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sur le déclinatoire de compétence opposé par la dame Rollin; - Dit que le tribunal de commerce était compétent pour prononcer sur les demandes dont il a été saisi par les parties en cause, etc.

Du 5 déc. 1912. C. Paris, 8 ch. MM. Milliard, prés. ; Pezous, subst., Martin Dupray et Emile Laurent, av.

TOULOUSE 20 décembre 1906.

1° DOT, MEUBLES DOTAUX, MARI, ALIÉNATION, NANTISSEMENT, SAISIE-EXÉCUTION, CRÉANCIERS DU MARI, FEMME, REVENDICATION, PREUVE (Rép., v Dot, n. 2147 et s.; Pand. Rép., vo Mariage, n. 11014 et s.).

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20 SAISIE-EXECUTION, LIVRES ET INSTRUMENTS PROFESSIONNELS, MÉDECIN (Rép., vo Saisie-exécution, n. 25 et s., 110 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 28 et s., 114). 1o Sous le régime dotal, le droit d'administration du mari sur les meubles dotaux va jusqu'à lui permettre de les aliéner seul, et même de les donner en nantissement en faveur de ses créanciers personnels (1) (C. civ., 1549).

Le mobilier dotal, sauf le cas où il consiste en choses consomptibles, ne cesse pas cependant d'appartenir à la femme; si le mari n'en a pas disposé, elle est en droit

(1-2-3) Les meubles dotaux dont la femme a conservé la propriété peuvent-ils être saisis par les créanciers du mari? A cette question, la Cour de Toulouse, par l'arrêt ci-dessus rapporté, a répondu négativement; nous croyons que cet arrêt mérite d'être approuvé, et n'est pas en désaccord avec l'ensemble du système de la jurisprudence sur la condition de la dot mobilière.

I. On sait en quoi consiste ce système. La dot mobilière est inalienable au regard de la femme, mais les biens mobiliers, qui ont été apportés en dot, sans cesser d'appartenir à la femme (V. Cass. 22 mars 1882, S. 1882.1.241. P. 1882.1.593), peuvent être aliénés ou donnés en nantissement par le mari agissant seul. V. Caen, 26 mars 1862 (S. 1863.2.62. P. 1863.672); Cass. 1er août 1866 (S. 1866.1.363. P. 1866.991), la note et les renvois; 13 janv. 1874 (motifs) (S. 1874.1.160. - P. 1874.395); adde, la note sous Cass. 3 févr. 1879 (S. 1879.1.353. P. 1879.891), avec les autorités citées, et Aubry et Rau, 4o éd., t. 5, p. 599, § 537 bis; Baudry-Lacantinerie, Le Courtois et Surville, Du contr. de mariage, 3° éd., t. 3, n. 1827; et notre Rép. gen. du dr. fr., vo Dot, n. 2147 et s.; Pand. Rep., v° Mariage, n. 11014 et s. Comp. Paris, 26 févr. 1903 (S. et P. 1904.2.67; Pand. pér., 1903. 2.261). Mais ce pouvoir reconnu au mari n'implique pas que les biens dotaux fassent partie du gage de ses créanciers, et que ceux-ci puissent les saisir. Pour qu'il en fût ainsi, il faudrait que le mari pût aliener en qualité de propriétaire; mais tout le monde est aujourd'hui d'accord pour ne voir en lui qu'un administrateur du patrimoine d'autrui. V. Aubry et Rau, 4o éd., t. 5, p. 555, § 536, texte et note 3; Planiol, Tr. élém. de dr. civ., 5° éd., t. 3, n. 1503; Guillouard, Tr. du contr. de mariage, t. 4, n. 1821; Baudry-Lacantinerie, Le Courtois et Surville, op. cit., t. 3, n. 1602; et notre Rép. gén. du dr. fr., verb. cit., n. 2184; Pand. Rép., verb. cit., n. 11038 et s. Sans doute, il est usufruitier en même temps qu'administrateur, et son mandat est entendu dans le sens le plus large, puisqu'on lui

de le revendiquer contre les créanciers de celui-ci, et sa revendication peut être établie par tous les moyens de preuve (2) (Id.).

Spécialement, la femme ou ses ayants droit peuvent obtenir de justice que les meubles dotaux dont la femme a conservé la propriété soient distraits de la saisie pratiquée par les créanciers du mari (3) (Id.).

2 Lorsque le débiteur saisi est médecin, les objets, qui ne sont, ni des livres ni des instruments propres à l'exercice de son art, ne rentrent pas dans l'application des

3 et 4 de l'art. 592, C. proc., qui, pour des motifs d'humanité, exceptent de la saisie certains meubles (4) (C. proc., 592).

(Dr Etienne et Vve Romain
C. Mauriès et autres).

18 juill. 1905, jugement du tribunal civil de Toulouse, ainsi conçu : — « Le Tribunal; En ce qui concerne les meubles prétendus dotaux de la dame Etienne, figurant aux procès-verbaux de saisie : Attendu que le sieur Mauriès est créancier des époux Etienne, en vertu d'un acte de Hilariot, notaire, du 27 déc. 1901; qu'après commandement, il a fait saisir leur mobilier (procès-verbal de Menavit, huissier, du 26 févr. 1902); Attendu que le docteur Etienne et la dame Romain, en leur qualité d'héritiers bénéficiaires de la dame Etienne, née Romain, revendiquent les

reconnait le droit de disposer des meubles. Mais ce droit n'est qu'un moyen de satisfaire aux besoins de l'administration: il est subordonné à l'intérêt de la dot, et c'est le détourner de son but que de l'utiliser au profit des créanciers du mari. En bonne règle, on devrait considérer comme un abus du droit tout acte constituant visiblement un détournement de pouvoir; on pourrait concevoir et justifier un contrôle exercé par les tribunaux sur les actes de disposition du mari. Sans abdiquer absolument ce droit de contrôle, les juges, au moins jusqu'à présent, l'ont exercé très timidement, avec une excessive réserve. On s'est contenté d'annuler les actes frauduleux par lesquels le mari cherchait à dépouiller la femme. V. Cass. 26 mars 1855 (S. 1855.1.481. -- P. 1855.2.449); 6 déc. 1859 (S. 1860. 1.644. - P. 1860.174). On a interdit également au mari d'aliéner les revenus futurs d'une valeur mobilière. V. Paris, 13 févr. 1845 (S. 1846.2.175. P. 1845.1.298). Mais, le plus souvent, on a maintenu les actes de disposition passés par le mari ou les époux. V. Cass. 13 janv. 1874, précité. Pouvait-on aller au delà, et valider un paiement forcé, ou une saisie pratiquée par les créanciers du mari? On a paru parfois disposé à l'admettre; on peut, en effet, citer certaines décisions, dont les motifs, sinon le dispositif, se montraient favorables aux prétentions des créanciers. V. Trib. de St-Girons, 2 juill. 1850 (S. 1850.2.484); Trib. de Valence, 18 juin 1861 (Rec. de Grenoble, 1862, p. 161). V. aussi, Caen, 26 mars 1862, précité. Dans l'espèce actuelle, le tribunal de Toulouse s'était prononcé dans le même sens; mais, sur ce point, son jugement a été infirmé par la Cour, qui décide que le mobilier dotal échappe à l'action des créanciers du mari, toutes les fois que ce dernier n'a pas, par un acte quelconque, manifesté sa volonté d'affecter les meubles dotaux au paiement de ses propres dettes. On peut espérer que cette solution sera finalement acceptée. V. conf., Aubry et Rau, 4o éd., t. 5, p. 555, § 536, note 3; BaudryLacantinerie, Le Courtois et Surville, op. cit.,

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n. 173, 175, etc., comme désignant des meubles dotaux inaliénables, et, par suite, insaisissables; Attendu les termes que et clauses du contrat de mariage des époux Etienne avaient imprimé aux meubles de la dame Etienne, énumérés dans le contrat, le caractère de biens dotaux, mais lui en avaient conservé la propriété; Attendu que la propriété des meubles dotaux reste à la femme; que le mari a 1" un droit d'administration; 2 un droit de jouissance; Attendu que, sous le régime dotal, les pouvoirs du mari, comme administrateur des biens de sa femme, sont plus étendus que ceux qui lui appartiennent sur les propres, sous le régime de la communauté; qu'il a gardé quelque chose de son ancienne qualité de propriétaire; il peut aliéner le mobilier dotal;

Attendu donc que, malgré que la dame Etienne fût restée propriétaire, le mari pouvait les aliéner coinme administrateur; que, entre les mains du mari, qui a le droit de disposer des meubles dotaux, la dot mobilière est aliénable; que, à l'égard de la femme, elle est frappée d'inaliénabilité, en ce sens qu'elle ne peut se trouver compromise par aucun acte de la femme; Attendu donc que le mari peut disposer des meubles dotaux, même de ceux dont il n'est pas propriétaire; que cette jurisprudence, qui a con

t. 3, n. 1829, p. 636; Guillouard, op. et loc. cit. II. Pour qu'elle soit applicable, et que les meubles dotaux puissent être distraits de la saisie, il ne suffit pas qu'ils ne soient pas devenus la propriété du mari; il faut qu'on puisse les reconnaître et faire la preuve de leur identité. Comment cette preuve se fera-t-elle ? En exceptant le cas où il y a faillite, cas dans lequel il faut tenir compte des dispositions spéciales de l'art. 560, C. comm., on admet que, sous le régime dotal, la preuve des reprises de la femme se fait conformément au droit commun. V. Cass. 28 oct. 1908 (sol. implic.) (S. et P. 1911.1.89; Pand. pér., 1911.1.89), et la note de M. Wahl (p. 91, 3 col.). Il faut donc, en principe, un écrit, toutes les fois que l'intérêt du procès dépasse 150 fr.; la preuve testimoniale n'est recevable que si des circonstances particulières, constatées par juge du fait, avaient empêché la femme de se procurer un titre écrit. V. Cass. 28 oct. 1908, précité, et la note de M. Wahl. Adde, Charmont, Examen doctrinal (Rev. crit., 1909, p. 527). Dans le cas présent, les objets que la femme s'était constitués en dot étaient énumérés dans son contrat de mariage dans le but d'établir l'identité des objets saisis avec les meubles constitués en dot, la Cour s'est approprié les constatations du rapport d'un juge-commissaire qui avait été nommé par le tribunal, et qui avait recherché la preuve de cette identité, en comparant les énonciations du contrat de mariage avec celles des procès-verbaux de saisie.

(4) Il est de principe que le droit de saisie ne souffre exception que dans les cas prévus et déterminés par la loi, dont les termes ne peuvent être étendus ou modifiés sous prétexte d'interprétation. V. Cass. 25 janv. 1899 (S. et P. 1899.1.168; land. pér., 1899.1.232); Trib. fédéral suisse, 6 oct. 1900 (S. et P. 1901.4.8), les notes et les renvois. Adde, Bioche, Dict. de proc., v° Saisie-exécution, n. 45 et s.; Rousseau et Laisney, Dict. de proc., v° Saisieexécution, n. 46 et s.; Garsonnet, Tr. de proc., 2o éd., par Cézar-Brn, t. 4, § 1301; Glasson, Precis de proc., 2° éd., par Tissier, t. 2, n. 1186.

servé les pouvoirs du mari, est certainement contraire à la tendance du régime dotal, mais que, depuis 1846, elle n'a pas varié; que la question ne se plaide plus, ce qui ne veut pas dire que des variations ne se produiront peut-être prochainement, car, logiquement, personne, même un mari, ne devrait pouvoir disposer des meubles dont il n'est pas propriétaire, à moins qu'il n'y fût autorisé par le propriétaire lui-même; Attendu, néanmoins, que, en présence d'une jurisprudence aussi formelle et aussi persistante, donnant au mari le droit d'aliéner les meubles dotaux, à charge d'en représenter la valeur lors de la dissolution du mariage ou de la séparation des biens, la logique juridique doit lui donner le droit de s'obliger sur ces mêmes biens, et permettre à ses créanciers de les saisir; peu importe qu'ils lui aient été remis, comme dans l'espèce actuelle, avec clause que « l'estimation n'en vaut pas vente », car, dans ce cas, il en dispose tout de même en vertu de son pouvoir exceptionnel d'administration, et, par suite, ils deviennent le gage de ses créanciers qui ont le droit de les saisir; Attendu que l'opinion contraire d'Aubry et Rau se résout, comme presque toujours chez ces auteurs, par une affirmation plus ou moins tranchante; que, dans leur texte, ils se bornent à dire les créanciers du mari ne peuvent valablement saisir même les meubles corporels ou incorporels faisant partie de la dot »; et, dans leur note:

Cette proposition doit être admise, quant aux meubles, comme conséquence du principe posé au texte, même dans le système de l'aliénabilité de la dot mobilière (4e éd., t. 5, p. 555, § 536, texte et note 3) »; et, néanmoins (ibid., p. 599, $ 537 bis), ils professent que le droit de disposition dont jouit le mari s'applique, non seulement aux meubles corporels dont il est devenu propriétaire, mais encore à ceux dont la femme à conservé la propriété »; qu'il y a là une contradiction qui doit faire écarter l'opide ces auteurs que les créanciers du mari ne peuvent saisir valablement les meubles faisant partie de la dot »; - Attendu que Mauriès a donc eu le droit de saisir les meubles dotaux de la dame Etienne; Attendu, en outre, que d'autres motifs semblables semblent pouvoir ètre invoqués, à l'appui de l'opinion que les meubles dotaux peuvent être valablement saisis par les créanciers du mari; que c'est un des motifs de la situation faite à la femme (même à la femme dotale) d'un commerçant failli; que, en effet, aux termes de l'art. 560, C. comm., la femme qui revendique ses effets mobiliers dont elle prétendrait avoir conservé la propriété doit, « sous quelque régime » qu'ait été contracté le mariage, établir l'origine et « l'identité des meubles ou effets mobiliers revendiqués par elle, par inventaire ou tout autre acte authentique »; Attendu qu'un autre de ces motifs peut étre tiré des art. 1498 et 1499, C. civ., qui exigent impérieusement un inventaire ou un état en bonne forme, qui, seuls, permettent, le cas échéant, de vérifier et de dire si les objets mobiliers revendiqués

D

par la femme sont les mêmes qui lui ont appartenu avant ou au moment de son mariage; que, sous le régime de la communauté réduite aux acquêts, la femme ne peut revendiquer les meubles énumérés dans son contrat de mariage qu'autant que la consistance en est constatée par un inventaire ou un état en bonne forme; que, la simple énumération faite dans le contrat de mariage ne permettant pas de vérifier si les objets revendiqués sont les mêmes que ceux qui ont appartenu à la femme avant son mariage, ce contrat ne peut remplacer cet inventaire ou cet état en bonne forme; que, par suite, ces objets peuvent être valablement saisis à la requête du créancier du mari; que, du reste, ces deux situations ne sont indiquées que par surcroît, et pour affirmer l'esprit de notre législation, quand la femme mariée se trouve en conflit d'intérêts avec des créanciers du mari, les motifs développés antérieurement à ces deux situations étant suffisants pour justifier la saisie des meubles dotaux de la dame Etienne, et faire repousser la demande en revendication de ces meubles; Par ces motifs, etc. ». Appel par le docteur Etienne et Mme Romain.

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ARRÈT.

LA COUR; En ce qui touche les meubles corporels dotaux revendiqués par le docteur Etienne et la dame veuve Romain, agissant en qualité d'héritiers bénéficiaires de la dame Etienne, née Romain... : Attendu, en droit, qu'il est de doctrine et de jurisprudence constantes que, sous le régime dotal, le droit d'administration du mari sur les meubles dotaux de sa femme est un des plus étendus et va jusqu'à lui permettre de les aliéner seul, même de les donner en nantissement en faveur de ses créanciers personnels; Attendu qu'il est non moins certain que le mobilier dotal, sauf le cas où il consiste en choses consomptibles, se consommant par le premier usage et qui deviennent alors la propriété du mari, suivant la règle posée dans l'art. 1587, C. civ., ne cesse pas cependant d'appartenir à la femme, et que, si le mari n'en a pas disposé, elle est en droit de le revendiquer contre les créanciers de celui-ci, sa revendication pouvant, au surplus, être établie par tous les moyens de preuve (V. Cass. 22 mars 1882, S. 1882.1.241. P. 1882.1.593); Attendu, dès lors, que, si le mari, qui peut, à son gré, disposer du mobilier dotal, en a consenti la vente ou l'a remis en gage à un de ses créanciers, le droit de propriété de la femme se convertit en une créance contre le mari, créance garantie et protégée par son hypothèque légale; Attendu que si, au contraire, il n'en a pas disposé, s'il ne l'a pas aliéné, s'il n'a pas, par un acte quelconque, manifesté la volonté de l'affecter au paiement de sa propre dette, la femme en est restée nécessairement propriétaire, et, en cette qualité, elle a le droit, comme tout propriétaire, de le revendiquer et d'obtenir de justice qu'il soit distrait de la saisie pratiquée par le créancier du mari;

Attendu, en fait, que, parmi les objets

saisis par les créanciers du mari, certains font incontestablement partie du mobilier dotal de la dame Etienne; que, par conséquent, le docteur Etienne n'en a pas disposé comme il aurait été en droit de le faire; qu'il ne les a ni vendus ni remis en gage; d'où il suit que la dame Etienne en est restée propriétaire, et qu'à tort les premiers juges, accueillant les prétentions de Mauriès, ont décidé que ce dernier avait pu valablement saisir le mobilier dotal pour le faire servir au paiement de sa créance; que, de ce chef, il convient de réformer leur décision; -Mais attendu que le docteur Etienne et la veuve Romain ne pourront échapper à l'action de Mauriès que tout autant qu'ils prouveront que les meubles qu'ils revendiquent sont réellement des meubles dotaux... (l'arrêt examine ensuite, à l'aide des constatations du rapport du juge-commissaire qui avait été nommé par le tribunal, l'identité des objets saisis avec les meubles constitués en dot):

Sur la revendication du docteur Etienne, en ce qui concerne les objets mobiliers indiqués sous les n. 362, 363, 364, 373 du procès-verbal de saisie, et qui consistent en un bois de bibliothèque, un fauteuil, une chaise et une fontaine en cuivre : Attendu qu'il est de principe que tous les biens d'un débiteur servent de gage à ses créanciers, et partant sont susceptibles de saisie-exécution; que, néanmoins, pour des motifs d'humanité et pour ne pas réduire ce débiteur à l'impossibilité de vivre, la loi a excepté de la saisie certains meubles énumérés dans l'art. 592, C. proc.; qu'on lit, dans les 8 3 et 4 de l'article susvisé que les livres relatifs à la profession du saisi, jusqu'à la somme de 300 fr., à son choix, sont insaisissables; qu'il en est de même pour les instruments servant à l'exercice de la profession du saisi, jusqu'à concurrence de la même somme, également à son choix; Or, attendu que le procèsverbal de l'huissier ne constate la saisie d'aucun livre, d'aucun instrument de médecine ou de chirurgie; qu'il est vraisem blable que le docteur Etienne avait en sa possession des livres et des instruments de chirurgie pour une valeur importante, dans tous les cas bien supérieure à la somme de 600 fr., et qu'ils ont dû être dissimulés, puisque l'huissier n'en fait pas mention; Attendu que, seuls, les livres et les instruments de médecine et de chirurgie, dans les limites indiquées par la loi, sont déclarés insaisissables; d'où il suit que, les objets revendiqués par le docteur Etienne, n'étant ni des livres ni des instruments propres à l'exercice de son art, ne rentrent pas dans le champ d'application des $$ 3 et 4 de l'art. 592, C. proc., et que ce serait violer le texte de la loi que d'accueillir, de ce chef, sa demande en revendication; Par ces motifs, etc.

Du 20 déc. 1906. - C. Toulouse, 2o ch. - MM. Simonet, prés.; Bonzom, subst.; Armaing et Gamard Clairin, av.

DOUAI 2 juillet 1912.

1 NOBLESSE (TITRES DE), PROPRIÉTÉ, TRIBUNAUX CIVILS, Incompétence (Rép., vo No

blesse [Titres de], n. 188 et s.; Pand. Rép., v Noms et prénoms, n. 302 et s.).

20 NOMS ET PRÉNOMS, NOM PATRONYMIQUE, POSSESSION, ACTE ANCIEN, PARTICULE, USURPATION ANTÉRIEURE A LA REVOLUTION, LOI DU 6 FRUCT. AN 2 (Rép., vo Noms [et prénoms], n. 215 et s.; Pand. Rép., v Noms et prénoms, n. 107 et s., 234 et s.).

1o Les tribunaux civils sont incompétents pour connaitre des contestations relatives à la propriété d'un titre de noblesse (1) (Ordonn., 26 mars 1555; LL. 4 août 1789; 19-23 juin 1790; 6 fruct. an 2; 11 germ. an 11).

2o Pour établir quel est le nom patronymique d'une famille, il faut remonter aux actes les plus anciens qui fixent ce nom (2) (C. civ., 2226; L. 6 fruct. an 2).

Spécialement, lorsque le nom d'une famille a été, depuis le XVIe siècle, orthographie, tantoi avec incorporation de la particule de, tantôt avec séparation de cette particule, tantôt enfin sans l'adjonction de la particule, soit séparée, soit incorporée, c'est cette dernière orthographe qui doit être préférée, lorsqu'elle résulte des actes les plus anciens versés au débat (3) (Id.).

Alors surtout que c'est cette même orthographe qui a été conservée par une des branches de la famille (4) (Id.).

Vainement le demandeur se prévaudrait de la loi du 6 fruct. an 2 pour soutenir que, dans un certain nombre d'actes antérieurs à la Révolution, son nom étant précédé de la particule de, il aurait le droit de le rétablir sous cette forme; en effet, si la loi du 6 fruct. an 2 a autorisé ceux dont le nom patronymique comportait la particule, séparée à reprendre cette particule, elle n'a pu avoir pour conséquence

(1) Dans l'opinion la plus généralement admise, l'autorité judiciaire est incompétente pour connaitre des questions relatives à la collation, à la reconnaissance ou à la vérification des titres uobiliaires, la solution de ces difficultés appartenant au chef de l'Etat, sur l'avis du conseil d'administration du ministère de la justice, qui a remplacé le conseil du sceau des titres. V. Cass. 1er juin 1863 (S. 1863.1.447. - P. 1864.79); Trib. de Péronne, 2 avril 1890, et Amiens, 24 déc. 1890, sous Cass. 17 nov. 1891 (S. et P. 1893.1.25), et les observations de M. Lallier: Cass. 10 nov. 1897 (S. et P. 1899.1.337), et la note de M. Appert; Paris, 16 mars 1910 (sol. implic.) (S. et P. 1910.2.307; Pand. pér., 1910.2.307), et les renvois de la note in fine. Mais les titres nobiliaires formant l'objet d'une véritable propriété (V. la note de M. Hauriou sous Trib. des conflits, 17 juin 1899, de Dreux-Brézé, S. et P. 1900.3.17; et les conclusions de M. le commissaire du gouvernement Corneille, rapportées avec Cons. d'Etat, 29 avril 1910, de Martimprey, S. et P. 1912.3.125; Pand. pèr., 1912.3.125), il appartient à l'autorité judiciaire de connaître des actions fondées sur de prétendues atteintes aux droits pouvant résulter, pour ceux qui les ont obtenus, des titres de noblesse régulièrement conférés. V. Trib. des conflits, 17 juin 1899, de Dreux-Brézé, précité, et la note de M. Haurion (Pand. per., 1901.4.13); Cons. d'Etat, 29 avril 1910, de Martimprey, précité, et les conclusions de M. le commissaire du gouvernement Corneille, rapportées avec cet arrêt. V. encore,

d'autoriser ceux qui, par eux-mêmes ou par leurs auteurs, avaient usurpe cette particule, contrairement à l'ordonnance de 1555, depuis un temps peu éloigné el d'une manière non continue, à réitérer et à poursuivre une telle usurpation (5) (L. 6 fruct. an 2).

(De Veyrac C. Reboulh de Veyrac-Blin de Grincourt).

M. Louis-Jacques-Maurice de Veyrac, habitant la Haute-Loire, a introduit, devant le tribunal civil d'Arras, contre le baron Reboulh de Veyrac-Blin de Grincourt et son fils Joseph, une action tendant à faire défense à ces derniers de porter les titre et nom de baron de Veyrac, soit seuls, soit précédés ou suivis de leurs autres noms.

2 nov. 1911, jugement du tribunal civil d'Arras, ainsi conçu : - Le Tribunal; Attendu que le demandeur a d'abord la charge d'établir qu'il a la propriété du nom patronymique : « baron de Veyrac ». En ce qui concerne le titre de baron: Attendu que les parties reconnaissent que le tribunal est incompétent; - En ce qui concerne le nom « de Veyrac » : — - Attendu que le demandeur est né au Puy, le 27 mai 1858, et qu'il est dénommé dans son acte de naissance: Louis-Jacques-Maurice, fils de M. le baron Jacques-Irénée-Oscar de Veyrac ; qu'en outre, Jacques-IrénéeOscar de Veyrac est aussi ainsi désigné, dans son acte de naissance, au Puy, 31 janv. 1819, comme étant fils du baron JacquesMaurice de Veyrac; Mais attendu que, pour connaître exactement le nom patronymique du demandeur, il faut remonter aux actes les plus anciens fixant ce nom;

Attendu que Maurice Veyrac est né, le 22 juin 1792, au Monastier, fils de JeanJacques Veyrac ; qu'il est décédé au Puy,

le

Paris, 16 mars 1910, précité, la note et les renvois. (2 à 5) Du principe que le nom de famille est incommutable et imprescriptible (V. Toulouse, 15 mars 1893, et Trib. d'Orange, 21 avril 1893, S. et P. 1898.2.281, avec la note de M. Lallier: Limoges, 22 juill. 1895, S. et P. 1897.2.278. Adde, les observations de M. Lallier, sous Cass. 17 nov. 1891, S. et P. 1893.1.25; et Perreau, Le droit au nom en mut. civ., p. 189 et s.), on a tiré cette conséquence qu'en cas de désaccord entre les titres produits pour justifier le droit à un nom patronymique (V. sur la preuve du droit à un nom patronymique, Paris, 16 mai 1900, S. et P. 1902.2.15; Pand. per., 1901.2.250, et les renvois; Bourges, 30 janv. 1901, sol. implic., S. et P. 1904.2.27; Pand. pér., 1903.2.5), il faut se reporter aux actes les plus anciens. Toutes garanties d'authenticité égales, ces actes sont présumés véridiques, et le nom, dans la forme où il y est consigné, doit être tenu comme le véritable nom patronymique. V. Toulouse, 15 mars 1893, et Trib. d'Orange, 21 avril 1893, précités; Limoges, 22 juill. 1895, précité, et les renvois. Il a été jugé spécialement, dans une espèce analogue à celle de l'arrêt ci-dessus recueilli, où le nom patronymique d'une famille avait été, au cours de deux siècles, orthographié, tantôt avec séparation de la particule de, comprise dans ce nom, tantôt avec incorporation au nom de cette particule, que la première orthographe devait être préférée, si elle se trouvait dans l'acte le plus ancien. V. Limoges, 22 juill. 1895, précité.

4 mai 1837, sous les noms de Maurice Deveyrac ; que Jean-Jacques Deveyrac, fils de Jacques-Antoine Deveyrac, a été baptisé, le 6 déc. 1730, au Monastier; que Jacques-Antoine de Veyrac a été baptisé le 25 juill. 1701, au Monastier, et était fils de Jacques de Veyrac; que Jacques de Veyrac a été baptisé le 8 juin 1664, et était fils de Gabriel de Veyrac; que Gabriel Veyrac a été baptisé le 16 avril 1634, et était fils d'Antoine Veyrac, lequel est repris en son acte de mariage comme étant fils de Jean Veyrac, le 16 mai 1633; que Jean Veyrac était fils de Jacques Veyrac, né, le 29 oct. 1535, à SaintEtienne-Lardeyrol; que Jacques Veyrac était fils de Jean Veyrac, maçon; Attendu qu'il appert des documents précités que le demandeur pouvait se prévaloir du nom patronymique Veyrac », et non pas « de Veyrac»; qu'il faut noter, en outre, que ce nom patronymique « Veyrac » a été conservé intact par une autre branche de la famille;

Attendu, enfin, que le demandeur ne peut faire état d'une procédure en vérification de nom et de titres, faite dans des conditions étranges et suspectes; Attendu que, dans de semblables conditions, le demandeur ne justifie nullement de la propriété du nom patronymique de Veyrac ; qu'il n'est donc pas recevable en son action; Par ces motifs, etc. ». Appel par M. Louis-Jacques-Maurice de Veyrac.

ARRÈT.

LA COUR; Attendu que l'appelant a fait assigner les intimés, pour voir dire que la dénomination baron de Veyrac » ou celle de « de Veyrac », lui appartient, à leur exclusion, et qu'il leur sera fait défense de se faire désigner, en aucune circonstance, sous la dénomination de « baron

Dans la présente affaire, le demandeur, pour soutenir qu'il avait le droit de faire précéder son nom de la particule de, invoquait divers actes antérieurs à la Révolution, dans lesquels son nom était orthographié avec la particule, et il soutenait que la loi du 6 fruct. an 2 (S. 1er vol. des Lois annotées, p. 304), en enjoignant aux citoyens de reprendre leur nom patronymique originaire, avait eu pour effet de rendre à ses ascendants l'usage de la particule qu'ils avaient abandonnée.

Cette prétention ne pouvait être accueillie. La loi du 6 fruct. an 2 n'a eu qu'un but, c'est de mettre fin au régime de liberté absolue, instauré par le décret du 24 brum. an 2 (S. 1er vol. des Lois annotées, p. 273), qui avait permis à chaque citoyen de changer de nom à son gré. V. Perreau, Le droit au nom en mat. civ., p. 202. C'est ce qui ressort de son art. 1er, aux termes duquel << aucun citoyen ne pourra porter de nom ni de prénom autres que ceux exprimés dans son acte de naissance; ceux qui les auraient quittés seront tenus de les reprendre Ce texte a, sans doute, autorisé ceux dont le nom figurait dans leur acte de naissance avec une particule, qu'ils avaient plus tard abandonnée, à reprendre cette particule, mais il n'a pu avoir pour effet de consacrer l'usage abusif qui avait été fait d'un nom, sous l'empire de l'ordonnance d'Amboise du 26 mars 1555, qui a formé, jusqu'à la Révolu tion, le droit de l'ancienne France. V. Cass, 16 nov. 1824 (S. et P. chr.); Perreau, op. cit., p. 201,

note 4.

de Veyrac ou sous celle de « de Veyrac »; qu'en appel, le demandeur demande seulement que les intimés soient tenus de prendre, en toutes circonstances, leur nom complet Reboulh de Veyrac-Blin de Grincourt et qu'il leur soit interdit de prendre celui de de Veyrac isolé de « Reboulh »;

Attendu qu'il n'a point qualité pour former cette demande, son véritable nom patronymique étant « Veyrac », et non « de Veyrac, ainsi que l'ont établi les premiers juges, dans les motifs de leur décision; Attendu qu'il invoque à tort la disposition finale de l'art. 1er de la loi du 6 fruct. an 2; qu'en effet, l'esprit de cette loi a été de prescrire à ceux, dont la particule de faisait partie intégrante du nom patronymique, de la reprendre, mais non d'autoriser ceux dont les auteurs avaient usurpé cette particule, contrairement à l'ordonnance de 1555, depuis un temps peu éloigné, ainsi que l'avaient fait certains auteurs de l'appelant, et d'une manière non continue, à réitérer et à poursuivre une telle usurpation; que le véritable nom de l'aïeul de l'appelant, Jacques-Maurice Veyrac, né le 22 juin 1792, était « Veyrac », conformément, d'ailleurs, à son acte de naissance; que la loi de fructidor ne l'autorisait nullement, et lui interdisait même d'en prendre un autre; Attendu que l'usage illégal qu'il aurait fait du nom de « de Veyrac ne lui aurait point constitué un droit à changer son nom patronymique; mais qu'au contraire, il résulte des faits de la cause qu'il signait les actes authentiques, notamment son contrat de mariage et les actes de naissance de ses enfants, du nom de « Deveyrac » en un seul mot, et non de celui de « de Veyrac »; que son fils, père du demandeur, a été, de même, marié, le 22 avril 1852, devant l'officier de l'état civil de la ville du Puy, où il était domicilié, sous le nom de « Jacques-IrénéeOscar Deveyrac », en un seul mot; qu'ils n'avaient donc, ni l'un ni l'autre, la possession publique et continue du nom de « de Veyrac - Attendu que, ni JacquesMaurice Veyrac, aïeul du demandeur, ni Jacques-Irénée-Oscar, son père, ni luimême, n'ont jamais été autorisés à changer de nom conformément à l'art. 4 de la loi du 11 germ. an 11; que, par suite, le véritable nom patronymique de l'appelant, et le seul auquel il a droit, est celui de

Veyrac», qu'ont d'ailleurs conservé intact tous les membres de la branche aînée

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(1) Aux termes de l'art. 6 de la loi du 22 juill. 1896 (S. et P. Lois annotées de 1896, p. 145; Pand. pér., 1898.3.33), modifié par la loi du 4 mars 1898 (S. et P. Lois annotées de 1898, p. 453; Pand. pér., 1898. 3.34), sera punie d'une amende de 16 fr. à 100 fr., sans préjudice de tous autres dommages-intérêts, et de l'application, le cas échéant, des peines portées aux art. 451 et 401, C. pén., toute personne qui, en n'importe quel lieu ou quel temps, par n'importe quel moyen, aura capturé ou détruit, ou tenté de capturer ou de détruire, des pigeons voyageurs ne lui appartenant pas ». Il ressort de la généralité des termes employés par la loi que le fait de tuer un pigeon voyageur est punissable, même dans le cas où, comme dans l'espèce, l'oiseau causait du dégât aux récoltes; nul n'a le droit de capturer ou de tuer l'animal trouvé en délit ; il

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PIGEONS, PIGEONS VOYAGEURS, DESTRUCTION, DÉLIT, ELEMENTS CONSTITUTIFS, INTENTION DELICTUEUSE (Rép., vis Colombiers, n. 1 et s., Pigeons, n. 11 et s.; Pand. Rép., vo Animaux, n. 347 et s., Suppl., eod. verb., n. 175 et s.).

Ne constitue pas, à défaut d'intention délictueuse, le délit de destruction de pigeons voyageurs, prévu par l'art. 6 de la loi du 22 juill. 1896, modifié par la loi du 4 mars 1898, le fait par un prévenu d'avoir, sur l'ordre de son maître, tué d'un coup de fusil un pigeon voyageur, au moment où il commettait des dégâts dans un champ appartenant à ce dernier, s'il n'est pas établi que le prévenu eût la certitude qu'il déchargeait son arme sur un pigeon voyageur (1) (LL. 22 juill. 1896, art. 6; 4 mars 1898).

(Texier).

10 déc. 1912, jugement du tribunal de police correctionnelle de Châtellerault, ainsi conçu - « Le Tribunal; - Attendu qu'il résulte d'un procès-verbal régulier et des débats d'audience, et que le fait d'ailleurs n'est pas contesté, que, le 17 nov. 1912, à Châtellerault, l'inculpé, qui se trouvait dans une propriété que possède son maître aux portes de la ville, a tiré un coup de fusil sur des pigeons voyageurs descendus sur un champ, et en a tué un; que l'inculpé prétend que les pigeons, sur lesquels il a tiré, sur l'ordre de son maître, faisaient dans les champs de grands dégâts, mais que la loi du 22 juill. 1896, modifiée par celle du 4 mars 1898, défend expressément la destruction des pigeons voya

peut seulement être réclamé des dommages-intérêts pour le dégât causé. V. la note, in fine, sous Cass. 30 mai 1907 (S. et P. 1911.1.595; Pand. pér., 1911.1.595). Adde, notre Rép. gen. du dr. fr., vo Pigeons, n. 11: Pand. Rep., vo Animaux, n. 347 et s.

Mais l'infraction prévue par l'art. 6 de la loi du 22 juill. 1896, modifié par la loi du 4 mars 1898, est-elle une infraction matérielle, punissable, comme l'avait décidé le tribunal de Châtellerault, indépendamment de la bonne foi de son auteur: ou bien, au contraire, comporte-t-elle un élément intentionnel, en telle sorte que le délit ne puisse être retenu que si le prévenu a agi en connaissance de cause, sachant que le pigeon qu'il détruisait ou capturait était un pigeon voyageur? C'est en ce dernier sens que se prononce la Cour de Poitiers, et l'on peut invoquer, à l'appui de cette

geurs, en tout temps et par quelque moyen que ce soit; qu'il n'existe pas d'arrêté préfectoral ordonnant la fermeture des colombiers; que le dommage causé par les pigeons peut donner lieu à une action civile, mais ne saurait excuser ceux qui les détruisent de commettre une contravention; Attendu que ce fait constitue la contravention prévue par l'art. 6 de la loi du 22 juill. 1896, modifiée par celle du 4 mars 1898; - Par ces motifs; Déclare le prévenu atteint et convaincu d'avoir, à Châtellerault, le 17 nov. 1912, tué un

pigeon voyageur; Et, pour réparation, le condamne à la peine de 16 fr. d'amende, etc. ».

Appel par M. Texier.

ARRÊT.

LA COUR; Attendu qu'il ne résulte, ni de l'information, ni des débats, la preuve que Texier ait eu connaissance, avant le fait qui lui est reproché, que Monribot possédait des pigeons voyageurs, et qu'il eût obtenu de l'administration préfectorale, le 12 mai dernier, l'autorisation d'en élever; qu'il n'est même pas établi que, le 17 nov. 1912, en tirant, par ordre de Brunet, un coup de fusil sur des pigeons qui mangeaient le blé récemment ensemencé dans le champ de son maître, le prévenu eût la certitude qu'il déchargeait son arme sur des pigeons appartenant à Monribot; qu'en effet, Brunet ayant, à cette date, demandé à la dame Monribot si les pigeons causant du dégât chez lui venaient de son colombier, celle-ci aurait répondu, d'après les dépositions du témoin Mary, qu'on ne pouvait le savoir, qu'ils n'étaient pas marqués au bout de la queue » ; que l'intention délictueuse de la part de l'auteur de l'infraction n'est donc pas démontrée; - Par ces motifs; Reçoit le prévenu Texier appelant du jugement rendu, le 10 déc. 1912, par le tribunal correctionnel de Châtellerault;

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solution, les travaux préparatoires de la loi du 4 mars 1898. Le rapporteur à la Chambre des députés, après avoir insisté sur la nécessité de protéger les pigeons voyageurs, et montré qu'il était nécessaire de prévoir une répression rigoureuse pour des agissements qui, étant donné les différences profondes séparant, à l'aspect, les pigeons voyageurs des pigeons ramiers ou des pigeons domestiques, s'expliquent dans la plupart des cas par la malveillance, ajoutait : Les gens de bonne foi n'ont rien à craindre. S'il y a simplement erreur ou accident, le ministère public ne poursuivra pas ou les juges acquitteront; car, pour obtenir une condamnation, le parquet doit établir, non seulement le fait matériel de destruction, mais, en outre, l'intention délictueuse » (S. et P. Lois annotées de 1898, note 1, p. 454, 2o col., in fine).

DIJON 28 octobre 1910.

COMMUNAUTÉ CONJUGALE, Liquidation, RePRISES, RÉCOMPENSES, MARI, BALANCE DU COMPTE, PRÉLÈVEMENTS DE LA FEMME (Rép., v Communauté conjugale, n. 1963 et s.; Pand. Rép., vo Mariage, n. 6117 et s.). Pour le partage de la communauté, les

(1) Un mari est tout à la fois créancier de reprises et débiteur de récompenses envers la communauté dissoute. La plus faible des deux sommes doit-elle être déduite de la plus forte, ainsi que Pothier le décidait déjà (Tr. de la comm., n. 701, ed. Bugnet, t. 7, p. 354, et Tr. des success., ch. 5, art. 2. § 1, éd. Bugnet, t. 8, p. 198 et s.), de telle. sorte qu'il n'y ait lieu à rapport ou à prélèvement que pour l'excédent? Doit-on, au contraire, régler séparément reprises et récompenses d'un même époux, sans déduction ni compensation entre elles? C'est en ce dernier sens que vient de statuer la Cour de Dijon. Il n'est pas inutile de rapprocher cet arrêt d'une décision identique, rendue par la même Cour, à l'égard des reprises et récompenses de la femme. Par arrêt du 11 juin 1889 (sous Cass. 3 mars 1891, S. et P. 1892.1.190; Pand. pér., 1891. 1.449), la Cour de Dijon avait repoussé toute déduction ou balance de compte, refusant de voir là autre chose qu'une compensation ordinaire, prohibée par l'art. 446, C. comm. (En l'espèce, la communauté avait été dissoute par la séparation de biens prononcée après la déclaration de faillite du mari).

Mais cet arrêt a été cassé par un arrêt de principe du 3 mars 1891, précité, ainsi motivé : « Attendu, en droit, que, lorsqu'il s'agit, après la dissolution de la communauté, d'établir les reprises de la femme, ou les récompenses par elle dues à la communauté, ces reprises et ces récompenses ne sauraient étre considérées comme des dettes distinctes, indépendantes les unes des autres, soumises aux règles de la compensation, et spécialement aux effets que peuvent produire, relativement à ces règles, des accidents tels que la faillite; qu'elles constituent les éléments d'un compte unique et indivisible, dont le résultat est seul à considérer, lorsqu'il s'agit de réLa gler la situation réciproque des parties... Cour de cassation maintenait ainsi énergiquement une jurisprudence affirmée par un arrêt du 15 mai 1872 (S. 1872.1.313. P. 1872.833, et la note de M. Labbé), cassant un arrêt de Rouen du 10 avril 1868. Cette jurisprudence avait été suivie par les Cours d'appel, malgré l'objection grave tirée, dans cette affaire, du caractère dotal des reprises de la femme. V. Caen, 9 juill. 1889 (motifs) (S. 1890. 2.73. P. 1890.1.434), et la note de M. Labbé; Angers, 11 mai 1891 (S. et P. 1892.2.112); Besançon, 22 juill. 1891 (sur renvoi prononcé par l'arrêt de Cass. 3 mars 1891, précité) (S. et P. 1894.2.114). Comp. Trib. de la Seine, 31 janv. 1899, et Paris, 23 mai 1900, sous Cass. 16 nov. 1904 (S. et P. 1905.1.465), et la note de M. Dalmbert; Rouen, 10 janv. 1903 (motifs), sous Cass. 27 avril 1904 (S. et P. 1905.1.81), et la note de M. Esmein. V. au surplus, la note de M. Lyon-Caen, et les renvois sous Cass. 2 mai 1901 (S. et P. 1905.1.481). En 1897, la Cour de Dijon eut à statuer sur une hypothese qui semblait lui permettre de maintenir, du moins dans l'intérêt des tiers, créanciers hypothécaires, sa thèse de l'indépendance entre elles des créances de reprises de la femme, et des récompenses dues par elle à cette communauté. Il s'agissait de colloquer les créances hypothécaires de la femme aux divers rangs que leur attribue l'art. 2135, ANNÉE 1913. 4 cal.

prélèvements de la femme devant, aux termes de l'art. 1471, C. civ., s'exercer avant ceux du mari, il s'ensuit que le mari ne peut se payer du montant de ses reprises, fùt-ce par voie de compensation avec les sommes par lui dues à la communauté, à titre de récompenses, avant que la femme ait exercé ses prélèvements dans l'ordre réglé par l'art. 1471, c'est-à-dire d'abord

C. civ. Comment établir ces collocations, quand la femme, créancière de reprises pour des causes diverses, est, en même temps, débitrice de récompenses? Tout en admettant que la récompense (unique en l'espèce) devait se compenser avec le montant des reprises, de manière à déterminer le chiffre définitif desdites reprises, la Cour de Dijon, considérant les créances de la femme comme distinctes les unes des autres, compensa la dette de la femme avec les créances de reprises les plus anciennes, par application d'une règle commune à la compensation et à l'imputation des paiements (C. civ., 1256, 1297). Quoique ayant apporté une dot en mariage, la femme n'était colloquée, pour le solde de ses reprises », qu'à une date ultérieure, après plusieurs créanciers de son mari. V. Dijon, 18 nov. 1897 (S. et P. 1899.2.121).

"

Cette these, désastreuse pour la garantie hypothécaire de la femme, a été vivement combattue. V. la note de M. Tissier sous Dijon, 18 nov. 1897, précité. Adde, Baudry-Lacantinerie et de Loynes, Des priv. et hyp., 3e éd., t. 2, n. 1497, I. M. Tissier nie avec raison qu'il y ait à faire, en l'espèce, application des art. 1256 et 1297, aucune compensation n'étant d'ailleurs possible, durant la communauté, entre dettes non liquides ni exigibles :

Il faut, dit-il, concilier la règle de l'art. 2135, C. civ., d'après laquelle l'hypothèque légale prend rang à des dates différentes, avec cette autre règle, d'après laquelle il y a unité de la créance des reprises, déduction faite des récompenses, compte unique et indivisible, dont le solde seul détermine la créance de la femme ». De leur côté, MM. BaudryLacantinerie et de Loynes, se plaçant résolument sur le terrain déterminé par la jurisprudence, maintiennent que, même au point de vue hypothécaire,

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la femme n'a qu'une créance unique, la créance du solde de la balance des reprises et récompenses à elle et par elle dues à la communauté; que cette créance est garantie par l'hypothèque légale aux dates fixées par l'art. 2135, C. civ. :- à la date du mariage, jusqu'à concurrence de la dot et des conventions matrimoniales; - à la date de l'ouverture des successions et de l'efficacité des donations, jusqu'à concurrence des sommes acquises de ces manières; à la date des obligations contractées ou des aliénations consenties, pour les droits nés de ces causes. Elle est ainsi dans une situation analogue à celle du constructeur, dont la créance n'est privilégiée que jusqu'à concurrence de la plus-value, et qui, pour le surplus, n'est qu'un créancier chirographaire... Les tiers sont avertis... (Baudry-Lacantinerie et de Loynes, op. et loc. cit.).

»

Est-ce à dire que, par l'arrêt ci-dessus reproduit, la Cour de Dijon entend persister dans sa résistance à la jurisprudence de la Cour de cassation? Elle semble bien s'en défendre. Il s'agit, cette fois, non plus du compte des reprises et récompenses de la femme, mais du règlement des reprises et récompenses du mari. N'est-ce pas une situation différente, régie par des règles spéciales? C'est sur ce terrain que nous transportent les motifs de l'arrêt. Pour refuser d'ordonner que les reprises du mari soient déduites des récompenses par lui dues, il in

sur le mobilier, y compris la créance de la communauté contre le mari débiteur de récompenses, et que la femme ou ses héritiers ne peuvent faire décider qu'une compensation (ou balance de compte doit s'opérer d'abord entre les récompenses dues à la communauté par le mari el le montant de ses reprises (1) (C. civ., 1471).

voque la règle que les prélèvements de la femme doivent s'exercer avant ceux du mari (C. civ., 1471), d'où il conclut que le mari ne peut pas se payer par voie de compensation, avant que la femme ait été complétement désintéressée. L'arrêt ajoute que cette interprétation de l'art. 1471 est conforme à la jurisprudence de la Cour de cassation, telle qu'elle résulterait d'un arrêt de la chambre civile, en date du 16 avril 1862 (S. 1862.1.970. P. 1863.40). Or, une lecture attentive de cet arrêt permet de constater que, loin de déclarer que reprises et récompenses du mari doivent être liquidées et réglées séparément, il maintient, au contraire, la déduction ordonnée par l'arrét attaqué de la Cour d'Orléans, du 17 janv. 1861. Pourtant, le pourvoi reprochait nettement à l'arrêt attaqué d'avoir violé les art. 1468 et 1471, en ce que, " au lieu de déclarer que la somme dont le mari devait récompense à la communauté serait comptée dans la masse active, il a disposé que cette « somme se compenserait avec les prélèvements auxquels il avait droit. A ce moyen, la Cour de cassation répond :

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...Attendu qu'en ordonnant que, sur les reprises de S... (le mari), il serait fait déduction du montant des récompenses par lui dues à la communauté, l'arrêt n'a rien préjugé sur le droit des héritiers de la femme à exiger, s'il y a lieu, le rapport effectif des indemnités et des récompenses; d'où il suit qu'il n'a pas été porté atteinte au droit de préférence qui appartient à la femme, pour l'exercice de ses prélèvements ».

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Ainsi, la déduction, qui est plus qu'une simple compensation, car elle suppose l'unité de compte entre l'époux et la communauté, et elle se produit même en cas de faillite, la déduction incriminée par les auteurs du pourvoi est maintenue, telle qu'elle a été ordonnée par l'arrêt attaqué. La chambre civile parait donc, dès 1862, avoir admis, à l'égard du mari, le principe de l'unité et de l'indivisibilité du compte des reprises et récompenses, tel que, plus tard, en 1872 et en 1891, elle l'a consacré, quand il s'est agi des reprises et récompenses de la femme commune en biens. Elle n'a trouvé rien à reprendre dans cette formule de la Cour d'Orléans : que le compte des unes et des autres pourra seul faire connaître si le mari sera, en définitive, créancier ou débiteur de la communauté ». Evidemment, après avoir ainsi approuvé la déduction des récompenses faite sur les reprises (ou réciproquement), la Cour suprême n'entend point l'annihiler, quand elle ajoute que l'arrêt qui l'ordonne n'a rien préjugé sur le droit des héritiers à exiger, s'il y a lieu, le rapport effectif des indemnités... ». Qu'est-ce à dire, si ce n'est que, le rapport s'exerçant seulement sur le solde du compte, et à la condition que l'époux soit finalement reconnu débiteur de la communauté, la question reste intacte, même après la balance du compte, de savoir s'il y a lieu, pour la femme ou ses héritiers, à exiger le rapport effectif des récompenses dues par le mari?

D'ailleurs, la femme commune en biens a-t-elle vraiment intérêt à s'opposer à ce que la balance soit faite du compte des reprises et récompenses II PART. 15

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