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de la promulgation de la loi de 1905, deviendront la propriété des communes, s'ils n'ont été restitués ni revendiqués dans le délai légal; Attendu que le droit ainsi conféré aux communes par cette disposition, dont le sens clair et précis ne présente ni équivoque ni ambiguïté, est un droit éventuel, subordonné à une condition suspensive, et ne devant se réaliser qu'à défaut de toute revendication se produisant dans le délai prévu; - Attendu que telle a bien été l'intention du législateur; qu'il résulte, en effet, des travaux préparatoires, et notamment de la déclaration de M. Briand, ministre des cultes, à la séance de la Chambre du 30 oct. 1907 (S. et P. Lois annotées de 1908, p. 663, 2e col., note 1; Pand. per., Lois annotées de 1908, p. 663, 2o col., note 1), que le législateur, se préoccupant d'affranchir les communes des embarras que l'attribution des biens pouvait leur susciter, a entendu que les biens des anciens établissements publics du culte fussent préalablement purgés de leurs dettes, et ne fussent transmis aux communes que lorsqu'ils seraient liquidés; Attendu que, les meubles garnissant les églises ayant été, comme les autres biens appartenant aux fabriques, placés sous séquestre en vertu de l'art. 8 de la loi de 1905, et les communes n'en devenant propriétaires qu'à l'expiration du délai légal, et à défaut de toute revendication, c'est incontestablement contre le séquestre que doivent être intentées les actions en reprise dont ces meubles peuvent être l'objet; que c'est donc régulièrement que Lachat a introduit son action contre l'Administration des domaines, investie des fonctions de séquestré par arrêté préfectoral; Sur la demande principale... (sans intérêt); Par ces motifs;

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TRIB. DE CHATEAUROUX
13 novembre 1911.

BAIL (EN GÉNÉRAL), DégradaATIONS, PLANTS DE VIGNE, ARRACHAGE, INDEMNITÉ, RÉPARATION DU DOMMAGE, DEMANDE PRÉMATURÉE (Rép., v Bail [en général], n. 1144 et s.; Pand. Rép., vo Bail en général, n. 1441 et s.).

Pendant la durée du bail, le bailleur n'a d'action contre le preneur, en réparation des dégradations commises par celui-ci, que lorsque ces dégradations ont altéré

(1-2-3) On admet généralement, dans le sens du jugement ci-dessus recueilli, que, si le bailleur ne peut, en principe, avant l'expiration du bail, actionner le preneur en réparation des dégradations par lui commises, il en est différemment, si ces dégradations sont de nature à compromettre l'existence de la chose louée, ou à en altérer la substance d'une manière irréparable. V. Cass. 6 déc. 1858 (S. 1860.1.66. - P 1859.1022), et la

d'une façon permanente la substance même de la chose louée, et que le préjudice qui en est résulté est désormais irréparable (1) (C. civ., 1729).

L'action en dommages-intérêts exercée par le bailleur contre son locataire est donc prématurée, si, à raison de la nature des dégradations, de la solvabilité du preneur, de la durée du bail, le préjudice est réparable, en sorte que le bailleur peut, à l'expiration du bail, n'avoir droit à aucune indemnité, ou seulement à une indemnité très réduite (2) (Id.).

Spécialement, est irrecevable, comme prématurée, l'action introduite contre le preneur, à raison de l'enlèvement de plants de vigne, dès lors que le fermier, dont la solvabilité n'est pas contestée, affirme avoir en pépinière, pour remplacer les plants qu'il a arrachés, des plants en nombre suffisant, qu'il compte mettre en place en temps opportun, en telle sorte qu'étant donné l'âge des plants et la durée du bail restant à courir, il est en mesure de laisser, à l'expiration du bail, une vigne de valeur sensiblement égale à celle qu'il a arrachée (3) (Id.). (Abbé Hémery C. Maire de Celon).

JUGEMENT.

Attendu

LE TRIBUNAL; En droit: que le bailleur ne demande ni la résiliation du bail, ni la constatation judiciaire de la dégradation commise, mais uniquement des dommages-intérêts, auxquels donnerait ouverture un préjudice qui résulterait de cette dégradation; Attendu que le bailleur n'a d'action née contre le preneur que lorsqu'il se trouve en face d'un intérêt actuel certain, et non éventuel, que lorsque les dégradations ont altéré d'une façon permanente la substance même de la chose louée, lorsque le préjudice compromettant l'existence même de cette chose est irréparable; - Attendu que l'action exercée par le bailleur est donc prématurée, si, en raison de la nature de la dégradation, de la solvabilité du preneur, de la durée du bail, le préjudice est réparable, et, si le preneur réparant, en tout, ou en la plus grande partie, par ses meilleurs soins, le bailleur peut n'avoir droit à aucune indemnité, ou à une indemnité très réduite en fin de bail; En fait : Attendu qu'il est affirmé par la commune de Celon, et qu'il est reconnu par l'abbé Hémery, que celui-ci a arraché, dans la propriété louée, 298 pieds de vigne; Attendu qu'à défaut d'état de lieux contradictoire, l'abbé Hémery est présumé les avoir reçus en bon état; Mais attendu que la solvabilité du preneur n'est point contestée; que le bail, commencé le 1er janv. 1909, doit se terminer le 1er janv. 1918; Attendu qu'au moment où la vigne fut arrachée, elle était

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note; Pau, 21 juill. 1902 (S. et P. 1902.2.238), la note et les autorités citées. Toutefois, dans une autre opinion, on décide que le bailleur peut agir en dommages-intérêts avant l'expiration du bail, sans qu'il y ait lieu de distinguer si les dégradations sont ou non réparables. V. Baudry-Lacantinerie et Wahl, Tr. du louage, 3o éd., t. 1o, n. 775. (4) L'art. 318, C. civ., dispose que l'action en désaveu sera dirigée « contre un tuteur ad hoc

âgée de cinq ans; que cette vigne eût eu, en fin de bail, quatorze ans; que le preneur prétend avoir 300 pieds de vigne en pépinière dans le jardin du presbytère, et qu'il les plantera, dès l'époque favorable venue, dans un sol convenablement approprié; Attendu que, si le preneur exécute sa promesse, la nouvelle vigne aura sept ans en fin de bail; qu'il s'ensuit que le preneur peut, avec une bonne culture, laisser en fin de bail une vigne de valeur sensiblement égale à celle qu'il a précédemment arrachée; que la dégradation commise par l'abbé Hémery n'a donc pas compromis l'existence même de la chose louée, n'en a pas altéré de façon permanente la substance; que le préjudice causé est réparable en tout ou en très grande partie; que la commune se trouve donc en présence d'un préjudice seulement éventuel; qu'elle n'a donc pas d'intérêt né et actuel; Par ces motifs; Infirme; Déclare irrecevable et mal fondée la demande de la commune de Celon, l'en déboute, etc. Du 13 nov. 1911. Trib. civ. de Chateauroux. M. Gambart, prés.

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TRIB. DE SAINT-CLAUDE 15 mai 1912. DÉSAVEU D'ENFANT OU DE PATERNITÉ, TUTEUR

« AD HOC », MÈRE, DÉFAUT FAUTE DE COMPARAITRE, INSTANCE EN DIVORCE, ORDONNANCE DU PRÉSIDENT, DÉLAI DE TROIS CENTS jours, Point dE DÉPART (Rép., vo Désaveu de paternité, n. 128; Pand. Rép., v° Paternité et filiation, n. 282 et s.).

L'instance en désaveu de paternité étant uniquement dirigée contre le tuteur ad hoc de l'enfant, et la mère n'étant appelée à l'instance que pour y être présente, si, le tuleur ad hoc ayant comparu, la mère ne comparait pas, il n'y a lieu de décerner defaut que contre la mère seule (4) (C. civ., 318).

La disposition de l'art. 313, § 2, G. civ., modifié par les lois du 27 juill. 1884 et du 18 avril 1886, d'après laquelle le mari, en cas de demande en divorce ou en séparation de corps, peut désavouer l'enfant ne plus de trois cents jours après l'ordonnance qui a autorisé la femme à avoir un domicile séparé, ne saurait être étendue en dehors de l'hypothèse spéciale qu'elle prévoit (5) (C. civ., 313).

Spécialement, le mari n'est pas recevable à désavouer l'enfant né plus de trois cents jours après l'ordonnance l'autorisant, sur sa demande, à citer sa femme aux fins de divorce, dès lors que cette ordonnance n'a pas statue sur le domicile de la femme (6) (C. civ., 235, 236, 313).

donné à l'enfant, et en présence de sa mère ». On déduit, en général, de ces derniers mots que la mère n'est pas partie au procès, au sens strict du mot. V. Huc, Comment. du C. civ., t. 3, n. 30; Baudry-Lacantinerie et Chéneaux, Des pers., 3° éd., t. 4, n. 553.

(5-6) La question qui était portée devant le tribunal de Saint-Claude a fait l'objet d'une note de M. Naquet, sous Aix, 13 févr. 1908 (S. et P. 1909.2. 281; Pand. pér., 1909.2.281), dans laquelle, confor

(Louis C... C. François C... et dame M...).

JUGEMENT.

LE TRIBUNAL;-Attendu que Louis C... a fait donner assignation à : 1 Francois C..., pris en qualité de tuteur ad hoc du mineur Emile-Georges-Constant C...; 2o dame M... (Claudine-Constance), épouse divorcée du demandeur, à l'effet de faire déclarer bien fondé le désaveu de paternité que ledit Louis C... a formé, en ce qui concerne le mineur prénommé; - Attendu que la dame M..., qui, sur l'assignation à elle donnée, n'avait pas comparu, a été de nouveau régulièrement ajournée, en vertu d'un jugement de réassignation rendu par le tribunal de céans; qu'elle ne comparaît toujours pas, non plus qu'elle n'a constitué avoué; Mais attendu qu'en l'instance pendante, uniquement dirigée contre le tuteur ad hoc, ès qualité, la mère n'est appelée que pour être présente, si bon lui semble; qu'il échet donc seulement à son endroit de décerner défaut;

Attendu qu'au soutien de l'action en désaveu, il est exposé ce qui suit: A la date du 16 nov. 1910, le demandeur s'est vu autorisé, par ordonnance du président de ce siège, à suivre sur la demande en divorce qu'il introduisait contre la dame M..., son épouse, demande accueillie depuis, comme il appert d'un jugement du 12 avril 1911, rendu par le tribunal, et prononçant le divorce entre les époux C...-M... Le 17 nov. 1911, soit plus de trois cents jours après qu'a été rendue l'ordonnance précitée, la dame M... a accouché de l'enfant, objet de l'action en désaveu; - Sur la recevabilité de ladite action: ... (sans intérêt); Au fond: - Attendu que l'ordonnance, dont la date est prise par le demandeur comme point de départ de la période passé laquelle l'enfant mis au monde par la dame M.. pouvait être désavoué, simplement autorisé Louis C... à suivre

a

mément à la solution admise par le jugement cidessus, il a été soutenu que l'art. 313, § 2, C. civ., ne peut être étendu hors de l'hypothèse qu'il prévoit, en telle sorte que l'action en désaveu ouverte au père par cet article ne peut pas être admise, lorsque l'ordonnance, qui a précédé de trois cents jours la naissance de l'enfant, n'autorisait pas la femme à avoir un domicile séparé. Mais la Cour d'Aix a décidé, en sens contraire, que les termes de l'art. 313, § 2, C. civ., n'ont pas un caractère tellement limitatif que toute ordonnance qui ne statuerait pas sur le domicile de la femme doive rester inopérante en matière de désaveu de paternité, et elle a spécialement, dans une espèce où la femme avait, dès avant l'introduction de l'instance en divorce, abandonné le domicile conjugal, déclaré le mari recevable à désavouer l'enfant né plus de trois cents jours après l'ordonnance qui l'avait autorisé à citer sa femme, sans statuer sur le domicile de celle-ci, qui n'avait, d'ailleurs, pas comparu. V. Aix, 13 févr. 1908, précité.

(1) Pour que la Régie puisse réclamer les peines afférentes au refus de communication, il faut, de toute évidence, que la communication ait été demandée aux représentants mêmes de la société, car ce sont les sociétés que les textes soumettent à la communication (L. 5 juin 1850, art. 16 et 28; Décr., 17 juill. 1857, art. 9; LL. 23 août 1871, art. 22; 21 juin 1875, art. 7), et, par

sur la demande en divorce, mais qu'il n'y a pas été statué, aucune demande n'ayant été formulée à ce sujet, sur la résidence de l'époux demandeur, non plus qu'il n'en a été et ne pouvait en être assigné une à la femme, défenderesse éventuelle, alors, non comparante; Attendu que C..., ne se trouvant pas au cas seul et bien spécialement prévu par l'art. 313, § 2, C. civ., C... est mal venu à l'invoquer; que, dès lors, et par application de la règle posée en Fart. 312, $ler, où il est dit que l'enfant conçu pendant le mariage a pour père le mari, la demande doit être rejetée; ces motifs; - Dit recevable, en la forme seulement, l'action introduite; La déclare, d'autre part, mal fondée; — En conséquence, déboute Louis C... de toutes ses fins et conclusions, et le condamne aux dépens de l'instance, etc.

- Par

Du 15 mai 1912. Trib. civ. de SaintClaude. M. Carle, prés.

TRIB. DE LA SEINE 17 juillet 1912. ENREGISTREMENT, COMMUNICATION (DROIT DE), REFUS, PROCÈS-VERBAL, CHEF DU CONTENTIEUX, ASSOCIÉ EN NOM, GÉRANTS, LETTRES, SOCIÉTÉ EN NOM COLLECTIF, SoCIÉTÉ EN COMMANDITE SIMPLE, OBLIGATIONS NÉGOCIABLES, REMBOURSEMENT, ASTREINTE (Rép., vis Enregistrement, n. 3335 et s., Valeurs mobilières, n. 1296 et s.; Pand. Rép., v Valeurs mobilières, n. 2554 et s.).

Un procès-verbal de refus de communication des livres et registres d'une société est valablement dressé par un agent de l'enregistrement, et les sanctions de ce refus sont applicables, bien que le refus ait été formulé uniquement par le chef du contentieux de la société, d'ailleurs membre de la société à titre d'associé en nom collectif, s'il résulte des circonstances de la cause, et notamment

conséquent, c'est à ceux qui les personnifient que la communication doit être réclamée. Ainsi, il n'y aurait pas de pénalité encourue, si la communication avait été demandée à un simple associé non gérant ou à un employé, ou même à un associé qui, comme dans l'espèce, est également employé. La Cour de cassation avait déjà jugé dans le même sens que la communication n'est pas valablement demandée au clerc d'un officier ministériel assujetti à la communication. V. Case. 21 mars 1848 (S. 1848. 1.287. P. 1848.1.379). V. encore en ce sens, Wahl, Tr. du régime fiscal des soc. et des val. mob., t. 2, n. 2616 et 2619.

Mais la Cour de cassation a ajouté, également avec raison, que, si l'officier ministériel s'absente systématiquement, dans le but d'éviter une demande directe en communication, il y a là un refus de communication, l'officier ayant eu l'intention de se dérober à une réquisition qu'il n'ignorait pas. V. Cass. 21 mars 1848, précité. Il faut en dire autant des gérants de sociétés. V. Wahl, op. cit., t. 2, n. 2619.

Dans l'espèce, les gérants avaient reçu plusieurs lettres les informant que le sous-inspecteur se présenterait dans les locaux de la société pour demander la communication; il est probable (le jugement ne nous renseigne pas sur ce point) que les gérants avaient connu le moment où devait se présenter le sous-inspecteur; comme le sous-ins

de ce fait que, après plusieurs lettres écrites à la société en vue d'obtenir la communication, les gérants ont protesté auprès du directeur général de l'enregistrement contre la demande de communication, qu'ils ont eu connaissance, avant le dressé du procèsverbal, des prétentions de l'Administration, et que, s'ils n'étaient pas présents au moment du dressé du procès-verbal, cette absence provient de leur fail, en telle sorte qu'elle ne saurait nullement entacher de nullité ce procès-verbal (1) (L. 5 juin 1850, art. 16 et 28; Décr., 17 juill. 1857, art. 9; LL. 23 août 1871, art. 22; 21 juin 1875, art. 7).

Les lois des 23 août 1871 et 21 juin 1875, qui soumettent au droit de communication toutes les sociétés assujetties aux verifications de l'enregistrement par les lois en vigueur, s'appliquent aux sociétés en nom collectif et en commandite simple qui ont émis des obligations négociables (2) (Id.).

Par suite, les sociétés en nom collectif et en commandite simple, qui ont émis des obligations négociables, sont aujourd'hui, comme les sociétés anonymes et les sociétés en commandite par actions, soumises à l'obligation de communiquer au fisc toutes les pièces visées dans les lois de 1871 et de 1875 (3) (Id.).

Il n'y a, entre les sociétés anonymes et les sociétés en commandite par actions, d'une part, les sociétés en nom collectif et les sociétés en commandite simple, d'autre part, au point de vue de l'obligation de communication, d'autres différences, sinon que les premières y sont tenues pendant toute leur existence et à raison même de leur nature de sociétés par actions, tandis que les secondes n'y sont soumises qu'à raison de l'émission des obligations négociables (4) (Id.).

Mais si, postérieurement à la signification du procès-verbal pour refus de com

pecteur ne s'était pas trouvé en face d'eux (après, probablement, avoir demandé à les voir), le tribunal a pu estimer qu'il y avait de leur part une abstention calculée. De plus, en écrivant au direc teur général, avant la visite du sous-inspecteur, pour contester l'assujettissement de la société à la communication, les gérants avaient montré qu'ils connaissaient la prétention de la Régie.

(2-3-4) La question de savoir si les sociétés en nom collectif ou en commandite simple, qui ont émis des obligations, sont assujetties à la communication pour l'ensemble de leurs documents, se présentait pour la première fois en jurisprudence. Elle est, avec raison, résolue affirmativement par le tribunal de la Seine. V. dans le même sens, Wahl, Tr. du régime fiscal des soc. et des val, mob., t. 2, n. 2590. En effet, la forme de la société n'exerce aucune influence sur le point de savoir si elle est assujettie à la communication; le seul point à considérer est celui de savoir si elle a ou non émis des titres négociables.

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registre à souche, qui devra être communiqué aux préposés de l'enregistrement. La loi du 23 juin 1857 (S. Lois annotées de 1857, p. 45. P. Lois, décr., etc. de 1857, p. 74) ayant créé, sur les mêmes titres, un droit de transmission, l'art. 9 du décret du 17 juill. 1857 (S. Lois annotées de 1857, p. 123. P. Lois, décr., etc. de 1857, p. 208) a disposé que les dépositaires des registres à souche et des registres de transferts et conversions de titres de sociétés, compagnies et entreprises, seront tenus de les communiquer sans déplacement, ainsi que toutes les pièces et documents relatifs auxdits transferts et conversions, aux préposés de l'euregistrement, à toute réquisition

Il n'est pas douteux que, sous l'empire de ces lois, toute société qui avait émis des obligations, fût-elle en nom collectif ou en commandite simple, était assujettie à la communication des documents visés par les textes.

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Or, l'art. 22 de la loi du 23 août 1871 (S. Lois annotées de 1871, p. 122. P. Lois, décr., etc. de 1871, p. 209) a déclaré que les sociétés..., et tous autres assujettis aux vérifications des agents de l'enregistrement par les lois en vigueur »>, seraient tenus de représenter auxdits agents leurs livres, registres, pièces de recette, de dépense et de comptabilité ». L'art. 7 de la loi du 21 juin 1875 (S. Lois annotées de 1875, p. 709. - P. Lois, décr., etc. de 1875, p. 1221) a reproduit cette disposition, en l'aggravant à certains points de vue étrangers à la question qui nous occupe.

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Il résulte de là, avec une parfaite évidence, que les conditions d'assujettissement au droit de communication ne sont pas modifiées, mais que les assujettis doivent désormais communiquer tous leurs documents de comptabilité, et non plus seulement les pièces destinées à contrôler le droit de timbre et de transmission. La communication devient un moyen général de découvrir les fraudes et les dissimulations en matière d'impôt, tout en restant limitée aux sociétés qui ont émis des titres. Par suite, les sociétés en nom collectif ou en commandite simple, qui échappent entièrement à la communication, si elles n'ont pas émis de titres soumis aux droits de timbre et de transmission, sont obligées de communiquer tous leurs documents de comptabilité, si elles ont émis des titres. Il se peut que cette situation soit gênante pour les sociétés de personnes, qui détiennent beaucoup de secrets, et auxquelles il répugne de les divulguer. Mais la loi est formelle. V. d'ailleurs, sur le droit de la Régie à la communication des documents même confidentiels, Trib. de SaintEtienne, 10 août 1899, sous Cass. 14 janv. 1902 (S. et P. 1903.1.197, et la note; Pand. pér., 1902. 6.37).

Ce qui est vrai, c'est que l'assujettissement des sociétés de personnes au droit de communication est exceptionnel, puisque ce sont des sociétés à

du 30 août 1882, enregistré à Paris le 12 septembre suivant, pour une période de trente ans; qu'elle a pour objet l'exploitation du commerce du lait et de ses dérivés, et notamment l'exploitation en régie du fonds de commerce de la Société générale de laiterie, et qu'elle a été constituée sous la forme d'une société en nom collectif et en commandite simple; Attendu que cette société est aujourd'hui régie par un acte sous seings privés du 28 nov. 1908, déposé le 12 décembre au rang des minutes de Me Ridder, notaire à Paris, qui n'a apporté aucune modification à son ca

parts d'intérêt, et non pas des sociétés par actions, et que, par suite, en elles-mêmes, elles ne comportent pas la délivrance de titres. Il faut, pour qu'elles soient assujetties à la communication, une circonstance aussi exceptionnelle que l'émission d'obligations. C'est une différence importante avec les sociétés par actions, qui, divisées en actions, c'est-à-dire en titres librement cessibles, sont, par elles-mêmes, soumises à la communication.

Cette différence est fort bien mise en relief par le tribunal de la Seine. Mais il peut arriver que les actions ou les obligations ne soient pas constatées par des titres transmissibles, c'est-à-dire que le droit des actionnaires ou obligataires résulte seulement d'une constatation sur les registres sociaux, ou d'une quittance à eux remise. Dans ce cas, la communication n'est pas due.

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Il ne faut pas oublier, en effet, que le droit de communication ne peut, encore aujourd'hui, être exercé que contre les sociétés qui y étaient soumises par les lois de 1850 et de 1857. Or, d'après l'art. 16 de la loi de 1850, précitée, les sociétés astreintes à la communicatiou étaient celles qui émettaient des titres ou certificats d'actions »; la loi leur impose la tenue de registres à souche, et ce sont ces registres à souche qu'elles doivent communiquer; il n'y a pas de registre à souche s'il n'y a pas de titres. Donc, les seules sociétés qui soient soumises à la communication, en vertu de la loi de 1850, précitée, sont celles qui, ayant émis des titres d'actions (ou d'obligations, suivant l'art. 28) sont tenues d'extraire ces titres d'un registre à souche.

De même, l'art. 9 du décret du 17 juill. 1857, précité, prescrit que les dépositaires des registres à souche et des registres de transferts et conversions de titres les communiquent. Ici encore il n'est question que de titres d'actions.

Il faut ajouter que, s'il n'y a pas de titres, les sociétés ne sont tenues de payer ni le droit de timbre ni le droit de transmission établis par les lois du 5 juin 1850 et du 23 juin 1857. En ce qui concerne le droit de timbre, les textes sont formels. L'art. 14 soumet au timbre « chaque titre ou certificat d'action »; l'art. 15 de la loi du 5 juin 1850, précité, exempte, au moyen du droit établi par l'article précédent, les cessions de titres ou de certificats d'actions; l'art. 17 dispense du timbre le titre ou certificat d'action délivré par suite de transfert ou de renouvellement; l'art. 19 punit l'agent de change ou courtier qui a concouru à la cession ou au transfert des titres; l'art. 20, relatif à des dispositions transitoires, donne un certain délai aux sociétés existantes pour faire timbrer les titres ou certificats d'actions, et décide que le droit sera perçu sur la représentation du titre constatant la délivrance du certificat. Les articles suivants sont tous aussi formels. Au reste, la jurisprudence est bien établie sur ce point. V. Cass.

ractère de société en nom collectif et en commandite simple, mais a seulement reporté l'expiration de sa durée au 31 déc. 1945, et divisé son capital en 107 parts de 25.000 fr. chacune, indivisibles pour les associés en nom collectif, et divisibles pour les commanditaires; Attendu qu'aux termes de délibérations prises les 28 juill. et 22 oct. 1894, la société a contracté un emprunt, représenté par 194.500 obligations de 400 fr. au porteur, mises en souscription à 310 fr., produisant 12 fr. d'intéret par an, et reniboursables par voie de tirages au sort, dans un délai de cinquante

10 août 1887 (motifs) (S. 1889.1.33.- - - P. 1889.1. 52, et la note; Pand. pér., 1887.6.64); Sol. Régie, 21 mai 1894 (Rev. de l'enreg., n. 760). Adde, dans le même sens, Wahl, op. cit., t. 2, n. 1579.

Quant au droit de transmission, la loi du 23 juin 1857 (art. 6), précitée, porte que, « indépendamment des droits établis par le titre 2 de la loi du 5 juin 1850, toute cession de titres ou promesses d'actions... » est passible du droit; ce qui équivaut à dire deux fois, par le renvoi à la loi de 1850 et par l'emploi du mot titres ou promesses, que la cession de titres est seule soumise à l'impôt. L'alin. 2 de l'art. 6 et l'art. 7 sont dans le même sens. Ils opposent aux titres nominatifs les titres au porteur, et ceux dont la transmission peut s'opérer sans un transfert. L'art. 8 parle de la conversion des titres au porteur en titres nominatifs, ou réciproquement. Le décret du 17 juill. 1857, précité, rendu pour l'exécution de cette loi, les lois postérieures qui augmentent le tarif (LL. 16 sept. 1871, art. 11; 30 mars 1872, art. 6; 29 juin 1872, art. 3; 26 déc. 1908, art. 5 et 6) ne parlent également que de titres. Sur ce point encore, la jurisprudence paraît bien fixée. V. Trib. de la Seine, 16 mars 1860 (Journ. de l'enreg., n. 17114); Trib. de Rouen, 7 déc. 1886 (Rép. pér., de Garnier, n. 7213); Trib. de la Seine, 10 mars 1893, cité par Wahl, op. cit., t. 1, n. 1293. L'Administration de l'enregistrement, d'ailleurs, s'est ralliée à cette opinion. V. Sol. Régie, 21 mai 1894, précitée.

Il est donc certain que le droit de communication ne peut être exercé vis-à-vis de sociétés qui n'ont pas émis de titres. Et, d'ailleurs, à supposer même que des considérations spéciales dussent conduire à soumettre ces sociétés aux droits de timbre et de transmission, elles échapperaient encore au droit de communication, puisque les textes de 1850 et de 1857 disent formellement que les sociétés qui ont émis des titres et sont tenues d'extraire ces titres de registres à souche sont seules assujetties à la communication. En présence surtout du caractère exceptionnel que la jurisprudence reconnait aux lois fiscales, cela ne fait pas de doute. Le jugement fort bien motivé du tribunal de la Seine ne dit pas le contraire.

(1) C'est là encore une question nouvelle qui a été exactement résolue. Une société, qui refuse à tort de communiquer ses documents, a commis une contravention qu'aucun fait ultérieur ne saurait effacer; elle doit payer l'amende fixée par la loi. Mais l'art. 5 de la loi du 17 avril 1906 (S. et P. Lois annotées de 1906, p. 283; Pand. pér., 1906. 3.134) l'oblige également à payer une astreinte de 100 fr. au minimum par jour de retard, en cas de refus d'exécuter le jugement de condamnation. Or, si, dans le cours de l'instance, la société a remboursé tous ses titres, elle n'est plus sujette à communication; par conséquent, elle ne saurait désormais être condamnée à communiquer, et une astreinte ne peut lui être réclamée.

ans, à compter du 5 novembre de chaque année, mais avec faculté de remboursement anticipé; Attendu que ces obligations ont été admises à la cote officielle de la Bourse de Paris, et qu'au 31 mars 1911, le nombre de ces obligations restant en circulation s'élevait à 4823; - Attendu que l'Administration de l'enregistrement, considérant que, par le fait de cette émission, la société était tenue de représenter à ses agents le registre à souche des titres, les pièces relatives à leur transfert ou à leur conversion, et, plus généralement, ses livres, titres, pièces de dépenses ou de comptabilité, a réclamé à la société la communication de ces pièces; Attendu que, la société ayant prétendu n'être tenue que de représenter à l'enregistrement les pièces relatives aux transferts et aux conversions de ces obligations, et non les autres pièces réclamées par l'Administration de l'enregistrement, celle-ci, après avoir fait dresser un procès-verbal de refus, a signifié à la société, suivant exploit du 22 avril 1911, une contrainte à l'effet d'obtenir paiement de l'amende de 12.500 fr., décimes compris, maximum prononcé par l'art. 5 de la loi du 17 avril 1906, en cas de refus de communication;

Attendu que la société a fait opposition à cette contrainte, et que, dans son acte d'opposition, elle prétend que, n'étant ni société anonyme, ni société en commandite par actions, et n'ayant émis que pour un temps des obligations négociables, elle n'était tenue qu'à communiquer les documents relatifs à ces obligations, et non les autres pièces réclamées par l'Administration; qu'elle a, de plus, soutenu que le procès-verbal de refus dressé contre elle était irrégulier, et qu'il en était de même de la contrainte, par ce motif que celle-ci tendait au paiement de la somme fixe de 12.500 fr., amende maxima arbitrairement fixée par l'Administration; Attendu qu'au cours de l'instance, le reliquat de l'emprunt de 1894 a été remboursé par anticipation; Sur la question du procès-verbal de refus : Attendu que ce procès-verbal a été dressé, le 10 avril 1910, par un sous-inspecteur de l'enregistrement, dùment commissionné, et après refus d'obtempérer, formulé, ce jour-là, par M. Banès, chef du contentieux de la société, et s'étant également déclaré un des membres au titre d'associé en nom collectif, et après différentes lettres écrites à la société en vue d'obtenir la communication; Attendu que les gérants de la société ont eu connaissance, avant le dressé du procès-verbal, des prétentions de l'Administration, puisqu'à la date du 31 mars 1911, ils ont écrit à M. le directeur général pour protester contre ces prétentions;

Attendu qu'il résulte de ces différents documents que, si les gérants n'étaient pas présents au moment du dressé du procès-verbal, cette absence provient de leur fait, et qu'elle ne saurait nullement entacher de nullité ce procès-verbal;

Sur le fond: Attendu que la loi du 5 juin 1850, qui a soumis les titres des sociétés à la contribution du timbre, édicte, dans son art. 16: « Les titres ou certificats d'actions seront tirés d'un registre à sou

che; le dépositaire du registre sera tenu de le communiquer aux préposés de l'enregistrement »;; Attendu que l'art. 28 de la même loi impose aux sociétés qui ont émis des obligations négociables la représentation des documents analogues afférents à ces obligations; - Attendu que, ces mêmes titres (actions ou obligations) ayant été assujettis au droit de transmission par la loi du 23 juin 1857, l'art. 9 du décret du 17 juillet suivant impose aux dépositaires des registres à souche et des registres de transferts et conversions de titres de société l'obligation de les communiquer aux préposés de l'enregistrement; Attendu que les dispositions cidessus ont été complétées par les lois des 23 août 1871 et 21 juin 1875; Attendu que l'art. 22 de la loi du 23 août 1871 dispose Les sociétés, compagnies, assureurs, entrepreneurs de transports et tous autres assujettis aux vérifications des agents de l'enregistrement par les lois en vigueur, sont tenus de représenter auxdits agents leurs livres, registres, titres, pièces de recette, de dépense et de comptabilité, afin qu'ils assurent l'exécution des lois sur le timbre »; Attendu que l'art. 7 de la loi du 21 juin 1875 édicte la même obligation de communication, en vue d'assurer l'exécution de la loi sur le timbre; - Attendu qu'aux termes de l'art. 5 de la loi du 17 avril 1906, le refus de communication a été déclaré passible de 1.000 à 10.000 fr. en principal, et qu'il a été spécifié qu'en cas d'instance, les sociétés assujetties aux vérifications de l'enregistrement seraient condamnées à représenter les pièces non communiquées, sous une astreinte de 100 fr. au minimum par jour de retard;

Attendu que, dans son premier mémoire, l'Administration de l'enregistrement réclame qu'il soit fait à la société application de cette astreinte; Attendu

que les lois de 1871 et de 1875 sont formelles; qu'elles visent toutes les sociétés assujetties aux vérifications de l'enregistrement par les lois en vigueur »; Attendu que les sociétés en nom collectif et en commandite simple, qui avaient émis des obligations négociables, étaient, à raison de ce fait, dès avant les lois de 1871 et 1875, assujetties aux vérifications des agents de l'enregistrement, en vertu des lois des 5 juin 1850 et 23 juin 1857; - Attendu qu'il suit de là, et par voie de conséquence, que les sociétés en nom collectif et en commandite simple, qui ont émis des obligations négociables, doivent être aujourd'hui, comme les sociétés anonymes et les sociétés en commandite par actions, soumises à l'obligation de communiquer au fisc toutes les pièces visées dans les lois de 1871 et 1875; Attendu que la seule différence qui sépare les sociétés anonymes et les sociétés en commandite par actions des sociétés en nom collectif et des sociétés en commandite simple, au point de vue de l'obligation de communication, est que les premières y sont tenues pendant toute leur existence, et à raison mème de leur nature de sociétés par actions, tandis que les secondes n'y sont soumises qu'à raison de l'émission de ces obligations négociables; Attendu que, pour soutenir

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que les lois de 1871 et 1875 n'ont rien changé au devoir de communiquer, en cas d'émission d'obligations négociables, certains des registres, qui était imposé par les lois de 1850 et de 1857 aux socié tés en nom collectif et en commandite simple, les opposants à contrainte invoquent les termes du rapport de M. MathieuBodet à la Chambre des députés, lors de la discussion de la loi de 1871, qui ne visent que les sociétés par actions (S. Lois, annotées de 1871, p. 133, note 31-LI. — P. Lois, décr., etc. de 1871, p. 229, note 31-LI);

Mais attendu que les termes de ce rapport ne sont pas suffisamment explicites pour restreindre l'application de la loi, et décider qu'elle doit être entendue dans un sens restrictit que, d'ailleurs, ne comporte pas son texte; Attendu, il est vrai, que le législateur a traité, à propos de la taxe du revenu, d'une façon différente, les sociétés de personnes et les sociétés par actions, mais que cette différence ne peut réagir sur ce qui doit être décidé pour la communication des pièces aux agents du fisc, le texte des lois de 1871 et de 1875 étant net et impératif; Attendu que, si ce devoir de communication fait, ainsi que l'affirment les opposants à contrainte, une situation particulièrement gênante aux sociétés de personnes, cette considération ne saurait avoir une influence sur la décision du tribunal, dictée par les seuls termes de la loi;

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Sur l'astreinte : Attendu que, tous les titres négociables émis par la Société des Fermiers réunis étant actuellement reti rés de la circulation, la société n'est plus soumise à l'obligation de communiquer aucune pièce à la Régie; qu'elle ne doit pas être condamnée à le faire à l'avenir, et qu'aucune astreinte ne peut être prononcée contre elle; · Sur l'amende et son quantum...; Par ces motifs; Déboute la société de son moyen de nullité de la contrainte, tiré de l'irrégularité du procèsverbal de communication, et de ce fait qu'elle tendait au paiement d'une amende de 12.500 fr., principal et décimes au maximum; Dit que la Société de laiterie des Fermiers réunis, malgré son caractère de société en nom collectif et en commandite simple, était, pendant toute la période d'existence des obligations négociables qu'elle avait créées, soumise au devoir de communiquer au fisc tous les documents énumérés par l'art. 22 de la loi du 23 août 1871;- Ditque, ces obligations négociables étant actuellement remboursées, la société ne saurait être aujourd'hui contrainte à faire cette communication; dit, en conséquence, qu'il n'y a pas lieu prononcer contre elle l'astreinte prévue par l'art. 5 de la loi du 17 avril 1906; La condamne à payer une amende de 2.000 fr., en principal, auquel s'ajouteront les décimes, pour avoir refusé la communication à l'époque où elle y était obligée, etc.

à

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Du 17 juill. 1912. Trib. civ. de la Seine, 2 ch. MM. Sureau, prés.; Peignot, subst.

DIJON 18 juillet 1910.

PREUVE TESTIMONIALE, DEMANDES MULTIPLES, DEMANDES NON JUSTIFIÉES PAR ÉCRIT, EXPLOIT UNIQUE, JONCTION DES INSTANCES, ORDRE PUBLIC, OFFICE DU JUGE, RENONCIATION, MATIÈRE COMMERCIALE (Rép., vo Preuve testimoniale, n. 137 et s.; Pand. Rép., vo Preuve, n. 413 et s.).

Par application de l'art. 1346, C. civ., d'après lequel toutes les demandés qui ne sont pas entièrement justifiées par écrit doivent être formées par un même exploit,

(1 à 5) L'art. 1316, C. civ., a donné lieu à d'importances controverses en doctrine; mais il a fort peu occupé la jurisprudence. L'arrêt de la Cour de Dijon tranche, à son sujet, plusieurs questions délicates.

L'art. 1346 dit : « Toutes les demandes, à quelque titre que ce soit, qui ne seront pas entièrement justifiées par écrit, seront formées par un même exploit, après lequel les autres demandes dont il n'y aura point de preuves par écrit ne seront pas reçues ».

I. Fondement de l'art. 1346.

Cette question, la plus importante et la plus délicate de celles que soulève l'interprétation de l'art. 1346, est, pour la première fois, tranchée par une décision judiciaire.

Il y a sur elle deux opinions.

L'une d'elles, tenant compte du texte même de l'article, le considère comme ayant pour objet d'empêcher un créancier de faire subir à son débiteur des frais, des lenteurs et des vexations, en engageant une instance distincte pour chacune de ses créances, au lieu de les réunir dans un procès unique. On ne nie pas, d'ailleurs, que l'art. 1346 ne serve, en outre, de sanction à l'art. 1345, d'après lequel la preuve testimoniale n'est pas admise, quand, de plusieurs demandes, formées par la même instance, et qui, dans leur ensemble, dépassent 150 fr., aucune n'excède ce chiffre, et qui, lui-même, sanctionne l'interdiction de la preuve par témoins au-dessus de 150 fr., en empêchant qu'un créancier ne fractionne sa créance en plusieurs parties, toutes inférieures à 150 fr.; si l'art. 1346 n'existait pas, le créancier échapperait à la limitation de preuve que lui impose l'art. 1345, en engeant, pour ses diverses créances, des instances distinctes; mais cette considération, pour le législateur, n'a été que secondaire. D'après les partisans de cette opinion, les procès-verbaux de rédaction de l'ordonnance de 1667, qui a servi de base à la rédaction des articles du Code civil sur la preuve par témoins, indiquent que tel a été le fondement de la disposition que l'art. 1346 lui a empruntée. V. en ce sens, Marcadé, Explic. théor. et prat. du C. civ., t. 5, p. 135, sur l'art. 1346, n. 1; Colmet de Santerre, Cours anal. de C. civ. (contin. de A.-M. Demante), t. 5, n. 319 bis, I; Baudry-Lacantinerie, Précis de dr. civ, 7° éd., t. 2, n. 1266 bis ; Planiol,

(a) (Ribeyre C. Mercinier).

Dans un arrêt du 8 juin 1896, sur lequel est intervenu, à la suite d'un pourvoi, un arrêt de la chambre civile de la Cour de cassation, du 27 nov. 1899 (S. et P. 1900.1.217; Pand. pér., 1900.1143), la Cour d'Aix, saisie d'une exception d'irrecevabilité, opposée à l'appel interjeté par M. Ribeyre de trois jugements rendus au profit de M. Mercinier par le tribunal consulaire d'Alexandrie, avait statué ainsi qu'il suit : « La Cour; Sur l'irrecevabilité de l'appel, tirée du dernier ressort, en ce qui touche les trois jugements des 22 février, 10 mai et 21 juin 1895:- Considérant que les susdits jugements ont tous respectivement statué sur des demandes personnelles inférieures à 1.500 fr.; qu'à la vérité, ces demandes, si elles eussent été réunies, auraient excédé le taux d'appel, et qu'il est ANNÉE 1913. . 2 cah.

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les demandes formées après une instance engagée sur une première demande doivent être déclarées non recevables, encore bien que le tribunal ait ordonné la jonction de ces diverses demandes, si elles ont conservé leur caractère distinct, les intérêts dus à partir de la demande y étant calculés, pour chaque créance, à partir de la date de l'assignation (1) (C. civ., 1346).

L'art. 1346, C. civ., a un caractère d'ordre public, qui oblige le juge à en faire, même d'office, l'application (2) (Id.).

Par suite, la renonciation du défendeur

Tr. élém. de dr. civ., 5o éd., t. 2, n. 1132; Aubry et Rau, 4 éd., t. 8, p. 314, § 762, texte et note 39; Baudry-Lacantinerie et Barde, Tr. des oblig., 3e éd., t. 4, n. 2553; Bonnier, Tr. des preuves, 5o éd., par Larnaude, n. 162.

L'autre système, moins en faveur jusqu'à présent, voit uniquement dans l'art. 1346 la sanction de l'art. 1345, et le moyen d'éviter que soient transgressées les règles relatives à la prohibition de la preuve testimoniale. V. en ce sens, Aix, 8 juin 1896 (motifs), reproduit en sous-note (a); Laurent, Princ. de dr. civ., t. 19, n. 462; Huc, Comment. théor, et prat. du C. civ., t. 8, n. 286; Larombière, Théor. et prat, des oblig., t. 6, sur les art. 1345 et 1346, n. 19 et s.; Demolombe, Contr. ou oblig., t. 7, n. 72. C'est cette seconde opinion qu'admet la Cour de Dijon. Elle a pour elle la place occupée par l'art. 1346, non pas seulement à la suite immédiate du texte qui interdit la preuve par témoins pour des demandes multiples dans une même instance, mais aussi sous la rubrique de la preuve testimoniale ». Elle a également pour elle les travaux préparatoires, puisque l'exposé des motifs de Bigot-Préameneu (Fenet, Trav. prepar. du C. civ., t. 13, p. 302) ne donne que ce dernier fondement à l'art. 1346.

Les objections que l'on peut faire à cette doctrine, et particulièrement celle qui est tirée des procèsverbaux de l'ordonnance de 1667, sont réfutées par l'arrêt, et surtout par M. l'avocat général Lesoudier, dans ses remarquables conclusions, avec une ampleur qui nous dispense d'insister sur ce point. II. La disposition de l'art. 1346, C. civ., est-elle d'ordre public?

L'arrêt adopte l'affirmative, et en conclut que l'application doit en être faite d'office par le juge, et qu'il n'est pas permis au débiteur d'y renoncer, notamment en se défendant au fond sans opposer l'exception tirée de l'art. 1346. C'est l'opinion générale. V. Laurent, op. cit., t. 19, n. 468; Aubry et Rau, 4o éd., t. 8, p. 318, § 762, texte et note 48; Baudry-Lacantinerie et Barde, op. cit., 4, n. 2560; Larombière, op. cit., t. 6, sur les art. 1345 et 1346, n. 5. La solution contraire peut se défendre. C'est dans l'intérêt du défendeur que l'art. 1346 prescrit au demandeur de former toutes ses demandes dans le même exploit. Seul le défendeur est appelé à souffrir des lenteurs et des frais résultant de la

regrettable de voir un avocat recourir à un artifice de procédure pour soustraire l'action en paiement de ses honoraires au contrôle du second degré de juridiction, en divisant arbitrairement une demande qu'il avait d'abord soumise dans son ensemble aux tribunaux, et multiplier ainsi abusivement les frais judiciaires, mais qu'en agissant de la sorte, il n'a fait qu'user du droit qui appartient à tout demandeur de joindre ou de séparer les demandes distinctes qu'il introduit contre le même défendeur; Considérant qu'à l'origine, sans doute, Mercinier avait compris dans un compte général, par lequel il se préten dait créancier de Ribeyre d'une somme globale de 37.422 piastres au tarif, les articles dont la réclamation ou le recouvrement ont ensuite donné lieu aux trois instances susvisées; mais qu'en statuant sur cette prétention, le tribunal consulaire de France à Alexandrie, par son juge

au droit de se prévaloir de cette disposi tion est sans effet (3) (Id.).

Mais l'art. 1346, C. civ., placé dans la section qui traite de la preuve testimoniale, rentre dans l'ensemble des dispositions destinées à déterminer les conditions dans lesquelles ce mode de preuve est admis, et n'a pas l'objet plus général d'empêcher la multiplicité des procès (4) (Id.).

Par suite, il n'est pas applicable en matière commerciale, où il n'y a pas de restriction à la liberté de la preuve testimoniale (5) (C. civ., 1346; C. comm. 109).

multiplicité des demandes; il lui appartient donc de renoncer à un droit établi en sa faveur.

Cette considération prend une force toute particulière, si, avec l'arrêt ci-dessus recueilli, on voit dans l'art. 1346 la sanction de l'art. 1345, lequel, indiquant une hypothèse où la preuve testimoniale n'est pas admise, est l'application et le dévelop pement de l'art. 1341, relatif aux conditions d'admission de la preuve testimoniale; car il est constant en jurisprudence que les dispositions de l'art. 1341 n'ont pas un caractère d'ordre public. V. Cass. 1er août 1906 (S. et P. 1911.1.562; Pand. pér., 1911.1.562), la note et les autorités citées. Il est à noter, d'ailleurs, que l'art. 1346 ne s'exprime pas d'une manière plus impérative que l'art. 1341. Il porte que les demandes dont il parle seront formées par un même exploit, faute de quoi les autres demandes « ne seront pas reçues. L'art. 1341 dit de même qu' « il doit être passé acte de toutes choses excédant 150 fr. », et qu'il n'est reçu aucune preuve par témoins contre et outre le contenu aux actes ». Les termes sont analogues.

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III. Y a-t-il violation de l'art. 1346, si les demandes ont fait l'objet de diverses instances, alors que le tribunal a ordonné la jonction de ces instances?

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L'art. 1346 exige que les diverses demandes soient formées par un même exploit Mais les auteurs sont d'accord pour ne pas prendre ces mots à la lettre, quoiqu'ils soient très catégoriques. On reconnaît que le créancier peut former ses demandes par des exploits différents, pourvu qu'il les forme dans une même instance. V. Aubry et Rau, 4o éd., t. 8, p. 314, § 762, texte et note 38; Larombière, op. cit., t. 6, sur les art. 1345 et 1346, n. 6; Demnolombe, op. cit., t. 7, n. 75; Baudry-Lacantinerie et Barde, op. cit., t. 4, n. 2561. Quel que soit le fondement de l'art. 1346, peut-on dire en ce sens, la loi veut que le créancier intente toutes ses actions dans une même instance, soit pour l'empêcher d'employer indirectement une preuve testimoniale que la disposition précédente lui refuse directement, soit pour l'empêcher d'imposer à son adversaire, par des instances répétées, des vexations inutiles. Or, le calcal que la loi redoute ainsi chez le créancier n'existe réellement que si ce dernier ne formule pas toutes ses demandes dans la même instance; tout au moins, lorsque, après avoir ment du 19 janv. 1895, l'avait renvoyé, notamment en ce qui concernait ces articles, à se pourvoir par instances séparées, et s'était complètement dessaisi de la contestation quant à cette partie du compte; que, l'appel relevé par Ribeyre de cette décision n'ayant point porté sur ce chef du litige, et Mercinier n'ayant pas, de son côté, appelé dudit jugement, celui-ci avait acquis, à cet égard, l'autorité de la chose jugée; que, par suite, Mercinier avait repris sa liberté d'action, et restait libre d'introduire ses demandes autrement que par un même exploit, l'art. 1346, C. civ., ne trouvant pas son application dans la cause, du moment où il ne s'est point agi pour lui d'éluder la règle prohibitive en matière de preuve testimoniale; - Par ces motifs, etc.

Du 8 juin 1896. — C. Aix.

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