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(Ménard C. Jusserand père, Lefebvre et autres). ARRÈT.

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LA COUR; Considérant qu'une distribution par contribution a été ouverte sur la somme de 11.885 fr. 20, appartenant à Ménard fils, et que, par ordonnance du 30 mai 1910, Ardoin, créancier opposant, a été autorisé à sommer les créanciers de produire; que la sommation a été faite, le 6 juin 1910, aux créanciers opposants; qu'avant que le règlement provisoire fût intervenu, à la date du 12 juin 1911, Ménard père, qui n'avait pas fait opposition à la délivrance des deniers, forma sa production pour une somme de 18.000 fr., et que cette production fut admise le 2 décembre; que Jusserand, créancier opposant, aux termes de son contredit, conclut à la nullité de la production de Ménard père, par application de l'art. 660, C. proc., qui oblige les créanciers opposants à faire leur production, à peine de forclusion, dans le mois de la sommation; Considérant qu'aucun autre texte ne statue sur la situation des créanciers qui, à défaut d'opposition formée en leur nom, n'ont point reçu sommation de produire; qu'on ne saurait, cependant, sans tomber dans l'arbitraire, admettre les créanciers de cette catégorie à faire leur production dans un délai plus étendu, et prenant fin, soit lors du règlement provisoire, soit lors du règlement définitif de la contribution; qu'il importe, dans l'intérêt d'un prompt règlement de cette procédure, de déterminer le moment précis de la contribution, où l'état de ceux qui doivent participer à la distribution sera définitivement arrêté; qu'on doit donc admettre que, si l'art. 660, C. proc., n'a visé expressément que les créanciers opposants, en se référant à la situation la plus ordinaire, il s'impose également, par analogie de motifs, aux autres créanciers, et que, par suite, Ménard, en produisant à la contribution plus d'un mois après, le 6 juin 1910,

qui suit les sommations, V. Cass. civ. 13 nov. 1861 (S. 1861.1.940. - P. 1862.109); 14 avril 1869 (S. 1870.1.76. P. 1870.158). Adde dans le même sens, les autorités citées dans la note de M. Hugueney sous Cass. 28 avril 1911, précité. V. aussi, Cass. 6 juill. 1899 (S. et P. 1901.1. 333; Pand. pér., 1901.1.52). Mais, par l'arrêt précité du 28 avril 1911, la chambre des requêtes a décidé que les créanciers non opposants et non sommés peuvent produire jusqu'à la clôture du réglement provisoire. L'arrêt ci-dessus recueilli, qui a été rendu postérieurement à cette décision, est intéressant à reproduire, car il montre que l'arrêt de la chambre des requêtes, dont la solution se recommande par ses avantages pratiques et par son caractére équitable (V. la note précitée de M. Hugueney, 3), n'a pas triomphé des résistances des Cours d'appel.

(1 à 5) La Cour de cassation a décidé, comme l'arrêt ci-dessus recueilli, que l'art. 753, C. proc., aux termes duquel « les créanciers seront sommés de produire à l'ordre, par acte signifié aux domiciles élus par leurs inscriptions.», doit être entendu en ce sens que si, depuis l'inscription, il y a eu changement de l'élection de domicile qui y est portée, c'est au domicile nouvellement élu que doit être signifiée

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BESANÇON 10 juillet 1912.

1o ORDRE, ORDRE JUDICIAIRE, SOMMATION DE Produire, NOTIFICATION AU Domicile élu, NOUVELLE ÉLECTION DE DOMICILE, RENOUVELLEMENT DE L'INSCRIPTION (Rép., v Ordre, n. 578 et s.; Pand. Rép., v° Ordre entre créanciers, n. 1379 et s.). - 2o LIQUIDATION JUDICIAIRE, LIQUIDATEUR, QUALITÉ POUR AGIR, ORDRE, SOMMATION DE PRODUIRE, OUVERTURE DE L'ORDRE, ASSISTANCE DU LIQUIDÉ (DÉFAUT D'), MISE EN CAUSE DU LIQUIDÉ (Rép., vo Liquidation judiciaire, n. 221 et s., 254 et s.; Pand. Rép., vo Faillite, liquidation judiciaire, etc., n. 880 et s.).

1o Par le domicile élu dans l'inscription, auquel doit être signifiée, aux termes de l'art. 753, C. proc., la sommation de produire à l'ordre adressée aux créanciers, il faut entendre le dernier domicile élu dans l'inscription, au jour de l'ouverture de l'ordre judiciaire (1) (C. proc., 753).

Par suite, ne fait pas courir le délai de 40 jours, imparti aux créanciers, à peine de forclusion, pour produire à l'ordre, la sommation notifiée à un créancier au domicile elu révélé par l'état des inscriptions déposé au greffe par le poursuivant, en conformité de l'art. 750, à l'appui de sa réquisition d'ouverture du procès-verbal d'ordre, lorsque le créancier a, depuis l'ouverture de l'ordre amiable, modifié son élection de domicile, en renouvelant son inscription (2) (C. proc., 753 et s.).

Il en est ainsi surtout, alors que le pour

la sommation, en sorte que l'extrait des inscriptions doit être pris par le poursuivant le jour même où il requiert du juge commis l'ordonnance en vertu de laquelle les créanciers sont sommés de produire, sans que le créancier, en modifiant son élection de domicile, ait à notifier au poursuivant son nouveau domicile élu. V. Cass. 2 juin 1831 (S. 1831.1.232. P. chr.) Bioche, Dict. de proc., vo Ordre, n. 291; Houyvet, Tr. de l'ordre, n. 112 et 138; notre C. proc. annoté, par Tissier, Darras et LouicheDesfontaines, sur l'art. 753, n. 24 et s. Cependant cette solution n'est pas unanimement admise, et des auteurs enseignent que la sommation de produire doit être signifiée aux créanciers, au dernier domicile qu'ils ont élu avant la délivrance de l'état des inscriptions, qui, aux termes de l'art. 750, doit être déposé à l'appui de la réquisition d'ouverture du procès-verbal d'ordre, et que le poursuivant n'est tenu d'avoir égard aux chaugements postérieurs qu'autant qu'ils lui ont été notifiés. V. Garsonnet, Tr. de proc., 2o éd., par Cézar-Bru, t. 5, § 1820.

(6-7-8) La liquidation judiciaire n'a pas pour effet de dessaisir le commerçant, qui est l'objet de cette mesure, de l'administration de ses biens. V. Grenoble, 10 juill. 1908 (S. et P. 1909.2.53; Pand, pér..

suivant n'a pas observé les délais prescrits par le Code de procédure, tant pour l'ouverture de l'ordre amiable que pour l'ouverture de l'ordre judiciaire (3) (C. proc., 750 et s.).

Vainement le poursuivant soutiendrait qu'il n'aurait été tenu de notifier la sommation au nouveau domicile élu que si le créancier lui avait signifié la nouvelle élection de domicile, le créancier n'étant tenu à aucune obligation de ce genre, et la publicité légale résultant, en cette matière, des registres du conservateur des hypothèques (4) (C. civ., 2152).

Il importe peu également que, le poursuivant ayant obtenu du conservateur des hypothèques, au moment de faire les sommations, un état des modifications intervenues, cet état n'ait pas fait mention du changement de domicile, qui, étant contenu dans un renouvellement d'inscription, ne figurait pas en marge de l'inscription primitive: c'est un état des inscriptions au jour de l'ouverture de l'ordre judiciaire qui aurait dû être requis par le poursuivant, et non pas un simple état des modifications survenues (5) (C. proc., 750, 753).

20 Le liquidateur judiciaire, agissant pour le compte de la masse des créanciers, n'a pas qualité pour notifier les sommations de produire à un ordre, sans l'assistance du liquide, alors que le concordat obtenu par celui-ci n'est pas un concordat par abandon d'actif, le liquidé s'étant engagé à verser aux mains de ses créanciers un dividende (6) (C. proc., 753; L. 4 mars 1889, art. 5 et s.).

Le liquidateur ne peut, d'ailleurs, requérir seul l'ouverture d'un ordre (7) (C. proc., 750 et s.; L. 4 mars 1889, art. 5 et s.).

Dès lors, est nulle la procédure d'ordre, engagée à la requête du liquidateur seul, alors même que le liquidé aurait été mis en cause, s'il n'est pas établi que, celui-ci ayant refusé d'agir, on se trouvait dans l'hypothese où le liquidateur peut agir seul, par application de l'art. 6, 2, de la loi du 4 mars 1889 (8) (Id.).

L'exception tirée du défaut de qualité du

1909.2.53), la note et les renvois. Adde, la note et les renvois sous Poitiers, 26 févr. 1908 (S. et P. 1911.2.181: Pand. pér., 1911.2.181). En principe, done, le liquidateur n'a qu'un rôle d'assistance; il ne peut agir seul, et le concours du liquidé lui est nécessaire en toute circonstance. V. les notes de M. Lyon-Caen sous Cass. 6 févr. 1899 (S. et P. 1899. 1.118), et sous Cass. 13 déc. 1904 (S. et P. 1905.1. 65). Adde, la note et les renvois sous Grenoble, 10 juill. 1908, précité. Ce principe comporte toutefois des exceptions. Lorsque les créanciers de la liquidation judiciaire sont en état d'union, le liquidé se trouve complètement dessaisi, et le liquidateur est seul investi des droits et actions concernant l'union. V. Cass. 6 févr. 1899 (S. et P. 1899.1.113, et la note de M. Lyon-Caen; Pand, pér., 1899.1.217); Limoges, 17 déc. 1900 (S. et P. 1902.2.302), et le renvoi; Poitiers, 26 févr. 1908 (sol. implic.), précité, la note et les renvois. A ce cas il faut assimiler celui où le liquidé n'a pas obtenu son concordat. V. Poitiers, 26 févr. 1908, précité, et la note. De même également, le liquidé est complètement dessaisi, lorsqu'il a obtenu un concordat par abandon d'actif, et, dans ce cas, encore, son assistance n'est pas requise. V. Lyon-Caen et Renault, Tr. de dr. comm., 3e éd.. t. 7, n. 1100.

liquidateur judiciaire pour agir seul peut être proposée en tout état de cause, et alors même que les parties qui l'opposent ont comparu à la procédure d'ordre (1) (ld.). (Carron et liquid. Carron C. Soc. Lemaire et Dumont). ARRÈT.

LA COUR; Attendu qu'à l'appui de leur appel, Mareschal, ès qualités, et Carron soutiennent que, contrairement à la décision des premiers juges, la sommation de produire à l'ordre, notifiée le 29 juill. 1911, en l'étude de Gagne, avoué, à la Société Lemaire et Dumont, intimés, est valable, opérante, et, dès lors, a pu faire courir le délai de forclusion édicté par l'art. 755, C. proc.; qu'il échet donc de rechercher, au vu des conclusions respectives des parties: 1° si cette sommation a pu être valablement notifiée en l'étude Cagne; 2° si elle pouvait être notifiée à la requête du liquidateur seul, le nommé Mareschal, appelant; 3° si celui-ci avait qualité pour requérir seul l'ouverture de l'ordre; Sur le premier point: Attendu que les appelants, se basant sur l'art. 753, C. proc., prétendent que la sommation en l'étude Cagne est régulière, parce que, par « domicile élu dans l'inscription, au sens de cet article, il faut entendre le domicile élu, révélé par l'état d'inscriptions déposé, à l'appui de la réquisition d'ouverture d'ordre, par le poursuivant (C. proc., 750), celui-ci n'ayant pas à se préoccuper des modifications qui auraient pu se produire postérieurement; Mais attendu que l'art. 753, faisant courir un délai de forclusion, doit être interprété de façon rigoureuse; que la procédure d'ordre constitue un tout indivisible; qu'au cas où les mots domicile élu dans l'inscription », de l'art. 753, devraient s'entendre par référence à l'état visé dans l'art. 750, les appelants seraient encore irrecevables à se prévaloir de ce moyen, à défaut par eux de s'être conformés aux prescriptions du Code de procédure civile; que l'ordre amiable a été ouvert le 15 déc. 1908, sur un état sur transcription délivré le 20 juin précédent, soit six mois avant; que l'ordre judiciaire n'a pas été ouvert dans le délai d'un mois prévu par l'art. 752, C. proc., mais près de trois ans après l'ouverture de l'ordre amiable, soit le 12 juill. 1911, alors que les renouvellements d'inscription et les changements d'élection de domicile avaient eu lieu les 24 mai et 26 déc. 1910; que, par domicile élu » (C. proc., 753), il faut entendre le dernier domicile élu dans l'inscription, au jour de l'ouverture de l'ordre judiciaire, par ce triple motif que le législateur n'a pas entendu se contenter d'une notification faite à un domicile élu quelconque, puisqu'il a attaché une telle importance à ce que les créanciers soient

Dans la présente affaire, on ne se trouvait dans aucune de ces hypotheses. Le concordat qui avait été consenti par les créanciers, bien qu'il comportât abandon de l'actif, ne pouvait être considéré comme un concordat par abandon d'actif, le commerçant ne s'étant pas borné à abandonner son actif aux créanciers, mais s'étant engagé envers eux à leur verser un dividende. Le liquidé n'étant pas entièrement dessaisi, le liquidateur ne pouvait, sans

bien touchés par la sommation de produire qu'il a exigé que la sommation 'fut faite par huissier commis; que le texte de l'art. 2156, C. civ., qui constitue le droit commun, en matière d'actions concernant les inscriptions hypothécaires, vise formellement le dernier des domiciles élus; qu'aux termes de l'art. 2152, C. civ., tout créancier a le droit de changer, sur le registre des hypothèques, le domicile par lui élu dans son inscription première; que cette faculté illimitée n'aurait pas ce caractère, et il serait fait échec à ce principe, si le poursuivant n'était pas tenu de se préoccuper du changement d'élection de domicile; que, sans qu'il soit besoin de rechercher si, à dater de la transcription de l'acte de vente, l'hypothèque a produit son effet légal, il suffit de constater que le créancier inscrit conserve le droit, nonobstant cette transcription, d'user de la faculté qui lui est reconnue par le texte prérappelé (C. civ., 2152), et agit prudemment, en renouvelant son inscription tant qu'il n'est pas payė;

Attendu que vainement les appelants allèguent que le poursuivant n'aurait été tenu de signifier au nouveau domicile élu que si le changement lui avait été notifié par le créancier; que cette prétention est formellement contredite par la jurisprudence et tous les auteurs (V. C. proc. annoté, par Tissier, Darras et LouicheDesfontaines, sur l'art. 753, n. 24 et 25); qu'il est interdit d'ajouter ainsi arbitrairement aux dispositions de l'art. 2152, C. civ.; que la publicité légale, en la matière, résulte du registre du conservateur des hypothèques; que, vainement encore, les appelants soutiennent que, si le poursuivant avait requis du conservateur des hypothèques, au moment de faire les sommations, un état des modifications survenues, le changement de domicile ne lui aurait pas été révélé, faute de mention de ce changement en marge des premières inscriptions, et invoquent un certificat à eux délivré par le conservateur; que ce certificat, délivré sur une réquisition rédigée habilement et pour les besoins de la cause, révèle que ce n'est pas un état des modifications intervenues, mais bien un état des inscriptions, au jour de l'ouverture de l'ordre judiciaire, qui aurait dû être requis; que le créancier ne doit faire mentionner en marge le changement de domicile qu'autant que là se bornent les moditications effectuées; qu'il n'y est nulement tenu, lorsqu'il effectue le renouvellement complet de son inscription; qu'ainsi, en signifiant aux intimés, en l'étude Cagne, c'est-à-dire au domicile élu dans son inscription primitive, sans tenir compte du changement de domicile contenu dans les renouvellements d'inscription des 24 mai

son assistance, sommer les créanciers de produire à un ordre.

Le liquidateur n'avait d'ailleurs, pour les mêmes raisons, pas qualité pour requérir seul l'ouverture d'un ordre. Il soutenait, il est vrai, que l'art. 6, § 2, de la loi du 4 mars 1889 lui permettait de procéder seul, en mettant en cause le liquidé. Mais cet article ne permet au liquidateur d'engager seul une instance que sur le refus du liquidé. Or, il n'était pas

et 26 déc. 1910, le poursuivant a violé les dispositions de la foi; que la signification par lui faite, le 29 juill. 1911, doit être déclarée non avenue; que le délai de production n'a pas encore commencé à courir, et qu'aucune forclusion n'est encourue par les intimés; Attendu que, si

Sur le second point:

le liquidateur n'a pas, en principe, qualité pour agir seul, il en est autrement, d'après les appelants, en cas de concordat par abandon d'actif, comme dans l'espèce, Carron étant concordataire par abandon d'actif, aux termes d'un traité du 19 févr. 1912, homologué le 5 mars suivant; qu'en ce cas spécial, le liquidateur peut agir seul; Mais attendu que le concordat du 19 févr. 1912 n'est pas un simple concordat par abandon d'actif, mais, ainsi qu'il résulte de la teneur du procès-verbal, il est, à la fois, un concordat simple, moyennant 10 p. 100 de dividende, et un concordat par abandon; que la masse, en cas de liquidation judiciaire, est représentée par le liquidé, assisté de son liquidateur, alors même qu'elle exerce un droit propre; que les appelants l'ont, du reste, si bien compris qu'ils ont interjeté appel à la double requête de Mareschal, liquidateur, et de Carron, liquidé; qu'à ce point de vue, la sommation de produire est nulle, comme faite par une personne sans qualité:

Sur le troisième point: Attendu que les appelants prétendent que les intimés ne sont ni recevables ni fondés à conclure à la nullité de la procédure d'ordre ellemême, parce que, d'une part, ils ont comparu durant toute la procédure, parce que, d'autre part, le liquidateur peut requérir seul l'ouverture de l'ordre, et que le liquidé a été régulierement mis en cause, conformément à l'art. 6, § 2, de la loi de 1889;

Attendu que l'exception tirée du défaut de qualité est susceptible d'être opposée en tout état de cause; que les arrêts anciens invoqués par les appelants concernent des hypothèses absolument différentes de l'espèce actuelle; que, d'un autre côté, si le liquidateur peut prendre seul l'inscription de l'art. 490, C. comm., c'est qu'il est autorisé par le texte formel de l'art. 4 de la loi de 1889; que l'on ne peut assimiler la procédure d'ordre, qui est une véritable instance, à un acte conservatoire, comme l'inscription de l'hypothèque légale de la masse; que l'art. 6, § 2, de la loi de 1889 est inapplicable; qu'il suppose, en effet, le refus du débiteur, refus qui n'est même pas allégué; Par ces motifs; Confirme, etc.

Du 10 juill. 1912. C. Besançon, Ire ch. - MM. Brellmann, prés. ; Casteíl, av. gén.; Georges Pernot et Cornet, av.

justifié que le liquidé eût refusé de demander l'ouverture de l'ordre.

(1) Sur le principe que la fin de non-recevoir, tirée du défaut de qualité pour agir, peut être opposée en tout état de cause, V. Limoges, 22 janv. 1900 (S. et P. 1903.2.135), et les renvois. Adde, comme applications, Nancy, 25 nov. 1905 (S. et P. 1906.2.264); Trib. de Liége, 29 nov. 1910 (Infra, 4o part., p. 5).

BUREAU D'ASSIST. JUDIC. PRÈS LA COUR DE PARIS 12 janvier 1912. ASSISTANCE JUDICIAIRE, BUREAU DU DOMICILE, BUREAU DU LIEU DU LITIGE, RENSEIGNEMENTS, INSUFFISANCE DES RESSOURCES, DECISION (ABSENCE DE), APPEL (Rép., Suppl., V Assistance judiciaire, n. 41 et s.; Pand. Rép., Suppl., eod. verb., n. 10 et s.).

En matière d'assistance judiciaire, le bureau du domicile de la personne qui réclame l'assistance devant, aux termes de l'art. 8 de la loi du 22 janv. 1851. modifié par la loi du 10 juill. 1901, lorsqu'il n'est pas, en même temps, celui établi près de la juridiction compétente pour statuer sur le litige, se borner à recueillir des renseignements tant sur l'état des ressources de l'impétrant que sur le fond de l'affaire, et à les transmettre, n'a pas de décision à rendre (1) (LL. 22 janv. 1851, art. 8: 10 juill. 1901).

(1-2-3) Lorsque le bureau d'assistance judiciaire du domicile de l'impétrant « n'est pas, en même temps. celui établi près la juridiction compétente pour statuer sur le litige », l'art. 8 de la loi du 22 janv. 1851 (S. Lois annotées de 1851, p. 10. P. Lois, dier., etc. de 1851, p. 14), aujourd'hui comme autrefois, avant la loi du 10 juill. 1901 (S. et P. Lois annotées de 1901, p. 209; Pand. pér., 1902.3.129), qui l'a complété, définit son rôle en disant qu'« il se borne à récueillir des renseignements tant sur l'insuffisance des ressources que sur le fond de l'affaire. Il peut entendre les parties. Si elles ne se sont pas accordées, il transmet, par l'intermédiaire du procureur de la République, la demande, le résultat de ses informations et les pièces au bureau établi près de la juridiction compétente ».

Il semble en résulter, de la façon la plus claire (V. au surplus, l'art. 11, alin. 1), que le bureau du domicile n'a, en pareil cas, d'autre fonction que celle d'un office de renseignements, qu'il n'a pas de décision à prendre, et qu'on ne peut pas, par conséquent, même sous l'empire de la loi du 4 déc. 1907 (S. et P. Lois annotées de 1908, p. 642. Pand. pér., Lois annotées de 1908, p. 642), critiquer son œuvre, par voie d'appel devant un bureau supérieur. C'est la solution adoptée, dans l'espèce ci-dessus rapportée, par le bureau installé près la Cour d'appel de Paris. Et nous l'approuvons, en dépit des objections qu'elle soulève.

1. La première est tirée des travaux préparatoires de la loi du 4 déc. 1907.

Certains bureaux d'assistance judiciaire, chargés, en qualité de bureaux du domicile de l'impétrant, de recueillir des renseignements sur son état d'indigence, out, depuis longtemps, pris l'habitude de formuler, sur sa situation de fortune, un avis qu'ils communiquent, en même temps que les pièces justificatives, au bureau établi près de la juridiction compétente. Cette pratique irrégulière s'est maintenue, malgré les efforts de la Chancellerie qui la condamne (V. Circ. min. just., 15 déc. 1879, Bull. off. min. just., 1879, p. 265), à Paris en particulier, comme la présente affaire en témoigne; et c'est elle qui, probablement, a jeté le trouble dans l'esprit des rédacteurs de la loi du 4 déc. 1907.

Au cours de la discussion à la Chambre, un député, M. Perroche, le rapporteur, M. Drelon, le garde des sceaux, M. Guyot-Dessaigne, ont successivement affirmé que le bureau du domicile, lorsqu'il formule son opinion sur la question d'indigence, rend une décision, décision qui, par application de l'art. 12, nouveau, de la loi de 1851, a besoin d'être motivée. V. S. et P. Lois annotées de 1908, p. 643, ANNÉE 1913. 4 cah.

Et, s'il croit devoir émettre l'avis que l'insuffisance des ressources de l'impetrant ne lui parait pas établie, cet avis ne saurait être considéré comme une décision entrainant un refus d'assistance, puisque le pouvoir de statuer appartient au bureau établi près la juridiction compétente pour statuer sur le litige, lequel reste entièrement libre dans l'appréciation des faits et renseignements qui lui sont transmis tant sur les ressources que sur le fond (2) (LL. 22 janv. 1851, art. 11; 10 juill. 1901).

Dès lors, cet avis n'est pas susceptible d'appel (3) (LL. 22 janv. 1851, art. 12; 10 juill. 1901; 4 déc. 1907, art. 2, § 2).

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2 col., note 3; Pand. pér., Lois annotées de 1908, p. 643, 2° col., note 3. Ne faut-il pas en déduire que cette décision, à l'instar de celles qui accordent ou refusent le bénéfice de l'assistance, est susceptible d'appel de la part du procureur de la République, dans les termes de l'art. 2, § 2, de la loi du 4 déc. 1907? V. sur ce droit d'appel, notre Rép. gen. du dr. fr., vo Assistance judiciaire, n. 110 et s., et Suppl., eod. verb., n. 73 et s.; Pand. Rép., Suppl., vo Assistance judiciaire, n. 10 et s. V. aussi la note 4-5 sous Aix, 17 juill. 1902 (S. et P. 1904.2.212).

Cette conclusion serait sans doute bonne, si les prémisses étaient exactes. Mais les prémisses sontelles exactes? Les auteurs de la loi de 1907 n'anraient-ils pas, tout simplement, été victimes d'une confusion? On est au moins tenté de le croire. Et ce n'est pas, dans tous les cas, d'une discussion aussi trouble, où l'on voit le garde des sceaux, à quelques secondes d'intervalle, exprimer deux pensées contraires (S. et P. Lois annotées de 1908, loc. cit.; Pand. pér., Lois annotées de 1908, loc. cit.), qu'on peut tirer argument, à l'encontre d'un texte aussi précis et aussi net que l'art. 8 de la loi de 1851.

-

II. Il convient pourtant de reconnaître c'est une seconde objection · qu'en écartant l'appel, on s'expose à d'assez graves embarras. Car cette idée, d'après laquelle le bureau du domicile, lorsqu'il se prononce sur la question d'indigence, rendrait une vraie décision, ne s'est pas glissée seulement dans l'esprit du législateur : les bureaux d'assistance, euxmêmes, l'ont prise pour guide de leur conduite, et c'est ainsi que, dans l'espèce, le bureau établi près de la juridiction compétente, le tribunal de Bordeaux, avait refusé de statuer et mis l'affaire hors de son rôle, se considérant comme lié par l'avis du bureau de la Seine.

Comment, en pareille hypothèse, trancher la difficulté? S'il n'y a de décision rendue, ni par le bureau du domicile, ni par celui installé près de la juridiction compétente, la conséquence sera-t-elle qu'il n'y aura pas de recours possible, que le bnreau du domicile, qui n'avait même pas qualité pour statuer en premier ressort, jugera, en fait, en dernier ressort?

Si cette solution s'imposait, il faudrait avouer qu'il y a dans la loi une lacune. Mais nous ne sommes pas sûr qu'elle s'impose.

Essayons de trouver une échappatoire.

Le bureau établi près le tribunal de Bordeaux a commis un déni de justice. Ce déni de justice, sans doute, ne donne pas ouverture à l'appel : l'appel comme de déni de justice, en droit moderne, a dis

quelles ils défèrent au bureau une délibération du bureau de la Seine du 21 juin 1911, prise sur la demande d'assistance de M. L..., afin d'introduire une instance devant le tribunal de première instance de Bordeaux; Considérant, en principe,. qu'aux termes de l'art. 8 de la loi du 22 janv. 1851, modifiée par la loi du 10 juill. 1901, sur l'assistance judiciaire, le bureau, qui est appelé seulement à prendre des renseignements tant sur l'état des resSources que sur le fond de l'affaire et à les transmettre, n'a pas de décision à rendre; que, s'il croit devoir émettre l'avis que l'insuffisance des ressources ne lui paraît pas établie, cet avis ne saurait être considéré comme une décision entrainant un refus d'assistance, puisque le pouvoir de statuer appartient à un autre bureau, qui reste entièrement libre, dans l'appréciation des faits et renseignements

paru (Cf. Merlin, Rép., v° Deni de justice, n. 4; et notre Rép. gén, du dr. fr., vo Déni de justice, n. 39). Mais, par un détour, il est possible d'arriver au résultat même auquel conduirait cet appel.

La doctrine dit: Lorsqu'un tribunal ne veut pas juger, tout doit se passer comme s'il ne pouvait pas juger (V. spécialement, Merlin, op. et loc. cit.). Et la procédure à suivre est, sinon celle du règlement de juges (Cf. Glasson, Précis de proc. civ., 2 éd., par Tissier, t. 1o, n. 898), du moins une procédure calquée sur celle du règlement de juges (C. proc., 363 et s.). On s'adresse au tribunal supérieur, qui renvoie l'affaire devant un tribunal de même ordre et de même degré que le tribunal originaire.

Si l'on s'en tenait à ces principes, on déciderait, dans notre espèce, qu'il fallait saisir le bureau d'appel établi près la Cour de Bordeaux, pour que ce bureau, à son tour, chargeât de statuer sur la demande l'un des bureaux d'arrondissement compris dans le ressort de la Cour. Comp. pour le cas où un bureau se trouve dans l'impossibilité de se constituer par suite d'abstentions, Bureau d'assist. judic. de Pan, 9 août 1881 (S. 1882.2.67. - P. 1882.1.347). Adde, Garsonnet, Tr. de proc., 2o éd., par Cézar-Bru, t. 2, p. 253, note 3.

Mais, ces principes, la loi du 4 déc. 1907 paraît les avoir, en matière d'assistance judiciaire, implicitement modifiés. Ses auteurs, interprétant mal la jurisprudence antérieure, ont cru que, dans le cas où i bureau du premier degré, pour une raison ou pour une autre, ne pouvait statuer, c'était le bureau du second degré, qui, lui-même, sans renvoi, statuait, à sa place, définitivement (V. les observations de M. Legrand au Sénat, S. et P. Lois annotées de 1908, p. 644, note 12; Pand. pér., Lois annotées de 1908, p 644, note 12). Et c'est le système que, dans l'alin. 8, ajouté à l'art. 12 de la loi de 1851 par la loi du 4 déc. 1907, ils ont consacré dans les rapports des bureaux d'appel et assimilés, d'une part, et du nouveau bureau supérieur établi près de la Chancellerie, d'autre part. Le même systéme, logiquement, doit fonctionner dans les rapports des bureaux de première instance et d'appel.

Qu'en conclure, sinon que le bureau établi pres la Cour d'appel de Bordeaux avait, dans l'espèce, qualité pour corriger l'erreur commise par le bureau de première instance?

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qui lui sont transmis tant sur les ressources que sur le fond; que cela résulte de l'art. 11 de la loi, qui donne au bureau établi près le tribunal du litige la faculté de prendre toutes les informations nécessaires pour s'éclairer sur l'état des ressources du demandeur, si l'instruction de l'affaire par le bureau du domicile de ce dernier ne fournit pas, à cet égard, des documents suffisants; Considérant qu'aucune modification n'a été apportée auxdits art. 8 et 11 de la loi du 10 juill. 1901 par celle du 4 déc. 1907, tendant uniquement, d'après son titre même, à compléter les art. 3 et 12 de cette loi; que la modification apportée à l'art. 12 a consisté à obliger les bureaux à donner les causes des décisions refusant d'accorder le bénéfice sollicicité; qu'il ne peut s'agir que des décisions à prendre par les bureaux du lieu du litige, seuls compétents pour accorder ou refuser l'assistance judiciaire, et non d'avis sur l'état des ressources, émis par les bureaux du domicile, uniquement saisis de la mission d'instruire, mais non de solutionner les demandes d'assistance judiciaire; Considérant, en fait, que M. L... a, dans le courant de juin 1910, fait une double demande d'assistance, pour faire appel devant la Cour de Bordeaux, et pour introduire une instance devant le tribunal de cette ville; - Considérant qu'à la date du 21 juin 1911, le bureau d'assis tance de la Seine, saisi de cette double demande, conformément à l'art. 8 nouveau de la loi du 22 janv. 1851, après s'être déclaré incompétent, a fait une double transmission au bureau près la Cour et au bureau près le tribunal de Bordeaux, en indiquant, dans chacun des procès-verbaux de transmission, qu'il estimait que l'insuffisance des ressources n'était pas établie;

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(1-2) C'est un principe certain que le bâtonnier de l'ordre des avocats est recevable à intervenir dans une instance, au nom de l'ordre qu'il représente, lorsque l'honneur ou les intérêts de l'ordre l'exigent. V. Bordeaux, 23 févr. 1910, sous Cass, 30 juin 1910 (S. et P. 1912.1.33; Pand. pér., 1919.1.33); Garsonnet, Tr. de proc., 2o éd., par Cézar-Bru, t. 1o, § 264, p. 440; et notre Rép. gén. du dr. fr., v Arocat, n. 695 et s.; Pand. Rep., eod. verb., n. 1564 et s. Adde, comme application en matière répressive, Chambéry, 20 juill. 1872 (S. 1874.2.89. P. 1874.456). V. au surplus, sur les pouvoirs du bâtonnier pour soutenir les intérêts de l'ordre, Montpellier, 28 janv. 1884 (motifs) (S. 1885.2.52. - P. 1885.1.324).

(3 à 6) La question de savoir si, lorsqu'une partie n'use pas du droit à elle conféré par l'art. 85, C. proc., de se défendre elle-même, elle peut en charger une personne autre qu'un avocat ou un avoué, est controversée. La Cour de cassation, dans un arrêt ancien, a admis un fils, qui n'était

que le fait, par le bureau de Bordeaux, seul compétent pour statuer, comme étant celui du litige, de ne pas avoir pris la décision sur la demande de M. L..., en se considérant comme lié par l'avis du bureau de la Seine, ne saurait donner à cet avis le caractère d'une décision, que ce bureau n'avait pas le pouvoir de prendre;

Considérant que c'est cependant contre cet avis, considéré comme une décision de rejet, que le bureau de la Cour est saisi, par voie de pourvoi tendant à réformation;

Mais considérant qu'en l'espèce, il ne peut y avoir matière à réformation de l'avis, du reste irrégulièrement formulé, du bureau de la Seine, saisi de la demande de M. L... pour introduire une instance devant le tribunal de Bordeaux, cet avis ne pouvant être considéré comme une décision de refus d'assistance judiciaire; Par ces motifs; Décide qu'il n'y a pas

lieu de statuer.

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TRIB. DE LORIENT 12 décembre 1911. 1o AVOCAT, BATONNIER, ACTION EN JUSTICE, INTERVENTION, INTÉRÊTS DE L'ORDRE (Rép., vo Avocat, n. 695 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 1564 et s.). - 20 DEFENSE (JUSTIFICATIVE)-DÉFENSEUR, DÉFENSE PAR LA PARTIE, ETAT (L'), Ministre de la marine, DIRECTEUR DES TRAVAUX HYDRAULIQUES, DÉLÉGATION (Rép., v° Défense-Défenseur, n. 62 et s.; Pand. Rép., vo Avocat, n. 928 et s.).

1o Le bâtonnier des avocats inscrits près d'un tribunal ou d'une Cour est recevable à intervenir dans une instance, lorsque les intérêts de l'ordre sont en jeu (1) (Ordonn., 20 nov. 1822, art. 9).

Spécialement, le bâtonnier est recevable à intervenir dans une instance introduite contre l'Etat, à l'effet de contester à un fonctionnaire qui représente l'Etat, le droit de plaider (2) (Id.).

2o Si, aux termes de l'art. 85, C. proc., les parties, assistées de leurs avoués, peuvent se défendre elles-mêmes, elles ne peu

pas avocat, à soutenir devant elle le pourvoi de sa mère contre un arrêt qui avait prononcé contre elle la séparation de corps. V. Cass. 8 nov. 1830 (S. et P. chr.). Adde, Bioche, Dict. de proc., v Defense, n. 30. Mais l'opinion la plus généralement admise, à laquelle se range le jugement ci-dessus recueilli, décide, au contraire, que la partie, qui ne se défend pas elle-même, ne peut confier sa défense qu'à un avocat ou à un avoué. C'est ce que la Cour de cassation a elle-même décidé, par un arrêt du 22 août 1822 (S. et P. chr.). Et la doctrine se prononce également en ce sens. V. Chauveau sur Carré, Lois de la proc., t. 1°, quest. 420; Boitard et ColmetDaage, Leg. de proc., 15o éd., par Glasson, n. 224; Rousseau et Laisney, Dict. de proc., v° Défense, 1. 8; Garsonnet, Tr. de proc., 2o éd., par Cézar-Bru, t. 2, § 687; notre C. proc. annoté, par Tissier, Darras et Louiche Desfontaines, sur l'art. 85, n. 29; et notre Rép. gén. du dr. fr., v" Defense-Défenseur, n. 62 et s.; Pand. Rep., v° Arocat, n. 928 et s. L'application de cette solution, au cas où l'Etat est

vent se faire représenter par un mandataire (3) (C. proc., 85).

Il ne saurait être fait aucune exception à cette règle, même à l'égard de l'Etat, qui ne peut agir que par ses représentants légaux (4) (Id.).

Et l'Etat, en ce qui concerne le service de la marine, n'a d'autres représentants légaux, en dehors du ministère public, que le ministre de la marine, et, dans chaque arrondissement maritime, le vice-amiral préfet maritime (5) (Id.).

En conséquence, le directeur des travaux hydrauliques d'un port ne saurait être admis, même en vertu d'une délégation du ministre, à présenter des observations, au nom de l'Etat, dans une instance en indemnité pour accident du travail, formée contre l'Etat par un ouvrier du service des travaux hydrauliques (6) (Id.).

(Le Gouellec, bâtonnier de l'ordre des avocats de Lorient C. Directeur des travaux hydrauliques du port de Lorient).

JUGEMENT.

LE TRIBUNAL; Attendu que le sieur Jan, ouvrier en régie à l'arsenal de Lorient, service des travaux hydrauliques, prétendant, au cours de son travail, avoir été victime, les 24 juill. et 13 oct. 1910, d'accidents qui lui auraient occasionné une incapacité permanente partielle, a, suivant exploit de Le Corre, huissier à Lorient, en date du 25 juillet dernier. assigné M. le ministre de la marine, représentant l'Etat, en la personne de M. le directeur des travaux hydrauliques à Lorient, en paiement, notamment, d'une pension annuelle et viagère, en vertu de la loi du 9 avril 1898, sur les accidents du travail; - Attendu que, l'affaire ayant été appelée à l'audience du 5 de ce mois, M. le directeur des travaux hydrauliques a demandé à présenter quelques observations relativement à cette affaire, au nom de M. le ministre de la marine; Attendu qu'aussitôt est intervenu Me Le Gouellec. bâtonnier de l'ordre des avocats de Lorient, au nom du barreau de cette ville, lequel, après avoir exposé que nul ne peut p'aider que pour sa propre cause, à moins qu'il ne soit avocat, que la seule partie en cause est l'Etat, en la personne

partie dans une instance, doit-elle conduire à décider que, seuls, les représentants légaux de l'Etat penvent invoquer la disposition de l'art. 85, C. proc., pour présenter des observations orales, et qu'ils ne peuvent déléguer ce droit à un fonctionnaire sous leurs ordres? C'est ce qu'admet le jugement ci-dessus, dans une affaire concernant le ministère de la marine. et dans laquelle le chef de service intéressé avait émis la prétention de présenter des observations orales, en arguant d'une délégation qui lui avait été donnée par le ministre de la marine.

Les auteurs décident, d'ailleurs, d'une manière générale, qu'un fonctionnaire public, qui a compé tence pour représenter l'Etat en justice, ne pent valablement déléguer cette compétence à un autre fonctionnaire non expressément désigné par la loi. V. Duguit, Man. de dr. constitutionnel, p. 443; et L'Etat, les gouvernants et les agents, p. 510 et s.; Jeze, Élém. de dr. publ. et admin., p. 80 et s.: Moreau, Man, de dr. admin., p. 172. n. 160, in fine.

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du ministre de la marine, que, seul, le ministre de la marine pourrait se présenter et plaider, a conclu à ce qu'il plaise au tribunal recevoir l'ordre des avocats intervenant au procès, et dire que l'Etat français ne peut se faire représenter, pour la plaidoirie, que par le ministre assigné ou un avocat; Attendu que, de son côté, Me Le Normand, avoué, au nom de l'Etat français, représenté par M. le directeur des travaux hydrauliques du port de Lorient, a soutenu que l'art. 85, C. proc., permet aux parties, assistées de leurs avoués, de se défendre elles-mêmes: que, dans l'espèce, c'est l'Etat français, c'est-à-dire une entité abstraite, qui est en nom dans la procédure; dès lors, que, sous peine d'être privé de ce droit, qui est reconnu à toutes les parties, il faut nécessairement que l'Etat puisse l'exercer par l'un de ses fonctionnaires dont le choix appartient au ministre, puisqu'il n'est pas limitativement déterminé par la loi; que M. le directeur des travaux hydrauliques au port de Lorient, qui d'ailleurs, étant chef de service, a été assigné comme représentant l'Etat français, a été, au surplus, délégué expressément par M. le ministre de la marine pour représenter l'Etat francais dans la présente instance, et donner à ce tribunal toutes explications utiles, - a conclu à ce qu'il plaise au tribunal : dire que M. le directeur des travaux hydrauliques du port de Lorient, soit qu'il représente l'Etat français dans l'instance pendante, soit qu'il soit délégué par M. le ministre de la marine, sera entendu en ses explications à la présente audience, ou à telles autres qu'il plaira au tribunal de fixer;

Attendu, avant qu'il soit passé outre aux débats, qu'il y a lieu de statuer sur cet incident; Attendu qu'on ne saurait refuser à l'ordre des avocats le droit d'intervenir dans une instance, par l'entremise de son bâtonnier, lorsque ses intérêts sont en jeu; qu'il échet donc de recevoir Me Le Gouellec, ès qualités, en son intervention;

Au fond:

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Attendu qu'aux termes de l'art. 85, C. proc., si les parties, assistées de leurs avoués, peuvent se défendre ellesmêmes, il est d'une jurisprudence constante qu'elles ne peuvent se faire représenter un mandataire; par Attendu que cette disposition est générale, et qu'il n'est fait aucune exception, même à l'égard de l'Etat, qui ne peut agir que par ses représentants légaux; Attendu que l'Etat, en ce qui concerne le service de la marine, a, comme représentant légal, en dehors du ministère public, le ministre de la marine, et, dans chaque arrondissement maritime, un vice-amiral, préfet mari

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(1-2) Il résulte du texte même de l'art. 9 de la loi du 21 vent. an 7 (S. 1 vol. des Lois annotées, p. 493) que les actions, en responsabilité, dirigées contre les conservateurs des hypothèques, peuvent, encore bien que ceux-ci aient cessé leurs fonctions, étre portées devant le tribunal dans le ressort duquel s'est produit le fait générateur de la responsabilité, c'est-à-dire devant le tribunal dans le ressort duquel est établi le siège de la conservation à laquelle ils étaient préposés. V. Aubry et Ran, 5o éd.. t. 3, p. 504, § 268, texte et note 42:

time, commandant en chef;

Attendu, en l'espèce, qu'en dehors du ministère public, M. le ministre de la marine ou M. le préfet maritime à Lorient pourraient seuls intervenir personnellement au procès, mais qu'ils ne sauraient déléguer, à cet effet, même un chef de service sous leurs ordres; - Attendu, en conséquence, que M. le directeur des travaux hydrauliques à Lorient ne saurait être admis, au nom de l'Etat, à présenter ses observations, relativement à l'action intentée contre lui par le sieur Jan; - Par ces motifs; Admet Me Le Gouellec, ès qualité, en son intervention; - Au fond: Dit que M. le directeur des travaux hydrauliques à Lorient ne peut être admis à se présenter, au nom de l'Etat, dans l'instance engagée contre ce dernier par le sieur Jan; Renvoie à une audience ultérieure pour être plaidé au fond, lorsque l'Administration de la marine sera régulièrement représentée; etc.

Du 12 déc. 1911. Trib. civ. de Lorient. M. Donadieu, prés.

TRIB. DE VERSAILLES 26 juin 1912. CONSERVATEUR DES HYPOTHÈQUES, ACTION EN RESPONSABILITÉ, COMPÉTENCE, CESSATION DE FONCTIONS, TRIBUNAL DU RESSORT DE LA CONSERVATION, BUREAU DES HYPOTHÈQUES, TRIBUNAL DU DOMICILE (Rép., V° Conservateur des hypothèques, n. 506 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 761 et s.). Le conservateur des hypothèques, qui a cessé ses fonctions, peut être assigné en responsabilité, au choix du demandeur, soit, en vertu de l'art. 9 de la loi du 21 vent. an 7, devant le tribunal dans le ressort duquel est située la conservation des hypothè ques à laquelle il était préposé, soit devant le tribunal du ressort où il a transféré son domicile depuis la cessation de ses fonctions (1) (C. proc., 59; L. 21 vent. an 7, art. 9).

En effet, si la loi du 21 vent. an 7 prolonge, après la cessation des fonctions, et pour l'exercice de l'action en responsabi lité, le domicile de droit du conservateur des hypothèques au lieu où il exerce ses fonctions, c'est, non dans l'intérêt du conservateur des hypothèques, mais dans l'intérêt des demandeurs en responsabilité (2) (Id.).

(Lelièvre et Bureau C. Epoux Raynes).

JUGEMENT.

LE TRIBUNAL; Attendu que les époux Raynes ont, le 1er juill. 1911, assigné devant le tribunal civil de Versailles les sieurs Lelièvre, notaire à Bourges,

Baudry-Lacantinerie et de Loynes, Des priv. et hyp., 3 éd., t. 3, n. 2621, texte et note 1; Guillouard, Tr. des priv. et hyp., t. 3, n. 1072; Boulanger, Tr. des radiations hypothécaires, 3o éd., par de Récy, t. 2, n. 742; et notre Rép. gen. du dr. fr., ° Conservateur des hypothèques, n. 506; Pand, Rép., eod. verb., n. 761. Adde, comme application, Rouen, 7 nov. 1826 (P. chr.). Mais on s'accorde à reconnaître que cette compétence exceptionnelle, ayant été établie dans l'intérêt du demandeur en responsabilité et pour qu'il n'ait pas à rechercher

et Bureau, ancien conservateur des hypothèques à Bourges, leur réclamant 50.000 fr. de dommages-intérêts, en raison du préjudice qui leur aurait été causé par ces faits que Lelièvre aurait reçu, le 10 juin 1897, en son étude, un acte contenant mainlevée d'une inscription hypothécaire, prise à leur profit le 21 sept. 1894, au bureau des hypothèques de Bourges, sur des immeubles appartenant aux époux Oudet, pere et mère de la dame Raynes, et que Bureau aurait radié ladite inscription hypothécaire; Attendu que Lelièvre et Bureau opposent à la demande une exception d'incompétence; que Lelièvre soutient qu'étant domicilié à Bourges, il aurait dû être cité devant le tribunal de cette ville, et que Bureau, quoique domicilié actuellement à Versailles, soutient qu'aux termes de l'art. 9 de la loi du 21 vent. an 7 il a son domicile de droit à Bourges; - Attendu que l'exception invoquée par Lelièvre ne peut être admise que s'il est décidé que celle invoquée par Bureau est admissible; qu'en effet, aux termes de l'art. 59, C. proc., lorsqu'il y a plusieurs défendeurs, le demandeur peut, à son choix, les assigner devant le tribunal du domicile de l'un d'eux; Attendu que l'art. 9 de la loi du 21 vent. an 7 est ainsi conçu Les préposés à la conservation des hypothèques auront domicile dans le bureau où ils remplissent leurs fonctions, pour les actions auxquelles leur responsabilité pourrait donner lieu; ce domicile est de droit, il durera aussi longtemps que la responsabilité des préposés. Toutes poursuites à cet égard pourront y être dirigées contre eux, quand même ils seraient sortis de place »; Attendu que Bureau, pour soutenir son exception d'incompétence, se base sur les termes de cet article, d'où il résulte que les préposés à la conservation des hypothèques ont leur domicile dans le bureau où ils remplissent leurs fonetions, et que ce domicile est de droit et doit durer aussi longtemps que leur responsabilité, tandis que les époux Raynes, pour faire rejeter ladite exception, invoquent les termes du même article : « Toutes poursuites à cet égard pourront y être dirigées ; qu'ils prétendent que le mot.

a

pourront signifie qu'ils ont la faculté d'exercer leurs poursuites à l'endroit où le conservateur exerçait ses fonctions, mais qu'ils peuvent aussi agir suivant le droit commun, c'est-à-dire suivant l'art. 59, C. proc.; Attendu qu'il faut entendre par domicile de droit celui pour lequel il n'est pas besoin de faire élection; qu'on comprend fort bien que, pour un fonctionnaire, comme le conservateur des hypothèques, la loi lui impose, comme à bien d'autres,

en quel lieu le conservateur s'est retiré, est facultative pour le demandeur, qui peut, en conséquence, porter son action, s'il le préfère, devant le tribunal du domicile du conservateur ou de ses ayants cause. V. en ce sens, Bruxelles, 4 mai 1820 (P. chr.). Adde, Baudry-Lacantinerie et de Loynes, op. cit., t. 3, n. 2621, texte et note 2; Guillouard, op. cit., t. 3, n. 1073; Boulanger, op. cit., t. 2, n. 743; et notre Rép. gén. du dr. fr., verb. cit., n. 507; Pand. Rep., verb. cit., n. 762. Comp. Ronen, 7 nov. 1826, précité.

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