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LA COUR; Attendu qu'il résulte des constatations du jugement attaqué que le mineur Charles Poisson, étudiant en droit, attaché comme clerc à l'étude de Me Refoule, avoué, exerce cette fonction, non dans le but de se procurer des moyens d'existence, mais uniquement en vue de se préparer à une profession libérale, et que les modiques rémunérations qu'il peut recevoir, au cours de ce stage, ont le caractère de simples gratifications; - Attendu qu'en cet état des faits souverainement constatés, c'est à bon droit que le tribunal d'Orléans a décidé que le jeune Charles Poisson n'était pas un salarié, au sens de l'art. 1er de la loi du 5 avril 1910, et qu'il a confirmé la sentence du juge de paix du canton sud de la ville d'Orléans, ayant ordonné la radiation du nom de cet intéressé de la liste des assurés obligatoires de la commune d'Orléans; qu'en statuant ainsi, il n'a violé aucune loi;

du salaire et des obligations qui caractérisent le contrat de louage de services.

Le salaire est le prix du travail. En d'autres termes, l'obligation de travail, qui est contractée par l'ouvrier, a pour corollaire l'obligation pour le patron de payer un salaire. L'une doit être l'équivalent de l'autre dans l'intention commune des parties; par suite, le prix est en rapport avec l'importance du travail.

Ces caractères apparaissent avec évidence dans la rémunération promise par un officier ministériel à ses clercs professionnels (V. Trib. d'Yssingeaux, 6 déc. 1912, Gaz. Pal., 1913.1.39; Sachet, Tr. de la législ. sur les retr. ouvr., 1г et 2o éd., n. 122; Pothémont, La législ. des retr. ouvr., n. 130; Salain, Les retr. ourr. et pays., 2o éd., n. 7, p. 69), ou par une administration hospitalière à ses infirmières laïques. V. Sachet, op. cit., n. 169. Pourquoi peut-il en être autrement, quand, dans un contrat ayant pour objet des prestations respectivement identiques, le prestataire est un clerc amateur, ou une infirmière appartenant à une congrégation religieuse?

Le clerc amateur est celui qui travaille, non pour gagner une rémunération, mais pour s'instruire. L'obligation qu'il contracte de collaborer aux travaux de l'étude a pour corollaire celle que l'officier ministériel prend envers lui de l'aider de ses conseils et de l'initier, par lui-même ou par ses autres clercs, à la pratique des affaires. Si une minime rétribution est parfois stipulée, elle ne l'est qu'accessoirement, à titre de simple encouragement; on ne saurait donc y voir l'équivalent du travail fourni, et c'est pourquoi il n'y a pas contrat de louage de services, et, partant, pas d'assujettissement à la loi de 1910. V. en ce sens, Trib. d'Orléans, 22 sept. 1911 (Gaz. Pal., 1911.2.527), rendu dans la présente affaire; Trib. de Caen, 22 janv. 1913 (Gaz. Pal., 1913.1.477); Pinot et

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LA COUR; Sur le moyen unique, tiré de la violation de l'art. Îer de la loi du 5 avril 1910, sur les retraites ouvrières et paysannes: Attendu que, pour déclarer que la demoiselle Clara Huard, de la congrégation des Filles de la Sagesse de SaintLaurent-sur-Sèvre, employée à l'hôpital de La Roche-sur-Yon, en vertu d'un traité intervenu, le 17 janv. 1867, entre le directeur de cet établissement et la supérieure générale de la congrégation, ne serait pas inscrite sur la liste des assurés obligatoires de la commune de La Roche-sur-Yon, le jugement attaqué s'est fondé sur ce que, ni au regard de l'administration de l'hospice, ni même au regard de leur communauté, les Filles de la Sagesse ne pourraient être considérées comme des locateurs de service, et, par suite, assimilables à des salariés; Attendu que, en statuant ainsi, ledit jugement n'a pas violé le texte de loi invoqué par le pourvoi; — Attendu, en effet, d'une part, que l'art. 7 du traité susmentionné du 17 janv. 1867 porte réserve pour la supérieure de la congrégation du

Comolet-Tirman, Tr. des retr. ouvr., p. 31 et s.; Salaun, op. cit., n. 7, p. 69, note 2. Par certains côtés, ce contrat se rapproche de celui d'apprentissage, qui ne donne pas lieu à l'application de la loi de 1910, du moins quand il n'y a pas rémunération. V. Sachet, op. cit., n. 136; Pothémont, op. cit., n. 200; Pinot et Comolet-Tirman, op. et loc. cit. La condition sociale du clerc peut servir d'indication en cas de doute sur la nature du contrat; elle ne doit jamais être, à elle seule, un criterium suffisant pour distinguer un clerc amateur d'un clerc professionnel. Il arrive le plus souvent, en effet, qu'avant de devenir acquéreur d'un office ministériel, un jeune homme fasse un stage effectif de principal clerc et reçoive la rémunération attachée habituellement à ces fonctions. Cette rémunération constituera un salaire, et le contrat qui l'aura stipulée sera un louage de services.

La situation des religieuses infirmières est plus complexe. Elle comporte généralement, comme dans l'espèce rapportée plus haut, deux contrats distincts.

En premier lieu, la congrégation prend, au regard de l'administration hospitalière, l'engagement d'assurer avec son personnel le service des soins à donner aux malades, et elle stipule une rémunération en argent ou en nature, dont le taux est proportionné à l'importance des prestations promises. Ce contrat, que la commission de l'hospice est autorisée à passer, sous l'approbation préfectorale, avec la congrégation hospitalière autorisée, en vertu de l'art. 8 de la loi du 7 août 1851 (V. la note sous Cass. 29 mars 1909 et 6 juin 1910, S. et P. 1910.1.588; Pand. pér., 1910.1.583), est un contrat d'entreprise.

Comment ce contrat d'entreprise est-il exécuté? Au lieu de sous-traiter avec des infirmières, la congrégation emploie ses propres membres. Ceci nous amène à envisager, du moins au seul point de

droit de remplacer, ainsi qu'elle le juge convenable, les religieuses, employées à l'hôpital, par d'autres du même ordre; que, de cette disposition, le tribunal a pu déduire que la congrégation avait, en 1867, stipulé pour elle seule, et qu'ainsi, il ne s'était pas formé de lien de droit, ni, par suite, de contrat de travail entre les Filles de la Sagesse, considérées individuellement, et l'administration de l'hospice; Attendu, d'autre part, que, en dehors d'un contrat particulier ou d'une disposition spéciale des statuts, dont il n'est pas excipé dans l'espèce, la convention, par laquelle une congrégation s'engage à fournir à chacun de ses membres tout ce qui est nécessaire à leur existence, en échange de ce qu'elle-même reçoit d'eux, ne participe pas juridiquement de la nature du louage de services; Rejette le pourvoi formé contre le jugement rendu le 22 mai 1912 par le tribunal civil de La Roche-surYon, etc.

Du 30 oct. 1912. Ch. civ. MM. Baudouin, ler prés.; Lénard, rapp.; Mérillon, av. gen. (concl. conf.).

CASS.-Civ. 26 juin 1912.

RETRAITES OUVRIÈRES ET PAYSANNES, ASSURÉS OBLIGATOIRES, ASSURÉS FACULTATIFS, RÉMUNÉRATION ANNUELLE, CALCUL, SALAIRE EN NATURE, SECRÉTAIRE DE MAIRIE,

vue intéressant pour notre sujet, le contrat qui lie une religieuse infirmière à sa propre communauté. La religieuse infirmière s'engage vis-à-vis de sa communauté à soigner les malades et à accomplir toutes les prestations inhérentes au service de l'hôpital. Que recoit-elle en échange? La nourriture, le logement et l'entretien, rien de plus, quelle que soit l'importance ou la difficulté de sa tâche. Et encore a-t-elle, en général, versé au moment de sa prise de voile une dot dont les intérêts suffiraient à sa subsistance. On ne peut donc pas dire que la valeur de son travail trouve un équivalent dans le montant des frais dont la communauté assume la charge. En réalité, chaque religieuse prise individuellement est liée par son vœu de pauvreté, et n'obéit, en travaillant pour sa communauté, qu'à une pensée pieuse et charitable.

Que la communauté elle-même réalise des bénéfices dans le contrat d'entreprise conclu avec l'administration hospitalière, cela est possible. Mais de tels bénéfices, s'il s'en produit, restent dans sa caisse ou reçoivent des affectations diverses, sans que, dans aucun cas, ils puissent être partagés entre ses membres. Ici encore, on n'aperçoit aucun élément même indirect de salaire.

L'absence de salaire excluant tout contrat de louage de services, nous ne pouvons qu'approuver la solution de la Cour suprême. V. dans le même sens, Trib. du Mans, 28 sept. 1911 (Gaz. Pal., 1911.2.540); Salaün, op. cit., n. 9, p. 73 et e. V. aussi Pothémont, op. cit., n. 139. V. égal., d'une manière générale, pour les religieuses gardes-malades, Trib. de Rouen, 6 févr. 1912 (Rec. de Rouen, 1912, p. 57).

ADRIEN SACHET, Premier président de la Cour de Montpellier.

(1) V. la note qui précède.

LOGEMENT GRATUIT (Rép., vo Retraites ouvrières, n. 1 et s.; Pand. Rép., v° Retraites et pensions, n. 1654 et s.).

Le secrétaire de mairie, qui, jouissant d'un traitement annuel de 3.000 fr., est, en outre, logé gratuitement dans les dépendances de la mairie, est, quelle que puisse être la valeur annuelle de ce logement, en possession d'une rémunération ou d'un salaire annuel supérieur à 3.000 fr., el, par suite, il ne peut être inscrit sur la liste des assurés obligatoires (1) (L. 5 avril 1910, art. 10, $5).

Mais il peut être inscrit sur les listes des assurés facultatifs (si sa rémunération annuelle n'excède pas 5.000 fr.) (2) (L. 5 avril 1910, art. 36, $ 5). Motifs.

(Préfet d'Ille-et-Vilaine C. Dulondel).

ARRÊT.

LA COUR; Attendu qu'il résulte des énonciations et constatations du jugement attaqué que Dulondel, secrétaire de la mairie de Vitré, est rémunéré de cette fonction par la ville de Vitré, au moyen de 1o un traitement annuel de 3.000 fr.; 2o l'attribution, dans les dépendances de la mairie, d'un logement gratuit d'une valeur d'environ 250 fr. par an; Attendu que, dans ces circonstances de fait, en confirmant la sentence du 11 nov. 1911, par laquelle le juge de paix de Vitré a admis la réclamation de Dulondel, rayé son nom de la liste des assurés obligatoires

(1-2) La question se pose, sur l'art. 10, 5, de la loi du o avril 1910, qui exclut de l'assurance obligatoire les salariés dont la « rémunération annuelle dépasse 3.000 fr., et sur l'art. 36, S5, de la même loi, qui admet à l'assurance facultative les salariés dont le « salaire annuel » est supérieur à 3.000 fr. et ne dépasse pas 5.000 fr., de savoir si l'on doit comprendre dans le calcul de la rémunération annuelle » ou du « salaire annuel », - expressions que la Cour de cassation, dans l'arrêt ci-dessus, rapproche avec raison, car elles doivent recevoir la même interprétation (V. Pinot et ComoletTirman, Tr. des retr. ouvr., p. 35 et s.), les prestations en nature (logement, nourriture, etc.) reçues par le salarié. L'affirmative ne peut, à notre avis, être sérieusement contestée. Le salaire comprend, en principe, toute la rémunération du travail, sans distinction entre les différentes formes dont cette rémunération est susceptible. Un texte formel eût été nécessaire pour exclure du salaire les prestations en nature. V. en ce sens, S. et P. Lois annotées de 1911, p. 47, note 57, in fine; Pand. pér., Lois annotées de 1911, p. 47, note 57, in fine; Sachet, Tr. de la législ. sur les retr. ouvr. et pays., 1 et 2 éd., n. 200 et s. Comp. Salaün, Les retr. ouvr. et pays., 2° éd., n. 129, p. 220. Bien que l'on ait soutenu l'opinion contraire (V. Pothémont, La législ. des retr, ouvr. et pays., n. 182; Pinot et Comolet-Tirman, op. cit., p. 36), en invoquant la réponse faite, au cours de la discussion à la Chambre des députés, par M. Viviani, ministre du travail, à une question de M. Th. Reinach Il n'y a aucun doute que le mot «< rémunération vise un salaire en argent, et qu'on ne devra pas y comprendre un salaire en nature (S. et P. Lois annotées de 1911, loc. cit.; Pand. pér., Lois annotées de 1911, loc. cit.), l'affirmation du ministre, quelle que soit l'autorité qui s'y atta

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de la ville de Vitré, et ordonné son inscription sur celle des assurés facultatifs de la même ville, le jugement attaqué fait une exacte application de la loi du 5 avril 1910, sur les retraites ouvrières et paysannes; Attendu, en effet, qu'aux termes des art. 1er et 36, § 5, n. 2, de ladite loi, les salariés des communes, dont le salaire annuel est supérieur à 3.000 fr., mais ne dépasse pas 5.000 fr., sont admis facultativement, en opérant les versements et en se soumettant aux conditions de la loi susvisée, au bénéfice d'une pension de retraite ;

Attendu qu'il résulte des cons tatations du jugement attaqué que Dulondel, jouissant d'un traitement annuel de 3.000 fr., et, en outre, d'un logement gratuit, est, quelle que puisse être la valeur annuelle de ce logement, en possession d'une rémunération ou d'un salaire annuel supérieur à 3.000 fr.; d'où il suit que le jugement attaqué n'a violé aucun des textes visés au pourvoi;- Rejette le pourvoi formé contre le jugement rendu le 6 déc. 1911 par le tribunal civil de Vitré, etc. Du 26 juin 1912. Ch. civ. MM. Baudouin, 1er prés.; Ditte, rapp.; Mérillon, av. gén. (concl. conf.).

CASS.-CIV. 8 avril 1913.

RETRAITES OUVRIÈRES ET PAYSANNES, LISTES D'ASSURÉS, RÉCLAMATIONS, JUGE DE PAIX,

che, ne saurait tenir lieu d'un texte. Elle est d'ailleurs en contradiction avec l'opinion précédemment émise par le rapporteur de la commission du Sénat. M. Cazeneuve, à l'appui d'un amendement visant expressément les gratifications de tout ordre, et spécialement les gratifications en nature, ayant dit: J'ai élaboré une rédaction qui, dans ma pensée, se confond avec la première partie du § 2 du texte de la commission, sauf que, dans le compte de 3.000 fr., je fais entrer les gratifications de tout ordre qui sont quelquefois considérables ", M. Cuvinot, rapporteur, a fait l'observation suivante, dans le but de montrer l'inutilité de l'amendement : « Nous sommes d'accord; nous avons mis rémunération et non salaire» (Sénat, séance du 9 déc. 1909; J. off. du 10, déb. parl., p. 1041 et 1042, S. et P. Lois annotées de 1911, p. 45, 3° col., note 57; Pand. pér., Lois annotées de 1911, p. 45 3° col., note 57). Enfin, le successeur de M. Viviani au ministère du travail s'est, dans sa circulaire du 29 mars 1911 (V. Sachet, op. cit., p. 561), rangé à l'opinion du rapporteur au Sénat.

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Sans doute, l'évaluation des prestations en nature peut parfois, dans la pratique, prêter à difficultés. Mais tel n'était pas le cas dans l'espèce cidessus. Le montant du salaire en argent avait atteint la limite maxima fixée pour les assurés obligatoires. Tout supplément en nature, si minime fût-il, devait avoir pour effet, s'il entrait en ligne de compte, de faire dépasser ce maximum et de placer le salarié dans la catégorie des assurés facultatifs. Or, en fait, la stipulation de ce salaire en nature n'était pas contestée.

A. S.

(3) Cette solution doit être approuvée. La demande en inscription sur les listes d'assurés a pour

MOYEN NOUVEAU, CERTIFICAT, DEMANDE NOUVELLE (Rép., vo Retraites ouvrières, n. 1 et s.; Pand. Rép., v° Retraites et pensions, n. 1654 et s.).

Celui auquel l'inscription sur la liste des assurés obligatoires a été refusée par le préfet, sur la production d'un certificat attestant qu'il travaillait, depuis plus de dix ans, comme ouvrier agricole, chez un patron, peut, sur le recours par lui formé devant le juge de paix contre cette décision préfectorale, et pour le justifier, produire à l'appui de son recours un nouveau certifical, attestant qu'il a travaillé, pendant le même laps de temps, en qualité de terrassier el de carrier, chez un autre patron; il y a là, non une demande nouvelle, dont le préfet eût dû être préalablement saisi, mais un moyen nouveau, que le demandeur est recevable à invoquer devant le juge de paix pour faire valoir son droit à l'inscription (3) (L. 5 avril 1910, art. 1er; Décr., 25 mars 1911, art. 196).

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objet de faire reconnaître à l'intéressé la qualité d'assuré, dans les termes de la loi du 5 avril 1910 (S. et P. Lois annotées de 1911, p. 1; Pand. pér., Lois annotées de 1911, p. 1). La reconnaissance de cette qualité suppose réunies chez le demandeur les conditions prescrites par la loi. Si, l'inscription étant refusée par le préfet, l'intéressé exerce un recours contre la décision préfectorale, l'objet de la demande est l'inscription; la production des pièces destinées à justifier de la qualité d'assuré n'est qu'un moyen d'en établir le bien fondé; l'intéressé doit donc être admis, devant le juge de paix, à justifier sa demande par des moyens autres que ceux qu'il a fait valoir devant le préfet, et à l'aide de pièces et certificats différents de ceux qu'il a produits devant le préfet ; il n'y a pas là une demande nouvelle. Cette solution présente d'autant moins d'inconvénients que le préfet, qui, aux termes de l'art. 196 du décret du 25 mars 1911 (S. et P. Lois annotées de 1911, p. 75 ; Pand. pér., Lois annotées de 1911, p. 75), doit recevoir un avertissement donné cinq jours au moins à l'avance par le juge de paix, est partie nécessaire à l'instance (V. Sachet, Tr. de la législ. sur les retr. ouvr., 1 et 2° éd., n. 1375), et est par là même en mesure de discuter les moyens que l'intéressé peut invoquer à l'appui de la demande en inscription.

Dès lors qu'il s'agit de moyens nouveaux, ils peuvent également être présentés devant le tribunal civil, statuant sur appel de la décision du juge de paix, l'art. 464, C. proc., ne prohibant, en appel, que les demandes nouvelles et non les moyens nouveaux. C'est, d'ailleurs, ce qui est admis, en matière électorale, devant les juges de paix, juges d'appel des décisions des commissions municipales. V.Cass. 13 mai 1895 (S. et P. 1896. 1.245; Pand. pér., 1896.7.84), et la note.

saire dans l'instance; Attendu, en fait, que Simian avait demandé son inscription en qualité de salarié sur la liste des assurés obligatoires de la commune de Villevayne, et qu'il avait fourni, à l'appui de sa demande, un certificat du sieur Pons, attestant qu'il occupait habituellement, depuis plus de dix ans, ledit Simian comme ouvrier agricole; que le préfet de l'Aveyron, estimant que Simian ne se trouvait pas dans les conditions prescrites par l'art. 1er de la loi du 5 avril 1910, a rejeté sa demande, mais que, sur le recours de l'intéressé contre cette décision, le juge de paix a ordonné son inscription, en se fondant sur un nouveau certificat, délivré par Vaysse, entrepreneur, et déclarant qu'il occupait depuis plus de dix ans Simian, en qualité de terrassier et carrier; que le préfet allègue vainement que cette demande ainsi modifiée constituait une demande nouvelle, qui aurait dû être préalablement portée devant lui avant d'être produite au juge de paix; qu'il ne s'agissait que d'un moyen nouveau, que l'intéressé était fondé à invoquer en justice de paix pour faire valoir son droit à l'inscription sur la liste des assurés obligatoires; qu'il appartenait au préfet, demandeur dans l'instance d'appel, de discuter devant le tribunal de Villefranche ce moyen, et de contester la valeur de ce document, régu lièrement versé au procès pendant devant les juges d'appel; qu'en décidant, dans ces circonstances, que le juge de paix ne pouvait statuer sur la demande de Simian au vu de ce nouveau certificat, sans que le préfet en ait préalablement connu, le tribunal a violé, par fausse application, le texte susvisé; Casse le jugement rendu

(1-2) La loi du 27 févr. 1880 (S. Lois annotées de 1880, p. 546. P. Lois, décr., etc. de 1880, p. 941) détermine les obligations du tuteur, en ce qui concerne l'aliénation des valeurs mobilières appartenant aux mineurs, la conversion en titres nominatifs des valeurs au porteur, et l'emploi des capitaux (art. 1er, 2, 3, 5 et 6), et charge le subrogé tuteur de surveiller l'accomplissement de ses prescriptions. « Le subrogé tuteur devra, porte l'art. 7, surveiller l'accomplissement des formalités prescrites par les articles précédents. Il devra, ei le tuteur ne s'y conforme pas, provoquer la réunion du conseil de famille, devant lequel le tuteur sera appelé à rendre compte de ses actes ». On s'accorde à reconnaître que, si le subrogé tuteur ne remplit pas ou remplit mal la mission de surveillance que la loi lui impose, il peut être déclaré responsable vis-à-vis du mineur. V. Cass. 29 juill. 1895 (S. et P. 1897.1.38; Pand. pér., 1896.1.116), et la note; Aubry et Rau, 5° éd., t. 1, p. 736, 117, texte et note 3; Planiol, Tr. élém. de dr. civ., 5o éd., t. 1o, n. 1874; F. Bonnet, Comment. de la loi du 27 févr. 1880, p. 35; Buchère, Comment. de la loi du 27 févr. 1880, n. 102; Bressolles, Explic. de la loi du 27 févr. 1880, p. 64 et s.; Deloison, Tr. des val., mob., n. 227. Mais le rôle du subrogé tuteur est un rôle de simple surveillance; le seul droit que lui confère expressément la loi, si le tuteur ne se conforme pas aux prescriptions légales, est de convoquer le conseil de famille, auquel il appartiendra de prendre les mesures que commandera la situation, et même de destituer le tuteur. V. Aubry et Rau, 5° éd., t. 1, p. 735,

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CASS.-REQ. 28 novembre 1911. SUBROGÉ TUTEUR, TUTEUR, VALEURS MOBILIÈRES, ALIENATION, EMPLOI DES CAPITAUX, CONVERSION DES TITRES AU PORTEUR EN TITRES NOMINATIFS, SURVEILLANCE, TIERS DÉTENTEUR, OPPOSITION A LA REMISE DES TITRES ET CAPITAUX, MESURE CONSERVATOIRE, MOTIFS DE JUGEMENT OU D'ARRÊT, CONCLUSIONS, ARGUMENTS, MOTIFS IMPLICITES (Rép., vo Tutelle, n. 538 et s., 588 et s.; Pand. Rép., vo Minorité-Tutelle, n. 195 et s., 256 et s., 268).

Le subrogé tuteur, auquel l'art. 7 de la loi du 27 févr. 1880 impose, sous sa responsabilité personnelle, l'obligation de surveiller l'accomplissement par le tuteur des prescriptions de cette loi, en ce qui concerne l'aliénation des valeurs mobilières appartenant aux mineurs, l'emploi des capitaux, et la conversion en titres nominatifs des titres au porteur, peut, alors que le tuteur a manifesté la prétention de s'affranchir de l'obligation de transformer en titres nominatifs des valeurs au porteur appartenant à ses enfants, et même de les aliener sans remplir les obligations prescrites par l'art. 1er de la loi du 27 févr. 1880, et d'en faire le remploi à sa fantaisie, faire défense, par acte extrajudiciaire, au détenteur des valeurs et capitaux des mineurs, de les remettre au tuleur avant que celui-ci ait été appelé à rendre compte de ses actes

§ 117; Planiol, op. cit., t. 1o, n. 1866; BaudryLacantinerie et Chéneaux, Des pers., 3e éd., t. 5, n. 585. Le subrogé tuteur doit se renfermer dans ce rôle de surveillance; il ne peut s'immiscer dans la gestion du tuteur. V. Buchère, op. cit., n. 105; Deloison, loc. cit. Il a même été jugé que le subrogé tuteur ne pouvait intervenir à la liquidation ou au partage dans lesquels était intéressé le mineur, à l'effet d'exiger que des mesures soient prises pour assurer l'exécution des prescriptions de la loi de 1880. V. Trib. de la Seine, 2 avril 1881 (Journ. La Loi, 30 oct. 1881). Adde, Buchère et Deloison, op. et loc. cit.

Est-ce à dire que le subrogé tuteur ne puisse jamais faire autre chose que de convoquer le conseil de famille? S'il en était ainsi, le subrogé tuteur serait dans l'impossibilité d'empêcher des actes par lesquels l'avoir du mineur pourrait être compromis. Et la loi, en lui prescrivant de convoquer le conseil de famille pour contraindre le tuteur à exécuter ses obligations, n'a pas voulu lui interdire de recourir à des mesures conservatoires, lorsque les intérêts du mineur sont mis en péril par les agissements du tuteur. Si, comme dans l'espèce, le tuteur manifeste l'intention de s'affranchir des obligations que lui impose la loi de 1880, de ne pas convertir les titres au porteur en titres nominatife, d'aliéner à son gré les valeurs mobilières, et d'en faire le remploi à sa fantaisie, ce serait méconnaître le but de protection des intérêts du mineur, qui a inspiré la loi de 1880, que d'interdire au subrogé tuteur de recourir aux mesures conservatoires, telles que l'opposition entre

devant le conseil de famille (1) (L. 27 févr. 1880, art. 7).

L'opposition du subrogé tuteur, dans ces circonstances, ne constitue pas de sa part une immixtion dans l'administration de la tutelle; elle n'est qu'une simple mesure conservatoire, destinée à assurer l'efficacité de la surveillance prescrite au subrogé tuteur et l'utilité des mesures que le conseil de famille jugera utile d'ordonner (2) (Id.).

Les juges d'appel, qui confirment, tant par adoption de motifs que par des motifs propres, le jugement de première instance validant l'opposition du subrogé tuteur, déclarent implicitement que l'offre faile en appel par le tuteur, d'opérer le placement des capitaux du mineur comme il serait décidé par le conseil de famille, était inopérante, et motivent ainsi suffisamment le rejet des conclusions du tuteur, tendant à ce qu'il lui fût donné acte de cette offre, conclusions qui ne constituent pas d'ailleurs un chef de demande (3) (L. 20 avril 1810, art. 7).

(Lerouge C. Reubrez).

Les mineurs Lerouge, placés sous la tutelle naturelle et légale de leur père, ont été appelés à recueillir, en 1908, dans la succession d'un de leurs parents en ligne maternelle, une somme d'environ 15.000 fr. chacun, en deniers et valeurs au porteur. Le subrogé tuteur, M. Reubrez, ayant fait défense au notaire liquidateur, par acte extrajudiciaire, de se dessaisir des titres et d'en opérer la remise au tuteur, M. Lerouge l'a assigné en mainlevée devant le tribunal civil de Lille, qui, par jugement du 4 déc. 1909, a rejeté sa demande.

les mains du détenteur des valeurs ou capitaux du mineur, de nature à empêcher que le conseil de famille par lui convoqué ne se trouve en présence d'un fait accompli; ce n'est pas là, de la part du subrogé tuteur, comme le fait justement observer l'arrêt ci-dessus, s'immiscer dans l'administration du tuteur; c'est, de sa part, uniquement se cantonner dans son rôle, qui consiste surveiller l'observation, par le tuteur, des prescriptions légales. V. au surplus, le rapport ci-dessus reproduit de M. le conseiller Feuilloley.

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(3) L'offre faite par le tuteur, disait M. le conseiller Feuilloley dans son rapport, n'avait le caractère, ni d'un chef de demande, ni d'une exception, ni même d'un moyen ; c'était un simple argument de fait, présenté par l'appelant en vue de démontrer l'inutilité de l'opposition. Or, il est de jurisprudence constante que les jugements et arrêts ne sont pas tenus de répondre, point par point, à chacun des arguments développés dans les conclusions des parties ». V. Cass. 21 déc. 1910 et 11 déc. 1911 (S. et P. 1912.1.246 et 380; Pand. pér., 1912.1.246 et 380), et les renvois. A cette réponse au moyen du pourvoi, la Cour de cassation en a ajouté une autre, à savoir que tant les motifs du jugement adoptés par l'arrêt que les motifs propres de l'arrêt répondaient implicitement aux conclusions prises en appel par le tuteur pour qu'il lui fût donné acte de son offre. V. sur les motifs implicites, Cass. 2 févr. 1910 (S. et P. 1912.1.302; Pand. pér., 1912.1.302); 22 janv. 1912 (S. et P. 1912.1.141; Pand. pér., 1912.1.141), et les renvois.

con

M. Lerouge a interjeté appel, en cluant à la mainlevée de l'opposition, et en demandant qu'il lui fut donné acte de ce qu'il était prêt à, dans le délai légal, faire le placement tel qu'il sera décidé après la délibération par le conseil de famille ». Malgré cette offre, la Cour de Douai, par arrêt du 1er juin 1910, a confirmé dans les termes suivants : - ( La Cour; -Adoptant les motifs des premiers juges;

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Et attendu qu'il ne s'agissait pas, dans l'espèce, pour le tuteur Lerouge, de recevoir le paiement de sommes qui pouvaient être dues à ses enfants mineurs, ce qui eût été un simple acte d'administration pour lequel il pouvait agir seul, sans que le subrogé tuteur et le conseil de famille aient à intervenir; que l'appelant a toujours émis la prétention de recevoir des titres et valeurs représentant, pour chacun de ses deux enfants, un capital important, et non seulement de s'affranchir de l'obligation de transformer ces valeurs en titres nominatifs, mais, bien plus, de les aliéner sans remplir les obligations prescrites par la loi du 27 févr. 1880, et d'en faire le remploi à sa fantaisie; que c'est donc à bon droit que le subrogé tuteur s'est opposé à la remise de ces titres et valeurs; Par ces motifs, etc. ».

POURVOI en cassation par M. Lerouge. Moyen unique. Violation des art. 5, 6 et 7 de la loi du 27 févr. 1880, et de l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810, en ce que, malgré des conclusions formelles, par lesquelles le tuteur se déclarait prêt à faire le placement des capitaux appartenant aux mineurs, après délibération du conseil de famille, l'arrêt attaqué a maintenu une opposition faite par le subrogé tuteur, sur ces capitaux, entre les mains du notaire, sous prétexte que le tuteur aurait émis la prétention d'aliéner ces capitaux sans remplir les obligations prescrites par la loi du 27 févr. 1880.

M. le conseiller Feuilloley a présenté, sur cette affaire, un rapport dont nous extrayons ce qui suit :

.... Sur beaucoup de points, nous n'interprétons pas autrement que le savant auteur du mémoire la loi du 27 févr. 1880, et, notamment, nous reconnaissons avec lui que le subrogé tuteur ne tient pas de cette loi le droit d'intervenir dans un partage intéressant le mineur; ainsi, par exemple, s'il faisait défense au notaire liquidateur de procéder au partage hors sa présence, il excéderait certainement les limites de son droit; il n'est, en effet, chargé par aucun texte de veiller à ce que les rapports soient effectués par les successibles d'une façon plutôt que d'une autre, à ce que le partage de tel bien soit fait plutôt en nature qu'en argent, après licitation préalable, ni même à ce que certaines valeurs soient, dans les abandonnements, attribuées au mineur de préférence à certaines autres. Ce n'est pas à son affaire, mais celle du tuteur et du tribunal, à l'homologation duquel est soumis tout partage où un mineur est intéressé. Toute intervention de ce genre, de la part du subrogé tuteur, qui n'a, dans les divers cas que nous venons d'indiquer, aucune surveillance à exercer, devrait donc, selon nous, être déclarée irrecevable. Il n'a d'autre droit que de provoquer la destitution du tuteur, si ses agissements lui paraissaient de nature à justifier cette mesure.

. Mais nous ne saurions, au contraire, considérer comme une immixtion du subrogé tuteur dans l'administration de la tutelle l'acte par lequel celui-ci, sans d'ailleurs chercher à substituer son action personnelle ou son initiative propre à celle du tuteur, se borne à prendre, dans un but purement conservatoire, une mesure simplement destinée à assurer l'efficacité de la surveillance que la loi lui prescrit d'exercer relativement à l'accomplissement, par le tuteur, des formalités prescrites pour l'emploi des capitaux des mineurs, l'aliénation des titres et leur conversion du porteur au nominatif. Comprendrait-on, par exemple, que le subrogé tuteur, qui viendrait à découvrir que le tuteur profite du délai de trois mois, que la loi de 1880 lui confère pour remplir les formalités qu'elle prescrit, pour jouer à la Bourse avec les valeurs de ses mineurs, puisse être obligé d'assister, impuissant, à la violation flagrante d'obligations dont la loi lui ordonne, sous sa responsabilité, de surveiller l'accomplissement? Peuton admettre que le subrogé tuteur, qui doit appeler le tuteur devant le conseil de famille pour rendre compte de ses actes, et pour provoquer les mesures définitives que le conseil jugera utiles, ne puisse, lui, prendre aucune mesure provisoire pour prévenir le mal et empêcher le tuteur de consommer la ruine du mineur, avant qu'il ait été matériellement possible au conseil de famille de se réunir et au tribunal de prononcer sur la délibération qu'il aura prise? Supposons, afin de bien préciser notre pensée par un exemple, que le subrogé tuteur soit informé que le tuteur fait vendre en Bourse des titres appartenant au mineur, n'est-il pas de toute évidence que le devoir de surveillance, que la loi lui impose, implique pour lui le pouvoir de recourir à cette mesure conservatoire de droit commun qu'est l'opposition, pour faire défense à l'agent de change de se dessaisir, soit des titres, soit des fonds provenant de leur aliénation, jusqu'au jour où le conseil de famille aura été mis à même de prononcer? Décider le contraire, et limiter, comme nous demande de le faire le pourvoi, le droit du subrogé tuteur à la convocation du conseil de famille, c'est enlever toute son efficacité pratique à la loi de 1880, loi très sage, qui, en confiant au subrogé tuteur un droit de surveillance sur le tuteur, a eu pour but de prévenir des abus, dont le danger, à peu près nul en 1804, s'était, au contraire, révélé menaçant à une époque où la fortune mobilière avait pris une énorme extension.

« C'est pourquoi nous ne saurions nous ranger au système du pourvoi. Nous estimons, au contraire, que l'art. 7 confère, en termes généraux, au subrogé tuteur un pouvoir de surveillance, et qu'aucune raison de texte n'en impose l'interprétation restrictive, laquelle serait manifestement contraire au but que s'est proposé le législateur.

En résumé, nous estimons, et c'est en ce sens que nous vous proposons d'interpréter la loi de 1880, que, s'il est vrai que le tuteur a un délai de trois mois pour se conformer aux obligations que cette loi impose, ses actes, même dans cette période, ne sont cependant pas soustraits, d'une manière complète, à la surveillance organisée par l'art. 7. Rien ne nous paraît donc s'opposer à ce que le subrogé tuteur prenne, même avant l'expiration du délai de trois mois, les mesures conservatoires prévues, soit par les lois spéciales sur la tutelle, soit par le droit commun, que les actes du tuteur peuvent rendre nécessaires. Parmi les mesures de droit commun, nous n'hésitons pas à placer l'opposition qui serait formée par le subrogé tuteur aux mains d'un détenteur

de deniers ou titres pupillaires. Si l'opposition est formée témérairement, si elle est faite dans un but vexatoire contre le tuteur, ou même sans motifs suffisants, le tribunal en fera mainlevée, avec ou sans dommages-intérêts, selon les circonstances particulières de chaque cause. Si, au contraire, elle se trouve être justifiée par les agissements du tuteur et la crainte légitime qu'a pu concevoir le subrogé tuteur que le tuteur abuse de la détention des titres ou deniers pendant le délai que la loi lui accorde pour l'accomplissement des formalités qu'elle prescrit, les tribunaux maintiendront une opposition qui n'aura été, pour le subrogé tuteur, qu'un moyen légitime d'exercer le droit de surveillance dont il est investi par la loi.

« Cette interprétation, que nous vous proposons de la loi de 1880, trouve un sérieux appui dans le rapport présenté à la Chambre des députés, Lors de la délibération en 2e lecture, par l'honorable M. Jozon. On peut avancer, disait le rapporteur, qui était un juriste distingué, que, dans l'état actuel de notre législation, la surveillance du subrogé tuteur, quoique ce soit encore, en fait, la plus sérieuse de toutes, reste absolument inefficace. Il n'en sera plus de même dès que le subrogé tuteur aura qualité pour contrôler, dès qu'il sera même tenu sous sa responsabilité à surveiller l'observation des obligations imposées au tuteur par le projet de loi ». Et, après avoir expliqué que le subrogé tuteur tient déjà du Code civil, et notamment de l'art. 1442, des droits de surveillance sur le tuteur, afin de l'obliger à se conformer à certaines prescriptions de la loi civile, le savant rapporteur continue ainsi : « Nous croyons ne vous demander rien d'exorbitant en vous demandant d'étendre ce devoir de surveillance et cette responsabilité aux obligations imposées au tuteur par le projet de loi » (S. Lois annotées de 1880, p. 551, note 3. P. Lois, décr., etc. de 1880, p. 949, note 3). Or, l'une de ces obligations, nous pouvons même dire la principale, est celle de ne pas aliéner, sans l'autorisation du conseil de famille, les valeurs mobilières appartenant au mineur. A aucun moment, ce droit n'appartient au tuteur. Par conséquent, s'il apparaît qu'à un moment quelconque, et même avant l'expiration du délai de trois mois, il transgresse ou tente de transgresser les obligations que la loi lui impose, le subrogé tuteur, dont la vigilance est en éveil, doit pouvoir provoquer la réunion du conseil de famille, et prendre les mesures conservatoires nécessaires pour que les décisions que ce conseil sera appelé à prendre ne soient pas inefficaces en présence du fait accompli ».

ARRÊT.

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LA COUR; Sur le moyen unique du pourvoi, pris de la violation des art. 5, 6 et 7 de la loi du 27 févr. 1880, et 7 de la loi du 20 avril 1810, pour défaut de motifs et manque de base légale : — Attendu que les mineurs Lerouge, placés sous la tutelle naturelle et légale du docteur Lerouge, leur père, ayant recueilli dans la succession du sieur Fiquet des capitaux et valeurs mobilières au porteur, Reubrez, leur subrogé tuteur, a, par acte extrajudiciaire, fait défense au notaire liquidateur, qui en était détenteur, de les remettre au tuteur avant que celui-ci eût été appelé à rendre compte de ses actes devant le conseil de famille; que la demande en mainlevée de cette opposition, formée par le tuteur, a été rejetée par l'arrêt attaqué;

Attendu que le pourvoi fait grief à cet arrêt d'avoir validé une mesure non autorisée par les art. 5, 6 et 7 de la loi du 27 févr. 1880; Mais attendu que le tuteur ne peut aliéner les rentes, actions, obligations et autres meubles incorporels appartenant au mineur sans y avoir été préalablement autorisé par le conseil de famille; qu'il est tenu, dans les trois mois, de faire emploi des capitaux, et de convertir en titres nominatifs les titres au porteur; Attendu l'art. 7 de ladite loi que impose au subrogé tuteur, sous sa responsabilité personnelle, l'obligation de surveiller l'accomplissement par le tuteur de ces formalités, et de provoquer, s'il ne s'y conforme pas, la réunion d'un conseil de famille, devant lequel il sera tenu de rendre compte de ses actes; Attendu

qu'il est constaté que Lerouge, tuteur de ses enfants mineurs, avait toujours manifesté la prétention, non seulement de s'affranchir de l'obligation de transformer en titres nominatifs des valeurs au porteur représentant pour ses deux enfants un capital important, mais encore de les aliéner sans remplir les obligations prescrites par l'art. fer de la loi du 27 févr. 1880, et d'en faire le remploi à sa fantaisie; Attendu que, dans ces circonstances, le subrogé tuteur a pu pratiquer une opposition aux mains du détenteur des titres et valeurs appartenant aux mineurs; que cette mesure ne constitue pas, en effet, une immixtion du subrogé tuteur dans l'administration de la tutelle, et n'est qu'une simple mesure conservatoire, destinée à assurer l'efficacité de la surveillance que la loi prescrit au subrogé tuteur d'exercer, et l'utilité des mesures que le conseil de famille jugera utile d'ordonner; d'où il suit qu'en validant cette opposition, l'arrêt attaqué n'a violé ni faussement appliqué les textes visés au pourvoi; Attendu que si, dans ses dernières conclusions, prises en instance d'appel, Lerouge a demandé qu'il lui fut donné acte de l'offre qu'il faisait d'opérer le placement tel qu'il serait décidé, après délibération du conseil de famille, cette offre, faite comme motif justificatif de l'appel, ne constituait pas un chef de demande; qu'en confirmant le jugement entrepris, tant par adoption des motifs des premiers juges que par des motifs propres, et en déclarant valable l'opposition faite par le subrogé tuteur à la remise des valeurs, l'arrêt attaqué a implicitement déclaré que cette offre était inopérante, et a suffisam

(1 à 4) La chambre civile de la Cour de cassation, à plusieurs reprises déjà, a adopté une formule identique pour déterminer le sens de l'expression accidents survenus à l'occasion du travail de l'art. 1o de la loi du 9 avril 1898. V. Cass. 1er août 1906 (S. et P. 1909.1.541; Pand. pér., 1909.1.541); 16 mai 1911 (S. et P. 1912.1. 224; Pand. pér., 1912.1.224); 24 janv. 1912 (S. et P. 1912.1.223; Pand. pér., 1912.1.223); 20 avril 1912 (S. et P. 1912.1.335; Pand. pér,, 1912,1.335). V. au surplus les notes sous ces arrêts, avec les renvois. Cette formule implique-t-elle que l'ouvrier, victime d'un accident à l'usine pendant le repos, a droit de se prévaloir de la loi du 9 avril 1898 ?

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CASS.-CIV. 27 décembre 1911.

OUVRIER, ACCIDENTS Du travail, RESPONSABILITÉ, LOI DU 9 AVRIL 1898, ACCIDENT DONNANT DROIT A INDEMNITÉ, LIEU DU TRAVAIL, TEMPS DU TRAVAIL, REPOS A L'USINE, AUTORISATION DU CHEF D'ENTREPRISE (Rép., vo Responsabilité civile, n. 1646 et s.; Pand. Rép., vo Travail, n. 1982 et s.). Doit être considéré comme survenu à l'occasion du travail tout accident arrivé au temps et au lieu du travail (1) (L. 9 avril 1898, art. 1er).

Ce temps commence à l'entrée de l'ouvrier dans l'usine, lieu du travail, et se continue tant qu'il y demeure; et il n'est pas suspendu pendant le repos de la journée (2) (Id.).

Il importe peu que l'ouvrier soit alors libre de sortir de l'usine, s'il est autorisé à y rester; s'il use de cette faculté, il ne le fait que sous l'autorité du chef d'entreprise, et, par suite, sous sa responsabilité (3) (Id.).

Spécialement, doit être considéré comme un accident du travail, à la charge du chef d'entreprise, l'accident survenu à un oùvrier, dans l'usine, pendant la suspension du travail, si l'ouvrier avait été expressément ou tacitement autorisé à demeurer dans l'usine (4) (Id.).

(Société des Aciéries de Micheville C. Diédrich). ARRÊT.

LA COUR; Sur le moyen unique du pourvoi : Attendu que l'arrêt attaqué constate que, le 22 juill. 1907, Diédrich, ouvrier de la Société des Aciéries de Micheville, a été couvert de déchets enflammés, alors que, pendant le temps du repos, il s'était étendu et endormi dans la baraque du casseur de fonte; qu'il constate, en outre, que Diedrich était expressément ou tacitement autorisé à demeurer dans l'usine, comme il l'avait fait, au moment de la suspension du travail; Attendu que Diedrich, se disant atteint d'incapacité permanente à la suite des brûlures dont il avait été victime, a demandé à la Société des Aciéries de Micheville l'indemnité déterminée par l'art. 3 de la loi du 9 avril

Il est certainement au lieu du travail; mais le temps de repos peut-il être considéré comme étant le temps du travail? La Cour de cassation se prononce pour l'affirmative, au cas où l'ouvrier était expressément ou tacitement autorisé à demeurer à l'usine pendant la suspension du travail. C'est l'opinion que nous avons soutenue (V. les notes et renvois sous Nimes, 10 août 1900, S. et P. 1901.2.212, et sous Rouen, 28 févr. 1900, S. et P. 1901.2.266; et la note, n. I, sous Cass. 25 févr. 1902, S. et P. 1904.1.181), et à l'appui de laquelle on peut invoquer plusieurs arrêts. V. Rouen, 28 févr. 1900, et Nîmes, 10 août 1900, précités; Cass. 23 avril 1902 (S. et P. 1904.1.78), et la note.

1898; que l'arrêt attaqué a nommé trois experts pour constater son état; - Attendu qu'en statuant ainsi, ledit arrêt n'a violé aucun des articles visés au pourvoi; Attendu, en effet, que doit être considéré comme survenu à l'occasion du travail tout accident arrivé au temps et au lieu du travail; que ce temps commence à l'entrée de l'ouvrier dans l'usine, lieu du travail, et se continue tant qu'il y demeure; qu'il n'est pas suspendu pendant le repos de la journée; qu'il importe peu l'ouvrier soit alors libre de sortir de que l'usine, s'il est autorisé à y rester, et que, s'il use de cette faculté, il ne le fait que sous l'autorité du chef d'entreprise et par suite sous sa responsabilité; - Rejette le pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 27 juin 1908 par la Cour de Nancy, etc.

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Du 27 déc. 1911. Ch. civ. MM. Baudouin, 1er prés.; Reynaud, rapp.; Lombard, av. gén. (concl. conf.); de Ségogne, av.

CASS.-REQ. 13 avril 1910 et 2 juin 1913. OUVRIER, ACCIDENTS DU TRAVAIL, RESPON

sabilité, Loi du 9 AVRIL 1898, ACCIDENT DONNANT DROIT A INDEMNITÉ, TEMPS DU TRAVAIL, LIEU DU TRAVAIL, RIXE, MEURTRE, AGRESSION, RELATION ENTRE LE TRAVAIL ET L'ATTENTAT (Rép., v Responsabilité civile, n. 1646 et s.; Pand. Rép., vo Travail, n. 1982 et s.).

Les juges du fond considèrent à bon droit comme victime d'un accident du travail le contre-maître, qui, à la suite d'une discussion à l'atelier, à propos de l'outillage de la maison, entre lui et un ouvrier congédie, qui tentait de se faire réembaucher à nouveau, ayant invité l'ouvrier à sortir comme pour vider au dehors la querelle commencée, a été, la porte à peine franchie, frappé mortellement par l'ouvrier (5) (L. 9 avril 1898, art. 1er), — 2o espèce.

En effet, ces constatations et déclarations ne laissent aucun doute sur le risque professionnel couru par la victime, la relation entre l'organisation du travail et l'attentat, non plus que sur le lieu même, le seuil de l'atelier, où il s'est produit (6) (Id.).

Id.

Au contraire, on ne saurait voir aucune relation entre le travail et l'agression dont un ouvrier a été victime de la part d'un autre ouvrier qui l'a blessé d'un coup de poing pendant le travail, s'il est constaté

Adde, Baudry-Lacantinerie et Wahl, Louage, 3o éd., t. 2, 1 part., n. 2000; Sachet, Tr. de la législ. sur les acc. du trav., 5o éd., t. 1o, n. 845; Loubat, Tr. sur le risque profess., 3 éd., n. 458. Mais il nous a paru, et l'arrêt ci-dessus semble bien favorable à cette restriction, qu'il en était autrement, si l'ouvrier victime de l'accident est resté dans l'usine, pendant le repos, malgré les ordres formels du chef d'entreprise. V. la note, n. I, in fine, sous Cass. 25 févr. 1902, précité, avec les renvois.

-

(5-6) Les arrêts ci-dessus font apparaître, croyons-nous, une dissidence entre la chambre civile et la chambre des requêtes, en ce qui con

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