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1re,

CASS.-CRIM. 22 juin 1912 (3 ARRÊTS). RETRAITES OUVRIÈRES ET PAYSANNES, PRÉ

LÈVEMENT SUR LE SALAIRE, TIMBRES, OUVRIER, REFUS DE PRÉSENTATION DE CARTE, PATRON, RESPONSABILITÉ PÉNALE, PRÉSOMPTION DE FAUTE (ABSENCE DE), CONSIGNATION AU GREFFE DE LA JUSTICE DE PAIX, CONTRIBUTION PATRONALE, SANCTION PÉNALE (ABSENCE DE) (Rép., Retraites ouvrières, n. 1 et s.; Pand. Rép., vo Retraites et pensions, n. 1654 et s.).

Si l'employeur est lenu, aux termes de l'art. 3 de la loi du 5 avril 1910, sur les retraites ouvrières el paysannes, d'opérer un prélèvement sur le salaire de l'employé, c'est afin de pouvoir apposer un limbre, qui est pour partie la représentation de ce prélèvement, sur la carie délivrée à l'employé; el ces deux obligations correlatives ne peuvent être remplies que si une carte

est présentée à l'employeur, le défaut de pour établir sa bonne foi, l'autre moyen ile présentation de cette carte rendant impos- preuve que la consignation des cotisations sible l'apposition du timbre prescrit, ei af au grefl'e de la justice de paix ; une telle franchissant dès lors l'employeur de l'obli- présomption, fül-elle instituée par la loi, gation de prélever sur les salaires de l'em- se trouverait détruite, quand le défaut d'apployé les versements à la charge de ce der- position des timbres est le résultat de la nier (1) (L. 5 avril 1910, art. 3). 2e faute exclusive de l'employé'; et il en est et 3e espèces.

ainsi, lorsque la carte n'a pas été présentée La loi ne frappant d'une amende, dans à l'employeur (3) (Id.). -- Id. l'art. 23, que l'employeur ou l'employé par L'art. 23, S2, de la loi, en autorisant la la faute duquel l'apposition dutimbre n'aura consignation au grese par l'employeur qui pas eu lieu, la faute commise par l'employé veut se libérer, ne vise que la seule contriqui n'a pas présenté sa carte, en mettant bution de l'employeur (4) (Id.). - lre esl'employeur dans l'impossibilité d'observer pèce. les formalités qui lui sont imposées, l'exo- Au surplus, la loi n'a donné ainsi à l'em

même de toute responsabilité ployeur qu'une faculté, mais n'a pas créé pénale (2) (L. 5 avril 1910, art. 3 et 23). à sa charge une obligation (5) (Id.). - 1re, Id.

20 et 3e espèces. On ne saurait d'ailleurs soutenir qu'il Et aucune sanction pénale n'est attachée exisle à la charge de l'employeur une pré

à l'inobservation de cette disposition (6) somption de faute, et que celui-ci n'aurail, (Id.). – Id.

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(1 : 0) La loi du 6 avril 1910 (S. et P. Lois annotées de 1911, p. 1; Pand. pér., Lois annotées de 1911, p. 1), sur les retraites ouvrières et paysannes, vient de soulever un nouveau débat devant les tribunaux sur une question qui est essentielle pour son existence, et qui aura probablement son épilogue devant le Parlement. Après la chambre civile, la chambre criminelle s'est, en effet, prononcée, mais sur un point un peu différent, sur le sens de l'art. 23. V. l'arrêt de la chambre civile du 11 déc. 1911 (S. et P. 1912.1.9; Pand. pér., 1912.1.9), avec le rapport de M. le conseiller Reynaud et la note de M. Sachet.

Il n'est pas exagéré de penser que, de l'interprétation donnée à ce texte, dépendait le sort de la loi de 1910. Le principe de l'assurance obligatoire, accepté, semble-t-il, à l'étranger, rencontre au contraire de nombreuses résistances en France : toutes ne sont pas dues à l'ignorance ou au parti pris. Il y a certainement quelque raison pour les ouvriers, qui n'espèrent guère atteindre l'âge fixé dans la loi pour la retraite, do n'être pas très portés à verser en vue d'une vieillesse qu'ils ne verront pas. Quant aux employeurs, ne redouteraientils pas les charges que la loi leur impose qu'ils trouveraient déjà, dans la conduite des ouvriers envers elle, un motif suffisant d'indifférence à son égard. Raisonnée, ou, si on le croit, erronée, l'opposition existe de toutes parts, frequente et commune : cela est certain. V. Herriot, Questions prat. de législ. ouvr., 1912, p. 1.

Il incombait à l'art. 23, qui prononce des peines contre l'employeur ou l'assuré par la faute duquel l'apposition de timbres de retraite n'aura pas eu lieu, de triompher de ces résistances, et d'assurer, par le jeu d'une responsabilité pénale, le respect du principe d'obligation voulu par le législateur. C'est ce texte qui formait, pour ainsi dire, la clef de voûte de tout le système législatif; c'est sur lui que reposait le caractère obligatoire des assurances pour la vieillesse; c'est par lui que la loi devait être obéie. Il est clair, en effet, qu'avec la possibilité d'échapper aux sanctions pé. nales, ou seulement avec la difficulté de les appliquer, tout l'édifice laborieusement construit par le législateur s'écroulait : l'assurance obligatoire devenait un mot sans importance; et les calculs, minutieusement établis pour fixer le chiffre des retraites, se trouvaient faussés par la défection d'un grand nombre d'assujettis. Comp. Cabouat, Examen doctrinal (Rev. crit., 1912, p. 334).

O'est surtout à l'égard des employeurs que l'existence de cette responsabilité pénale avait de

ANNÉE 1913. – 1er cah.

l'importance. Ne disons pas qu'il doit y avoir dans les sévérités de la loi deux mesures; ne déclarons pa", ce que certains ont proclamé, ou laissé entendre, qu'une pression trop vive, exercée sur les ouvriers, pouvait avoir de fâcheuses répercussions politiques, et détourner les grandes masses électorales de la République. Laissons ce genre de considérations, qui serait déplacé ici. Il est exact de reconnaître cependant que, si l'on parvenait à imposer la loi sur les retraites aux employeurs, le succès définitif de celle-ci ne serait plus qu'une affaire de temps. Insensiblement, par leur autorité ou simplement par leur exemple, les patrons amèneront leurs ouvriers à les imiter, et à satisfaire, en ce qui les touche eux-mêmes, à leurs obligations légales. Voila pourquoi la responsabilité mise à leur charge prenait une importance sociale particulière; voilà ce qui explique qu'après la réponse peu satisfaisante de la chambre civile, on se soit tourné du côté de la chambre criminelle, pour essayer de sauver la loi de 1910, dans l'hypothèse, très fréquente, où les ouvriers refusent de se soumettre à ses exigences, soit en ne retirant pas leur carte, soit en s'opposant, à l'instant de la paye, à laisser opérer un prélèvement sur leur salaire.

Mais la chambre criminelle a dû à son tour détromper les espérances que l'on avait placées en elle. La solution qu'elle consacre dans l'arrêt de principe qu'elle a rendu, et qui est suivi de deux autres, du même jour, dans le même sens, ruine complètement l'espoir, que l'on avait eu, de croire que l'on pourrait, simplement par une contrainte exercée sur les employeurs, assurer å la loi sur les retraites un fonctionnement régulier. A notre avis, la chambre criminelle, qui n'avait pas de politique à faire, même pas de politique sociale, était obligée, en l'état actuel du texte, de juger comme elle l'a fait; et, si l'échec de la loi de 1910 doit être la conséquence de ses arrêts, il serait injuste de laisaer accréditer l'opinion que la responsabilité lui en incombe. La faute en est aux auteurs de cette loi, qui ont posé le principe de l'assurance obligatoire, et n'ont pas su l'imposer.

Qu'on veuille, en effet, se rappeler les principes qui, de toute certitude, dominent l'interprétation des lois pénales. L'interprète, pour déterminer le sens d'une loi, doit rechercher ce qu'a voulu et ce qu'a fait le législateur. S'il s'attache simplement à ce qu'a voulu le législateur, il court le risque de prendre pour la loi ce qui n'est pas la loi; car

volonté, qui n'est pas exprimée par un texte, n'est qu'une intention imparfaite, une volition incomplète, qui n'oblige pas, parce qu'elle n'a

pas la forme qui l'impose. Les exemples abondent. On en trouvera un, qui est topique, dans la loi du 31 mars 1904, sur les tribunaux répressifs indigènes. V. la note, n. II, sous Cass. 22 juill. 1904 (S. et P. 1907.1.249). L'esprit et la lettre de la loi sont donc deux pôles, dont l'interprète doit tenir compte; et, si l'on peut dire que la lettre de la loi, sans son esprit, tue, il convient immédiatement d'ajouter que l'esprit, sans la lettre, n'est pas moing meurtrier, en enlevant au droit pénal la certitude et la rigidité, qui lui sont nécessaires pour empêcher la tyrannie du pouvoir de s'exercer, et que seule peut lui donner une formule rédigée.

Un impérieux devoir s'imposait donc à la jurisprudence de dégager, avant toute chose, le sens matériel de l'art. 23.

Or, que dit celui-ci ? Reprenons-le pour le savoir. Il est conçu dans les termes suivants :

L'employeur ou l'assuré, par la faute duquel l'apposition des timbres prescrite par la présente loi n'aura pas eu lieu, sera passible d'une amende égale aux versements omis, prononcée par le juge de simple police, quel qu'en soit le chiffre...

». Sonlignons immédiatement l'expression de faute : le mot est capital! Donc, pour faire naître la responsabilité à la charge de l'employeur, et il en est de même pour l'assuré, — il est nécessaire d'établir l'existence d'une faute. Que l'on entende cette faute aussi largement que l'on voudra, que, devant la généralité des termes de la loi, on admette qu'elle puisse consister tant dans des faits positifs d'opposition ou de résistance du patron à l'exécution de la loi que dans un manquement à une des obligations que la loi lui impose, qu'on lui impute même les faits d'inexécution qu'il partagerait avec les ouvriers, il y aura toujours, dans l'exigence de cette condition, une limite infranchissable pour le juge, une barrière au delà de laquelle il ne saurait être question, sans abus tyrannique, de responsabilité pénale. Comp. Cabouat, op. cit., p. 343. Pas de faute relevée contre l'employeur, pas de responsabilité pénale à sa charge! V. Salaiin, Les retraites ouvr, et paysannes, 2 éd., n. 256. C'est d'ailleurs le principe de droit commun ; et ce principe essentiel d'équité et de justice, qui parait avoir été perdu de vue un moment dans la préparation de la loi de 1910, doit d'autant plus être suivi que s'il s'agit de matières rangées dans la compétence du juge de simple police, on est en présence en réalité de délits, qui peuvent être passibles de peines correctionnelles. V. S. et P. Lois annotées de 1911, p. 65, note 125 ; Pand. pér., Lois annotées de 1911, p. 65,

1** PART. 7

.

1re Espèce. – (Lévy).

concil: Le Tribunal : Attendu que M. Lévy est poursuivi pour avoir contrevenu à la loi du 5 avril 1910, en ne prélevant pas sur les salaires de ses ouvrières

20 oct. 1911, jugement par défaut du tri. bunal de simple police de Paris, ainsi

la cotisation à leur charge, et en versant au greffier de la justice de paix sa contribution patronale seule; En droit : Attendu que le régime des retraites, ins

note 125. Or, peut-on parler véritablement de faute commise par les employeurs, lorsque la nonapposition des timbres de retraite a été matériellement rendue impossible de leur part, par le refus des ouvriers de retirer leur carte, ou de laisser faire un prélèvement sur leur salaire? Car c'étaient là les espèces qu'avait à juger la chambre criminelle. Ne faut-il pas, pour que le patron exécute l'obligation qui lui incombe d'apposer des timbres sur une carte, que d'abord il n'y ait pas refus opposé par l'ouvrier, et qu'il y ait remise par celui-ci de sa carte ?

Au reste, personne n'a contesté le sens clair de l'art. 23. Ce qu'on conteste, c'est que l'employeur soit exempt de faute dans ce cas. On ne nie donc pas qu'il faille, pour établir sa responsabilité, l'existence d'une faute; mais cette faute, on la trouve, ou du moins on croit la trouver, dans deux directions opposées.

Elle serait, d'après certains, dans le fait que le patron n'a pas retenu, comme l'art. 3 de la loi lui en donnait le droit, au moment de la paye, les cotisations que ses ouvriers devaient verser pour leur retraite. Il pouvait, dit-on, retirer lui-même les cartes de ces derniers, et y apposer personnellement les timbres. La résistance de ces ouvriers n'était pas invincible; et le patron était en faute de ne pas l'avoir vaincue.

Mais la chambre criminelle n'aurait pas eu de peine à faire justice de cette opinion, que la chambre civile avait déjà condamnée, et qui ne trouvait d'ailleurs aucun appui sérieux dans la rédaction de l'art. 23, du moins dans celle finalement donnée à ce texte. Rien, en effet, dans les disposition sactuelles de ce texte, n'indique, d'une manière positive, que l'on ait investi le patron de cette prérogative exorbitante, consistant à retenir d'autorité quelque chose qui ne lui appartient pas, quelque chose qui ne lui est pas dû, la cotisation ouvrière de l'assurance obligatoire. Sans doute, l'art. 3 de la loi de 1910 dispose que les versements des salariés sont prélevés sur le salaire par l'employeur lors de chaque paye, et son g 3 ajoute que le montant total du prélèvement et de la contribntion patronale est représenté par un timbre mobile que l'employeur doit apposer sur la carte de l'assuré. Cette obligation du patron, qui le lie visà-vis de l'assuré, consiste seulement en ceci que, si l'ouvrier veut s'assurer sur la vieillesse, l'employeur ne peut pas se refuser au prélèvement à effectuer sur le salaire ni à l'apposition de timbres mobiles sur la carte de son employé. Mais cette obligation n'implique pas le droit du patron de faire un prélèvement forcé sur le salaire de les ouvriers. Il n'a pour cela ni titre légal ni titre judiciaire ! Que cependant le législateur ait eu un moment l'intention de rendre le patron responsable des non-versements de ses ouvriers, ce qui aurait pu faire croire qu'il avait le droit de leur imposer ces versements, la chose est possible (V. la rédaction de l'art. 23, votée par la Chambre des députés, 11€ séance du 7 févr. 1906; J. off. du 8, déb. parl., p. 581, et la rédaction présentée par la commission du Sénat, à la séance du 28 janv. 1910; J. off. du 29, déb. parl., p. 142). Mais il a sûrement abandonné cette intention, en adoptant l'amendement déposé au Sénat par MM. Guillier et Cordelet (V. le texte de cet amendement, et les observations présentées par M. Guillier à la séance du Sénat du 1er févr. 1910; S. et P. Lois annotées

de 1911, p. 65, note 126 ; Pand. pér., Lois annotées de 1911, p. 65, note 126). Et peut-être trouverat-on sage ce revirement, qui a permis d'éviter, par le précompte obligatoire, une nouvelle pomme de discorde entre patrons et ouvriers, un nouveau sujet de haine, et une nouvelle cause de grève entre le travail et le capital. Sage ou non, le refus d'admettre le précompte obligatoire est certain. Est-ce que le législateur aurait, en effet, parlé, dans l'art. 23, $ 2, d'impossibilité d'apposer les timbres de retraite sur la carte, si les retenues avaient pu être imposées obligatoirement, et si le patron avait eu le pouvoir de vaincre l'opposition de ses ouvriers ? On dira peut-être que cette impossibilité se réfère au cas où, au début de l'année, les cartes ne sont pas encore distribuées : soit! Est-ce qu'alors, dans cet art. 23, le législateur aurait admis ce mode de paiement, qui ne réalise aucune. ment le veu de la loi : le versement, qui va au fonds de réserve, de la seule contribution patronale entre les mains du greffier de la justice de paix ? Est-ce qu'il aurait, enfin, dans l'art. 23, § 1o', mentionné que la non-apposition des timbres de retraite pouvait avoir lieu par la faute des assurés, si, quelle que soit leur conduite ou leur attitude, le patron, qui est débiteur des salaires, et qui a à payer ses ouvriers, peut leur retenir le montant de leur cotisation? V. Cass. 11 déc. 1911 (motifs), précité, et le rapport de M. le conseiller Reynaud. Adde, Cabouat, op. cit., p. 329, 334 et s. V. cep, en sens contraire, la note de M. Sachet sous l'arrêt de la chambre civile du 11 déc. 1911, précité.

Ce n'est point lè d'ailleurs le genre de faute que l'on a songé à relever devant la chambre criminelle. L'échec éprouvé devant la chambre civile laissait trop peu de chance de succès sur ce terrain. Il fallait songer à autre chose. L'employeur, a-t-on donc soutenu, est en faute, non pas précisé. ment lorsqu'il n'a pas apposé les timbres de retraite sur les cartes de ses ouvriers, mais lorsque ce résultat s'est produit par suite d'un manquement quelconque de sa part à l'une des obligations que le législateur fait peser sur lui pour arriver à cette apposition des timbres. - Jusqu'à présent, la formule est très correcte, et peut être tenue pour exacte. Mais poursuivons : quel est ce manquement que l'on peut relever à la charge de l'employeur: C'est, dit-on, d'avoir omis, au moment de la paye des salaires, de demander à ses ouvriers s'ils ont une carte, et s'ils consentent à une retenue sur leurs salaires ! Voilà l'oubli sur lequel on prétend asseoir une responsabilité pénale; c'est un oubli bien mince, parce que l'interpellation ne saurait avoir guère d'efficacité, le patron ne pouvant pas opérer d'office la retenue, et un oubli trop faible, semble-t-il, pour fonder cette chose grave qui est l'application d'une sanction pénale.

Mais, enfin, si c'était là, cependant, le système de notre loi, l'interprète n'aurait qu'à s'incliner. Heureusement, la Cour de cassation a montré que le législateur avait eu un souci plus grand de la responsabilité pénale, et ne l'avait pas établie sur d'aussi minimes arguties. Et d'abord, où est écrite cette soi-disant obligation incombant aux em. ployeurs d'interpeller leurs ouvriers au moment de la paye? quel est le texte qui la contient? quelle est la disposition qui l'impose ? C'est en vain qu'on le chercherait. O'est donc ici le cas de rappeler les règles de l'interprétation des lois, que nous indiquions plus haut, que ce qui n'est

pas dans la loi est hors la loi. Sans doute, en fait, il arrivera souvent que le patron, pour savoir s'il doit opérer le précompte sur les salaires, demandera aux ouvriers s'ils acceptent la retenue ; il la leur fera même subir, en ne leur versant que le surplus de leur salaire, sauf à leur compter celui-ci intégralement à la moindre opposition. Mais, de lå å ériger en obligation légalement imposée une pratique qui facilite simplement la tâche du patron, il y a loin; et surtout à sanctionner de peine cette obligation, il y a plus loin encore. Il faudrait même supposer qu'entre les obligations qui incombent aux employeurs, et celles qui existent å la charge des assurés, il y a un certain ordre successif, qui implique une certaine initiative prise par les patrons. Ne trouvant rien dans la loi, qui laisse supposer un ordre, la Cour de cassation a pu justement déclarer que les obligations des employeurs et des assurés sont corrélatives, et que la première chose qui soit exigée, pour qu'on puisse imputer comme faute à un employeur de n'avoir pas apposé de timbres de retraite sur une carte, c'est qu'il ait eu la possibilité matérielle de faire l'apposition, c'est-à-dire que les assurés aient retiré leur carte, et qu'ils ne se soient pas opposés à cette apposition.

La solution de la jurisprudence est dès lors acquise. Car, si la faute de l'employeur n'est ni dans le défaut d'apposition des timbres sur la carte de l'assuré, ni dans l'absence d'interpellation , celui.ci, elle n'est plus nulle part. Elle ne saurait être davantage, en effet, dans le non-versement, qui pouvait se rencontrer en fait, de la contribution patronale entre les mains du greffier de la justice de paix. Sur ce point, l'art. 23, § 2, ouvre au patron une solution, qui a une grande importance pratique, soit pour mettre sa bonne foi dans la non-application de la loi à l'abri de toute discussion, soit pour lui éviter l'ennui de garder dans sa caisse les sommes dont il reste debiteur, malgré le refus de ses ouvriers de s'assurer, et qu'il pourra être obligé à verser quand ce refus cessera. Mais, comme le déclare la chambre criminelle, après d'ailleurs la chambre civile, il y a là simplement un mode facultatif de libération, dont l'omission, précisément parce qu'il n'est pas imposé, n'engage pas la responsabilité des employeurs, a sous la sanction d'une peine », ajoute, dans nos arrêts, la chambre criminelle. Adde, Salaün, op. cit., n. 257, p. 373, Revoyons, en effet, l'art. 23 dans son ensemble. Il parle de peine seulement dans le § 1er, et à propos d'une certaine mesure, la non-apposition de timbres sur la carte individuelle de retraite, avant même qu'il soit encore question, comme conséquence civile de la faute de l'assuré, de versement entre les mains du greffier. Il serait donc contraire aux principes les plus élémentaires du droit pénal de transporter la sanction pénale du ? 1er au ? 2, et de l'appliquer à une mesure différente, qui n'a rien de semblable à celle pour laquelle elle a été écrite. V. Cabouat, op. cit., p. 345.

Or, cet oubli des principes essentiels du droit pénal, les défenseurs de l'assurance obligatoire n'ont pas craint de le commettre sur un point important, pour arriver pratiquement au respect de l'euvre établie par cette loi. Il ne suffisait pas, en effet, d'affirmer théoriquement une prétendue obligation des employeurs d'interpeller leurs ouvriers au moment de chaque paye. Il fallait, de plus, mettre à leur charge une présomption d'inaccom

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de soportes pour l'employeur de la regledi prende y sa por delanteront ce juge.

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titué par la loi du 5 avril 1910, repose sur les trois ordres d'opérations suivantes, qui sont la base et la garantie même de l'existence de cette loi : lo cotisation obligatoire des salariés qui bénéficient de la loi; 20 contribution des employeurs et de l'Etat à la constitution de la retraite ; 3° prélèvement par le patron de la cotisation de l'ouvrier sur le salaire lors de chaque paie;

Attendu qu'aucun doute ne peut s'élever et ne s'élève sur le principe et l'application des deux premiers ordres d'opérations; mais qu'on conteste l'obligation où serait l'employeur de prélever la cotisation de ses ouvriers pour la joindre à sa contribution et déposer le tout au greffe de la justice de paix ; que c'est l'opinion qu'a notamment émise M. Lévy, lorsque l'auteur du procès-verbal du 25 sept. 1911 s'est présenté chez lui; Attendu que le texte de l'art. 3 de la loi du 5 avril 1910 est formel; qu'il dispose expressément que a les versements des salariés sont préle. vés sur le salaire par l'employeur lors de chaque paie »; que le texte ajoute, sous le $3 : « Le montant total du prélèvement et de la contribution patronale est représenté par un timbre mobile, que l'employeur doit apposer sur la carte de l'assuré n; Attendu qu'il résulte incontestablement de ces dispositions que le législateur a entendu faire et a fait de l'employeur le collecteur des cotisations de ses ouvriers; qu'il a entendu obliger et a obligé le patron à adjoindre à ces cotisations sa contribution personnelle, si bien que c'est par un seul timbre, apposé sur la carte du salarié, que se traduit et se justifie le double versement imposé par l'art. 3; Attendu que cette manière de procéder ne ressort pas seulement des textes de loi précités; qu'elle est encore confirmée par le s 2 de

l'art. 23, qui prévoit le versement par

la loi du 5 avril 1910; Par ces motifs; l'employeur, soit au greffier de la justice - Faisant application au prévenu de de paix, soit à l'organisme auquel serait l'art. 23, S ler et 2; Condamne Lévy à affilié l'assuré, ce qui implique bien le une amende de 23 fr. 46, qui sera versée versement cumulé de la cotisation de l'as- au fonds de réserve représentant le monsuré et de la contribution patronale; tant des retenues ouvrières afférentes aux Attendu que l'obligation du prélèvement ouvrières dont les noms suivent, occupées imposée à l'employeur résulte encore du par lui à leur domicile en août 1911...; $ 2 de l'art. 33 du règlement d'adminis- Le condamne, en outre, au paiement de tration publique du 25 mars 1911, qui in- la somme de 23 fr. 46, montant total des dique que la mention mise par la société retenues qu'il aurait dù opérer et commutuels la du salarié

dans sa déclaration, etc.

du M. Lévy formé opposition à prélèvement à opérer sur le salaire en ment; mais il a été débouté de cette oppovertu de l'art. 3 de la loi ; Attendu, sition par un second jugeinent du tribunal enfin, que la discussion de la loi au Parle- de simple police de Paris, en date du ment, les discours de MM. Ribot, Monis, 18 nov. 1911. Gacon, ne laissent aucun doute sur l'obli- Sur appel du prévenu, le tribunal corgation du prélevement ou précompte par rectionnel de la Seine a rendu, le 30 janv. l'employeur; que M. Monis, notamment, 1912, le jugement suivant : - (Le Triqui en a fait triompher le principe, disait : bunal; -- Attendu qu'un procès-verbal, en « Le prélèvement est une condition sine date du 25 sept. 1911, et un rapport du qua non, il est le fondement organique de commissaire spécial de police des Halles la loi » (S. et P. Lois annotées de 1911, centrales, en date du 29 du même mois, p. 27, Tre col., ad notam; Pand. per., Lois constatent que Lévy, négociant en confecannotées de 1911, p. 27, 1re col., ad notam); tions, a versé au greffe de la justice de

Attendu que, dans ces conditions, on ne paix du 1er arrondissement de Paris la saurait soutenir utilement que l'employeur somme de 23 fr. 46, montant de sa part n'est pas tenu, lorsqu'il verse au greffe de contributive pour les retraites ouvrières la justice de paix la somme à sa charge, concernant soixante-six ouvrières qui ne d'y adjoindre la cotisation qu'il a dù rete- s'étaient

pas munies de la carte prescrite nir sur le salaire de ses employés; que le par la loi du 5 avril 1910; mais que ledit double versement n'est pas moins obliga- Lévy a négligé d'ajouter à ce versement toire lors du paiement au greffe que lors une somme égale, représentant le prélèvede l'apposition du timbre mobile, prescrite ment que, d'après le ministère public par le 3 de l'art. 3; Et attendu qu'il près le tribunal de simple police, il aurait est établi

que

Lévy n'a versé au greffe de dù faire sur le salaire de ses ouvrières; la justice de paix que sa contribution pa- Attendu qu'aux termes de l'art. 2 de la tronale; qu'il ne justifie pas, par suite, loi du 5 avril 1910, la retraite de vieillesse, s'être libéré de la somme mise à sa charge que l'art. ler assure aux salariés des deux par la loi, et tombe, en conséquence, sous sexes, est constituée par leurs versements, l'application des S; 1er et 2 de l'art. 23 de tant obligatoires que facultatifs, par les

plissement de cette obligation, quand on se trouverait en présence de la non-apposition de timbres sur la carte de l'assuré. Comment autrement le ministère public, après six mois ou un an, pourrat-il faire la preuve que le patron a omis d'interpeller ses ouvriers, et par là a fait naitre à sa charge une responsabilité pénale? Il s'agit d'un échange de paroles, qui s'est passé dans un bureau, et qui peut ne pas avoir d'autres témoins que les deux parties intéressées. Dans quel dédale inextricable de difficultés ne s'engagerait-on pas, si on obligeait le ministère public à rapporter cette preuve ? Ce n'était donc rien faire, en définitive, si on maintenait sur ce point les règles ordinaires de la preuve.

A vrai dire, n'y a-t-il pas là un nouvel indice que toute la théorie péniblement échafaudée de l'obligation de l'interpellation est une construction puremept imaginaire, puisqu'à la supposition d'une obligation dont on ne trouve pas la trace dans la loi, il faut encore ajouter, toujours sans texte, un renversernent des règles ordinaires de la preuve desurément, c'est à l'employeur, et

au ministère public, qu'il incomberait de justifier pourquoi l'apposition des timbres de retraites n'a pas eu lieu, lorsque les cartes individuelles ont été retirées, et que les ouvriers n'ont fait aucune opposition à leur assurance. C'est qu'alors, il échéait au patron d'effectuer le précompte et de le constater au moyen de timbres, ainsi que l'exige l'art. 3 de la loi de 1910; et c'est à lui que naturellement il appartient de se justi

fier, dans un délit d'omission, de l'exécution de son obligation. V. Cabouat, op. cit., p. 346. Mais telle n'est pas l'hypothèse qui nous occupe. Les ouvriers sont ouvertement en rébellion contre la loi; ils refusent de s'assurer ou ils n'ont pas retiré leurs cartes. La non-apposition de timbres de retraites trouve dans cette résistance une explication immédiate et naturelle. Parler, dans ces circonstances, de présomption de faute à la charge des employeurs, c'est, outre que loi de 1910 parle positivement de faute, aller à l'encontre de toute vraisemblance. V. Salaiin, ubi supra. Il est exact cependant, ce qui n'est pas une présomption de faute, mais une présomption de fait, que la pertinence de certains faits autorise la déduction d'autres faits, de nature cachée, et dont la preuve directe serait à peu près imposslble à rapporter. Il a été fait application de ces idées, notamment à propos du délit de vagabondage spécial. V. Trib. de la Seine, 22 oct. 1903, et Paris, 31 oct. 1903 (S. et P. 1906.2.121), et notre note; Dijon, 22 déc. 1910 (S. et P. 1911.2.45; Pand. pér., 1911.2.46). Mais certes, nul ne songera à prétendre que la non-apposition des timbres sur la carte de l'assuré constitue une présomption pertinente et certaine que l'employeur n'a pas interpellé l'assuré ! Ce serait supposer aux patrons un bien singulier empire sur leurs ouvriers qui se dérobent à l'application de la loi, que de croire qu'il aurait suffi d'un mot, d'un geste de leur part pour les ramener obéissants à la loi des retraites. Que n'ugent-ils

alors plus souvent de cette autorité quand éclate une grève? Comp. Jouarre, Questions de droit (Gaz. des trib., 29 juin 1912).

Le sens matériel de l'art. 23 est maintenant connu. Vainement, dès lors, on soutiendrait qu'il résulte d'affirmations, faites au cours de la loi ou après son vote, que l'intention du législateur était de faire peser sur les employeurs une responsabilité complète, peut-être difficile à justitier en équité, au cas de non-apposition des timbres de retraite sur les cartes individuelles. V. la première rédaction donnée à l'art. 23, et la déclaration de M. Paul Boncour, ministre du travail, à la séance du Sénat, du 30 mai 1911 (J. off. du 31 mai 1911, déb, parl., p. 532 et s.). Aucune de ces allégations ne saurait prévaloir contre le sens clair et précis de la loi. La jurisprudence ne s'y est point trompée; et, s'il est nécessaire de répéter la règle qui domine toute l'interprétation des lois pénales, nous dirions qu'elle n'avait pas, même devant la volonté certaine du législateur, à aller au delà de ce qui était dit et exprimé dans la loi. Pour être restée fidèle à cette règle, la jurisprudence a été, de divers côtés, l'objet d'attaques; elle n'a pas à s'émouvoir de ces critiques ; car elle n'a pas la charge de redresser les lois boiteuses ; en s'absterant de toute ingérence sur un domaine qui n'est pas le sien, elle reste dans son rúle constitutionnel de gardienne de la justice.

non

J.-A. ROUX.

contributions des employeurs et par des tation de ce prélèvement, sur la carte dé- 2Espèce. (Dame Humbert). allocations viagères de l'Etat; que les ver- livrée à l'employé en vertu du même ar- ARRÊT (apr. delib. en ch. du cons.). sements obligatoires des salariés, qui ne ticle; que ces deux obligations corrélatives sont adhérents ni à une société de secours ne peuvent être remplies que si une carte

LA COUR; Sur le moyen pris de la mutuels ni à une caisse autorisée par est présentée à l'employeur, le défaut de

violation des art. 3. et 23 de la loi du l'Etat, sont, d'après l'art. 3, prélevés par présentation de cette carte rendant impos

5 avril 1910: — Attendu que la dame Huml'employeur sur le salaire, lors de chaque sible l'apposition du timbre prescrit, et

bert était poursuivie pour avoir contrepaie, et constatés par l'apposition, sur une affranchissant, dès lors, l'employeur de

venu à la loi du 5 avril 1910, en n'apposant carte délivrée aux salariés par les soins de l'obligation de prélever sur les salaires de pas les timbres prescrits sur les cartes l'Administration, d'un timbre mixte, dont l'employé les versements à la charge de

de neuf ouvriers, et en ne faisant pas la valeur représente le prélèvement et la ce dernier; Attendu, en outre, que, la au greffe de la justice de paix les versecontribution patronale d'égale importance; loi ne frappant d'uneamende, dans l'art. 23,

ments des sommes à sa charge; At - Attendu que la seule sanction de cette que l'employeur ou l'assuré par la fauté tendu que le jugement attaqué relaxe la prescription se trouve dans l'art. 23 de la duquel l'apposition du timbré n'aura pas

dame Humbert, d'une part, parce que le loi, punissant d'une amende « l'employeur eu lieu, la non-présentation d'une carte

défaut d'apposition des timbres représenou l'assuré par la faute duquel l'apposi- constitue, à la charge de l'employé, une

tant la cotisation ouvrière et la contribution des tiinbres prescrits par la présente faute, qui, en mettant l'employeur dans

tion patronale est le résultat de la faute loi n'aura pas lieu ?; Attendu que,

l'impossibilité d'observer les formalités qui imputable aux ouvriers, qui ont négligé d'après ce texte, la peine ne peut être pro- lui sont imposées, l'exonére par là même

de se faire délivrer des cartes, et, d'autre noncée que si le défaut d'apposition du de toute responsabilité pénale; - Attendu part, parce que le versement au greffe de timbre résulte d'une faute de la personne qu'on ne saurait soutenir, en l'absence la justice de paix ne constitue qu'une fapoursuivie; — Attendu que, si les timbres d'une disposition précise de la loi, qu'il culté; Attendu qu'en statuant ainsi, le mixtes n'ont pas été apposés en vue de la existe à la charge de l'employeur une jugement a fait une juste application de la retraite des ouvrières dénommées au pro- présomption de faute, et que celui-ci

loi ; Attendu, en effet,... (motifs de droit cès-verbal; la faute est imputable, non pas n'aurait, pour établir sa bonne foi, d'autre identiques à ceux de l'arrêt rendu dans la à Lévy, mais aux ouvrières elles-mêmes, moyen de preuve que la consignation au Tre espèce, jusqu'à : « lorsque la carte ne qui ont négligé de se munir d'une carte, greffe de la justice de paix; – Attendu

serait pas présentée à l'employeur »); d'où il suit que Lévy n'est passible d'au- qu'une telle présomption, fût-elle instituée Attendu, d'autre part, que si, aux termes cune peine; Attendu que le fait de par la loi, se trouverait détruite, quand le de l'art. 23, a l'employeur, qui a été dans n'avoir pas versé au greffe de la justice défaut d'apposition des timbres serait le l'impossibilité d'apposer le timbre presde paix le prélèvement prévu par la loi résultat de la faute exclusive de l'employé, crit, peut se libérer de la somme à sa sur le salaire des ouvrières ne peut être et qu'il en serait ainsi, lorsque la carte ne

charge en la versant à la fin de chaque assimilé au défaut d'apposition des timbres, serait pas présentée à l'employeur; — At

mois, directement ou par la poste, au grefseule contravention prévue par l'art. 23; tendu, d'autre part, que si, aux termes du

fier de la justice de paix ou à l'organisme qu'au surplus, ce même article, dans son 5 2 de l'art. 23, l'employeur, qui a été auquel est affilié l'assuré », la loi n'a $ 2, ne donne au patron (qui a été dans dans l'impossibilité d'apposer le timbre

donné ainsi à l'employeur qu'une faculté, l'impossibilité d'apposer le timbre pres- prescrit, peut se libérer de la somme à sa mais n'a pas créé à sa charge une oblicrit) la faculté de verser au greffe de la charge en la versant à la fin de chaque gation; qu'au surplus, aucune sanction justice de paix que la somme mise à sa mois, directement ou par la poste, au gref- pénale n'est attachée à cette disposition ; charge, c'est-à-dire sa propre contribution, fier de la justice de paix ou à l'organisme Rejette le pourvoi contre le jugement et non un prélèvement causant au salaire auquel est affilié l'assuré », il ne peut

du tribunal correctionnel de la Seine du une réduction que ce patron ne saurait, de s'agir que de la contribution patronale;

30 janv. 1912, etc. sa propre autorité, imposer à son ouvrier; que, dans son $ .ler, ledit art. 23 prévoit le

Du 22 juin 1912. Ch. crim. Par ces motifs; Infirme, etc. ). cas où l'apposition du timbre n'a pas eu

MM. Bard, prés.; Lecherbonnier, rapp., Pourvoi en cassation par le procureur lieu par la faute de l'employeur ou par

Séligman, av. gén. (concl. contr.); Morcelle de l'employé; qu'il punit cette faute

nard et de Ségogne, av.
de la République près le tribunal de la
Seine.

d'une amende, sans préjudice de la con-
damnation au paiement de la somme re.

3. Espèee. - (Bontemps et Maillard). ARRÈT (apr. délib. en ch, du cons.). présentant les versements à la charge du 21 déc. 1911, jugement du tribunal de LA COUR; Sur le moyen pris de la contrevenant; que cette condamnation, simple police de Soissons, ainsi conçu : violation des art. 3 et 23 de la loi du quand elle frappe l'employé en faute, ne « Le Tribunal; Attendu qu'aux termes 5 avril 1910 : Attendu que Lévy était s'explique que par cette raison que le dé. de l'art. 23 de la loi du 5 avril 1910, l'empoursuivi pour avoir contrevenu à la loi faut de présentation de la carte

n'a pas per- ployeur ou l'assuré, par la faute duquel du 5 avril 1910, en ne prélevant pas, sur mis à l'employeur de prélever lesdits verse- I'apposition des timbres, prescrite par elle, le salaire de soixante-six ouvrières, la co- ments; que, dans un second paragraphe, le n'aura pas eu lieu « sera passible d'une tisation à leur charge, et en ne versant au même article s'occupe de l'employeur qui a amende égale aux versements omis, progreste de la justice de paix que sa contri- été dans l'impossibilité d'apposer le timbre noncée par le juge de simple police, quel bution patronale; - Attendu que le juge- prescrit, et qui n'en demeure pas moins qu'en soit le chiffre, sans préjudice de la ment attaqué relaxe Lévy, par le motif, tenu de sa propre contribution; qu'il dé- condamnation, par le même jugement, au d'une part, que le défaut d'apposition des clare que cet employeur pourra se libérer paiement de la somme représentant les timbres représentant la cotisation ouvrière de la somme à sa charge par une consi- versements à sa charge, et qui sera portée et la contribution patronale est le résultat gnation; que les mots < à sa charge » ne au compte individuel de l'assuré » ; - Atd'une faute imputable aux ouvrières, qui peuvent avoir, dans le S2, une signification tendu que le même article dispose que ont négligé de se munir d'une carte, et, autre que celle qu'ils ont dans le s ler; l'amende sera versée au fonds de réserve d'autre part, parce que la faculté donnée Attendu, au surplus, que la loi n'a donné et que l'employeur, qui aura été dans l'imau patron de verser au greffe la somme ainsi à l'employeur qu'une faculté, mais possibilité d'apposer le timbre prescrit, mise à sa charge ne coinporte que le mon- n'a pas créé à sa charge une obligation, et peut se libérer de la somme à sa charge, tant de sa propre contribution; Attendu qu'aucune sanction pénale n'est attachée à en la versant à la fin de chaque mois, diqu'en statuant ainsi, le jugement a fait cette disposition; Rejette le pourvoi rectement ou par la poste, au greffier de une juste application de la loi; — Attendu, contre le jugement du tribunal correction- la justice de paix ou à l'organisme reconnu en effet, que, si l'employeur est tenu, aux nel de la Seine du 30 janv. 1912, etc. par la loi auquel serait affilié l'assuré; que termes de l'art. 3 de la loi du 5 avril 1910, Du_22 juin 1912. Ch. crim. la loi donne ainsi toute facilité aux intéd'opérer un prélèvement sur le salaire de MM. Bard, prés.; Lecherbonnier, rapp.; ressés pour remplir leur engagement; l'employé, c'est afin de pouvoir apposer Séligman, av. gen. (concl. contr.); Mor- Attendu qu'il est avéré que le plaignant un timbre, qui est pour partie la représen- nard et de Ségogne, av.

Royant a été employé, les mois de juillet et

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août 1911 en entier, au service de la So- conformer aux prescriptions de l'art. 23 de cet employé, a été mise en réserve dans ciété Bontemps et Cie, à Soissons, ladite de la loi; qu'ils devaient s'y conformer; unecaisse spéciale, a néanmoins condamné société représentée pendant le mois de que la lettre de M. le préfet, bien que vi- Bontemps et Maillard pour n'avoir pas juillet et jusqu'au 19 août par M. Maillard, sant le refus d'apposer les timbres, ré- opéré au greffe la consignation de ladite en qualité d'administrateur délégué; et clame l'application des pénalités édictées contribution; -- Attendu, en premier lieu, que M. Bontemps, bien que ne reprenant par l'art. 23 de la loi du 5 avril 1910, qui qu'en l'état des constatations précitées, les fonctions d'administrateur délégué de vise la faute; que les sieurs Bontemps et c'est par la faute personnelle et exclusive ladite société qu'à la date du 1er septembre, Maillard ont donc commis une faute en de Royant que les prévenus ont été mis les remplissait cependant depuis le 19 août, ne déposant pas au greffe la contribution dans l'impossibilité d'apposer le timbre ainsi qui l'a reconnu; qu'il avait donc la patronale; - Attendu que les termes de prescrit; Attendu , en second lieu, que responsabilité entière de l'administrateur l'art. 170 du décret du 25 mars 1911 pres: si, aux termes de l'art. 23, « l'employeur, délégué en son absence;

Attendu que,

crivent bien les formalités que doivent qui a été mis dans l'impossibilité d'apposer de l'enquête à laquelle il a été procédé remplir les patrons pour leurs versements le timbre prescrit, peut se libérer de la le 13 décembre courant, il est résulté que au greffe; Attendu qu'il est suffisam- somme à sa charge, en la versant, à la fin Royant n'a pas remis sa carte à ses pa- ment établi que Maillard et Bontemps de chaque mois, directement ou par la trons, mais s'est contenté de la laisser n'ont pas opéré, à la fin des mois de juillet poste, au greffier de la justice de paix ou dans le bureau qu'il occupait; qu'il était et août, conformément aux prescriptions à l'organisme auquel est affilié l'assuré, réfractaire à la loi; que MM. Bontemps et de l'art. 23, S2, de la loi du 5 avril 1910, la loi n'a donné ainsi à l'employeur qu'une Cie n'ont jamais refusé d'apposer les tim- au greffe de la justice de paix, le dépôt faculté, mais n'a pas créé sa charge une bres patronaux, et ont affiché dans les de la contribution patronale à leur charge obligation; qu'au surplus, aucune sanction ateliers un placard rappelant aux ouvriers pour l'employé Royant; qu'ils tombent pénale n'est attachée à cette disposition; d'avoir à présenter leur carte pour l'ap. sous l'application des ler et 2 de l'art. 23

Attendu, dans ces conditions, et sans position des timbres, et, pour ceux qui n'é- de la loi précitée... ; Par ces motifs; qu'il y ait lieu de rechercher si les prétaient pas munis de carte, de s'en procurer Condamne Bontemps et Maillard, con- venus ont été jugés pour des faits autres au plus tôt; Attendu que, de l'enquête jointement et solidairement, comme ad- que ceux relevés dans la citation, que la et de la déclaration du sieur Bontemps ministrateurs délégués de la Société Bon- condamnation n'est pas légalement jus lui-même, il ressort que la Société Bon- temps et Cie, à une amende de 1 fr. 50, tifiée; - Et attendu que les faits ne prétemps et Cie a procédé à l'apposition des égale aux versements omis; et, en outre, sentent aucun caractère punissable, et timbres sur les cartes des assurés qui en au paiement de la somme de 1 fr. 50, qu'il n'y a pas lieu à renvoi; - Casse, etc. avaient fait la présentation, et que, pour les représentant les contributions à leur Du 22 juin 1912. Ch. crim. autres, les fonds destinés à l'achat de ces charge, etc. ).

MM. Bard, prés.; Lecherbonnier, rapp.; timbres avaient été versés et mis en ré.

Séligman, av. gen. (concl. contr.); Mornard serve dans une caisse spéciale; At

Pourvoi en cassation par MM. Bontemps et de Ségogne, av. tendu que Maillard et Bontemps soutien

et Maillard. nent, en s'appuyant sur le texte même de l'art. 23, que le versement au greffe n'est ARRÈT (apr. délib. ench. du cons.).

CASS.-CRIM. 2 avril 1909. que facultatif, et qu'ils n'ont encouru au- LA COUR; Statuant sur les pourvois cune sanction pénale, et que les concluants formés par Bontemps et Maillard contre un

DÉLIT MILITAIRE, COMPLICE CIVIL, PEINE

CRIMINELLE ENCOURUE, COUR CRIMINELLE, ne sont pas poursuivis pour défaut de ver- jugement du tribunal de simple police de sement au greffe; Mais attendu que Soissons en date du 21 déc. 1911; · Joint

COMPÉTENCE, INDIVISIBILITÉ (Rép., yo Jusl'art. 23, dans son § 2, s'occupe de l'em- les pourvois, vu leur connexité; Sur le

tice militaire, n. 298 et s.; Pand. Rép., vo ployeur qui a été dans l'impossibilité d'ap

Conseils de guerre et de revision, n. 439, moyen pris de la violation des art. 23 de poser le timbre prescrit par le S 3 de la loi du 5 avril 1910, 145, 146, 413, C. instr.

454 et s.). l'art. 3, lequel représente le total du pré- | crim., en ce que le jugement attaqué, créant Lorsque des militaires sont poursuivis lèvement et de la contribution patronale; une contravention de non-versement de

pour un crime commis avec la complicité que cet article déclare que l'employeur contributions patronales dans la caisse du d'un non militaire (dans l'espèce, un sujet n'en est pas moins tenu de sa propre greffier, à côté de la contravention, prévue annamile, justiciable, aux termes des decontribution, et qu'il pourra se libérer de par l'art. 23 de la loi, de défaut d'apposi- crets du 15 sept. 1896 et du 1er déc. 1902, des la somme à sa charge à la fin de chaque tion de timbres sur la carte d'un assuré, a tribunaux ordinaires), tous doivent être mois, directement ou par la poste, au gref- | jugé les exposants pour des faits non re- traduits devant la juridiction ordinaire fier de la justice de paix, ou à l'organisme levés dans la citation, et les a illégalement compétente pour connaitre des crimes (dans reconnu par la loi; que les mots « à sa frappés d'une peine pour une contraven- l'espèce, la Cour criminelle) (1) (C. instr. charge » ne peuvent avoir, dans le S 2, une tion que ne reconnait pas la loi pénale : crim., 227; C. just. milit., 76). signification autre que celle qu'ils ont u ces articles; - Attendu que, si l'em- Il importe peu que la complicité dont le dans le s ler; que la contribution patro- | ployeur est tenu... (motifs de droit identi- non militaire est prévenu ne constitue à nale est la seule somme qui soit à la charge ques à ceux de l'arrêt rendu dans la pre- son égard qu'un simple délil, puisque, de l'employeur; que cette opinion est, du mière espèce, jusqu'à : « lorsque la carte d'une part, le droit de prononcer une peine reste, celle émise par la Cour de cassation ne serait pas présentée à l'employeur »); correctionnelle rentre dans les altributions dans son arrêt du 11 décembre 1911; Attendu que Bontemps et Maillard de la Cour criminelle, et que, d'autre part, Attendu que, ni la non-présentation par étaient poursuivis pour avoir refusé d'ap- l'indivisibilité de la procédure ne peut re: Royant de sa carte, ni la mise en réserve poser les timbres sur la carte de l'employé cevoir aucune exception, à raison des difdans une caisse spéciale avec inscription Royant; Attendu que le juge a pro- férences de qualité des coprévenus d'un au grand livre de la contribution patro- cédé à une enquête, et qu'après avoir seul et même fait (2) (Id.). nale à la charge de la Société Bontemps constaté, d'une part, que Royant n'a pas et Cir, ne dispensaient les sieurs Maillard remis sa carte à ses patrons et était réfrac

(Nguyen Huy Tran et autres). — ARRÈT. et Bontemps, administrateurs délégués taire à la loi, et, d'autre part, que la con- LA COUR; Statuant sur la demande pendant les mois de juillet et août, de se tribution patronale, relative à la retraite en règlement de juges formée par le pro

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(1-2) La difficulté que résout l'arrêt actuel portait sur le point de savoir quelle juridiction doit être saisie, quand une infraction, commise par des militaires et des non militaires, constitue un crime pour les premiers, un simple délit pour les seconds. La Cour de cassation décide avec raison que, dans ce cas, il convient de saisir la Cour d'assises (dang

l'espèce ci-dessus la Cour criminelle de la colonie)
parce qu'elle a la plénitude de juridiction, et que,
de plus, la procédure, étant indivisible entre les
prévenus, ne saurait se scinder. On aboutit donc à
ce résultat singulier, mais parfaitement légal, que
le civil attire le militaire devant la juridiction de
droit commun, et qu'il est ensuite entraîné par

celui-ci devant la juridiction de la Cour d'assises ; il fixe la nature, mais non le degré du tribunal. V. dans le même sens, Cass. 23 août 1855 (S. 1856. 1.89. - P. 1856.1,280); 19 janv. 1856 (2 arrêts) (S. 1856.1.459. P. 1856.2.93), et la note; 5 déc. 1891 (Bull. crim., n. 243); 20 oct. 1900 (S. et P. 1903,1.543), et la note.

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