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lui et ses clients, ne sauraient légalement, si même elles pouvaient encourir la sanction de nullité, être qualifiées d'immixtion dans la fonction des agents de change, et à ce titre comporter, en outre, une sanction pénale; Mais attendu que, en disposant que les agents de change ont, seuls, le droit de faire des négociations des effets publics et autres, susceptibles d'être cotés, l'art. 76, C. comm., n'a fait que renouveler l'interdiction, résultant précédemment des arrêts du Conseil du 24 sept. 1724, du 26 nov. 1781, du 7 août 1785 et du 10 juin 1788, ainsi que de la loi du 28 vent. an 9, et de l'arrêté des consuls du 27 prair. an 10, de s'immiscer d'une façon quelconque, sous quelque forme et prétexte que ce pût être, dans toutes négociations dont l'objet ne doit pouvoir être réalisé et le but atteint qu'avec le concours de ces officiers publics; que, dans ces textes, la sanction de nullité et la sanction pénale sont encourues simultanément, et constituent un système de répression indivisible; qu'ainsi, la pénalité édictée par l'art. 8 de la loi du 28 vent. an 9 doit être prononcée dans les mêmes cas où la nullité de l'opération est encourue; qu'on ne saurait juridiquement admettre que, lorsqu'il s'agit d'une opération réservée par son objet à l'agent de change, la sanction pénale soit éludée, par cela seul que cette opération aurait emprunté une forme interdite à ces officiers publics par l'art. 85, C. comm., ou par toute autre disposition légale; qu'en constatant que Chavaroux faisait commerce habituel de recueillir des offres et des demandes d'effets admis à la cote officielle; qu'il procurait à ses clients le moyen d'effectuer sur ces effets, en dehors de la Bourse, et sans recourir au ministère des agents de change, des opérations qui n'auraient pu être régulièrement faites sans l'intermédiaire de ces officiers publics », l'arrêt justifie donc légalement les condamnations prononcées; tendu, d'autre part, que, si nul ne peut faire les actes d'une fonction sans s'y immiscer, il n'est pas également vrai que, pour s'immiscer dans une fonction, il soit nécessaire d'en accomplir strictement les

At

(1) C'est un point certain que la signature de l'huissier constitue une formalité substantielle, dont l'omission entraîne nullité des exploits. V. Cass. 1er mars 1904 (S. et P. 1904.1.288, et les renvois; Pand. pér., 1904.1.455); Lyon, 12 juin 1908 (S. et P. 1908.2.315; Pand. pér., 1908.2.315), et les renvois. Et il doit en être ainsi spécialement de l'acte d'appel, qui doit contenir les mêmes mentions que l'ajournement. V, notre C. proc. annoté, par Tissier, Darras et Louiche-Desfontaines, sur l'art. 61, n. 13, et sur l'art. 456, n. 4.

(2) L'arrêt ci-dessus résout implicitement une question qui se pose sur la portée de l'art. 43 de la loi du 27 mars 1907. Cet article déclare applicables à la juridiction des prud'hommes un certain nombre d'articles du Code de procédure civile qu'il énumère. Cette énumération est-elle limitative, en telle sorte qu'il ne serait pas permis, en cette matière, soit aux parties d'invoquer d'autres articles de ce Code, soit aux conseils de prud'hommes de les appliquer? La Cour de cassation ne l'a pas pensé. A plusieurs reprises déjà, elle a

actes réglementés; qu'à ce point de vue encore, l'argument pris des prohibitions. faites aux agents de change par les art. 85 et 87, C. comm., est inopérant;

Sur le second moyen, pris aussi par le demandeur de la violation des art. 1, 6, 7, 8 de la loi du 28 vent. an 9, 1157, 1247, C. civ., 76, C. comm., 7 de la loi du 20 avril 1810, en ce que l'arrêt attaqué a considéré comme constituant une immixtion dans les fonctions d'agent de change le fait, par un banquier, de s'être livré à des opérations sur valeurs publiques, sans constater que ces opérations avaient lieu dans une ville pourvue d'un parquet d'agents de change, et violation des art. 1 et 3, C. instr. crim., en ce que, s'agissant d'un délit qu'il n'établit pas s'être consommé à Paris, l'arrêt attaqué déclare recevable l'action civile intentée par la Chambre syndicale des agents de change de Paris : Attendu que le demandeur entend démontrer, d'une part, que la négociation des effets publics serait libre dans les villes dépourvues de parquets d'agents de change, et, d'autre part, que les opérations qu'il a faites avec un client demeurant à Avignon doivent être considérées comme accomplies en ladite ville, laquelle est dans ce cas; Attendu que, tant au point de vue de l'action civile que de l'action publique, lorsque toutes deux sont poursuivies en même temps et devant les mêmes juges, le lieu du délit est celui où le prévenu en réalise les éléments essentiels et constitutifs; qu'il résulte de l'arrêt que les ordres dont il s'agit ont été transmis par son représentant d'Avignon à Chavaroux, à Paris, où les offres et les demandes sont recueillies dans sa maison de banque, et que c'est avec Chavaroux que le client visé a effectué, sur une valeur cotée officiellement, diverses opérations qui n'ont été réglées à chaque liquidation que par des différences; qu'il apparaît ainsi que l'acte qui a consommé le délit est élémentairement l'exécution à Paris, sans entremise d'agents de change, d'ordres qui y avaient été recus et acceptés par le prévenu; qu'à bon droit donc, dans ses motifs et dans son dispositif, l'arrêt a retenu, comme ayant eu lieu à

reconnu applicables en matière prud'homale des dispositions du Code de procédure qui ne figurent pas dans l'énumération de l'art. 43, notamment, l'art. 141, C. proc., aux termes duquel les jugements doivent contenir un exposé sommaire des points de fait et de droit en discussion, ainsi que les conclusions des parties, s'il en a été déposé (V. Cass. 18 déc. 1907, sol. implic., S. et P. 1908.1.260; Pand. pér., 1908.1.260); l'art. 268, C. proc., défendant d'entendre comme témoins les parents et alliés en ligne directe de l'une des parties (V. Cass. 26 juill. 1910, S. et P. 1911.1. 15; Pand. pér., 1911.1.15); les art. 158 et 159, C. proc., aux termes desquels l'opposition à un jugement par défaut n'est plus possible, lorsque ce jugement a été exécuté ou que la partie défaillante y a acquiescé. V. Cass. 29 nov. 1910 (S, et P. 1911.1.559; Pand. pér., 1911.1.559).

L'arrêt ci-dessus est une application de la même règle, à propos de l'art, 173, C. proc,, d'après lequel les nullités d'exploit ou d'acte de procédure sont couvertes si elles ne sont proposées avant

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CASS.-CIV. 31 janvier 1912.

1o EXPLOIT, ACTE D'APPEL, SIGNATURE DE L'HUISSIER (DÉFAUT DE), NULLITÉ (Rép., v Exploit, n. 339 et s.; Pand. Rép., v Ajournement, n. 302 et s.). 20 PRUD'HOMMES, NULLITÉ d'exploit, Exception, NULLITÉ COUVERTE (Rép., v's Prud'hommes, n. 177, Nullités, n. 346 et s., 418 et s.; Pand. Rép., vis Ajournement, n. 11, 1206, Conseils de prud 'hommes, n. 131). 3o CASSATION, CONCLUSIONS, INTERPRETATION (Rép., v Cassation [mat. civ.], n. 3355 ets. ; Pand. Rép., v Cassation civile, n. 1091 et S.). 4o EXCEPTION, NULLITÉ, NULLITÉ COUVERTE, CONCLUSIONS, INTERPRÉTATION, CONTROLE DE LA COUR DE CASSATION (Rép., vis Appel, n. 2629; Pand, Rép., eod. verb., n. 3992 et s., 4055 et s.).

1o Est nul l'acte d'appel qui ne porte pas la signature de l'huissier qui à instrumenté (1) (C. proc., 61, 456). Motifs.

2° La disposition de l'art. 173, C. proc., en vertu de laquelle toute nullité d'exploit ou d'acte de procédure est couverte, si elle n'est pas proposée avant toute défense ou exception autre que les exceptions d'incompétence, est applicable en matière prud'homale (2) (C. proc., 173; L. 27 mars 1907, art. 43). Sol. implic.

3o Il appartient à la Cour de cassation de

toute défense ou exception autre que les exceptions d'incompétence. L'art. 43 de la loi de 1907 vise spécialement les art. 168 à 172 du Code de procédure civile, mais ne mentionne pas l'art. 173. Malgré cela, la Cour de cassation regarde ce dernier article comme applicable à la juridiction prud'homale, puisque, dans l'espèce, elle s'est fondée sur ses dispositions pour casser le jugement qui lui était déféré.

Des décisions de jurisprudence que nous venons de rappeler, on peut donc tirer la conclusion que l'énumération de l'art. 43 de la loi de 1907 n'est pas limitative, et que les autres articles du Code de procédure, qui contiennent des règles de droit commun, doivent être appliqués par les conseils de prud'hommes. C'est là le principe directeur auquel il doit être fait appel pour déterminer si une disposition du Code de procédure est ou non applicable en matière prud'homale. M. Bloch et Chaumel (Tr, des cons. de prud'h., n. 709) paraissent bien se prononcer en ce sens. Toutefois, ces mêmes auteurs (op. cit., n. 711) refusent au tribunal civil, statuant

donner aux conclusions des parties l'interprétation juridique qu'elles comportent (1).

4° Spécialement, lorsque les juges du fond ont décidé que la nullité de l'acte d'appel (pour défaut de signature de l'huissier), opposée par l'intime, n'avait pas été couverte par les conclusions de celui-ci, qui lendaient principalement à la non-recevabilité, et subsidiairement seulement au fond, il appartient à la Cour de cassation de vérifier la partie juridique des conclusions invoquées, et de dire que l'intime avait conclu exclusivement au fond, en telle sorte que la nullité de l'acte d'appel était couverte (2) (C. proc., 173).

(Karcher C. Gondry).

Assigné devant le conseil des prud'hommes de la Seine, à la requête de M. Gondry, voyageur de commerce, et condamné, par jugements des 5 janv. et 27 avril 1911, à lui payer les sommes réclamées, M. Karcher a interjeté appel. L'intimé n'a pas comparu devant le tribunal civil, qui, statuant par défaut, a infirmé les décisions du conseil des prud'hommes. M. Gondry a formé opposition à ce jugement, et, devant le tribunal, il a opposé la nullité de l'acte d'appel, qui n'était pas revêtu de la signature de l'huissier. M. Karcher a prétendu que la nullité était couverte par les conclusions prises au fond par M. Gondry, dans son exploit d'opposition au jugement de défaut. Par jugement du 11 oct. 1911, le tribunal de la Seine a déclaré nul l'acte d'appel, et a décidé que la nullité n'était pas couverte, l'intimé ayant, en appel, pris des conclusions tendant au principal à la non-recevabilité de l'appel, et subsidiairement au fond ».

POURVOI en cassation par M. Karcher.

ARRÊT.

LA COUR; Vu l'art. 173, C. proc.; Attendu qu'aux termes de cet article,

en appel, en matière prud'homale, la faculté d'évocation, par le motif que l'art. 473, C. proc., n'est pas visé par l'art. 43 de la loi du 27 mars 1907, ce qui ne cadre pas exactement avec le principe que l'énumération de l'art. 43 n'a pas un caractère limitatif.

(1-2) La nullité d'un acte d'appel, pour inobservation des formalités prescrites par la loi, et spécialement, comme dans l'espèce, pour défaut de signature de l'huissier (V, la note 1, à la page qui précède), est une nullité de procédure, qui doit, aux termes de l'art. 173, C. proc., être proposée avant toute défense au fond (V. Cass. 30 nov, 1897, S. et P. 1898.1.345, et les renvois; Pand. pér., 1898.1.173). La nullité est couverte, si la partie qui pouvait s'en prévaloir a, avant de l'invoquer, pris des conclusions sur le fond de l'affaire.

C'est aux juges du fond qu'il appartient d'apprécier, à ce point de vue, les conclusions des parties, et de rechercher si l'intéressé a, dès le début, invoqué cette nullité; mais leur pouvoir d'appréciation n'est pas illimité; il s'exerce sous le contrôle de la Cour de cassation, à laquelle il appartient de donner aux conclusions des parties l'interprétation juridique qu'elles cemportent (V. Cass, 19 avril 1905, S. et P. 1906.1.119, et les renvois), et, le cas échéant, de leur restituer leur véritable caractère (V. Cass. 29 janv. 1908, S. et P. 1908.1.88; Pand. per., 1908.1.88). Il appar

toute nullité d'exploit ou d'acte de procédure est couverte, si elle n'est proposée avant toute défense ou exception autre que les exceptions d'incompétence; Attendu, d'autre part, qu'il appartient à la Cour de cassation de donner aux conclusions des parties l'interprétation juridique qu'elles comportent; Attendu qu'après avoir constaté que l'original de l'exploit de l'appel formé par Karcher contre un jugement du conseil des prud'hommes de la Seine, en date du 27 avril 1911, ne portait pas la signature de l'huissier qui a instrumenté, et avoir déclaré, à bon droit, ledit acte nul pour cette cause, le jugement attaqué ajoute que cette nullité n'a pas été couverte par la procédure postérieure à l'exploit d'appel; qu'il en donne pour motif que Gondry a pris, dans l'exploit même d'opposition au jugement par défaut du 16 août 1911, des conclusions tendant au principal à la non-recevabilité de l'appel, et subsidiairement au fond »; Mais attendu que, des termes mêmes de l'exploit d'opposition susvisé, il résulte que Gondry, loin de diviser les conclusions de cet acte en deux parties, l'une, la principale, tendant à la non-recevabilité de l'appel, l'autre, subsidiaire, sur le fond, a conclu exclusivement au fond; que les motifs de cet exploit, sans spécifier aucune cause de nullité, et même sans formuler aucune réserve, visent les deux jugements rendus en faveur de Gondry par le conseil des prud'hommes de la Seine, les 5 janv. et 27 avril 1911, et que le dispositif est ainsi conçu: «Voir rapporter le jugement susdaté; - En conséquence, voir adjuger au requérant le bénéfice des conclusions par lui prises dans les jugements des 5 janv. et 27 avril 1911;

Voir décharger le requérant des condamnations prononcées contre lui par ledit jugement; dès lors, se voir le susnommé déclarer autant non recevable que mal fondé dans sa demande, et s'en voir dé

tient, par suite, à la Cour de cassation de vérifier et de dire si des conclusions impliquent renonciation à se prévaloir d'un moyen de nullité, V. comme application, Cass. 2 févr. 1909 (S. et P. 1911.1. 303; Pand. pér., 1911.1.303).

(3-4) Il est généralement admis que la voie de la prise à partie, qui s'applique aux officiers de police judiciaire comme aux juges proprement dits (V. Cass. 25 juill. 1910, S. et P. 1911.1.321; Pand. pér., 1911.1.321, et la note), et spécialement aux gardes particuliers dûment assermentés (V. Cass. 10 janv. 1900, S. et P. 1900.1.273, et la note de M. Naquet; Pand. pér., 1901.1.215), n'est obligatoire vis-à-vis d'eux qu'à l'égard des actes commis dans l'exercice de leurs fonctions. V. Cass. 27 juin 1881 (S. 1883.1.319. P, 1883. 1.772); 9 janv. 1882 (S. 1884.1.271.-P. 1884.1. 665); et notre C. proc. annoté, par Tissier, Darras et Louiche-Desfontaines, sur l'art. 505, n. 38. V. aussi, notre C. civ. annoté, par Fuzier-Hermann et Darras, sur les art. 1882-1383, n. 523 et s. ; et notre Rép. gén, du dr. fr., v° Prise à partie, n. 76 et s.; Pand. Rep., eod. verb., n. 76 et s, Telle est la règle dont l'application était en jeu dans la présente affaire.

La question se posait de savoir si un garde particulier, qui, prétendant avoir constaté un délit de chasse, n'en a pas dressé procès-verbal, et en

bouter » "; D'où il suit qu'en décidant que la nullité de l'exploit d'appel n'avait pas été couverte par les conclusions postérieures de Gondry, le jugement attaqué a méconnu la portée juridique desdites conclusions, et, par suite, violé l'article de loi ci-dessus visė; Casse...; renvoie devant le tribunal civil de Versailles, etc. Du 31 janv. 1912. Ch. civ. MM. Baudouin, 1er prés.; Dupont, rapp.; le cons. Fabreguettes, av. gén. (concl. conf.).

CASS. CIV. 6 mai 1912.

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PRISE A PARTIE, OFFICIER DE POLICE JUDICIAIRE, GARDE PARTICULIER, DÉLIT DE CHASSE, PROCÈS VERBAL (ABSENCE DE), DÉNONCIATION A LA GENDARMERIE, POURSUITE CORRECTIONNELLE, ACQUITTEMENT DU PRÉVENU, ACTION EN DOMMAGES-INTÉRETS (Rép., v Prise à partie, n. 68 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 76 et s.).

Les dispositions légales relatives à la prise à partie, qui régissent tous les officiers de police judiciaire, doivent recevoir leur application, non seulement lorsque ceux-ci ont personnellement dressé procèsverbal du prétendu délit qu'ils constataient, mais encore lorsqu'ils ont, d'une manière quelconque, donne avis au procureur de la République d'un délit dont ils ont acquis la connaissance dans l'exercice de leurs fonc tions (3) (C. proc., 505; C. instr. crim., 358).

Ainsi, un garde particulier qui, sans dresser procès-verbal du délit de chasse qu'il prétend avoir constaté, s'est borné à le dénoncer à la gendarmerie, ne peut, après l'acquittement du prévenu, être actionné par celui-ci en dommages-intérêts qu'au moyen de la procédure de la prise à partie (4) (C. proc., 505; C. instr. crim., 29, 358).

a donné simplement avis à la gendarmerie, peut être considéré comme ayant agi dans l'exercice de ses fonctions, et si, en conséquence, l'action en dommages-intérêts, formée contre lui par le prévenu relaxé, à raison de la fausseté de la dénonciation qu'il impute au garde, est soumise à la procédure de la prise à partie.

Il n'est pas contestable qu'un garde particulier, qui constate un délit de chasse sur les terres confiées à sa surveillance, est dans l'exercice de ses fonctions, et il paraît bien s'ensuivre que la réparation du dol ou de la fraude qu'il aurait commise dans cette constatation ne peut être poursuivie que par la voie de la prise à partie. V. en ce sens, Cass. 10 janv. 1900, précité. En quoi le fait que le garde particulier n'a pas dressé procès-verbal du délit constaté, et s'est borné, comme dans l'espèce, à en donner avis à la gendarmerie, pourrait-il mettre obstacle à l'application des règles de la prise à partie? Le procès-verbal n'est pas une condition indispensable de la validité de la constatation d'un délit de chasse, puisque, à défaut de procèsverbal, ou en cas d'irrégularité, le délit peut être prouvé conformément au droit commun. V. Cass. 24 mai 1878 (S. 1879.1.92.-P. 1879.185); 25 nov. 1882 (S. 1883 1.141. - P. 1883.1.316), et les renvois. La constatation d'un délit de chasse est donc un acte de l'exercice des fonctions du garde parti

(Allostry C. Bauw). — ARRÊT.

LA COUR; Sur le moyen unique du pourvoi (violation de l'art. 505, C. proc., et de l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810, pour manque de base légale, en ce que le tribunal civil de première instance a retenu la connaissance d'une action dirigée contre un garde-chasse assermenté, à raison d'un acte qui se rattachait d'une manière étroite à l'exercice de ses fonctions, et que, dès lors, cette action ne pouvait être formée que par la voie de la prise à partie): Vu l'art. 505, C. proc.;

Attendu que, de la combinaison de cet article avec l'art. 358, C. instr. crim., il résulte que les dispositions légales relatives à la prise à partie, qui régissent tous les officiers de police judiciaire, doivent recevoir leur application, non seulement lorsque ceux-ci ont personnellement dressé procès-verbal du prétendu délit qu'ils constataient, mais encore lorsqu'ils ont, d'une manière quelconque, donné avis au ministère public d'un délit dont ils ont acquis la connaissance dans l'exercice de leurs fonctions; Attendu que, des qualités et des constatations du jugement attaqué, il ressort : 1° que c'est sur la déclaration d'Allostry, garde-chasse dûment assermenté, faite par lui à la gendarmerie, qu'a été dressé par celle-ci un procès-verbal constatant que, le 18 oct. 1908, il aurait, en compagnie de ses collègues, surpris Bauw en flagrant délit de chasse, en temps et à l'aide d'engins prohibés, sur un terrain soumis à leur surveillance; 2° qu'à la suite de cette dénonciation, Bauw a été, pour ce délit, poursuivi par le procureur de la République, devant le tribunal d'Hazebrouck, et acquitté; Attendu qu'assigné ensuite par Bauw devant le juge de paix de Bailfeul, et condamné à lui payer des dommages-intérêts, en réparation du préjudice causé par sa fausse dénonciation, Allostry a interjeté appel, et s'est, devant le tribunal, prévalu de ce que l'action, ayant pour cause un fait dolosif commis par un garde particulier dans l'exercice de ses fonctions», devait être soumise aux règles

culier, encore bien qu'il n'ait pas dressé de procèsverbal. Et, en transmettant ses constatations au parquet du procureur de la République par l'intermédiaire de la gendarmerie, il se conforme aux prescriptions de l'art. 29, C. instr. crim., d'après lesquelles toute autorité constituée, tout fonctionnaire ou officier public, qui, dans l'exercice de ses fonctions, acquerra la connaissance d'un crime ou d'un délit, sera tenu d'en donner avis sur-le-champ au procureur de la République ». Il suit de là qu'en transmettant ses constatations, le garde accomplit encore un acte de ses fonctions, dont il ne peut répondre que par la voie de la prise à partie, aux termes mêmes de l'art. 358, C. instr. crim., qui dispose que, si des membres des autorités constituées >> sont actionnés en dommages-intérêts, • à raison des avis qu'ils sont tenus de donner concernant les délits dont ils ont cru acquérir la connaissance dans l'exercice de leurs fonctions, on devra agir contre eux par la voie de la prise à partie.

Il faut ajouter qu'en subordonnant à la rédaction d'un procès-verbal l'application des règles de la prise à partie, on établirait une distinction dif

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CASS.-CIV. 17 décembre 1912. Action possessoire, Complainte, Trouble, TROUBLE DE FAIT, TROUBLE DE DROIT, CONTRADICTION A LA POSSESSION, ACTE VOLONTAIRE, MOULIN, PRAIRIES, INONDATION (Rép., v Action possessoire, n. 17 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 621 et s.).

L'action possessoire suppose un trouble apporté à la possession, et ce trouble, qui peut être de fait comme de droit, doit toujours consister en un acte volontaire impliquant contradiction à la possession (1) (C. proc., 23).

Specialement, le propriétaire de prés riverains d'un ruisseau dont les eaux alimentent le bief_d'un moulin n'est pas fondé, sur le motif que les prés auraient été inondes, faute par le meunier d'avoir curé le ruisseau, à agir en complainte pour obtenir la cessation du trouble qu'il aurait éprouvé dans sa possession, alors que le meunier défendeur n'a jamais élevé de prétention à la possession des prés (2) (Id.).

A supposer qu'une responsabilité pesat sur le meunier, à raison de l'inondation des prés, il y aurait lieu, non à la complainte possessoire, mais, selon les cas, à une action basée, soit sur l'art. 1382, C. civ., soit sur les art. 6, 8 1er et 2, de la loi du 12 juill. 1905, ou 15, tit. 2, de la loi des 28 sept.-6 oct. 1791 (3) (C. civ., 1382; C. pén., 457; LL. 28 sept.-6 oct. 1791, tit. 2, art. 15; 12 juill. 1905, art. 6, 1o et 2o).

ficile à justifier, en raison de ce qu'on ne comprendrait pas que la loi, qui couvrirait l'officier de police judiciaire ayant rédigé un procès-verbal, abandonnât sans défense le même fonctionnaire, qui, accomplissant le devoir qu'elle lui impose, aurait dénoncé le délit au procureur de la République. Dans l'un comme dans l'autre cas, il a agi dans l'exercice de ses fonctions et s'est conformé aux prescriptions de la loi. Il est donc logique que si, à l'occasion, soit de ce procès-verbal, soit de cette dénonciation, il est poursuivi pour avoir agi méchamment, il ait droit à la même protection, et puisse réclamer la même juridiction exceptionnelle.

(1-2-3) Le trouble à la possession, qui justifie l'exercice de l'action possessoire, doit, qu'il s'agisse d'un trouble de fait ou d'un trouble de droit, consister en un acte volontaire, impliquant contradiction à la possession d'autrui. V. Cass. 27 nov. 1895 (S. et P. 1896.1.8; Pand. pér., 1896.1.168), et les renvois; 11 janv. 1910 (S. et P. 1910.1.318; Pand. pér., 1910.1.318), et les renvois. Adde, Aubry et Rau, 5o éd., t. 2, p. 231, § 187; et notre C. proc. annoté

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LA COUR; Sur le moyen unique (violation de l'art. 23, C. proc., de l'art. 6 de la loi du 12 juill. 1905, sur la compétence des juges de paix, de l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810 (en ce que le jugement attaqué a admis que le fait par l'exposant de n'avoir pas veillé à ce que les eaux coulant dans une rigole destinée à conduire celles-ci à son moulin ne causent pas de dommages aux voisins, constituait un trouble de possession autorisant l'exercice de l'action possessoire, alors que ce trouble matériel, eùt-il été de nature à causer un préjudice au défendeur éventuel, n'avait point le caractère d'une contradiction opposée à sa possession, condition essentielle pour autoriser l'exercice d'une action possessoire) : Vu l'art. 23, C. proc.; Attendu que l'action possessoire suppose un trouble apporté à la possession; que ce trouble peut être de fait comme de droit, mais qu'il doit, toujours, consister en un acte volontaire impliquant contradiction à la possession; Attendu, en l'espèce, que Soulier, se disant en possession légale de deux prés, confrontant à un ruisseau dont les eaux servent exclusivement à l'alimentation du bief du Moulin neuf, appartenant à Dru, avait assigné celui-ci devant le juge de paix de Vergt, pour voir dire que, faute par lui d'avoir curé ce ruisseau, les eaux, en débordant dans les prés, les pourrissaient; qu'il concluait, en conséquence, à la cessation de ce trouble et à son maintien en possession;

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Attendu que le jugement attaqué déclare qu'il est constant, en fait, que, pendant l'hiver de 1908, Dru a laissé les eaux envahir les prés, alors qu'il dépendait de lui de les détourner, soit en curant le fossé, soit en employant d'autres moyens; qu'il confirme, en son dispositif, la sentence, qui décide que Soulier sera maintenu dans la libre et paisible jouissance de ses parcelles, et que Dru sera tenu de faire cesser le trouble, en procédant sans retard au curage et au faucardement du ruisseau ; Mais attendu que Dru n'avait jamais élevé de prétention à la pos

par Tissier, Darras et Louiche-Desfontaines, sur l'art. 23, n. 505. Les faits dommageables qui, de leur nature et d'après les circonstances dans lesquelles ils ont eu lieu, n'indiquent, de la part de leur auteur, ni prétention à un droit, ni contestation de la possession de celui au préjudice duquel ils ont été commis, ne constituent pas des troubles de possession; et, s'ils peuvent donner lieu à une action en dommages-intérêts, ils n'autorisent pas la complainte. V. Cass. 1er févr. 1864 (S. et P. 1864.1.353. P. 1864.571), et la note; 2 juill. 1877 (S. 1878.1.37. - P. 1878.58), et la note; 27 nov. 1895, précité; Aubry et Rau, 5o éd., t. 2, p. 232 et s., § 187, texte et note 25; Garsonnet, Tr. de proc., 2° éd., par Cézar-Bru, t. 1er, 350, p. 589; Glasson, Précis de proc., 2o éd., par Tissier, t. 1o, n. 258; et notre C. proc. annoté, loc. cit., n. 511 et s. Il s'ensuit que le juge de paix doit, dans ce cas, se dessaisir, à moins qu'il ne soit compétent pour statuer sur la demande, considérée comme une action en dommages-intérêts. V. Aubry et Rau, 5e éd., t. 2, p. 233, § 187; Garsonnet, op. cit., t. 1er, § 362.

session des prés; qu'à supposer qu'une responsabilité pesat sur lui, à raison de l'inondation, il y avait lieu, non à la complainte possessoire, mais, selon les cas, à une action basée, soit sur l'art. 1382, C. civ., soit sur les art. 6, 8 1 et 2, de la loi du 12 juill. 1905, ou 15, tit. 2, de la loi des 28 sept.-6 oct. 1791; qu'en accueillant la demande possessoire, le jugement attaqué a donc faussement appliqué, et, par suite, a violé l'art. 23, susvisé; Casse le jugement rendu le 10 févr. 1909 par le tribunal civil de Périgueux, etc.

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Du 17 déc. 1912. Ch. civ. MM. Baudouin, ler prés.; Fabreguettes, rapp.; Lombard, av. gén. (concl. conf.); de Lapanouse et Cail, av.

CASS. crv. 29 janvier 1913.

1o RÉCUSATION, ABSTENTION, CAUSES, TRIBUNAL CIVIL, COUR D'APPEL, APPRECIATION SOUVERAINE, JUGEMENT, MENTION (Rép., vo Récusation, n. 368 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 398 et s.). - 20 JUGEMENTS ET ARRETS (EN GÉNÉRAL), REMPLACEMENT DES MAGISTRATS, EMPÈCHEMENT, ABSTENTION, MENTION, AVOCAT (Rép., vo Jugement et arrêt [mat. civ. et comm.], n. 753 et s., 802 et s.; Pand. Rép., v Jugements et arrêts,

(1-2-3) La thèse du pourvoi consistait à soutenir qu'en dehors des causes d'empêchement purement matérielles, les seules autres causes susceptibles d'empêcher les magistrats de siéger sont celles qui se confondent avec les causes de récusation limitativement énumérées dans l'art. 378, C. proc. -- C'est là une opinion trop restrictive. A côté de la récusation, il y a l'abstention du juge. Les causes d'abstention n'ont pas été, comme les causes de récusation, déterminées par la loi. V. Cass. 25 nov. 1875 (S. 1891.1.153, ad notam. - P. 1891.1.366, ad notam); 9 déc. 1889 (S. 1891.1.153. - P. 1891. 1.366), et les renvois. Adde, Garsonnet, Tr. de proc., 2o éd., par Cézar-Bru, t. 2, p. 574, § 753; notre C. proc. annoté, par Tissier, Darras et Louiche-Desfontaines, sur l'art. 880, n. 2 et s.; et notre Rép. gen. du dr fr., v° Récusation, n. 368 et s.; Pand. Rep., eod. verb., n. 398 et s. Les magistrats ont la faculté de se refuser à siéger, non seulement dans les cas énumérés par l'art. 378, mais encore toutes les fois que leur conscience leur fait un devoir de s'abstenir, avec cette seule restriction de faire constater et approuver leur abstention par la chambre du tribunal ou de la Cour à laquelle ils appartiennent. V. Cass. 25 nov. 1875 et 9 déc. 1889, précités, et la note. Adde, Pothier, Tr. de la proc., n. 78 (éd. Bugnet, t. 10, p. 39); Merlin, Rép., v° Récusation, S 1er, n. VII; Pigeau, Comment, sur le C. proc., t. 1, n. 658 et s.; Garsonnet, op, et loc. cit.; Rousseau et Laisney, Dict. de proc., vo Recusation, n. 49; Glasson, Précis de proc., 2° éd., par Tissier, t. 1er, n. 903; notre C. proc. annoté, loc. cit., n. 3; et notre Rép. gén. du dr.fr., verb. cit., n. 367, 370 et s.; Pand. Rép., verb. cit., n. 395, 412 et s. La décision par laquelle la chambre du tribunal ou de la Cour se prononce sur les causes d'abstention invoquées est un acte d'administration intérieure (V. Cass. 25 nov. 1875, motifs, et 9 déc. 1889, précités, et la note; Pau, 14 mars 1904, S. et P. 1904.2.128); il n'y a ni procès, ni débat, et aucune disposition de loi n'exige, soit un jugement, soit un procès-verbal pour constater les motifs d'abstention et leur admission par

n. 1541 et s.). 3o COLONIES, REQUÈTE CIVILE, NOUVELLE-CALÉDONIE, ADMISSION, PIÈCES RETENUES, FORCE PROBANTE. 4o REQUÊTE CIVILE, ADMISSION, PIÈCES RETENUES, FORCE PROBANTE (Rép., v Requête civile, n. 409 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 357 et s., 403 et s., 530 et s.).

1o Les causes pour lesquelle le juge, non récusé par les parties, peut être autorisé à s'abstenir, n'ont pas été déterminées par la loi; il appartient, en conséquence, à la chambre du tribunal ou de la Cour, dont fait partie le juge qui déclare s'abstenir, d'apprécier souverainement les motifs de cette abstention, et, en se livrant à cet examen, elle accomplit une acte de pure administration et de police intérieure, qui échappe au contrôle de la Cour de cassation (1) (C. proc., 378, 380).

Lorsque l'abstention est admise, il suffit qu'il en soit fait mention dans le jugement ou dans l'arrêt, pour que, par là, se trouve justifiée la présence du magistrat qui a du être appelé pour compléter le tribunal ou la Cour (2) (Id.).

2o En conséquence, un arrêt constate régulièrement l'empêchement d'un magistrat qui s'est abstenu, et son remplacement par un avocat, par la mention que cet avocat a été appelé à remplacer l'un des magistrats de

le tribunal qui doit prononcer sur la contestation; il suffit d'en faire mention dans le jugement définitif, et de motiver ainsi la présence du magistrat qui a été appelé pour compléter le tribunal. V. Cass. 6 déc. 1898 (S. et P. 1900.1.491; Pand. pér., 1899.1.30), et le renvoi. Dans l'espèce, la Cour de Nouméa avait estimé que le fait par un conseiller d'avoir connu de l'affaire comme substitut suffisait pour justifier et légitimer son abstention. L'appréciation de la Cour à cet égard était souveraine. Une seule obligation lui était imposée : c'était de mentionner l'abstention du magistrat; elle n'y avait pas manqué. Il importait peu qu'elle eût motivé l'abstention, puisqu'elle n'y était pas tenue, et qu'elle eût emprunté le motif de l'abstention à l'une des causes de récusation limitativement énumérées dans l'art. 378, C. proc. L'empêchement du magistrat ne résultait pas moins de son abstention volontaire, et se trouvait, par suite, être la conséquence, de la part du tribunal ou de la Cour, d'un acte d'administration et de police intérieure échappant comme tel à tout contrôle de la Cour de cassation.

(4-5) Aux termes de l'art. 480, 10°, C. proc., la voie de la requête civile est ouverte, « si, depuis le jugement, il a été recouvré des pièces décisives, et qui avaient été retenues par le fait de la partie ». Et le décret du 28 nov. 1866, portant organisation de l'administration de la justice en Nouvelle-Calédonie (S. Lois annotées de 1866, p. 105. — P. Lois, décr., etc. de 1866, p. 109), qui édicte, dans son art. 66, deux cas d'ouverture de cette voie de recours dans la colonie, déclare qu'elle peut être formée, « si la partie a été condamnée faute de représenter une pièce décisive qui était retenue par son adversaire Cette disposition présente ainsi, avec le droit commun de la métropole, une très grande analogie. Dans l'un et l'autre cas, la requête n'est recevable que si la pièce retenue est décisive (V. Cass. 6 juill. 1875, S. 1877.1.462. P. 1877. 1.1221, et le renvoi), circonstance que les juges du fond apprécient souverainement, leur appréciation

la Cour ayant connu de l'affaire en qualité de substitut du procureur général » (3) (C. proc., 141, 380).

30 En Nouvelle-Calédonie, où, d'après l'art. 66 du décret du 28 nov. 1866, la requete civile peut être formée, « si la partie a été condamnée faute de représenter une pièce décisive qui était retenue par son adversaire, le tribunal ou la Cour, saisi de ladite requête, n'a pas, pour justifier l'admission de la requête et la rétractation de la décision précédemment rendue, à rechercher si les pièces nouvellement produites, et qui, jusque-là, avaient été retenues par l'une des parties, étaient suffisamment probantes et décisives pour entrainer une solution diametralement contraire à celle qui est intervenue; il suffit qu'il estime que ces pièces étaient de nature à exercer une influence sur la solution du litige, au cas où elles eussent été connues des juges au moment où ils ont statue pour la première fois (4) (Décr., 28 nov. 1866, art. 66).

4° Que décider dans la métropole, où, d'après l'art. 480, 10°, C. proc., les jugements peuvent être rétractés par la voie de la requête civile, si, depuis le jugement, il a été recouvré des pièces décisives, et qui avaient été retenues par le fait de la partie (5) (C. proc., 480)? — V. la note.

échappant au contrôle de la Cour de cassation. V. Cass. 6 juill. 1875, précité, et le renvoi. Adde, notre C. proc.annoté, par Tissier, Darras et LouicheDesfontaines, sur l'art. 480, n. 186; et notre Rép. gén. du dr. fr., v° Requête civile, n. 472; Pand. Rép., eod. verb., n. 357.

Mais les juges saisis de la requête n'ont pas à rechercher si les pièces retenues sont à ce point décisives qu'elles commandent d'ores et déjà une solution diamétralement opposée à celle qui est intervenue. Il suffit que ces pièces eussent pu influer sur l'issue du procès et le faire juger autrement qu'il ne l'a été, si elles avaient été connues des juges au moment où ils ont statué pour la première fois. Il en est si bien ainsi que, malgré l'admission de la requête, la première décision pourra encore être maintenue, si, lors de l'examen à nouveau du fond, les pièces retenues sont définitivement écartées comme n'étant pas suffisamment probantes pour justifier une solution contraire. Autrement, il faudrait déclarer que les juges du fond se trouveraient liés par la simple admission de la requête, qu'ils ne pourraient plus discuter la valeur des pièces, et qu'ils n'auraient qu'à y confirmer leur décision. On ne s'expliquerait plus, en pareil cas, la nécessité de deux jugements statuant distinctement sur l'admission de la requête civile et sur le fond du litige. V. Cass. 24 avril 1901 (S. et P. 1902.1.220; Pand. pér., 1902 1.30), et les renvois. Adde, Rodière, Cours de compét. et de proc., t. 2, p. 116 et 127; Garsonnet, Tr. de proc., 2o éd., par Cézar-Bru, t. 6, p. 406, § 2326; et notre Rép. gén. du dr. fr., vo Requête civile, n. 409 et s.; Pand. Rep., eod. verb., n. 403 et s., 530 et s.

Ajoutons que, d'après l'opinion la plus généralement admise, il faut, pour que la découverte de la pièce retenue donne ouverture à requête civile, que la rétention de cette pièce, par la partie qui a obtenu le jugement, ait un caractère dolosif. V. Toulouse, 1 févr. 1864 (S. 1864.2.18. P. 1864. 137). Adde, notre C. proc. annoté, par Tissier, Darras et Louiche-Desfontaines, sur l'art. 480,

(Vve Lucchini et Paul Lucchini C. Cons. Higginson et autres).

Par acte du 5 oct. 1880, M. Lèques, mandataire de M. Joseph Lucchini, a vendu à M. Higginson une concession de terrains à Hunghen (Nouvelle-Calédonie), qui avait été accordée sous certaines conditions audit Joseph Lucchini. Aux termes de l'acte de vente, M. Lèques s'engageait, sous peine de 25.000 fr. de dommages-intérêts, à rapporter à M. Higginson, dans un délai de six mois, la ratification de son mandant. Bien que cette ratification n'ait jamais été rapportée, M. Higginson a revendu à son tour, sans aucune réserve, le 15 oct. 1885, la même propriété à M. Petit-Jean. Quinze années après cette dernière vente, le 22 oct. 1900, la veuve de M. Joseph Lucchini et ses fils, agissant aux droits de leur auteur, ont introduit, devant le tribunal civil de Nouméa, une demande tendant à faire déclarer nulles les ventes consenties par M. Lèques à M. Higginson, et par ce dernier à M. Petit-Jean. M. Petit-Jean a appelé en garantie M. Higginson, lequel a, de son côté, appelé en garantie M. Lèques.

Par jugement en date du 29 oct. 1902, le tribunal a annulé la vente Higginson, comme faite sans pouvoir par Lèques et non ratifiée par Joseph Lucchini, et, par voie de conséquence, la vente Petit-Jean; il a fait droit, en outre, aux recours en garantie formés par M. Petit-Jean contre M. Higginson et par celui-ci contre M. Lèques. - Appel de ce jugement a été interjeté par toutes les parties. Devant la Cour de Nouméa, M. Higginson a soutenu qu'en admettant même que M. Lèques n'eût pas eu les pouvoirs nécessaires pour vendre les terrains litigieux, cette vente avait été tacitement ratifiée par la connaissance qu'en avait eue M. Joseph Lucchini, et par le silence qu'il avait gardé jusqu'à sa mort, en 1892, et que ses héritiers avaient continué à observer jusqu'en 1900, date de leur action. Par arrêt du 30 nov. 1903, la Cour de Nouméa a confirmé le jugement entrepris, en ce qu'il avait annulé les ventes des 5 oct. 1880 et 15 oct. 1885, et déclaré que M. Lèques devait garantir M. Higginson des condamnations prononcées contre lui, par le motif « qu'on ne saurait admettre comme une ratification tacite le silence gardé par Lucchini jusqu'à sa mort, en 1892, et par ses héritiers depuis cette époque; qu'en l'absence de tous documents produits par les parties, il n'est pas démontré que Lucchini ou ses héritiers aient eu connaissance de l'aliénation de la propriété, et qu'ils aient ratifié tacitement la vente, en s'abstenant, pendant près de vingt ans, de la contester».

Plus tard, des documents concernant les ventes litigieuses ont été remis par M. Lèques, qui a prétendu les avoir retrouvés après les avoir égarés, à M. de Verteuil, mandataire en Nouvelle Calédonie de M. Higginson. C'est alors que, se fondant sur la découverte de ces pièces nouvelles, M. Higginson d'abord, ses héritiers ensuite, ont introduit devant la Cour de Nou

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n. 184. V. cep. en sens contraire, les autorités citées dans la note sous Toulouse, 1er févr.

méa une procédure de requête civile, dans les formes spéciales prévues par le décret du 28 nov. 1866. Par arrêt en date du 31 déc. 1906, la Cour de Nouméa, « considérant que toutes les conditions nécessai res à l'admission du recours prévu par les art. 66 et s. du décret du 28 nov. 1866 étaient réunies », a prononcé l'admission de la requête civile des consorts Higginson, et rétracté, en conséquence, son précédent arrêt du 30 nov. 1903.

POURVOI en cassation par Mme veuve Lucchini et consorts. 1er Moyen. Violation des art. 1 et 2 du décret du 3 sept. 1882, en ce que l'arrêt attaqué a été rendu avec le concours d'un avocat, alors que tous les magistrats composant la Cour n'étaient pas légitimement empêchés.

2 Moyen. Violation des art. 66 du décret du 28 nov. 1866, 1338, C. civ., 12, C. comm., et 7 de la loi du 20 avril 1810, en ce que l'arrêt attaqué a déclaré admissible une requête civile, à l'appui de laquelle étaient produites des copies de lettres adressées à l'auteur des demandeurs en cassation et auxquelles le destinataire n'aurait pas répondu, alors que ces pièces n'ont pu être considérées comme décisives qu'en tenant indument, en violation des textes susvisés, comme constitutif d'une ratification, le silence gardé par le destinataire, alors, d'autre part, que les pièces n'avaient été ni retenues, ni, à plus forte raison, dolosivement retenues par les demandeurs en cassation.

-

ARRÊT.

LA COUR; Statuant sur le premier moyen du pourvoi : Attendu que l'arrêt attaqué porte: « Etaient présents MM. Blandeau, président, Favreau, conseiller, et Genson, défenseur près la Cour et les tribunaux de Nouméa, seul défenseur présent à la barre, en dehors des avocats plaidants, appelé à remplacer M. Gleises, conseiller par intérim, ayant connu de l'affaire en qualité de substitut de M. le procureur général, et M. Solari, conseiller auditeur, empêché »; Attendu que cette mention remplit toutes les conditions de régularité exigées par la loi pour justifier la composition de la Cour; qu'en effet, les causes pour lesquelles le juge, non récusé par les parties, peut être autorisé à s'abstenir, n'ont pas été déterminées par la loi; que l'art. 380, C. proc., a laissé à la chambre du tribunal, à laquelle appartient le juge qui déclare vouloir s'abstenir, l'appréciation des motifs de cette abstention, leur admission ou leur rejet; qu'en se livrant à cet examen, elle accomplit un acte de pure administration et de police intérieure, qui échappe au contrôle de la Cour de cassation; qu'il suffit, lorsque l'abstention est admise, qu'il en soit fait mention dans le jugement ou l'arrêt, et que, par là, se trouve justifiée la présence du magistrat qui a été appelé pour compléter le tribunal; - D'où il suit qu'en statuant ainsi qu'elle l'a fait, la Cour de Nouméa n'a pas violé les textes de loi invoqués au moyen;

1864, précité. Et les juges du fond ont un pouvoir souverain pour apprécier le caractère dolosif

Sur le deuxième moyen Attendu qu'en l'état de la cause, la Cour de Nouméa n'avait pas à rechercher si les pièces nouvellement produites étaient suffisamment probantes et décisives pour établir la ratification par Lucchini de la vente qui avait été consentie, en son nom, par Lèques, son mandataire, à Higginson, des terrains faisant partie de la concession de Tipindge (Nouvelle-Calédonie), originairement attribuée audit Lucchini, et rétrocédés ensuite par l'acquéreur à Petit-Jean; qu'il s'agissait seulement de décider si ces pièces étaient de nature à exercer une influence sur la solution du litige, au cas où elles eussent été connues des juges au moment où a été rendu l'arrêt du 30 nov. 1903; - Attendu que l'arrêt attaqué déclare, à cet égard, d'une part, que les pièces se composent de copies de lettres adressées par Lèques à Lucchini, son mandant; que les originaux de ces lettres sont restés entre les mains de Lucchini et les copies entre les mains de Lèques que ces pièces démontrent que Dominique Lucchini, dès 1880, et Joseph Lucchini, à la mort de son frère, en 1887, ont été avisés de la cession faite à Higginson des droits qu'ils pouvaient avoir sur la concession de Tipindgé et des conditions auquelles cette cession a été faite »; d'autre part, qu'il n'est pas possible de nier l'influence que la production de ces pièces aurait eue sur la décision des juges, puisque la Cour n'a accueilli la demande des consorts Lucchini que parce qu'il n'était pas établi que la vente du 5 oct. 1880 fut connue de Joseph Lucchini; que l'arrêt ajoute que la dissimulation de ces pièces (des originaux) par les consorts Lucchini présente assurément un caractère dolosif; qu'il en serait de même de la rétention des copies par Lèques, si la version de la découverte fortuite de ces pièces était inexacte; mais que, dans un cas comme dans l'autre, il y a eu rétention matérielle de pièces dont Higginson pouvait demander légalement la communication »; Attendu que c'est à bon droit que, dans ces circonstances par elle souverainement constatées, la Cour de Nouméa a admis la requête civile présentée par les consorts Higginson; qu'elle a motivé sa décision, et n'a violé aucun des textes de loi visés au moyen; Rejette, etc.

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Du 29 janv. 1913. — Ch. civ. MM. Baudouin, ler prés.; Ruben de Couder, rapp.; Lombard, av. gén. (concl. conf.); Raynal et Palyart, av.

CASS.-CIV. 19 janvier 1910. CRÉANCIER (EN GÉNÉRAL), ACTION PAULIENNE, CRÉANCIER CHIROGRAPHAIRE, SAISIE DU MOBILIER, CRÉANCIER GAGISTE, VENTE, MAUVAISE FOI, Préjudice (Rép., vo Action paulienne, n. 139 et s., et Suppl., eod. verb., n. 139 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 38 et s., 64 et s.).

L'action paulienne formée par le créandes actes qui leur sont soumis. V. Cass. 5 juin 1839 (S. 1839.1.477. - P. 1839.2.264).

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