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date erronée peut être rectifiée, à la double condition que l'erreur ait été involontaire, et que la rectification puisse se faire avec des éléments pris intrinsèquement dans le testament (1) (C. civ., 970).

Spécialement, lorsque le testament porte une date (10 juin 1810), antérieure à la naissance du testateur (11 févr. 1827), les juges, qui constatent que l'erreur a été le résultat d'une inadvertance du testateur, peuvent, à l'aide du filigrane inscrit dans le papier timbré sur lequel est écrit le testament (1908), rectifier l'indication erronée du millésime, en décidant que, le testateur étant décédé en 1911, c'est en 1910 que le testament a été fait (2) (Id.).

...

Alors, d'ailleurs, qu'il n'est pas établi que les autres éléments de la date ne soient pas exacts (3) (Id.).

(Hue et Chevret C. Cons. Cuel). - ARRÈT.

LA COUR; Sur l'exception d'incompétence des premiers juges, soulevée pour la première fois en appel par les consorts Hue et Chevret: Considérant que le legs fait par le de cujus à ses neveux et nièce, et contenu dans son testament olographe daté du 10 juin 1810, constitue un legs universel, et non un legs à titre universel; que les expressions employées dans le testament et les sentiments d'égale affection du testateur pour tous ses neveux et nièce, et qu'il a tenu encore à affirmer dans son testament, en sont la preuve manifeste; que la mention « par parts égales, qu'il a insérée dans son testament, n'a pas eu pour but de restreindre la vocation héréditaire de ses neveux et nièce, mais seulement de régler l'exécution du legs et de prévenir toute contestation et toute discussion, en écartant expressément le partage par souches, et en imposant le partage par têtes;

Considérant que les consorts Hue et Chevret en concluent que c'était par voie de demande d'envoi en possession, adressée au président du tribunal dès l'ouverture de la succession, et non par voie de demande en délivrance, que les consorts Cuel devaient procéder, et que le tribunal de Senlis était incompétent pour statuer sur la demande

(1-2-3) Un testament olographe est nul, lorsqu'il porte une date inexacte, la fausseté de la date équivalant à l'absence de date. V. Cass. 12 févr. 1906 (S. et P. 1908.1.80; Pand. per., 1908.1.30), et la note; 21 févr. 1906 (S. et P. 1908.1.31; Pand. pér., 1908.1.81), et les renvois; Alger, 18 juin 1906, sous Cass. 16 févr. 1909 (S. et P. 1912.1.77; Pand. pér., 1912.1.77), la note et les renvois. Mais les juges peuvent rectifier la date erronée, lorsque son inexactitude est due à une inadvertance du testateur. V. Cass. 31 mars 1896 (S. et P. 1897.1.408; Pand. pér., 1897.1.89), et la note; Alger, 13 juin 1906, précité, la note et les renvois. Toutefois, la rectification n'est possible que si les juges trouvent des éléments de rectification dans le testament lui-même (V. Cass. 31 mars 1896, précité; 9 janv. 1900, S. et P. 1901.1.406; Pand. per.. 1900.1.467; 12 févr. 1906 et 21 févr. 1906, sol. implic., précités ; Alger, 13 juin 1906, précité, la note et les renvois), ou dans les éléments extrinsèques au testament, mais à la condition qu'ils aient leur racine dans le testament lui-même. V. Cass. 9 juill. 1885 (S. 1888.1.479. P. 1888.1.

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dont les consorts Cuel l'avaient saisi; Considérant que l'envoi en possession constitue incontestablement un avantage accordé par la loi au légataire universel; que le légataire universel est libre d'y renoncer, et qu'on ne peut guère lui faire grief d'avoir eu recours à la procédure moins simple et moins favorable de la demande en délivrance; que les consorts Hue et Chevret sont d'autant moins fondés dans leurs critiques de ce chef qu'ils avaient, dès le décès même du défunt, refusé d'exécuter son testament; que. l'ordonnance d'envoi en possession qui aurait pu être rendue se serait trouvée, par là même, dénuée d'effet; Considérant, d'autre part, que les consorts Hue et Chevret ont, à la suite de la demande en délivrance formée contre eux par les consorts Cuel, introduit eux-mêmes contre ceux-ci une demande en partage, et ont conclu, devant les premiers juges, à la jonction des deux instances; qu'il semble bien qu'ils ne sont plus recevables à arguer aujour d'hui de nullité une procédure dont euxmêmes ont reconnu implicitement la régularité, en demandant la jonction; que l'exception qu'ils soulèvent n'est donc pas plus recevable que fondée;

Sur la validité du testament : Considérant que le sieur Victor Hue, de cujus, est décédé le 10 mars 1911; qu'il était né le 11 févr. 1827; que son testainent est daté, en toutes lettres, du 10 juin 1810; que cette date est évidemment erronée, puisqu'elle est antérieure à la naissance du testateur; que, s'il est de règle que la date erronée équivaut à l'absence de date, et entraine, dès lors, la nullité du testament, il est aussi de principe que la date erronée peut être rectifiée, à la double condition : 1° que l'erreur ait été involontaire; 2o que la rectification puisse se faire avec des éléments pris intrinsèquement dans le testament;

Sur la première condition: Considérant que les premiers juges ont, avec raison, considéré qu'il ressortait manifestement de tous les faits et de toutes les circonstances de la cause que c'est par pure inadvertance que Victor Hue a daté son testament du 10 juin 1810;

1172); Alger, 13 juin 1906, précité, et les renvois. Le filigrane du papier timbré, notamment, peut constituer l'un de ces éléments de rectification. V. Cass. 28 mai 1894 (S. et P. 1896.1.277; Pand. pér., 1894.1 516); 31 mars 1896, précité, et les renvois. V. aussi. Cass. 12 févr. 1906 (sol. implic.), précité.

Dans l'espèce de l'arrêt ci-dessus recueilli, la fausseté de la date était évidente, et elle était due, suivant les constatations des juges, à une inadvertance du testateur. Le testament était daté du 10 juin 1810, alors que le testateur était né le 11 févr. 1827. Le papier timbré sur lequel le testament était rédigé portant dans le filigrane le millésime de 1908, et le testateur, d'autre part, étant décédé le 10 mars 1911, le testament se plaçait manifestement entre la date d'émission du papier timbré (1908) et la date du décès. La Cour d'Amiens a conclu que le chiffre 8 du millésime, qui seul était argué d'inexactitude, pouvait être rectifié à l'aide du filigrane, qui permettait d'y substituer le chiffre 9, et de rétablir la date de 1910, postérieure à l'émission du papier timbré, et antérieure au décès. Il a été jugé, dans une espèce analogue,

Sur la deuxième condition : Considérant que les diverses parties d'une date, les jour, mois et an, sont, par elles-mêmes, divisibles; que l'erreur sur une des parties de la date ne vicie pas forcément les autres parties; que, la feuille de papier timbré sur laquelle est écrit le testament étant au filigrane de 1908, il s'ensuit : 1° que le testament litigieux a été rédigé postérieurement au 1er janv. 1908; 2o que le chiffre des centaines du millésime est inexact, et que le 8 qui le représente doit être remplacé par un 9; Mais considérant que c'est là aussi la seule erreur dont la preuve soit nettement établie; qu'en ce qui concerne, non seulement le jour et le mois, mais même les autres chiffres de l'année, représentant les unités, les dizaines et les mille, rien ne permet de croire qu'ils sont erronés, et ils doivent, en l'absence de toute preuve contraire. être considérés comme exacts; Considérant que, les années 1908 et 1909, qui sont les seules qui se placent entre le 1er janv. 1908 et le 10 mars 1911, ne contenant pas le chiffre 10 comme chiffre des unités et des dizaines, le millésime réel se trouve forcément être celui de 1910; — Par ces motifs; En la forme: Déclare les consorts Hue et Chevret aussi bien non recevables que mal fondés en leur exception d'incompétence; Au fond Confirme le jugement dont est appel dans toutes ses dispositions, etc.

Du 3 juill. 1912. C. Amiens. MM. Petit, 1r prés.; Guilmard, av. gén.; Quérenet et Paisant (du barreau de Paris),

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que, lorsque c'est par suite d'une erreur involontaire, démontrée par le filigrane du papier timbré, émis en mars 1889, qu'un testament olographe a été daté du 20 mai 1887, les juges du fond peuvent, en tenant compte de ce fait que le testament est suivi, sur la même feuille, d'un codicille du 13 avril 1890, se rattachant à ses dispositions par un lien indissoluble, et dont la date n'est pas contestée, décider que le testament, n'ayant pu être fait, ni en 1887, ni en 1888, avait nécessairement été rédigé le 20 mai 1889. V. Cass. 31 mars 1896, précité, et le renvoi. Mais il a été jugé que doit être déclaré nul le testament olographe d'une personne décédée le 20 juin 1903, écrit sur une feuille de papier timbré au filigrane de 1897, et portant la date manifestement fausse du 16 sept. 1896; si, en effet, la mention du filigrane infirme seulement le dernier chiffre du millésime de la date apposée par le testateur et en laisse subsister tout le surplus, elle n'en rend pas moins incertain le point de savoir laquelle des trois années 1897, 1898 et 1899 est celle de la confection de son testament. V. Cass. 12 févr. 1906, précité.

La séparation de biens judiciairement prononcée ne fait pas disparaitre l'inaliénabilité de la dot, et ne modifie pas à cet égard la situation des créanciers (1) (C. civ., 1449, 1554).

Si les frais ou fournitures faits pour la conservation de la dot peuvent être recouvrés sur les biens dotaux, en application de l'art. 1558, C. civ., c'est seulement après que le juge aura été appelé à examiner si la créance qui sert de fondement aux poursuites est bien au nombre de celles au profit desquelles l'immeuble peut être déclaré aliénable (2) (C. civ., 1558).

En conséquence, l'immeuble dotal ne peut être saisi directement par un créancier, pour avoir paiement des travaux et fournitures de peinture qu'il y a faits (3) (Id.). (Epoux Gleizes Batut C. Pomiès). ARRÊT.

LA COUR: Attendu que, pour avoir paiement d'une somme de 318 fr. 65, à raison de travaux et fournitures de peinture, le sieur Pomiès. peintre en batiments à Carcassonne, a fait saisir immobilièrement la maison appartenant à la dame Gleize, épouse Batut, maison sise dans cette ville; que cet immeuble était dotal, aux termes du contrat de mariage des époux Batut, en date du 6 juill. 1896; Attendu qu'à tort, le tribunal, dans son jugement dont est appel, a fait état de la séparation de biens obtenue par la dame Batut, antérieurement aux travaux de peinture effectués à la maison dotale, et déclaré que, par suite de cette séparation et de la reprise de la libre administration de sa fortune, ladite dame n'avait plus le droit de se retrancher derrière le principe de la dotalité; Attendu que la séparation de biens judiciairement prononcée ne fait pas disparaître l'inaliénabilité de la dot. et ne modifie pas à cet égard

(1) C'est un point certain que la séparation de biens judiciairement prononcée ne fait pas disparaître l'inaliénabilité de la dot, et ne modifie pas, à cet égard, la situation des créanciers de la femme. V. Cass. 19 oct. 1903 (S. et P. 1909.1. 558; Pand. pér. 1909.1.558), et les renvois; 31 mai 1911 (S. et P. 1912.1.500; Pand. pér., 1912.1.500),

et les renvois.

(2-3) Si un immeuble dotal peut, en veitu de l'art. 1558, C. civ., être aliéné avec permission de justice pour le paiement de certaines dettes, et notamment de celles qui résultent de grosses réparations indispensables pour la conservation de l'immeuble dotal (V. sur ce qu'il faut entendre par grosses réparations, au sens de l'art. 1558, C. civ., Cass. 2 mai 1898, S. et P. 1899.1.173, la note et les renvois; Pand. per., 1898.1.307), il ne résulte pas de cette exception apportée au principe de l'inaliénabilité dotale que le créancier puisse, même pour l'une des créances énumérées à l'art. 1558, C. civ., saisir directement l'immeuble dotal ou le prix en provenant. Bien que cette solution ait été contestée (V. la note de M. Boutaud sous Cass. 10 nov. 1897, S. et P. 1898.1.353), elle nous paraît s'imposer, puisque l'art. 1558 a subordonné à l'autorisation du juge, dans les cas qu'il énumère, l'aliénation de l'immeuble dotal. V. en ce sens, Cass. 13 mars 1867 (S. 1867.1.256. P. 1867.648), et la note. Adde, les observations à la suite de la note précitée de M. Boutaud sous Cass. 10 nov. 1897. La Cour de cassation a d'ail

la situation des créanciers: que, sans doute, des frais ou fournitures faits pour la conservation de la dot peuvent être récupérés sur elle, par application de l'art. 1558, C. civ., mais après que le juge aura été appelé à examiner si la créance qui sert de fondement aux poursuites est bien au nombre de celles au profit desquelles l'immeuble peut être déclaré aliénable: Attendu que l'économie du régime dotal, tel qu'il est organisé par notre loi, exige que le principe fondamental de l'inaliénabilité ne soit enfreint que dans les limites strictes prévues par elle, et qu'il ne résulte pas, de ce que l'art. 1558 ait prévu certaines exceptions au principe, que le créancier puisse saisir directement et de plein droit l'immeuble dotal; Attendu, dans ces conditions, que le sieur Pomies a mal procédé, en saisissant immobilièrement la maison dont s'agit; que cette saisie était nulle, et qu'il doit être condamné aux frais exposés à ce jour; Par ces motifs: - Disant droit à l'appel formé par la dame Batut, envers le jugement du tribunal civil de Carcassonne, en date du 17 mars 1911; - Dit et déclare que la saisie immobilière a été irrégulièrement pratiquée, en prononce la nullité, etc.

Du 18 janv. 1912. C. Montpellier, 2 ch.MM. Moulenq, prés.: Balmary, av. gén.; Mercier et Louis Vallat, av.

RENNES 11 mars 1912.

1o JUGEMENT ET ARRÊT PAR DÉFAUT, DÉFAUT PROFIT-JOINT, PRÉJUDICE AU DÉFAILLANT, CONDAMNATION AUX FRAIS, OPPOSITION, RECEVABILITÉ (Rép., v Jugement et arrêt [mat. civ. et comm.], n. 3788 et s., 3866: Pand. Rép., v Jugements et arrêts par déleurs décidé, à propos d'une saisie pratiquée sur les immeubles dotaux par un créancier d'aliments, que, dans les cas prévus par l'art. 1558, le droit de demander l'autorisation d'aliéner l'immeuble dotal est un droit personnel à la femme, que les créanciers ne peuvent exercer en ses lieu et place, si elle refuse de solliciter cette autorisation (V. Cass. 10 nov. 1897, précité; Pand. pér., 1900.1.305). Adde, nos observations précitées. Mais V. la note de M. Boutaud sous cet arrêt.

(4-5) Le jugement qui ordonne la jonction d'un défaut, devant présenter un caractère purement préparatoire et ne préjuger aucun des points en litige (V. Carré et Chauveau, Lois de la proc., t. 2, quest. 623; Bioche, Dict. de proc., vo Jugement par défaut, n. 58; Garsonnet, Tr. de proc., 2o éd., par Cézar-Bru, t. 6, § 2186, p. 192; notre C. proc. annoté, par Tissier, Darras et Louiche-Desfontains, sur l'art. 153, n. 71; et notre Rép. gén. du dr. fr., V Jugement et arrêt [mat. civ. et comm.], n. 3788; Pand. Rep., v° Jugements et arrêts par défaut, n. 634), n'est pas, en principe, susceptible d'opposition. V. C. d'appel de Bruxelles, 1er juill. 1820 (S. et P. chr.); Chauveau, sur Carré, op. cit., t. 2, quest. 630; Garsonnet, op. cit., t. 6, § 2186, p. 193, note 13; notre C. proc. annoté, loc. cit.; et notre Rép. gén. du dr. fr., verb. cit., n. 3866; Pand. Rép, -verb. cit., n. 639. Mais des auteurs décident, comme l'arrêt ci-dessus, que ce jugement peut, par exception, être frappé d'opposition, s'il contient une disposition préjugeant le fond ou de nature à faire

faut, n. 634 et s.). — 2o BREF DÉLAI, ACTE D'APPEL, DÉLAI DE DISTANCE, ABRÉVIATION, ORDONNANCE DU PREMIER PRÉSIDENT (Rép., vo Ajournement, n. 334 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 563 et s.). 30 APPEL EN MATIÈRE CIVILE, EFFETS, INDIVISIBILITÉ, DEMANDE EN NULLITÉ DE BAIL (Rép.. v Appel [mat. civ.], n. 1671 et s.; Pand. Rép., v Appel civil, n. 2396 et s.).

1 Si, en principe, les jugements ou arrets de défaut profit-joint ne sont pas susceptibles d'etre attaqués par la voie de l'opposition, il en est différemment, lorsqu'ils ne se bornent pas à constater l'absence d'un défaillant et à ordonner sa réassignation, mais contiennent quelque disposition de nature à préjuger le fond, ou font d'ores et déjà grief à une partie qui n'a pas été en état de se défendre (4) (C. proc., 153).

Spécialement, l'opposition est recevable, de la part du défaillant, contre un arrêt de défaut profit joint qui l'a condamné aux dépens et aux frais de notification et de réassignation (5) (Id.).

2 Si l'ordonnance du premier président, qui autorise en appel l'assignation à bref délai, peut diminuer les délais de comparution, elle ne peut restreindre les délais de distance, qui doivent être observés, à peine de nullité de l'assignation (6) (C. proc., 72, 456, 1033).

3 Lorsque l'action est, par son objet, indivisible, ce qui est le cas pour la demande en nullité d'un bail introduite contre plusieurs défendeurs, le bail ne pouvant être maintenu à l'égard des uns sans l'être à l'égard des autres, l'appel peut être considéré comme valablement interjeté, au regard même de l'intimé qui a été assigné sans observation du délai de distance, si l'appel a été régulièrement formé à l'égard des autres parties en cause (7) (C. proc., 443).

grief au défaillant. V. Garsonnet, op. et loc. cit.; et notre Rép. gén. du dr. fr., ubi supra; Pand. Rep., verb. cit., n. 642.

(6) En matière civile, la jurisprudence paraît fixée en ce sens que si, par application de l'art. 72, C. proc., dans les cas qui requièrent célérité, le délai ordinaire de comparution peut être abrégé, il n'en est pas de même du délai de distance. V. Aix, 15 mai 1908 (S. et P. 1909.2.301 ; Pand. pér. 1909.2.301), la note et les renvois; Rouen, 25 mai 1909 (S. et P. 1910.2.56; Pand. pér., 1910.2.56), et le renvoi. Mais la question est controversée en matière commerciale. V. en ce sens qu'il n'est pas possible d'abréger le délai de distance, Aix, 15 mai 1908, et Rouen, 25 mai 1909, précités. Mais V. en sens contraire. Trib. comm. du Havre, 28 avril 1908 (S. et P. 1909.2.301; Pand. pér., 1909.2.301), infirmé par l'arrêt de Rouen, 25 mai 1909, précité. V. au surplus sur la question, la note sous Aix, 15 mai 1908, et Trib. comm. du Havre, 28 avril 1908, précités.

(7) Si, dans les causes où figurent plusieurs parties, l'appel n'a d'effet, en principe, qu'à l'égard de celles contre qui il a été régulièrement interjeté (V. Cass. 2 janv. 1894, S. et P. 1895.1.399; Pand. per., 1894.1.457; 9 janv. 1905, S. et P. 1907.1.13; Pand. pér., 1905.1.60, et les renvois), on admet, au contraire, qu'au cas où la contestation est indivisible (V. sur l'indivisibilité en matière de bail, Rouen, 15 avril 1897, S. et P. 1898. 2.241, la note de M. Dalmbert, et les renvois),

(Vve Galaine C. Consorts Brisou).

LA COUR; Considérant que, par jugement du tribunal civil de Rennes, du 20 oct. 1911, la dame Galaine a été déboutée d'une demande en résiliation de bail, avec dommages intérêts, qu'elle avait formée contre les consorts Brisou; que, par requête à M. le premier président de la Cour de Rennes, en date du 31 oct. 1911, la dame Galaine demandait à être autorisée à assigner directement les consorts Brisou, dans l'acte d'appel qu'elle voulait interjeter, pour telle audience qui lui serait indiquée, la cause requérant célérité; Considérant qu'il fut fait droit à cette requête, par ordonnance de M. le premier président du 31 octobre, qui fixait. la cause pour être conclue et plaidée à l'audience du 22 nov. 1911; que l'urgence était justifiée par des raisons de bonne administration de la justice dont le magistrat était seul juge; Considérant qu'assignation fut donnée, par exploit de Giffard, en date du 10 nov. 1911, aux consorts Brisou, domiciliés dans l'arrondissement de Rennes, et par exploit du 11 nov. 1911, de Combier, huissier à Lille, à Adolphe Brisou, demeurant à Lille; - Considérant qu'à l'audience du 22 nov. 1911, Adolphe Brisou ne s'est pas présenté, ni aucun avoué pour lui, et qu'un arrêt de défaut profit-joint a été rendu contre lui; qu'il a été condamné aux dépens de cet arrêt, et de sa notification avec réassignation; Considérant qu'Adolphe Brisou a formé opposition à cet arrêt; que cette opposition est recevable; Considérant que si, en principe, les jugements ou arrêts de défaut profit-joint ne sont pas susceptibles d'être attaqués par la voie de l'opposition, il en est autrement lorsque ces décisions ne se bornent pas à constater l'absence d'un défaillant et à ordonner sa réassignation, mais contiennent quelque disposition de nature à préjuger le fond, ou font d'ores et déjà grief à une partie qui n'a pas été en état de se défendre; Considérant que, d'une part, l'arrêt de défaut a été prononcé le 22 novembre contre Adolphe Brisou, qui n'avait été assigné à son domicile, à Lille, que le 11 novembre, et que, d'autre part, il a prononcé contre Adolphe Brisou condamnation aux dépens de l'arrêt, de sa notification et de la réassignation; que, dans cette dernière partie, il a perdu son caractère d'arrêt de défaut profit-joint, pour ne plus constituer qu'un arrêt de défaut ordi

l'appel régulièr ment interjeté à l'égard de certaines des parties en cause produit ses effets vis-àvis des autres. V. Cass. 18 juin 1895 (S. et P. 1899. 1.493, et les renvois; Pand. pér., 1901.1.369); Limoges, 5 juin 1899 (S. et P. 1901.2.113), et, sur pourvoi, Cass. 15 avril 1902 (S. et P. 1902.1.316; Pand. pér., 1904.1.305); Bordeaux, 14 janv. 1908 (sol. implic.) (S. et P. 1908.2.190; Pand. pér., 1908.2.190), la note et les renvois, Spécialement, il a été jugé que l'appel, interjeté en temps utile vis-à-vis de l'une des parties, conserve le droit de l'appelant à l'égard des autres. V. Cass. 18 juin 1895, précité, et les renvois; 15 avril 1902, précité; Bordeaux, 14 janv. 1908 (sol. implic.), précité. V. encore les renvois de la note sous Nancy, 11 janv. 1910 (S. et P. 1910.2.240; Pand. pér., 1910.2.240).

naire, susceptible dès lors d'être réformé par la voie de l'opposition;

Considérant qu'Adolphe Brisou soutient encore que l'exploit d'appel, à lui signifié le 11 nov. 1911, avec assignation à comparaître le 22 nov. 1911, est nul, en violation des art. 72, 456 et 1033, C. proc.; Considérant qu'il est certain que la distance entre Lille et Rennes, sans qu'elle puisse être exactement déterminée, est supérieure à 500 kilomètres; que l'ordonnance d'urgence, si elle peut diminuer les délais de comparution, ne peut cependant, aux termes d'une jurisprudence constante, restreindre les délais de distance; que l'assignation est nulle, et que cette nullité entraine celle de l'acte d'appel;

Mais considérant qu'il s'agit, en la cause, d'une demande en nullité d'un bail consenti par la dame Galaine ou son auteur aux consorts Brisou; que ce bail ne peut être maintenu à l'égard des uns, sans l'être également à l'égard des autres; que, dans ces conditions, la dame Galaine ayant valablement interjeté appel à l'encontre de plusieurs parties, cet appel doit être réputé valablement interjeté à l'égard de toutes parties; - Au fond: ... (sans intérêt);

Par ces motifs; - Reçoit Adolphe Brisou opposant à l'arrêt de défaut du 22 nov. 1911; Dit et juge nul cet arrêt, en tant qu'il a condamné Adolphe Brisou aux frais dudit arrêt et de sa notification avec réassignation; dit nul l'exploit du 11 nov. 1911 et l'acte d'appel y contenu; dit recevable l'appel de la dame Gallaine contre les consorts Brisou, de Rennes, et, vu l'indivisibilité de la cause, dit opposable ledit appel à Adolphe Brisou; etc. Au fond : Déboute, etc.

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Du 11 mars 1912. · C. Rennes, Ire ch. - MM. de Savignon-Larombière, prés.; Mahoudeau, av. gén.; Deschamps et Bily, av.

PARIS 30 avril 1912.

OUVRIER, ACCIDENTS DU TRAVAIL, RESPONSABILITÉ, Loi du 9 AVRIL 1898, ACCIDENTS DONNANT LIEU A INDEMNITÉ, HEURE ET LIEU DU TRAVAIL, RIXE, PROVOCATION (Rép., vo Responsabilité civile, n. 1646 et s., 2095 et s.; Pand. Rép., vo Travail, n. 1972 et s., 2134 et s.).

La blessure reçue par un ouvrier, à l'heure et au lieu du travail, au cours d'une

De même, dans les matières indivisibles, l'appel régulièrement interjeté par l'une des parties profite aux autres parties. V. Nancy, 11 janv. 1910, précité, la note et les renvois.

(1) L'accident survenu au temps et au lieu du travail engage la responsabilité du patron, aux termes de la loi du 9 avril 1898, sans qu'il soit nécessaire qu'il ait été causé par le fait même du travail, pourvu que le travail en ait été l'occasion. V. Cass. 22 nov. 1909 (S. et P. 1910.1.254; Pand. pér., 1910.1.254); 8 déc. 1909 (S. et P. 1910.1. 254; Pand. per., 1910.1.254), et la note; 20 avril 1912 (S. et P. 1912.1.335; Pand. pér., 1912.1.335), la note et les renvois. La Cour de cassation a appliqué ce principe aux accidents résultant de rixes survenues entre ouvriers au temps et au lieu

rixe avec un autre ouvrier, est un accident du travail, qui donne lieu à l'application de la loi du 9 avril 1898 (1) (L. 9 avril 1898, art. 1er).

Il importe peu que la rixe ait été provoquée par la victime, cette circonstance pouvant seulement autoriser les juges à diminuer l'indemnité, s'il y a eu faute inexcusable de la victime (2) (LL. 9 avril 1898, art. 20; 22 mars 1902).

(Soc. Coopérative de consommation de Villeneuve-Saint-Georges C. Mailhes).

ARRÊT.

LA COUR; Considérant que Mailhes a été blessé au cours d'une rixe survenue entre lui et son camarade d'atelier Bernard sur le lieu et à l'heure de son travail; qu'il y a donc lieu à application de la loi du 9 avril 1898; que le fait que l'accident aurait été provoqué par la faute de l'intimé ne pourrait qu'autoriser la Cour à dimi nuer la pension allouée par ladite loi, aux termes de l'art. 20; mais qu'il n'est mème pas établi qu'il y ait eu faute inexcusable de Mailhes, celui-ci n'ayant fait que se défendre contre l'agression dont il était l'objet; — Par ces motifs; Confirme le jugement dont est appel; Déboute la Société coopérative de Villeneuve de toutes ses demandes, fins et conclusions, etc. Du 30 avril 1912. C. Paris, 6 ch. MM. Bédorez, prés.; Siben, subst.; Sourbès, av.

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LYON 22 décembre 1909. LEGS-LÉGATAIRE (EN GÉNÉRAL), CAPACITÉ DE RECEVOIR, DERNIÈRE MALADIE, GARDEMALADE (Rép., vis Donations entre vifs, n. 1256 et s., Testament, n. 136 et s.; Pand. Rép., vo Donations et testaments, n. 1614 et s.).

La nullité des dispositions testamentaires faites en faveur des docteurs en médecine ou en chirurgie, officiers de santé el pharmaciens qui ont traité le dispo sant pendant la maladie dont il est mort, ne doit pas étre étendue aux dispositions faites en faveur des gardes-malades (3) (C. civ., 909).

La nullité d'une disposition faite en faveur d'une garde-malade ne peut être prononcée que s'il est relevé à la charge de la garde-malade des faits présentant le caractère de la captation (4) (C. civ., 901, 909).

du travail. V. Cass. 23 avril 1902 (S. et P. 1904. 1.182, et la note; Pand. pér., 1903.1.114); 8 juill. 1903 (S. et P. 1904.1.487); 20 avril 1912, précité, et les notes sous ces arrêts. C'est également la solution qu'adopte la Cour de Paris dans l'arrêt ci-dessus recueilli. Mais elle a rencontré de sérieuses résistances dans la jurisprudence des Cours d'appel. V. Lyon, 4 mai 1911 (S. et P. 1912.2.39; Pand. pér., 1912.2.39), et les renvois.

(2) La provocation de la part de la victime de l'accident pourrait seulement autoriser une diminution de pension, si elle avait le caractère d'une faute inexcusable. V. Cass. 20 avril 1912 (S. et P. 1912.1.335; Pand. pér., 1912.1.335), et la note.

(3-4) La disposition de l'art. 909, C. civ., aux termes de laquelle les docteurs en médecine ou en

(Dame Ferrand C. Dame Obéniche).

28 oct. 1908, jugement du tribunal de Lyon, ainsi conçu: -( Le Tribunal; - Sur l'application de l'art. 909, C. civ. : Attendu que cet article dispose que les docteurs, les officiers de santé et les pharmaciens, qui auront traité une personne pendant la maladie dont elle meurt, ne pourront profiter des dispositions entre vifs ou testamentaires qu'elle aurait faites en leur faveur; que cette disposition ne saurait s'appliquer dans l'espèce actuelle; que, si la doctrine et la jurisprudence ont étendu la prohibition de recevoir aux charlatans, empiriques et magnétiseurs exerçant illégalement la médecine, il n'en est pas de même, en ce qui concerne les gardes-malades; que rien, ni dans la lettre, ni dans l'esprit de l'art. 909, ne vise une telle catégorie de personnes ; que les incapacités sont limitatives et ne peuvent être étendues; que, du reste, le rôle effacé joué, au point de vue médical, par les gardes-malades, ne permet pas de les ranger parmi les personnes contre lesquelles la loi à cru devoir prendre des précautions; qu'elles n'ont pas, par leur savoir ou leur intelligence, la faculté de peser sur l'esprit du malade pour l'engager à tester en leur faveur; que, si elles peuvent, en l'entourant de soins, en s'emparant de sa confiance, le prédisposer à des libéralités, il y a alors un fait de captation, qui rentre dans les causes d'annulation du droit commun, mais qui ne prend nullement sa source dans l'art. 909, C. civ.;

chirurgie, les officiers de santé et les pharmaciens, qui auront traité une personne pendant la maladie dont elle meurt, ne pourront profiter des dispositions entre vifs ou testamentaires qu'elle aurait faites en leur faveur pendant le cours de cette maladie », doit-elle être étendue aux gardes-malades qui ont soigné le disposant pendant sa dernière maladie? La question est controversée. Une première opinion se prononce pour l'affirmative. V. Delvincourt, Cours de C. civ., éd. 1819, t. 2, p. 417; Baudry-Lacantinerie et Colin, Don. et test., 3o éd., t. 1o, n. 481. En faveur de cette opinion, on a fait observer que la captation est encore plus à redouter de la part de personnes comme les gardes-malades que de la part de médecins ou de pharmaciens, qui appartiennent à un milieu social plus élevé, et offrent, de par les études qu'ils ont faites et les diplômes dont ils justifient, plus de garanties d'honorabilité et de moralité. On a ajouté que le danger est d'autant plus grand que les gardes-malades, qui sont sans cesse en contact avec la personne à laquelle ils donnent leurs soins, peuvent acquérir зur son esprit beaucoup plus d'ascendant qu'un médecin, un officier de santé, ou un pharmacien, dont les visites n'ont lieu qu'à des intervalles plus on moins éloignés, et on a enfin invoqué la tendance de la jurisprudence à étendre l'incapacité de recevoir édictée par l'art. 909, tendance qui s'est notamment manifestée par l'application de l'art. 909 aux empiriques, charlatans et magnétiseurs. V. Lyon, 17 juin 1896 (S. et P. 1898. 2.124; Pand. pér., 1897.2.256), la note et les renvois.

Cette opinion doit, à notre avis, être rejetée, et il faut décider que l'incapacité de recevoir, édictée par l'art. 909, ne peut être étendue aux gardesmalades. V. en ce sens, Duranton, t. 8, n. 252; Aubry et Rau, 4o éd., t. 7, p.31, § 649; Huc, Com

qu'il y a donc lieu de rejeter la demande des époux Ferrand; - Attendu que l'administrateur provisoire-séquestre de la succession déclare s'en rapporter à justice; qu'il y a lieu de lui donner acte de sa déclaration; — Par ces motifs; Dit et pro

nonce que la demande des époux Ferrand est mal fondée, la rejette; Dit, en conséquence, que le testament de la demoiselle Donnet, reçu par Me Tricou, notaire à Lyon, le 29 mars 1995, sortira son plein et entier effet, et que la dame Obéniche pourra profiter de toutes les dispositions contenues dans le testament, etc. ». Appel par les époux Ferrand.

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VENTE (EN GÉNÉRAL), NON-PAIEMENT DU PRIX, RÉTENTION (DROIT DE), LAINES, DÉPÔT AU MAGASIN DE PEIGNAGE, DÉLIVRANCE EFFECTIVE (ABSENCE DE) (Rép., vis Rétention [Droit de], n. 158 et s., Vente, n. 1085 et s.; Pand. Rép., v Rétention, n. 108 et s.).

La délivrance de la chose vendue, qui prive le vendeur non payé du droit de rétention à lui conféré par l'art. 1612,

ment. du C. civ., t. 6, n. 100; Laurent, Princ. de dr. civ., t. 11, n. 841; Demolombe, Tr. des don. et test., t. 1, n. 509; Saintes pès-Lescot, Des don. et des test., t. 1, n. 241; et notre C. civ. annoté, par Fuzier-Herman et Darras, sur l'art. 909, n. 1.

La raison en est que l'art. 909 est une disposition qui, étant restrictive de la capacité de recevoir, doit être strictement appliquée. Or, il ressort de l'énumération même que fait l'art. 909 qu'il n'a entendu viser que des personnes qui ont assuré le traitement médical du malade, soit qu'elles l'aient directement traité, ce qui est le cas des médecins, chirurgiens et officiers de santé, soit qu'elles lui aient procuré les remèdes qui pouvaient apporter un soulagement à ses souffrances, ce qui est le cas des pharmaciens. C'est pour ce motif, et parce que l'art. 909 a eu en vue le traitement du malade, que la jurisprudence en a pu faire l'application aux empiriques, charlatans et magnétiseurs; ceux-ci, en effet, se comportent comme des médecins, et le fait qu'ils exercent illégalement l'art médical ne saurait avoir pour effet de les mettre à l'abri des prohibitions de l'art. 909. Tel n'est pas le cas pour les gardesmalades, qui n'exercent pas l'art médical, qui ne traitent pas le malade, et se bornent à assurer, par les soins qu'ils lui donnent, l'observation des prescriptions du médecin. Ce serait méconnaître la disposition même de l'art. 909 que de les assimiler aux médecins. Ce serait également en méconnaître l'esprit. Comme l'a justement fait observer Saintespès-Lescot (op. et loc. cit.), il n'y a pas de comparaison à établir entre un garde-malade et un médecin. L'art. 909 ne pouvait pas plus les confondre quant à l'influence qu'ils sont en mesure d'exercer sur l'esprit du malade que quant à leurs attributions. L'ascendant de l'un, bien moindre que celui de l'autre, en qui on a ordinairement une foi

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C. civ., doit s'entendre, non d'une transmission fictive, s'opérant par le seul fait de la convention, mais bien d'une tradition effective et matérielle, faisant passer la chose vendue aux mains de l'acheteur, de sorte qu'il en ait la possession apparente et réelle (1) (C. civ., 1612 et s.).

Une simple mise de la chose vendue à disposition de l'acheteur, émanant du vendeur ou du dépositaire qui détient la marchandise pour son compte, ne peut être considérée comme une tradition matérielle et effective; elle constitue seulement une autorisation de prendre livraison, et n'équivaut à la délivrance réelle que si la prise de possession se réalise (2) (Íd.).

En conséquence, le vendeur de balles de laine, par lui déposées dans les magasins de peignage, peut, si le prix de vente n'a pas été payé, exercer son droit de rétention sur la marchandise vendue, encore bien que ces laines aient été mises par le vendeur à la disposition de l'acheteur chez le dépositaire, qui en a averti l'acheteur, si celui-ci est resté dans une complète abstention et n'a effectué aucun acte équivalent à une prise de livraison (3) (Id.).

Il importerait peu que, d'après l'usage du commerce local, la mise à la disposition de l'acheteur, dans ces conditions, soit considérée comme une prise de possession réelle et effective de l'acheteur, cet. usage, fut-il établi, ne pouvant se substituer à la loi, et mettre obstacle au droit de rétention qu'elle consacre au profit du vendeur (4) (Id.).

aveugle, qui, d'ailleurs, est souvent l'arbitre de la santé ou de la vie, n'entraîne pas des inconvénients assez redoutables pour appeler les rigueurs de la loi ..

Les gardes-malades ne sont donc frappés d'aucune incapacité, et les libéralités faites en leur faveur ne peuvent être annulées, conformément aux règles de droit commun, que s'il est établi qu'elles ont été le résultat d'une captation, d'une suggestion, ou de toute autre violence morale. V. Huc et Saintes pès-Lescot, ubi supra.

(1-2-3-4) L'art. 1612, C. civ., qui permet au vendeur non payé de son prix de retenir la chose vendue, et l'art. 577, C. comm., qui confère le même droit au vendeur, en cas de faillite de l'acheteur, disposent l'un et l'autre que le droit de rétention est perdu, dès que le vendeur a délivré la chose vendue à l'acheteur. La question s'est posée de savoir dans quel cas, il y a délivrance, mettant obstable à l'exercice du droit de retention. Dans la note sous Bordeaux, 18 juin 1900 (S. et P. 1904.2.137), notre savant collaborateur, M. Wahl, a établi que le droit de rétention subsiste tant que l'acheteur n'a pas été mis en possession réelle et apparente de la chose vendue, et qu'à défaut de cette mise en possession réelle et effective, le droit de rétention peut être exercé, encore bien que le vendeur ait déclaré tenir les marchandises à la disposition de l'acheteur. V. dans le même sens, Cass. 24 janv. 1859 (S. 1859.1.106.P. 1859.384); 8 avril 1891 (S. et P. 1904.2.137, ad notam; Pand, pér., 1892.1.42); 12 mai 1903 (S. et P. 1905.1.327; Pand. pér., 1904.1.284), la note et les renvois. Comp. Bordeaux, 18 juin 1900, précité. La Cour de cassation a fait application de ces principes, en décidant, dans une espèce analogue à celle de l'arrêt ci-dessus recueilli, que, dans le cas de faillite de l'acheteur, le droit de

(Trentesaux et Destombes C. Brouwers frères, Voos et Centner).

19 déc. 1911, jugement du tribunal de commerce de Tourcoing, dont extrait suit : << Le Tribunal; Attendu que Trentesaux et Destombes exposent que, le 4 août 1911, ils ont vendu à Brouwers frères les lots 3317 et 3375, qui avaient été travaillés pour leur compte à eux, Trentesaux et Destombes, chez F. Voos, dans les magasins duquel ils se trouvaient encore au moment de la vente; que, suivant l'usage, ils prièrent F. Voos de tenir ces lots à la disposition des acheteurs; que, le 16 août, le paiement n'ayant pas été effectué par Brouwers frères, ils notifièrent à F. Voos, qui n'avait pas cessé de détenir les lots, qu'ils s'opposaient à ce qu'il s'en dessaisit; que, le 17 août, ils renouvelèrent cette opposition à F. Voos et à Brouwers frères, et les assignèrent pour faire sanctionner leur droit de rétention; qu'ils invoquent les art. 1612 et 1613, C. civ., à l'appui de leur prétention; que la seule question qui se pose est celle de savoir si la délivrance n'avait pas déjà été effectuée; - Attendu que Trentesaux et Destombes font valoir qu'aux termes de la jurisprudence de la Cour de cassation, pour faire obstacle au droit de rétention, il ne suffit pas d'une délivrance fictive, qu'une délivrance matérielle et effective est nécessaire; que, dans l'espèce, la marchandise, depuis la vente, n'a donné lieu, ni à un déplacement, ni à une tradition réelle, qu'elle est demeurée chez Voos, où elle est encore actuellement; Attendu que Trentesaux et Destombes soutiennent que la mise à disposition constitue seulement une autorisation de prendre livraison, mais ne devient délivrance réelle que si la prise de livraison se réalise; que l'acheteur, à qui la délivrance des lots n'a pas été faite, qui n'en a jamais eu la possession, n'a pu transmettre cette possession à un tiers, ni, en conséquence, les donner valablement en gage; Attendu que Trentesaux et Destombes demandent au tribunal de pro noncer, aux torts de Brouwers frères, la résiliation de la vente pour défaut de paiement du prix, et de les condamner en des dommages-intérêts, sous réserve de leurs droits à réclamer ultérieurement le surplus du préjudice éprouvé; Attendu que F. Voos déclare s'en rapporter à justice sur les prétentions respectives des parties, et demande, dans tous les cas, à être déchargé des dépens tant de la demande principale que de la demande en garantie; Attendu que O. Centner et Cie prétendent que Trentesaux et Destombes ont effectué la livraison des marchandises vendues à Brouwers frères, en les mettant à la disposition de ces derniers chez Voos; que celui-ci a informé à la fois Brouwers frères et Centner et Cie de cette

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rétention reste ouvert au vendeur non payé de balles de laines déposées dans des magasins de peignage, et mises à la disposition de l'acheteur dans ces magasins de peignage, en se fondant sur ce que les magasins de peignage re sont pas des magasins publics, en sorte que, les tiers n'ayant pas

mise à disposition; qu'aux termes des usages constants à Verviers, et aux termes de la jurisprudence tant des tribunaux belges que du tribunal de commerce de Tourcoing, la mise à disposition d'une marchandise chez un faconnier fait considérer la marchandise vendue comme étant entrée en la possession réelle et exclusive de l'acheteur; Attendu que O. Centner et Cie soutiennent qu'ayant eu la posses sion réelle et exclusive de la marchandise, par la mise à disposition, à Verviers, dans les magasins de Voos, qui leur a été consentie par Brouwers frères et Voos, ce dernier doit être contraint à leur remettre

ces marchandises; Attendu que la question actuelle doit être envisagée sous un double aspect en droit tout d'abord, en fait ensuite; - En droit: -- Attendu que, dans son jugement du 4 mars 1904, le tribunal faisait remarquer qu'après un examen nouveau de la question, auquel il s'est livré encore à propos du présent litige, il a été amené a constater que jamais la Cour de cassation n'avait décidé que, seule, la tradition matérielle constituait la délivrance aux mains de l'acheteur; qu'au contraire, elle a décidé, dans de nombreux arrêts, que la tradition virtuelle pouvait suffire à faire perdre au vendeur son droit de rétention, sous la condition que cette tradition virtuelle fut l'équivalent de la tradition matérielle, ce qui implique la nécessité d'un fait certain de prise de possession de la part de l'acheteur; que tel était et est demeuré le critérium de la Cour suprême, en cette matière; Attendu que, dans un arrêt du 12 mai 1903 (S. et P. 1905.1.327; Pand. pér., 1904.1.284), la Cour de cassation, se fondant uniquement sur les constatations matérielles qu'elle rencontrait dans l'arrêt qui lui était déféré, a décidé, dans une espèce voisine de celle actuellement soumise au tribunal, qu'il n'y avait eu, en définitive, qu'une simple mise à disposition, insuffisante pour constituer une délivrance effective; qu'il y a lieu de rechercher si, en l'espèce actuelle, d'autres actes ont été posés, qui puissent être considérés comme constituant une prise de possession de la part de l'acheteur; Attendu que la question litigieuse est, avant tout, une question de fait et de circonstances, soumise uniquement à l'appréciation du juge, mais qu'avant de passer à l'examen des faits, il n'est pas inutile de rappeler, à propos de cette question de la tradition réelle et de la tradition virtuelle, que, lors de la discussion de l'art. 576, C. comm., M. Gaillard de Kerbertin proposa, à la Chambre des députés, de supprimer le qualificatif réelle, qui accompagnait le mot tradition » dans le texte de cet article alors en discussion; que M. Gaillard de Kerbertin expliquait sa proposition comme suit: Il peut y avoir tradition réelle ou tradition feinte, aux

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été avertis du transfert de la propriété des laines vendues, celles-ci n'ont pu constituer un élément de crédit pour le tiers acquéreur, et qu'il n'y a eu, en définitive, qu'une simple mise à disposition, insuffisante pour constituer la délivrance. V. Cass. 12 mai 1903, précité, et la note. L'arrêt ci-dessus

termes de l'art. 1606, C. civ., car la livraison peut se faire par la remise des clefs des bâtiments où les marchandises auront été déposées. Dans ce cas comme dans l'autre, la revendication ne peut pas être admise, parce que l'acheteur est saisi »; Attendu qu'il pourrait être ajouté qu'il existe, à côté des modes de délivrance prévus par l'art. 1606, C. civ., un grand nombre de modes de délivrance, qui auraient pu bénéficier de la même observation; Attendu que la commission accepta l'amendement proposé, et que l'art. 576, C. comm., fut voté par la Chambre, avec la suppression demandée du mot « réelle » ;

Attendu qu'il est certain qu'en discutant l'art. 577, qui suivait, le législateur n'a pas entendu modifier le sens qu'il venait de donner à la tradition, à la délivrance; qu'il voulait, dans l'un comme dans l'autre article, assimiler la délivrance réelle à la délivrance virtuelle, n'imposant qu'une seule condition, c'est que l'acheteur fût saisi; Attendu que les articles susvisés ne sont qu'une application, à la matière de la faillite, des règles du droit commun; que la délivrance doit s'entendre de la même façon, qu'il s'agisse d'appliquer l'art. 577, C. comm., ou l'art. 1613, C. civ.;

En fait : - Attendu, sur le terrain des faits, que les usages commerciaux ont une importance considérable; qu'ainsi que le fait remarquer M. Lacour (note au Dalloz, 1901.2.74), en étudiant la question du droit de rétention après faillite, c'est un principe universellement admis que de pareils usages, ayant la valeur d'une convention tacite, peuvent déroger aux dispositions de la loi purement interprétative de la volonté des parties; - Attendu que la

laine constitue une marchandise d'un poids et d'un volume considérables; que le commerce de laines, pour éviter des manutentions coûteuses et inutiles, a, dans la plupart des pays, et notamment en France, en Belgique et en Allemagne, adopté, d'une manière générale, la pratique de la mise à disposition, qui est considérée comme l'équivalent de la délivrance effective aux mains de l'acheteur; - Attendu que ce procédé s'emploie d'une manière générale et constante, non seulement à raison des considérations qui précèdent, mais encore parce que les négociants en laines ont cessé généralement d'avoir chez eux des magasins où ils entreposent leurs laines; que celles-ci, qui arrivent à l'état brut des pays de production, sout dirigées immédiatement, lors de leur arrivée à destination, chez le laveur ou le peigneur qui doivent les façonner; qu'elles n'entrent pas chez le producteur, et qu'après avoir subi le travail du lavage ou du peignage, ces laines demeurent dans les magasins du façonnier, non seulement jusqu'au moment où elles ont été réalisées par le producteur, mais encore, lorsqu'il y a des reventes successives, jusqu'au moment où

recueilli, réformant le jugement longuement motivé du tribunal de commerce de Tourcoing, qui invoquait en sens contraire les usages du commerce local, donne la même solution, dans une espèce où le vendeur invoquait, non pas l'art. 577, C. comm., mais l'art. 1612, C. civ.

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