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vicomtesse de la Mure, et sa petite-fille, Me de Gabriac, mineure, qui était nue propriétaire dudit domaine. La liquidation de la succession a donné lieu à des contestations portant sur des indemnités qui pouvaient être dues aux héritiers, à raison de réparations et constructions nouvelles faites dans le domaine, et de la reconstitution d'une vigne détruite par le phylloxéra, ou qui pouvaient être dues à la nue propriétaire, à raison de l'exploitation de sapinières et de l'abatage des peupliers épars.

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Un jugement du tribunal de Chinon, du 25 juill. 1901, qui avait statué sur ces difficultés, a été frappé d'appel par M. et Me de la Mure. Par arrêt du 27 déc. 1902, la Cour d'Orléans a statué ainsi qu'il suit: La Cour; Attendu que de Gabriac (ès qualités de tuteur) reprochait au notaire liquidateur d'avoir porté à l'actif de la succession du marquis de Fayolle : 1° une somme de 23.989 fr. 66, montant de réparations et reconstructions faites de 1891 à 1897 par de Fayolle, usufruitier de la terre de Chateaufort, aux différents domaines composant ladite terre, somme dont, d'après l'état liquidatif, la demoiselle de Gabriac se trouverait débitrice envers la succession de Fayolle, en sa qualité de nue propriétaire; 20 une somme de 8.235 fr. pour aménagement d'un salonbillard, effectué par de Fayolle dans le château dont il avait l'usufruit, somme dont, suivant l'état liquidatif, la demoiselle de Gabriac serait débitrice en qualité de nue propriétaire; - Attendu que les premiers juges ont accueilli sur ces deux chefs les critiques de de Gabriac; qu'ils ont décidé qu'aux termes de la jurisprudence, les constructions neuves et reconstructions dont il s'agit, faites par l'usufruitier, constituaient des améliorations, à raison desquelles, d'après l'art. 599, C. civ., celui-ci ne peut, à la cessation de l'usufruit, réclamer aucune indemnité; Adoptant à cet égard les motifs des premiers juges;

Mais attendu qu'à tort le jugement a refusé d'homologuer l'état liquidatif, en ce qu'il débitait la demoiselle de Gabriac, envers la succession de Fayolle, d'une somme de 11.130 fr., pour reconstitution de 7 hectares de vignes, opérée par de Fayolle sur la terre de Chateaufort; que, s'agissant d'un vignoble ravagé par le phylloxéra, l'usufruitier n'était pas tenu de le reconstituer (C. civ., 607); que, s'il l'a fait, c'est en qualité de negotiorum gestor de sa fille, et qu'il a droit, en vertu de l'art. 1375, au remboursement de toutes les dépenses qu'il a utilement faites; que l'utilité de ces dépenses ne saurait être méconnue, la vigne reconstituée ayant produit en 1839 des vins vendus 6.800 fr.; qu'en vain soutiendrait-on qu'aux termes de l'art. 599, l'usufruitier ne peut, à la cessation de l'usufruit, réclamer aucune

Mais l'opinion qui applique à l'usufruit de bois de pins ou de sapins les règles des art. 590 à 592, C. civ., est loin d'être unanimement admise. Certains auteurs estiment, en effet, qu'on ne peut assimiler, ni à des taillis, ni à des futaies, les bois de pins ou de sapins que le propriétaire se pro

indemnité pour les améliorations qu'il prétendrait avoir faites; qu'autre chose est d'améliorer ce qui existe, autre chose de reconstituer ce qui n'existe plus; que le rétablissement. en son état primitif d'une vigne ruinée par le phylloxera est assimilable à une grosse réparation, indispensable à la conservation de la valeur de l'immeuble, ainsi que l'a reconnu la Cour de cassation dans un arrêt du 23 nov. 1893 (S. et P. 1899.1.93; Pand. per., 1899.1. 104); que, suivant l'art. 605, les grosses réparations demeurent à la charge du propriétaire; que la demoiselle de Gabriac doit donc supporter les frais de la reconstitution de la vigne dont il s'agit, soit 11.130 fr., montant de la plus-value, sans aucune déduction, de Fayolle, âgé de soixante-dix-sept ans en 1891, au commencement des plantations, n'ayant, jusqu'à son décès, survenu en 1899, tiré personnellement aucun profit appréciable d'un travail qu'il avait entrepris avec l'assentiment de sa fille et dans l'intérêt de cette dernière;...

At

Attendu que les époux de la Mure, de leur côté, critiquent le travail du notaire, en ce qu'il a porté au passif de la succession les sommes suivantes, qui, d'après lui, seraient dues par l'usufruitier à la nue propriétaire, à titre de dédommagement, à raison d'arbres abattus sur le domaine de Chateaufort: 7.720 fr., pour chénes, 748 fr., pour frênes et ormes, 7.627 fr., pour peupliers, 421 fr., pour sapins vendus sur pied, 23.824 fr., pour sapins dont il a été fait des cordes; au total: 40.340 fr.; tendu que cette critique n'est pas fondée en ce qui concerne la valeur des chênes, 7.720 fr., et celle des frênes et ormes, 748 fr., qui sont arbres de haute futaie; que la Cour adopte les motifs du jugement à cet égard; mais qu'il en est autrement en ce qui touche les peupliers et les sapins; — 1o Peupliers : - Attendu qu'en règle générale, c'est la jouissance antérieure de l'ancien propriétaire qui doit servir d'exemple et de prototype à la jouissance de l'usufruitier;" Attendu que les arbres sont des fruits, et, comme tels, appartiennent à l'usufruitier, à la condition que le précédent propriétaire en ait joui à titre de fruits; que l'aménagement proprement dit ne se conçoit pas pour des arbres épars, et notamment pour des peupliers, qui doivent être abattus suivant leur état et leur âge; qu'en l'espace de dix-sept ans, de Fayolle a, en plusieurs fois, fait abattre des peupliers d'une valeur totale de 7.627 fr.; qu'il n'a fait en cela que suivre l'exemple de M. de Falloux, l'ancien propriétaire, qui, en dix ans, de 1854 à 1864, avait réalisé, au moyen de quatre coupes de peupliers, une somme de 11.405 fr., et s'était ainsi fait un revenu régulier de l'exploitation de ces arbres; que de Fayolle n'a donc pas excédé son droit en agissant

pose de réaliser à un âge peu avancé, dès que les arbres sont utilisables, pour réensemencer ensuite. V. Laurent, Princ. de dr. civ., t. 6, n. 436; Guyot, op. cit., t. 2, n. 1715; et notre Rép. gén, du dr. fr., vo Usufruit, n. 389; Pand. Rep., eod. verb., n. 714. Toutefois, dans cette opinion, on ne dénie pas à

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comme l'ancien propriétaire, avec plus de mesure encore et de ménagements que celui-ci; - 2o Sapins — Attendu que les sapinières ne se reproduisent pas; qu'on les abat en entier tous les trente ans, puis qu'on les réensemence pour les abattre de nouveau après un certain temps; qu'il ne peut être question de haute futaie dans un bois de cette espèce; qu'il est dans l'usage des propriétaires de couper tous les ans une certaine quantité de sapins, sauf à les réensemencer ou à les remplacer par de jeunes plants; que leur abatage, dans ces conditions, constitue le revenu régulier du fonds, et que l'usufruitier a droit à la perception de ce revenu; qu'en exploitant la sapinière de Chateaufort par petites coupes annuelles, de Fayolle n'a donc pas commis d'abus de jouissance; qu'il échet de remarquer, d'ailleurs, que de Gabriac lui-même, aujourd'hui administrateur des biens de sa fille mineure, n'agit pas autrement que son prédécesseur, et porte dans son compte de tutelle, pour l'année 1899, à la colonne des revenus, le produit de la vente des bois divers, sapins et autres, pour une somme de 1.933 fr.; que la succession de Fayolle ne doit donc pas d'indemnité à raison de la coupe des peupliers et des sapins; que cette solution s'impose d'autant plus que l'argent provenant de ces coupes a été employé par l'usufruitier en constructions qui ont augmenté la valeur du fonds appartenant aujourd'hui en toute propriété à Me de Gabriac; qu'il y a lien de décider, en conséquence, que la somme de 7.627 fr. (peupliers) et celle de 23.824 fr., plus 421 fr. (sapins), d'autre part, au total, 31.872 fr., portées à tort par le notaire liquidateur au passif de la succession, en doivent être retirées...; ces motifs, etc. ».

Par

POURVOI en cassation par Mlle de Gabriac. 1er Moyen. Violation des art. 599, 605, 606, 607, 1134, 1341, 1375, C. civ., et 7 de la loi du 20 avril 1810, en ce que l'arrêt attaqué a condamné un nu propriétaire à rembourser à la succession de l'usufruitier la dépense de reconstitution de vignes, sous le prétexte que l'usufruitier aurait agi comme negotiorum gestor, que la reconstitution d'un vignoble serait assimilable à une grosse réparation, et qu'elle aurait eu lieu avec l'assentiment du nu propriétaire et dans son intérêt, alors, d'une part, que l'usufruitier n'a droit à aucune indemnité pour les améliorations faites par lui, encore que la valeur de l'immeuble en soit augmentée, alors, d'autre part, que la reconstitution d'un vignoble détruit par le phylloxera ne peut être comprise dans les grosses réparations mises par la loi à la charge du nu propriétaire, alors, enfin, que le propriétaire ne devient comptable de la plus-value résultant des plantations de l'usufruitier,

l'usufruitier le droit d'exploiter ces sortes de bois; mais son exploitation ne sera pas soumise aux règles précises édictées par les art. 590 à 592, C. civ. V. Laurent et Guyot, op. et loc. cit.; et notre Rép. gén. du dr. fr., verb. cit., n. 392 et s.; Pand. Rép., verb. cit., n. 715 et s.

ni par le fait qu'il ne s'y serait point opposé, ni par le fait que l'usufruitier aurait envisagé l'intérêt du fonds plutôt que le sien propre, les règles posées par la loi ne pouvant être mises en échec qu'au moyen d'une convention, inexistante au cas actuel, et démentie par l'arrêt luimême, lequel invoque les principes de la gestion d'affaires.

2o Moyen. Violation des art. 591, 592, C. civ., et 7 de la loi du 20 avril 1810, en ce que l'arrêt attaqué a déchargé la succession d'un usufruitier de toute indemnité envers le nu propriétaire, en raison des coupes de peupliers faites durant sa jouissance, sous le seul prétexte qu'un précédent propriétaire aurait coupé en diverses fois un certain nombre de ces arbres épars, alors qu'en l'absence d'un aménagement régulier, dont l'arrêt luimême constate l'inexistence, l'usufruitier n'a aucun droit sur les arbres de haute futaie.

3e Moyen. Violation des art. 590, 591, 592, C. civ., et 7 de la loi du 20 avril 1810, en ce que l'arrêt attaqué a dispensé la succession d'un usufruitier de rendre compte au nu propriétaire de la valeur des sapins abattus pendant sa jouissance, sans constater, ni que les sapinières eussent été mises en coupes réglées par les anciens propriétaires du domaine, ni que ledit usufruitier eût pourvu au remplacement des arbres abattus, alors, d'une part, que les sapins, constituant dans l'espèce des arbres de haute futaie, ne pouvaient être exploités par l'usufruitier qu'en vertu d'un aménagement régulier établi par les anciens propriétaires, alors, d'autre part, que, même dans l'hypothèse inexacte où un bois de sapins pourrait être assimilé à une pépinière, l'usufruitier devrait remplacer par de jeunes plants les arbres enlevés, ce qui n'est pas constaté par l'arrêt.

ARRÊT (ap. délib. en ch. du cons.).

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(1 à 6) Devant les conseils de prud'hommes, les enquêtes se font dans la même forme qu'en justice de paix; l'art. 43 de la loi du 27 mars 1907 (S. et P. Lois annotées de 1907, p. 490; Pand. pér., 1907.3.213) déclare, en effet, applicables à la juridiction des prud'hommes, en tout ce qu'ils n'ont pas de contraire à la présente loi, les art. 84, 35, 36, 37, 38, 39 et 40, C. proc., qui sont, dans le tit. 7, liv. 1er, C. proc., consacrés aux enquêtes en justice de paix.

Or, le serment de témoins, exigé par l'art. 35, C. proc., pour les enquêtes devant les juges de paix, est une formalité substantielle. V. Cass. 26 juin 1882 (S. 1883.1.214. - P. 1888.1.517).

l'art. 606 du même Code, et qu'en conséquence, la succession de de Fayolle était fondée à réclamer, pour la reconstitution du vignoble, la somme de 11.130 fr., montant de la plus-value lors de la cessation de l'usufruit;

Sur le troisième moyen : Attendu que l'usufruit de de Fayolle portait notamment sur une sapinière plantée dans le domaine de Chateaufort; Attendu qu'aucune énonciation de l'arrêt attaqué n'indique qu'il ait entendu assimiler, en droit, cette sapinière à une pépinière; Attendu, d'autre part, que l'arrêt déclare que les sapins qui la composaient ne pouvaient pas, à raison du jeune âge auquel ils étaient abattus, constituer des arbres de haute futaie; qu'il constate que, d'après l'usage des propriétaires, les bois de sapins sont, dans le pays, exploités par petites coupes annuelles, que l'aménagement est tel que les sapins abattus sont âgés de trente ans, et qu'après la coupe, les terrains sont réensemencés; qu'il ajoute que l'abatage de ces arbres, fait dans ces conditions, constitue le revenu régulier du fonds, et que l'usufruitier a droit à la perception de ce revenu; - Attendu que

la Cour d'appel d'Orléans déclare que de Fayolle a, conformément à cet usage, exploité la sapinière de Chateaufort par petites coupes annuelles, et que, dès lors, il n'a pas commis d'abus de jouissance qu'en statuant ainsi, l'arrêt attaqué, qui est motivé, n'a violé aucun des articles de loi visés au moyen; Rejette les premier et troisième moyens;

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Vu

Mais sur le deuxième moyen : les art. 591 et 592, C. civ.; Attendu que, des dispositions de ces articles, il résulte que l'usufruitier n'a droit aux arbres de haute futaie plantés sur le terrain soumis à son usufruit, fussent-ils épars, que lorsque ces arbres ont été mis en coupe réglée, et que l'époque de l'une de ces coupes est arrivée; qu'alors seulement ils constituent des fruits; Attendu que l'arrêt attaqué ne conteste pas que les peupliers épars sur la terre de Chateaufort fussent des arbres de haute futaie; qu'il constate que ces peupliers n'étaient pas soumis à un aménagement proprement dit, qu'ils étaient abattus suivant leur état et leur age; Attendu, dès lors, qu'ils ne pouvaient constituer des fruits appartenant à l'usufruitier; D'où il suit qu'en décidant le contraire, par le motif que de Fayolle, en faisant abattre en plusieurs fois, dans l'espace de dix-sept ans, des

Adde, Pabon, Tr. des just. de paix, t. 1o, n. 500; Leduc, Tr. de la just. de paix, p. 97; Henri Chevalier, Guide formul. des juges de paix, 3o éd., t. 2, n. 662; notre C. proc. annoté, par Tissier, Darras et Louiche-Desfontaines, sur l'art. 35, n. 7; et notre Rép. gén. du dr. fr., vo Juge de paix, n. 1645 et s.; Pand. Rép., v° Enquêtes, n. 1086 et s. Et, toute formalité dont l'accomplissement n'est pas constaté étant réputée avoir été omise, il y a nullité de l'enquête, alors que, soit le procès-verbal de l'enquête, rédigé dans les causes sujettes à appel (C. proc., 39), soit le jugement, dans le cas où la loi n'exige pas qu'un procès-verbal soit dressé, c'est-à-dire dans les causes de nature à

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1o JUGE DE PAIX, ENQUÊTE, JUGEMENT, SERMENT DES TÉMOINS, NOMS DES TÉMOINS, ENONCIATION, NULLITÉ, CASSATION, OFFICE DU JUGE (Rép., vo Juge de paix, n. 1645 et s.; Pand. Rép., v Enquêtes, n. 1034 et s.). 20 PRUD'HOMMES, ENQUÊTE, JUGEMENT, SERMENT DES TÉMOINS, NOMS DES TÉMOINS, CONSTATATION (DÉFAUT DE), NULLITÉ (Rép., vo Prud'hommes, n. 181 et 187; Pand. Rép., vo Conseils de prud'hommes, n. 667 et S., 670).

1o Devant le juge de paix, lorsqu'il est procédé à une enquête, dans les causes, de nature à être jugées en dernier ressort, s'il n'est pas dressé procès-verbal, le jugement doit, à peine de nullité, énoncer les nom, age, profession et demeure des témoins (1) (C. proc., 40). Ire espèce.

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Ainsi que leur serment (2) (Id.). 1re et 2e espèces.

Le moyen tiré de l'inobservation de cette formalité substantielle de la prestation de serment peut être soulevé d'office devant la Cour de cassation (3). Ire espèce (sol. implic.).

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20 Il en est de même, en matière prud'homale, dans les causes de nature à être jugées en dernier ressort (4) (C. proc., 40; L. 27 mars 1907, art. 43). 2o espèces.

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Ire et

Spécialement, doit être cassé le jugement qui, fondé tant sur les résultats de la comparution des parties à l'audience que sur la déclaration d'un témoin qu'il désigne, ne constate pas que ce témoin ait préalablement prêté serment (5) (Id.). Ire es

pèce.

De même, doit être cassé le jugement fondé uniquement sur la déposition de témoins qu'il ne désigne pas, et dont il ne constate pas la prestation de serment (6) (Id.). 2o espèce.

être jugées en dernier ressort (C. proc., 40), ne mentionnent pas expressément la prestation de serment par les témoins. V. Cass. 26 juin 1882, précité; Pabon, op. et loc. cit.; Leduc, op. et loc. cit.; et notre C. proc. annoté, loc. cit. V. égal. dans le même sens, dans le cas où le tribunal civil, statuant comme juge d'appel en matière prud'homale, fonde sa décision sur le témoignage des témoins entendus à son audience, sans qu'il soit constaté par le jugement que ces témoins avaient préalablement prêté serment, Cass. 7 août 1907 (S. et P. 1908.1.215; Pand. pér., 1908.1.216). — V. au surplus, sur le caractère irritant de cette formalité dans toutes les enquêtes en matière

(Ire Espèce. (Vve Breau C. Tron).

LA COUR;

ARRÊT.

Sur le moyen soulevé d'office: Vu l'art. 40, C. proc.; Attendu qu'aux termes de l'art. 40, C. proc., rendu applicable à la juridiction des prud' hommes par l'art. 43 de la loi du 27 mars 1907, s'il est procédé à une enquête dans une cause de nature à être jugée en dernier ressort, il n'est pas dressé de procèsverbal, mais les témoins ne peuvent être admis à déposer qu'après avoir prêté serment; que l'accomplissement de cette formalité substantielle doit, à peine de nullité, être expressément constaté dans le jugement; Attendu que, dans l'espèce, le jugement attaqué a fondé sa décision tant sur les résultats de la comparution des parties à l'audience que sur la déclaration d'un témoin, la dame Desplace, caissière», mais qu'il ne constate pas que ce témoin avait préalablement prêté serment; en quoi ledit jugement a violé les dispositions de l'article susvisé; Sans qu'il soit besoin de statuer sur les moyens du pourvoi; Casse le jugement rendu le 25 juin 1911 par le tribunal civil de Lyon, etc.

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LA COUR; Statuant sur le pourvoi de Policard contre un jugement du conseil des prud'hommes de Bourges, en date du 22 mai 1912; - Vu l'art. 40, C. proc.; Attendu qu'aux termes de l'art. 40, C. proc., rendu applicable à la juridiction des prud' hommes par l'art. 43 de la loi du 27 mars 1907, dans les causes de nature à être jugées en dernier ressort, le jugement doit énoncer les noms, âge, profession et demeure des témoins, ainsi que leur serment; que l'accomplissement de cette

sommaire, aussi bien qu'en matière ordinaire, Cass. 16 janv. 1912 (S. et P. 1912.1.136; Pand. pér., 1912.1.136), et les renvois.

1881.1.52.

Il convient de remarquer que l'arrêt rendu dans la 1 espèce ci-dessus relève d'office le moyen tiré du défaut de constatation de la prestation deserment. Un précédent arrêt du 8 nov. 1880 (S. P. 1881.1.119) paraît bien avoir décidé que le moyen tiré du défaut de prestation de serment des témoins n'intéresse pas l'orre public, et ne peut être présenté pour la première fois devant la Cour de cassation. V. la note sous cet arrêt. Adde, Leduc, op. et loc. cit.

La sanction de la nullité s'applique-t-elle également au défaut d'énonciation, dans les jugements rendus par le juge de paix ou le conseil des prud'hommes, des noms des témoins entendus dans l'enquête, énonciation qui est prescrite par l'art. 40, C. proc.? La négative est admise en doctrine. V. Garsonnet, Tr. de proc., 2o éd., par Cézar-Bru, t. 3, p. 315,2 994; Pabon, op. cit., t. 1er, n. 500. Elle a été admise également par des arrêts, pour l'application de l'art. 410, C. proc., qui, pour les enquêtes en matière sommaire, contient une disposition analogue à celui de l'art. 40 du même Code. V. Cass. 15 févr.

formalité substantielle doit, à peine de nullité, être expressément constaté dans le jugement; Attendu que le jugement attaqué a fondé sa décision uniquement sur la déposition de témoins qu'il ne désigne pas, et dont il ne constate pas la prestation de serment; qu'il a ainsi violé l'article susvisé; - Casse, etc.

Du 6 août 1912. Ch. civ. - MM. Baudouin, ler prés. ; Reynaud, rapp.; Mérillon, av. gén. (concl. conf.).

CASS.-CIV. 6 novembre 1912. OUVRIER, ACCIDENTS DU TRAVAIL, RESPONSABILITÉ, LOIS DES 9 AVRIL 1898 ET 30 JUIN 1899, EXPLOITATION AGRICOLE, INDUSTRIE ANNEXE, VITICULTEUR, DISTILLERIE, COMPLÉMENT INDISPENSABLE, MOYEN NOUVEAU (Rép., v Responsabilité civile, n. 1739 et s., 1877 et s., 2768 et s.; Pand. Rép., vo Travail, n. 1584 et s., 1708 et s., 3152 et s.).

Si la loi du 9 avril 1898 n'est pas applicable à l'agriculture, les industries annexes, qui n'en sont pas le complément indispensable, y sont assujetties (1) (LL. 9 avril 1898, art. ler; 30 juin 1899).

Il importe peu que l'industrie annexée à une exploitation rurale ne soit alimentée que par le produit de cette exploitation (2) (Id.).

En conséquence, c'est à bon droit qu'un jugement condamne le viticulteur, qui a annexe à son exploitation une distillerie, à payer à un ouvrier, victime, au cours des opérations de distillation, d'un accident occasionné par l'explosion d'un alambic, et ayant entraine une incapacité temporaire, les frais médicaux et pharmaceutiques et l'indemnité journalière déterminée par l'art. 3 de la loi du 9 avril 1898 (3) (Id.).

Le viticulteur, qui n'a pas fait valoir devant le juge du fait les circonstances d'où résulterait pour lui la nécessité de

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1832 (S. 1832.1.376. - P. chr.); 21 mai 1833 (S. 1833.1.751. · P. chr.); 30 juill. 1833 (S. 1833. 1.861. P. chr.). Adde, la note sous Cass. 30 mars 1885 (S. 1886.1.159. P. 1886.1.377); Garsonnet, op. cit., t. 3, p. 278, § 970; Carré et Chauveau, Lois de la proc., t. 3, quest. 1484 ter; Bioche, Dict. de proc., v° Enquête, n. 573; notre C. proc. annoté, par Tissier, Darras et Louiche-Desfontaines, sur l'art. 410, n. 1; et notre Rép. gén. du dr. fr., v Enquête, n. 1496; Pand. Rép., eod. verb., n. 931. L'arrêt rendu dans la 2e espèce ci-dessus paraît bien consacrer l'opinion contraire, puisqu'il se base, pour déclarer nul le jugement déféré, non seulement sur son défaut de mention de la prestation de serment, mais aussi sur ce que le jugement « a fondé sa décision sur la déposition de témoins qu'il ne désigne pas ».

(1-2-3) La chambre civile, par le présent arrêt, affirme de nouveau sa jurisprudence sur l'assujettissement à la loi du 9 avril 1898 des industries annexées à une exploitation agricole, et qui n'en sont pas le complément indispensable, fussentelles alimentées exclusivement par les produits de l'exploitation rurale. V. Cass. 6 avril 1909 (2o espèce) (S. et P. 1912.1.37; Pand. pér., 1912.

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LA COUR; Attendu que le jugement attaqué constate que Dantony, ouvrier de Tord, viticulteur, était occupé, le 21 janv. 1908, à distiller le vin blanc récolté par Tord, propriétaire, lorsqu'il fut victime, par suite de l'explosion de l'alambic, d'un accident qui a entraîné pour lui une incapacité temporaire; qu'il condamne Tord à payer à Dantony, avec les frais médicaux et pharmaceutiques, l'indemnité journa lière déterminée par l'art. 3 de la loi du 9 avril 1898; Attendu qu'en statuant ainsi, ledit jugement n'a violé aucun des articles visés au pourvoi; Attendu, en

effet, que, si la loi du 9 avril 1898 n'est pas applicable à l'agriculture, les industries annexes, qui n'en sont pas le complément indispensable, y sont assujetties, et qu'il importe peu que la distillerie ne soit alimentée que par les produits de l'exploitation rurale; Attendu, il est vraí, que le pourvoi reproche au jugement de ne pas s'être expliqué sur la nécessité où serait Tord de convertir son vin en alcool pour tirer parti de ses récoltes; Mais attendu qu'il appartenait à Tord de faire valoir devant le juge du fait les circonstances sur lesquelles il s'appuyait pour soutenir qu'il devait échapper à la règle générale posée par l'art. 1er de la loi sur les accidents du travail; qu'il ne peut les invoquer pour la première fois devant la Cour de cassation; Rejette le pourvoi formé contre le jugement rendu le 9 mars 1909 par le tribunal civil de Jonzac, etc.

Du 6 nov. 1912. — Ch. civ. MM. Baudouin, ler prés.; Reynaud, rapp.; Lombard, av. gén. (concl. conf.); Pérouse, av.

1.37); 8 nov. 1910 (2 arrêts) (S. et P. 1912.1.17; Pand. pér., 1912.1.17); 24 janv. 1912 (S. et P. 1912.1.196; Pand. pér., 1912.1.196). Mais V. dans la note de M. Naquet sous Cass. 8 nov. 1910 (2 arrêts), précités, la critique de cette jurisprudence.

(4) Si c'est seulement dans le cas où elle est le complément indispensable de l'exploitation rurale à laquelle elle est annexée qu'une industrie échappe à l'assujettissement à la loi du 9 avril 1898 (V. la note qui précède), l'exploitant qui prétend bénéficier de cette exception doit soumettre aux juges du fait les circonstances desquelles il entend la faire résulter; faute par lui d'avoir mis les juges à même de se prononcer sur ce point, il ne peut se faire contre leur décision un grief tiré de ce qu'ils ne se seraient pas expliqués sur le caractère indispensable ou non à son exploitation rurale de l'industrie qu'il y a annexée; un pareil moyen, mélangé de fait et de droit, n'est pas recevable devant la Cour de cassation. V. sur le principe, Cass. 29 nov. 1909 (S. et P. 1912.1.100; Pand. pér., 1912.1.100); 15 déc. 1909 (S. et P. 1910.1.171; Pand. pér., 1910.1.171), et les renvois.

CASS.-REQ. 28 avril 1911.

DISTRIBUTION PAR CONTRIBUTION, CRÉANCIER NON OPPOSANT, DÉLAI POUR PRODUIRE, REGLEMENT PROVISOIRE, FORCLUSION (Rép., vo Distribution par contribution, n. 248 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 284 et s.). L'obligation d'effectuer les sommations prescrites par l'art. 659, C. proc., au titre de la distribution par contribution, n'est relative qu'aux créanciers opposants avant

(1-2-3) Un procès plein d'obscurité et fertile en malentendus a conduit, par accident, la Cour suprême à exprimer son opinion sur une question qu'elle avait déjà résolue, mais sur laquelle sa doctrine est restée assez incertaine. Voyons dans quelles circonstances elle a formulé cet avis, s'il est conforme aux données de la jurisprudence antérieure, et s'il convient de s'y rallier.

§ 1er.

Le traitement d'un fonctionnaire ayant fait l'objet d'oppositions et de cessions, les unes et les autres avaient été, par voie de significations, portées à la connaissance du receveur municipal de Marseille, qui, dans l'espèce, jouait le rôle à la fois de tiers saisi et de débiteur cédé. Le receveur, par application de l'art. 2-8° de l'ordonn. du 3 juill. 1816, avait déposé les sommes dont il était détenteur à la Caisse des dépôts et consignations, en lui signalant les oppositions, mais sans parler des cessions, dont quelques-unes remontaient jusqu'à l'année 1900. Une distribution par contribution s'était ouverte au mois de juillet 1906. La Caisse avait délivré un état des oppositions, et, au mois de novembre, les créanciers dont les noms figuraient sur cet état avaient reçu sommation de produire. Mais le règlement provisoire, au lieu d'être dressé immédiatement, à l'expiration du délai d'un mois imparti aux créanciers pour les productions, ne l'avait été que beaucoup plus tard, le 10 juin 1909. Et il était arrivé qu'entre temps, le receveur, pris d'un scrupule dont nous ignorons la cause, avait transmis à la Caisse, le 25 mai 1909, les significations de cessions que jusqu'alors il avait passées sous silence.

Ce fut l'origine du procès. La procédure de distribution close, un créancier, muni de son bordereau de collocation, vint réclamer son paiement. La Caisse refusa de payer, sous prétexte que, les significations de cession valant opposition, elle ne pouvait se dessaisir sans qu'il eût été donné nominativement mainlevée de ces oppositions tardives, que n'avaient visées ni le règlement provisoire ni le règlement définitif. Le tribunal civil de Marseille, saisi de la contestation, jugea la prétention de la Caisse mal fondée; la mainlevée générale, contenue dans le règlement provisoire d'abord, dans le règlement définitif ensuite, était, d'après lui, régulière et suffisante. Le juge-commissaire n'avait pas à tenir compte d'oppositions formées par des créanciers, qui, n'ayant pas produit dans les délais », se trouvaient de plein droit forclos.

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C'est contre ce jugement que la Caisse s'était pourvue en cassation. A l'appui de son pourvoi, elle faisait valoir, entre autres arguments, que, d'après une opinion accréditée aussi bien en jurisprudence qu'en doctrine, la déchéance du droit de produire, pour les créanciers non sommés, ne résulte pas de la seule expiration du délai d'un mois prévu à l'art. 660, C. proc.; qu'elle est encou rue, au plus tôt, le jour de la clôture du règlement provisoire. Elle laissait entendre que, les signifiANNÉE 1913. 2o cal.

l'ordonnance du juge-commissaire (1) (C. proc., 659).

Eussent-i's fait opposition postérieurement à cette ordonnance, les autres créanciers sont définitivement forclos, s'ils n'ont pas produit avant la clôture du règlement provisoire (2) (C. proc., 660).

Par suite, lorsque le juge-commissaire à la contribution a, dans les termes les plus généraux, prononcé la mainlevée de toutes les oppositions existant à la Caisse des dé

cations de cessions lui ayant été transmises avant cette date, les cessionnaires n'étaient pas forclos. C'était un raisonnement qui reposait sur une confusion. S'il est vrai qu'une signification de cession équivaut à opposition, il n'est, par contre, pas permis d'y voir un acte de production. Les cessionnaires, en réalité, n'avaient produit ni avant ni après le règlement provisoire. Et il suffisait de le constater pour justifier la solution du tribunal de Marseille.

Mais le tribunal avait commis l'imprudence, dans les motifs de son jugement, de consacrer implicitement, et sans d'ailleurs y être obligé, une théorie dont ensuite la demanderesse en cassation avait, à bon droit, signalé le caractère contestable celle d'après laquelle la forclusion de l'art. 660, C. proc., faute de production dans le mois qui suit la sommation, s'applique à tous créanciers, opposants ou non opposants, sommés ou non sommés. La Cour suprême a cru bon de rectifier cette assertion, et, entrant dans la voie tracée par le jugement et par le pourvoi, elle s'est, à son tour, dans les considérants de son arrêt, prononcée sur cette question classique, mêlée à tort au débat :

Jusqu'à quel moment les créanciers conservent-ils le droit de produire dans une procédure de distribution par contribution?

§ 2.

Lorsqu'il s'agit de créanciers ayant formé opposition, tout le monde à peu près est d'accord.

S'ils ont reçu sommation conformément aux prescriptions de l'art. 659, C. proc., ils doivent, à peine de forclusion, produire dans le mois de la sommation. V. not, Garsonnet, Tr. de proc., 2o éd., par Cézar-Bru, t. 5, § 1927; Glasson, Précis de proc., 2° éd., par Tissier, t. 2, n. 1658; et notre Rép. gen. du dr. fr., v° Distribution par contribution, n. 248 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 284 et s., 322 et s. Certains arrêts (V. surtout, Paris, 11 déc. 1822, S. et P. chr.) leur avaient bien autrefois permis de se présenter à la distribution, même après l'expiration de ce délai d'un mois, tant que le juge-commissaire n'a pas dressé procèsverbal de règlement provisoire. Mais cette interprétation bienveillante, vraisemblablement inspirée des traditions de l'ancien droit (Cf. Pigeau, La proc. civ. du Châtelet, t. 1er, p. 679), était difficile à maintenir en face du texte formel de l'art. 660, C. proc.; la loi du 21 mai 1858, établissant, en matière d'ordre, une forclusion de plein droit faute de production dans les 40 jours de la sommation (art. 755 nouveau, C. proc.), l'a fait écarter définitivement. V. Cass. civ. juin 1835 (S. 1835.1.960. P. chr.); Paris, 30 déc. 1837 (S. 1838.2.87. P. 1838.1.145); Bordeaux,

7 juin 1839 (S. 1839.2.412); Cass. 23 août 1843 (P. 1843.2.716). Adde, Tessier, Tr. de la distrib. par contrib., n. 142; Garsonnet et Cézar-Bru, loc. cit., p. 550.

S'ils n'ont pas reçu sommation, il ne convient pas qu'ils souffrent de la faute commise par le

pôts et consignations, et qu'il a prononcé nominativement la mainlevée de toutes les oppositions parvenues à la Caisse avant les sommations de l'art. 659, C. proc., la Caisse ne saurait refuser de payer dans les termes du règlement définitif, sous prétexte que, depuis les sommations, elle a reçu des oppositions de la part de créanciers qui, d'ailleurs, n'ont pas forme de production avant la clôture du règlement provisoire (3) (Id.).

poursuivant. Ils peuvent produire utilement jusqu'à la clôture du règlement définitif (V. en ce sens, Toulouse, 12 avril 1820, S. et P. chr.; Tessier, op. cit., n. 144), peut-être même jusqu'au paiement des bordereaux de collocation. V. Pigeau, Comment. sur le C. proc., t. 2, sur l'art. 664, p. 260; et notre Rép. gén. du dr. fr., verb. cit., n. 304; Pand. Rep., verb. cit., n. 284.

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Mais s'agissait-il, dans l'espèce, de créanciers opposants? La Cour suprême ne l'a pas pensé. Suivant les errements antérieurs de la jurisprudence, elle a considéré comme insuffisante la signification de cession adressée au receveur municipal; comme tardive, la transmission de cette signification par le receveur municipal à la Caisse des dépôts et consignations. La première n'avait pas figuré sur l'état délivré par la Caisse au moment de l'ouverture de la contribution; le poursuivant n'était pas censé la connaître (Cf. Lyon, 11 déc. 1860, S. 1861.2.491. P. 1862.407, sous Cass. 20 janv. 1862; et notre Rép. gén. du dr. fr., verb. cit., n. 210). La seconde était postérieure à l'ordonnance du juge-commissaire autorisant les sommations; le poursuivant n'avait pas à s'en inquiéter. Cf. Paris, 28 mars 1830 (S. et P. chr.); Garsonnet et Cézar-Bru, op. cit., t. 5, p. 546 et 547, § 1925, texte et note 10; notre Rép. gén. du dr. fr., verb. cit., n. 208; Pand. Rép., verb. cit., n. 247. Et sa conclusion a été qu'elle se trouvait en présence de créanciers, qui n'avaient pas été sommés, parce qu'ils n'avaient pas à l'être, parce que leur opposition était restée inopérante. Tout le problème était de savoir à quel moment sont forclos les créanciers non opposants et non sommés.

C'est un problème qui a donné lieu à des solutions divergentes. Trois systèmes au moins se partagent la jurisprudence et la doctrine. D'après le premier, les créanciers non opposants et non sommés, comme les créanciers opposants et sommés, devraient produire dans le mois qui suit les sommations. V. en ce sens, outre les arrêts de cassation rapportés infra, Toulouse, 21 mars 1903 (Gaz. Pal., 1903.1.631). V. aussi et surtout, Tessier, op. cit., n. 151. D'après le second, ils pourraient, à l'instar des créanciers opposants et non sommės, produire jusqu'à la clôture du règlement définitif, peut-être même jusqu'au paiement des bordereaux de collocation. V. en ce sens, Grenoble, 29 déc. 1818 (S. et P. chr.); Bourges, 23 mars 1821 (motifs) (S. et P. chr.); et les autorités citées en note sous Nîmes, 30 déc. 1892 (S. et P. 1894.2.295). Adde, Garsonnet et Cézar-Bru, op. cit., t. 5, § 1930; et notre Rép. gen. du dr. fr., verb. cit., n. 302-303; Pand. Rep., verb. cit., n. 321. D'après le troisième, la forclusion résulterait du règlement provisoire. V. en ce sens, Paris, 7 juill. 1829 (S. et P. chr.); Paris, 28 mars 1830 (S. et P. chr.); et surtout Nîmes, 30 déc. 1892 (motifs) (S. et P. 1894.2.295; Pand. pér., 1893.2. 285), avec les autorités citées en note. Adde, Glasson et Tissier, op. cit., t. 2, n. 1691; et la note de M. Levillain sous Trib. de la Seine, 21 août 1877 et Alger, 11 févr. 1878 (Dalloz, 1879.2.185). C'est 13 I PART.

(Caisse des dépôts et consignations C. Me Poncel).

Une distribution par contribution ayant été ouverte sur une somme provenant des retenues effectuées sur le traitement de M. Allengry, ancien commissaire de police à Marseille, et qui avait été versée par le receveur municipal de cette ville à la Caisse des dépôts et consignations, à charge de diverses oppositions, la Caisse a délivré, à la date du 13 juill. 1906, un état de ces oppositions, lequel état a servi de base au règlement provisoire, dressé le 10 juin 1909, et au règlement définitif, arrêté le 27 novembre suivant. Le 25 mai 1909, trois significations de cessions concernant le traitement de M. Allengry, recues par le receveur municipal en 1900 et 1901, avaient été transmises par ce

ce système intermédiaire qu'adopte la Chambre des requêtes.

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Il est permis de s'en étonner. La Cour de cassation, jusqu'ici, semblait plutôt favorable au premier système. Elle avait jugé, en 1861, que la forclusion de plein droit », prononcée par l'art. 660, C. proc., s'applique aux créanciers non opposants comme aux créanciers opposants (V. Cass. civ., 13 nov. 1861, 8. 1861.1.940.-P. 18 32.109); en 1869, que les créanciers non opposants, s'ils peuvent se présenter spontanément à la distribution, doivent le faire dans le même délai et sous la même peine que les créanciers opposants (V. Cass. civ. 14 avril 1869, S. 1870.1.76. - P. 1870. 158); et, en 1899 encore, elle avait répété qu'il n'y a

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aucune distinction à faire entre les créan

ciers opposants et non opposants V. Cass. civ., 6 juil. 1899 (S. et P. 1901.1.333; Pand. pér., 1901. 1.52). Si elle a changé d'opinion, elle devait au moins justifier ce revirement de jurisprudence.

Mais a-t-elle changé d'opinion? Nous n'en sommes pas bien persuadé. La vérité, c'est qu'elle ne parait pas avoir jamais nettement distingué le troisième système du premier. Elle les a mêlés, comme les ont mêlés, à maintes reprises, les tribunaux (V. spécialement, Alger, 11 févr. 1878, précité), et les auteurs. V. not., Rodière, Cours de compét. et de proc., 4o éd., t. 2, p. 254; Carré et Chauveau, Lois de la proc., 5 éd., par Dutruc, t. 4, quest. 2171 ter.

Et cette confusion s'explique :

Par des raisons pratiques, d'abord. Le plus sou vent, la production tardive a lieu, non seulement après l'expiration du délai d'un mois, mais après la clôture du règlement provisoire. Les deux systèmes conduisent au même résultat. C'était le cas, en particulier, dans les affaires soumises à la Cour de cassation en 1861 et en 1869; la Cour, en consacrant le premier système, ne condamnajt pas pour autant le troisième.

Par des raisons historiques, ensuite : Au moment où s'est formée cette jurisprudence, étendant la déchéance de l'art. 660, C. proc, aux créanciers non opposants et non sommés, on était encore peu fixé sur la façon d'opérer de cette déchéance à l'égard des créanciers opposants et sommés. Cer tains croyaient qu'elle ne résultait que de la confection du règlement provisoire. V. Paris, 11 déc. 1822, précité.

Mais cette confusion doit cesser. Qu'il y ait un intérêt sérieux à opter pour l'un ou l'autre système, le procès actuel le démontre; plusieurs années séparent parfois les sommations de la clôture du règlement provisoire. Que si, d'autre

fonctionnaire à la Caisse des dépôts et consignations. Aussi, lorsque, après la délivrance des bordereaux, Me Poncel, avoué poursuivant, a réclamé le paiement des frais pour lesquels il avait été colloqué, la Caisse a refusé paiement, à raison de l'existence desdites cessions, dont il n'avait pas été tenu compte et dont il n'avait pas été donné mainlevée dans la procédure de distribution. Me Poncel ayant assigné la Caisse des dépôts et consignations, le tribunal civil de Marseille a accueilli sa demande par un jugement, en date du 10 juin 1910, dont extrait suit : - Le Tribunal; Attendu que la Caisse des dépôts et consignations, débitrice pure et simple en vertu de la consignation, se trouvait, à défaut de disposition de loi spéciale, placée sous l'empire du droit commun; - Attendu qu'il est de principe,

part, on prétend maintenir l'assimilation jadis proposée, par rapport à la forclusion, entre créanciers opposants et non opposants, il faut admettre que cette forclusion frappe les créanciers non opposants, aussi rigoureusement que les créanciers opposants; il n'est pas permis de donner à une même formule deux interprétations, l'une bienveillante, l'autre rigide, suivant qu'on l'applique

aux uns ou aux autres.

La jurisprudence, à l'analyser superficiellement, semblait pencher en faveur du premier système. En réalité, et plus ou moins consciemment, elle s'orientait vers le troisième (V. not., Cass. req. 16 déc. 1896, S. et P. 1900.1.461; Pand. pér., 1897. 1.163), déclarant un créancier forclos, pour n'avoir produit, ni dans le mois de la sommation aux créanciers opposants, ni avant la date du règlement provisoire ». L'arrêt actuel marque un pas important, sinon décisif, dans cette voie, que nous croyons la bonne.

8 3.

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Le système qui permet aux créanciers non opposants et non sommés de produire jusqu'à la clòture du règlement provisoire, mais jusqu'à cette époque seulement, est à la fois le plus équitable et le meilleur au point de vue pratique.

Ce serait une solution bien sévère que celle qui consisterait à déclarer de plein droit forclos, un mois après les sommations, des créanciers qui n'ont pas été touchés par ces sommations. En vain dirait-on qu'ils ont été négligents, qu'ils auraient dû former en temps utile opposition. Il serait facile de répondre que l'absence d'opposition n'est pas toujours imputable à faute; que, si le créancier n'a pas formé opposition, c'est peut-être simplement parce qu'il ignorait les poursuites qu'un autre exerçait ou s'apprêtait à exercer contre le débiteur; qu'en tout cas, les déchéances sont de droit étroit, qu'il n'est pas permis d'étendre aux créanciers non opposants cette espèce de peine que l'art. 660, C. proc., n'a édictée qu'à l'égard des créanciers opposants.

Et ce serait, à l'inverse, un système bien incommode et bien fâcheux que celui qui voudrait les autoriser à produire jusqu'à la distribution des deniers il risquerait d'imposer au juge-commissaire un vrai travail de Pénélope; il aggraverait les lenteurs et augmenterait les frais de la procédure; il ne tendrait à rien moins qu'à rendre presque impossible la distribution par contribution V. les considérants du jugement du tribunal civil de Nimes, 4 juill. 1892, sous Nîmes, 30 déc. 1892, précité.

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La doctrine intermédiaire, à laquelle s'arrête la chambre des requêtes, échappe aux inconvénients des deux théories extrêmes; elle concilie heureusement les intérêts en présence, ceux des créanciers non opposants et non sommés, d'une part, ceux des créanciers opposants et sommés, d'autre part.

Elle a pourtant rencontré, parmi les auteurs récents, des adversaires convaincus. V. not., Garsonnet et Cézar-Bru, op. cit., t. 5, § 1930; et notre Rép. gén, du dr. fr., verb. cit., n. 302 et 303; Pand. Rep., verb. cit., n. 322 et s., 327. On l'a critiquée, à la fois, au nom des textes et des principes. On a tiré à son encontre argument de l'art. 503, C. comm., qui, dans l'hypothèse de faillite, ouvre à ceux qui n'ont pas comparu ni procédé dans les délais à l'affirmation de leurs créances « la voie de l'opposition... jusqu'à la distribution des deniers inclusivement ». On lui a reproché de manquer de base, et d'être purement arbitraire.

Mais ces critiques, pour notre part, ne nous semblent pas méritées.

La disposition de l'art. 503, C. comm., s'explique par les conditions particulières à la faillite, la liquidation générale du patrimoine du failli, les répartitions successives; ce serait en fausser le sens que de l'étendre à la distribution par contribution poursuivie à l'encontre d'un débiteur non commerçant. V. sur l'hypothèse spéciale de faillite survenant au cours d'une distribution par contribution ouverte contre un débiteur commerçant, Rouen, 18 avril 1828 (S. et P. chr.); Metz, 16 août 1849 (S. 1849.2.520. P. 1850.1.345). V. aussi, Tessier, op. cit., n. 152.

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Quant au fondement du système, le seul tort de la jurisprudence a été de le chercher dans un texte où il n'était pas. Qu'elle renonce à torturer l'art. 660, C. proc.; qu'elle rejette décidément cette assimilation boiteuse des créanciers opposants et non opposants; qu'elle reconnaisse qu'il y a dans la loi, en ce qui touche les créanciers non opposants, une lacune la méthode critique lui fournira des matériaux pour la combler; les considérations pratiques, l'histoire (V. Pigeau, La proc. civ. du Chatelet, loc. cit.) et l'esprit de la loi (V. Trib. de Briey, 4 avril 1849, motifs, sous Metz, 16 août 1849, précité. V. surtout, Nîmes, 30 déc. 1892, motifs, précité) s'uniront pour justifier la solution dans laquelle nous sommes tenté d'apercevoir l'opinion définitive de la Cour de

cassation.

LOUIS HUGUENEY, Professeur à la Faculté de droit de Dijon.

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