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par les juges du fond que cette agression a été provoquée par une discussion, au cours de laquelle, quelque temps auparavant, la victime avail jeté de la sciure de bois dans le cou de l'autre ouvrier, de telle sorte que, le travail étant demeuré étranger à l'accident, il n'y a pas lieu à application de la loi du 9 avril 1898 (1) (Id.). — 1re espèce. 1re Espèce. - (André C. Potin et Cie). ARRÊT. LA COUR; - Sur le moyen unique, pris de la violation de l'art. 1er de la loi du 9 avril 1898, et de l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810: Attendu qu'André, ouvrier au service de la Société Potin et Cie, avait été chargé de descendre un ballot de papiers dans un sous-sol, lorsqu'un autre ouvrier de la maison, le sieur Laurent, qui le guettait, lui porta à l'œil gauche un coup de poing qui le blessa grièvement; qu'il est constaté par l'arrêt attaqué qu'une discussion avait eu lieu quelque temps auparavant entre les deux hommes, et qu'André avait jeté de la sciure de bois dans le cou de son camarade; Attendu qu'on ne saurait voir, dans cette circonstance, une relation de cause à effet entre l'accident et le travail; que ce n'est pas parce qu'André travaillait qu'il a été blessé, mais parce qu'il avait, par sa conduite antérieure, provoqué l'agression dont il a été victime; que cette agression aurait pu se produire à un autre moment et en tout autre lieu, et que le travail de l'un comme de l'autre est resté étranger à l'accident; qu'en conséquence, les juges du fond se sont à bon droit refusés à appliquer la loi du 9 avril 1898; Rejette le pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 15 juin 1909 par la Cour de Paris, etc. MM. Ta

Du 13 avril 1910. Ch. req. non, prés.; Letellier, rapp.; Lombard, av. gén. (concl. conf.); Regray, av.

2o Espèce. (Comp. d'assur. terr. le Secours C. Vve Bugat).

ARRÊT.

LA COUR; Sur le moyen unique du pourvoi, pris de la violation des art. 1er et s. de la loi du 9 avril 1898: Attendu que, de l'arrêt attaqué, il résulte que, le 23 déc. 1910, l'ouvrier Lucien Rivière se présenta à l'atelier, d'où il avait été con

cerne les conditions que doit réunir un accident pour pouvoir être considéré comme un accident du travail. Pour la chambre civile, qui considère comme un accident du travail tout accident survenu à l'heure et au lieu de travail (V. Cass. civ. 27 déc. 1911, qui précède, et les renvois), formule qui nous a paru critiquable (V. les notes sous Cass. civ., 1er août 1906, S. et P. 1909.1.541; Pand. pér., 1909.1.541, et sous Cass. civ. 24 janv. 1912, S. et P. 1912.1.228; Pand. pér., 1912.1.223), il est sans difficulté que le chef d'entreprise est responsable de tous les accidents résultant de rixes ou d'attentats, survenus au temps et au lieu du travail soit que ces rixes aient eu lieu entre ouvriers (V. Cass. civ. 20 avril 1912, S. et P. 1912.1.335; Pand. pér., 1912.1.335 et le renvoi; adde, Paris, 30 avril 1912, infra, 2° part., p. 36), soit que ces rixes aient eu lieu entre ouvriers et tiers (V. Cass. civ. 16 mai 1911 (S. et P. 1912.1.224; Pand. pér., 1912. 1.224), et ce, encore bien que la rixe n'ait été

gédié pour cause d'irrégularité, et où son frère travaillait encore, et tenta de s'y faire embaucher de nouveau; qu'une discussion s'étant élevée dans l'atelier même à propos de l'outillage de la maison Le Tourneur, Bugat, le contre-maître, après un échange de quelques mots vifs avec Lucien Rivière, l'engagea à sortir comme pour vider au dehors la querelle qui venait de commencer entre eux, mais qu'à peine franchie la porte de l'atelier, Lucien Rivière, sortant un revolver de la poche de son pantalon, en tira deux coups sur Bugat, qui tomba ensanglanté et si grièvement blessé qu'il expira deux jours après à l'hôpital; qu'il eut cependant la force de déclarer que son agresseur lui en voulait de soutenir avec trop de soin les intérêts de son patron; Attendu que ces consta

tations et déclarations ne sauraient laisser aucun doute sur le risque professionnel couru par la victime, la relation entre l'organisation du travail et l'attentat, non plus que sur le lieu même où il s'est produit, c'est-à-dire au seuil de l'atelier; que, par suite, en déclarant que, dans ces conditions, le fait qui a donné lieu au procès rentrait dans les prévisions et la sphère d'application de la loi du 9 avril 1898, la décision attaquée, loin de violer les textes visés dans la formule du moyen, n'a fait, au contraire, de ces textes, qu'une exacte application; Rejette le pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 27 févr. 1912 par la Cour de Paris, etc.

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CASS.-REQ. 16 juin 1913.

OUVRIER, ACCIDENTS DU TRAVAIL, RESPONSABILITÉ, ASCENDANT, ENFANT NATUREL, RECONNAISSANCE POSTÉRIEURE A L'ACCIDENT (Rép., vo Responsablité civile, n. 2025 et s.; Pand. Rép., vo Travail, n. 2841).

L'ascendant d'un enfant naturel décédé victime d'un accident du travail n'a droit à pension viagère, dans les termes de l'art. 3, SC, de la loi du 9 avril 1898, sur les accidents du travail, que s'il l'a reconnu avant

occasionnée, ni directement, ni indirectement, par les nécessités de travail. V. Cass. civ. 20 avril 1912, précité. Pour la chambre des requêtes, qui exige que l'accident, pour donner lieu à indemnité, en vertu de la loi de 1898, non seulement soit survenu sur le lieu et à l'heure du travail, mais soit en relation directe avec le travail (V. Cass. req. 22 nov. 1909, S. et P. 1910.1.254; Pand. pér., 1910.1.254. V. aussi, Cass. req. 21 oct. 1908, S. et P. 1910.1.255; Pand. pér., 1910.1.255), il ne saurait suffire que l'accident résultant d'une rixe ou d'un attentat soit survenu au temps et au lieu du travail, s'il est sans rapport avec le travail. V. en ce sens, Lyon, 4 mai 1911 (S. et P. 1912.2. 39; Pand. pér., 1912.2.39), et les renvois. C'est de cette doctrine que les deux arrêts ci-dessus font application, en décidant que la blessure reçue par l'ouvrier, au cours d'une rixe ou par suite d'un attentat, au temps et au lieu du travail, ouvrait droit à indemnité dans la deuxième espèce, et était,

l'accident (2) (L. 9 avril 1898, art. 3, § C).

-

ARRÊT. (Vve Le Léguillon C. Salaün). LA COUR; Sur le moyen pris de la violation de l'art. 3 de la loi du 9 avril 1898, et de l'art. 334, C. civ. : Attendu qu'à la date du 12 oct. 1910, François Le Saint, charretier livreur au service de Salaün, a été, sur la voie publique, victime d'un accident du travail, qui a causé sa mort; que la veuve Le Léguillon, qui a reconnu le défunt pour son fils naturel, suivant déclaration à l'état civil, le 15 mars 1911, avait, dès le 23 janvier précédent, en vertu de l'art. 3, § C, de la loi du 9 avril 1898, réclamé à Salaün le paiement d'une rente annuelle et viagère de 120 fr.; Attendu que le droit à la pension ne peut exister qu'en faveur des ascendants légitimes ou naturels; qu'à la date de l'accident, ce droit ne pouvait naître en la personne de la demanderesse, qui n'avait alors aucun titre pour y prétendre, puisqu'elle n'a reconnu son fils que le 15 mars de l'année suivante; que les termes de la loi ne laissent place à aucune autre interprétation; que, si le § C de l'art. 3 se borne à dire que les ascendants, qui étaient à la charge de la victime de l'accident, recevront une rente, il ne faut pas isoler cette disposition de celles des paragraphes qui précèdent, et notamment du S B, qui n'admet au bénéfice de la loi nouvelle que les enfants naturels reconnus avant l'accident; qu'interpréter autrement le § C, et permettre à l'ascendant, qui s'est abstenu de reconnaître son enfant, de venir se prévaloir de la loi de 1898, lorsque cet enfant aura été victime d'un accident, ce serait aller directement à l'encontre de la volonté du législateur, en faisant aux ascendants naturels une situation plus favorable que celle qu'il a faite aux enfants naturels; qu'en statuant ainsi, la Cour, dont l'arrêt est motivé, n'a violé aucun des textes visés au moyen; Rejette le pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 27 mars 1912 par la Cour de Rennes, etc.

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au contraire, en dehors de l'application de la loi de 1898 dans la première espèce, parce que, dans la deuxième espèce, il y avait une relation entre le travail et l'accident, l'attentat ayant été occasionné par une discussion sur le travail entre un contremaître et un ouvrier qui demandait à être embauché, tandis que, dans la première espèce, cette relation n'existait pas, l'agression dont avait été victime un ouvrier ayant été provoquée par les vexations qu'il avait, quelques jours auparavant, fait subir à son agresseur.

(1) V. la note qui précède.

(2) La question est controversée; mais c'est dans le sens de la solution admise par la Cour de cassation que se prononcent la jurisprudence des Cours et tribunaux et le plus grand nombre des auteurs. V. Trib. de Montauban, 16 févr. 1900 et Trib. de Nantes, 18 juin 1900 (S. et P. 1901. 2.53), et la note; Douai, 22 janv. 1908 (S. et P. 1908.2.188; Pand. pér., 1908.2.188), et les renvois.

CASS.-REQ. 21 février 1910.

ACTION POSSESSOIRE, DÉNONCIATION DE NOUVEL OEUVRE, MUR MITOYEN, SUSPENSION DES TRAVAUX, CONTINUATION, EXPERTISE, POURVOI EN CASSATION, INTÉRÊT (DÉFAUT D') (Rép., vis Action possessoire, n. 137 et s., Cassation [mat. civ.], n. 1073 et s., 1094; Pand. Rép., vis Action possessoire,

(1-2) I. L'arrêt que nous rapportons est fort intéressant, car il a trait à l'exercice d'une des actions possessoires, la dénonciation de nouvel œuvre, qui est fort peu employée dans la pratique des affaires, et sur laquelle il n'est intervenu qu'un petit nombre seulement d'arrêts de la Cour de cassation.

Si l'on remonte jusqu'au droit romain, on voit que l'operis novi nunciatio était une sorte d'opposition extrajudiciaire, qui ne nécessitait pas l'intervention du magistrat. Toute personne possédant un fonds pouvait sommer l'auteur des travaux portant préjudice à ce fonds de les arrêter provisoirement. Celui-ci avait le droit, il est vrai, de se pourvoir par l'interdit de remissionibus, pour faire lever par le magistrat l'interdiction qui lui était faite; mais, s'il continuait ses travaux sans autorisation, ce qu'il faisait était nul de plein droit. Il importe de remarquer que cette voie de droit ne s'appliquait qu'aux ouvrages en cours d'exécution (L. 1, § 7, Dig., liv. 39, tit. 1).

Dans notre droit actuel, la loi du 25 mai 1838, art. 6, alin. 1o, et la loi du 12 juill. 1905, art. 7, alin. 2, mentionnent la dénonciation de nouvel œuvre, mais n'indiquent pas en quoi elle différe de la complainte et de la réintégrande. Les auteurs sont loin d'être d'accord sur les caractères et les conditions de recevabilité de cette action. Certains auteurs (V. la note de M. Devilleneuve, sous Cass. 26 juin 1843, S. 1843.1.753, et les autorités citées; adde, Curasson, Compét. des juges de paix, 4o éd., par Poux-Lagier et Pialat, t. 2, n. 536; Bourbeau, contin. de Boncenne, T'héor, de la proc., t. 7, n. 295; Garsonnet, Tr. de proc., 3e éd., par Cézar-Bru, t. 1, § 414) enseignent que la dénonciation de nouvel œuvre n'est autre chose que la complainte, exercée dans un cas spécial, celui de travaux susceptibles de porter atteinte à la possession d'autrui; selon eux, la complainte prend simplement le nom de dénonciation de nouvel œuvre quand le trouble consiste dans des travaux entrepris au préjudice du demandeur. Dans ce système, ces deux actions ne différeraient que par leur dénomination et par les circonstances dans lesquelles elles sont exercées.

I importerait peu, par suite, que le nouvel œuvre ait lieu sur le fonds du plaignant, ou sur le fonds du constructeur; qu'il soit terminé ou en cours d'exécution; qu'il suppose une prétention au sol ou qu'il constitue une atteinte à un droit de servitude; que le demandeur conclue à la destruction ou seulement à la suspension des tra

vaux.

L'action serait ouverte dans tous les cas; elle imposerait au demandeur les mêmes conditions d'exercice que la complainte et produirait les mêmes effets; le juge de paix pourrait donc ordonner la suspension des travaux en cours d'exécution ou la suppression des travaux achevés.

D'après une autre opinion, qui tend à prévaloir en doctrine (V. les renvois de la note précitée de M. Devilleneuve sous Cass. 26 juin 1843; adde, Aubry et Rau, 5o éd., t. 2, p. 246, § 188, texte et note 2; Planiol, Tr. élém. de dr. civ., 6a éd., t. 1, n. 2310; Boitard et Colmet d'Aage, Leç. de proc., 15 éd., par Glasson, t. 1, p. 744 et 745, ad notam; ANNÉE 1913. 7-8° cah.

n. 17 et s., Cassation civile, n. 17 et s.,
100).

Constitue une action possessoire en dé-
nonciation de nouvel œuvre l'action d'un
propriétaire, qui tend à ce que le proprié-
taire voisin soit contraint d'arrêter les
travaux de démolition qu'il exécute sur
son propre fonds, et dont le résultat, s'ils

étaient poursuivis, serait d'ébranler le mur mitoyen existant entre les deux fonds (1) (L. 12 juill. 1905, art. 7, 2o).

Dans ces circonstances, le juge du possessoire a ordonné à bon droit la suspension des travaux (2) (Id.).

Et si, en ordonnant la suspension des travaux, le juge a réservé au défendeur la faculté de les continuer de la manière qui

ainsi que le constate M. Planiol (loc. cit.), par la raison que le maintien de cette action paraît plus théorique que pratique; toutes les fois qu'il en a été question, l'arrêt a reconnu que le préjudice existait déjà, et que l'action exercée avait plutôt le caractère d'une complainte que d'une dénonciation de nouvel œuvre ».

Le seul arrêt de la Cour suprême qui, en dehors de celui rapporté ci-dessus, ait accueilli la dénonciation de nouvel œuvre, est un arrêt du 1er déc. 1829 (S. et P. chr.).

Encore l'action est-elle qualifiée d'action en bien qu'elle eût pour objet la réparation d'un préjudice futur, et, d'autre part, il s'agissait d'une entreprise sur les eaux; or, l'on sait qu'il est possible de voir dans ce cas spécial une action possessoire distincte des autres. V. Cass. 19 nov. 1866 (S. 1867.1.32.-P. 1867.46); Raviart, op. cit., n. 124, n. 216 et n. 219, note 1. V. toutefois, Poux-Lagier et Pialat, sur Curasson, op. cit., t. 2, p. 342 et 343, ad notam.

Glasson, Précis de proc., 2o éd., par Tissier, t. 1,
n. 263; Archambault et Senly, Dict. des act. poss.,
vo Dénonciation de nouvel œuvre, n. 2 et s.; Raviart,
Tr. des act. poss., 4o éd., p. 34, n. 47. Comp. Bour-
cart, Et. sur les act. poss., n. 107 et s.), la dé-
nonciation de nouvel œuvre est une action pos-
sessoire sui generis, ayant pour but d'obtenir
la suspension des travaux commencés, ou sur le
point de l'être, lorsque ces travaux doivent causer
un dommage certain, mais simplement éventuel.
Dans cette opinion, la dénonciation de nouvel
œuvre n'est recevable qu'avec la réunion des con-
ditions suivantes : -
complainte,
- 1° il faut que les travaux
soient commencés ou sur le point de l'être; s'ils
étaient terminés, l'action en complainte serait
seule recevable. V. Aubry et Rau, 5" éd., t. 2,
p. 247, § 188, texte et note 4; Boitard et Colmet
d'Aage, op. cit., t. 1, p. 745, ad notam; Glasson
et Tissier, op. cit., t. 1, p. 276 et 277, n. 263; Ar-
chambault et Senly, op. et verb. cit., n. 3. — 2° Il
faut qu'il s'agisse d'un dommage certain, mais
simplement éventuel; en d'autres termes, que les
travaux, sans causer un trouble actuel à la
possession du demandeur, soient de nature à pro-
duire ce résultat s'ils étaient achevés»; ce qui
exclut le cas où il s'agit, non plus d'un dom-
mage futur, mais d'un dommage déjà existant.
V. Aubry et Rau, loc. cit.; Boitard et Colmet
d'Aage, loc. cit.; Glasson et Tissier, loc. cit.; Archam-
bault et Senly, loc. cit. -3° En outre, cette action
ne peut s'appliquer qu'à des travaux exécutés sur
un fonds autre que celui du demandeur. V. Aubry
et Rau, 5e éd., t. 2, p. 247, § 188, texte et note 3;
Boitard et Colmet d'Aage, loc. cit.; Glasson et
Tissier, loc. cit. - 4o Il faut enfin que le demandeur
conclue seulement à la suspension des travaux et
non à leur destruction, car le juge de paix, quand
il accueille l'action, ne peut prescrire autre chose
que la suspension des travaux commencés. V. Aubry
et Rau, loc. cit.

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Dans cette opinion, la dénonciation de nouvel œuvre apparaît comme différant profondément de la complainte.

Celle-ci n'est ouverte qu'autant qu'il s'agit d'un trouble actuel. V. Cass. 4 févr. 1856 (S. 1856.1. 433. – P. 1856.1.225), et le rapport de M. le conseiller Poultier. Adde, Aubry et Rau, 5e éd., t. 2, p. 246, § 188, note 2; Boitard et Colmet d'Aage, loc. cit.; Glasson et Tissier, op. cit., t. 1, p. 276, n. 263. Des travaux commencés, mais non achevés, peuvent ne pas constituer un trouble actuel, en telle sorte que le possesseur, qui serait seulement menacé dans sa possession, serait dépourvu de protection. Il trouvera précisément cette protection dans la dénonciation de nouvel œuvre, au moyen de laquelle, dès qu'il constatera des travaux non encore achevés, il en obtiendra la suspension, encore bien que le trouble ne soit pas actuel, mais seulement éventuel.

C'est à ce système que paraît s'être, après de
grandes fluctuations (V. la note précitée de
M. Devilleneuve), ralliée la jurisprudence

(V. Cass. 4 févr. 1856, précité, avec le rapport de
M. le conseiller Poultier), dont les manifestations
ont été excessivement rares, ce qui s'explique,

L'intérêt de la décision que nous rapportons ci-dessus n'échappera donc à personne, puisqu'elle proclame nettement la recevabilité de la dénonciation de nouvel œuvre, et en détermine les conditions d'exercice.

II. Le pourvoi, dans l'espèce, soutenait qu'il n'y avait pas lieu à action possessoire, et faisait valoir à cette fin les arguments suivants : Ce dont le demandeur était menacé, c'était d'un dommage pouvant résulter pour son mur de la démolition de la maison voisine. Cette menace d'un dommage éventuel n'impliquait pas nécessairement, de la part de son voisin, une prétention contraire à sa possession; en réalité, sa saisine possessoire n'était contestée ni directement ni indirectement par le voisin. Il semble donc qu'il n'y avait pas lieu pour lui de se prétendre troublé dans sa possession.

Et l'auteur du pourvoi rappelait ce principe, sanctionné plusieurs fois par la Cour de cassation, que le trouble apporté à la jouissance d'un immeuble ne peut donner lieu à une action possessoire que s'il soulève un débat sur la possession, tandis qu'au contraire, si le trouble n'est pas le résultat d'un acte contradictoire à la possession, il constitue seulement un fait dommageable, ne pouvant donner ouverture qu'à une action en dommages-intérêts. V. Cass. 17 déc. 1912 (Supra, 1 part., p. 76), et la note.

Ce raisonnement de l'auteur du pourvoi n'était pas déterminant, et il semble que c'est à bon droit que la Cour suprême ne l'a pas accueilli. Il n'est exact que lorsqu'il s'agit de l'action en complainte; mais il cesse de l'être pour la dénonciation de nouvel œuvre. Comme le dit M. Raviart, dans son Traité des actions possessoires, précité, 4o éd., n. 142, p. 142, la dénonciation de nouvel œuvre constitue un moyen préventif permettant au possesseur de s'opposer à l'achèvement des travaux, qui, sans causer un trouble actuel à sa possession, seraient cependant de nature à produire ce résultat, s'ils étaient terminés. Il n'est donc pas nécessaire que la possession soit troublée; il suffit qu'elle soit menacée de l'être.. IT PART.

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serait prescrite par les experts, cette dis position, toute de faveur pour le défendeur, ne peut lui ouvrir un moyen de cassation (1) (Id.).

(Bouhey C. Jeanne).

M. Bouhey, faisant abattre un bâtiment adossé au mur mitoyen qui sépare sa propriété de celle de M. Jeanne, en a avisé celui-ci, qui l'a assigné devant la justice de paix, en alléguant que la démolition à laquelle il était procédé compromettrait la solidité du mur mitoyen, et en demandant que ce travail fût exécuté sous la direction d'un expert, Le juge de paix de Meulan, après avoir ordonné une expertise, a, par jugement du 21 juill, 1908, entériné le rapport de l'expert, et ordonné la suspension des travaux litigieux. Sur l'appel de M. Bouhey, le tribunal civil de Versailles a rendu, le 12 févr. 1909, un jugement ainsi conçu : Le Tribunal; Attendu que, pour soutenir son appel, Bouhey prétend que le premier juge aurait qualifié à tort de dénonciation de nouvel œuvre l'action possessoire intentée par Jeanne, alors que, selon lui, il s'agissait d'une action en complainte, que Jeanne n'aurait pu introduire, par suite du défaut de trouble actuel dans sa possession, le mur mitoyen n'ayant pas encore été touché;

Attendu qu'il y a action en complainte lorsque l'entreprise dont se plaint le demandeur cause un trouble actuel à sa possession; Attendu qu'il suffit de se reporter à la citation du 24 avril 1908, délivrée à la requête de Jeanne, pour constater qu'en demandant que les travaux nécessaires soient faits pour assurer la solidité du mur mitoyen, Jeanne entendait se garantir du trouble éventuel que pouvait causer à sa possession la démolition des constructions adossées à ce mur, dont la solidité aurait été autrement compromise; que c'est donc à bon droit que le juge de paix a considéré cette action comme une dénonciation de nouvel œuvre; Attendu que les constatations de l'expert autorisaient le premier juge à ordonner la suspension des travaux; que, cependant, ayant été saisi, par la citation de Jeanne, d'une demande en nomination d'expert afin de faire exécuter les travaux nécessaires pour garantir la solidité du mur mitoyen, le juge de paix pouvait autoriser Bouhey à continuer ses travaux de démolition, à la condition d'exécuter à ses frais les travaux de consolidation du mur

Or, dans l'espèce, les faits invoqués par le demendeur originaire, copropriétaire d'un mur mitoyen, dont le propriétaire voisin compromettait par hypothèse la solidité, en démolissant sur sa propriété une construction adossée à ce mur, étaient de telle nature que le demandeur pouvait légitimement se croire menacé dans ses droits de copropriétaire du mur mitoyen, si les travaux commencés par son voisin étaient achevés.

Il n'y avait pas trouble actuel à sa possession, mais bien l'éventualité et la possibilité d'un trouble à la possession et jouissance du mur mitoyen, au cas où les travaux commencés et non achevés mettraient en péril la solidité du mur mitoyen. On se trouvait donc bien en présence de l'hypo

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mitoyen indiqués par l'expert et sous la surveillance de ce dernier, travaux qui auraient eu pour effet de faire disparaître tout trouble éventuel de possession; en Confirme; Par ces motifs; Dit, en conséquence, que c'est à bon droit que le juge de paix a qualifié la demande dont il était saisi d'action en dénonciation de nouvel œuvre et a ordonné la suspension des travaux; Dit, toutefois, que Bouhey pourra, s'il le préfère, continuer ses travaux de démolition, mais à la condition d'exécuter à ses frais, sous la surveillance de l'expert précédemment commis par le premier juge, et que le tribunal commet à nouveau en tant que de besoin, les travaux prescrits par cet expert, etc. ».

POURVOI en cassation par M. Bouhey. ler Moyen. Violation de l'art. 6 de la loi du 25 mai 1838 et de l'art. 1er de la loi du 11 avril 1838, en ce que le tribunal a considéré comme une action possessoire l'action intentée par le défendeur éventuel, alors qu'aucun trouble n'était apporté à sa possession, et que sa propriété n'était menacée que d'un simple dommage éventuel.

2 Moyen. Violation de l'art. 6 de la loi du 25 mai 1838 et des règles admises en matière de dénonciation de nouvel œuvre, en ce que le tribunal a qualifié ainsi une action possessoire tendant, en réalité, à l'exécution de mesures destinées à garantir la solidité d'un mur mitoyen, et a confirmé une décision de juge de paix se bornant à ordonner la suspension de tout travail.

30 Moyen. Violation de l'art. 6 de la loi du 25 mai 1838 et des règles admises en matière de dénonciation de nouvel œuvre, en ce que, s'agissant d'une action possessoire de cette nature, le tribunal ne s'est pas borné à ordonner la suspension des travaux, mais a prescrit l'exécution de travaux destinés à garantir la solidité d'un mur mitoyen.

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thèse toute particulière où la dénonciation de nouvel œuvre peut être intentée, et c'est avec raison que cette action a été déclarée recevable.

Il convient d'observer en terminant que c'est à tort que l'arrêt ci-dessus vise l'art. 6 de la loi de 1888, aujourd'hui abrogé, et remplacé par l'art. 7,§ 2, de la loi du 12 juill. 1905, qui attribue d'ailleurs, en termes identiques, compétence au juge de paix pour statuer sur les dénonciations de nouvel œuvre.

(1) En autorisant la continuation des travaux de démolition sous la surveillance d'un expert, il semble bien que le tribunal avait enfreint une des règles essentielles de la dénonciation de nouvel œuvre; cette action ne peut tendre, en effet,

tion de nouvel œuvre, autorisée par l'art. 6, § ler, de la loi du 25 mai 1838, et en ordonnant la suspension de ces travaux, le jugement attaqué, loin de violer les. règles et dispositions de loi invoquées par le pourvoi, en a fait, dans les circonstances relevées par lui, une juste et saine application; qu'il s'ensuit que les deux premiers moyens doivent être rejetés; Sur le troisième moyen, dit très subsidiaire : Attendu que, si le jugement attaqué a, de plus, réservé au demandeur en cassation la faculté de continuer ses travaux de démolition de la manière prescrite par les experts, cette disposition de faveur pour lui ne peut lui ouvrir un moyen de cassation; Rejette, etc. Ch. req.

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Du 21 févr. 1910. MM. Tanon, prés.; Denis, rapp.; Feuilloley, av. gén. (concl. conf.); Alcock, av.

CASS.-REQ. 18 novembre 1907.
CASS.-CIV. 20 janvier 1913.

1° DOMMAGES-INTÉRÊTS, ASTREINTE, CARACTÈRE DÉFINITIF, CARACTÈRE COMMINATOIRE, INTERPRÉTATION, POUVOIR DU JUGE, COMPENSATION, VENTE, PRIX, PRÉJUudice, EvaLUATION, DÉLAI (Rép., vo Obligations, n. 648 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 1612 et s.). 20 REPRISE D'INSTANCE, CONSTITUTION DE NOUVEL AVOUÉ, INCIDENT, JONCTION AU FOND, RÉSERVES (Rép., vo Reprise d'instance, n. 228 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 234 et s.).

1° En prononçant une condamnation dont l'objet consiste dans la prestation d'un fait personnel à la partie condamnée, les tribunaux ont le pouvoir d'ordonner que leur décision sera exécutée dans un certain délai, à peine de dommages-intérêts fixés par chaque jour de retard (2) (C. civ., 1147). 1re et 2e espèces.

Cette condamnation est encourue, en cas d'exécution tardive de la décision rendue, sans que la partie condamnée puisse en être relevée par une décision postérieure, s'il résulte des termes de la condamnation, dont l'interprétation appartient aux juges du fait, qu'elle était définitive et absolue (3) (C. civ., 1147, 1351). Ire espèce.

Par suite, lorsqu'un arrêt déclare que les contraintes prononcées par une précédente décision contre des vendeurs constituaient une réparation du préjudice pouvant résulter pour l'acheteur du retard

qu'à la suspension des travaux commencés (V. la note qui précède). La Cour suprême a considéré toutefois que le défendeur, ainsi autorisé à continuer les travaux, n'avait aucun intérêt à critiquer cette partie du jugement. C'est l'application du principe qu'on ne peut, faute d'intérêt, demander la cassation d'une décision favorable. V. Cass. 24 oct. 1900 (S. et P. 1902.1.509), et les renvois. EMILE RAVIART, Docteur en droit.

(2-8) On sait que les astreintes peuvent avoir, soit un caractère définitif, soit un caractère provisoire et comminatoire, le juge se réservant, dans ce dernier cas, le droit de reviser la décision qu'il a ren

apporté à la réalisation de la vente, et que, d'ailleurs, le caractère desdites contraintes se dégage avec évidence tant des motifs de la décision qui les a prononcées que du soin qu'elle a pris d'en limiter l'effet, c'est à bon droit qu'en l'état de ces constatations et appréciations souveraines, l'arrét décide que le montant des contraintes se compensera jusqu'à due concurrence avec le prix de vente (1) (C. civ., 1147, 1291). Id.

Dans le cas, au contraire, où la condamnation à une astreinte a le caractère d'une mesure simplement comminatoire, le juge n'est pas tenu de justifier, dès à présent, que la somme ainsi fixée représente exactement le préjudice causé au créancier par le retard, une semblable condamnation étant, de sa nature, sujette à revision (2) (C. civ., 1147, 1351). 2e espèce.

Peu importe, d'ailleurs, qu'un délai ait ou non été spécifié, passé lequel il serait fait droit (3) (Id.). Id.

Lors donc que les termes mêmes, dans lesquels les juges du fond ont condamné une partie à enlever un appareil dans le délai d'un mois à partir de la signification, sous une astreinte de 100 fr. par jour de retard, impliquent qu'il s'agissait d'une condamnation comminatoire, cette décision ne saurait être critiquée comme entachée d'excès de pouvoirs et de violation de la loi, sous le prétexte que les juges n'auraient pas fixé de délai après lequel il serait fait droit (4) (Id.). Id.

2° Si le tribunal, saisi incidemment d'une demande en constitution de nouvel avoué, ne peut, lorsque la partie défenderesse à l'incident ne comparait pas, statuer par un seul jugement sur l'incident et sur le fond, alors du moins qu'en raison de circonstances particulières, ledit jugement, tenant l'instance pour reprise, ne serait pas susceptible d'opposition, ces règles sont

due, et de maintenir l'astreinte, de l'augmenter, de la réduire ou de la supprimer, en tenant compte de l'attitude de la partie condamnée. V. Cass. 3 juill, 1893 (S. et P. 1896.1.67, et la note; Pand. pér., 1895.1.71); Toulouse, 30 juin 1909 (S. et P. 1909. 2.272; Pand. pér., 1909.2.272), et la note. La distinction entre les deux genres d'astreintes dépend de la volonté du juge; à cet égard, son appréciation est souveraine; elle échappe au contrôle de la Cour de cassation. V. Cass. 7 nov. 1888 (S. 1890.1.457. - P. 1890.1,1097; Pand. pér., 1889. 1.72), la note et les renvois; 19 avril 1904 (S. et P. 1906.1.390).

Dans la première espèce rapportée ci-dessus, l'astreinte avait été motivée par le retard apporté à la réalisation d'un contrat de vente : le vendeur était condamné à des dommages-intérêts fixés par chaque jour de retard; l'acheteur pouvait-il compenser jusqu'à due concurrence, avec son prix de vente, le montant de l'astreinte encourue? La question revenait à se demander si la condamnation prononcée était définitive ou purement comminatoire. En effet, si la condamnation était irrévocable, la dette d'indemnité était exigible et liquide; par application de l'art. 1291, C. civ., elle pouvait donner lieu à la compensation légale avec un prix de vente pour le paiement duquel aucun délai n'avait été convenu. Si, au contraire, la condamnation était seulement comminatoire, tant que le tribunal n'avait pas à nouveau statué, l'alloca

étrangères au cas où la partie, assignée en constitution de nouvel avoué, a désigné un avoué et se trouve ainsi représentée dans la cause (5) (C. proc., 344 et s.). 2o espèce.

En conséquence, lorsque, après cessation des fonctions de l'avoué de l'appelant, les intimés ont assigné l'appelant en constitution de nouvel avoué, qu'un nouvel avoué s'est constitué, et, loin de contester le bien fondé de la demande en constitution, a conclu à ce que l'instance fût déclarée reprise, et a ultérieurement pris des conclusions au fond, la Cour a pu, en cet état de la procédure, joindre l'incident au fond, et décider qu'il se trouvait clos par la constitution de nouvel avoué, aucune disposition légale n'obligeant la Cour à statuer sur l'incident par un arrêt spécial, devant acquérir l'autorité de la chose jugée avant l'examen du fond (6) (Id.). Id.

Il importe peu que le nouvel avoué eût formulé des réserves à l'effet de faire décider par un arrêt spécial qu'il ne pourrait être contraint de suivre sur les errements de la procédure antérieure; ces réserves, en contradiction directe avec le fait même de la constitution, étaient inopérantes, et n'empêchaient pas que l'appelant fut valablement représenté dans la cause (7) (Id.). Id.

1re Espèce. (Comp, algérienne C. Lecca).

La Comp. algérienne s'est pourvue en cassation contre un arrêt par lequel la Cour d'Alger, à la date du 22 nov. 1906, avait décidé que les contraintes prononcées contre la requérante par une décision antérieure, au profit de MM. Lecca frères. pour retard apporté à la réalisation d'une vente d'immeubles, étaient définitives et non comminatoires, et devaient se compenser à due concurrence avec le prix de vente.ler Moyen. Violation des art. 1142 et s., 1351, C. civ., et 7 de la loi du 20 avril

tion des dommages-intérêts restait éventuelle et incertaine; elle n'était à proprement parler ni li. quide ni exigible; elle ne pouvait faire l'objet d'un paiement forcé ; par conséquent, elle ne satisfaisait pas aux conditions de la compensation légale. Les juges du fond ayant déclaré que les contraintes prononcées avaient un caractère définitif, la compensation devait s'opérer. La Cour de cassation s'est bornée à faire état des déclarations de l'arrêt attaqué.

Dans la seconde espèce, il s'agissait, selon la déclaration souveraine des juges du fond, d'une astreinte purement comminatoire. Le pourvoi reprochait à l'arrêt attaqué de ne pas avoir limité l'effet de cette astreinte à un délai passé lequel il serait fait droit. La Cour de cassation a écarté avec raison ce moyen, en faisant observer que, la condamnation étant, par suite de son caractère comminatoire, sujette à revision, les juges avaient pu, avant de la prononcer, se dispenser de procéder à une évaluation exacte du préjudice, et qu'ainsi il importait peu qu'un terme n'eût pas été fixé au fonctionnement de l'astreinte. Comp. Meynial, De la sanction civile des obligations de faire ou de ne pas faire (Rev. prat., 1884, t. 2, p. 458). (1 à 4) V. la note qui précède.

(5-6-7) Lorsque la partie assignée en constitution de nouvel avoué ne comparaît pas, le jugement par défaut qui tient l'instance pour reprise peut, comme tous les jugements par défaut contre

1810, en ce que l'arrêt attaqué a décidé que les contraintes prononcées par l'arrêt du 26 oct, 1903 n'étaient pas purement comminatoires, et que leur montant, soit 9.000 fr., se compenserait jusqu'à due concurrence avec le prix de vente dů par les défendeurs éventuels, sous prétexte que rien, dans les termes de cet arrêt, n'autoriserait à considérer ces contraintes comme seulement édictées en vue de vaincre la résistance de la Comp. exposante à passer l'acte de la vente par elle consentie aux frères Lecca, ce qui est en contradiction avec les termes exprès de cet arrêt.

2e Moyen...

-

ARRÊT.

LA COUR ; Sur le premier moyen : Attendu qu'en prononçant une condamnation dont l'objet consiste dans la prestation d'un fait personnel à la partie condamnée, les tribunaux ont le pouvoir d'ordonner que leur décision sera exécutée dans un certain délai, à peine de dommages-intérêts fixés par chaque jour de retard; que cette condamnation est encourue en cas d'exécution tardive de la décision rendue, sans que la partie condamnée puisse en être relevée par une décision postérieure, s'il résulte des termes de la condamnation, dont l'interprétation appartient au juge. du fait, qu'elle était définitive et absolue;

Attendu que, dans l'espèce, il est déclaré en fait par l'arrêt attaqué; 1o que les contraintes prononcées contre la Comp. algérienne par la Cour d'Alger, dans son arrêt du 26 oct. 1903, constituaient une véritable réparation du préjudice pouvant résulter pour les frères Lecca des nouveaux retards s'ajoutant à ceux qu'ils avaient déjà subis du fait de ladite Comp., relativement à la réalisation d'un contrat de vente; 2o que le caractère de la con

partie, être frappé d'opposition. En vue de sauvegarder ce droit d'opposition, la jurisprudence décide que, si le jugement rendu sur le fond, qui est toujours, nécessairement, rendu par défaut (V. Garsonnet, Tr. de proc., 2° éd., par Cézar-Bru, t. 3, p. 159, 8 896, texte et note 25), n'était pas susceptible d'opposition, soit à cause de la nature de l'affaire (V. Cass. 11 juill. 1892, S. et P. 1892. 1.400; Pand, pér., 1893.1.445), soit parce qu'il prononcerait le rejet d'une première opposition (V. Cass. 29 mars 1905, S. et P. 1905.1.811), il doit être statué sur l'incident de constitution de nouvel avoué par un jugement distinct et séparé. V. Cass. 11 juill. 1892 et 29 mars 1905, précités. Cette jurisprudence est évidemment étrangère au cas où la partie, assignée en constitution de nouvel avoué, comparaît sur cette assignation, et c'est à tort que, dans l'espèce rapportée, le pourvol invoquait les arrêts précités.

Le demandeur en cassation objectait que, dans l'acte de constitution de nouvel avoué et dans les conclusions qui l'avaient suivi, il avait formulé des réserves quant à l'effet de la constitution, qui était faite seulement en ce qui concernait l'incident, et sans valoir reprise d'instance. Ces réserves étant, ainsi que le fait justement observer la Cour de cassation, en contradiction avec le fait même de la constitution, étaient dénuées de toute portée. Comp. Garsonnet, Tr. de proc., 8o éd., par Cézar-Bru, t. 3, p. 128, 582, note 1.

damnation à payer lesdites contraintes se dégageait avec évidence à la fois du soin que la Cour d'Alger avait pris d'en limiter l'effet et des autres motifs de son arrêt; qu'en décidant, dès lors, en l'état de ces constatations et appréciations souveraines de fait, que le montant des contraintes dont s'agit se compenserait jusqu'à due concurrence avec le prix de vente, l'arrêt attaqué n'a violé aucun des articles visés au moyen;

Sur le deuxième moyen : (sans intérét); Rejette, etc.

Du 18 nov. 1907. Ch. req.MM. Tanon, prés.; Alphandéry, rapp.; Feuilloley, av. gén. (concl. conf.); Hannotin,

av.

2o Espèce.

(Fouché C. Consorts Chancerelle).

MM. Chancerelle ont assigné M. Fouché pour s'entendre condamner à enlever de leur usine des appareils d'éclairage et de soudage par l'électricité qu'il y avait installés, et dont le fonctionnement était défectueux. Par jugement du 22 sept. 1906, le tribunal de commerce de Quimper a déclaré que M. Fouché serait tenu, dans le mois de la signification du jugement, d'enlever à ses frais les appareils, sous une astreinte de 100 fr. par jour de retard. M. Fouché a interjeté appel de ce jugement, sous la constitution de Me Autret, avoué à la Cour de Rennes. Celui-ci ayant cessé ses fonctions, MM. Chancerelle ont assigné M. Fouché en constitution de nouvel avoué. Par acte du palais du 23 juill. 1907, Me Ségot, avoué à la Cour, a déclaré se constituer pour M. Fouché, mais uniquement sur l'assignation en constitution de nouvel avoué, sans que la présente constitution eût pour objet de reprendre l'instance sur les derniers errements de la procédure. M° Ségot a pris des conclusions au fond; mais, d'autre part, il a conclu à ce qu'il plût à la Cour: Lui donner acte de sa constitution sur l'exploit en reprise d'instance du 4 juill. 1907; dire et juger que l'instance sera tenue pour reprise, sans que l'arrêt à intervenir puisse contraindre Me Ségot à suivre sur les errements de la procédure antérieure à sa constitution; mais qu'au contraire, l'arrêt à intervenir ne saurait engager la cause au fond, tant que la décision à intervenir n'aura pas acquis l'autorité de la chose jugée, notamment par sa notification à avoué ». - La Cour de Rennes a statué par un arrêt du 2 août 1907. Cet arrêt a joint au fond l'incident relatif à la constitution de nouvel avoué. En la forme, tout en donnant acte à Me Ségot de sa constitution sur l'exploit du 4 juill. 1907, il a dit n'y avoir lieu de statuer sur l'incident de constitution de nouvel avoué, auquel la constitution de Me Ségot avait mis fin. Au fond, l'arrêt a confirmé purement et simplement le jugement.

POURVOI en cassation par M. Fouché. 1er Moyen. Violation des art. 344, 346, 347, 348, 349, 350 et 351, C. proc., en ce que, bien que Me Ségot eût expressément déclaré, dans sa constitution du 23 juill. 1907, ne se constituer pour l'exposant que sur

l'assignation du 4 du même mois, en constitution de nouvel avoué, sans que cette constitution eût pour objet de reprendre l'instance sur les derniers errements de la procédure, l'arrêt attaqué a rejeté les conclusions de l'exposant, tendant à faire dire que l'arrêt à intervenir ne saurait le contraindre à suivre sur les derniers errements de la procédure tant que l'arrêt déclarant l'instance reprise n'aurait pas été signifié à avoué; a joint l'incident au fond pour être statué sur le tout par un seul et même arrêt; a dit n'y avoir lieu de statuer sur l'incident de constitution de nouvel avoué, sous prétexte que la constitution de Me Ségot y aurait mis fin, et a statué en même temps au fond, alors que la Cour ne pouvait statuer sur l'incident et sur le fond que par deux arrêts séparés. 2o Moyen...

3e Moyen. Excès de pouvoir et violation des art. 1142 et 1149, C. civ., en ce que l'arrêt attaqué a condamné l'exposant à enlever à ses frais de l'usine Chancerelle les appareils qu'il a installés, à peine d'une astreinte de 100 fr. par jour de retard, sans fixer un délai après lequel il serait fait droit.

ARRÊT (apr. délib. en ch. du cons.).

LA COUR; Sur le premier moyen : Attendu que, s'il résulte de la combinaison des art. 349, 350 et 351, C. proc., que le tribunal, saisi incidemment d'une demande en constitution de nouvel avoué, ne peut, lorsque la partie défenderesse à l'incident ne comparaît pas, statuer par un seul jugement sur l'incident et sur le fond, alors du moins qu'en raison de circonstances particulières, ledit jugement, tenant l'instance pour reprise, ne serait pas susceptible d'opposition, ces règles sont étrangères au cas où la partie assignée en constitution a désigné un nouvel avoué et se trouve ainsi représentée dans la cause; Attendu qu'il résulte des qualités et des constatations de l'arrêt attaqué qu'Autret, avoué de l'appelant, ayant cessé ses fonctions, les frères Chancerelle, intimés, ont assigné Fouché en constitution de nouvel avoué; qu'en réponse à cette assignation, Me Ségot, successeur d'Autret, a déclaré se constituer pour Fouché; que le nouvel avoué, loin de contester le bien fondé de la demande en constitution, conclu à ce que l'instance fût déclarée reprise, et a ultérieurement pris des conclusions au fond; qu'à la vérité, il avait, en même temps, formulé des réserves expresses, sans les appuyer, d'ailleurs, d'aucun motif, à l'effet de faire décider par un arrêt spécial qu'il ne pourrait être contraint de suivre sur les errements de la procédure antérieure; — Mais attendu, d'une part, que ces réserves, en contradiction directe avec le fait même de la constitution, étaient inopérantes, et n'empêchaient pas que l'appelant ne fût valablement représenté dans la cause; Attendu, d'autre part, qu'aucune disposition légale ne prescrivait, en cet état de la procédure, qu'il fùt, comme le réclamait Fouché, statué sur l'incident par un arrêt spécial, devant acquérir l'autorité de la chose jugée avant

a

que le fond ne fût examiné; que, dans ces circonstances, la Cour de Rennes a pu, sans méconnaître les principes de la matière, joindre l'incident au fond, et décider qu'il se trouvait clos par la constitution de Me Ségot; qu'en statuant ainsi, l'arrêt entrepris n'a violé aucun des textes de loi visés dans le premier moyen;

Sur le deuxième moyen ... (sans intérét);

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Sur le troisième moyen: Attendu que le pourvoi reproche à la Cour de Rennes d'avoir commis un excès de pouvoirs et violé les dispositions légales en matière de dommages-intérêts, en condamnant Fouché à enlever, dans le mois de la signification de l'arrêt, les appareils par lui fournis aux frères Chancerelle, sous une astreinte de 100 fr. par jour de retard », sans fixer en même temps un délai passé lequel il serait fait droit; Mais attendu que les tribunaux peuvent, en condamnant le débiteur d'une obligation de faire à l'exécuter dans un délai déterminé, ordonner qu'à défaut d'exécution de sa part dans le temps prescrit, il aurait à payer une somme fixe de dommages-intérêts par chaque jour de retard; que, dans le cas où cette condamnation a le caractère d'une mesure simplement comminatoire, le juge n'est pas tenu de justifier, dès à présent, que la somme ainsi fixée représente exactement le préjudice causé au créancier par le retard, une semblable condamnation étant, de sa nature, sujette à revision; peu importe, d'ailleurs, qu'un délai ait ou non été spécifié, passé lequel il serait fait droit; Attendu que les termes mêmes dans lesquels la Cour de Rennes condamnait éventuellement Fouché au versement d'une somme de 100 fr. par jour impliquaient qu'il s'agissait, dans l'espèce, d'une condamnation comminatoire; que, dès lors, en la prononçant, les juges du fond n'ont pas excédé leurs pouvoirs, et n'ont pas violé les textes de lof visés dans le troisième moyen; Rejette, etc.

Du 20 janv. 1913. - Ch. civ. MM. Baudouin, ler prés.; Rau, rapp.; Mérillon, av. gén. (concl. conf.); Boivin-Champeaux et Bailby, av.

CASS.-CIV. 11 juin 1913.

LIQUIDATION JUDICIAIRE, CONCORDAT PAR ABANDON D'ACTif, Réalisation de l'actif, RÉPARTITION, UNION, EXERCICE DES DROITS ET ACTIONS, LIQUIDATEUR JUDICIAIRE, DATE DE LA CESSATION DES PAIEMENTS, REPORT, ACTION EXERCÉE ANTÉRIEUREMENT AU CONCORDAT, IMMEUBLES, INSCRIPTIONS HYPOTHÉCAIRES, NULLITÉ (Rép., vo Faillite, n. 2848 et s., 2865 et s.; Pand. Rép., vo Faillite, liquidation judiciaire, etc., n. 7812, 7868).

En matière de liquidation judiciaire, comme en matière de faillite, le concordat par abandon d'actif diffère essentiellement du concordat ordinaire; tandis que le concordat ordinaire, dès qu'il est homologue par le tribunal, termine la liquidation judiciaire, au cas de concordat par abandon d'actif, la réalisation et la répartition de

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