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cier chirographaire, qui, après avoir saisi le mobilier et les marchandises garnissant le fonds de commerce de son débiteur, poursuit la nullité d'un acte par lequel ce dernier a vendu ces objets à un autre créancier, est à bon droit déclarée mal fondée, alors que celui-ci avait sur ces mêmes objets, en vertu d'un acte antérieur, un droit de gage qui lui garantissait la préférence sur le créancier saisissant, pour le prix entier desdits objets, et que, d'ailleurs, cette vente a eu lieu à un prix sérieux, qui n'aurait pas été dépassé en vente publique; ces circonstances excluent, en effet, la mauvaise foi de l'acheteur, en même temps que toute possibilité de préjudice résultant pour le demandeur de la vente litigieuse (1) (C. civ., 1167).

(Moquet C. Taclet). ARRET.

:

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LA COUR; Sur le moyen unique du pourvoi Attendu que, des qualités et des constatations de l'arrêt attaqué, il résulte que Breton, débiteur d'une somme de 316.373 fr. envers Taclet, lui a d'abord donné en gage, puis vendu, le 1er avril 1900, le mobilier et les marchandises garnissant le café qu'il exploitait à Paris; Attendu que Moquet, créancier de Breton d'une somme de 22.850 fr., qui avait, le 19 mars précédent, fait saisir lesdits mobilier et marchandises, a demandé la nullité de la vente susvisée, par ce double motif 1 que Taclet, qui était de mauvaise foi, ne pouvait se prévaloir de l'art. 2279, C. civ.; 2o que la vente litigieuse, faite en fraude des droits des créanciers de Breton, était nulle, aux termes de l'art. 1167 du même Code: Attendu que le tribunal civil de la Seine a admis cette double prétention, par un jugement dont Moquet a demandé la confirmation par adoption de motifs; mais que l'arrêt attaqué constate: 1o que la vente dont il s'agit a eu lieu au prix de 163.893 fr., à dire d'experts compétents, et après un travail d'estimation sérieux, dont rien ne permet de suspecter la sincérité 2o que ce prix n'aurait pas été dépassé dans une vente publique à l'encan; 30 qu'en tous cas, s'il avait été plus élevé, il eut été absorbé par Taclet, creancier gagiste privilégié pour une somme beaucoup plus considérable, et que Moquet n'eût eù intérêt à la nullité de la vente que s'il avait prouvé (ce qu'il n'a fait ni essayé de faire) qu'une vente publique du gage eût pu produire une somme supérieure au montant de la créance privilégiée qu'il garantissait, c'est-à-dire

D

(1) C'est là une application du principe que, dans l'exercice de l'action paulienne, le créancier poursuivant doit établir le préjudice causé à ses droits par l'acte qu'il argue de fraude, et le caractère frauduleux de cet acte. V. Cass. 17 mars 1909 (S. et P. 1909.1.356; Pand. pér., 1909.1.356), et les renvois. Dans l'espèce, le préjudice ne pouvait pas se concevoir pour le créancier demandeur à l'action paulienne. En effet, même en supposant annulée la vente qu'il attaquait comme frauduleuse, ce créancier n'eût rien pu toucher, puisque le détendeur, qui avait sur les objets à lui vendus un droit de gage résultant d'un contrat antérieur, lui eût été préféré, et se serait,' en vertu de ce

316.373 fr.; Attendu que l'arrêt attaqué a ainsi, d'une part, exclu la mauvaise foi de Taclet, et, d'autre part, écarté toute possibilité de préjudice pour Moquet; que, par suite, il a, au point de vue tant de l'art. 2279 que de l'art. 1167, C. civ., justifié le refus de prononcer la nullité de la vente litigieuse; que le pourvoi n'est donc pas fondé; Rejette le pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 28 déc. 1905 par la Cour de Paris, etc.

Du 19 janv. 1910. Ch. civ. - MM. Ballot-Beaupré, ler prés.; Dupont, rapp.; Melcot, av. gén. (concl. conf.); Talamon et de Ségogne, av.

CASS.-REQ. 7 août 1912. VÉRIFICATION D'ÉCRITURE, TESTAMENT OLOGRAPHE, POUVoir du juge, FORMES (Rép., vo Vérification d'écriture, n. 87 et s., 106 et s.; Pand. Rép., vis Dénégation d'écriture, n. 84 et s., Vérification d'écriture, n. 46 et s., 175 et s.).

Les juges du fond, lorsqu'ils procedent seuls, comme ils en ont le pouvoir, à une vérification d'écriture (en l'espèce, la véri fication d'écriture d'un testament olographe) sont libres de puiser dans tous les éléments de la cause les éléments de leur conviction, et ne sont pas astreints à l'observation des dispositions du Code de procédure civile, lesquelles ne sont applicables qu'en cas d'expertise (2) (C. proc., 195 et s.).

(Margueron et Bayard C. Barbier).

ARRÊT.

LA COUR; Sur le moyen unique, pris de la violation des art. 1315, 1319 et 1322, C. civ., des droits de la défense, de l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810, pour défaut de motifs, manque de base légale, et excès de pouvoir : Attendu, en droit, que, lorsqu'ils procèdent seuls, comme ils en ont le pouvoir, à une vérification d'écriture, les juges du fond, libres de puiser dans tous les faits et documents de la cause les éléments de leur conviction, ne sont point astreints à l'observation des dispositions du Code de procédure civile, lesquelles ne sont applicables qu'en matière d'expertise; Attendu, en fait, qu'en déclarant que, de la confrontation du testament attaqué, soit avec les pièces de comparaison soumises aux experts, soit avec des documents nouveaux produits par Barbier devant la Cour, non sérieusement contestés, et qui, d'après l'arrêt, émanent certainement du de cujus, résultait pour

gage, fait attribuer le prix entier desdits objets. (2) Les juges ont la faculté de procéder enxmêmes à la vérification d'une écriture contestée (V. Cass. 27 juill. 1909, S. et P. 1912.1.207; Pand. pér., 1912.1.207, et les renvois), et notamment d'un testament olographe. V. Cass. 27 juill. 1909, précité, et les renvois. Et, lorsqu'ils procèdent eux-mêmes à la vérification, ils peuvent puiser les éléments de leur conviction dans les faits, actes et documents de la cause, sans être astreints aux formalités prescrites par les art. 195 et s., pour la vérification par titres, témoins ou expertise. V. Cass. 28 oct. 1896 (S. et P. 1900.1.518; Pand. pér., 1897.1.101), et les renvois. Adde, Lyon, 30 mars

elle la conviction que le testament du 3 oct. 1905 était l'œuvre de Francois Dortier, la Cour a donné une base légale à sa décision; Attendu, en ce qui concerne le second grief, qu'il résulte de l'ensemble des motifs de l'arrêt que les parties étaient présentes ou représentées, lorsque la Cour a procédé à la vérification d'écritures, et que la Cour n'a pas méconnu les droits de la défense en faisant état de pièces qui ont été soumises aux demandeurs, sans protestation de leur part; Attendu, par suite, que la Cour n'a commis aucun excès de pouvoir, et que son arrêt, suffisamment motivé, n'a violé ni les textes ni les principes visés au moyen; Rejette le pourvoi contre l'arrêt de la Cour de Lyon du 10 nov. 1910, etc.

Du 7 août 1912.

Ch. req.

MM. le cons. Lardenois, prés.; Bulot, rapp.; Eon, av. gén. (concl. conf.); Mornard, av.

CASS.-CIV. 22 janvier 1913.

10 OBLIGATION (EN GÉNÉRAL), CAUSE NON EXPRIMÉE, CAUSE LICITE, CAPACITÉ, PRÉSOMPTION, PREUVE CONTRAIRE, CHARGE DE LA PREUVE (Rép., v Obligations, n. 252 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 7872 et s.). 2o AUTORISATION DE FEMME MARIÉE, AUTORISATION (DÉFAUT D'), DÉCÈS DU MARI, FEMME, BILLETS, POSTDATE, EXCEPTION DE NULLITÉ, PREUVE (CHARGE DE LA) (Rép., v Capacité, n. 24 et s.; Pand. Rép., v Obligations, n.7542 et s.).

1° L'obligation dont la cause n'est pas exprimée est présumée avoir une cause vraie et licite. Dès lors, c'est au débiteur, contre lequel l'exécution de l'obligation est poursuivie, qu'il incombe, s'il allègue qu'il y a défaut de cause, ou cause fausse ou illicite, d'en rapporter la preuve (3) (C. civ., 1132).

La présomption de capacité résultant de l'apposition par un débiteur de sa signature sur une obligation a pour effet d'imposer au débiteur, s'il allègue que cette obligation, qu'il aurait signée en état d'incapacité, a été postdatée par le bénéficiaire, d'en rapporter la preuve (4) (C. civ., 1108, 1123, 1315).

20 En conséquence, si une veuve, assignée en paiement de billets qu'elle a souscrits en blanc, prétend qu'ils auraient été signés par elle du vivant de son mari, et sans son autorisation, à une date antérieure à celle qui a été portée sur les billets par le bénéficiaire, cette exception ne saurait être accueillie par le seul motif que

1897 (S. et P. 1897.2.272), et les renvois. V. encore, comme applications de ce principe, Cass. 30 avril 1902 (S. et P. 1906.1.319; Pand. pér., 1903.1.14), et la note; 30 juill. 1906 (S. et P. 1907.1.165; Pand. per., 1906.1.322).

(8) La jurisprudence est aujourd'hui bien fixée en ce sens. V. Cass. 25 févr. 1896 (S. et P. 1896. 1.280; Pand. per., 1896.1.292), et le renvoi ; Bourges,

19 nov. 1900 (S. et P. 1901.2.39). Adde, Planiol, Tr. élém. de dr. civ., 5° éd., t. 2, n. 1044. V. au surplus, notre Rép. gen. du dr. fr., vo Obligations, n. 252 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 7872 et s.

(4) La capacité des parties étant la règle, tandis que l'incapacité est l'exception (V. Colmet de

l'on s'expliquerait difficilement que la femme ait contracté un emprunt après le décès de son mari, alors qu'elle disposait de ressources provenant de la vente d'un immeuble (1) (C. civ., 217, 1108, 1123, 1315).

(Dellac C. Veuve Delieux).

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de

Le 27 avril 1910, la Cour d'appel d'Agen a rendu l'arrêt suivant: -La Cour; Attendu que Dellac demande à la dame Delieux le paiement de la somme 5.200 fr., montant de sept effets datés du 25 janv. 1907, payables les 25 juill. et 25 août 1907, et causés valeur reçue comptant; Attendu qu'il est constant que ces effets ont été signés en blanc par la dame Delieux; que Dellac, interrogé sur faits et articles, a déclaré que lesdits effets lui ont été remis en règlement de compte par son père, et qu'il les avait lui-même remplis et datés; Attendu que le porteur d'un effet en blanc a qualité pour le remplir, à la condition de se conformer aux indications de la personne qui le lui a remis; d'où l'obligation pour Dellac d'établir que son père a versé les fonds entre les mains de la dame Delieux; qu'ainsi pourrait être établie la véritable cause de l'obligation; - Mais attendu que, non seulement Dellac n'établit pas que son père ait versé les fonds à ladite dame; qu'il a déclaré, dans son interrogatoire, qu'il n'était pas en relations d'affaires avec la dame Delieux, et qu'il ne savait pas si son père avait des relations d'affaires avec elle; qu'il a prétendu que cette dernière était la débitrice de son père, et que celui-ci avait remis à lui son fils les effets dont s'agit en règlement de compte; Attendu que l'aveu résultant de ces déclarations n'est pas indivisible; qu'il est complexe, puisqu'il suppose un prêt fait par Deflac père, un règlement de compte avec le fils, et une dation en paiement par le père à ce dernier; que, dans ces conditions, la dame Delieux soutient que les valeurs dont on lui demande le paiement sont sans cause juridique, et qu'il appartient à Dellac de prouver la véritable cause, ce qu'il ne fait pas; Attendu, en outre, qu'il n'est

pas certain que les effets litigieux aient été souscrits en blanc par la dame Delieux après la mort de son mari, et qu'elle n'aurait pu valablement s'engager du vivant de celui-ci ; Attendu que le sieur Delieux est décédé le 17 janv. 1906, et Dellac père, le 5 juillet de la même année; que les valeurs portent la signature d'Angèle Delieux, née Vignola, alors que, depuis

Santerre (contin. de A.-M. Demante), Cours anal. de C. civ., t. 5, n. 35; Huc, Comment. du C. civ., t. 7, n. 57; Planiol, Tr. élém. de dr. civ., 5o éd., t. 2, n. 1078; Demolombe, Contr. ou oblig., t. 1er, n. 289; Larombière, Théor. et prat. des oblig., t. 1°, sur l'art. 1123, n. 1; Baudry-Lacantinerie et Barde, Oblig., 3o éd., t. 1er, n. 227; et notre Rép. gén. du dr. fr., vo Capacité, n. 24; Pand. Rép., v° Obligations, n. 7542), la capacité d'une partie au moment où elle a souscrit une obligation doit être présumée. Si donc une partie, qui, ayant été en état d'incapacité, a recouvré sa capacité (femme mariée devenue veuve, mineur devenu majeur, interdit ayant obtenu la

le décès de son mari, et notamment dans l'acte de vente par elle consenti le 4 mars 1906, elle signe Vignola, veuve Delieux; qu'on s'explique difficilement qu'entre la date du décès de son mari et la date du décès de Dellac père, à qui elle a souscrit les effets, elle ait contracté des emprunts, au moment où, par la vente du 4 mars 1906, elle réalisait le prix d'un immeuble se chiffrant par 20.000 fr., sur lequel prix une somme de 3.000 fr. lui était versée comptant: Attendu, dans ces condi

tions, qu'il y a lieu de déclarer nuls, pour défaut de cause juridique et sans valeur, les effets dont Dellac réclame le paiement; qu'il y a lieu, par suite, d'annuler les saisies-arrêts pratiquées par Dellac, et d'ordonner que les tiers se libéreront aux mains de la dame Delieux; Par ces motifs, etc..

POURVOI en cassation par M. Dellac. ler Moyen. Violation des art. 1132 et 1315, C. civ., des règles de la cause, et renversement du fardeau de la preuve, en ce que l'arrêt attaqué a déclaré nuls et sans valeur, pour défaut de cause juridique, des effets dont Dellac demandait le paiement à la veuve Delieux, qui les avait signés, sous prétexte que le demandeur n'établissait pas la véritable cause de l'obligation, alors que le porteur des effets n'avait pas à prouver la validité du contrat, et qu'il incombait, au contraire, au signataire de ces effets de démontrer que l'obligation était sans cause valable.

2o Moyen. Violation des art. 1123, 1315 et 1322, C. civ., et 7 de la loi du 20 avril 1810, pour manque de base légale; fausse application des art. 217, 1328 et 1347, C. civ., en ce que l'arrêt attaqué a repoussé l'action en paiement du porteur d'effets signés par la défenderesse, sous prétexte qu'il n'était pas certain que ces effets aient été signés par ladite dame après la mort de son mari, alors que c'était à elle qu'il incombait, en présence de la présomption résultant de sa signature, de démontrer que cette signature avait été donnée en état d'incapacité légale, et qu'il n'existait aucun commencement de preuve par écrit rendant vraisemblable cette allégation. 3. Moyen...

ARRÊT.

LA COUR; Sur les deux premiers moyens réunis : Vu les art. 1132 et 1315, C. civ.; Attendu que, des constatations de l'arrêt attaqué, il résulte que Dellac, porteur de sept billets en blanc, mainlevée de l'interdiction), a souscrit une obligation non datée, ou qu'elle prétend avoir été postdatée pour lui donner une valeur qu'elle n'aurait pas eue à sa date réelle, elle ne peut, soit agir en nullité de cette obligation, soit en opposer la nullité par voie d'exception, qu'à la condition de prouver qu'elle a été souscrite pendant la période d'incapacité. C'est là une conséquence de la règle posée par l'art. 1315, C. civ.; le souscripteur de l'obligation est tenu d'établir le bien fondé du moyen de nullité qu'il invoque. L'arrêt ci-dessus est intéressant, en ce qu'il formule très nettement un principe, dont la jurisprudence s'était bornée jusqu'à présent à

signés par la veuve Delieux, et s'élevant ensemble à 5.200 fr., a reconnu, dans un interrogatoire sur faits et articles, qu'il avait reçu ces billets de son père en règlement de compte, et qu'il les avait lui-même datés et causés valeur reçue comptant; Attendu que, pour déclarer qu'ils étaient nuls pour défaut de cause juridique et sans valeur, et pour débouter, par suite, Dellac de sa demande en paiement de leur montant, l'arrêt s'est fondé: 1o sur ce qu'il incombait à Dellac de prouver que son père avait versé à la dame Delieux les sommes objet du litige, et d'établir ainsi la véritable cause de l'obligation; 2 sur ce qu'il n'était pas certain que les effets litigieux eussent été souscrits en blanc par ladite dame après la mort de son mari, et que, du vivant de celui-ci, elle ne pouvait valablement s'engager sans son autorisation; Mais attendu, d'une part, que, de l'art. 1132, C. civ., il résulte que, bien que la cause ne soit pas exprimée dans une obligation, il y a présomption qu'elle existe et qu'elle est vraie et licite, à moins que le contraire ne soit prouvé que, dès lors, si celui contre lequel l'exécution d'une telle obligation est poursuivie prétend qu'il y a défaut de cause, ou cause fausse, ou illicite, c'est à lui d'en rapporter la preuve; - Attendu, d'autre part, qu'en présence de la présomption de capacité résultant du fait même de sa signature, il incombait à la dame Delieux, par application de la règle que le défendeur devient demandeur quant à l'exception qu'il oppose, de prouver qu'elle était alors en état d'incapacité, et, par suite, que c'était avant le décès de son mari qu'elle avait signé les billets en litige; qu'il n'est pas établi par l'arrêt attaqué qu'elle ait fait cette preuve qu'en effet, pour tout motif sur ce point, l'arrêt se borne à dire qu'on s'explique difficilement qu'entre la date du décès de son mari et la date du décès de Dellac père, à qui elle avait souscrit les effets, elle ait contracté des emprunts, au moment où, par la vente du 4 mars 1906, elle réalisait le prix d'un immeuble s'élevant à 20.000 fr., sur lequel prix une somme de 3.000 fr. lui était versée comptant »; que, dès lors, en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'Agen a violé les articles ci-dessus visés; Sans qu'il soit besoin de statuer sur le troisième moyen; - Casse, etc.

Du 22 janv. 1913. — Ch. civ. MM. Baudouin, er prés.; Douarche, rapp.; Mérillon, av. gén. (concl. conf.); Tétreau,

av.

faire l'application, notamment en décidant que le conseil judiciaire, qui demande la nullité d'actes sous seing privé passés par le prodigue, en vertu de l'art. 502, C. civ., doit établir que les actes ont été signés par le prodigue postérieurement au jugement qui l'a pourvu d'un conseil judiciaire. V. Cass. 13 nov. 1895 (S. et P. 1897.1.262, et les renvois; Pand. pér., 1897.1.145). Adde, sur renvoi, Orléans, 5 mai 1897 (S. et P. 1897.2.303; Pand. pér., 1897.2.318). V. aussi, sur le même principe, en matière de vice du consentement, Cass. 5 févr. 1894 (S. et P. 1894.1.277), et la note.

(1) V. la note qui précède.

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(1 à 5) L'arrêt de la chambre civile du 20 nov. 1910 est très net et notable. Il a cassé un arrêt de la Cour de Paris du 20 mars 1907 (S. et P. 1908. 2.1; Pand. pér., 1908.2.1), dont nous avons énergiquement combattu le système. V. la note de M. Esmein, avec les renvois, sous Paris, 20 mars 1907, précité. Nous avons la flatteuse satisfaction de voir notre doctrine confirmée par la Cour suprême, dont l'arrêt ne laisse prise à aucune contestation. V. cep., Sourdois, Des effets de la clause d'imputation adjointe à la constitution de dot (Rev. trim. de dr. civ., 1910, p. 307 et s.).

a

Rappelons les faits assez simples qui ont donné lieu au débat. Deux époux, mariés sous le régime dotal, avec société d'acquêts, avaient constitué à deux de leurs enfants, conjointement et solidairement, des dots dont le montant total s'élevait à 615.000 fr., et chacun des contrats de mariage portait la clause que la dot serait imputable d'abord sur la succession de l'époux prémourant, et subsidiairement, s'il y avait lieu, sur celle du survivant ». Du vivant des deux parents, ces dots avaient été effectivement payées. Une somine de 233.000 fr. environ avait été à cet effet prise par le mari dans la société d'acquêts; le surplus avait été fourni par la femme en valeurs à elle propres. Le mari est décédé, laissant un patrimoine dont le passif dépassait l'actif. Comment, dans ces conditions, devait jouer la clause d'imputation? Le notaire liquidateur, le tribunal de Dreux et la Cour d'appel de Paris avaient estimé successivement que toute imputation était impossible sur la succession de l'époux prémourant, à raison de l'insolvabilité qu'elle présentait, et que, par suite, c'était la clause d'imputation subsidiaire qui devait être appliquée intégralement. Les dots devaient donc être considérées comme ayant été constitué s par la femme seule et pour le tout; mais, la société d'acquêts, ayant fourni 233.000 fr. pour le paiement de ces dots, se trouvait par là avoir payé jusqu'à concurrence de cette somme une dette propre à la femme, et celle-ci lui devait une récompense égale. Il faut ajouter que le débat judiciaire ne s'était point élevé entre les deux enfants ainsi dotés et leurs frères ou sœurs (il y avait d'autres enfants nés du mariage et non dotés), mais entre la veuve et des créanciers de son mari, qui étaient intervenus, et qui pouvaient faire valoir leurs droits sur la récompense, si elle était due, tandis qu'ils ne pouvaient les faire valoir sur le rapport qui serait fait (en le supposant dû) à la succession du mari, des 233.000 francs payés ANNÉE 1913. 2 cah.

d'obliger les donataires à rapporter à sa succession l'intégralité des dots, sous la réserve, toutefois, que, si leur part hérédi taire dans ladite succession se trouve inférieure au montant du rapport, l'époux survivant doit leur tenir compte de la différence, en raison de son engagement solidaire et de l'obligation de garantie qui en résulte, sauf à faire rapporter à sa propre succession les sommes par lui déboursées de ce chef (2) (Id.).

Doit, par suite, être cassé l'arrêt qui, statuant sur des contestations soulevées, sujet de la liquidation de la succession du mari, par des créanciers de la société d'acquels ayant existé entre les époux, a décidé que la femme, qui a survécu à son mari, devait être considérée comme ayant seule constitué les dots, et serait tenue de faire récompense à la société d'acquets du montant des sommes puisées dans la caisse

par lui comme codébiteur sur les dots de ses enfants. § 1er

Comment était-on arrivé à ce résultat paradoxal, manifestement contraire à la lettre et à l'esprit vrai de la clause stipulée, qui, comme le dit la Cour de cassation, « ne présente aucune ambiguïté »? D'après l'arrêt cassé de la Cour de Paris, cela viendrait de ce que, dans la pratique notariale de Paris, la clause d'imputation principale et subsidiaire, telle qu'elle se présentait ici, a été complétée par une addition devenue usuelle, et d'après laquelle l'enfant donataire ne sera jamais tenu

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au rapport effectif à la succession du prémourant ». La Cour de cassation vise aussi, sans l'admettre dans l'espèce, cette stipulation,« entrée dans la pratique notariale, et suivant laquelle l'enfant doté ne serait jamais tenu à un rapport effectif à la succession du prémourant ». Nous examinerons plus loin la validité de la clause ainsi complétée, mais il n'est pas besoin de le faire pour démontrer que cette clause additionnelle, qui n'était point écrite, ne pouvait s'appliquer ici. En la supposant licite et efficace, elle ne pourrait être prise en considération que si elle avait été expressément convenue et stipulée. Elle est, en effet, extraordinaire, exorbitante, et même diamétralement contraire dans ses effets au but que traditionnellement on vise par la clause d'imputation sur la succession du parent prémourant, même modifiée par la clause d'imputation simplement subsidiaire sur la succession du parent survivant. Ce but, c'est d'entamer le moins possible la fortune de l'époux survivant, et l'effet de la clause nouvelle, c'est d'augmenter les chances que la dot tout entière soit mise à son compte. Aussi la chambre civile a-telle eu simplement à dire à cet égard: Sans rechercher quelle pourrait être la portée d'une semblable stipulation, il suffit de constater que l'arrêt ne relève aucune circonstance de nature à établir que les contractants s'y seraient implicitement soumis ». L'arrêt, par là, admet, il est vrai, qu'une telle stipulation n'a pas besoin d'être expresse, qu'elle pourrait être implicite, et, en droit, cela n'est pas contestable. Mais, pour donner une telle interprétation des contrats de mariage, on ne voit point quel indice pourrait suppléer à une stipulation expresse. La fréquence d'une pareille clause ne suffirait pas, car, manifestement, elle est exorbitante du droit commun, et tend à bouleverser des rapports juridiques nettement établis par le Code civil, à écarter des résultats qu'il a voulus.

de cette société pour le paiement desdites dots, par le motif que les enfants dotés ne retireraient aucun émolument de la succession paternelle, qui présentait un déficit (3) (Id.).

Vainement, pour justifier leur décision, les juges ont allégué que les parties, en adoptant la clause litigieuse, avaient entendu en régler les effets conformément à une stipulation entrée dans la pratique notariale, et suivant laquelle l'enfant doté ne serait jamais tenu à un rapport effectif à la succession du prémourant», si aucune circonstance, de nature à établir que les parties s'étaient implicitement soumises à celle stipulation, n'a été relevée par les juges du fond (4) (Id.).

Et, dans cet état de la cause, il n'y a lieu, pour la Cour de cassation, de rechercher quelle pourrait être la portée d'une semblable stipulation (5) (Id.).

D'autres considérations avaient aussi joué un rôle. C'était d'abord la préoccupation de la sécurité des jeunes ménages. On veut qu'ils puissent compter, autant qu'il est possible, sur la conservation des dots qui leur ont été constituées pour supporter les charges du ménage; on veut éviter, autant qu'il est possible, qu'un rapport effectif, c'est-à-dire un rapport proprement dit, vienne détruire l'équilibre de leur avoir. Ces considérations sont caractéristiques de notre temps. Elles font passer l'intérêt de l'enfant doté avant l'intérêt du parent survivant, auquel on songeait surtout jadis dans la clause d'imputation sur la succession du parent prédécédé.

Mais, bien qu'elle ne nous paraisse pas avoir été dégagée d'une façon explicite, une autre idée nous semble, dans cette matière, avoir exercé une influence certaine sur les esprits. Elle ressort des termes imputable, imputation, traditionnellement et constamment employés dans ces clauses. Les termes propres eussent été rapportable, rapport : il semblait qu'en ne les employant pas, on voulût écarter l'application et les règles du rapport; la théorie qui avait été construite sur l'ancien art. 760, C. civ. (V. Chabot, Comment. sur la loi des succ., t. 1, sur l'art. 760, n. 2; Poujol, Tr. des succ., t. 1, sur l'art. 760, n. 1 et s.), pouvait encore aider à une pareille conception.

Mais cela ne pouvait tenir, à la réflexion. Tout au moins, tant que n'est pas entrée en scène la dernière addition à la clause, celle qui porte qu'il n'y aura jamais lieu au rapport effectif, on ne pouvait songer à soustraire au rapport les dots constituées avec la clause d'imputation sur la succession du parent prémourant, et subsidiairement sur celle du parent survivant. Aussi, dans la présente affaire, les arrêts qui sont dans notre sens insistent-ils sur l'obligation de rapport envers la succession du père prédécédé, jusqu'à concurrence des sommes reçues de lui. La Cour de cassation dit que la clause avait pour conséquence légale de faire réputer celui des deux époux qui décéderait le premier seul constituant, et d'obliger les donataires à rapporter à sa succession l'intégralité des dots, sous la réserve toutefois que, si leur part héréditaire dans cette succession était inférieure au montant du rapport, l'époux survivant leur tiendrait compte de la différence, en raison de son engagement solidaire et de l'obligation de garantie qui en résultait, sauf à faire rapport à sa propre succession des sommes par lui déboursées de ce chef ».

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Ire PART.

(Vve d'Arjuzon C. Foubert et autres),

Mme veuve d'Arjuzon s'est pourvue en cassation contre l'arrêt de la Cour de Paris du 20 mars 1907, rapporté S. et P. 1908.2.1; Pand. pér., 1908.2.1. 1er Moyen. Violation des art. 843, 1134, 1135, 1168, 1181 et 1183, C. civ.; fausse application des art. 1437 et 1438 du même Code, ensemble, violation de l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810, par défaut de motifs et manque de base légale, en ce que l'arrêt attaqué a décidé que l'exposante devait récompense à la société d'acquêts ayant

La Cour d'appel de Caen, Cour de renvoi, qui a rendu son arrêt, le 21 juin 1911, dans le même sens que la Cour de cassation (V. infra, 2a part., p. 46), insiste particulièrement sur la question du rapport. Elle tient beaucoup à écarter cette idée, produite par le notaire liquidateur, que, la succession du mari étant insolvable, aucune imputation de la dot sur cette succession n'était possible. Elle fait remarquer d'abord que le mari, codébiteur des dots, en prenant dans la communauté une somme de 233.000 fr., et en l'employant au paiement des dots promises à ses enfants, n'a fait que payer sa dette; que la somme versée à ses deux enfants est entrée dans leur patrimoine à titre de dot, et se trouve par là même rapportable à sa succession ». Puis la Cour de Caen distingue entre l'insolvabilité de cette succession quant aux créanciers et sa solvabilité partielle à l'égard des enfants, résultant de l'obligation du rapport: L'insolvabilité de la succession de M. d'Arjuzon n'est donc que relative; sans doute, vis-à-vis des créanciers de d'Arjuzon, qui n'ont aucun droit sur les sommes rapportables, sa succession est en déficit, puisque son passif excède son actif; mais, vis-à-vis de ses enfants, il en est différemment, puisque ceux-ci bénéficient de son chef d'une somme de 283.000 fr.; cette somme forme si bien, au regard de ses héritiers, un actif, que les enfants non dotés auraient pu, s'ils l'avaient voulu, en exiger le rapport et en réclamer le partage avec les enfants dotés». Peutêtre eût-il été préférable de ne point parler de la solvabilité de la succession à l'égard des enfants, car leur droit n'est pas un droit de créance, mais un droit d'hérédité, mais ce qui est dit du rapport est très juste et essentiel. Par l'effet de la condition accomplie, le parent prémourant est devenu seul donateur, seul constituant des dots en principe, lesquelles sont, par suite, rapportables à sa succession. Seulement, si, par suite de la consistance de la succession et par l'effet de ce rapport, les enfants dotés ne conservent pas la totalité de leurs dots, ils ont pour le surplus un recours contre le parent survivant, à la succession duquel ce surplus devra plus tard être rapporté. Dans l'hypothèse actuelle, le rapport n'avait pas été demandé ni effectué, et les deux enfants dotés avaient conservé, par la volonté commune des parties, leurs dots intactes. Il n'en était pas moins vrai que, par l'effet du paiement partiel fait de son vivant par le père prédécédé, ils tenaient de lui et non de leur mère ces dots jusqu'à concurrence de 233.000 fr.

22.

Il n'est pas sans intérêt d'examiner la valeur et la portée de la clause complémentaire, que la Cour de cassation a justement refusé d'introduire dans cette affaire, mais dont les documents de la

existé entre elle et son défunt mari d'une somme que cette société avait fournie pour le paiement des dots constituées par les époux à deux de leurs enfants communs,

conjointement et solidairement, en avancement d'hoirie, par imputation d'abord sur la succession du prémourant, et subsidiairement, s'il y avait lieu, sur celle du survivant », sous prétexte que ladite exposante devrait être considérée comme ayant seule et personnellement constitué les dots, à raison, d'une part, de l'état déficitaire de la succession de son mari, qui ne permettrait pas l'imputation du

cause moutrent la fréquence et l'importance dans la pratique. Elle consiste, on l'a vu, après avoir stipulé l'imputation principale de la dot sur la succession du prémourant et l'imputation subsidiaire sur la succession du survivant, à ajouter que « jamais l'enfant doté ne sera tenu à un rapport effectif à la succession du prémourant

Il est clair qu'il ne s'agit pas là simplement de la différence entre le rapport qui se fait en nature et celui qui se fait en moins prenant; ce sont là simplement des modalités d'un rapport certainement dû et qui doit être effectué; lorsque la clause s'applique, il s'agit, au contraire, de savoir si le rapport sera dû ou non, et elle paraît bien avoir pour but de l'exclure. Pour répondre à l'intention des parties, elle doit opérer dans le cas où l'enfant doté devrait rapporter à la succession du prémourant, telle qu'elle se comporte à l'ouverture, une somme qui dépasserait sa part héréditaire dans cette succession. Sans elle, il serait alors obligé de rendre et faire rentrer dans cette succession tout ou partie des biens qu'il a reçus en dot. C'est ce résultat, qui est un trouble et une désorganisation de son avoir, que la clause a pour but d'empêcher. Mais elle ne paraît pas être d'un effet certain, telle qu'elle est rédigée. Ce qu'on entend là par le rapport effectif, c'est bien le résultat indiqué plus haut, les biens constitués en dot sortant du patrimoine de l'enfant doté par l'effet du rapport. Mais la loi ne classe point dans ses catégories le rapport effectif, considéré comme une espèce particulière de rapport, distinct de celui qui s'effectuerait par une simple imputation sur la part héréditaire. Sans doute, elle connaît le rapport en moins prenant, et la volonté des donateurs peut donner à celui-ci une large extension. Mais il y a une limite infranchissable. Pour qu'il y ait rapport en moins prenant, il faut qu'il y ait à prendre dans la succession; il faut que la part héréditaire du rapportant soit au moins égale à la valeur qui doit être rapportée. S'il en est autrement, le rapport effectif aura nécessairement lieu, au moins pour partie. Et la clause qui dit que le donataire ne sera jamais tenu au rapport effectif est inopérante, parce qu'elle ne décharge pas le donataire du rapport en lui-même, et que celui qui est tenu au rapport peut toujours, et éventuellement, être obligé au rapport effectif.

Pour obtenir le résultat voulu, il faut donc que, cette obligation extrême se présentant, l'enfant doté ne soit pas tenu du tout du rapport à la succession du prémourant. Nous entrevoyons deux manières d'arriver à ce but : ce sont deux rédactions de la clause, différentes de celle qui est signalée dans nos arrêts.

1° Après avoir stipulé l'imputation principale sur la succession du prémourant et l'imputation subsidiaire sur la succession du survivant, on ajouterait: Cependant, si la somme que l'enfant doté

«

montant des dots sur les parts héréditaires des enfants dotés, et, d'autre part, d'une prétendue intention des constituants de sous-entendre, dans les constitutions de dot, la clause que le donataire ne serait jamais tenu à un rapport effectif à la succession du prémourant, alors que la clause d'imputation principale et subsidiaire, qui existe seule dans les contrats de mariage litigieux, ne comporte aucune des conséquences admises par l'arrêt entrepris, qui le reconnait d'ailleurs lui-même, et qu'en outre, stipulée dans l'intérêt du survivant des époux, pour lui assurer l'intégralité

devrait rapporter à la succession du prémourant était supérieure à sa part héréditaire dans cette succession, la dot serait alors considérée comme ayant été constituée pour le tout par l'époux survivant et rapportable à sa succession ». C'est là simplement la solution que voulaient donner à l'affaire présente le notaire liquidateur, le tribunal de Dreux et la Cour de Paris. Mais, d'après la formule ici proposée, elle prendrait, croyons-nous, une forme juridique précise et solide. Ce serait une condition nouvelle et licite qui serait apposée à la donation. Dans le cas où cette complication, résultant de la faiblesse de la succession du prémourant, se présenterait, la volonté des parties écarterait les difficultés et le trouble qui en résulteraient, en décidant, de parti pris, qu'alors la dot aurait été rétroactivement constituée par l'époux survivant seul. L'enfant doté ne devrait aucun rapport à la succession du parent prémourant, par la raison simple et péremptoire qu'il n'est pas son donataire, qu'il tient sa dot, non de lui, mais du conjoint survivant. Il serait possible de rendre cette solution seulement partielle, de l'introduire simplement pour l'écart qui existerait entre la dot constituée et la part héréditaire de l'enfant doté dans la succession du prémourant; mais elle perdrait alors l'avantage de sa grande simplicité.

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2o Dans la seconde combinaison, après avoir stipulé l'imputation principale sur la succession du prémourant et l'imputation subsidiaire sur la succession du survivant, on ajouterait: Mais, dans le cas où la somme que l'enfant doté devrait rapporter à la succession du prémourant serait supérieure à sa part héréditaire dans cette succession, le prémourant lui accorde dès maintenant et expressément la dispense de rapport ». Ce serait une extension de la clause actuellement en usage, telle qu'elle est reproduite ci-dessus. Cette dernière porte que le donataire ne sera jamais tenu au rapport effectif à la succession du prémourant Mais, nous l'avons vu, la dispense du rapport effectif est inefficace. La clause que nous imaginons porte donc que, dans le cas prévu, l'enfant doté ne sera pas tenu du rapport, qu'il en reçoit dès maintenant la dispense. Cette stipulation, qui vaudra dans la mesure de la quotité disponible, maintiendra néanmoins jusqu'à due concurrence la dot à la charge de la succession du prémourant, libérant d'autant le survivant. C'est une dispense de rapport conditionnelle, mais aucun principe ni aucun texte ne la rendent impossible. Celui qui l'accorde l'attache à une condition qui ne se réalisera qu'à son décès; mais, là encore, il n'y a aucune impossibilité; à l'heure de la mort du disposant s'ouvrira sa succession, et tous les éléments existeront dont dépendra l'accomplissement ou l'inaccomplissement de la condition.

A. ESMEIN.

de sa fortune, elle ne saurait être retournée contre celui-ci, de telle manière qu'il se voie imposer des obligations autres que celles qui résultent pour lui des constitutions de dots, notamment de garantir éventuellement les enfants dotés de toute diminution dans le montant de leur dot. 20 Moyen...

ARRET (apr. délib. en ch. du cons.). LA COUR;- Sur le deuxième moyen:... (sans intérêt);

:

Mais sur le premier moyen Vu l'art. 1134, C. civ.; Attendu qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que les époux d'Arjuzon, mariés sous le régime dotal avec société d'acquêts, ont constitué des dots en argent à deux de leurs enfants, la dame de Voize et Louis d'Arjuzon; qu'aux termes des contrats de mariage, cette constitution était faite par les donateurs « conjointement et solidairement, en avancement d'hoirie, par imputation d'abord sur la succession du premier mourant, subsidiairement, s'il y avait lieu, sur celle du survivant, et que les dots ont été payées au moyen de fonds fournis tant par la société d'acquêts que par la dame d'Arjuzon, qui avait affecté à cet usage des biens à elle propres; Attendu que la clause cidessus reproduite ne présentait aucune ambiguité; qu'elle avait pour conséquence légale de faire réputer celui des deux époux, qui décéderait le premier, seul constituant, et d'obliger les donataires à rapporter à sa succession l'intégralité des dots, sous la réserve, toutefois, que, si leur part héréditaire dans ladite succession était inférieure au montant du rapport, l'époux survivant leur tiendrait compte de la différence, en raison de son engagement solidaire et de l'obligation de garantie qui en résultait, sauf à faire rapporter à sa propre succession les sommes par lui déboursées de ce chef; Attendu, néanmoins, que, d'Arjuzon père étant décédé le premier, et des contestations ayant été soulevées, au sujet de la liquidation de sa succession, par les consorts Foubert, créanciers de la société d'acquêts, intervenant au partage, l'arrêt attaqué a déclaré que la veuve d'Arjuzon devait être considérée comme ayant seule constitué les dots, et serait tenue de faire récompense à la société d'acquêts du montant des sommes puisées dans la communauté pour le paiement desdites dots, par le motif que la dame de Voize et Louis

(1) Solution rentrant dans la jurisprudence d'après laquelle il ne suffit pas, pour justifier l'application de l'art. 3, C. instr. crim., qu'une plainte ait été déposée; il faut que l'action publique ait été régulièrement mise en mouvement. V. Cass. 9 nov. 1910 (S. et P. 1911.1.111; Pand. pér., 1911. 1.111), et les renvois. Adde, notre C. instr. crim. annoté, par G. Le Poittevin, sur l'art. 3, n. 119, p. 69.

(2-3) L'époux, qui, sur la demande en divorce intentée contre lui par son conjoint, a formé une demande reconventionnelle en séparation de corps, peut-il invoquer la disposition de l'art. 248, § 4, C. civ., d'après laquelle les demandes reconventionnelles (en divorce) peuvent se produire en appel, sans être considérées comme demandes nouvelles », pour transformer, en appel, sa demande reconventionnelle de séparation de corps en demande en

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d'Arjuzon ne retireraient aucun émolument de la succession paternelle, qui présentait un déficit; Attendu que, pour justifier cette solution, les juges du fond alleguent que les parties, en adoptant la clause d'imputation principale et subsidiaire, auraient entendu en régler les effets conformément à une stipulation entrée dans la pratique notariale, et suivant laquelle l'enfant doté ne serait jamais tenu à un rapport effectif à la succession du prémourant »; Mais attendu que, sans rechercher quelle pourrait être la portée d'une semblable stipulation, il suffit de constater que l'arrêt ne relève aucune circonstance de nature à établir que les contractants s'y seraient implicitement soumis; D'où il suit qu'en statuant comme

il l'a fait, et en ordonnant une rectification de l'état liquidatif dans le sens des prétentions des créanciers de la société d'acquêts, ledit arrêt a méconnu les effets légaux des contrats passés par les parties, et a violé le texte de loi ci-dessus visé; Casse, etc.

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Du 28 nov, 1910. Ch. civ. MM. Ballot-Beaupré, le prés.; Rau, rapp.; Mérillon, av. gén. (concl. conf.); Labbé et Boivin-Champeaux, av.

CASS.-Civ. 29 juillet 1912.

ACTION CIVILE (RÉSULTANT D'UN DÉlit), RÈ-
GLE: LE CRIMINEL TIENT LE CIVIL EN

ÉTAT, SURSIS, PLAINTE, CONSEIL DE
PRUD'HOMMES (Rép., v Action civile, n. 591;
Pand. Rép., vo Acquittement, n. 114 et s.).

Un conseil de prud'hommes, saisi d'une demande en dommages-intérêts pour brusque congé, formée contre son patron par un employé qui a été renvoyé sans observation du délai de prévenance, refuse à bon droit de surseoir à statuer, à raison d'une plainte en complicité de vol déposée par le patron contre l'employé, alors qu'aucune poursuite criminelle n'a été intentée contre celui-ci (1) (C. instr. crim., 3).

(Soc. des Galeries parisiennes C. Dame Fourche). ARRÈT.

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LA COUR; - Sur le moyen tiré de la nullité de la procédure... (sans intérêt); Sur le moyen tiré de la violation du principe d'après lequel le criminel tient le civil en état : Attendu que la décision

divorce? Des arrêts de Cours d'appel se sont prononcés dans le sens de l'affirmative. V. Amiens, 14 avril 1897 (S. et P. 1898.2.65); Bordeaux, 11 févr. 1907 (S. et P. 1908.2.76; Pand. pér., 1908. 2.76). Dans la présente affaire, la Cour de cassation a eu à statuer sur une difficulté très voisine; il s'agissait de savoir si l'art. 239, 3, C. civ., qui permet d'introduire des demandes reconventionnelles en divorce par un simple acte de conclusions, autorise l'époux qui, à la demande en divorce, a opposé d'abord une demande reconventionnelle en séparation de corps (V. sur la recevabilité de cette demande reconventionnelle, Paris, 27 juin 1888, sol. implic., S. 1891.2.62. P. 1891.1.488, et les renvois), à transformer cette demande, au cours de l'instance devant le tribunal, en demande reconventionnelle de divorce.

attaquée constate que la Société des Galeries parisiennes a porté plainte en complicité de vol contre la dame Fourche, mais qu'aucune poursuite criminelle n'a été intentée contre ladite dame; qu'en décidant, dans ces circonstances, qu'il n'y avait pas lieu de surseoir et de faire application de l'art. 3, § 2, C. instr. crim., le conseil des prud'hommes de La Rochelle a justifié légalement sa décision; Au fond: Attendu que, des constatations de la sentence attaquée, il résulte que la Société des Galeries parisiennes à renvoyé la dame Fourche, son employée, sans observer les délais de congé consacrés par l'usage de La Rochelle; qu'en se fondant sur cette inobservation des délais de congé, pour condamner la Société des Galeries parisiennes à des dommages-intérêts, le conseil des prud'hommes de La Ro chelle n'a violé aucune loi; Rejette le pourvoi formé contre le jugement rendu par le conseil des prud'hommes de La Rochelle le 10 juin 1912, etc.

Du 29 juill. 1912. Ch. civ. MM. Baudouin, le prés.; Douarche, rapp.; Lombard, av. gén. (concl. conf.).

CASS.-CIV. 6 août 1912. DIVORCE, DEMANDE RECONVENTIONNELLE, SEPARATION DE CORPS, TRANSFORMATION EN COURS D'INSTANCE, DEMANDE en divorce, ENQUÈTE, PENSION ALIMENTAIRE, CASSATION, MOYEN NOUVEAU, MOYEN DE FAIT ET DE DROIT, POUVOIR DU JUGE, APPRÉCIATION SOUVERAINE (Rép., vo Divorce et séparation de corps, n. 2651 et s., 3800 et s.; Pand. Rép., v Divorce, n. 1380 et s., 2099, 2106 et s., 2702 et s.).

De l'art. 248, C. civ., d'après lequel, en matière de divorce, les demandes reconventionnelles peuvent se produire en appel, sans être considérées comme demandes nouvelles, il résulte qu'en cette matière, la demande reconventionnelle, quel qu'en soit l'objet, n'est qu'une simple défense à la demande principale, et qu'elle peut se produire en tout état de cause (2) (C. civ., 239, 248).

En conséquence, l'époux défendeur, qui, au début de l'instance en divorce, n'a conclu reconventionnellement qu'à la séparation de corps, peut, au vù des enquêtes, transformer sa demande, et conclure au divorce (3) (Id.).

La question, dans l'une et l'autre hypothèses, revient à rechercher si la faculté, ouverte par la loi au défendeur à l'action en divorce, de former une demande reconventionnelle en divorce en tout état de cause, en première instance et en appel, lui permet de transformer une demande reconventionnelle en séparation de corps en demande reconventionnelle en divorce, en d'autres termes, quelle est, de la règle que les demandes reconventionnelles en divorce sont recevables en tout état de cause (C. civ., 239, § 8, et 248, 4), ou de celle qui interdit la transformation, en cours d'instance, des demandes de séparation de corps en demandes en divorce (V. Cass. 22 févr. 1888, S. 1888.1,374. — P. 1888,1.917; Pand. pér., 1888.1.253, et les renvois. Adde, les renvois de la note sous Amiens, 14 avril 1897, précité), celle qui doit, en la circonstance,

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