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l'expiration de ce délai; – Attendu que, sans qu'il y ait lieu de rechercher si, entre les art. 2 et 19 de la loi du 4 mars 1889, il existe une certaine antinomie, et si, dans les cas prévus par ces deux articles, doivent être appliquées des règles différentes, il échet uniquement, dans la cause soumise à l'appréciation de la Cour, de rechercher si Coute était ou non en état de cessation de paiements, d'une manière certaine et non équivoque, à une époque antérieure de plus de quinze jours à la date de sa requête du 8 mai 1912; — Or, attendu, en fait, qu'il résulte de tous les documents de la cause, et notamment de la tentative de règlement amiable du 17 avril 1912, que Coute était, dès avant cette dernière date, en état manifeste de cessation de paiements; que, dès lors, le 8 mai 1912, jour ou il a présenté sa requête, il n'était plus dans les délais de la loi pour obtenir le bénéfice de la liquidation judiciaire; qu'en conséquence, la décision des premiers juges, qui a déclaré Coute en état de faillite, doit être maintenue; - Par ces motifs; - Confirme, etc.

Du 28 juin 1912. – C. Pau. MM. le cons. Dupuy, prés.; Gaches, subst.; Lamaignère, Crouau et Guichenné, av.

lequel l'époux défendeur à une demande en divorce soulève, lors du préliminaire de conciliation, une exception d'incompetence ratione loci, doit se borner à en donner acte, el, sans même dresser de procès-verbal de non-conciliation, il doit renvoyer les parties à faire trancher préalablement la question de compétence par les juges du fond (4) (Id.).

Sauf au président, staluant comme juge des référés, à prescrire, s'il en est requis, les mesures provisoires urgentes que commande la force même des choses (5) (C.civ., 238; C. proc., 806 et s.). (Pigerol C. Pigerol). — ARRÊT.

LA COUR; - Attendu que Pigerol a régulièrement fait appel de l'ordonnance rendue le 29 févr. 1912 par le président du tribunal civil de Lyon, en vertu de l'art. 238, C. civ., et par laquelle ce magistrat a donné défaut contre le sieur Pigerol, autorisé la dame Pigerol à assigner son mari en divorce devant le tribunal de première instance de Lyon, et fixé à ladite dame une résidence séparée, en lui allouant une pension alimentaire mensuelle de 150 fr.; Attendu que Pigerol, défaillant devant le premier juge, soulève devant la Cour un déclinatoire d'incompétence, basé sur ce qu'il serait domicilié dans l'arrondissement de Trévoux (Ain), et que, par suite, l'instance en divorce devrait être commencée et suivre son cours devant le tribunal de Trévoux, et non devant le tribunal de Lyon; — Attendu qu'en matière de divorce, l'instance est engagée dès que l'époux défendeur a reçu assignation à comparaître en conciliation devant le président; que l'incompétence ratione loci doit, à peine de forclusion à le faire ultérieure ment devant le tribunal lui-même, être soulevée dès la comparution devant ce magistrat, ou en appel devant la Cour, si l'ordonnance de l'art. 238 a été, comme dans l'espèce, rendue par défaut; Attendu que la Cour, saisie par l'appel de Pigerol, formé contre l'ordonnance du président, n'a pas d'autres pouvoirs que ceux du président lui-même; qu'il échet donc de rechercher, en présence du déclinatoire proposé, si le président a le droit de statuer sur sa propre compétence; - Attendu que lui reconnaitre ce droit, c'est lui donner le pouvoir de statuer sur la compétence du tribunal lui-même, et en

lever à la juridiction du fond la faculté d'apprécier cette question; qu'une dérogation si profonde aux règles du droit commun ne pourrait être admise qu'en présence d'un texte formel, qui n'existe pas; que le président a reçu de l'art. 238 une mission qui ne l'autorise pas à empiéter sur les pouvoirs du tribunal, ni à rien faire qui puisse préjudicier irrévocablement au fond; que, si donc un décli: natoire d'incompétence ralione loci, qui s'applique nécessairement et indistincte ment à lui-même et en même temps au tribunal, est soulevé devant lui, parce qu'il faut le proposer in limine liiis, le président doit se borner à en donner acte, et, sans même dresser de proces verbal de non-conciliation, renvoyer les parties à faire trancher préalablement la question par les juges du fond, sauf, s'il en est requis, à ordonner les mesures provisoires urgentes que commande la force même des choses; que le litige sur la compétence ne s'oppose pas à ce que ces mesures indispensables soient prescrites, parce qu'en pareil cas, le président fait l'office de juge des référés (l'art. 238 se réfère du reste à l'art. 809, C. proc.), et que le juge du lieu où les mesures sont nécessitées par l'urgence a qualité pour les ordonner;

Mais attendu, à ce point de vue, que l'ordonnance entreprise ne saurait être maintenue; qu'il n'y a ni péril en la demeure, ni urgence justifiant les mesures provisoires ordonnées; que la femme, dės la présentation de la requête, avait, en fait, quitté le domicile conjugal, et est à même, au moins provisoirement, de pourvoir à ses besoins ; Par ces motifs; Dit que la Cour, saisie de l'appel de lordonnance par défaut du 29 févr. 1912, n'a pas pouvoir, pas plus que le président du tribunal, de statuer sur l'exception d’incompétence ratione loci soulevée; – Renvoie les parties à faire statuer au préalable par le tribunal de Lyon; -- Dit que les mesures provisoires, relatives à la résidence de la femme et à la pension alimentaire, ne sont pas, en l'état, nécessitées par l'urgence; Réforme, en conséquence, l'ordonnance entreprise, etc.

Du 20 juill. 1912. C. Lyon, 1re ch. MM. Nectoux, prés.; Astié, av. gén.; Bernus et Mettey, av.

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LYON 26 juillet 1912. DIVORCE, PRÉLIMINAIRE DE CONCILIATION,

PRÉSIDENT DU TRIBUNAL CIVIL, EXCEPTION D'INCOMPÉTENCE, DONNÉ ACTE, MESURES PROVISOIRES (Rép., V° Divorce et séparation de corps, n. 1073 et s., 1093 et s.; Pand. Rép., vo Divorce, n. 1301 et s.).

L'instance en divorce élant engagée dès que l'époux défendeur a recu assignation à comparaitre en conciliation devant le président du tribunal civil, c'est devant ce magistrat que doit, à peine de forclusion, être soulevée l'exception d'incompétence ratione loci (1) (C. civ., 238).

Elle peut également être soulevée devant la Cour, sur l'appel de l'ordonnance du président du tribunal civil, si le defendeur a fait défaut devant le président (2) (Id.).

La Cour, saisie de l'uppel de l'ordonnance, n'a pas de pouvoirs plus étendus que ceux que l'art. 238, C.civ., confère au magistrat conciliateur (3) (Id.).

Et le président du tribunal civil, devant

Lyon, 17 mars 1891 (S. et P. 1892.2.1, et la note de M. Appleton ; Pand. pór., 1894.1.60); Nimes, 16 févr. 1892 (S. et P. 1892.2.39); Paris, 4 janv. 1910 (S. et P. 1910.2.276 ; Pand. per., 1910.2.276), la note et les renvois. V. cep., Grenoble, 2 mai 1891 (S. et P. 1893.2.177); et Baudry-Lacantinerie et Chauveau, Des pers., 33e éd., t. 4, n. 80,

P. 58.

(1-2-3) La jurisprudence se prononce en général en ce sens que, l'instance en divorce ou en séparation de corps étant liée dès lors que le défendeur se présente en conciliation, c'est devant le président du tribunal civil que doit, à peine de forclusion, être soulevée l'exception basée sur l'incompétence ratione loci. V. Grenoble, 2 mai 1891 (S. et P. 1893.2.177), et les renvois de la note, 176 col., de M. A...; Cass. 1er juin 1891 (S. et P. 1892.1.129, et la note de M. Garsonnet; Pand. per., 1893.1.209); 15 mars 1892 (S. et P. 1892. 2.72; P’anıl. pér., 1893.2.13.5), la note et les renvois. Adde, la note et les renvois sous Paris, janv. 1910 (S. et P. 1910.2.276 ; Pand. pér., 1910.2.276). La raison même qui justifie cette solution implique que, si le défendeur n'a pas comparu en conciliation, il ne peut être considéré comme ayant renoncé å se prévaloir de l'incompétence ratione loci; cette exception n'est donc pas couverte, et le dé

fendeur est encore recevable à la proposer devant la Cour, saisie en ce cas de l'appel de l'ordonnance du président statuant sur la conciliation. V. en ce sens, dans une espèce analogue, Aix, 4 déc. 1912 (Gaz. Trib., 1er janv. 1913). Comp. Bruxelles, 23 déc. 1809 (S. et P. chr.); Douai, 26 févr. 1833 (S. 1833. 2.210. P. chr.); et notre C. proc. annoté, par Tissier, Darras et Louiche-Desfontaines, sur l'art. 170, n. 51 et s.

(1-5) On décide, en général, que le président du tribunal civil, devant lequel, lors du préliminaire de conciliation, le défendeur à une demande en divorce ou en séparation de corps soulève une exception d'incompétence, tirée, soit de l'incompétence ratione personæ vel loci, soit de l'extranéité des parties, n'a pas à statuer sur cette exception, et doit se borner à en donner acte, pour permettre au défendeur de la présenter à nouveau devant le tribunal civil saisi de la demande principale. V.

Le président du tribunal civil, en donnant acte au défendeur de l'exception d'incompétence, pent néanmoins statuer sur les mesures provisoires et urgentes que comporte la situation des parties. V. Lyon, 17 mars 1891, Nîmes, 16 févr. 1892, et Paris, 4 janv. 1910, précités. V. égal., les renvois de la note sous ce dernier arrêt. L'opinion la plus généralement admise lui reconnaît aussi, contrairement à ce que décide l'arrêt ci-dessus recueilli, le droit de constater la non-conciliation. V. Lyon, 17 mars 1891, et Nîmes, 16 févr. 1892, précités,

C. D'ASSISES DE L'ILLE-ET-VILAINE

18 novembre 1912. DIFFAMATION, POURSUITES, SURSIS, FAIT PUNIS

SABLE, INSTRUCTION CRIMINELLE, PLAINTE, PERSONNE QUALIFIÉE, MAIRE, Fjux, MisisTÈRE PUBLIC, OFFICE DC JUGE, PARTIE POURSUIVANTE (Rép., Vo Diffamation,n. 1301, 1605 et s.; Pand. Rép., vo Diffamation-Injure, n. 1106 et s., 1138 et s.).

Encore bien que l'art. 35, S4, de la loi du 29 juill. 1881 paraisse réserver l'application du sursis au seul cas de disfamation envers personnes non qualifiées, celle disposition ne doit pas être interprrtée en ce sens limi. tatif, ei elle peut recevoir son application méme au cas de dissamation contre personnes qualifiées (, 35, S 4).

,

ouverte contre un ancien maire, à raison de faits de faux, uxage de faux et détour. nements commis dans l'exercice de ses fonclions, la Cour d'assises, saisie par l'ancien maire d'une poursuite en diffamation fondée sur des imputations visant ces mêmes fails, peut surseoir à statuer, soil sur la demande du ministère public, soil même

Spécialement, lorsqu'une instruction est d'office (2) (12.).

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6

(1-2) La loi du 26 mai 1819, relative à la poursuite et au jugement des crimes et délits commis par la voie de la presse (S. 1or vol. des Lois annoiées, p. 1010), avait interdit, en principe, la preuve de la vérité des faits diffamatoires, sauf a dans le cas d'imputations contre des dépositaires ou agents de l'autorité on contre toute personne ayant agi dans un caractère public, de faits relatifs à leurs fonctions » (art. 20). Mais, prévoyant le cas où les imputations motivant une poursuite en diffamation viseraient des faits punissables selon la loi, et sur lesquels il y aurait, soit des poursuites commencées à la requête du ministère public, soit une denonciation de l'auteur de la diffamation, elle disposait, dans son art. 25, que, dans ce cas, il serait,

durant l'instruction, sursis à la poursuite et an jugement du délit de diffamation ». De la sorte, si la vérité des imputations diffamatoires était proclamée par un jugement de condamnation, prialablement prononcé contre le plaignant, le prévenu de diffamation, qui n'aurait pas en le droit de prouver directement la vérité de ses allégations, pouvait, devant ses juges, tirer ile ce jugement im moyen de justitication. La disposition de l'art. 25 étant conçue en termes très généraux, on déci(ait que le sursis pouvait être demandé, non senlement au cas où les imputations diffamatoires visaient un simple particulier, mais aussi dans le cas où elles avaient trait à «les actes accomplis dans ses fonctions par une personne revêtue d'un caractère public. V. Cass. 20 juill. 1821 (S. et P. chr.); de Grattier, Comment, sur les lois de la presse, t. Jer, P. 196. Bien que, dans cette seconde hypothese, le prévenu de diffamation eût la faculté de faire la preuve de la véracité de ses allégations, le sursis pouvait néanmoins lui être utile, en lui permettant de profiter, en vue d'une preuve qui pouvait être difficile à administrer, des éléments réunis par l'information ouverte sur les faits imputés.

La disposition de l'art. 25 de la loi du 26 mai 1819, qui, dans l'opinion générale, n'avait pas été abrogée par l'art. 28 du décret organique sur la presse du 17 févr. 1852, interdisant la preuve par témoins des faits injurieux on diffamatoires (V. Cass. 19 janv. 1855, S. 1855.1.304. P. 1855.1. 148; 1er juin 1855, S. 1855.1.767. P. 1856.1. 175 ; 29 déc. 1865, S. 1866.1.311. P. 1866.802), avait soulevé dans l'application de telles difficultés que le projet primitif, présenté par la commission de la Chambre des députés lors de l'élaboration de la loi du 29 juill. 1881, l'avait délibérément écartée. La comunission avait substitué au système admis par la loi du 26 mai 1819 un autre systéme, qui autorisait la preuve de la vérité des faits diffamatoires aussi bien lorsque la diffamation visait de simples particuliers que lorsqu'elle s'adressait à des personnes revêtues d'un caractère public, en la subordonnant, dans le cas où la diffamation était commise à l'égard de simples particuliers, à la double condition que le fait, à le supposer prouvé, fût passible d'une peine, et que le prévenu de diffamation eût été lésé par le fait imputé. V. le rapport de M. Lisbonne à la Chambre des députés (S. Lois annotées de 1882, p. 218, 2° et

ANNÉE 1913. 4° cah.

30 col., note 69. P. Lois, dier., etc. de 1882, p. 366, 2e col., note 69).

Lors de la première délibération à la Chambre des députés, le système de la commission a été abandonné, par suite de l'adoption d'un amendement de MM. Bardoux et Durand, qui, d'une part, restreignait la preuve de la vérité des faits cliffamatoires au cas où ils étaient relatifs aux fonctions, et où la diffamation était dirigée contre les corps constitués, les armées de terre ou de mer, les administrations publiques, et contre toutes les personnes énumérées à l'art. 31 de la loi (personnes ayant un caractère public), et qui, d'autre part, ajoutait : « Dans toute autre circonstance, et visà-vis de toute autre personne non qualifiée, lorsque le fait imputé est l'objet de poursuites commencées à la requête du ministère publice sur la plainte du prévenu, il sera, durant l'instruction, sursis à la poursuite et au jugement du délit de diffamation » (S. Lois annoties de 1882. p. 218 et 219, note 69. P. Lois, décr., etc. de 1882, p. 366 et 2367, note 69). Depuis, soit à la Chambre, soit au Sénat, l'art. 38, tel qu'il était rédigé à la suite du vote de l'anendement de MM. Bardoux et Durand, n'a subi d'antres modifications que celles résultant de l'assimilation, au point de vie de la prenve de la vérité des faits diffamatoires, des directeurs et administrateurs d'entreprises financières aux personnes revêtues d'un caractère public (art. 3.), $ 2) (V. S. Lois annotées de 1882, p. 219, note 70. P. Lois, décr., etc. de 1882, p. 368, note 70), et des rectifications apportées au texte de l'art. 35, § 4, relatif au sursis, rectifications ayant pour objet, d'une part, de ne pas subordonner le sursis exclusivement à des poursuites commencées, comme le faisait l'amendement Bardoux et Durand, et de donner à la plainte du prévenu le même effet qu'à des poursuites commencées, conformément à la disposition de l'art. 25 de la loi de 1819, et, d'autre part, de préciser, par les expressions :.“ durant l'instruction qui devra avoir lieu », la nécessité d'une instruction. V. S. Lois annotées de 1882, p. 219, 1col., note 69. P. Lois, décr., etc. de 1882, p. 367, 2° col., note 69.

Nous avons insisté sur l'historique de la disposition de l'art. 35, § 4, de la loi de 1881, relative an sursis, parce que, à notre avis, cet historiqne projette une lumière très vive sur l'interprétation que comporte ce texte. Sans doute, après avoir d'abord projeté d'écarter le système de la loi du 26 mai 1819, autorisant la preuve de la vérité des faits diffamatoires aussi bien en cas de diffamation contre des particuliers que contre des personnes revêtues d'un caractère public, sauf à ne l'admettre qu'avec des restrictions dans le premier cas, le législateur de 1881 a fini par consacrer un système très voisin de celui de la loi de 1819 : preuve de la vérité des faits diffamatoires à l'encontre des personnes revêtues d'un caractère public; sursis en cas de poursuites commencées ou de plainte déposée par le prévenu du délit de diffamation. Mais la disposition relative au sursis est autrement restrictive que ne l'était la disposition correspondante de l'art. 25 de la loi de 1819. Tandis que cet article, placé à la suite de ceux qui réglementaient la

preuve de la vérité des faits diifamatoires à l'encontre des personnes revêtues d'un caractere priblic, disposait, en termes très généraux et sans faire aucune distinction, qu'il y aurait suursis aux poursuites et au jugement de la diffamation, lorsque les faits imputés seraient punissables, et qu'il y aurait en poursuites commencies i la requête du ministere public, ou dénonciation de la part du prévenu de diffamation, l'art. 35, après avoir émméré les hypotheses dans lesquelles la preuve de la vérité des faits diffamatoires est autorisée (diffamation contre les corps constitués, les armées de terre ou de mer, les administrations publiques et les personnes énumérées dans l'art. 31, c'est-à-dire les personnes revêtues d'un caractere public, et contre les administrateurs et directeurs des entreprises financières), ajoute, dans son § 1, qu'il y aura sursis, moyennant la réunion des conditions qu'il spécifie, « dans toute autre circonstance, et envers tonte personne non qualifiée ". On ne peut dire en termes plus clairs et plus nets que, à la différence de ce que l'on décidait sous l'empire de la loi du 26 mai 1819, c'est seulement dans les cas où la preuve de la vérité des faits diffamatoires n'est pas autorisée, c'est-à-dire lorsque la diffamation vise de simples particuliers, que l'art. 335, § 1, est applicable, et qu'il peut y avoir lien à sursis. En d'autres termes, le sursis n'est pas un moyen de défense ouvert à tout prévenu de diffamation, lorsque les faits imputés ont un caractère délictueux, comme sous l'empire de la loi du 26 mai 1819; ce moyen de défense n'est plus donné qu'au prévenn de diffamation auquel la loi de 1881 interdit de faire la preuve de la vérité des faits dif-, famatoires, et pour empêcher que, faute de pouvoir faire cette preuve, il ne soit condamné, encore bien que les faits par lui dénoncés tombent sous l'application des lois pénales.

Si cette interprétation ressort du texte même de l'art. 35, § 4, rapproché des dispositions du mome article qui le précédent, il ne peut faire doute qu'elle correspond à l'intention non équivoque des auteurs de la loi du 29 juill. 1881. Il suffit de se reporter au rapport de M. Lisbonne à la Chambre des députés pour se rendre compte que, dans le projet primitivement soumis à la Chambre, l'abrogation de l'art. 25 de la loi du 26 mai 1819 et la suppression du sursis apparaissaient comme une conséquence de l'innovation qui permettait au prévenu de diffamation d'administrer, même à l'égard des simples particuliers, la preuve de la vérité des faits diffamatoires (V. S. Lois annotées de 1882, p. 218, 3° col., note 69. – P. Lois, deer., etc. de 1882, p. 367, 1re col., note 69). D'autre part, c'est une conception analogue qui avait inspiré lamendement Bardoux et Durand, substitué par la (hambre au texte présenté par la commission. C'est parce qu'ils estimaient que la preuve de la vérité des faits diffamatoires ne devait pas être autorisee en cas de diffamation en vers les personnes non qualifiées, et qu'ils proposaient, contrairement au projet. de la commission, de l'interdire, que les auteurs de l'amendement avaient jugé nécessaire de rétablir, dans ce cas, le sursis, comme corollaire de cette interdiction. La forme même qu'ils avaient domee

llo Part. - 14

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Le sursis pourrait-il être accordé sur la seule demande de la partie poursuivante (1) (10.)? -- V. la note.

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(Morin C. Journ. Le Nouvelliste de Bretagne et Soc. la Presse de Bretagne).

la suite de poursuites en diffamation, dirigées par M. Morin, ancien maire de Gahart (Ille-et-Vilaine), contre différents journaux, une information a été ouverte contre M. Morin, pour faux, usage de faux et détournements commis dans l'exercice de ses fonctions de maire.

M. Morin a demandé à la Cour d'assises de surseoir à statuer sur les poursuites en diffamation, jusqu'à clôture de l'information. Le ministère public s'est joint à cette demande.

de diffamation envers particuliers, sans pour cela avoir voulu l'écarter, au cas de diffamation envers personnes qualifiées ; qu'il est certain, au contraire, que c'est dans le cas où la preuve des faits diffamatoires est admise que le sursis peut et doit avoir sa plus grande utilité; qu'en effet, dans le cas de diffamation envers particuliers, la décision intervenue sur la réalité des faits allégués, à la suite de l'information ouverte, soit d'office par le ministère public, soit sur la plainte du prévenu, ne peut jamais être retenue par le juge de la diffamation que comme un élément d'appreciation du degré de culpabilité de l'auteur de cette diffamation ; qu'au contraire, dans le cas de diffamation envers personnes qualifiées, cette même décision peut être retenue comme une preuve complète et une justification de la vérité des faits allégués, faisant, en conséquence, disparaitre toute culpabilité du prétendu diffamateur: - Considérant que, sans qu'il soit besoin de rechercher si la demande de sursis peut être utilement et légalement formée par la partie poursuivante, il est de principe certain que cette demande peut être formée par le ministere public; que, d'ailleurs, la Cour d'assises peut l'ordonner d'office: qu'elle peut trouver dans ce moyen, le cas échéant, un

mode utile et pratique de l'exercice du droit qui lui appartient souverainement d'ordonner un renvoi qu'elle juge nécessaire dans l'intérêt de la vérité, pour l'éclaircissement des faits non suffisamment apurés: – Considérant, en la cause, qu'il est constant et non dénié qu'une information est ouverte, entre les mains de M. le juge d'instruction de Rennes, contre Morin, nommément désigné, inculpė, en sa qualité de maire de la commune de Gahard, de faux, usage de faux et de détournements ; que, d'autre part, le ministère public conclut au sursis;

Par ces motifs ;

Dit qu'il sera sursis aux poursuites et procédures dont il s'agit, jusqu'à clôture de l'instruction ouverte entre les mains de M. le juge d'instruction de Rennes contre Morin, inculpé, en sa qualité de maire de la commune de Gahard, de faux, usage de faux, détournements; etc.

Du 18 nov. 1912. - C. d'assises de l'Illeet-Vilaine. MM. Allard, prés. ; Lacouture, av, gén.; Charlier et lari, av.

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ARRÊT.

LA COUR; Considérant que les termes de l'art. 35, S 4, de la loi du 29 juill. 1881 peuvent paraitre réserver l'application du sursis au seul cas de diffamation envers personnes non qualifiées; qu'ils ne doivent cependant pas être interprétés dans ce sens absolument limitatif : qu'on peut fort bien admettre que le législateur a cru nécessaire d'énoncer expressément l'appli cabilité possible du sursis au cas spécial

LYON 23 octobre 1912. Cultes, SÉPARATION DES ÉGLISES ET DE L'E

TAT, LOIS DES 9 DEC. 1905 ET 2 JANV. 1907,

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à la partie de leur amendement relative au sursis, qui débutait exactement comme l'art. 35, § 4, (lémontre que, dans leur pensée, le sursis n'était ouvert qu'à ceux qui ne pouvaient faire la preuve de la vérité des faits diffamatoires. V.S. Lois unnotées de 1882, p. 218 et 219, note 69. P. Lois, dier., etc. de 1882, p. 366 et 367, note 69.

Aussiest-on, en général, d'accord pour reconnaître, contrairement à la solution admise par l'arrêt cidessus, que le sursis ne pent être réclamé que dans les poursuites pour diffamation envers un simple particulier, et que, par suite, lorsque la Cour d'assises est appelée à statuer sur des faits de diffamation en vers un fonctionnaire public, ou lorsque le tribunal correctionnel est saisi par un administrateur de société financière d'une poursuite pour diffamation commise à son égard, le prévenu ne peut, devant ces juridictions, se prévaloir de l'art. 35 de la loi du 29 juill. 1881 pour demander un sursis. V. Trib. corr, de la Seine, 2 juin 1897, rapporté en (a) (De Lavigerie et Ourback C. Dame Richard-Lesclide

sous-note (a): Barbier, ('ode explique de la presse, 2. ed., par Matter et Rondelet, t. 2, n. 575 : Le Poittevin, Tr. de la presse, t. 2, n. 797: Fabreguettes, Tr. des del. polit, et des infr. par la parole. l'écriture et la presse', 1. 1'', n. 133 bis, p. 532.

Mais, si cette solution s'impose, étant donnés les termes de l'art. 35, $ t, et les conditions dans les. quelles cette disposition a été introduite dans la loi, elle n'en demeure pas moins, en soi, fort critiquable, comme l'observation en a été faite : « De ce que le prévenu de diffamation envers ume personne qualifiée est admis à faire la preuve des faits diffamatoires par les voies ordinaires, il ne s'ensuit nullement que le moyen de défense résultant du sursis soit pour lui inutile. L'instruction ouverte sur les faits imputés peut fort bien rassembler des éléments de preuve que l'auteur des imputations, abandonné à ses propres moyens, est dans l'impossibilité de rapporter. N'est-il pas étrange de refuser au prévenu, qui, en principe, est veau de Lavigerie et Ourback concluent à ce que les défendeurs soient déboutés, l'art. 35, dernier paragraphe, ne s'appliquant pas aux directeurs ou administrateurs de toute entreprise industrielle, commerciale ou financière faisant publiquement appel à l'épargne ou au crédit, contre lesquels la preuve par témoins de la vérité des faits diffa. matoires peut seule être établie (art. 35, $ 2); -- Attenlu qu'il est manifeste que la rédaction de l'art. 35 confirme cette appréciation; qu'après avoir autorisé la preuve dle la vérité des imputations diffamatoires et injurieuses contre les personnes qualifiées, il s'exprime ainsi dans le dernier paragraphe : « Dans toute autre circonstance et envers toute autre personne non qualifiée, il sera sursis à la poursuite et au jugement, etc... »»: que les termes de cette disposition sont précis, exprès, et ne peuvent prêter au doute ni à l'interprétation ; que, de plus, le rapport sur la loi du 29 juill. 1881 (S. Lois annotées de 1892, p. 218, ze col., n. 69. – P. Lois, déer., etc. de 1882, p. 367, 1re col., note 69), adopté par la commission, la discussion de l'amendement de M. Bardoux, qui a été substitué à la dis. position proposée par la commission (Ohambre des députés, séance du 1er févr. 1881, S. Lois annolées de 1882, p. 219, col. 1, note 69. – P. Lois, décr., etc. de 1882, p. 367, 2° col., note 69), établissent d'abord que le projet de loi était une innovation sur la loi de 1819, dont la commission voulait abroger l'art. 25; en second lieu, qu'en substituant l'amendement Bardoux à la rédaction de la com. mission, la Chambre des députés a eitendu limiter aux personnes non qualifiées le droit de demander le sursis, lorsqu'une plainte aurait été déposée ; Attendu qu'en

admis à prouver ses imputations diffamatoires, un moyen de preuve particulier, auquel pent recourir le prévenu qui, en principe, n'est pas adinis á 1:1 prewe? » (Barbier, op. ei loc. cit.).

(1) Les auteurs s'accordent à reconnaitre que le sursis de l'art. 135, $ 4, de la loi du 29 jnill. 1881 peut être réclamé par le ministère public aussi bien que par le prévenu de diffamation, et qu'il peut même être ordonné d'office. V. Barbier, l'ode erpliqué de la presse', ?" éd., par Matter et Rondelet, t. 2, n. 588 ; Le Poittevin, Tr. de la presse, t. 1er, n. 806; Fabregnettes, Tr. des del. polit. et des infr. par la parole, l'écriture et la presse, t. 105, n. 133 bis. p. 531. Mais ils n'ont pas envisagé le cas ou le sursis serait demandé par la personne diffamée. Les considérations qui ont inspiré la disposition de l'art. 25 de la loi du 26 mai 1819 et de l'art. 3.3 de la loi du 29 juill. 1881 (V. la note qui précéde), conduiraient à décider qu'elle ne peut demander le sursis. présence de cette disposition précise et des intentions formelles du législateur, il n'appert pas d'examiner si la situation des inculpés poursuivis par des personnes qualifiées est moins favorable que celle des assignés par de simples particuliers, qui peuvent mettre en mouvement par une plainte l'action publique, avec ses moyens d'investigation, perquisitions, mandats, etc., alors que les personnes qualifiées, que la loi a eu la pensée de découvrir ou de mieux protéger, seraient à l'abri d'une instruction et de ses moyens d'action ; – Attendu, en fait, qu'il n'est pas douteux ni contesté que Taveau de Lavigerie est président du conseil d'administration et administrateur délégué d'une société financière qui fait appel à l'épargne et au crédit; qu'Ourback est administrateur de la même société; que, dès lors, les conclusions tendant à ce qu'il leur soit fait application du paragraphe dernier de l'art. 35 doivent être rejetées ; qu'il reste au défendeur la faculté de faire contre eux, conformément aux $3 2 et 3 du même rticle, la preuve des faits diffamatoires, suivant les règles de procédure prescrites par l'art. 51 de la même loi; - Attendu, au surplus, qu'en ce qui touche la dame veuve Ri. chard-Lesclide, elle n'est pas recevable à demander le sursis, étant sans qualité pour porter plainte et ne justifiant d'aucune lésion ni préjudice, à raison des faits de noncés, ainsi qu'il vient d'être statué dans l'affaire Vi. terbo contre veuve Richard-Lesclide; - Par ces motifs:

Déboute la dame Richard-Lesclide, etc. Du 2 juin 1897. -- Trib. corr, de la Seine, ge ch. MM, Richari, prés.; Lecherhonnier, subst.; Deligand, Desplas et Béesqu, av.

et Marot : journal le Vélocipede illustré).

JUGEMENT.

LE TRIBUNAL; Attendu que, par assignation, en date du 20 févr. 1897, renouvelée par acte du 17 avril, Taveau de Lavigerie et Ourback ont assigné devant cette chambre : 1° la dame veuve Richard. Lesclide, en sa qualité de gérante du journal le Velocipede illustré ; 20 Léon Marot, à raison d'articles prétendus injurieux et diffamatoires, parus daus le Velocipède ullustré, n. des 13 déc. 1896, 3, 10, 17 et 24 janv. 1897, dont Marot serait l'auteur; Attendu que, par acte en date du 25 févr. 1897, la dame veuve Richard-Lesclide a signitié à Taveau de Lavigerie et Ourback qu'elle entendait user des droits que lui confère l'art. 35 de la loi du 29 juil!. 1881, et faire la preuve des faits incriminés dans l'assignation ; qu'elle a, en conséquence, notifié aux surnommés les noms des témoins qu'elle se propose de faire entendre à cet effet ; — Attendu qu'aux dates des 13 nov., 18 et 23 déc. 1896, Marot a déposé au parquet du procureur de la République, contre Taveau de Lavigerie, Ourback et autres, des plaintes pour infraction aux lois des 24 juill. 1867 et 1er août 1893, abus de confiance, escroquerie et faux; Attendu qu'à la date du 5 janv. 1897, la dame veuve Richard-Lesclide a déposé contre les mêmes une plainte à raison des mêmes faits ; qu'ils concluent à ce que, conformément à l'art. 35, in fine, de la loi du 29 juill. 1881, il soit sursis au jugement de la présente affaire jusqu'à ce qu'il ait été procédé à une instruction sur les faits dénoncés ; Attendu que Ta

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En disposant que les édifices all'ectes i l'exercice du culle continueront à être laissés à la disposition des fidèles et des ministres du culte pour la pratique de leur religion, l'art. 5 de la loi du 2 janv. 1907 (1 entendu

que les fidèles et les ministres du culte puissent pratiquer leur religion dans ces édifices, après la séparation, dans les conditions mêmes ils le faisaient antėrieurement (1) (LL. 9 déc. 1905; 2 janv. 1907, art. 5).

L'affectation de ces édifices et de leurs dépendances doit donc demeurer, après la séparation, telle qu'elle était sous le regime concordataire (2) (Id.).

Si donc un jardin est une dépendance de l'église, avec laquelle il forme un lout indivisible, la jouissance du jardin étant indispensable pour l'accès de diverses parties de l'édifice, el son affectation à d'autres usages devant gêner considérablement l'exercice du culte, la commune doit en respecter l'affectation, telle qu'elle existait sous le régime concordataire, sans pouvoir distruire le jardin, en totalité ou en partie, de l'affeciation qu'il avait reçue (3) (Id.). (Ville de Lyon C. Abbé Vignon, curé de

Saint-Martin-d'Ainay). 16 juin 1911, jugement du tribunal civil de Lyon, ainsi conçu : « Le Tribunal;

Attendu que, par exploit en date du 30 juin 1910, la ville de Lyon a assigné M. l'abbé Vignon, curé de Saint-Martind'Ainay, devant ce tribunal, aux fins suivantes : Entendre dire : lo qu'il est tenu de remettre sans délai à la ville de Lyon les clefs du jardin attenant à l'église d'Ai. nay, à peine d'une astreinte de 50 fr. par jour de retard; 2° que ledit jardin est domaine privé de la ville de Lyon et à sa libre disposition; – Attendu qu'aux termes de l'art. 5 de la loi du 2 janv. 1907, à défaut d'association cultuelle, les édi. fices affectés à l'exercice du culte, ainsi que les meubles les garnissant, continue. ront, sauf désaffectation dans les cas prévus par la loi du 9 déc. 1905, à être laissés à la disposition des fidèles et des ministres du culte pour la pratique de leur religion;

Attendu que la question à trancher par le tribunal est celle de savoir si le jardin est, comme l'église, grevé d'une affectation cultuelle, et doit rester à la disposition des fidèles et des ministres du culte, ou si, au contraire, la ville de Lyon a le

droit d'en disposer librement, et de le l'esprit et le texte de la loi, réduire le droit
transformer notamment en cour de récréa- de jouissance que les fidèles ont toujours
tion, pour les enfants de l'école primaire, eu, à Ainay, sur l'église et le jardin; — Par
municipale; Attendu que M. le curé de ces motifs ; Dit et prononce que le jar-
Saint-Martin-d'Ainay et les fidèles ont le din attenant à l'église d'Ainay est une
droit de continuer à jouir du jardin qui annexe, un accessoire de l'édifice, grevé,
entoure l'église comme ils en ont toujours comme lui, d'une affectation spéciale, et
joui; Attendu, en effet, que ce jardin qu'il doit étre laissé à la disposition exclu-
est une dépendance de l'église, qu'il forme sive des ministres du culte catholique et
avec elle un tout indivisible; Attendu des fidèles qui ont la jouissance de l'église,
que, pour jouir de l'église elle-même, il dans les conditions où cette jouissance
est nécessaire d'avoir la jouissance du jar- s'est toujours exercée; - Dit et prononce
din, seul passage pour aller à certaines que la clef dudit jardin doit rester entre
parties de l'éditice, et notamment à un les mains de M. l'abbé l'ignon, qui a la
local sis sous une chapelle servant d'en- jouissance de l'immeuble; Déclare, en
trepôt pour le matériel de l'église (échel. | conséquence, la ville de Lyon mal fondée
les, bancs, estrades, catafalques), et à un dans sa demande, l'en déboute, etc. ».
autre local où est installé le foyer du calo- Appel par la ville de Lyon.
rifère de l'église; Attendu que l'occu-
pation, même partielle, du jardin par la

ARRÈT.
ville de Lyon gènerait considérablement LA COUR; Adoptant les motifs des
l'exercice du culte dans une des chapelles premiers juges; Considérant, en outre,
de l'église et dans la chapelle de la crypte, que l'appelante essaie vainement de justi
à cause du bruit que feraient les enfants fier sa demande, par le rapprochement des
en récréation, et à cause, en outre, de la di- art. 12 et 13 de la loi du 9 déc. 1905 et 5
minution de lumière dans des chapelles de la loi du 2 janv. 1907; qu'elle soutient
déjà sombres qu'amènerait la construction que la loi de 1907 doit être interprétée ri-
d'un mur et d'un grillage, et de l'humidité goureusement, en ce sens que les édifices
qui en serait la conséquence; Attendu affectés à l'exercice du culte sont laissés
qu'il serait des plus difficiles de trans- seuls, sans leurs dépendances immobiliè-
porter dans le local sis sous la chapelle les res, à la disposition des fidèles et des mi-
objets encombrants, échelles, catafalques, nistres du culte, pour la pratique de la re-
estrades; – Attendu que ville de Lyon ligion ; Mais considérant, à un premier
n'a jamais eu la jouissance du jardin, et point de vue, que, même si cette interpré-
qu'aucun texte de la loi ne lui à accordé tation étroite était admise, il ne s'ensui-
le droit nouveau qu'elle revendique; qu'il vrait pas que la prétention de la ville fut
importe d'observer que le jardin a toujours fondée; que la petite parcelle de terrain
suivi le sort de l'église; qu'il a toujours revendiquée ne constitue pas une simple
été considéré comme faisant partie de l'é. dépendance de l'église d'Ainay, mais fait
difice; qu'en 1789, il a été mis, avec l'é- partie intégrante de l'édifice, dans lequel
glise, à la disposition de la Nation ; qu'en elle est enserrée par un mur qui fait corps
l'an 10, il a été remis à la disposition des avec lui, et le complète, pour former un
évêques, parce qu'il a été considéré comme ensemble indivisible; que, dès lors, elle
faisant partie de l'édifice destiné au culte, est nécessairement comprise dans l'édifice
la loi du 18 germ. an 10 déclarant, dans affecté à l'exercice du culte ; Considé.
l'art. 75, que « les édifices anciennement rant, à un second point de vue, que l'in-
destinés au culte catholique, actuellement terprétation de l'appelante se heurte aux
dans les mains de la Nation, à raison d'un termes mêmes de l'art. 5 et à l'intention
édifice par cure et par succursale, seront des auteurs de la loi de 1907; que l'art. 5
mis à la disposition des évèques, par arrê- déclare que les édifices affectés à l'exer-
tés du préfet du département »; — Attendu cice du culte a continueront » à être lais-
que la loi de 1907 a voulu assurer l'exer- sés à la disposition des fidèles et des mi-
cice du culte dans les conditions où il nistres du culte, pour la pratique de leur
s'exerçait antérieurement; qu'en effet, par religion, et que les travaux préparatoires
les expressions : « les édifices affectés à démontrent que la volonté du législateur,
l'exercice du culte continueront à être manifestée par le mot « continueront », a
laissés à la disposition des fidèles et des été de laisser ces édifices à la disposition
ministres du culte », le législateur a net. des fidèles et des ministres du culte, pour
tement indiqué que l'affectation devait qu'ils pussent y pratiquer leur religion,
persister telle qu'elle existait auparavant; après la séparation, dans les conditions où

Attendu qu'on ne pourrait, sans violer ils le faisaient antérieurement; qu'il se

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(1-2-3) L'art. 5 de la loi du 2 janv. 1907, en disposant que, à défaut d'associations cultuelles, les édifices affectés à l'exercice du culte, ainsi que les meubles les garnissant, continueront à être laissés à la disposition des fidèles et des ministres du culte pour la pratique de leur religion, a, dans l'opinion générale, entendu que l'exercice du culte pât continuer à être pratiqué dans ces édifices, comme avant la loi du 9 déc. 1905. V. Bordeaux, 29 mars 1911 (S. et P. 1912.2.133 ; Pand. per., 1912.2.133 ), la note et les renvois ; Montpellier, 25 juill. 1911 (S. et P. 1912.2.143; Pand. per., 1912.2.143), la note et les renvois. V. encore, Cass. 5 févr. 1912

(sol. implic.) (S. et P. 1912.1.353 ; Pand. per., 1912.
1.353), et la note de M. Mestre. Pour qu'il en soit
ainsi, il faut que le droit, conféré aux fideles et aux
ministres du culte par l'art. 5 de la loi du 2 janv.
1907 (V. sur la nature de ce droit, Cass. 5 févr.
1912, précité, et la note de M. Mestre), puisse
s'exercer, non seulement sur les édifices dii culte,
mais sur celles de leurs dépendances qui étaient,
sous le régime concordataire, accessoirement em-
ployées pour la célébration du culte. V. Curet,
Les communes et la loi de séparation, n. 192;
Pierre Leroy, La situation jurid. des églises ca-
tholiques, p. 85; Régis Ivert, Eglises communales

(Rer. d'organis. et de def. relig., 1911, p. 473).

Il a été jugé en ce sens que doivent demeurer å la disposition des fidèles et des ministres du culte : une salle affectée à usage de sacristie avant la loi du 9 déc. 1905 (V. Paris, 8 févr. 1912, Rev. d'organis, et de déf. relig., 1912, p. 124); — des dépendances d'une église, affectées au dépôt d'objets nécessaires à l'exercice du culte (V. Amiens, 3 avril 1912, Id., 1912, p. 249); un local attenant å une église, servant d'entrepôt pour les objets du culte, et de salle de catéchisme pour les enfants arriérés. V. Trib, d'Aix, 16 juill. 1912 ( Id., 1912, p. 532).

MINDE

rait donc contraire à la loi de ne laisser å CANTE, SIMPLE PROMESSE, COMPÉTENCE, 5 traites dont le paiement lui était réclamé; la disposition des fidèles que des édifices Í'RIBUNAL DE COMMERCE, TRIBUNAL CIVIL Considérant que, le tribunal de comrestreints ou modifiés, dans lesquels la re- (Rép., v° Lettre de change, n. 510 et s.; merce de Versailles ayant, aux termes du ligion ne pourrait plus être pratiquée avec Pand. Rép., vo Effets de commerce, n. 3168 jugement entrepris, repoussé ses prétenla même liberté et la même facilité qu'a

et s.).

2° TRIBUNAL DE COMMERCE, DE- tions, et prononcé contre elle la condamnavant la séparation; -- Or, considérant, en

RECONVENTIONNELLE, CARACTÈRE tion requise par Guillaumot, la veuve Rolfait, comme le constate le tribunal, que CIVIL, MOYEN DE DÉFENSE, ('OMPÉTENCE lin soutient devant la Cour que le tribunal l'occupation, inème partielle, du jardin par (Rép., v° Compétence civile et commerciale, précité était, à raison de la matière, inla ville gènerait considérablement l'exer- n. 873 et s.; Pand. Rép., yis Compétence, compétent pour connaitre du litige, parce cice du culte dans une des chapelles de n. 905 et s., Tribunaux de commerce, que, d'une part, ni l'un ni l'autre des plail'église et dans la crypte; Considérant n. 258 et s.).

deurs n'étaient commerçants ; que, d'autre que vainement la ville, revenant sur ses

part, la demande en paiement de Guillauprojets primitifs, déclare aujourd'hui vou- 1° En apposant son acceptation sur une mot avait, comme la demande reconvenloir faire de la parcelle litigieuse, non un

lellre de change, une femme s'engage com- tionnelle formée par elle-même, une cause préau de récréation pour les enfants de mercialement, et devient justiciable de la ju

purement civile;

Considérant que les l'école, mais un jardin public; que cette

ridiction commerciale, encore bien qu'elle effets dont Guillaumot poursuit le paiement affectation nouvelle, en admettant même ne soit pas commerçante, et que la lellre de

sont des lettres de change, qui réunissent qu'elle ne fut jamais modifiée dans l'ave

change ail été lirée et acceptée pour une les conditions de validité prescrites par nir, ne supprimerait ni les dangers aux- obligation civile (1) (C. comm., 113, 632). l'art. 110, C. comm.; qu'en apposant son quels la contiguïté d'un lieu public expo

En effet, de l'art. 636, C. comm., qui acceptation sur lesdites lettres de change, serait les vitraux, peu élevés au-dessus du n'excepte de la competence commerciale que

la veuve Rollin s'est engagée commercialesol, ni l'inconvénient du bruit que pour

les prétendues lettres de change auxquelles ment, ainsi qu'il résulte de l'art. 632, in fine, raient faire dans le jardin les promeneurs

l'art. 112, C. comm., refuse ce caractère, et C. comm.; que, par suite, ses engagements et les enfants du quartier; -- Considérant qu'il repule simples promesses, il résulte que sont de la compétence de la juridiction que vainement encore la ville offre d'é- la loi n'a pas voulu déroger, dans le cas commerciale (art. 631) et cela, encore bien lever dans le jardin un mur séparatif de

que prévoit l'art. 113, aux principes gene- que la dame Rollin ne soit pas commerdeux mètres de hauteur, avec grillages auraux de la compétence en matière de lettres

çante, et que les lettres de change aient dessus, pour protéger les vitraux et assurer de change (2) (C. comm., 112, 113,632, 636). été tirées et acceptées pour une obligation les communications avec les dépendances

2° Le tribunal de commerce est competent civile; Considérant que, de l'art. 113, de l'église; que ce mur établirait, le long pour connaitre d'une demande reconven

C. comm., qui dispose que la signature des de l'église, un couloir dans lequel il serait tionnelle, bien que celle demande ait un femmes et des filles non négociantes ou très difficile de faire passer les échelles,

caractère civil, si elle constitue un moyen marchandes publiques sur les lettres de catafalques, estrades et autres objets en

de défense et une réponse directe à l'action change ne vaut, à leur égard, que comme combrants, pour les transporter dans le principale (3) (C. comm., 631 et s.).

simple promesse, on ne saurait induire que local où ils sont déposés; que, de plus, il

lesdites femmes et filles ne sont pas justicia. diminuerait sensiblement la lumière dans

( (Vive Rollin C. Guillaumot). – ARRÊT.

bles des tribunaux de commerce; — Condes chapelles déjà sombres, l'une souter- LA COUR; - Considérant que la veuve sidérant, en effet, qu'en exceptant de la raine, l'autre éclairée par des fenêtres Rollin a été assignée par Guillaumot, devant compétence commerciale les prétendues ouvertes à lm, 65 seulement de hauteur, le tribunal de commerce de Versailles, pour lettres de change auxquelles l'art. 112, C. et augmenterait l'humidité intérieure; s'entendre condamner à lui payer la comm., refuse ce caractère, et qu'il répute qu'enfin, à moins qu'il ne fût construit somme de 7.242 fr., montant de 5 traites simples promesses, l'art. 6:36" du même à une distance telle de l'église qu'il sup- acceptées par elle, et causées valeur en Code garde le silence sur les lettres de primerait presque totalement le jardin, culture de champignons; Considérant change visées en l'art. 113; Considérant déjà très exigu, on peut se demander, á qu'en réponse à l'action de Guillaumot, la qu'il résulte de ce silence que la loi n'a raison du niveau des fenêtres de la cha- dame Rollin a formé, devant le tribunal pas voulu déroger, dans les cas que prévoit pelle supérieure, s'il empêcherait les bruits précité, une demande reconventionnelle, l'art. 113, aux principes généraux de la du dehors de troubler les exercices du tendant, au principal, à faire prononcer, compétence, ni étendre à cet article la disculte; que, pour ces diverses raisons, l'of- pour cause de dol, la résolution de la vente position que l'art. 636 a limitée au cas de fre de la ville ne peut être acceptée; de la culture de champignons qui lui avait l'art. 112; – Considérant, enfin, Par ces motifs, etc.

été consentie par ledit Guillaumot, le mande reconventionnelle de la dame RolDu 23 oct 1912. C. Lyon, 1re ch. 21 juill. 1910, moyennant le prix de lin constituant un moyen de défense et MM. Auzière, le prés.; Gros, av.

gén.; Ta.

42.500 fr., sur lesquels elle avait payé une réponse directe à l'action principale vernier et Gabriel Perrin fils, av.

comptant une somme de 20.000 fr.; et sub- de Guillaumot, le tribunal de commerce sidiairement, à faire réduire le prix de pouvait en connaître, bien qu'elle eût un

vente à 20.000 fr.; de sorte que, si l'une de caractère civil; PARIS 5 décembre 1912.

été libérée du reliquiat du prix de vente du compétence opposé par la veuve Rollin doit 1° LETTRE DE CHANGE, FEMME NON COMMER- par elle, et représenté, pour partie, par les être rejeté; Par ces motifs; Statuant

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que, la de

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ses prétentions avait été accueillie, elle et de ce qui précède que le déclinatoire de

(1-2) La question de savoir quelle est la portée de l'art. 113, C. comm., d'après lequel « la signature des femmes et filles non négociantes ni marchandes publiques sur lettres de change ne vaut à leur égard que comme simple promesse », est controversée. V. la note sous Montpellier, 26 déc. 1902 (S. et P. 1906.2.65), dans laquelle sont exposés les différents systèmes qui se sont produits sur l'interprétation de l'art. 11:3, C. comm., et les conséquences de ces divers systèmes, all point de vue notamment de la compétence. La Cour de cassation s'est prononcée en faveur de la compétence du tribunal de commerce pour connaitre des difficultés relatives aux lettres de change revêtues de la signature d'une femme non commerçante. V. Cass. 330 janv. 18:49 (S, 1849.1.225. P. 1819.2.18+). Adile, la note de

M. Labbé sous Cass. 20 févr. et 6 mai 1878 (S.
1879.1.145. P. 1879.369); Boistel, Tr. blém. de dr.
comm., 3e éd., n. 739, in fine; Ruben de Couder,
Dict. de ilr. comm., v" Lettre de change, n. 210. Mais
V. en sens contraire, Montpellier, 26 déc. 1902 (mo-
tifs), précité, et les renvois de la note. Adie, Lyon-
Caen et Renault, Tr. de dr, comm., le éd., t. 4, n. 198.
V. au surplus, notre ('. comm. annoté, par Cohendy
et Darras, sur l'art. 113, n. 2 ; et notre Rép.gon. du
dll.fr., vl. Competence cirile et commerciale, n. 733
et s., Lettre de change, n. 510 et s.; Pand. Rip,
vo Effets de commerce, n. 3168 et s.

(3) La jurisprudence admet le plus généralement,
en sens contraire, que les tribunaux de commerce
ne peuvent statuer sur une demande reconvention-
nelle que lorsqu'ils sont compétents pour en con-

naître, d'après la nature de cette demande. V. Dijon, 19 nov. 1894 (S. et P. 1896.2.217), la note de M. Tissier et les autorités citées; Paris, 19 févr. 1897 (S. et P. 1899.2.185, la note de M. Wahl et les renvois; Pand. pér., sous Cass. 29 juin 1899, 1900.1.369); Besançon, 12 janv. 1912 (S. et P.1912. 2.100; Pand. por., 1912.2.100), et les renvois. Et, si quelques arrêts ont admis que cette règle souffrait exception, lorsqu'il y avait indivisibilité entre la demande principale et la demande reconventionnelle (V Dijon, 19 nov. 1894, précité; Paris, 19 févr. 1897, précité; Besançon, 12 janv. 1912, motifs, précité), ils ont été à juste titre critiqués. Vi la note de M. Tissier sous Dijon, 19 nov. 1894, précité. Adde, la note sous Besançon, 12 janv. 191?, précité.

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