, de l'ensemble des dispositions de l'art. 6, il résulte que la capacité civile des associations régulièrement déclarées, et leur droit corrélatif d'ester en justice, sont limités aux actes nécessaires à l'accomplissement de l'objet en vue duquel elles ont été contractées, et qui doit être défini par leurs statuts; Attendu que l'arrêt attaqué constate que l'Association fraternelle des institutrices et instituteurs publics et laïques du département de la Marne, et la Fédération des Amicales d'institutrices et instituteurs publics de France et des colonies, ont acquis la capacité juridique déterminée par l'art. 6, en remplissant la formalité de la déclaration préalable, prescrite, pour les associations, par l'art. 5 de la loi, et, pour les unions d'associations, par l'art. 7 du décret du 16 août 1901; que l'Association fraternelle a pour objet de resserrer les liens de confraternité et de solidarité entre les instituteurs et institutrices de la Marne et les élèves de l'école normale, de prendre part aux travaux des congrès d'instituteurs et aux réunions importantes organisées en faveur de l'instruction populaire, et d'étudier par son conseil d'administration les questions touchant aux intérêts matériels et moraux des instituteurs et aux œuvres d'éducation sociale et post

vues de titre officiel, et dont l'apparition trouble forcément l'ordre établi,

Ce sont ces collectivités que la Cour de cassation proclame cependant légalement existantes. Au moins ne procéderont-elles pas en dehors du domaine que leur ouvre le Conseil d'Etat, et où la chambre civile les enferme.

ERNEST CHAVEGRIN, Professeur à la Faculté de droit de l'Université de Paris.

(1-2) C'est un point certain que, les cessions d'offices intéressant l'ordre public, toute lésion provenant d'une exagération de prix est une cause de réduction de ce prix. V. Caen, 12 avril 1905 (S. et P. 1906.2.245); Cass. 7 juin 1905 (S. et P. 1906.1.399; Pand. pér., 1905.1.368), et les renvois.

scolaire; que la Fédération a pour but de travailler à la défense des intérêts moraux et matériels des instituteurs, de resserrer les liens de bonne confraternité entre eux et de faciliter l'échange de leurs vues en matière d'éducation et d'enseignement;

Attendu que l'arrêt déclare que ces dispositions sont relatives, non seulement aux intérêts de carrière, mais encore à la défense de tout ce qui contribue moralement à la prospérité de l'enseignement primaire et au bien de ses maîtres, dans leurs rapports avec les personnes étrangères à l'école comme avec leur chefs;

Attendu que cette interprétation des statuts attribue aux associations défenderesses un objet incompatible avec les lois relatives à l'organisation de la fonction publique, et, par suite, illicite; - Attendu, en effet, que les passages du document incriminé, relevés dans l'assignation et retenus par l'arrêt, ne visent pas spécialement les membres des deux associations en cause, mais bien l'ensemble des instituteurs et institutrices laïques de France, que lesdites associations ne représentent pas; qu'ils sont de nature à compromettre la considération du personnel entier de l'enseignement primaire, et à diminuer ainsi l'autorité d'un service public, dont la direction et la surveillance incombent à l'Etat;

Attendu que les fonctionnaires, en s'associant, peuvent légitimement se proposer de défendre leurs intérêts de carrière, et qu'il leur appartient alors de poursuivre l'annulation des mesures prises en violation des dispositions législatives ou réglementaires, et susceptibles de causer un dommage, soit à tous, soit à chacun d'entre eux;

--

Mais qu'ils ne sauraient, sans usurper les attributions essentielles de l'Etat, assumer, à l'encontre des tiers, la protection des intérêts généraux de la fonction qu'ils exercent, et dont l'Administration supérieure doit demeurer seule juge et gardienne exclusive; que leur reconnaître une pareille prérogative serait assimiler les associations, qui leur sont permises, aux syndicats, qui leur sont interdits; d'où il suit que ni l'Association fraternelle des instituteurs de la Marne, ni la Fédération des Amicales d'instituteurs, n'avaient qualité pour déférer à la justice des attaques qui ne pouvaient avoir pour résultat de mettre en péril les intérêts professionnels de leurs membres, et qui étaient dirigées, sans considération de personnes,

Et il appartient aux tribunaux d'apprécier souverainement s'il y a eu exagération dans le prix (V. Cass. 14 févr. 1898, S. et P. 1902.1.23; Pand. pér., 1898.1.278, et les renvois), et dans quelle mesure la réduction doit être prononcée. V. Cass. 7 juin 1905, précité. V. aussi, Cass. 25 juin 1902 (S. et P. 1902.1.447; Pand. pér., 1902.1.382), et la note.

(3-4) Lorsque la cession porte sur une étude de notaire, les seuls honoraires à porter aux états de produits sont, pour les années postérieures à la mise en vigueur des tarifs établis par les décrets du 25 août 1898, les honoraires portés à ces tarifs. V. Caen, 12 avril 1905 (S. et P. 1906.2.245), et la note. Mais que doit-on décider pour les années antérieures? La Cour de Caen, par l'arrêt précité du 12 avril 1905, a jugé qu'il fallait se référer aux tarifs en usage. Et la chambre des requêtes a re

[blocks in formation]

CASS.-REQ. 13 juin 1910.

OFFICES, CESSION, PRIX, RÉDUCTION, POUVOIR DU JUGE, APPRÉCIATION SOUVERAINE, NOTAIRE, ETATS DE PRODUITS, EXAGÉRATION, TARIFS ANTÉRIEURS AUX DÉCRETS DE 1898, HONORAIRES, EXCLUSION, FRAIS D'ÉTUDE (Rép., v° Office ministériel, n. 707 et s.; Pand. Rép., v° Offices, n. 400 et s.).

Les cessions d'offices constituent des contrats sui generis, intéressant l'ordre public, lequel exige que le prix des offices représente leur valeur exacte (1) (C. civ., 6, 1131, 1641, 1642; L. 28 avril 1816, art. 91).

Et il appartient aux juges du fond d'apprécier souverainement s'il y a eu exagération dans le prix, et dans quelle mesure la réduction doit être opérée (2) (Id.).

Spécialement, les juges du fond, usant de leur pouvoir d'appréciation, ont pu décider, après expertise, qu'il y avait lieu de réduire le prix de cession d'un office de notaire, alors, d'une part, que, sans contester la régularité de la perception par le cédant, avant le décret du 25 août 1898, d'honoraires pour négociation de prêts ou de ventes de propriétés, ils déclarent que ces honoraires ne sauraient être compris dans le produit moyen, comme n'étant pas taxables, aux termes du décret de 1898 (3) (C. civ., 1131, 1641, 1642; L. 28 avril 1816, art. 91; Décr., 25 août 1898).

Et alors, d'autre part, qu'après avoir constaté que le prix de cession, par rapport au revenu moyen résultant de l'état de produits joint au dossier, et défalcation faite des frais d'étude, correspondait à un taux de 17 fr. 32, admis par la Chancellerie, ils déclarent que le produit moyen annuel doit être fixé, par suite des retranchements opérés, à un chiffre inférieur (4),

jeté le pourvoi formé contre un arrêt de la Cour de Nancy, qui s'était prononcé dans le même sens, en considérant comme régulièrement portés aux états de produits des droits de recouvrement de prix d'adjudications et de ventes d'immeubles, perçus, conformément aux usages, antérieurement aux décrets du 25 août 1898. V. Case. 14 avril 1904 (8. et P. 1905.1.284; Pand. pér., 1905.1.8). Dans l'espèce, la Cour de Riom s'était prononcée en sens opposé, en retranchant des états de produits les honoraires perçus sous le régime antérieur aux décrets de 1898, et que les tarifs établis par ces décrets ont supprimés, et la chambre des requêtes rejette le pourvoi qui lui déférait, de ce chef, l'arrêt de Riom. La chambre des requêtes s'est bornée, pour répondre au moyen, à invoquer deux motifs d'abord, que les juges n'avaient pas

qui doit être encore abaissé par la déduc tion d'un chiffre de frais d'étude supérieur à celui indiqué à l'état de produits (1) (Id.).

(Gidon C. Bordessoule). — ARRÊT.

LA COUR; Sur le moyen unique du pourvoi, pris de la violation des art. 2 et 1134, C. civ., de la loi du 25 vent. an 11, du décret des 25 août-1er sept. 1898, art. 2, 3 et s., des règles relatives aux cessions d'office, et de l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810 (en ce que l'arrêt attaqué a décidé qu'il n'y avait pas lieu de porter dans l'état des produits de l'office cédé par l'exposant, le 9 janv. 1899, les droits pour négociations de prêts et de ventes perçus pendant les cinq années antérieures à cette date, sous prétexte que, d'après le décret du 25 août 1898, ces droits n'étaient pas taxables, alors que ce décret, n'ayant pas d'effet rétroactif, ne pouvait évidemment s'appliquer qu'à la partie de ladite période de cinq ans qui lui était postérieure, et que, pour la partie antérieure, il fallait se conformer au tarif en usage dans l'arrondissement de Thiers, où était situé l'office, et alors que l'arrêt, non seulement n'a pas recherché quel était le tarif ou l'usage en vigueur, mais a méconnu celui qui était suivi): - Attendu que les cessions d'offices constituent des contrats sui generis, intéressant l'ordre public, lequel exige que le prix des offices représente leur valeur exacte; Attendu qu'il appartient aux juges du fond d'apprécier souverainement s'il y a eu exagération dans le prix, et dans quelle mesure la réduction doit être opérée; Attendu, en fait, que, sans contester la régularité de la perception, par le cédant, avant le 1er sept. 1898, du droit de 1 p. 100 pour négociation de prêts, et de celui de

contesté la légalité des perceptions faites sous le régime antérieur aux décrets de 1898, conformément aux tarifs alors en usage; ensuite, que les juges apprécient souverainement s'il y a eu exagération des produits et dans quelle mesure la réduction doit être opérée. V. la note qui précède. Il semblerait résulter de ce dernier motif que la Cour de cassation se refuse à contrôler l'application qui a été faite des tarifs en vigueur par les juges du fond pour en déduire s'il y a lieu ou non à réduction. Entre l'espèce jugée par la Cour de cassation en 1904 et l'espèce ci-dessus, il y avait, à la vérité, une différence. Dans l'espèce de l'arrêt de 1904, la cession était antérieure aux décrets de 1898; elle était intervenue, dans l'espèce de l'arrêt ci-dessus, après la mise en application des tarifs établis par ces décrets. Et, dans la première affaire, la cession ayant eu lieu au vu des tarifs existants, les parties avaient pu et dû faire entrer dans la détermination du prix tous les produits qui étaient alors autorisés, et l'intervention de tarifs nouveaux, qui écartaient une partie de ces produits, ne pouvait faire qu'il y eût eu exagération du prix, tel qu'il avait été fixé par les parties. Dans l'espèce ci-dessus, au contraire, on pouvait dire que, bien que les honoraires perçus sous l'ancien régime eussent été légalement perçus, le cessionnaire, qui traitait sous l'empire des tarifs établis par les décrets de 1898, n'avait pu compter que sur les honoraires autorisés par ces tarifs, et qu'il y avait exagération de la valeur vénale de l'office à tenir compte, pour l'établissement du prix,

négociation de vente de propriétés, la Cour déclare, par adoption des motifs du jugement non contraires à ceux de son arrêt, que ces droits ne sauraient être compris dans le calcul de la moyenne des produits, comme n'étant pas taxables, aux termes des décrets d'août et septembre 1898, d'après lesquels les notaires ne peuvent percevoir aucun droit de recette ou de comptabilité pour l'encaissement et la garde des fonds et des valeurs déposés en conséquence ou pour l'exécution directe d'un acte dans leur étude; Attendu que l'arrêt constate, d'autre part, que, d'après l'état joint au dossier de la cession GidonBordessoule, le revenu moyen pour les cinq dernières années était de 8.122 fr., qui, après défalcation des frais d'étude, fixés à 326 fr., était, net, de 7.792 fr. ; qu'au regard de ce produit, le prix de 45.000 fr., porté dans le traité, se trouvait fixé au taux de 17 fr. 32, et que ce taux a été admis par la Chancellerie; mais que les experts ont fixé le produit moyen annuel à 7.146 fr., dont il faut déduire 460 fr. pour frais d'étude, ce qui ramène le produit moyen annuel à 6.686 fr.; - Attendu qu'en l'état de ces déclarations et constatations, la Cour, dont l'arrêt est suffisamment motivé, a pu, usant de son pouvoir souverain d'appréciation, et sans violer les textes de loi ou les principes visés au moyen, décider qu'il y avait lieu de réduire à 41.000 fr. le prix de l'office cédé par Gidon à Bordessoule; Rejette le pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 20 janv. 1909 par la Cour de Riom, etc.

Du 13 juin 1910. Ch. req. MM. Tanon, prés.; Bulot, rapp.; Feuilloley, av. gén. (concl. conf.); de Ramel, av.

d'honoraires qui, bien qu'ils eussent été légalement perçus par le cédant, ne pouvaient plus désormais rentrer dans les produits normaux de l'office. Cette différence entre les deux espèces peut expliquer la divergence apparente qu'on peut relever entre les deux arrêts de la chambre des requêtes; mais on peut regretter que la Cour de cassation n'ait pas plus nettement affirmé son sentiment sur une question qui divise les Cours d'appel, et qui présentera quelque temps encore un intérêt.

(1) La dissimulation partielle des frais d'étude peut être prise en considération pour la réduction du prix de cession de l'office. V. notamment, dans l'hypothèse de dissimulation partielle du montant des traitements des clercs, Cass. 7 juin 1905 (S. et P. 1906.1.399; Pand. pér., 1905.1.368), et la note.

(2) Les conventions relatives à la transmission des offices sont des contrats de droit civil, et les contestations auxquelles elles peuvent donner lieu sont, en principe, de la compétence de l'autorité judiciaire. V. Cass. 18 nov. 1823 (S. et P. chr.). Adde, Perriquet, Tr. de la propriété et de la transmission des offices ministériels, n. 411; et notre Rép. gén du dr. fr., v° Office ministériel, n. 779 et s.; Pand. Rép., ° Offices, n. 679 et s. Ce principe comporte, il est vrai, une limite. La nomination du cessionnaire exigeant l'intervention de la puissance publique, l'autorité judiciaire ne pourrait, sans empiéter sur les attributions de celle-ci, connaître entre les parties de différends portant sur la validité du décret de nomination (V. Cass. 20 mars 1855, S. 1856.1.47. P. 1856.1.176;

CASS.-REQ. 14 février 1911.

OFFICES, CESSION, TRAITÉ, INEXECUTION, ACTION EN RÉSOLUTION, DOMMAGES-INTÉRETS, COMPÉTENCE, AUTORITÉ JUDICIAIRE, PRÉSENTATION (droit de) (Rép., vo Office ministériel, n. 779 et s.; Pand. Rép., vo Offices, n. 679 et s.).

Lorsque le différend entre les héritiers d'un notaire et celui auquel les héritiers ont cédé l'office porte, non pas sur l'exercice du droit de présentation, mais uniquement sur le point de savoir si c'est par le fait et la faute du cessionnaire que le traité de cession n'a pu être exécuté, et s'il y a lieu à des dommages-intérêts, le débat, n'ayant pour objet qu'un intérêt privé, est soumis aux règles de droit commun, et ressortit à la compétence de l'autorité judiciaire (2) (LL. 16-24 août 1790, tit. 2, art. 13; 16 fruct. an 3; 28 avril 1816, art. 91).

(X... C. V L... et N...).

A la suite du décès de Me L..., notaire, sa veuve et son héritier, M. N... ont passé avec M. X... un traité de cession de l'office, et ils ont présenté celui-ci à l'agrément du gouvernement. Mais, au cours de l'instruction de la demande de nomination, des difficultés s'étant élevées entre les parties, principalement au sujet de la sincérité des états de produits qui avaient servi de base au traité, les cédants ont assigné le cessionnaire devant le tribunal civil de Semur, en résiliation de la cession et en dommages-intérêts. M. X... a décliné la compétence du tribunal, sur le motif qu'il appartenait au ministre seul de connaître du différend, puisqu'il était saisi par l'acte de présentation. Le déclinatoire a été rejeté par jugement du 5 févr. 1908, confirmé,

Paris, 9 déc. 1892, S. et P. 1895.2.9, et la note; Pand. pér., 1893.2.270), ou sur l'exercice du droit de présentation, comme l'admet implicitement l'arrêt ci-dessus. La Cour de cassation avait déjà, en reconnaissant la validité du compromis sur les dommages-intérêts pouvant être dus par suite de l'inexécution d'un traité de cession, dans un arrêt dont l'arrêt ci-dessus paraît bien s'être inspiré, réservé le cas où le litige porterait sur l'exercice du droit de présentation. V. Cass. 24 mai 1859 (S. 1859.1.616. - P. 1859.1131), et le rapport de M. le conseiller Hardouin. Mais, lorsque les parties, comme dans l'espèce de l'arrêt de 1859, compromettent sur les dommages-intérêts dus pour inexécution du traité de cession, ou lorsque, comme dans l'espèce de l'arrêt ci-dessus, il y a litige entre elles sur le point de savoir si l'inexécution de ce traité est imputable à la faute du cessionnaire, le contrôle du gouvernement sur l'exercice du droit de présentation n'est pas en jeu; c'est une contestation d'ordre purement privé, qui ressortit aux tribunaux de l'ordre judiciaire, aussi bien que toutes autres contestations touchant à l'intérêt privé qui peuvent s'élever entre les parties, et notamment l'action en réduction de prix, formée, même après l'approbation du traité par la Chancellerie, par le cessionnaire. V. Paris, 24 févr. 1845 (P. 1846.1.412); Orléans, 3 mai 1890 (S. et P. 1892.2.241). Adde, Perriquet, op. cit., n. 412; Amiaud, Man prat. de la transmission des offices 2o éd., n. 96 et 102; et notre Rép. gén, du dr. fr., verb. cit., n. 783; Pand. Rép., verb. cit., n. 465.

« PrécédentContinuer »