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mes réclamées, par le motif que, « si Def- sa propre autorité; et, en outre, violation de 2o l'absence, pendant plus de deux heures, frennes a commis un manquement grave l'art. 1780, C. civ., par le motif qu'en ad- le 27 mars suivant, de Deffrennes, quittant dans l'exercice de ses fonctions, Thuillier mettant même qu'il y ait eu manquement, l'usine, et emportant avec lui le bon de lin'avait qu'à le prévenir ou le congédier, de la part de l'employé, à ses obligations, vraison pour aller au cabaret d'en face, en lui payant son temps de prévenance, ce manquement pouvait bien justifier une immobilisant ainsi un camion attelé et mais qu'il ne pouvait le congédier sans rupture du contrat sans indemnité, mais chargé, obligé d'attendre son retour; le régler; que la perte de son emploi était non pas la suppression du délai de préve- Attendu qu'en statuant ainsi, le jugement déjà pour Deffrennes une peine suffisante ». nance, qui devait être accordé ou payé; attaqué a motivé sa décision, et n'a violé

M.' Thuillier a interjeté appel de ce violation de l'art. 7 de la loi du 20 avril aucun des textes de loi invoqués par le jugement. Devant le tribunal civil de Lille, 1810, en ce que le jugement ne serait pas pourvoi; Attendu, en effet, que si, en l'appelant a soutenu de nouveau qu'il suffisamment motivé, et ne permettrait principe, le patron, qui renvoie son emavait eu le droit de renvoyer son employé pas à la Cour de cassation d'exercer son ployé, même pour un motif légitime, est sans préavis et sans indemnité, à raison contrôle.

tenu d'observer les délais de prévenance des manquements graves que ce dernier

fixés par l'usage ou la convention, il en est avait commis dans l'exercice de son em

ARRÊT.

autrement, lorsque la faute del'employé préploi, et, au cas où le tribunal ne se trou- LA COUR; Statuant sur le moyen du sente, comme dans l'espèce, un caractère verait pas suffisamment éclairé sur l'exis- pourvoi, tiré de l'art. 141, C. proc. : • At- particulier de gravité; que, dans ce cas, tence de ces manquements, il a demandé tendu que les qualités du jugement atta- le patron a le droit de le congédier immé subsidiairement à être autorisé à prouver que contiennent la mention des noms, pro- diatement et sans délai de prévenance, et tant par titres que par témoins : 1° que, fessions et demeures des parties; qu'elles sans avoir à lui payer aucune indemnité; le 26 mars 1912, M. Deffrennes, à qui ce tra- reproduisent les conclusions des parties, qu'il ne lui duit d'autre somme que les savail incombait, avait négligé d'établir les dans lesquelles se trouvent nettement in- laires en cours, proportionnellement au bons de livraison de toute une série d'ex- diquées les questions sur lesquelles le tri- nombre des journées de travail écoulées péditions sur Paris; ? que, le 27 mars, vers bunal était appelé à se prononcer; que le jusqu'à son renvoi; Rejette, etc. une heure et demie de l'après-midi, M. Def- point de droit à juger, les faits qui ont Du 6 août 1912. – Ch. civ. · MM. Baufrennes avait quitté l'atelier, emportant le donné naissance au litige et les préten- douin, ler prés.; Ruben de Couder, rapp.; bon de livraison qu'attendait un camion tions respectives des parties sont exposés Mérillon, av, gén. (concl. conf.). attelé et chargé; qu'il n'était rentré du de la manière la plus complète ; que, nocabaret, vis-à-vis de l'usine, qu'après une tamment, les manquements graves, reproabsence de plus de deux heures. 4 juin chés par Thuillier à Deftrennes dans l'ac

CASS-CIV. 16 mai 1911. 1912, jugement du tribunal civil de Lille, complissement des charges de son emploi, qui infirine le jugement du conseil de pru- sont précisés dans une offre de preuve OUVRIER, ACCIDENTS DU TRAVAIL, ResPONSJd'hommes de Tourcoing, dans les termes que le tribunal a rejetée comme inutile, BILITÉ, LOI DU 9 AVRIL 1898, MINEURS DE suivants : « Le Tribunal; Au fond : les faits étant reconnus par Defirennes; SEIZE ANS, APPRENTIS, INCAPACITÉ PERMAAttendu qu'il n'y a pas lieu de s'arrêter à qu'ainsi, ce moyen manque en fait;

NENTE, SALAIRE DE BASE, OUVRIERS VALIDES l'offre subsidiaire de preuve formulée par Sur le moyen tiré de la violation des

DE MÊME CATÉGORIE, CHOMAGE, GRÈVE Thuillier, les faits articulés étant dès à art. 1184,1780, C.civ., et de l'art. 7 de la loi du

(Rép., vo Responsabilité civile, n. 2170 et présent reconnus par Deffrennes; — At- 20 avril 1810:-Attendu que, des qualités du s., 2191 et s.; Pand. Rép., vo Travail, tendu que ces faits sont suffisamment gra- jugementattaqué, il résulte que Deffrennes n. 2527 et s., 2578 et s.). ves pour justitier de la part de Thuillier a été engagé parle sieur Thuillier, fondeur, un renvoi immédiat, et ce, en raison de

comme pointeau, aux appointements de Le salaire des ouvriers valides de la la pature des fonctions de surveillance 150 fr. par mois, etque, d'après les usages lo- même catégorie occupés dans l'entreprise, qui étaient confiées à Deffrennes; - Par caux, le patron ne pouvait mettre fin au con

Gündemitiservir de la
qui

à la fixation de ces motifs; Réformant le jugement en- trat de louage qu'après préavis d'un mois, l'indemnité due à un ouvrier mineur de trepris; Décharge Thuillier des con- ou, à défaut, moyennant paiement du mois seize ans, victime d'un accident du travail, damnations prononcées contre lui, sous en cours et d'un mois en sus, à titred'indem- est le salaire le plus bas qui eul élé alloué réserve du paiement par lui à Deffrennes demnité de prévenance;

Attendu que,

à ces ouvriers, s'ils eussent régulièrement de son salaire, s'élevant à la somme de pour justifier le congédiement immédiat travaillé pendant les douze mois qui ont 57 fr. 50, somme qui a été offerte avant de Deffrennes par Thuillier, sans paiement précédé l'accident (1) (L. 9 avril 1898, l'audience, etc. ).

d'autres gages que ceux courus lors du art. 8).

renvoi, et sans indemnité de prévenance, Dès lors, doit être cassé l'arrêt, qui, pour POURVOI en cassation par M. Deffrennes. le jugement attaqué s'est fondé sur deux fixer la rente à laquelle a droit un ouvrier

1er Moyen. Violation de l'art. 141, C. faits dont la gravité lui parait suffisante, mineur de seize ans, alteint d'une incapacité proc., à raison de ce que la rédaction du vu surtout « la nature des fonctions de sur- permanente partielle, prend pour salaire jugement ne contiendrait pas l'exposé veillance confiées à Deffrennes » : 1° le non- de base le salaire annuel d'un ouvrier sommaire des points de fait et de droit. établissement par celui-ci, le 26 mars 1912, adulte dans le même établissement, en tenant

2e Moyen. Violation des art. 1184 et 1780, de bons de livraison portant sur toute une compte des chomages occasionnés par des C. civ., en ce que la résiliation ne se- série d'expéditions pour Paris, d'un poids grèves », ces chômages devant rester sans rait pas justifiée, et que, dans tous les cas, de 3.500 kil., et d'une valeur de 1.487 fr. 08; influence sur la détermination légale due elle aurait dû être demandée à la justice par ces bons n'ayant pu être établis que le len- salaire de base de l'ouvrier mineur de seize le patron, qui ne pouvait pas l'imposer de demain, après le départ de l'employé; ans (2) (Id.).

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(1-2) Aux termes de l'art. 8, § 1o, de la loi du 9 avril 1898, « le salaire qui servira de base à la fixation de l'indemnité allouée à l'ouvrier âgé de moins de seize ans ou de l'apprenti victime d'un accident ne sera pas inférieur au salaire le plus bas des ouvriers valides de la même catégorie occupés dans l'entreprise ». La détermination du salaire de base de l'ouvrier de moins de seize ans ou de l'apprenti ne souffre pas difficulté, si les « onvriers valides de même catégorie » sont occupés dans l'entreprise depuis douze mois ; ce sera, conformément à l'art. 10, $ 1er, de la loi du 9 avril 1898,

la rémunération effective reçue par ces ouvriers,
soit en argent, soit en nature, pendant les douze
mois qui ont précédé l'accident. Maig, en dehors
de cette hypothèse, comment calculer le salaire de
base du mineur de seize ans et de l'apprenti? On
pourrait être tenté de soutenir que l'on doit ap-
pliquer toutes les règles que l'art. 10 a établies
pour la détermination du salaire de base de l'on-
vrier adulte ; mais il suffit de se reporter aux
dispositions de cet article, autres que celles qui
visent la situation de l'ouvrier adulte ayant tra-
vaillé douze mois dans l'entreprise, pour se rendre

compte des difficultés à peu près insurmontables auxquelles on se heurterait. En effet, si leg « ouvriers valides de même catégorie , ou quelquesuns d'entre eux, n'ont pas été employés pendant douze mois dans l'entreprise, il faudra, pour ceux-là, ajouter à la rémunération effective qu'ils ont reçue depuis leur entrée dans l'entreprise, « la rémunération qu'ils auraient pu recevoir pendant la période de travail nécessaire pour compléter les douze mois, d'après la rémunération moyenne des ouvriers de la même catégorie pendant ladite pé. riode

(L. 9 avril 1898, art. 10, $ 2, modifié

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(Kerkaert C. Drieux et fils).

un ouvrier mineur de seize ans, victime d'un accident du travail, est le salaire le plus bas qui eût été alloué à ces ouvriers, s'ils eussent régulièrement travaillé pendant les douze mois qui ont précédé l'accident; Attendu que l'arrèt attaqué constate qu’Emile Kerkaert, ouvrier mineur de seize ans chez Drieux et fils, a été victime d'un accident du travail, qui l'a laissé atteint d'incapacité permanente; qu'il fixe à 5:36 fr. le salaire qui doit servir de base à la fixation de la rente qui lui sera allouée, « salaire annuel d'un ouvrier adulte dans le même établissement, en tenant compte des chômages occasionnés par des grèves ); - Mais attendu qu'il n'y avait pas à tenir compte de ces chô. mages, sans influence sur la détermination légale du salaire de base d'un ouvrier mineur de seize ans; d'où il suit qu'en statuant comme il l'a fait, l'arrêt attaqué a violé l'article susvisé; - Casse, etc.

Du 16 mai 1911.- Ch. civ. MM. BallotBeaupré, Jer prés.; Reynaud, rapp.; Lombard, av. gen. (concl. conf.); Passez, av.

M. Kerkaert, agissant au nom de son fils mineur, victime d'un accident du travail, s'est pourvu en cassation contre un arrêt de la Cour de Douai du 17 févr. 1908. Jør Voyen. Violation des art. 8 et 10, 5 ler et 2, de la loi du 9 avril 1898, modifiée par la loi du 31 mars 1905, et de l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810, pour manque de base légale, en ce que, pour déterminer le salaire devant servir de base à la fixation de la rente due au fils de l'exposant, l'arrêt attaqué s'est borné à déclarer que le salaire annuel d'un ouvrier valide de la même catégorie doit être fixé à 5:36 fr., en tenant compte des chomages occasionnés par des grèves, sans spécifier si ce salaire annuel avait été évalué d'après le S ler ou d'après les 2 de l'art. 10 de la loi précitée, et alors qu'il résulte d'ailleurs des constatations des juges du fond que c'est le jer qu'ils ont entendu à tort appliquer.

2e Moyen. Violation des art. 8 et 10, S 4, de la loi du 9 avril 1898, modifiée par la loi du 31 mars 1905, et de l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810, en ce que l'arrêt attaqué, en tenant compte des chòmages occasionnés par des grèves, n'a pas visé le salaire moyen qui eût correspondu à ces chòmages, et en ce qu'il n'a déterminé ni le chiffre de ce salaire moyen ni le mode de calcul qu'il a employé.

ARRÈT. LA COUR;

Sur les deux moyens réunis : Vu l'art. 8 de la loi du 9 avril 1898; Attendu que le salaire des ouvriers valides de la même catégorie occupés dans l'entreprise, qui doit servir de base à la fixation de l'indemnité due à

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n'est pas soumise au contrôle de la Cour de cassation (1) (C. civ., 1116, 1341 et s.). (Vve Brujon C. Dllo Brujon).

ARRÈT. LA COUR; Sur le moyen unique du pourvoi, pris de la violation des art. 893 et s., 1304, 1315, 1341, 1348, 1353, 1421 et 1422, C. civ., et fausse application des art. 1582 et s., du même Code; violation des art. 254, C. proc., et 7 de la loi du 20 avril 1810; manque de base légale : Attendu qu'il est déclaré par le jugement du tribunal de Saint-Etienne du 29 juin 1908, dont les motifs ont été adoptés par l'arrêt attaqué, que la dame veuve Brujon n'a pas fait la preuve que la vente de deux immeubles de communauté, consentie au cours du mariage par le sieur Brujon à la demoiselle Brujon et à la demoiselle Chenet, et la revente opérée par celle-ci à la demoiselle Brujon, étaient simulées et constituaient une donation déguisée ; Attendu qu'il appartenait aux juges du fond d'apprécier le caractère des faits allégués comme constitutifs de la fraude, et aussi s'il y avait lieu d'en ordonner la preuve; que leur appréciation à cet égard n'est pas soumise au contrôle de la Cour de cassation; Attendu que l'arrêt entrepris, dùment motivé, répond aux différents chefs de conclusions prises par la demanderesse; qu'il n'a, par suite, violé aucun des textes de loi visés au moyen; Rejette le pourvoi formé contre l'arrét rendu le 14 janv. 1910 par la Cour de Lyon, etc.

Du 30 avril 1912. - Ch. req. - MM. Tanon, prés.; Malepeyre, rapp. ; Blondel, av. gén. (concl. conf.); Aguillon, av.

CASS.-REQ. 30 avril 1912.

DOL ET FRAUDE, FAITS CONSTITUTIFS, OFFRE

DE PREUVE, APPRÉCIATION SOUVERAINE, POUVOIR DU JUGE (Rép., vis Fraude, n. 20, Preuve testimoniale, n. 237, 414; Pand. Rép., vis Cassation civile, n. 1088 et s., Preuve, n. 140 et s.).

I appartient aur juges du fond d'apprécier le caractère des faits alligués comme constitutifs de la fraude, comme aussi de décider s'il y a lieu d'en ordonner la preuve; et leur appreciation à cet égard

par la loi

a

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31 mars 1905). Si le travail n'est pas continu dans l'usine, il faudra, ponr déterminer le salaire de base du mineur ou de l'apprenti, ajouter à la rémunération reçue, pendant la période d'activité, par les ouvriers valides de même catégorie », le gain que ces mêmes ouvriers auraient fait pendant le reste de l'année (L. 9 avril 1898, art. 10, $ 3).

Le seul énoncé de ces règles permet d'entrevoir à combien de calculs il faudrait se livrer, quelles moyennes, reposant parfois sur des données incertaines ou peu précises, il faudrait établir, pour les appliquer intégralement à la fixation du salaire de base du mineur de seize ans ou de l'apprenti. Cela n'a pas été et n'a pu être l'intention du législateur, lorsqu'il a formulé la disposition de l'art. 8; ce serait faire dire à cet article autre chose que ce qu'il a dit et a entendu dire que d'en faire sortir que toutes les règles de l'art. 10 devraient être appliquées, lorsqu'il s'agit de déterminer le salaire de base du mineur ou de l'apprenti. La loi n'a formellement exprimé qu'une chose, c'est que l'on devait prendre pour base le salaire des ouvriers valides de même catégorie; elle n'a pas dit que, pour faire ce calcul, on appliquerait nécessairement toutes les dispositions de l'art. 10, qui visent des hypothèses exceptionnelles. Il est logique d'appliquer la disposition du & 1er, parce qu'elle pose la règle normale; mais, si l'une des conditions nécessaires pour son application, le travail consécutif pendant douze mois, fait défaut, il faut supposer son existence, et prendre pour salaire de base le

salaire que les ouvriers valides de même catégorie auraient gagné, s'ils avaient travaillé pendant douze mois. C'est la solution que donne la Cour de cassation dans l'arrêt ci-dessus, et elle doit être approuvée, parce qu'elle fournit de l'art. 8 une interprétation à la fois conforme à ses termes et à l'équité, et qu'elle n'applique l'art. 10 que dans la mesure où son application est compatible avec la disposition de l'art. 8.

De cette régle, la Cour de cassation a tiré très justement la conséquence que, lorsque les ouvriers de même catégorie n'ont pas travaillé douze mois dans l'entreprise, parce qu'ils ont fait grève, il n'y a pas lieu, dans la détermination du salaire de base de l'ouvrier mineur de seize ans, de tenir compte des chômages occasionnés par la grève. C'est la pure et simple application de la solution de principe donnée par la Cour de cassation; le salaire de base de l'ouvrier mineur ou de l'apprenti doit être calculé comme si les ouvriers avaient travaillé douze mois, sans faire grève. Il n'y a donc pas à rechercher quelle influence le chômage occasionné par des grèves peut avoir sur la détermination du salaire de base de l'ouvrier victime d'accident, question qui était discutée avant la loi du 31 mars 1905 (V. Cass. 4 mai 1904, S. et P. 1906.1.497, et la note de M. Wahl), et qui, dans l'opinion admise par la Cour de cassation, et d'après laquelle le temps de grève ne peut entrer en compte pour compléter la période de douze mois de travail avant l'accident, dans les termes de l'art. 10, § 1er, de la loi du 9 avril 1898 (V. Cass.

mai 1904, précité. Mais V.la note de M. Wahl sous cet arrêt), doit recevoir la même solution depuis la loi de 1905, cette loi (paragraphe final ajouté à l'art. 10 de la loi de 1908) ne prescrivant de faire état du salaire moyen correspondant aux chômages de l'ouvrier que lorsque « l'ouvrier a chômé exceptionnellement pour des causes indépendantes de sa volonté », ce qui exclut les chômages volontaires, tels que la grève. V. en ce sens, Sachet, Tr. de la législ. sur les acc. du trav., 5° éd., t. 1er, n. 357 et s. Comp. la note précitée de M. Wahl (n. III, in fine).

(1) C'est un point certain que la constatation et l'appréciation des faits constitutifs de la fraude rentrent dans les attributions souveraines des juges du fond. V. Cass. 11 mai 1887 (S. 1887.1.456. P. 1887.1.1133); 3 avril 1889 (S. 1890.1.209. P. 1890.1.508); 31 déc. 1901 (S. et P. 1902.1.399); 9 nov. 1910 (S. et P. 1911.1.88; Pand. pér., 1911. 1.88); 16 nov. 1910 (1er arrêt) (S. et P. 1912.1.100; Pand. pér., 1912.1.100), et les renvois ; notre C. civ. annoté, par Fuzier-Herman et Darras, surl'art. 1116, n. 32 et s.; et notre Rép. gen. du dr. fr., vo Fraude, n. 20; Pand. Rép, vo Cassation civile, n. 1088.

C'est également aux juges du fond qu'il appar. tient d'apprécier souverainement s'il y a lieu d'autoriser la preuve par témoins des faits allégués par une partie. V. Cass. 27 mars 1901 (S. et P. 1901. 1.228); 5 juin 1905 (S. et P. 1905.1.504), et les ren vois. Adde, notre C. civ. annoté, par FuzierHerman et Darras sur l'art. 1315, n. 31 et g.; notre Rép. gen. Ju dr. fr., Preuve testimoniale, n. 237, 414; Pand, Rép., vo Preuve, n. 140 et s.

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CASS.-REQ. 19 avril 1910.

le testament contenant un partage lestamen

taire partiel, passible du droit propor-
ENREGISTREMENT, TESTAMENT, Legs, RAP- tionnel(l) (C. civ., 1075, 1076; LL. 28 févr.

PORT A SUCCESSION, PARTAGE TESTAMEN- 1872, art. lor; 28 avril 1893, art. 19).
TAIRE, PRESCRIPTION BIENNALE, POINT DE N importe peu que le testateur aii subor-
DÉPART, CONDITION SUSPENSIVE,

RÉALISA- donné l'exécution de sa disposition à l'ac-
TION, APPORT EN SOCIÉTÉ, PARTAGE EN JUS-

ceptation des deux héritiers qu'elle concer-
TICE (Rép., vo Partage d'ascendant, n. 981 nait, une semblable clause ne portant aucune
et s.; Pand. Rép., vo Donations et testa- alteinte à la réserve, et ne contrevenant à au-
ments, n. 13708 et s.).

cun principe d'ordre public (2) (Id.).

Si, aux termes de l'art. 61, n. 1, de la loi
Lorsqu'un lestateur a manifesté sa vo- du 22 frim. an 7, il y a prescription pour
lonte de faire passer les exploitations in- la demande des droits après deux années
dustrielles et commerciales qui dépendaient à compter du jour de l'enregistrement, celte
de sa succession dans le loi de ceux de ses prescription, lorsqu'il s'agit d'une percep-
héritiers qu'il estimait plus aptes à les di- tion insuffisamment fuite, n'est applicable
riger; que, d'après les déclarations des que dans le cas les droits pourraient
juges du fond, cette disposition n'a pas

été être réclamés au vu des actes présentés (3)
faite par précipul et hors part, les benefi- (L. 22 frim. an 7, art. 61, n. 1).
ciaires ayant eu à rapporter à la masse le- Spécialement, lorsque ni le testament,
quivaleni de ce qu'ils recevaient, les juges portant partage anticipé au profit de
du fond, qui avaient, de même que la Régie, deux héritiers, d'ailleurs sous une condi.
le devoir de restituer à l'acte son veritable tion suspensive l'acceptation simultanée des
caractère, quels que fussent les termes em- deur bénéficiaires), ni l'acle par lequel
ployés par le testateur', ont

ри
décider
que

ceux-ci oni apporté à une société par eux

constituée leurs attributions, à titre d'heritiers, de legataires ou de colicitants, dans les successions de leurs auteurs, ne pouvaient, par eux-memes, et indépendamment de toutes recherches ultérieures, servir de base à la perception des droits propor, tionnels de partage et de soulte qui ont été réclamés par la suite, la prescription biennale n'a pu courir à partir de l'enregistrement de ces actes (4) (Id.).

Au surplus, si le partagé testamentaire ne portait que sur une partie de la succession, de sorte qu'aux termes de l'art. 1077, C. civ., les biens en dehors de cette disposition devaient étre partage's conformément à la loi, et si la présence d'un héritier mineur entrainait un partage en justice, c'est seulement à partir du partage definitif qu'il a été possible à la Régie de liquider et de percevoir les droils; ei, le jugement d'homologation étant devenu en realité le titre sur lequel la perception devail s'effectuer, la prescription biennale n'est acquise que deux ans après l'enregistrement de ce juge ment (5) (Id.).

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(1 à 5) L'arrêt ci-dessus mérite d'attirer l'atten-
tion, car, d'une part, la distinction entre le par-
tage testamentaire et le legs présente, en droit
civil comme en droit fiscal, une très grande im.
portance; d'autre part, la solution consacrée par
la Cour de cassation ne tend à rien moins qu'à
nier l'existence du legs fait à charge de rapport,
en confondant ce legs avec le partage testamen-
taire.

En droit civil, le partage testamentaire, prévu
par les art. 1075 et 8., C. civ., présente divers carac-
tères spéciaux. Son but, comme celui de la dona-
tion par partage anticipé, est de regler, par un
acte émanant de l'ascendant, la répartition des
biens héréditaires entre les descendants, afin d'é.
viter toutes difficultés entre eux, d'échapper, quand
il y a des mineurs, aux frais d'un partage judiciaire,
de confier les exploitations commencées par le dé-
funt aux descendants les plus aptes a les continuer,
etc. Aussi, d'après les auteurs les plus récents,
l'efficacité du partage d'ascendant est subordon-
née à l'acceptation de tous les descendants qui y
sont mentionnés; on a fait remarquer avec raison
que, s'il en était autrement, le partage testamen-
taire pourrait faire naître les difficultés que le
défunt a voulu éviter. V. Laurent, Princ. de dr.civ.,
t. 15, n. 55; Huc, Comment. du C. civ., t. 6, p. 556,
n. 431; Baudry-Lacantinerie et Colin, Tr. des
don, et test., 30 éd., t. 2, n. 3542. V. cep. en sens
contraire, Demolombe, Tr. des don. et test., t. 6,
n. 99; Colmet de Santerre (contin, de A.-M. De-
mante), Cours anal. de C. civ., t. 4, n. 243 bis II.
S'il résulte de l'art. 1077, O. civ., que le partage tes-
tamentaire, comme le partage anticipé, peut ne pas
comprendre tous les biens du défunt, et que les
biens omis donnent lieu simplement, après le
décès, à un partage supplémentaire, il est indis-
pensable que le partage soit fait entre tous les des-
cendants (C. civ., 1078). Entre les cohéritiers, le
partage testamentaire produit les effets d'un par-
- tage fait entre eux après décès. Ils ont, pour la
garantie des lots et pour les soultes, le privilège du
copartageant (V. Demolombe, op. cit., t. 6, 0. 116;
Laurent, op. cit., t. 16, n. 83; Baudry-Lacantine-
rie et Colin, op. cit., t. 2, n. 3644); chacan d'eux,
en cas d'éviction, peut invoquer l'art. 884, C. civ.
V. Demolombe, op. cit., t. 6, n. 115; Laurent, op.
cit., t. 15, n. 85; Baudry-Lacantinerie et Colin, op.
cit., t. 2, n. 3645. Ajoutons que le partage testa-

ANNÉE 1913. Jer cah,

mentaire est rescindable, comme le partage entre
vifs, pour lésion de plus du quart (C. civ., 1079).

Aucune de ces solutions n'est exacte pour le
legs : il peut être fait, bien entendu, à un seul
ou quelques-uns des descendants; il peut n'être
accepté, s'il est fait à plusieurs, que par l'un ou
quelques-uns d'entre eux (C. civ., 1044 et 1045), et,
n'étant pas un partage, il ne donne lieu, ni au
privilège du copartageant, ni à la garantie, ni å
la rescision pour cause de lésion.

En droit fiscal, les enfants, qu'ils soient légataires copartagés ou héritiers, payent le même droit de succession. Mais, tandis que le testament est soumis à un simple droit d'enregistrement de 7 fr. 50 (LL. 22 frim. an 7, art. 68, § 3, n. 5; 28 avril 1816, art. 45, n. 4; 28 févr. 1872, art. 4), le partage testamentaire est, d'après l'opinion générale, passible du droit de partage. V. Cass. 27 juill. 1873 (s. 1873.1.478. - P. 1873.1198); 8 juill. 1879 (S. 1880.1.177. - P. 1880.390), et les décisions indiquées plus loin. C'est une solution qui, en pratique, a depuis longtemps cessé d'être contestée, que la jurisprudence n'estime plus, par conséquent, nécessaire de démontrer, et qui n'a pas été non plus discutée dans l'espèce. En tout cas, les soultes, dans le partage testamentaire, sont passibles du droit de mutation (L. 18 mai 1850, art. 5). Or, le droit de partage est aajourd'hui de 20 cent. par 100 fr. (L. 22 avril 1905, art. 5), et le droit de mutation, toujours proportionnel, varie suivant la nature des droits sur lesquels porte la soulte.

Il est donc important de distinguer le partage testamentaire du legs.

Il va sans dire qu'il y a partage testamentaire si le testament attribue des biens à chaque enfant; en pareil cas, tous les enfants sont compris au partage; chacun d'eux est alloti. V. Casg. 28 juill. 1873, précité.

Il est certain que le testament contient également un partage testamentaire, s'il attribue tous les biens de la succession à certains enfants, à la charge de payer une soulte aux autres; dans ce cas encore, chacun des enfants est alloti. V. Trib. de la Roche-sur-Yon, 8 déc. 1856 (Rép. pér. de Garnier, n. 923); Trib. de Péronne, 12 mai 1858 (Journ. de l'enreg., n. 16766; Rép. pér. de Garnier, n. 1046); Trib. de Morlaix, 21 août 1860 (Journ. de l'enreg., n. 1722; Rep. pér., n. 1424);

Trib. d'Yvetot, 23 avril 1863 (Journ. de l'enreg., n. 15702); Trib. de Oorbeil, 21 janv. 1864 (Ibid., n. 17789); Trib. de Nice, 25 nov. 1867 (Journ. de l'enreg., n. 18603; Rép. pér., n. 2781).

Un arrêt (V. Cass. 8 juill, 1879, précité) a vu également un partage testamentaire dans le testament léguant tous les immeubles de la succession à l'un des descendants, à charge de rapport, dans une espèce où l'actif de la succession, ainsi qu'il résulte du rapport de M. le conseiller Dareste, ne comprenait que des immeubles. La solution, ici, devient plus douteuse; le legs à charge de rapport est formellement distingué par la loi du partage testamentaire, puisque, suivant l'ancien art. 843, C. civ., tout legs était soumis à rapport en dehors d'une dispense formelle, et qu'aujourd'hui encore (L. 24 mars 1898), il peut y être assujetti par la volonté du défunt; il n'y a pas à cet égard de distinction entre les legs universels et les autres. V. Baudry-Lacantinerie et Wahl, Tr. des succ., 3o éd., t. 3, n. 2744. D'autre part, tous les enfants ne sont pas allotis; par conséquent, le partage ne répond pas aux conditions fixées par l'art. 1078, 0. civ. En troisième lieu, il paraît impossible d'accorder, en cas de legs fait à l'un des enfants à charge de rapport, l'action en rescision aux autres enfants pour cause de lésion de plus du quart; car l'action en rescision suppose une lésion résultant du partage; par conséquent, le legs fait à charge de rapport, et qui ne fait d'attribution qu'à l'un des descendants, contiendrait nécessairement, si on le considère comme un partage, une lésion pour les autres, et ces derniers pourraient ainsi faire toujours réduire les droits concédés à leur cohéritier, ce qui serait contraire à l'art. 843. Enfin, si l'on considère qu'il y a, dans les cas de ce genre, partage testamentaire, il faut admettre que son efficacité est subordonnée au consentement de tous les enfants, ce qui est fort singulier, un seul d'entre eux ayant été alloti. Il faut ajouter que ces diverses entraves à la volonté du disposant paraissent fort étranges; elles le sont d'autant plus qu'elles ne sauraient être admises en cas de legs fait, par un testateur mort sans enfants, à l'un de ses heritiers ; l'acte ne peut alors, en effet, être qualitié de partage testamentaire, puisque le partage testamentaire n'est autorisé par le Code civil qu'entre les enfants. est remarquable que, quand une donation est

1" PART.

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(Dubosc C. Enregistrement).

a Le Tribunal; Attendu que, dans son au Havre, décédé le 1er avril 1902, laissant testament olographe du 22 nov. 1899, en- cinq enfants, dont une fille mineure, a registré le 5 avril 1902, au droit fixe de fait, au profit de ses fils Georges et Al7 fr.50, M. Aimé-Ernest Dubosc, négociant | bert, une disposition qui peut se résumer

Le 23 oct. 1908, le tribunal civil du Havre a rendu le jugement suivant :

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V. en

faite par un ascendant à un seul de ses enfants, l'acte est considéré sans difficulté comme n'étant pas un partage anticipé, bien que les donations soient, en l'absence d'une clause formelle, sujettes å rapport. Et cela a été jugé pour le cas où cet enfant est donataire en vue d'une égalisation de droits avec les autres enfants donataires antétérieurs (V. Trib. de la Seine, 23 janv. 1838, Journ. de l'enreg., n. 11966; Trib. de Péronne, 11 juill. 1815, Journ. de l'enreg., n. 13787; Trib. de SaintOmer, 23 mai 1847, Ibid., n. 14319), à moins que la donation ne puisse être alors considérée comme une sorte de pacte de famille, de contrat de revision en quelque sorte, constatant l'allotissement de chacun. V. Cass. 9 août 1837 (S. 1837,1.674. - P. 1837.2. 156). Et il est de toute évidence, en effet, que la donation faite à un seul enfant n'est pas un partage anticipe ; on ne voit pas dès lors pourquoi le legs fait à un seul enfant serait regardé comme un partage testamentaire, étant donné que, euivant le Code civil, il existe, entre le partage anticipé et le partage testamentaire, une seule diffé. rence, c'est que le premier est fait entre vifs et le second par testament. Il est vrai que l'intérêt de la Régie est tout autre, en matière d'actes entrevifs, qu'en matière d'actes testamentaires. Si le testament contenant un legs est soumis à des droits moins élevés que le testament contenant un partage, la donation ordinaire est frappée de droits plus considérables que la donation par partage anticipé. En ligne directe, la donation entre vifs payait autrefois un droit de 2,50 p. 100 (LL. 22 frim. an 7, art. 69, $ 6, n. 2; 18 mai 1850, art. 10), qui a été élevé à 3,50 p. 100 par l'art. 18 de la loi du 25 févr. 1901, et à 4,50 p. 100 par l'art. 11 de la loi du 8 avril 1910; les donations par partage anticipé ont été distinguées des donations ordinaires par l'art. 3 de la loi du 16 juin 1824, pour être successivement frappées d'un droit de 25 cent. p. 100 sur les meubles et de 1 p. 100 sur les immeubles (même texte), puis, sans distinction entre les meubles et les immeubles, d'un droit de 1 p. 100 (L. 18 mai 1850, art. 5 et 10), de 1,70 p. 100 (L. 25 févr. 1901, art, 18), de 2 p. 100 (L. 8 avril 1910, art. 11). Mais, si cette observation fait comprendre que la Régie prétende ou non voir, dans une disposition identique, un partage d'ascendant, suivant qu'elle est faite entre vifs ou par testament, elle ne justifie pas la jurisprudence, qui suit si aisément la Régie.

Sans doute aussi, la Cour de cassation a reconnu que l'acte entre vifs, qui se présente sous la forme d'un partage anticipé, est passible du tarif réduit applicable à ce dernier acte, alors même que certains des descendants du donateur y sont omis. V. Cass. 15 avril 1850 (S. 1850.1.357. — P. 1850.2.41), et le renvoi. Comp. Cass. 13 janv. 1890 (S. 1891. 1.38. — P. 1891.1.61). Mais la Cour de cassation a donné le véritable motif de cette solution : c'est que l'acte portant lotissement entre les enfants ne saurait perdre son caractère à raison de l'éventualité d'une action en nullité intentée par l'enfant omis, éventualité qui peut ne pas se réaliser, si l'enfantomis ne survit pas au donateur ou s'il renonce à ea succession. L'arrêt du 15 avril 1850, précité, a été rendu contre la Régie, qui, soutenant qu'à raison de l'omission, l'acte ne constituait pas un partage anticipé, prétendait que cet acte devait être considéré comme une donation ordinaire,

passible du droit de donation, en raison du principe d'après lequel la Régie n'est pas juge de la validité des actes. Cette prétention était injustifiable; car, ei la nullité des actes n'est pas opposable à la Régie, celle-ci, en revanche, ne peut se prévaloir de la nullité d'un acte pour lui refuser les faveurs fiscales qui lui sont accordées par la loi à raison de sa nature ; ce serait à la fois se prévaloir de la nullité et la repousser. V. Wahl, Tr. de dr. fiscal, t. 2, n. 622.

Il en est tout autrement, lorsqu'une disposition, soit entre vifs, soit testamentaire, se présente comme une donation ou comme un legs, faits seulement à certains des enfants ; dans ce cas, si la disposition est entre vifs, elle est une donation, et c'est ce qui résulte des motifs mêmes de la loi de 1850; elle doit donc, si elle est testamentaire, constituer un legs.

Nous avons supposé jusqu'ici que la disposition testamentaire, faite au profit d'une partie des enfants, porte sur la succession tout entière; si elle porte seulement sur certains des biens du testateur, et qu'une soulte soit stipulée au profit des autres, il y a encore partage testamentaire, chacun des enfants étant alloti, et le partage testamentaire, comme le partage anticipé, ne supposant pas nécessairement, ainsi que nous l'avons dit, la répartition de la totalité des biens héréditaires.

ce sens, Trib. de Belfort, 17 mai 1858 (Journ. de l'enreg., n. 16791 ; Rep. pér. de Garnier, n. 1005); Trib. d'Yvetot, 2 juill. 1858 (Journ. de l'enreg., n. 16791; Rép. pér., n. 1068); Trib. de Mâcon, 17 déc. 1862 (Rep. pér., n. 1785); Trib. de Strasbourg, 27 mai 1863 (Rép. pér., n. 2056); Trib. de Blois, 11 févr. 1879 (Journ, de l'enreg., n. 20998); Trib. du Havre, 30 oct. 1890 (Rép. pér., n. 7577); Trib. de Péronne, 1er juill. 1904 (Ibid., n. 10890).

Mais l'arrêt ci-dessus recueilli donne la même solution pour le cas où un bien déterminé est légué à un ou plusieurs enfants, à la charge de le rapporter à la succession. V. égal. en ce sens, Trib. de Toulouse, 6 avril 1906 (Rev. de l'enreg., n. 4165). Cela est évidemment logique, si l'on part de l'idée que le legs de toute la succession, fait sous charge de rapport à certains enfants, est un partage testamentaire. Aussi cette solution ne peut-elle, en droit, se réfuter que par les arguments, décisifs suivant nous, qui ont été développés plus haut à propos de cette dernière hypothèse. Ce qui empêche surtout de l'accepter, c'est qu'elle établit une antinomie complète entre les art. 843 et 1076, C. civ.; il n'y a plus, en effet, de legs fait aux enfants à charge de rapport, tout legs à charge de rapport étant nécessairement un partage testamentaire. Il n'est pas permis de supprimer ainsi la qualification que donne un texte aux dispositions testamentaires, et moins encore de donner à un legs dont bénéficie un enfant un caractère juridique différent de celui qu'il faut attribuer à un legs fait à tout autre héritier.

Etant donné cependant que, suivant le tribunal et la Cour de cassation, l'acte était un partage testamentaire, le tribunal a décidé avec raison qu'il pouvait, sans perdre son caractère, être soumis à une condition suspensive : on ne voit pas pourquoi la condition suspensive, autorisée dans tous les actes (O. civ., 1168 et s.), ne le serait pas dans le partage testamentaire. Mais, à notre avis,

le tribunal et la Cour de cassation ont à tort considéré qu'il y avait, dans l'espèce, une condition suspensive. La raison nn peu superficielle qui les a déterminés, c'est que le testateur, léguant des immeubles à deux de ses enfants, déclarait subordonner le legs à la condition de leur acceptation simultanée, Il entendait par là que le lege ne serait efficace que si les légataires l'acceptaient l'un et l'autre. Or, cette acceptation de l'un et l'autre légataires est, comme nous l'avons dit plus haut, indispensable, dans le partage testamentaire, en l'absence même de toute clause qui la prescrive. D'une part, toute disposition testamentaire est subordonnée à l'acceptation du légataire ; d'autre part, tout partage testamentaire tombe, si tous les copartagés n'acceptent pas, et c'est là précisément, ainsi que nous l'avons dit, l'un des caractères essentiels du partage testamentaire, bien que rien n'interdise de subordonner également un legs ordinaire à l'acceptation de tous les légataires. L'acceptation ne fait autre chose que parfaire le partage testamentaire, qui devient un acte obligatoire entre les parties par l'acceptation; jusqu'à l'acceptation, il n'y a qu'une offre; l'offre n'est pas un acte juridique passible d'un droit proportionnel. V. Wahl, op. cit., t. 1, n. 151.

L'observation qui vient d'être faite n'est pas, comme on le verra, sans importance.

La Régie, tout d'abord, considérant que le par. tage était soumis à une condition suspensive, avait appliqué le principe d'après lequel l'acte condi. tionnel n'est pas frappé, lors de son enregistrement, du droit proportionnel (V. Cass. 20 mars 1905, sol. implic., S. et P. 1906.1.197, et la note), lequel devient de plein droit exigible après la réalisation de la condition. V. la note de M. Albert Wahl, n. III, sous Cass. 8 déc. 1903 (S. et P. 1905.1.241).

Etant donné qu'au contraire, l'acceptation des copartagés n'est pas une condition suspensive, mais un élément essentiel à la perfection de l'acte, le droit peut être exigé seulement après l'acceptation, et sur l'acte constatant cette acceptation. Le contrat ne se forme qu'après l'acceptation; ce n'est pas l'acte constatant l'offre qui est rétroactivement, après l'acceptation, soumis au droit proportionnel; c'est l'acte constatant l'acceptation. V. au cas d'un acte administratif comportant approbation par l'autorité supérieure, la note sous Cass. 10 nov. 1909 (S. et P. 1912.1.113; Pand. pér., 1912.1.113). D'où la conséquence, notamment, que, s'il n'existe pas d'acte fournissant le titre de l'acceptation, ou si cet acte n'est pas présenté par les parties à l'enregistrement, le droit ne peut être exigé. Il y a donc là une différence importante ---- à laquelle on pourrait en joindre plusieurs autres, qui, dans l'espèce, n'avaient pas d'intérêt

entre l'acceptation considérée comme élément essentiel du partage, et l'acceptation considérée comme l'accomplissement d'une condition suspensive.

Cette solution est, du reste, admise au moins dans son principe par la Régie. Si, a-t-elle dit, un testament est parfait par la seule volonté da testateur, il n'opère néanmoins de mutation defi. nitive et le partage qu'il contient ne produit effet qu'autant qu'il est accepté par les légataires » (Sol. Régie, 4 mars 1864, S. 1866.2.218. — P. 1865.863). Seulement, par un véritable illo

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ainsi : Pour faciliter la transmission de tage par préciput ou hors part »; - At-
ses usines à ses collaborateurs, il déclare tendu que MM. Georges et Albert Dubosc
leur léguer, sous la condition de leur ac- ont partiellement et implicitement accepté
ceplation simultanée, le droit de conserver la volonté du testateur, en apportant, aux
ses établissements industriels sis en France termes d'un acte notarié du 14 avril 1902,
et à l'étranger, immeubles, matériel, mar- à la société formée entre eux par le même
chandises, achalandage et liquidation de acte, les immeubles, le matériel et l'acha-
créances commerciales, tout en les obli- landage dépendant de leurs établissements
geant à rapporter la valeur de ces éta- sis à Graville (France) et à Riga (Russie),
blissements à sa succession; Attendu précédemment exploités par leur père; -
qu'après avoir fixé cette valeur, pour les Attendu qu'ils ont ensuite obtenu du tri-
immeubles, le matériel et l'achalandage, à bunal civil du Havre, le 2 juill. 1902, un
1.600.000 fr., sauf diminution par voie jugement portant qu'après l'accomplisse.
d'expertise, si les circonstances faisaient ment, en Russie, des formalités nécessaires
paraitre ce prix excessif, le testateur a pour leur envoi en possession des im-
déclaré que cette fixation serait faite, pour meubles sis à Riga, « leurs trois cohéritiers
les marchandises, d'après le cours du jour, seraient tenus de faire délivrance auxdits
diminué de 10 p. 100, et, pour les créances, demandeurs des legs concernant lesdits
d'après le montant de celles reconnues établissements industriels, ensemble les
bonnes; Attendu qu'il a ajouté qu'elle terrains, les constructions, le matériel et
serait imputée sur la part de ses deux fils, l'achalandage..., aux charges exprimées
mais seulement à concurrence de deux par le testament); Attendu que la dé-
millions de francs pour chacun d'eux, et livrance du legs des marchandises a été
ue ceux-ci se libéreraient de la somme amiablement constatée par un acte notarié

du 16 juill. 1902; Attendu, enfin, que
termes trimestriels; – Attendu, enfin, que Mo Narcy, notaire, qui avait été judiciai-
le testament se termine par la déclaration rement commis à cet effet, a dressé, le
suivante : « Dans le cas où les presentes 16 juill. 1902, et le tribunal civil du Havre
dispositions testamentaires seraient consi- a homologué purement et simplement, à
dérées comme un avantage au profit de la date du 18, le procès-verbal des opéra-
l'un ou l'autre, je leur lègue cet avan- tions relativ à la liquidation et au partage

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de tous les biens dépendant : 1° de la communauté ayant existé entre les époux Dubosc-Burdel père et mère: 2° de la succession du mari; 3o de celle d'un fils décédé après la mère; Attendu que ce procès-verbal contient l'analyse du testament précité, et indique de quelle manière les volontés du testateur ont été exécutées, que, lors de l'enregistrement, à la date du 19 juill. 1902, du jugement d'homologation, le droit de partage de 0 fr. 15 p. 100 et la taxe judiciaire de 0 fr. 25 p. 100, établie par l'art. 16, S ler, n. 2, de la loi du 20 janv. 1892, ont seuls été perçus ; - Attendu que l'Administration a considéré que les dispositions faites par M. Dubosc père en faveur de ses deux fils avaient, sous la condition suspensive dont elles étaient affectées, le caractère, non d'un legs, mais d'une division de biens, c'est-àdire d'un partage testamentaire partiel; qu'elle a pensé que la qualification de legs, qui leur avait été donnée par les bénéficiaires et leurs cohéritiers, dans les actes relatifs à l'exécution du testament, ou même par le tribunal, dans les jugements d'expedient intervenus au sujet de ces actes, ne les avaient pas dépouillées de ce caractère; Attendu qu'il lui a paru, dės lors, que le partage testamentaire, quoique partiel, rendait exigible le droit de partage

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,

gisme, la Régie perçoit les droits proportionnels
sur l'acte de partage, quitte à les restituer si
les copartagés renoncent au bénéfice du contrat
(même solution), s'il est annulé (V. les solutions
citées par Maguéro, Tr. alph. des dr. d'enreg., 2° ed.,
to Partage d'ascendant, n. 381), ou si les attri-
butions qu'il contient sont modifiées par un acte
passé entre les copartagés (V, les solutions citées
par Maguéro, op. et verb. cit., n. 382). De deux
choses l'une : ou le partage est parfait sans ac-
ceptation, et les droits, ayant été régulièrement
perçus lors de l'enregistrement de cet acte, n'étaient
pas, tout au moins sous l'empire de l'art. 60 de la
loi de frim. an 7, avant la loi du 18 janv. 1912 (8.
et P. Lois annotées de 1913, p. 361; Pand. pér.,
Lois annotées de 1913, p. 361), restituables à rai-
son de modifications ultérieures; ou le partage
n'est parfait que par l'acceptation, et les droits
ne peuvent être perçus qu'après l'acceptation, et
si un titre constatant cette acceptation est présenté
à l'enregistrement.

Quoi qu'il en soit, la Régie, pour rester fidèle à
ses errements, aurait dû percevoir les droits sur
le partage testamentaire; en tout cas, étant donné
qu'elle considérait le partage comme étant soumis
à la condition suspensive de l'acceptation, le droit
pouvait être exigé après la preuve acquise de cette
acceptation, mais à titre de supplément de droit
dû, en raison de la rétroactivité de la condition ac-
complie, sur le partage testamentaire lui-même.

Pour déterminer le point de départ de la prescription du supplément de droit réclamé par la Régie, le tribunal et la Cour de cassation ont constaté avec raison (V. plus loin) que le partage fait ultérieurement en justice, et portant sur toute la succession, avait seul permis à la Régie de réclamer ce droit supplémentaire. A supposer même que l'enregistrement d'un titre constatant l'acceptation fût nécessaire pour rendre le droit exigible, comme nous le pensons, le droit a été exigé avec raison ; car le partage judiciaire, qui relatait le partage testamentaire, et auquel participaient

les deux enfants copartagés, fournissait par là
même le titre de leur acceptation. Mais le tri-
bunal a eu tort de dire que les deux actes
étaient « connexes, comme formant un seul tout ».
Cela est inexact : les copartagés tiraient du par-
tage testamentaire, et de cet acte seulement,
leur droit de propriété sur les biens compris dans
ce partage; le partage définitif n'avait pu leur
donner de droit sur des biens qui leur appartenaient
déjà. La question a, et avait notamment dans l'es.
pèce, un grand intérêt : pour le calcul du droit de
mutation, dû à raison de la soulte, il faut considérer
uniquement le partage testamentaire, et, si cette
soulte est diminuée par le partage total de l'héré-
dité, le droit de mutation ne se trouve pas diminué
d'une façon correspondante. V. en ce sens, Trib.
de Péronne, 1er juill. 1904, précité. Ce qui est
vrai, c'est que la Régie, sans établir du reste au-
cune connexité entre le partage testamentaire et
l'acte modificatif de ce partage, admet, comme
nous l'avons vu, et peu logiquement, que, si l'ac-
ceptation du partage testamentaire n'intervient
pas avant l'acte moditicatif, cet acte doit servir
de base aux droits exigibles sur le partage testa-
mentaire. O'est la pratique qu'elle avait suivie dans
l'espèce. Elle manifestait ainsi un nouveau défaut
de logique; car, en fait, antérieurement au partage
de la succession, les copartagés avaient implicite-
ment accepté le partage testamentaire en appor-
tant les biens partagés dans une société; or, la
Régie a décidé antérieurement, et même, paraît-il,
a fait juger que la modification postérieure à l'ac-
ceptation n'exerce aucune influence sur les droits
auxquels donne lieu le partage testamentaire
(V. Sol. Régie, déc. 1872, et Trib. de Laval,
22 juin 1889, cités par Maguéro, op. et verb. cit.,
n. 883).

Cette matière délicate s'obscurcit donc singu-
lièrement.

Sur la question de la prescription des droits, il y a également des observations à faire.

D'une manière générale, la prescription biennale

établie par l'art. 61, n. 1, de la loi du 22 frim. an 7 ne court contre la Régie qu'à partir de l'enre. gistrement d'un acte qui lui permet, sans autres recherches, de percevoir les droits, c'est-à-dire qui établit d'une manière complète, à lui seul, la mutation. V. Cass. 2 août 1909, qui suit, et la note. Si donc on admet avec nous que les droits proportionnels dus sur un partage testamentaire ne peuvent être exigés que lors de l'enregistrement d'un acte formant le titre d'acceptation, il est exact, comme cela a été décidé, que la prescription biennale, dans l'espèce, devait courir seulement du jour de l'enregistrement du partage de la succession, qui seul établissait l'acceptation. L'acte antérieur, par lequel les copartagés apportaient les immeubles partagés dans une société, ne fournissait pas ce titre, puisqu'il ne faisait pas allusion au partage testamentaire, et par conséquent ne permettait pas de constater l'exigibilité des droits sans recherches ultérieures.

Si, au contraire, on estime, avec la Régie, que les droits proportionnels doivent être perçus lors de l'enregistrement du partage testamentaire luimême, indépendamment de toute acceptation, la prescription biennale devait courir dès l'enregistrement de ce partage, de sorte que, dans l'espèce, elle était acquise lors de la réclamation de la Régie.

En considérant l'acceptation comme une condition suspensive, à laquelle était subordonné le partage testamentaire, le tribunal et la Cour de cassation ont été amenés à décider que, les droits ne pouvant être exigés qu'après la réalisation de la condition, la prescription biennale, qui, en pareil cas, ne court qu'à partir de l'enregistrement de l'acte constatant la réalisation de la condition (V. Cass. 2 août 1909, précité, et la note), avait son point de départ au jour de l'enregistrement du partage définitif. Mais, comme nous l'avons montre, l'acceptation ne saurait être une condition suspensire.

ALBERT WAHL

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