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LA COUR; Sur le moyen unique: Attendu que la difficulté soumise à la Cour de Dijon portait, non sur l'exercice du droit de présentation au gouvernement, par la dame veuve L... et N..., de X..., en qualité de successeur du notaire L..., décédé, ainsi que l'allègue le pourvoi, mais uniquement sur le point de savoir si c'était par le fait et la faute de X..., cessionnaire, que le traité de cession intervenu entre les parties n'avait pu être exécuté, et s'il y avait lieu à des dommages-intérêts;-Attendu qu'un pareil débat, n'ayant pour objet qu'un intérêt privé, était soumis aux règles du droit commun; qu'en décidant que la solution de ce litige appartenait aux tribunaux judiciaires, la Cour de Dijon n'a fait que se conformer à la loi; Rejette, etc.

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Du 14 févr. 1911. Ch. req.. MM. Tanon, prés.; Bulot, rapp.; Séligman, av. gén. (concl. conf.); Frénoy, av.

(1-2-3) La jurisprudence admet qu'un créancier, qui a produit à l'ordre dans le délai de quarante jours imparti par l'art. 754, C. proc., peut encore, après l'expiration de ce délai, donner plus de précision à sa demande, et même invoquer des moyens qu'il aurait négligé de faire valoir devant le juge-commissaire. V. Cass. 24 juill. 1905 (S. et P. 1907.1.441), la note de M. Naquec et les renvois. L'application de ce principe a présenté des difficultés, quant au point de savoir si le créancier peut, pour présenter des moyens nouveaux après l'expiration des délais de production, invoquer des titres qu'il n'a pas produits devant le juge-commissaire. La jurisprudence paraît bien se prononcer en ce sens que, si le créancier ne peut invoquer, après l'expiration des délais, une créance nouvelle, à l'appui de laquelle il présente un titre non encore produit, ce qui constituerait une demande nouvelle (V. Cass. 25 févr. 1891, S. 1891.1.157. - P. 1891.1.373; Pand. pér., 1891. 1.302), il peut, après l'expiration des délais de production, faire valoir un droit qu'il n'avait pas d'abord explicitement réclamé, mais dont il prétend trouver la justification dans un titre qui avait fait de sa part l'objet d'une production régulière. V. Cass. 19 juill. 1893 (motifs) (S. et P. 1894.1.28), et les renvois. Il a même été décidé que la demande en collocation, formée dans le délai légal et avec production à l'appui, conserve au créancier le droit d'obtenir pour sa créance un rang meilleur que celui qui lui avait été assigné, en produisant, après les délais, un nouveau titre déjà indiqué dans celui qu'il avait présenté tout d'abord. V. Cass. 30 janv. 1883 (S. 1885.1.109. P. 1885.1.247), et la note.

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Dans l'espèce, un ordre ayant été ouvert sur deux immeubles, un créancier, qui avait hypothèque

CASS.-REQ. 27 janvier 1913.

1o ET 3o ORDRE, PRODUCTION, DÉLAI, FORCLUSION, MOYEN NOUVEAU, CONTREDIT, RANG, DÉPENS, TITRES ANTÉRIEUREMENT PRODUITS, CRÉANCIER POURSUIVANT, JUGEMENT, APPEL, RAPPORT A JUSTICE, CONCLUSIONS ANTÉRIEURES A FIN DE CONFIRMATION (Rép., vo Ordre, n. 695 et s.; Pand. Rép., v° Ordre entre créanciers, n. 1649 et s.). 2o DÉPENS, RAPPORT A JUSTICE, CONCLUSIONS NOUVELLES, POUVOIR DU JUGE (Rép., vis Dépens, n. 1772 et s., Ordre, n. 1254; Pand. Rép., vis Acquiescement, n. 205 et s., Frais et dépens, n. 999 et s., Ordre entre créanciers, n. 3186 et s.).

1o Le créancier hypothécaire, qui a demandé sa collocation à l'ordre ouvert pour la distribution du prix d'un immeuble, peut, après l'expiration des délais de production, réclamer un rang meilleur ou un droit dont il ne s'était pas originairement prévalu, mais qui est justifié par les titres compris dans sa production (I) (C. proc., 754, 755, 761).

Spécialement, lorsqu'un ordre ayant été ouvert pour la distribution du prix de deux immeubles, deux créanciers, dont l'un avait hypothèque sur les deux immeubles, et l'autre sur le premier seulement, ont été colloqués tous les deux, au premier rang, proportionnellement à leurs créances, sur le premier immeuble, le créancier ayant hypothèque sur les deux immeubles étant colloqué au premier rang sur le second immeuble pour ce qui lui restait dû après sa collocation sur le premier immeuble, le créancier colloqué seulement sur le premier

sur les deux immeubles, avait été colloqué, d'abord, sur l'un d'eux, concurremment avec un autre créancier, qui n'avait d'hypothèque que sur cet immeuble, et, en outre, sur l'autre immeuble, pour le surplus de sa créance. L'autre créancier, l'ayant remboursé avec subrogation, après le règlement provisoire, avait, en usant de la faculté, que lui avait fait acquérir la subrogation, de choisir celui des immeubles sur lequel il entendait être colloqué pour la totalité de la créance (V. sur ce droit, Cass. 9 mai 1905, S. et P. 1906.1.489, la note, n. I, de M. Maurice Bernard, et les renvois; Pand. pér., 1906.1.31; adde, la note sous Bordeaux, 8 avril 1908, S. et P. 1912.2.102; Pand. pér., 1912. 2.102), formé, après l'expiration des délais de production, un contredit tendant à ce que la créance dans laquelle il était subrogé fût colloquée sur le deuxième immeuble, de manière à obtenir le paiement intégral de sa propre créance sur le premier immeuble. Son intérêt à former cette demande était évident, et, en outre, les titres sur lesquels s'appuyait cette demande, c'est-à-dire les titres de sa propre créance et de celle dans laquelle il avait été subrogé, ayant été produits dans les délais, il pouvait invoquer la jurisprudence que nous venons de rappeler pour écarter la forclusion qui lui était opposée.

On objectait que l'intérêt légitime, qui seul peut justifier l'exercice du droit d'option, appartenant au créancier qui a hypothèque sur plusieurs immeubles dont le prix est en distribution (V. Cass. 9 mai 1905, précité, et la note de M. Maurice Bernard; adde, la note sous Bordeaux, 8 avril 1908, précité), n'existait qu'en sa personne, et que, de plus, cet intérêt était né de l'acte de subrogation, intervenu après les délais de production. Il

immeuble est fondé, après avoir remboursé avec subrogation l'autre créancier, à demander, malgré l'expiration des délais de production, à être colloqué pour sa créance personnelle sur le premier immeuble, et, pour la créance dans laquelle il est subrogé, sur le second immeuble (2) (C. civ., 1250; C. proc., 754, 755, 761).

Il importe peu que ce créancier puise l'intérêt qu'il a à faire cette demande dans un fait postérieur au règlement provisoire. à savoir le remboursement qu'il a effectué) 3) (Id.).

2o La partie qui s'en rapporte à justice peut être condamnée aux dépens (4) (C. proc., 130).

D'autre part, si le juge, qui n'est saisi que des questions posées par les dernières conclusions prises devant lui, ne doit statuer que sur les questions que ces conclusions lui soumettent, il lui appartient néanmoins, au point de vue des dépens, de tenir comple des conclusions antérieures, en ce sens que la partie, qui, après avoir modifié une prétention mal fondée, y substitue des conclusions nouvelles, peut être condamnée aux dépens comme ayant succombé dans sa prétention originaire (5) (Id.). 30 Spécialement, lorsque le créancier poursuivant un ordre, el commis pour suivre l'audience sur un contredit au règlement provisoire, a d'abord contesté le bien fondé de ce contredit et conclu à la confirmation du jugement qui l'avait rejeté, et s'en est ensuite rapporté à justice, cette contestation fournit une base légale à l'arrêt qui l'a condamné aux dépens, en même temps que le créancier qui a conclu au rejet du contredit (6) (C. proc., 130, 766).

est bien certain que le créancier subrogeant, intégralement payé de sa créance par la double collocation qu'il avait obtenue, n'aurait eu aucun intérêt à former un contredit; mais le créancier subrogé avait eu, au contraire, dès l'origine, un intérêt indéniable à faire reporter la collocation du créancier qu'il avait désintéressé sur l'immeuble qui n'était pas affecté à sa propre créance; il aurait pu former an contredit dans ce but, contredit dont le sort aurait été lié l'appréciation qu'auraient faite les juges de l'intérêt du créancier à double inscription à obtenir une double collocation; le moyen qu'il aurait pu faire valoir s'était modifié par l'effet de la subrogation; mais il n'en restait pas moins basé sur l'intérêt qu'il avait eu dès l'origine à être colloqué seul sur le premier immeuble.

(4-5-6) Suivant une jurisprudence constante, la partie qui s'en rapporte à justice conteste, en tant qu'il y a lieu, la prétention de l'adversaire (V. Cass. 9 nov. 1892, S. et P. 1895.1.399; Pand. pér., 1893.1.132, et le renvoi; 24 oct. 1904, S. et P. 1905.1.283, et la note), en telle sorte que, si la partie adverse obtient gain de cause, la partie qui s'en est rapportée à justice peut être condamnée aux dépens. V. Cass. 2 févr. 1885 (S. 1885.1.501. - P. 1885.1.1185), et les renvois; adde, notre Rép. gén. du dr. fr., v° Dépens, n. 1932; Pand. Rép., Frais et dépens, n. 285. Cette règle doit recevoir son application en matière d'ordre, où, conformément au droit commun, c'est celui qui succombe sur un incident qui en paie les frais. V. Cass. 9 mars 1898 (S. et P. 1899.1.241); Garsonnet, Tr. de proc., 2o éd., par Cézar-Bru, t. 5, 2 1866, p. 483; Glasson, Précis de proc., 2e éd., par Tissier, t. 2, n. 1688; et notre Rep. gén. du dr. fr., v° Ordre,

(Gilbert et Théron C. Nicolas).

A la suite d'une saisie immobilière poursuivie par M. Théron, les immeubles de M. Pellodeau ont été adjugés en deux lots: le premier (terre de Briaudet), moyennant le prix de 11.673 fr.; le second (terre de la Perche), moyennant le prix de 9.255 fr.; et un ordre a été ouvert devant le tribunal civil de Gannat pour la distribution de ces deux prix. Le règlement provisoire a colloqué sur le premier lot, au premier rang, M. Nicolas et M. Baudet, proportionnellement entre eux, conformément à leurs productions; et, sur le second lot, au premier rang, M. Baudet, pour la somme qui lui resterait due après prélèvement de la part proportionnelle lui revenant sur le premier fot. M. Nicolas, qui n'avait pas d'hypothèque sur le second lot, ayant alors remboursé la créance de M. Baudet, en se faisant subroger dans ses droits (C. civ., 1250,

ler), a élevé une contestation contre le règlement provisoire, en demandant à être colloqué, pour sa créance personnelle, sur le prix du premier lot, et, pour la créance de M. Baudet, dans laquelle il était subrogé, sur le prix du deuxième lot. M. Gilbert, créancier colloqué après M. Baudet, a conclu au rejet du contredit, et M. Théron, créancier poursuivant, commis pour suivre l'audience, s'en est rapporté à justice. Par jugement du 31 juifl. 1908, le tribunal civil de Gannat a débouté M. Nicolas de son contredit, et l'a condamné aux dépens.-M. Nicolas a interjeté appel, en intimant devant la Cour à la fois M.Gilbert et M. Théron.Ceux-ci ont d'abord, l'un et l'autre, conclu à la confirmation du jugement; mais, ultérieurement, au nom de M. Théron, Me Monnier, avoué, s'en est rapporté à justice. Par arrêt du 11 avril 1911, la Cour de Riom a fait droit à l'appel et infirmé le jugement, en déclarant M. Nicolas bien fondé dans son contredit, et en condamnant les intimés aux dépens.

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POURVOI en cassation par M. Gilbert et par M. Théron. - 1er Moyen (commun aux deux demandeurs). Violation des art. 754 et s., C. proc., en ce que l'arrêt a admis qu'après l'expiration des délais de production, un créancier pouvait, par voie de contredit au classement provisoire, demander une collocation différente de celle qu'il avait primitivement sollicitée et qui lui avait été accordée, sous prétexte que, dans l'intervalle, il aurait acquis un titre lui permettant d'obtenir une situation meilleure que celle à laquelle il pouvait prétendre auparavant.

20 Moyen (spécial à M. Théron). Violation des art. 130 et 131, C. proc., et manque de base légale, en ce que l'arrêt a condamné aux dépens, même de première

n. 1254; Pand. Rép., vo Ordre entre créanciers, n. 3187. Ces principes suffisaient à justifier la condamnation aux dépens critiquée par le pourvoi. Cependant, la Cour de cassation s'est préoccupée de répondre à une objection, tirée par le pourvoi de ce que l'arrêt attaqué, pour condamner aux dépens, en même temps que le créancier contestant, le créancier désigné par le juge-commissaire pour suivre l'audience sur le contredit, s'était fondé sur des conclusions par lesquelles ce dernier créan

instance, dans une procédure de contredit à ordre, le créancier poursuivant, commis pour suivre l'audience, sous l'unique prétexte que son avoué d'appel, qui, d'après les seules conclusions relatées aux qualités, s'en était remis à droit, à raison de ce qu'il n'avait aucun intérêt dans le litige, aurait précédemment conclu à la confirmation du jugement, alors que, s'en étant remis à droit devant le tribunal, et n'ayant pas succombé dans les prétentions résultant des dernières conclusions devant la Cour, il ne pouvait être condamné aux dépens que s'il était constaté que cette prétendue modification des conclusions d'appel avait causé des frais supplémentaires ou un dommage quelconque aux parties en cause, et que, d'ailleurs, la possibilité de ce préjudice est exclue par les mentions mêmes des qualités relatant la procédure.

ARRÊT.

défen

LA COUR; Sur le premier moyen Attendu que le pourvoi reproche à l'arrêt attaqué d'avoir autorisé deur éventuel à réclamer par voie de contredit, après l'expiration des délais de production, une collocation différente de celle qui lui avait été accordée au règlement provisoire, sous prétexte que, dans l'intervalle, il aurait acquis un titre lui permettant d'obtenir une situation meilleure que celle à laquelle il pouvait prétendre auparavant; Mais attendu que le créancier hypothécaire, qui a demandé sa collocation à l'ordre ouvert pour la distribution d'un prix, peut, après l'expiration des délais de production, réclamer un rang meilleur ou un droit dont il ne s'était pas originairement prévalu, mais qui est justifié par les titres compris dans sa production; Et attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué qu'au règlement provisoire, Nicolas et Baudet avaient été colloqués en première ligne, et proportionnellement entre eux, sur le prix de la terre de Briaudet; que, cependant, Baudet aurait pu, dès le début de la procédure, et en vertu des titres produits par lui à ce moment, requérir spécialement sa collocation sur le domaine de la Perche; que, par application des principes susénoncés, cette collocation pouvait encore être réclamée par lui ou par Nicolas, subrogé à ses droits, après l'expiration des délais de production, sans qu'il y ait lieu de s'arrêter à la circonstance que l'intérêt à le faire procéderait d'un fait postérieur au règlement provisoire, dès lors que celui-ci ne constitue pas un terme après lequel les demandes de collocation ne pouvaient être modifiées; - Attendu, par suite, qu'en statuant ainsi qu'il l'a fait, l'arrêt attaqué, dûment motivé, n'a pas violé les textes visés au moyen;

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cier, avant de s'en rapporter à justice, avait conclu à la confirmation du jugement, en prenant ainsi nettement parti contre le créancier contesté. Il pouvait y avoir eu quelque sévérité de la part des juges du fond à baser sur ce fait la condamnation contre une partie qui n'avait aucun intérêt au débat; mais leur décision sur ce point de fait était souveraine, les tribunaux, qui sont investis, quant aux dépens, d'un pouvoir discrétionnaire, étant autorisés à laisser à la charge d'une partie, alors même

Sur le deuxième moyen :- Attendu que la partie qui s'en rapporte à justice peut être condamnée aux dépens; que, d'autre part, si le juge n'est saisi que des questions posées par les dernières conclusions prises devant lui, et ne doit statuer que sur les questions que ces conclusions lui soumettent, il lui appartient néanmoins, au point de vue des dépens, de tenir compte des conclusions antérieures, en ce sens que la partie, qui, après avoir modifié une prétention mal fondée, y substitue des conclusions nouvelles, peut cependant être condamnée aux dépens comme ayant succombé dans ses prétentions originaires; -Et attendu que si, dans ses dernières conclusions, seules reproduites aux qualités, et les seules sur lesquelles le juge avait à prononcer, Monnier, avoué de Théron, s'en est remis à droit, il résulte de l'arrêt attaqué qu'il avait, dans d'autres conclusions, formellement contesté la demande de Nicolas, et conclu à la confirmation du jugement entrepris; - Attendu que, rapprochée des règles du droit susénoncées, cette constatation fournit une base légale à la décision rendue; qu'en prononçant, dans les termes où il l'a fait, la condamnation des demandeurs en cassation aux dépens, l'arrêt attaqué n'a, ni commis un excès de pouvoirs, ni violé les textes visés au moyen; Rejette, etc.

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Du 27 janv. 1913. Ch. req MM. Tanon, prés.; Poupardin, rapp.; Blondel, av. gén. concl. conf.); de Lalande, av.

CASS.-CIV. 12 avril 1910 et 7 mai 1913.

Louage de services, Durée iINDÉTERMINÉE, CONGÉ, ABUS du droit, faute, Contrôle DE LA COUR DE CASSATION, Délai de préVenance, Epoque défavorable, GRATIFICATIONS (Rép., vo Louage d'ouvrage, de services et d'industrie, n. 316 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 694 et s.).

Le contrat de louage de services fait sans détermination de durée pouvant toujours cesser par la volonté d'un seul des contractants, l'auteur de la résiliation ne peut être condamné à des dommages-intérêts envers l'autre partie que si l'on prouve contre lui, outre un préjudice subi, l'existence d'une faute légalement imputable (1) (C. civ., 1780; C. trav., liv. ler, art. 23: L. 27 déc. 1890). 1re espèce (sol. implic.), et 2o espèce.

Les juges du fond doivent alors relever les circonstances desquelles ils font résulter l'existence de la faute, pour permettre à la Cour de cassation d'exercer son contrôle (2). 1re espèce.

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qu'elle ne succombe pas au fond, la totalité ou une partie des frais occasionnés par son fait ou par ses agissements. V. Cass. 30 janv. 1912 (S. et P. 1912. 1.272; Pand. pér., 1912.1.272), et les renvois.

(1) Jurisprudence constante. V. Cass. 27 déc. 1911 (Supra, 1гe part., p. 126), et le renvoi.

(2) Point certain. V. Cass. 18 juill. 1899 (8. et P. 1899.1.508; Pand. pér., 1900.1.80), et les renvois; 28 mars 1904 (S. et P. 1904.1.264; Pand. pér., 1905.1.118).

Ainsi, les juges du fond refusent à bon droit de reconnaitre comme constitutive d'une faute, justifiant l'allocation de dommages-intérêts, la circonstance que le patron, qui a congédié un ouvrier, en lui offrant, avec son salaire, le paiement d'une indemnité de congédiement conforme aux usages de la profession, a usé de son droit à une date où le renvoi privait l'ouvrier des gratifications annuelles que lui auraient données les clients du patron (1) (C. civ., 1382, 1780; C. trav., liv. 1er, art. 23; L. 27 déc. 1890). 2e espèce.

Au contraire, manque de base légale le jugement qui, tout en constatant que le patron s'est conforme à l'usage local en congédiant un ouvrier sans préavis et sans indemnité, le condamne néanmoins à payer des dommages-intérêts à cet ouvrier, sans relever à sa charge d'autre circonstance que la résiliation même du contrat, et en se bornant à déclarer qu'il a commis une faute en renvoyant l'ouvrier au milieu de la semaine, sans en attendre la fin pour le congédier (2) (Id.). Ire espèce. Ire Espèce.

(Vve Charriaud C. Sola). ARRÊT.

LA COUR; Sur les deux moyens réunis : Vu l'art. 1780, C. civ., complété par l'art. 1er de la loi du 27 déc. 1890; Attendu qu'aux termes de cet article, la rupture du contrat de louage de services fait sans détermination de durée, qui peut toujours cesser par la volonté d'une des parties contractantes, sauf conventions ou usages contraires, donne lieu à des dommages-intérêts, lorsque, provoquée par la volonté d'un seul des contractants, elle constitue l'exercice abusif et préjudiciable du droit qui lui appartient; que le juge du fond doit alors relever les circonstances desquelles il fait résulter l'existence de la faute, pour permettre à la Cour de cassation d'exercer son contrôle; · Attendu

que le jugement attaqué, après avoir constaté l'existence d'un usage local, d'après lequel les patrons et ouvriers tonneliers d'Oran ont réciproquement le droit de ré

(1-2) Le patron, qui a congédié un ouvrier ou employé en observant les délais de préavis fixés par la convention ou l'usage, ou qui, ce qui revient au même, l'a congédié immédiatement, conformément à la convention ou à l'usage qui dispensent les parties de l'observation d'un délai de préavis, peut être condamné à des dommagesintérêts, s'il a abusé de son droit de résiliation, et, par la faute ainsi commise, a causé un préjudice à l'ouvrier ou employé. V. Cass. 18 déc. 1907 (sol. implic.), 28 janv. et 26 mai 1908 (S. et P. 1908.1.241; Pand. pér., 1908.1.241), la note de M. Ruben de Couder et les renvois; Bordeaux, 22 janv. 1912 (S. et P. 1912.2.248; Pand. pér., 1912.2.248), et les renvois.

Le fait de renvoyer un ouvrier ou employé à une époque peu favorable pour lui, soit par la difficulté qu'il éprouvera à se placer, soit parce que le renvoi le privera de gratifications qu'il aurait touchées, s'il était resté un peu plus de temps au service du patron, constitue-t-il une faute, de nature à justifier l'allocation de dommages-intérêts? Un jugement l'a admis pour un concierge renvoyé à l'époque des étrennes. V. Trib. de paix de Paris, 10 déc. 1903 (S. et P. 1904.2.84; Pand. pér.,

silier le contrat de travail qui les lie, sans préavis et sans aucune indemnité, a condamné la veuve Charriaud fils à payer des dommages-intérêts à Sola, son ouvrier, congédié conformément à l'usage, et n'a relevé à sa charge d'autre circonstance que la résiliation même du contrat; qu'il se borne, en effet, à déclarer qu'elle a commis une faute en congédiant le jeudi, au milieu de la semaine, le sieur Sola, abusant ainsi de son droit de résiliation; qu'elle aurait pu ne pas se montrer si sẻvère envers cet ouvrier, et attendre au moins la fin de la semaine pour le congédier; qu'en statuant ainsi, il n'a pas donné une base légale à sa décision et qu'il a, par suite, violé l'article susvisé; Casse le jugement rendu par le conseil des prud'hommes d'Oran le 3 déc. 1908, etc. Du 12 avril 1910. Ch. civ. - MM. Ballot-Beaupré, 1er prés.; Dupont, rapp.; Merillon, av. gén. (concl. conf.).

2 Espèce. (Drouet C. Clouard). -- ARRÊT. LA COUR; Sur le moyen unique, pris de la violation de l'art. 1780, C. civ.: Attendu qu'il est déclaré par le jugement attaqué que Drouet, au service de Clouard, brasseur au Havre, en qualité de charretier-livreur, a été congédié le 7 déc. 1912; que Clouard faisait offre du montant des salaires dus et d'une indemnité de congédiement conforme aux usages de la profession, représentant le salaire de la semaine qui a suivi le jour où l'employé avait quitté le service de son patron; Attendu que le litige portait uniquement sur les dommages-intérêts réclamés par Drouet pour réparation du préjudice causé par suite du renvoi à une date qui le privait de recevoir des clients les gratifications annuelles »;

Mais attendu qu'aux termes

de l'art. 1780, C. civ., reproduit par l'art. 23, $4, C. trav., le contrat de louage de services, fait sans détermination de durée, peut toujours cesser par la volonté d'un seul des contractants; que l'auteur de la résiliation ne peut donc être condamné à des dommages-intérêts envers l'autre par

1904.2.192). Encore ce jugement invoquait-il, à l'appui de la condamnation à des dommages-intérête qu'il prononçait, d'autres circonstances de nature à justifier la solution qu'il avait donnée, circonstances ne permettant pas de voir dans cette solution une décision de principe, qui serait d'ailleurs en opposition avec les tendances de la Cour de cassation, « peu favorable, comme l'observation en a été faite par M. Ruben de Couder, dans la note (n. II) sous Cass. 18 déc. 1907 et autres arrêts précités, aux restrictions susceptibles d'entraver la liberté des parties », et qui « veut que cette liberté s'exerce dans la plus large mesure, et assure à chacun, à l'ouvrier comme au patron, leur pleine indépendance ». La Cour de cassation avait déjà, avant les arrêts ci-dessus, décidé qu'il n'y a pas faute du patron à congédier l'ouvrier ou employé sans lui laisser le temps nécessaire pour trouver un emploi équivalent (V. Cass. 9 juill. 1901, S. et P. 1902.1.114; Pand, pér., 1901.7.104), ni à renvoyer, en observant les délais d'usage, sans lui accorder un délai plus long, un ouvrier qui est depuis longtemps à son ser. vice (V. Cass. 16 mai 1908, précité), ni à congédier,

tie que si l'on prouve contre lui, outre un préjudice subi, l'existence d'une faute légalement imputable; Attendu qu'en refusant de reconnaître comme constitutive d'une faute, justifiant l'allocation de dommages-intérêts, la circonstance que le patron avait fait usage de son droit, sans se préoccuper de l'époque de l'année à laquelle intervenait la résiliation du contrat, le jugement attaqué n'a pas violé l'article de loi visé par le moyen; Rejette le pourvoi formé contre le jugement rendu le 30 janv. 1913 par le tribunal civil du Havre, etc.

Du 7 mai 1913. Ch. civ. MM. Baudouin, 1er prés.; Potier, rapp.; Mérillon, av. gén. (concl. conf.).

CASS.-CIV. 12 mars 1913.

LOUAGE DE SERVICES, DURÉE INDÉTERMINÉE, CONGE, DÉLAI DE PRÉAVIS, USAGE, POUVOIR DU JUGE, APPRÉCIATION SOUVERAINE, EMPLOYÉ, SALAIRE FIXE, SALAIRE A LA COMMISSION (Rép., v° Louage d'ouvrage, de services et d'industrie, n. 226 et s.; Pand. Rép., v Louage d'ouvrage et d'industrie, n. 694 et s.).

Les juges du fond, qui constatent que, d'après l'usage d'une profession, les employés engagés au mois, moyennant un salaire fixe et invariable, ont seuls droit à un délai de congédiement d'un mois, et que les employés payés à la commission peuvent, au contraire, étre congédiés sans préavis, constatation qui est souveraine, - décident à bon droit qu'un employé, engagé moyennant une remise de 15 p. 100 sur les recettes, a pu être congédié sans détai, alors même qu'un minimum de 300 fr. par mois lui avait été assuré (3) (C. civ., 1134, 1780; C. trav., liv. 1o, art. 23).

(Trémoureux C. Blanc et Lescure).
ARRÊT.

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LA COUR; Attendu qu'il résulte des constatations du jugement attaqué que Trémoureux est entré dans la maison des

en observant le délai d'usage, un ouvrier atteint de diminution de capacité à la suite d'une maladie grave. V. Cass. 28 janv. 1908, précité. Les arrêts ci-dessus, qui refusent de considérer comme une faute du patron le renvoi de l'ouvrier à une époque peu favorable pour ses intérêts, rentrent dans cette jurisprudence.

(3) La question de savoir quel est, dans une profession, d'après l'usage, le délai de préavis à observer en cas de rupture du contrat de travail, étant abandonnée à l'appréciation souveraine des juges du fond (V. Cass. 8 janv. 1912, S. et P. 1912.1.168; Pand. per., 1912.1.168, et la note), le seul point sur lequel la Cour de cassation pouvait faire porter son examen, dans l'espèce, était celui de savoir si les juges du fond n'avaient pas méconnu, en la dénaturant, la convention des parties, en faisant rentrer dans la catégorie des employés à la commission, et non dans celle des employés à salaire fixe et variable, un employé rémunéré par une remise proportionnelle sur les recettes, avec un minimum assuré. La solution des juges du fond était à l'abri de toute critique, le minimum de salaire garanti ne modifiant pas la nature de l'engagement.

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sieurs Blanc et Lescure, fabricants de jeux automatiques, le 1er août 1908, en qualité de garçon de recettes, et qu'il en est sorti le 3 oct. 1912; qu'à la suite du congé qui lui avait été donné, il a cité ses patrons devant le conseil des prud'hommes du département de la Seine, à l'effet de les faire condamner à lui payer une somme de 30 fr. pour solde de salaires, et une somme de 350 fr., à titre d'indemnité pour brusque renvoi; que cette demandé a été accueillie par jugement du conseil des prud'hommes; mais que, sur appel, le tribunal de la Seine, tout en maintenant le chef de condamnation relatif au solde de salaires, a infirmé ledit jugement, en ce qui concerne la somme allouée pour le congédiement, et a décidé qu'à cet égard, Trémoureux n'avait droit à aucune indemnité; Attendu que le pourvoi soutient que, si Trémoureux touchait une commission de 15 p. 100 sur les bénéfices réalisés par la maison, on lui avait garanti un minimum de 300 fr. par mois, qu'il devait donc être considéré comme un employé recevant un salaire mensuel fixe, et qu'il ne pouvait, par suite, être congédié qu'après un préavis d'un mois; Mais attendu que le jugement attaqué constate que, d'après les usages de la profession des parties, les employés engagés au mois, moyennant un salaire fixe et invariable, ont seuls droit à un délai de congédiement d'un mois, que les employés payés à la commission peuvent, au contraire, être congédiés sans préavis, et que cette constatation est souveraine; Attendu qu'en décidant, dans ces circonstances, que Trémoureux, engagé moyennant une remise de 15 p. 100 sur les recettes, ne pouvait être classé dans la catégorie des employés recevant un salaire fixe et invariable, alors même qu'un minimum de 300 fr. par mois lui aurait été promis, et en refusant, par suite, de lui allouer une indemnité pour brusque congédiement, le tribunal n'a pas méconnu le caractère et les effets légaux de la convention intervenue entre les parties, et n'a violé aucune loi; - Rejette le pourvoi contre le jugement rendu le 31 janv. 1913 par le tribunal civil de la Seine, etc. Du 12 mars 1913. Ch. civ. MM. Durand, prés.; Rau, rapp.; Lombard, av. gén. (concl. conf.).

CASS.-civ. 17 juin 1913. LOUAGE DE SERVICES, DURÉE INDÉTERMINÉE,

(1-2) Jurisprudence constante. V. sur le premier point, Cass. 30 oct. 1911 (S. et P. 1912.1.511; Pand. pér., 1912.1.511); 27 déc. 1911 (Supra, 1re part., p. 126), et les renvois; et sur le second point, Cass. 18 déc. 1907 (sol. implic.), 28 janv. et 26 mai 1908 (S. et P. 1908.1.241; Pand. pér., 1908.1.241), la note de M. Ruben de Couder et les renvois.

(3) Par sa jurisprudence aujourd'hui bien établie, la Cour de cassation se réserve le droit d'apprécier si les faits souverainement constatés par les juges du fond présentent les caractères juridiques de la faute et engagent la responsabilité de leur auteur. V. Cass. 28 févr. 1910 (S. et P. 1911.1.329; Pand. pér., 1911.1.329), la note de M. Appert et les

CONGÉ, ABUS DU DROIT, FAUTE, PREUVE, POUVOIR DU JUGE, CONTRÔLE DE LA COUR DE CASSATION, CHÔMAGE, REFUS D'UN TRAVAIL DIFFÉRENT (Rép., v Louage d'ouvrage, de services et d'industrie, n. 316 et s. Pand. Rép., vo Louage d'ouvrage et d'industrie, n. 694 et s., 760 et s.).

Si la résiliation, par la volonté d'un seul des contractants, d'un contrat de louage de services fait sans détermination de durée, peut donner lieu à des dommagesintérêts au profit de celui qui la subit, ce n'est qu'autant qu'elle constitue, de la part de celui qui l'impose, un abus du droit (1), dont la preuve incombe au demandeur (2) (C. civ., 1315, 1382, 1780; C. trav., liv. ler, art. 23).

D'autre part, s'il appartient aux juges du fond de constater souverainement les circonstances d'où dérive la responsabilité d'un fait dommageable, l'appréciation par laquelle ils attribuent à ces circonstances le caractère légal d'une faute imputable à l'une des parties est susceptible_d'être revisée par la Cour de cassation (3) (C. civ., 1382, 1383).

Spécialement, il n'y a pas, de la part du patron, usage abusif de son droit de résiliation, présentant les caractères d'une faute, lorsque, après un chômage d'une certaine durée pour manque de travail, l'ouvrier a refusé d'accepter le seul travail dont le patron disposait et qu'il lui offrait (4) (C. civ., 1382, 1383; C. trav., liv. 1er, art. 23).

(Soc. des Huileries de Roubaix C. Cuvelier et autres).

Au cours de l'été 1912, les hommes de peine employés par la Société des Huileries de Roubaix se sont trouvés contraints au chômage par suite du manque de travail. Pour leur permettre de pourvoir à leur subsistance, la société, qui n'avait pas d'autre travail à leur offrir, leur a proposé de les employer au déchargement des bateaux. Les ouvriers ont refusé de faire ce travail, et ont assigné la société devant le conseil des prud'hommes de Roubaix, en paiement, à chacun d'eux, d'une somme de 52 fr., représentant deux semaines de salaires, pour indemnité de brusque renvoi. 30 oct. 1912, jugement du conseil de prud'hommes, qui condamne la société à payer à chacun des ouvriers une semaine de salaires, soit 26 fr. 40, à titre d'indemnité,

renvois. V. spécialement, sur l'exercice de ce droit de contrôle au cas de rupture prétendue abusive du louage de services à durée indéterminée, Cass. 20 mars 1895 (2 arrêts) (S. et P. 1895.1.313, et la note, 6e col.; Pand. pér., 1895.1.489); 28 juill. 1897 (S. et P. 1899.1.33), et le renvoi. V. aussi, Cass. 19 juin 1897 et 2 mars 1898 (S. et P. 1899.1.33).

(4) Dans le louage de services à durée indéterminée, le renvoi de l'ouvrier est légitime de la part du patron quand il n'a plus de travail à lui donner (V. Cass. 20 mars 1895, 2o espèce, S. et P. 1895.1.313; Pand. pér., 1895.1.489); le patron, en effet, n'excède pas son droit en réduisant son personnel. V. Trib. de Grenoble, 23 janv. 1893

par les motifs suivants : « Attendu que c'est à juste titre que les demandeurs ont refusé de faire le travail de chargement au bateau, qui est l'ouvrage spécial des débardeurs, qui, pour ce travail pénible et dangereux, touchent un salaire plus que double de celui que les demandeurs gagnaient en travaillant; Attendu que ce n'était pas là un motif plausible de renvoi de ces ouvriers, et qu'en les congédiant dans ces conditions, la Société des Huileries a commis une faute et causé un réel dommage à ces ouvriers ».

POURVOI en cassation par la Société des Huileries de Roubaix.

ARRÊT.

LA COUR; Vu l'art. 23, C. trav.; Attendu, d'une part, que, si la résiliation, par la volonté d'un seul des contractants, d'un contrat de louage de services fait sans détermination de durée peut donner lieu à des dommages-intérêts au profit de celui qui la subit, ce n'est qu'autant qu'elle constitue, de la part de celui qui l'impose, un abus du droit, dont la preuve incombe au demandeur; Attendu, d'autre part, que, s'il appartient aux juges du fond de constater souverainement les circonstances d'où dérive la responsabilité d'un fait dommageable, l'appréciation par laquelle ils attribuent à ces circonstances le caractère légal d'une faute imputable à l'une des parties est susceptible d'être revisée par la Cour de cassation; tendu que le jugement attaqué a condamné la Société des Huileries de Roubaix à payer une indemnité à ses ouvriers, Cuvelier et autres, pour avoir abusé de son droit de résiliation; que, des constatations du jugement, il résulte que la Société des Huileries, après un chômage de quinze jours pour manque de travail, a proposé à ses ouvriers de travailler au chargement d'un bateau, et que, sur leur refus d'accepter le seul travail dont elle disposait, elle les a congédiés; que les faits ainsi constatés et précisés ne présentent pas les caractères juridiques de la faute;

At

D'où il suit qu'en statuant comme il l'a fait, le conseil des prud'hommes de Roubaix a violé l'article de loi ci-dessus visé; Casse, etc.

Du 17 juin 1913. - Ch. civ. MM. Baudouin, le prés.; Douarche, rapp.; Lombard, av. gén. (concl. conf.); Cail, av.

(S. et P. 1895.2.253); Bastia, 27 févr. 1893, sous Cass. 14 nov. 1894, 1er arrêt (S. et P. 1895.1. 260). Il a même été jugé que le patron peut, en ce cas, librement choisir les ouvriers à renvoyer. V. Trib. de Grenoble, 23 janv. 1893, précité. Adde sur ces différents points, Baudry-Lacantinerie et Wahl, Du louage, 3o éd., t. 2, 1o part., n. 2941 et s. On ne peut donc pas faire grief à un patron, qui ne peut plus fournir à une catégorie de ses ouvriers leur travail habituel, et qui aurait ainsi une cause légitime de renvoi, de les avoir congédiés, sur leur refus d'accepter un travail, différent, à la vérité, de celui auquel ils étaient d'ordinaire employés, mais qui était le seul dont il disposait.

CASS.-REQ. 28 juin 1910.

1° QUOTITÉ DISPONIBLE, CALCUL, CRÉANCES IRRÉCOUVRABLES, CRÉANCE CONTRE L'HERITIER RÉSERVATAIRE (Rép., vo Quotité disponible et réserve, n. 325 et s.; Pand. Rép., Vo Donations et testaments, n. 2627 et s.)

20 RÉSERVE (SUCCESSION ET DONATION), CRÉANCES IRRÉCOUVRABLES, CRÉANCE CONTRE L'HÉRITIER, RÉUNION A LA MASSE, IMPUTATION, AVANCEMENT D'HOIRIE, PRÈT, MOTIFS DE JUGEMENT OU D'ARRÊT, CONTRADICTION, QUOTITÉ DISPONIBLE (Rép., vo Quotité disponible et réserve, n. 511 et s.; Pand. Rép., vo Donations et testaments, n. 2880 et s.).

1° Si, en principe, les créances irrécouvrables ne doivent pas être rapportées à la

(1-2) Il est de principe incontesté que les créances irrécouvrables ne doivent pas entrer dans la masse héréditaire formée pour le calcul de la quotité disponible et de la réserve. V. Trib. de Clamecy, 7 juill. 1899, et Bourges, 13 juin 1900, sous Cass. 19 juin 1901 (S. et P. 1903.1.459; Pand. pér., 1902.1.178), la note et les autorités citées. C'est qu'en effet, la masse ne peut comprendre que des valeurs réelles, non des valeurs qui n'ont d'existence que sur le papier, et qui ne constituent que des titres nus, sans efficacité. Il s'agit de déterminer la consistance des biens, et le mot biens implique des facultés actives, des éléments pécuniaires. Mais le principe ne doit-il pas recevoir exception dans certains cas?

La question s'est posée à propos du legs de libération, et elle se présente, dans notre espèce, à propos d'une créance contre un héritier réservataire insolvable. Encore qu'il ne s'agisse pas, dans l'affaire actuelle, d'un legs de libération, nous croyons utile, pour mieux dégager la théorie générale applicable aux créances irrécouvrables, d'examiner la question sous ses deux faces : legs de libération, créance contre un héritier réservataire insolvable,

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I. On décide très généralement que la créance contre un débiteur insolvable doit être comptée pour le calcul de la quotité disponible, lorsqu'elle a fait l'objet d'un legs de libération. Il y a, écrit M. Demolombe, un cas où la créance de la succession contre un débiteur insolvable doit entrer dans la masse ; c'est lorsque la créance a été léguée au débiteur lui-même. Il est clair, en effet, que le débiteur, devant se payer par ses propres mains, doit être considéré comme solvable. C'est ce qu'Ulpien exprimait fort bien en ces termes : Cum debitori liberatio relinquitur, ipse sibi solvendo videtur; et quod ad se attinet dives est... (Dig., 1. 82, Ad leg. Falcid., liv. 35, tit. 2)» (Demolombe, Don. et test., t. 2, n. 277). Adde, Troplong, Don. et test., t. 2, n. 949; Saintes pès-Lescot, Don. et test., t. 2, n. 462. Comp. Bayle-Mouillard, sur Grenier, Don. et test., t. 4, n. 602, note a, p. 223 et 224.

Nous ne croyons pas que cette thèse soit exacte, et nous indiquons, tout d'abord, que, contrairement à ce qu'on affirme, ce n'était pas celle d'Ulpien. La loi 82, précitée, n'a pas du tout la signification qu'on lui attribue; elle a même une signification manifestement opposée. Ulpien dit, dans cette loi, que le legs de libération doit sortir à effet dans la mesure où la loi Falcidia le permet, que c'est seulement dans cette mesure que le débiteur sera libéré ; et, pour bien préciser sa pensée, il ajoute : « Si le débitear de 400, légataire de sa propre dette, est solvable jusqu'à concurrence de 100, c'est sur ANNÉE 1913. 7-8 cah.

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masse pour le calcul de la quotité disponible, il n'y a pas lieu de considérer comme telle une créance sur un héritier, dès lors que la liquidation de la succession lui fournit le moyen de se libérer, par suite de l'attribution qui lui est faite de la somme à concurrence de laquelle il se trouve par avance rempli de ses droits (1) (C. civ., 922). 2o Cette attribution doit se faire par imputation sur la réserve, en vertu du principe de droit et d'équité qui s'impose à tous les prétendants droit à une fraction d'une masse commune, et qui veut que, pour qu'aucun ne prenne plus que la part qui doit lui revenir, s'il arrive qu'un des copartageants ait déjà entre les mains une partie de la masse, il soit tenu de l'y remettre, afin que le tout soit partagé, et que, si le rapport en nature est impossible, les

ces 100 que sera calculée la quarte falcidie ». De bonne foi, est-il possible de se méprendre sur sa pensée? Si la quarte falcidie est calculée sur 100, n'est-ce pas que la créance ne figure dans la masse que pour sa valeur réelle, et non point pour son chiffre total, pour 100, non pour 400? Au reste, cette conséquence n'est que la déduction nécessaire de la règle posée par le célèbre jurisconsulte dans la loi précitée, à savoir que la succession ne comprend que ce qui peut en être retiré, quod ex hæreditate refici potest.

On nous dit : le débiteur doit être considéré comme solvable, parce qu'il trouve, comme légataire, de quoi s'acquitter de sa dette. L'argument n'est que spécieux. Sans doute, si le legs de libération n'excède pas la quotité disponible, le débiteur se trouvera libéré, et, de ce chef, il cessera d'être insolvable. Mais le problème n'est pas là. Il ne s'agit pas de savoir si la dette sera éteinte, mais si, pour établir la masse successorale, on doit faire entrer en ligne de compte la créance qu'avait le de cujus contre le légataire, et c'est tout autre chose. Or, si la masse héréditaire doit se composer des biens appartenant au défunt, et si la créance contre un débiteur insolvable n'est pas un bien véritable, la circonstance que cette créa ace est léguée au débiteur lui-même est absolument impuissante à en faire un bien accroissant la masse. Le patrimoine héréditaire n'est point augmenté de ce chef; il est, après le legs, ce qu'il était auparavant. Supposons qu'une succession comprenne 40.000 fr. de biens en nature et une créance de 40.000 fr. contre un débiteur insolvable. Que possédait effectivement le défunt? 40.000 fr. Comment se pourrait-il que sa succession s'enrichît de 40.000 fr., par le fait du legs de libération? Il y a enrichissement, au moins théorique, pour le débiteur, qui se trouve libéré de sa dette, mais non pour la succession. Et c'est pour bien marquer cette différence qu'Ulpien, dans la loi 82, précitée, a soin de dire que c'est par rapport à lui-même que le débiteur doit être considéré comme solvable : « ipse sibi solvendo videtur », que c'est par rapport à lui-même qu'il y a enrichissement, quod ad se attinet, dives est ».

On aboutirait, d'ailleurs, dans le système que nous combattons, à des résultats étranges, lorsque le legs de libération excède la quotité disponible. Suivons l'hypothèse proposée par M. Demolombe (op. cit., t. 2, n. 278 et 279. Adde, Troplong, op. cit., t. 2, n. 950; Bayle-Mouillard, sur Grenier, loc. cit.). Le patrimoine du défunt, qui laisse un enfant, se compose de 40.000 fr. de biens en nature et d'une créance de 20.000 fr. sur Primus, qui est insolvable. Le défunt a légué à Primus la totalité de la créance

autres communistes soient fondés à imputer sur la part qui lui revient la portion qu'il détient, et à prélever, sur les biens composant la masse, une fraction égale à celle dont leur copartageant est déjà muni (2) (C. civ., 843, 919, 922).

Et si, après avoir donné aux avances faites par le de cujus à son successible le caractère d'une dette, les juges emploient dans leur décision l'expression de donation en avancement d'hoirie, il n'en résulte pas une contradiction de motifs, de nature à entrainer cassation, alors qu'il résulte du contexte de la décision que les juges ont voulu seulement affirmer la pensée du de cujus que les avances par lui faites dans un but libéral à son successible constituaient un acompte de celui-ci sur la succession à recueillir, et devaient, à ce titre,

de 20.000 fr., et il a fait à Secundus un autre legs aussi de 20.000 fr. Si l'on compte la créance de 20.000 fr. contre Primus dans la masse, celle-ci comprend 60.000 fr., et la quotité disponible est de 30.000 fr. Les deux legs réunis s'élevant à 40.000 fr., il y a lieu à réduction dans la proportion de 1/4 pour chacun. La libération de Primus ne s'opère donc que pour les 3/4, soit pour 15 seulement, et il demeure débiteur de 5. Mais, Primus étant insolvable, cette créance de 5 est à retrancher de la succession pour la formation de la masse, qui sera réduite, dès lors, à 55.000 fr. La réserve de l'enfant sera donc de 27.500 fr. Et comme nous avons attribué à Primus 15.000 fr. sous forme de compensation, il ne reste plus pour Secundus que 12.500 fr. On arrive donc à ce résultat singulier que les deux légataires subissent une réduction différente, alors que, d'après l'art. 926, C. civ., la réduction doit être faite au marc le franc sur tous les legs. Une pareille conséquence est la condamnation du système.

Supposons, au contraire, que la créance contre Primus n'entre pas en ligne de compte; nous dirons le patrimoine héréditaire est de 40.000 fr., et la quotité disponible de 20.000 fr. Cette quotité disponible de 20.000 fr. appartiendra tout entière à Secundus, Primus n'y pouvant prétendre, puisqu'il est libéré par l'effet du lege, et n'a, en dehors de cette libération, aucun droit à exercer contre l'hérédité.

II. La règle applicable au cas d'un legs de libération fait à un débiteur insolvable doit-elle être suivie, lorsque le débiteur insolvable est, non plus un légataire, mais l'héritier à réserve du de cujus? Il semble bien qu'il n'y a aucune raison de distinguer entre les deux cas, car la créance du de cujus est une valeur nulle, quelle que soit la personne du débiteur.

Mais ici intervient un autre principe, qui doit conduire à une solution différente. Ce principe, c'est que le prêt fait à un successible, et non réclamé par le prêteur sa vie durant, doit être assimi.é, en ce qui concerne le calcul de la réserve, à une donation proprement dite, et, comme tel, imputé sur la réserve du débiteur.

L'assimilation entre le prêt et la donation est de tradition constante, et c'est elle qui a motivé l'obligation de rapporter les dettes, édictée par le Code civil. V. Baudry-Lacantinerie et Wahl, Tr. des succ., 8° éd., t. 3, n. 2946. On pourra objecter, sans doute, qu'il ne s'agit pas ici, en matière de réduction, de rapport réel; mais l'argument n'en reste pas moins, et très pressant, comme argument d'analogie.

Au reste, nos anciens auteurs n'hésitaient pas à I PART. 45

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