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Par une lettre écrite directement à M. le préfet du Nord, M. Larue, délégué mineur, de la fosse Gayant des Mines d'Aniche, avait signalé une infraction à la loi sur le repos hebdomadaire, qu'il avait connue en dehors de ses visites réglementaires, et qu'il n'avait pas consignée sur le registre ad hoc, prévu par l'art. 3 de la loi du 8 juill. 1890. Au cours d'une enquête à laquelle il était procédé sur ces faits, le 1er juin 1912, par le contrôleur des mines, l'ingénieur D... adressa à M. Larue les qualifications de « mouchard » et de menteur. Ce dernier, agissant comme partie civile, a poursuivi l'ingénieur devant le tribunal correctionnel de Douai, pour injures et diffamation publiques. L'affaire avait été remise au 17 octobre, lorsque M. Larue s'est désisté; mais le parquet est alors intervenu, en citant M. D..., sous l'inculpation d'outrages à un citoyen chargé d'un ministère de service public, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions. Le tribunal de police correctionnelle a renvoyé M. D... des fins de la poursuite dirigée contre lui.

Appel par le ministère public.

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21 déc. 1906 (S. et P. 1906.1.527; Pand. pér., 1907. 1.78); Nancy, 2 juill. 1907 (S. et P. 1907.2.316), la note et les renvois; Trib. de Senlis, 16 nov. 1909 (S. et P. 1911.2.123; Pand. pér., 1911.2.123), et les renvois de la note.

Pour qu'un ouvrier délégué à la sécurité des ouvriers mineurs puisse être considéré comme un citoyen chargé d'un ministère de service public, au sens de l'art. 224, C. pén., il faut donc qu'il soit établi qu'il détient une portion de l'autorité publique. Or, il paraît bien résulter des textes qui définissent les attributions des délégués mineurs que ce caractère ne peut leur être reconnu. Aux termes de l'art. 120, liv. 2, C. trav., promulgué par la loi du 26 nov. 1912, « des délégués à la sécurité des ouvriers mineurs sont institués pour visiter les travaux souterrains des mines, minières ou carrières, dans le but d'en examiner les conditions de sécurité et d'hygiène pour le personnel qui y est occupé, et, d'autre part, en cas d'accident, les conditions dans lesquelles cet accident se serait produit. Les délégués sont, en outre, chargés de signaler, dans les formes prévues à l'art. 130, les infractions aux dispositions concernant le travail des enfants et des femmes, la durée du travail et le repos hebdomadaire, relevées par eux au cours de leurs visites ».

Cet article a réuni dans un seul texte les dispositions de l'art. 1er de la loi du 8 juill. 1890 (S. et P. Lois annotées de 1891, p. 71; Pand. pér., 1892. 3.1), qui avait institué les délégués mineurs, et des lois subséquentes qui, depuis 1890, avaient considérablement étendu les attributions des délégués mineurs (LL. 13 juill. 1906, art. 11; 23 juill. 1907; 12 mars 1910), en leur confiant un rôle de surveillance, en matière d'hygiène et de salubrité, et en les chargeant de signaler les infractions aux diffé

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nieurs du contrôle; qu'elle a voulu simplement organiser une représentation ouvrière élective, puisant dans l'élection et dans la loi un crédit suffisant pour soumettre aux ingénieurs de l'Etat, concurremment avec les exploitants, toutes les constatations et observations utiles à la sécurité des mines; Attendu, en effet, qu'il résulte de l'économie et des dispositions combinées de cette loi que les attributions essentielles des délégués mineurs sont les suivantes : 1° d'après l'art. 1er, visiter le fond de la mine et examiner les travaux souterrains en vue de la sécurité du personnel, ou, en cas d'accident, les conditions dans lesquelles il se serait produit; 2° d'après l'art. 3, consigner les observations relevées dans leurs visites sur un registre spécial, mis à la disposition des ouvriers, dans une colonne en regard de laquelle s'en trouve une autre, destinée aux observations corrélatives des exploitants; Attendu que, peu après la promulgation de la loi, dans une circulaire adressée le 17 févr. 1891 aux préfets, pour préciser la nature exacte de la nouvelle institution, le même ministre des travaux publics, qui avait pris une part active et prépondérante aux travaux préparatoires et à la discussion des textes définitifs, a nettement affirmé que, dans l'intention formelle du législateur, les délégués à la sécurité des ouvriers mineurs étaient, non des agents publics ou officiels de la surveillance, mais de simples visiteurs-rappor teurs», représentants directs de la masse ouvrière, sans aucun lien de subordination

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rentes lois qui réglementent le repos hebdomadaire et la durée du travail.

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Mais, si leurs attributions ont été étendues, leur caractère n'a pas été modifié. Il reste tel que l'avait fixé la loi du 8 juill. 1890. Or, lors de la discussion de cette loi, le caractère de l'institution des délégués mineurs avait été précisé avec soin. Il s'agissait, déclarait M. Baïhaut, rapporteur de la loi à la Chambre des députés, de créer de simples agents d'information (S. et P. Lois annotées de 1891, p. 73). C'est la même définition qu'a donnée, avec plus de développements, une circulaire ministérielle, en date du 17 févr. 1891 (V. le texte de cette circulaire, Rev. de la législ, des mines, 1891, p. 99), qui avait pour objet de mettre fin à des divergences qui s'étaient produites au lendemain de la promulgation de la loi du 8 juill. 1890. Il y était dit que cette loi n'a pas entendu que les délégués à la sécurité des ouvriers mineurs fussent des fonctionnaires publics, des agents officiels de surveillance; que « le délégué n'est pas un agent public de la surveillance, mais seulement un visiteurrapporteur»; qu'« il importe, dans l'intérêt même du fonctionnement de la nouvelle institution, que les délégués restent strictement dans leur rôle de simples visiteurs-rapporteurs ». On voit donc que, dans le système de la loi du 8 juill. 1890, les délégués à la sécurité des ouvriers mineurs ne peuvent pas être considérés comme investis de fonctions publiques. Les lois postérieures n'ont rien changé à ces principes. Le délégué mineur est resté un simple visiteur-rapporteur. Quelle que soit la mission qu'il remplisse, surveillance, constatation d'accidents ou tournées d'inspection, le délégué mineur ne joue qu'un rôle passif. Il n'a aucun ordre à donner, et doit se borner à faire des constatations et à consigner sur un registre spécial les observations et

vis-à-vis les agents de l'Administration; - Attendu que rien, dans les travaux préparatoires de la loi de 1890, ne parait aller à l'encontre d'une déclaration aussi autorisée; que, bien au contraire, on voit se faire jour, dans le Parlement, la constante préoccupation de ne pas donner aux délégués mineurs la qualité officielle d'agents du pouvoir, susceptible de les rendre suspects aux yeux de leurs commettants; que, notamment, dans cet ordre d'idées, il est impossible de ne pas remarquer que les premiers projets, conférant aux délégués mineurs le droit de dresser un procès-verbal de leurs visites réglementaires, ont été abandonnés et remplacés par un texte définitif, qui, au procès-verbal, exclusivement réservé pour les agents assermentés et dépositaires de l'autorité, substitue la simple consignation d'observations sur le registre spécial de la mine fourni par l'exploitant, avec droit de réponse pour ce dernier, mettant ainsi sur un pied d'égalité parfaite, à l'égard du contrôle, les représentants élus de la masse ouvrière et ceux du patronat; Attendu que, si le législateur de 1890, justement préoccupé d'assurer la marche régulière de la nouvelle institution, a établi : 1o les sanctions pénales de l'art. 17, contre tous ceux qui apporteraient une entrave à son libre exercice; 2o les sanctions disciplinaires de l'art. 15, contre les délégués eux-mêmes, qui, par leur négligence ou leurs abus, compromettraient leur fonction, ces dispositions pénales et disciplinaires s'expliquent et se justifient par le grand intérêt

les critiques qui lui paraissent légitimes. V. Bry, Cours élém. de législ. industr., 5° éd., n. 576; Riston, De l'institution des délégués à la sécurité des ouvriers mineurs (Rev. de la législ. des mines, 1891, p. 129); et notre Rép. gen. du dr. fr., v° Mines, minières ou carrières, n. 1579; Pand. Rép., eod. verb., n. 3630.

En présence même d'une infraction à des dispositions légales, il doit se borner à la signaler sur le registre spécial; il ne peut en dresser procèsverbal (arg. art. 120, liv. 2, C. trav.). C'est l'ingénieur des mines qui reste seul chargé d'apprécier si les faits signalés constituent des infractions aux lois, et si l'action répressive doit être exercée. V. le rapport de M. Richard au Sénat sur la loi du 12 mars 1910 (S. et P. Lois annotées de 1910, p. 1042, note 2; Pand. pér., Lois annotées de 1910, p. 1042, note 2).

On ne saurait donc assimiler le délégué mineur à un fonctionnaire, comme l'inspecteur du travail, qui a qualité pour dresser procès-verbal des contraventions qu'il constate, et qui doit être considéré comme un citoyen chargé d'un ministère de service public, aux termes de l'art. 224, C. pén. V. pour un inspecteur du travail des enfants, Paris, 15 mai 1885 (Rec. Gaz. Pal., 1885.1.697); et notre C. pén. annoté, par Garçon, sur les art. 222 à 225, n. 486. La situation des délégués à la sécurité des ouvriers mineurs peut, plus justement, être comparée à celle de certaines personnes qui exercent des fonctions auxquelles un intérêt public est attaché, mais qui, n'étant investies d'aucune portion de l'autorité publique, ne peuvent être, pour l'application de l'art. 224, C. pén., considérées comme des citoyens chargés d'un ministère de service public. V. spécialement pour les dames employées au service des téléphones, Cass. 11 févr. 1905, précité, et la note de M. Roux.

public et social qui détermine toutes les mesures capables d'accroître les garanties de la sécurité des mines; mais qu'il ne suffit pas qu'un intérêt public s'attache à un service ou à une fonction pour que celui qui l'exerce devienne nécessairement un agent délégataire de partie de la puissance publique, ou un citoyen chargé d'un ministère de service public; que, bien au contraire, suivant la recommandation expresse du ministre des travaux publics, «il importe au bon fonctionnement dé l'institution que les délégués restent strictement dans leur rôle de simples visiteursrapporteurs, et n'essaient pas de se transformer en agents publics de la surveillance (Circ. minist., 17 févr. 1891, précitée); Attendu que le caractère essentiel de l'institution, ainsi défini, ne saurait être modifié et altéré par la vocation légale éventuelle du délégué mineur à la mission d'expert, prévue dans l'art. 14 de la loi du 8 juill. 1890, pour le cas particulier de la fermeture d'une mine; que cette éventualité exceptionnelle ne s'est pas, d'ailleurs, réalisée, et que ce n'était pas en qualité d'expert que le délégué Larue était descendu dans la mine, au moment où il a été visé et atteint par les propos incriminés; Attendu, d'autre part, que, si les lois du 13 juill. 1906 et du 12 mars 1910 ont chargé les délégués mineurs de signaler également les infractions relatives au repos hebdomadaire, à l'âge des ouvriers, et à la durée du travail journalier, cette extension de leurs attributions à des prescriptions d'hygiène ouvrière complémentaire des lois sur la sécurité n'a pas eu pour effet de changer les conditions dans lesquelles doit s'accomplir leur mission, toujours régie par la loi fondamentale de 1890; Attendu que cette appréciation, en harmonie avec les textes et les intentions formelles du législateur, se trouve nettement confirmée par l'avis du conseil général des mines, et les instructions subséquentes du ministère du travail, qui, dans sa circulaire du 20 mai 1911, insiste, à plusieurs reprises, sur cette idée que, pour remplir la mission dont ils sont investis par les lois de 1906 et de 1910, les délégués ne doivent jamais perdre de vue les principes directeurs de la loi du 8 juill. 1890; qu'ainsi, au sens de cette circulaire, les délégués mineurs, après comme avant les lois nouvelles de 1906 et de 1910, restent les simples visiteurs-rapporteurs définis par le ministre des travaux publics, représentants élus des mineurs, sans caractère officiel, également éloignés de tout ministère de service public

(1-2) L'arrêt ci-dessus recueilli fait application du principe d'après lequel, si les juges sont obligés d'admettre les reproches énumérés dans l'art. 283, C. proc., et ne peuvent les repousser d'une façon arbitraire, il leur appartient de vérifier en fait si la cause du reproche existe, et si elle se présente dans des conditions telles qu'ils doivent l'admettre. V. Cass. 28 oct. 1896 (S. et P. 1900.1.411; Pand. per., 1900.7.150), et le renvoi. On peut rapprocher de la présente décision un arrêt de la Cour d'appel de Liége, du 9 août 1841 (cité à notre Rép. gén, du dr. fr., vo Enquête, n. 802), d'a

et de toute subordination aux agents de l'Administration; - Attendu que les interprétations concordantes des deux ministères plus spécialement compétents n'ont soulevé aucune protestation ni critique dans les milieux ouvriers, plutôt disposés à craindre de voir leurs représentants librement élus se transformer en agents du pouvoir, et perdre tout ou partie de leur indépendance par une affiliation plus ou moins étroite à la hiérarchie administrative minière; que telle était assurément la pensée du délégué Larue lui-même, lorsqu'il prenait tout d'abord l'initiative de citer personnellement l'ingénieur D... devant le tribunal correctionnel, pour des délits de diffamation et d'injures publiques, poursuites dont il s'est désisté, parce qu'un élément essentiel des délits, la publicité, semblait faire défaut, et qui ont fait place à l'action directe du parquet pour outrages, dont la Cour se trouve régulièrement saisie par l'appel du ministère public; Par ces motifs; Confirme; renvoie D... des fins de la poursuite, etc. Du 28 janv. 1913. C. Douai, ch. corr. - MM. Febvret, prés.; Fieffé, av. gén.; de Prat, av.

RENNES 23 novembre 1911. TÉMOINS EN MATIÈRE civile, Reproche, REPAS DE BAPTÊME, USAGE LOCAL (Rép., vo Enquête, n. 802 et s.; Pand. Rép., vis Enquêtes, n. 1100 et s., Témoins, n. 660 et s., 674).

Ne peuvent être reprochés, comme ayant bu et mange avec la partie et à ses frais depuis la prononciation du jugement ordonnant l'enquête, dans les termes de l'art. 283, S2, C. proc., les témoins qui ont pris part, chez la partie, à un festin de baptême, alors que, dans les usages du pays, les repas de ce genre sont largement ouverts aux parents, aux amis el aux voisins (1) (C. proc., 283). Et alors d'ailleurs que la coutume impose aux invités, aux repas de baptême, de faire un cadeau en nature ou en argent à ceux qui donnent le repas, en sorte qu'ils ne peuvent être considérés comme ayant bu et mangé aux frais de ceux-ci, au sens de l'art. 283, C. proc. (2) (Id.).

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près lequel un témoin, qui, depuis plusieurs années, et chaque fois qu'il était en relations de commerce avec la partie qui veut le faire entendre, était obligé de prendre ses repas chez cette partie, ne peut être écarté pour avoir bu et mangé avec elle, si la qualité de ce témoin et sa probité bien connue éloignent tout soupçon de subornation. V. aussi, Cass. 28 oct. 1896, précité. Mais un arrêt de Nancy, 31 janv. 1874 (cité à notre C. proc. annoté, par Tissier, Darras et Louiche-Desfontaines, sur l'art. 283, n. 32), a jugé, en sens contraire de l'arrêt ci-dessus, que le témoin qui a bu et mangé

ouverts aux parents, aux amis et aux voisins; que leur présence, dans ces conditions, à la table de Pierre Gallic, alors que les invitations de cette nature sont réciproques dans toutes les familles du pays, n'a pas le caractère auquel s'attache la sanction prévue par l'art. 283, C. proc.;

Considérant, au surplus, qu'il est reconnu par l'appelant lui-même que, d'après les usages du pays, les invités à un repas de noces paient obligatoirement un prix fixé d'avance, et que les invités à un festin de baptême ne sont pas tenus de payer leur écot en espèces, mais se conConsidétentent de faire un cadeau;

rant que, si ce cadeau, tantôt en nature, tantôt même en argent, n'est pas imposé par la famille qui reçoit, il l'est tout au moins la coutume; par Considérant que cette circonstance doit faire déclarer, avec plus de raison encore, que celui qui a assisté à un festin de baptême n'a pas bu et mangé aux frais de son hôte, dans les termes de l'article susvisé; — Par ces motifs;

Confirme le jugement du tribunal de Quimper du 5 janv. 1911, etc.

Du 23 nov. 1911. C. Rennes, 2o ch. - MM. Canac, prés.; Lacouture, av. gén.; Louvière et Alizon (du barreau de Quimper), av.

PARIS 23 décembre 1912. INSTRUCTION PUBLIQUE, ENSEIGNEMENT SUPERIEUR, DOCTEUR EN DROIT, FACULTÉ ÉTRANGÈRE, USURPATION DE TITRE, DÉLIT (ABSENCE DE) (Rép., v° Instruction publique, n. 735 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 115 et s., 125, 3150 et s.).

Ne constitue pas une infraction punissable le fait, par un candidat à la dépulation, de faire suivre son nom, sur des affiches et des bulletins de vote, du titre de docteur en droit, qu'il ne posséderait pas, ou qui ne lui aurait été délivré que par une Faculté étrangère (3) (L. 18 mars 1880, art. 4, 5 et 8).

En effet, les art. 4 et 5 de la loi du 18 mars 1880, sur la liberté de l'enseignement supérieur, n'ont eu d'autre objet que de limiter les droits des établissements libres d'enseignement supérieur, et de restituer à l'Etat la collation des grades, et les sanctions édictées par l'art. 8 de ladite loi ne sauraient être appliquées, ni au fait d'usurper un titre universitaire, ni au fait de porter un titre conféré par une Faculté étrangère, sans mentionner son origine (4) (Id.).

avec la partie, et à ses frais, depuis le jugement ordonnant l'enquête, peut être reproché, bien qu'il l'ait fait un jour de fête patronale, et en se conformant à un usage local.

(3-4) L'usurpation du titre français de docteur en médecine est prévue et punie par l'art. 20 de la loi du 30 nov. 1892, sur l'exercice de la médecine (S. et P. Lois annotées de 1893, p. 489; Pand. pér., 1894.3.33). Mais l'usurpation du titre fran. çais de docteur en droit, par un individu qui ne possède pas ce titre, ou qui ne l'a reçu que d'une Université étrangère, constitue-t-elle une infraction

(Dabry C. Stern).

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LA COUR; Considérant que, dans son assignation, le sieur Dabry reproche au sieur Jacques Stern d'avoir, au cours d'une période électorale dans l'arrondissement d'Avignon, pris le titre de docteur en droit; que, cependant, Stern ne posséderait que le diplôme de bachelier en droit, et que, s'il à produit un diplôme de docteur, ce titre émane d'une Faculté étrangère; que Dabry soutient que ces faits, qui lui ont causé un dommage, puisqu'il était le compétiteur de Stern aux dites élections, sont prévus et punis par les art. 5 et 8 de la loi du 18 mars 1880; Mais considérant que cette loi n'a eu d'autre objet que de limiter les droits des établissements libres d'enseignement supérieur, tels qu'ils avaient été déterminés par la loi du 12 juill. 1875, et de restituer à l'Etat la collation des grades; qu'aussi, après avoir interdit à ces établissements de prendre le titre d'Université, et spécifié que les certificats d'études qu'ils jugeront à propos de décerner ne pourront porter les titres de baccalauréat, de licence et de doctorat (art. 4), la loi défend, sous les sanctions édictées par l'art. 8, d'attribuer des titres ou grades universitaires à d'autres personnes qu'à celle qui les a obtenus, après les examens ou les concours réglementaires subis devant les professeurs ou les jurys de l'Etat (art. 5); que ce texte, qui doit être interprété restrictivement, comme toutes les dispositions de droit pénal, ne vise ni le fait de recevoir un diplôme décerné par un jury autre qu'un jury d'Etat, ni le fait d'usurper un titre universitaire; qu'à plus forte raison, il est impossible de voir dans ce texte l'interdiction de porter un titre conféré par une Faculté étrangère sans faire suivre cette mention d'une indication particulière; que, si cette interdiction se trouve dans la législation française, c'est dans l'art. 20 de la loi du 30 nov. 1892, pour le titre de docteur en médecine, et que cette disposi

punissable? Spécialement, tombe-t-elle sous l'application des art. 5 et 8 de la loi du 18 mars 1880, relative à la liberté de l'enseignement supérieur, lesquels sont ainsi conçus : « Art. 5. Les titres ou grades universitaires ne peuvent être attribués qu'aux personnes qui les ont obtenus après les examens ou les concours réglementaires subis devant les professeurs ou les juges de l'Etat.

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Art. 8. Toute infraction aux dispositions des art. 4 et 5 de la présente loi sera punie d'une amende de 100 à 1.000 fr., et de 1.000 à 3.000 fr. en cas de récidive »? La Cour de Paris, par l'arrêt ci-dessus reproduit, s'est prononcée pour la négative. Cette solution se fonde surtout sur le principe d'interprétation restrictive des lois pénales, et il faut bien reconnaître, en effet, que l'art. 5 paraît relatif à la collation des grades, et qu'en tout cas, il n'édicte pas, comme l'art. 20 de la loi du 30 nov. 1892 (V. comme application, Paris, 16 janv. 1904, S. et P. 1904.2.216), l'interdiction de porter un titre conféré par une Faculté étrangère, sans faire suivre cette mention d'une indication particulière.

Toutefois, on peut faire valoir, en sens contraire, que les travaux préparatoires de la loi de 1880 révèlent clairement l'intention du législateur de punir

tion légale eût été inutile, si les art. 5 et 8 de la loi du 18 mars 1880 avaient la portée générale que leur attribue le plaignant; Considérant que le jugement entrepris n'a pas statué sur le caractère délictueux ou non des faits qui lui étaient soumis; qu'il y a lieu tout d'abord, pour la Cour, d'examiner ce point de droit; Considérant qu'en conséquence, les faits poursuivis ne constituant pas un délit, les tribunaux répressifs ne sauraient connaître de l'action intentée par M. Dabry; qu'il y a lieu d'infirmer le jugement et, l'affaire étant en état, d'évoquer le fond, conformé ment à l'art. 215, C. instr. crim.; Par ces motifs; - Infirme le jugement dont est appel; Évoque; - Dit que le fait par un candidat de faire suivre son nom, sur des affiches et des bulletins de vote, du titre de docteur en droit, qu'il ne posséderait pas, ou qui ne lui aurait été délivré que par une Faculté étrangère, ne constitue pas un délit, etc.

Du 23 déc. 1912. C. Paris, ch. corr. MM. de Valles, prés. ; Nattan-Larrier et Dabry, av.

PAU 19 mars 1913.

1o ET 3° DERNIER RESSORT, TAXE, ORDONNANCE, OPPOSITION, DOMMAGES-INTÉRÊTS, DÉFENSE A LA DEMANDE PRINCIPALE, CONCLUSIONS NON REPRODUITES AUX QUALITÉS (Rép., vo Appel [mat. civ.], n. 497 et s., 562 et s.; Pand. Rép., v° Appel civil, n. 1663 et s., 1679 et s.). - 2o CONCLUSIONS, QUALITÉS DE JUGEMENT OU D'ARRET, MOTIFS, POINT DE DROIT, CONCLUSIONS NON SIGNÉES, CONCLUSIONS NON SIGNIFIÉES (Rép., vis Conclusions, n. 14 et s., Jugements et arrêts, n. 2518 et s.; Pand. Rép., vo Jugements et arrêts, n. 1652 et s.).

1o Le débiteur, qui forme opposition à une ordonnance de taxe, à lui signifiée par un officier public ou ministériel, n'en doit pas

l'usurpation de titres universitaires, dans des circonstances analogues à celles qui ont donné lieu à l'arrêt ci-dessus reproduit. On lit, en effet, dans l'exposé des motifs de la loi de 1880 : « L'abus que nous voulons réprimer par l'art. 5 est flagrant. Des étrangers et des Français gradués à l'étranger s'attribuent, dans notre pays, des titres à l'aide desquels ils surprennent la confiance publique. S'il est admis qu'en vertu de l'art. 78 de la loi du 15 mars 1850, et des dispositions du décret conforme du 5 décembre de la même année, des équivalences de grades et des autorisations d'enseigner, générales ou limitées, peuvent être accordées à des étrangers, le Conseil supérieur de l'instruction publique entendu, il devient nécessaire de mettre un terme à des usurpations de grade ou de titres qui portent atteinte à l'ordre public » (S. Lois annotées de 1880, p. 520, note 2. P. Lois, décr., etc. de 1880, p. 896-897, note 2). Et le rapport de M. Spuller ajoute Quant aux usurpations de titres, elles sont répréhensibles et punissables; il y a d'ailleurs un intérêt de premier ordre à ne point laisser s'avilir titres et grades décernés par nos Facultés » (S. et P. loc. cit.). Il est certain que l'interprétation adoptée par la Cour de Paris, si elle trouve un très sérieux appui dans le texte même des art. 5 et 8

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moins être considéré comme défendeur dans l'instance, et les dommages-intérêts qu'il réclame, à raison du préjudice que lui cause cette signification, doivent être considérés comme exclusivement fondés sur la demande principale de son adversaire.

Dès lors, ces dommages-intérêts ne peuvent être pris en considération pour la détermination du premier ou dernier ressort (1) (L. 11 avril 1838, art. 1er et 2).

2o L'art. 87 du 1er décret du 16 févr. 1807, portant que les motifs des conclusions né doivent pas être reproduits aux qualités, est toujours en vigueur (2) (1er Décr., 16 févr. 1807, art. 87).

Par suite, pour rechercher si des conclusions ont été présentées devant les juges du premier degré, il faut se reporter aux conclusions, telles qu'elles sont rapportées aux qualités, et au point de droit (3) (L. 11 avril 1838, art. 1er et 2).

On ne saurait prendre en considération un projet de conclusions non signé par l'avoue (4) (Id.).

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Non plus que des conclusions signées par l'avoué, si elles n'ont pas été portées à la connaissance de l'adversaire et du tribunal (5) (Id.).

La signification des conclusions à l'adversaire est, elle-même, sans effet, alors qu'il n'est pas démontré que le tribunal en ait été saisi (6) (Id.).

Seules, en effet, les conclusions prises à l'audience limitent le débat et peuvent être prises en considération pour là détermination du ressort (7) (Id.).

3° Il n'y a donc pas à tenir compte, pour la détermination du taux du ressort, de prétendues conclusions, par lesquelles l'opposant aurait fondé sa demande en dommages-intérêts sur des causes étrangères à la demande principale, si ces conclusions ne sont pas reproduites aux qualités ni dans le point de droit, et si, d'ailleurs, rien dans les motifs du jugement n'établit qu'elles aient été prises et soutenues devant les premiers juges (8) (1er Décr., 16 févr. 1807, art. 87; L. 11 avril 1838, art. 1er et 2).

de la loi de 1880, se concilie moins bien avec les déclarations faites au cours des débats.

(1 à 8) La signification, par un officier public ou ministériel, de l'ordonnance qui taxe ses frais et honoraires, est le premier acte d'une poursuite qui s'annonce; l'officier public ou ministériel prend l'offensive; c'est lui qui est demandeur; il lui appartient de justifier sa demande; le débiteur, auquel la taxe est signifiée, demeure défendeur, bien que ce soit lui qui, par son opposition, ait saisi le tribunal. V. sur le principe, Toulouse, 6 févr. 1907 (S. et P. 1908.2.198; Pand. pér., 1908.2.198), la note et les renvois. Il en est ainsi spécialement, en matière de commandement (V. Toulouse, 6 févr. 1907, précité), de saisie-exécution (V. Cass. 16 août 1864, S. 1864.1.447. P. 1864.1157, et la note), de saisie foraine (V. Cass, 8 août 1860, S. 1861.1.779. - P. 1861.560, et la note), de saisie immobilière. V. Cass. 23 août 1864 (S. 1864.1.447. P. 1864.1157).

Le taux du ressort est donc fixé par la demande, telle qu'elle est formulée par celui qui a fait procéder au commandement ou à la saisie, ou à la signification de l'exécutoire de taxe, et la demande reconventionnelle en dommages-intérêts basée sur le préjudice occasionné par ces poursuites, reposant sur la demande principale, ne modifie pas le taux

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LA COUR; Attendu que, le 21 déc. 1907, une ordonnance de M. le président du tribunal civil de Lourdes taxait les frais et honoraires dus par l'abbé Carrère à Me Dupas, notaire à Argelès; Attendu que, le 6 févr. 1912, Me Dupas faisait signifier cette ordonnance à l'abbé Carrère, et, par le même exploit, constituait, pour le représenter, Me Bert, avoué à Lourdes;

Attendu que, le 25 févr. 1912, l'abbé Carrère formait opposition à cette ordonnance, et constituait Me Combeau, avoué à Lourdes; Attendu que les frais taxés par Me le président du tribunal civil de Lourdes s'élevaient à 1.197 fr. 66; que c'était cette seule somme qui était réclamée par M. Dupas, sous déduction d'une somme de 850 fr., reçue à compte; Attendu que l'abbé Carrère, par ses conclusions d'audience, telles qu'elles sont transcrites aux qualités du jugement dont est appel, offrait à Me Dupas une somme de 21 fr. 21, demandait le rejet du surplus de ses conclusions, et lui réclamait reconventionnellement la somme de 2.000 fr., à titre de dommages-intérêts, pour le préjudice qu'il lui occasionnait; - Attendu que Me Dupas soutient que, bien que l'abbé Carrère ait saisi le tribunal de Lourdes par son opposition, c'est lui Dupas qui est demeuré demandeur, et que, sa demande étant inférieure à 1.500 fr., le jugement entrepris, rendu le 30 avril 1912 par le tribunal civil de Lourdes, est en dernier ressort, la demande reconventionnelle de 2.000 fr. étant fondée sur la demande principale; Attendu que l'officier public où ministériel, qui poursuit contre son débiteur le paiement de sa créance, résultant de l'ordonnance de taxe, est toujours demandeur principal dans l'instance engagée à la suite de la signification de l'ordonnance de taxe, alors qu'il a agi par voie d'exécution parée, et que le tribunal a été saisi par l'opposition du débiteur; Attendu, en effet, que l'opposition formée par le débiteur à l'ordon

du ressort, alors même que, par son chiffre, elle dépasserait le taux du dernier ressort (L. 11 avril 1838, art. 2).

Dans l'espèce, pour prétendre que le litige était en premier ressort, le défendeur alléguait que sa demande en dommages-intérêts était basée sur le préjudice que lui avait occasionné son adversaire par des faits étrangers et antérieurs au procès, en telle sorte que cette demande, portant sur un chiffre de dommages-intérêts supérieur au taux du dernier ressort, avait pour effet de rendre le jugement à intervenir susceptible d'appel. V. Angers, 24 janv. 1911 (S. et P. 1912.2.86; Pand. pér., 1912.2.86); Cass. 24 mai 1911 (S. et P. 1912.1.516; Pand. pér., 1912.1.516); 19 juin 1912 (S. et P. 1912.1. 516; Pand. pér., 1912.1.516), les notes et renvois.

Mais, pour qu'il en pût être ainsi, il aurait fallu que le demandeur établit qu'il avait saisi le premier juge de conclusions donnant à sa demande de dommages-intérêts le caractère allégué. Or, les conclusions qui déterminent le ressort sont les dernières prises à l'audience, et qui limitent le débat, à la condition qu'elles aient saisi le juge. V. Cass. 14 avril 1908 (S. et P. 1911.1.356; Pand.

nance de taxe n'est qu'un moyen de défense tendant à repousser l'action de l'officier public ou ministériel, en la faisant déclarer nulle ou mal fondée; que l'officier public ou ministériel n'en demeure pas moins demandeur, qu'il lui appartient de démontrer le bien fondé de la taxe et de fournir toutes les justifications utiles; Attendu, par suite, que la demande en dommages-intérêts, formée par l'opposant à la taxe, à raison du préjudice que lui a occasionné la signification de cette taxe, a tous les caractères d'une demande reconventionnelle fondée exclusivement sur la demande principale, et qu'elle ne doit pas, dès lors, être prise en considération pour la détermination de la compétence en premier ou en dernier ressort;

Attendu que l'abbé Carrère prétend que, bien que défendeur, son appel est recevable, parce que sa demande en dommagesintérêts n'est pas fondée sur la demande principale, mais sur des faits étrangers au procès; que la cause du préjudice subi, non indiquée dans le dispositif des conclusions, est précisée dans leurs motifs, et que ces motifs expliquent le dispositif et en déterminent le sens et la portée; Attendu que, d'après l'art. 87 du tarif (décret du 16 févr. 1807), toujours en vigueur sur ce point, les qualités ne doivent pas reproduire les motifs des conclusions; que c'est donc à bon droit que ces motifs ne figurent pas aux qualités; Attendu que l'abbé Carrère, qui avait eu le tort de ne pas mentionner la cause de sa demande en dommages-intérêts dans le dispositif de ses conclusions, aurait pu former opposition aux qualités, pour demander que les motifs de ses conclusions figurassent aux qualités, ou pour obtenir que la cause de sa demande de dommages-intérêts fût précisée dans le point de droit; que le litige sur les qualités aurait eu toujours pour effet de faire connaître sur quels motifs il fondait sa demande de dommages-intérêts; tandis que, du dispositif des conclusions tel qu'il est libellé, il résulte que la demande de dommages-intérêts est fondée

per., 1911.1.356), et la note. Et l'on ne peut établir qu'une demande transcrite dans les conclusions a été portée devant les juges, et les a ainsi saisis, que par la reproduction des conclusions dans les qualités du jugement, ou par les mentions insérées au point de droit, ou par les motifs eux-mêmes du jugement, s'ils sont, à ce point de vue, clairs et précis et ne laissent subsister aucun doute. V. Cass. 28 avril 1840 (S. 1840.1.600. P. 1840.2.85); et notre Rép. gen. du dr. fr., v's Cassation (mat. civ.), n. 2136 et s., et Conclusions, n. 14; Pand. Rep., yo Cassation civile, n. 488 et s., 1287 et s.

D'autre part, il ne faut pas oublier que l'art. 87 du 1er décret du 16 févr. 1807, interdisant de reproduire les motifs des conclusions dans les qualités des jugements et arrêts, est toujours en vigueur. V. Cass. 24 juill. 1840 (S. 1840.1.780. P. 1840. 2.595); et notre Rép. gén. du dr. fr., v° Jugements et arrêts, n. 2518; Pand. Rép., vo Jugements et arrêts, n. 1652 et s.

Dans l'espèce, il n'était pas fait mention, dans les conclusions reproduites aux qualités, ni dans le point de droit, de la cause de demande alléguée par le défendeur; cette cause n'était men

exclusivement sur la demande principale;

Attendu que l'abbé Carrère produit un projet de conclusions, non signé par son avoué, visant, dans leurs motifs, comme cause de dommages, des agissements de Mc Dupas, tant à l'occasion du procès que des faits antérieurs et étrangers; que ce projet, puisqu'il n'est pas signé par l'avoué, ne constitue pas des conclusions, et demeure sans portée juridique; que, fût-il signé par l'avoué, il faudrait que les conclusions, pour être efficaces, eussent été portées à la connaissance de l'adversaire êt du tribunal; qu'une signification à partie serait elle-même sans effet, puisque cette signification ne démontrerait pas que le tribunal eût été saisi de ces conclusions; que, seules, les conclusions prises à l'audience limitent le débat et déterminent le ressort; Attendu, d'ailleurs, que rien, dans les motifs du jugement, ne permet d'affirmer que de pareilles conclusions aient été prises et soutenues devant les premiers juges;

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Attendu, par suite, que l'on doit se reporter aux conclusions transcrites aux qualités pour rechercher comment le litige a été porté devant le juge, comment le débat a été fixé et limité; Attendu qu'il ressort des qualités du jugement entrepris que la demande de dommages-intérèts, formée par l'abbé Carrère, est fondée exclusivement sur la demande principale;

Attendu, dès lors, qu'elle ne saurait changer le taux du ressort; - Attendu que, la demande principale portant sur une somme inférieure à 1.500 fr., le jugement, qualifié à tort en premier ressort par les premiers juges, est en dernier ressort, et que, en conséquence, l'appel est irrecevable; Par ces motifs; Dit et juge que l'appel de l'abbé Carrère est irrecevable, etc.

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Du 19 mars 1913. C. Pau. MM. le cons. Maury, prés.; Ancely, subst.; Villette (du barreau de Nérac) et Magescas,

av.

tionnée que dans un projet de conclusions non signé par l'avoué, et dans des conclusions que rien n'indiquait avoir été portées à la connaissance du juge. Les représentants du défendeur avaient eu le tort de ne pas insérer, dans le dispositif des conclusions, la cause des dommages-intérêts, de nature à rendre susceptible d'appel le jugement à intervenir. Cette cause n'étant ainsi rappelée, ni dans les qualités, ni dans le point de droit inséré aux qualités, ni dans les motifs du jugement, la Cour ne pouvait en faire état, pour apprécier si le jugement était ou non susceptible d'appel. Cette situation n'aurait pas été cependant sans remède; les représentants du défendeur, en faisant opposition aux qualités, auraient pu demander que la cause des dommages-intérêts, alléguée par le défendeur, fût précisée dans le point de droit; ils auraient pu appuyer cette opposition sur des documents dont la Cour ne pouvait faire état, mais dont le juge, réglant les qualités, qui avait pris part aux débats, était en mesure d'apprécier la portée, à l'effet de dire si les conclusions, où était formulée la cause des dommages-intérêts, avaient frappé l'oreille du juge.

TRIB. DE POITIERS 31 janvier 1913.

1o CONTRIBUTIONS DIRECTES, RECOUVREMENT, POURSUITES, COMPÉTENCE, AUTORITÉ JUDICIAIRE, SAISIE, OPPOSITION, PERCEPTEUR, FAUTE PERSONNELLE, ACTION EN DOMMAGESINTÉRÊTS, PAIEMENT, AVERTISSEMENT, PRÉSENTATION (DÉFAUT DE), MANDATAIRE, MANDAT - CARTE, MANDAT-CONTRIBUTION NUMÉRO DU RÔLE, INDICATION (DÉFAUT D') (Rép., v° Contributions directes, n. 831 et s., 842 et s., 3107 et s.; Pand. Rép., vo Impôts, n. 826 et s., 914 et s., 1371 et s.).

2o FONCTIONNAIRE PUBLIC - FONCTIONS PUBLIQUES, RESPONSABILITÉ, PERCEPTEUR, CONTRIBUTIONS DIRECTES, PAIEMENT, MANDAT-CARTE, REFUS, FAUTE PERSONNELLE, INTENTION VEXATOIRE (Rép., vo Fonctionnaire public, n. 475 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 567 et s.). -3° EXÉCUTION PROVISOIRE, NÉCESSITÉ ABSOLUE, CONTRIBUTIONS DIRECTES, RECOUVREMENT, POURSUITES, OPPOSITION A SAISIE, MAINLEVÉE, EXÉCUTION SUR MINUTE (Rép., vo Exécution provisoire, n. 175 et s.; Pand. Rép., vo Jugements et arrêts, n. 467 et s.).

1o Les contestations sur les actes de poursuites en matière de contributions directes sont de la compétence de l'autorité judiciaire à partir du moment où ces poursuites sont entrées dans la voie judiciaire (1) (LL. 16-24 août 1790, tit. 2, art. 13; 28 pluv. an 8; 21 avril 1832).

En conséquence, le tribunal civil est com

(1 à 8) Les contributions directes sont payables en argent. V. Cons. d'Etat, 4 avril 1906, Petiot (S. et P. 1908.3.94; Pand. pér., 1908.3.94), et la note. De plus, elles sont portables, en ce sens que le contribuable doit aller payer dans la maison où le percepteur a établi son bureau de recette. V. la note sous Cons. d'Etat, 4 avril 1906, précité. Il suit de là, d'une part, qu'un percepteur a le droit de refuser un mandat-poste, à lui adressé par un contribuable pour le paiement de ses contributions, puisque ce mode de paiement obligerait le percepteur à aller toucher le montant du mandat au bureau de poste, et que, d'autre part, si le percepteur, par pure bienveillance, accepte le mandat, le contribuable n'est libéré que du jour où le percepteur, après encaissement volontaire du mandat, a délivré quittance. V. en ce sens, Cons. d'Etat, 4 avril 1906, précité, et la note. Aussi, pcur faciliter aux contribuables le paiement de leurs impôts, un décret du 25 juin 1911 (J. off. du 27, p. 5054) a créé un mandat spécial, appelé

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mandat-contributions ». L'usage de ce nouveau

mode de paiement ne présente aucun inconvénient pour l'Administration, puisque le mandatcontributions est payable entre les mains du percepteur, et qu'il contient toutes les indications nécessaires au comptable qui reçoit les fonds; et, d'autre part, il offre au public cet avantage que le reçu de la poste est libératoire, s'il est délivré en échange d'un mandat-contributions régulièrement établi (Décr. 25 juin 1911, art. 1er). Mais, bien que le décret du 25 juin 1911 ait mis à sa disposition ce moyen commode de se libérer de ses impositions, le contribuable peut-il néanmoins, pour faire parvenir au percepteur le montant de ses contributions, se servir d'un simple mandat-carte? Il est bien certain que l'emploi du mandat-carte n'offre pas au contribuable les mêmes garanties que le mandat-contributions; le facteur n'a pas à ANNÉE 1913.

5 cah.

pétent pour connaitre de l'opposition faite par un contribuable à une saisie-exécution pratiquée par un percepteur pour le recouvrement des contributions directes (2) (Id.).

Il en est ainsi, du moins, alors que le contribuable ne conteste ni l'existence, ni la validité de sa dette, ni la valeur des titres sur lesquels elle repose, non plus que la régularité de la procédure administra tive qui a précédé la saisie, et se borne, à l'appui de son opposition à la saisie, à invoquer une faute personnelle du percepteur, qui aurait abusivement et par pure malice refusé de recevoir le montant des contributions dues, en telle sorte que l'action par lui intentée devant le tribunal civil est recevable, tant comme demande en dommagesintérêts que comme opposition à la saisie (3) (Id.).

Si les impôts doivent être acquittés au bureau du percepteur, rien n'oblige le contribuable à se présenter lui-même, et il lui est loisible de faire payer par un mandataire, qui n'a pas plus que lui à présenter son avertissement ou toute autre pièce of ficielle constatant sa dette (4) (L. 21 avril 1832).

Ce mandat peut être confié à l'Administration des postes, pourvu que le percepteur n'ait pas à se déplacer; et, en conséquence, le redevable peut emprunter, pour l'acquit de ses contributions, la forme du mandat-carte, payable au domicile du destinataire (5) (Id.).

En créant des mandats-contributions,

exiger la quittance; le percepteur n'est pas tenu d'en faire parvenir une au contribuable, de sorte que, si le percepteur néglige d'émarger sur le rôle, le contribuable n'a aucun moyen de prouver sa libération, et peut être exposé à payer deux fois. Si, cependant, le contribuable, à ses risques et périls, emploie un mandat-carte ordinaire, le percepteur est-il tenu d'accepter ce mandat? Telle est la question, nouvelle, semble-t-il, en jurisprudence, qui était le fond du débat dans l'affaire ci-dessus.

La solution affirmative, que le tribunal de Poitiers a adoptée, se recommande d'arguments très sérieux. En effet, l'emploi du mandat-carte ne viole pas la règle que les contributions sont portables, puisque ce mandat est payable à domicile et que le percepteur reçoit, des mains du facteur, l'argent du contribuable. D'autre part, s'il est vrai que le paiement par mandat-carte peut présenter des inconvénients très réels pour l'Administration, parce que, le plus souvent, le mandat ne contiendra pas les indications nécessaires pour faciliter la besogne du percepteur, cette raison ne suffit pas à justifier l'interdiction de ce mode de libération; il reste, en effet, à démontrer que le contribuable est légalement tenu de fournir au percepteur ces indications. Or, il est admis, au contraire, que la mention qui figure au verso des avertissements, et d'après laquelle les contribuables doivent les représenter à chaque paiement, n'a aucune force obligatoire, et que le percepteur n'est fondé à exiger, du contribuable qui vient payer ses impôts, ni la représentation de son avertissement, ni celle des quittances des versesements antérieurs. V. Durieu, Poursuites en mat. de contrib. dir., t. 1er, p. 143; et notre Rép. gén, du dr. fr., v° Contributions directes, n. 840; Pand. Rép., vo Impôts, n. 826. Tout au plus pourrait-on objecter l'art. 16 de l'arrêté du 16 therm. an 8 (S. 1er vol. des Lois annotées, p. 544), aux termes duquel le percepteur émargera sur le rôle, en présence

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dont l'emploi est plus avantageux pour le contribuable, en ce sens que le récépissé délivré par la poste est libératoire visà-vis du Trésor, l'Administration des posles n'a nullement entendu exclure l'emploi des mandats-cartes pour le paiement des contributions, et priver ainsi le contribuable d'une facilité dont il bénéficiait antérieurement (6) (Décr., 25 juin 1911).

L'expéditeur du mandat-carte n'est même pas tenu de faire connaître au percepteur la commune où il est imposé, ni le numéro du rôle, aucun texte de loi ni de règlement n'imposant au contribuable qui se présente au guichet du percepteur, ou à son mandataire, de fournir ces indications, dès lors que le percepteur ne peut avoir aucun doute sur l'identité de celui qui paie (7) (L. 21 avril 1832).

2o En conséquence, constitue une faute personnelle, et non un acte de la fonction, le fait par un percepteur de refuser un mandat-carte à lui adressé par un contribuable pour l'acquit de ses impositions, sur le motif que ce mandat ne contenait ni l'indication de la commune où le contribuable était imposé, ni le numéro du rôle, alors que le percepteur, qui connaissait personnellement le contribuable, et avait même déjà accepté plusieurs fois qu'il acquittal ses impôts par le même procédé et sans fournir d'indications plus précises, a agi dans un but de vexation (8) (C. civ., 1382; LL. 16-24 août 1790, tit. 2, art. 13; 16 fruct. an 3).

Par suite, le tribunal civil, compétent

du contribuable, la somme qu'il recevra; il croisera les articles entièrement soldés... ». Mais cette disposition paraît avoir été introduite beaucoup plus pour fournir une garantie au contribuable que pour lui imposer une obligation.

A supposer, avec le jugement ci-dessus reproduit, que le contribuable soit fondé à payer ses contributions par mandat-carte, quel est le caractère du refus par le percepteur d'accepter ce mandat? Constitue-t-il, comme l'a admis le tribunal, une faute personnelle, et non un acte de la fonction? En principe, il semble difficile de considérer l'acte par lequel un fonctionnaire interprète un texte relatif à ses devoirs professionnels, et dont le sens est douteux, autrement que comme un acte de la fonction. Et l'on ne saurait évidemment faire grief à ce fonctionnaire du fait que le sens du texte a été ultérieurement précisé par une décision judiciaire qu'il ne pouvait prévoir. Spécialement, la question de savoir si les contribuables peuvent employer le paiement par mandat-carte n'avait jamais été tranchée jusqu'au présent jugement; elle est assez délicate, et il n'est même pas certain que ce jugement fixe la jurisprudence. Le percepteur a donc eu à déterminer lui-même quels étaient ses droits, et, s'il s'est trompé dans son appréciation, il n'y a là, en principe, qu'une faute de service. Le Tribunal des conflits a déjà jugé, en ce sens. que l'application erronée des règlements constitue, de la part d'un employé d'une administration de l'Etat, un fait de service, et non une faute personnelle se détachant de l'exercice de la fonction. V. Trib. des conflits, 9 déc. 1899, Deyres (S. et P. 1900.3.89, et la note de M. Hauriou; Pand. pér., 1900.4.31).

La solution du tribunal paraît avoir été surtout motivée par ce fait qu'en l'espèce, les rapports personnels entre le percepteur et le contribuable étaient très tendus, et laissaient présumer, chez le 20 II® PART.

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