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(Consorts Litaudon C. Jeannier). L'inventaire dressé au décès de Mme Jeannier, née Guillemin, mariée sous le régime de la communauté, a établi que la valeur du mobilier commun était de 11.218 fr. 30, somme qui s'élevait à 19.118 fr. 30, si on y ajoutait 7.900 fr. de récompenses dues par le mari. Mais, ce dernier ayant 6.450 fr. de reprises à exercer, si l'on faisait la balance de son compte envers la communauté, sa créance disparaissait, et il restait un excédent de 1.450 fr. de récompenses, dont il devait faire le rapport à la masse commune (C. civ., 1468). La succession de Mme Jeannier était, d'autre part, créancière de 14.700 fr. de reprises. Les héritiers de ladite dame ont prétendu que, les reprises de M. Jeannier devant être déduites des récompenses par lui dues, et celles-ci se trouvant réduites à 1.450 fr.. ils ne trouvaient plus à prélever dans la masse commune que 12.668 fr. 30 de valeurs mobilières; ils demandaient, en conséquence, à être admis à prélever 2.031 fr. 70 sur les immeubles conquéts. M. Jeannier a soutenu, au contraire, que sa dette de 7.900 fr. devait figurer tout entière à la masse commune, que les valeurs mobilières étaient, par suite, plus que suffisantes pour l'exercice des prélèvements de la femme (19.118 fr. 30 14.700 fr. 4.418 fr. 30), qu'il exercerait à son tour le prélèvement de ses reprises, d'abord, en faisant confusion sur lui-même du solde de sa dette envers la communauté (6.450 fr. 4.418 fr. 30 2.031 fr. 70), puis, en prélevant le solde (2.031 fr. 70) sur les immeubles conquêts. Le débat se réduisait donc à rechercher qui, du mari ou des héritiers de la femme, devait être admis à prélever 2.031 tr. 70 sur les immeubles de la communauté, en raison de l'insuffisance des valeurs mobilières pour le paiement intégral des reprises des deux époux. Par jugement, en date du 30 juill. 1909, le tribunal civil de Louhans a donné gain de cause à M. Jeannier. Appel de ce jugement a été interjeté par les consorts Litaudon, héritiers de Mine Jeannier.

LA COUR;

ARRÊT. Attendu que les appelants

du mari envers la communauté, et à exiger le rapport de l'intégralité des indemnités en argent dues à la communauté par son mari? Sans doute, elle ou es héritiers obtiendront ainsi une augmentation de l'actif mobilier, sur lequel s'exercent les prėlėvements de la femme. Mais n'oublions pas que, si l'actif commun est insuffisant pour assurer le paiement des reprises de la femme, celle-ci a son recours sur les biens personnels du mari. Or, peu lui importe qu'elle agisse contre son mari en qualité de créancière directe, ou comme substituée à la communauté, créancière de récompenses dont le mari serait débiteur. La balance du compte de reprises et indemnités du mari, tout en simplifiant son réglement avec la communauté, n'apporte done point d'entrave à l'exercice des reprises et prélèvements de la femine.

Aussi n'est-ce pas dans l'intérêt de la femme ou de ses héritiers, mais dans son propre intérêt, que, devant la Cour de Dijon, le mari prétendait que le droit reconnu à la femme d'exercer ses préleve

concluent à ce que la Cour décide que c'est à tort que les premiers juges ont donné mission aux experts par eux commis de prélever sur les immeubles dépendant de la communauté ayant existé entre le sieur Louis Jeannier, intimé, et son épouse décédée, la dame Jeanne-Marie Guillemin, une somme suffisante pour solder les reprises du mari, le chiffre des reprises de celui-ci étant inférieur de 1.450 fr. au montant des récompenses dues par lui;

Mais attendu qu'aux termes de l'art. 1471, C. civ., les prélèvements exercés au nom de la succession de la femme prédécédée doivent s'opérer dans l'ordre qu'il a établi, c'est-à-dire, d'abord sur l'argent comptant, ensuite sur les créances et les meubles dépendant de la communauté, et enfin sur les immeubles; Attendu qu'il résulte des mentions de l'inventaire dressé par Mes Guillemin et Petitjean, notaires à Louhans, les 24 septembre, 17 et 18 nov. 1908, que l'actif de la communauté JeannierGuillemin comprend : 1° meubles prisés, 535 fr. 90; 20 créances contre divers, 10.682 fr. 40; 3° sommes dues pour récompenses par le mari, 7.900 fr.; soit un total de 19.118 fr. 30, qui dépasse de 4.418 fr. le montant des reprises dues à la succession de la femme, s'élevant à 14.700 fr.; Attendu qu'on ne saurait opposer à ce mode de règlement le système par les consorts Litaudon, et décider qu'une compensation doit s'opérer entre le montant des récompenses dues par Jeannier (7.900 fr.) et le montant de ses reprises (6.450 fr.), de telle sorte que la succession de la dame Jeannier n'aurait à prélever, en outre de la valeur du mobilier et des créances sur les tiers, que l'excédent des récompenses sur les reprises, et devrait se payer du surplus de ses propres reprises sur les immeubles de la communauté; Attendu qu'en procédant de la sorte, on irait à l'encontre des dispo sitions de l'art. 1471, d'après lequel les prélèvements de la femme doivent s'exercer avant ceux du mari », ce qui implique que le mari ne peut pas se payer, fût-ce par la voie de la compensation, avant que la femme ait été complètement désintéressée; Attendu que cette interprétation du texte de l'art. 1471 est conforme à la

soutenu

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ments avant ceux du mari faisait obstacle à l'établissement d'un compte unique entre lui et la communauté, de telle façon qu'il ne serait débiteur envers elle que d'un solde de récompenses, déduction faite de ses reprises. Il entendait exagérer la faveur conférée à la femme par l'art. 1471, alin. 1o, C. civ., en vue de rétorquer contre elle ce droit de préférence, et d'en tirer lui-même un profit personnel plutôt médiocre, qui semble, en l'espèce, avoir consisté à être payé de ses reprises plutôt en immeubles qu'en valeurs mobilières. Est-ce pour de tels résultats qu'il y a lieu de faire échec à un principe aussi important que celui de l'unité et de l'indivisibilité du compte existant entre chaque époux et la communauté? Aussi, les auteurs, qui ont exposé le système de la balance des comptes entre chaque époux et la communauté, l'admettentils à l'égard des deux époux. V. Laurent, Princ. de dr. cie., t. 22, n. 488; Hue, Comment, du C. civ.. t. 9, n. 312; Guillouard, Tr. du contr. de mariage,

jurisprudence de la Cour de cassation (V. Cass. 16 avril 1862, S. 1862.1.970. P. 1863.40); Attendu que, les reprises

du sieur Jeannier s'élevant à 6.450 fr., il doit lui être attribué, sur les récompenses dues par lui, la différence entre le montant desdites récompenses (7.900 fr.) et la partie de cette somme formant le solde des reprises de la femme (3.481 fr. 70), soit 4.418 fr. 30, qu'il reste, par conséquent, créancier de 2.031 fr. 70; Attendu que c'est donc à bon droit que le jugement entrepris a ordonné que les experts prélèveraient sur les immeubles la somme nécessaire pour solder les reprises du mari; Par ces motifs: - Confirme, etc.

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ROUEN 9 mars 1910.

NOTAIRE, HONORAIRES, LIQUIDATION DE SUCCESSION, HÉRITIER DÉBITEUR, PROROGATION DE DÉLAI, TESTAMENT, FRAIS DE VOYAGES EN DEHORS DU RESSORT, CHAMBRE DU CONSEIL, INCOMPÉTENCE, INVENTAIRE, PAPIERS, DÉPOUILLEMENT, VACATIONS (Rép., v° Notaire, n. 895 et s., 995; Pand. Rép., eod. verb., n. 498 et 682).

Le notaire chargé de la liquidation d'une succession n'est pas fondé à réclamer un droit de prorogation de délai sur la somme due à la succession par l'un des héritiers, si le terme dont bénéficie le débiteur ne lui a été concédé par ses cohéritiers que par application de l'une des clauses du testament du de cujus, sur laquelle le notaire a déjà percu sa rémunération légale (1) (Décr., 25 août 1898, art. 18).

Un notaire ne peut demander par la voie de la taxe que les frais des voyages affe rents à son ministère, effectués dans le périmètre de sa circonscription territoriale (2).

Le recouvrement des frais des voyages qu'il a accomplis, dans l'intérêt de ses clients, en dehors de sa circonscription ter ritoriale, et en qualité de mandataire des parties, ne peut être poursuivi que dans les termes du droit commun (3).

Si, pour fixer les honoraires dus au no

t. 2, n. 977: Baudry-Lacantinerie. Le Courtois et Surville, Du contr. de mariage, 3 éd., t. 2, n. 1083 à 1086: L. et A. Mérignhac, Tr. du reg, de comm.. t. 2, n. 1963 et s.; et notre Rép. gén, du dr. fr., vo C'ommunauté conjugale, n. 1963 et 1964.

J. LE COURTOIS.

(1) C'est là une application du principe, consаcré expressément par plusieurs dispositions des décrets du 25 août 1898 (art. 6 et 18), d'après lequel les notaires ne peuvent percevoir deux fois des honoraires sur un même acte. V. Amiaud et Voland, Tr. des honoraires des not., 2o ¿d., n. 9 et 157. La prorogation de délai, dans l'espèce, était contenue dans un testament sur lequel des honoraires avaient été perçus; elle constituait l'une des dispositions intégrantes de ce testament; les héritiers n'avaient fait que confirmer cette prorogation.

(2-3) Cette solution ne soulève aucune critique.

taire qui a procédé à un inventaire, le juge doit rechercher quel est le nombre de vacations que la confection de cet acte a nécessitées, il y a lieu, pour parvenir à cette détermination, de tenir compte, non seulement du temps qui a été employé en présence des parties, mais aussi du travail préparatoire que le notaire a dû accomplir, pour analyser les titres et papiers de la succession, ou bien encore pour recueillir les renseignements indispensables à l'effet d'établir les forces héréditaires (1) (Décr., 25 août 1898, art. 20).

(Hérit. Bouchy C. Me X...).

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ARRÈT.

LA COUR; Attendu que X..., notaire à T..., est appelant devant la Cour du jugement, en date du 18 mai 1909, par lequel le tribunal civil des Andelys a rejeté son opposition à la taxe effectuée par le magistrat compétent, après avis conforme du président de la chambre de discipline, de quatre états de frais à lui dus par les héritiers de la veuve Bouchy; - Attendu que c'est par une saine appréciation des circonstances de la cause que les premiers juges ont décidé que le notaire X... ne pouvait percevoir le droit de prorogation de délai sur la somme due par Emile Bouchy, en se basant sur ce que la liquidation par lui dressée accordait à ce débiteur un délai de six années pour se libérer; que le terme dont bénéficie Emile Bouchy ne lui a pas été concédé par une convention indépendante du testament de sa mère, mais n'est que l'application de l'une des clauses de cet acte de dernière volonté, sur laquelle le notaire X... a déjà percu sa rémunération légale; Attendu, d'ailleurs, que l'art. 18 du tarif réglementant le ressort de Rouen ne permet aux notaires de recevoir qu'un seul honoraire, à l'occasion des valeurs qui figurent dans plusieurs opérations successives comprises dans un même acte de partage; que l'appelant, qui perçoit l'honoraire d'obligation sur les 61.735 fr. 56 dus par Emile Bouchy, est donc non recevable à réclamer sur la même somme, à raison du délai concédé au débiteur pour sa libération, un supplément d'honoraires, que prohibe expressément l'art. 18, susvisé;

-

Attendu que X... demande que la somme de 900 fr., pour voyages à Paris et à Courseulles, soit rétablie à son profit, mais qu'il ne suffirait pas que ces voyages, que l'appelant affirme avoir effectués, l'aient été, comme il le prétend, à l'occasion des actes soumis à la taxe, pour que le rétablissement puisse en être ordonné, et que le recouvrement puisse en être poursuivi,

Il est admis, en effet, que, pour que les frais de voyage soient taxables, il est nécessaire : 1° que le voyage ait été effectué dans la circonscription du notaire; 2° que les frais aient été exposés à l'occasion de la réception d'un acte du ministère du notaire. V. Trib. de Paimboeuf, 1er févr. 1907 (Rép. gen. prat. du not. et de l'enreg., art. 15228). V. encore, Amiaud et Voland, Tr. des honoraires des not., 2o éd., n. 194. Or, dans l'espèce. les deux conditions ci-dessus faisaient défaut, puisque, d'une part, le voyage, bien qu'accompli dans l'intérêt des clients, ne l'était pas à l'occasion de la récep

conformément à l'art. 22 du tarif; que, justement, les premiers juges ont décidé que l'appelant ne pouvait réclamer, en qualité de notaire et par la voie de la taxe, que les frais de voyages afférents à son ministère, exercés dans le périmètre de sa circons cription territoriale; que, par suite, s'il est exact que X... ait, dans l'intérêt de l'hérédité, accompli divers voyages à Paris et à Courseulles, c'est-à-dire hors du canton de sa résidence, l'appelant, n'ayant alors agi que comme mandataire des parties, ne peut, en cette qualité, demander le remboursement de ces frais qu'en introduisant une instance dans les termes du droit commun; - Attendu, en conséquence, que, sans préjuger quant au bien fondé de cette réclamation, la Cour doit maintenir la décision, qui, quant à présent, la rejette comme étant irrecevable en la forme;

Attendu, enfin, que, relativement au partage de la succession de la dame Bouchy, X... conclut à ce que la somme de 162 fr., pour honoraires de rédaction d'inventaire, qui lui a été retranchée par une taxe réduisant son salaire à 18 fr., soit rétablie à son profit; Attendu que les premiers juges, pour opérer ce retranchement, se sont exclusivement appuyés sur ce qu'il était constaté par l'inventaire même que, commencé à 8 heures du matin, il avait été terminé à 6 heures du soir, et que, dès lors, il était prouvé que le notaire n'avait pas employé plus de trois vacations pour le rédiger; Attendu, en principe, que, pour fixer les honoraires dus au notaire qui a procédé à un inventaire, le juge doit rechercher quel est le nombre de vacations que la confection de cet acte a nécessitées; que, pour parvenir à cette détermination, il y a lieu de tenir compte, non seulement du temps qui a été employé en présence des parties, mais aussi du travail préparatoire qu'arrière d'elles, le notaire a dù accomplir, pour analyser les titres et papiers de la succession ou bien encore pour recueillir les renseignements indispensables à l'effet d'établir les forces héréditaires; que décider qu'il ne peut entrer en taxe que les vacations auxquelles les parties ont personnellement assisté, aurait pour résultat d'astreindre les notaires, afin de ne pas être privés d'un émolument légitime, & imposer aux héritiers des déplacements répétés, ainsi que des droits d'enregistrement multiples et onéreux; que c'est en recourant à ces modes d'interprétation et d'application du tarif, conformes à l'intérêt sainement entendu des parties, que, d'une manière usuelle, les magistrats arbitrent, ainsi que cela leur

tion d'un acte du ministère du notaire, et que, d'autre part, ce voyage avait été effectué en dehors de la circonscription dans laquelle le notaire avait le droit d'instrumenter. Celui-ci avait agi, non comme officier public, mais comme mandataire des parties. Dès lors, le recouvrement de ses frais ne devait pas être poursuivi devant la chambre du conseil, et suivant la procédure instituée par la loi du 24 déc. 1897. La demande devait être introduite conformément aux règles du droit commun. V. Amiens, 12 juill. 1909 (S. et P. 1912. 2.36; Pand. pér., 1912.2.36), la note et les ren

paraît équitable, le salaire des notaires rédacteurs d'inventaires, lorsqu'il résulte d'un ajournement après l'ouverture, ou même d'une simple mention insérée dans l'acte, qu'une partie de l'opération s'est effectuée par les soins de l'officier public, hors la présence des intéressés; Attendu que si, en fait, le notaire X... n'a pas eu la prudence d'indiquer expressément, dans l'acte du 21 avril 1906, que les analyses et déclarations qu'il contient étaient le résultat de l'examen auquel il s'était antérieurement livré, la réalité de ce travail préparatoire est, toutefois, pleinement démontrée dans la cause; que, d'une part, en effet, il est énoncé, dans cet acte authentique, que l'inventaire est dressé en l'étude du notaire X..., où tous les titres et papiers à inventorier se trouvaient déposés, et que c'est évidemment pour permettre le travail préalable de leur analyse par le notaire instrumentaire que cette remise avait été précédemment consentie par les héritiers; qu'il suffit d'ailleurs de compulser l'acte, qui comporte 20 rôles de minute, et contient notamment l'analyse de la liquidation dressée, après le décès de Bouchy, des titres de propriété des immeubles, du compte de la succession dans la maison Picon, enfin, des valeurs successorales, pour acquérir la certitude qu'il y avait impossibilité matérielle à ce que cet inventaire, s'il n'avait été préalablement préparé, pût être dressé dans l'espace d'un seul jour; que X... doit donc être cru, lorsqu'il affirme que, le 21 avril 1906, il s'est borné à donner connaissance aux parties de l'inventaire déjà préparé par ses soins, et à recevoir, en outre, leurs déclarations complémentaires; que, la somme portée par X... dans son état de frais, pour vacations employées tant arrière des héritiers qu'en leur présence, étant en concordance avec le temps pendant lequel a duré la confection de l'inventaire, il convient d'accorder, de ce chef, à l'appelant l'intégralité de l'honoraire qu'il réclame; Par ces motifs, etc. Du 9 mars 1910. - C. Rouen.

PARIS 12 mars 1912. DIVORCE, FEMME, DOMICILE PROVISOIRE, ABANDON, JUSTES MOTIFS (ABSENCE DE), PROVISION « AD LITEM », MARI, REFUS (Rép., vo Divorce et séparation de corps, n. 1921 et s.; Pand. Rép., vo Divorce, n. 1639 et s.).

A défaut de justification par la femme, au cours de l'instance en divorce, de sa ré

vois. Adde, Amiaud et Voland, op. cit., n. 793

et s.

(1) La Cour de cassation a décidé cependant que, le classement des papiers étant une opération normale de l'inventaire, les vacations allouées à l'occasion de ce dernier acte comprenaient la rétribution du temps employé à ce classement, sans que le notaire puisse réclamer, de ce chef, des vacations supplémentaires. V. Cass. 15 févr. 1904 (S. et P. 1909.1.293; Pand. per., 1909.1.293), et la note. Adde, Amiaud et Voland, Tr. des honoraires des not., 2o éd., n. 127.

sidence au domicile qui lui a été assigné,

le mari peut refuser le paiement, non seulement de la provision alimentaire, mais aussi de la provision ad litem (1) (C. civ., 241).

S'il appartient au juge, au cas où la femme demanderesse en divorce ne justifie pas de sa résidence au lieu qui lui a été assigné, d'apprécier les motifs qui ont pu l'obliger à abandonner sa résidence, il y a lieu de faire droit à la demande du mari, tendant à faire ordonner la suppression de la provision ad litem, et à faire déclarer la femme non recevable à continuer ses poursuites à fin de divorce, lorsqu'elle n'établit pas qu'elle ait été dans la nécessité d'abandonner sa résidence (2) (Id.).

(Delfourd C. Delfourd). ARRÊT.

LA COUR; Considérant que la dame Delfourd, appelante d'un jugement rendu à la date du 26 mai 1911 par le tribunal de la Seine, qui a prononcé contre elle le divorce, à la requête et au profit de son mari, forme par incident, devant la Cour, une demande de provision ad litem de 1.500 fr.;

Considérant que Delfourd oppose à cette demande la déchéance de l'art. 241, C. civ., aux termes duquel le mari, à défaut de justification par la femme de sa résidence dans la maison assignée, peut lui refuser la provision alimentaire ou la faire déclarer non recevable à continuer ses poursuites; qu'elle répond à ce moyen: 1o que

(1-2) Aux termes de l'art. 241, C. civ. (ancien art. 269, repris par la loi du 18 avril 1886), « la femme est tenue de justifier de sa résidence dans la maison indiquée toutes les fois qu'elle en est requise; à défaut de cette justification, le mari peut refuser la pension alimentaire, et, si la femme est demanderesse en divorce, la faire déclarer non recevable à continuer ses poursuites ». Le mari puise dans ce texte le droit de refuser le paiement de la provision alimentaire à sa femme, lorsque celle-ci a abandonné sans motifs légitimes la résidence qui lui a été assignée. V. sur le pouvoir souverain des juges, à l'effet d'apprécier les motifs qui ont fait quitter à la femme le domicile à elle assigné, Cass. 25 juin 1889 (S. 1890.1.71. 1890.1.150; Pand. pér., 1889.1.555), et les renvois. Mais, l'art. 241 ne parlant que de la provision alimentaire, la question se pose de savoir si le mari peut également refuser à la femme le paiement de la provision qui lui a été allouée pour suivre l'instance.

P.

Une première opinion assimile, au point de vue de l'application de l'art. 241, C. civ., la provision ad litem à la provision alimentaire, et permet au mari de refuser l'une et l'autre, si la femme abandonne le domicile qui lui est assigné. V. en ce sens, Trib. de Marseille, 13 nov. 1886 (Rec. d'Aix, 1887. 2.179); Hue, Comment. du C. civ., t. 2, n. 348; Coulon, Le div. et la sép. de corps, t. 4, p. 311; Suppl. à notre C. civ. annoté, par Griffond, sur l'art. 241, n. 16. V. égal., par application de l'ancien art. 269, C. civ., Paris, 2 juill. 1885 (Rec. Gaz. Pal., 1885.2.566); et en Belgique, Pandectes belges, v° Divorce, n. 1124. On invoque, à l'appui de cette opinion, l'affinité qui existe entre la provision alimentaire et la provision ad litem, et on soutient que, en visant la provision alimentaire, l'art. 241, C. civ., a entendu comprendre, non seulement les sommes destinées à pourvoir à la subsistance de la femme, mais aussi celles qui lui sont allouées pour suivre l'instance en divorce

l'art. 241, susvisé, ne s'applique pas, en matière de provision ad litem; 2° que, s'y appliquât-il, le juge, dans son pouvoir discrétionnaire, peut toujours admettre l'équivalence du domicile nouveau, en appréciant les raisons qui ont pu obliger la femme à s'y transporter; Mais considérant, sur le premier point, que si, à la vérité, la provision ad litem n'est pas taxativement prévue, comme l'est la provision alimentaire, dans l'article en question, elle rentre, tout au moins, dans la disposition finale du texte de cet article, laquelle est aussi large que possible, et comprend tous les actes de poursuite, dont le premier est assurément la demande d'argent pour plaider; qu'aussi bien, l'interprétation contraire aboutirait à ce résultat contradictoire, auquel n'a pas pu s'arrêter la loi, de faire attribuer à la femme des subsides, en vue d'un procès dans lequel désormais elle peut être déclarée non recevable, au moins pour un temps;

Sur le second point:

Considérant que, s'il est également exact qu'il est loisible au juge d'apprécier les motifs qui ont pu obliger la femme à abandonner, pour en prendre un autre, le domicile indiqué, la dame Delfourd ne fait, en l'espèce, aucune preuve d'une semblable nécessité; que, dès lors, à aucun point de vue, sa demande de provision ad litem n'est recevable quant à présent; Par ces motifs; Dit la dame Delfourd non recevable, quant à présent,

On ne s'expliquerait pas, d'ailleurs, dit-on dans cette opinion, qu'il en fût autrement. L'art. 241 déclare la femme demanderesse en divorce non recevable à continuer ses poursuites, tant qu'elle demeure absente de la résidence qui lui a été assignée; elle ne peut, dans l'opinion générale (V. Cass. 25 juin 1889, précité, et les renvois. Adde, Paris, 24 déc. 1885, Gaz. Trib., 15 janv. 1886; Trib. de la Seine, 26 nov. 1897, Journ. Le Droit, 12 mai 1898; Paris, 25 févr. 1903, Gaz. Trib., 6 mai 1903; Huc, op. cit., t. 2, n. 348; Baudry-Lacantinerie et Chauveau, Des pers., 3° éd., t. 4, n. 208. V. égal., par application de l'ancien art. 269, C. civ., Cass. 16 janv. 1816, S. et P. chr.), reprendre l'exercice de son action que lorsqu'elle a réintégré la résidence provisoire dont elle s'était éloignée, ou lorsqu'elle a présenté aux juges, pour expliquer son absence, des motifs qui ont été reconnus suffisants. Il serait contraire à la logique qu'elle pût continuer à recevoir une provision, qui n'a d'autre objet que de faire face aux frais d'une instance qui est momentanément interrompuc.

Une seconde opinion enseigne, au contraire, que l'art. 241, C. civ., doit être interprété restrictivement. V. Baudry-Lacantinerie et Chauveau, op. cit., t. 4, n. 209; Carpentier, Divorce et sépar. de corps, t. 1o, n. 1964. V. égal. dans le même sens, en Belgique, Trib. de Bruxelles, 16 juill. 1887, cité par les Paudectes belges, ubi supra. Cette opinion se fonde sur le silence de l'art. 241, en ce qui concerne la provision ad litem; ce texte édicte, dit-on, une déchéance qui ne saurait être étendue. On ajoute qu'il n'est rien moins que sûr que les expressions « provision alimentaire » comprennent, comme on le prétend, la provision ad litem; tout au contraire, ces deux provisions sont complètement distinctes l'une de l'autre, puisqu'elles correspondent l'une et l'autre à un but différent, et elles ont si peu d'affinité entre elles que la jurisprudence n'hésite pas à leur appliquer des règles différentes,

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AMIENS 5 décembre 1912. CHASSE, ANIMAUX MALFAISANTS OU NUISIBLES, DESTRUCTION, FERMIER, DÉLÉGATION, ARRÊTÉ PRÉFECTOral, Visa du mAIRE, AGRÉMENT DU PRÉFET (Rép., vo Destruction des animaux malfaisants ou nuisibles, n. 58 et s.; Pand. Rép., v° Chasse, n. 394 et s.).

Les propriétaires, possesseurs ou fermiers peuvent déléguer à un tiers le droit de détruire, en tout temps, sur leurs terres, les animaux malfaisants ou nuisibles (3) (L. 3 mai 1844, art. 9, 3o). Rés. par le

Trib.

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Mais le préfet, que la loi du 3 mai 1844 autorise, dans son art. 9, 3o, à réglementer la destruction des animaux malfaisants ou nuisibles, peut, par un arrêté, subordonner la validité de la délégation à la condition que les tiers, choisis par les propriétaires, possesseurs ou fermiers, pour coopérer à la destruction des animaux malfaisants ou nuisibles, seront munis d'un pouvoir écrit, visé par le maire, et devront être agréés par le préfet ou le sous-préfet (4) (L. 3 mai 1844, art. 9, 30).

En conséquence, contrevient aux pres

en décidant, notamment, que le jugement qui accorde une provision alimentaire est susceptible d'exécution provisoire (V. Nimes, 2 juin 1909, S. et P. 1909.2.278; Pand. pér., 1909.2.278, la note et les renvois), à la différence de celui qui accorde une provision ad litem. V. Rennes, 30 juill. 1894 (S. et P. 1897.2.145), et les renvois.

(3-4) Il est certain que le propriétaire, possesseur ou fermier peut déléguer à un tiers le droit, qui lui est reconnu par l'art. 9-3° de la loi du 3 mai 1844, de détruire, sur ses terres, les animaux malfaisants ou nuisibles. V. Poitiers, 14 mai 1897 (S. et P. 1898.2.69), et les renvois de la note. Adde. la note et les renvois sous Lyon, 19 mai 1905 (S. et P. 1906.2.213); et Carême, Rép. des dr. et oblig. des chasseurs, v° Animaux malfaisants ou nuisibles. n. 156; M. Baudouin, Jaffeux et Radot, Diet. de la jurispr. en mat. de chasse, vo Délégation, n. 1 et s., 12 et s. On admet, en général, qu'il n'est pas nécessaire que cette délégation soit constatée par écrit, et qu'elle peut être faite verbalement. V. Trib. corr. de Pau, 21 mars 1900 (Pand. pér., 1900.2.287: Journ. La Loi, 27 avril 1900); Larcher, Rép. du dr. de chasse, v° Animaux malfaisants ou nuisibles, n. 78; et notre Rep. gén. du dr. fr., vo Destruction des animaux malfaisants ou nuisibles, n. 58 et s.; Pand. Rep., y Chasse, n. 394 et s. V. cep., Leclerc, Quest. de chasse, p. 71. On admet même qu'elle peut être tacite. V. Trib. corr. de Coulommiers, 22 avril 1884, cité par M. Baudouin, Jaffeux et Radot, op. et verb. cit., n. 7; Larcher, op. et verb. cit., n. 79; Carême, op. et rerb. cit., n. 159.

Mais le préfet, auquel la loi du 3 mai 1844 (art. 9-3°) confère le droit de réglementer les conditions d'exercice du droit de destruction des animaux malfaisants ou nuisibles, peut-il subordonner la délégation à des conditions destinées, comme dans l'espèce ci-dessus, à en assurer la sincérité. comme aussi à garantir qu'il n'en sera pas fait abus? Peut-il notamment, comme l'avait fait l'ar

criptions de l'arrêté préfectoral l'individu qui, surpris alors qu'il chassait le lapin en temps prohibe, a excipe de la délégation à lui donnée, pour la destruction des animaux nuisibles, par le fermier des terres où il chassait, si l'autorisation par écrit qu'il produit n'est pas visée par le maire, et s'il ne justifie pas de l'agrément du préfet ou sous-préfet (1) Id.).

(Roze C. Fouconnier).

16 oct. 1912, jugement du tribunal civil de Vervins, ainsi conçu - - Le Tribunal; - Attendu qu'il est constant et reconnu par Roze que celui-ci a tué un lapin, dans une pâture occupée par le sieur Maréchal, à titre de fermier, et où le droit de chasse appartient au sieur Fouconnier, partie civile; - Mais attendu qu'il appert, tant de la déposition du sieur Maréchal que d'un écrit signé de lui, et daté du 15 juin 1912, que ce fermier, à qui l'art. 9, 3o, de la loi du 3 mai 1844 donne le droit de détruire en tout temps, sur ses terres, les animaux malfaisants ou nuisibles, et notamment les lapins, désignés comme tels par l'arrêté préfectoral du 3 janv. 1912, avait préalablement autorisé Roze à procéder, en son lieu et place, à cette destruction, et lui avait, par conséquent, délégué son droit; Attendu qu'une telle délégation, qui est toute naturelle et pour ainsi dire de droit commun, n'est défendue par aucun texte, et que la possibilité en a, au contraire, été reconnue au cours des travaux préparatoires de la loi, par le rap

rêté dont l'application était en cause dans l'espèce, prescrire que la délégation devra être donnée par écrit, et soumise au visa du maire, et que les personnes auxquelles la délégation est donnée devront être agréées par l'autorité préfectorale? La question est délicate, et elle a donné lieu, dans la présente affaire, à des décisions opposées du tribunal et de la Cour,

Pour décider, avec la Cour d'Amiens, que le préfet n'excède pas ses pouvoirs, en réglementant, comme il l'avait fait dans l'espèce, l'exercice du droit de délégation, on peut faire valoir que, si le droit de réglementation, conféré au préfet en ce qui concerne la destruction des animaux nuisibles ou malfaisants, comporte le droit de déterminer les différents animaux qui rentrent dans cette catégorie, et le droit de limiter les modes de destruction, en subordonnant, par exemple, l'emploi de certains d'entre eux à une autorisation spéciale (V. Rouen, 18 févr. 1864, motifs, S. 1864.2.62. P. 1864.367; Paris, 17 févr. 1899, sol. implic., S. et P. 1899.2.109; Lyon, 19 mai 1905, précité, et les renvois), ce pouvoir de réglementation doit aussi comporter la faculté, pour le préfet, de prendre toutes les mesures de nature à empêcher que le droit accordé aux propriétaires, fermiers ou possesseurs de détruire sur leurs terres les animaux malfaisants ou nuisibles ne puisse engendrer des abus. Or, il n'est pas contestable que le droit de délégation peut amener de sérieux abus, s'il suffit, pour échapper à toute poursuite, de justifier de l'autorisation, même verbale, même tacite, du propriétaire, possesseur ou fermier du terrain où l'on chasse; des collusions, des fraudes sont à redouter, qui couvriront de l'apparence d'une délégation des actes de chasse délictueux. Sans doute, pour qu'elle soit valable, il faut que la délégation ait été donnée antérieurement

porteur à la Chambre des pairs; que, d'ailleurs, sans ce moyen, les personnes, incapables de procéder par elles-mêmes à la destruction des animaux malfaisants ou nuisibles, se trouveraient dans l'impossibilité d'user du droit dont il s'agit, et de protéger leurs récoltes et leurs terres, ce qui serait manifestement contraire au but et à l'esprit de la loi; - Attendu, il est vrai, que l'arrêté préfectoral susvisé, en son art. II, subordonne cette délégation à des conditions qui n'ont pas été remplies en l'espèce, à savoir que les tiers choisis par le propriétaire, possesseur ou fermier pour coopérer à la destruction des animaux malfaisants ou nuisibles, devront être munis d'un pouvoir écrit visé par le maire et agréé par le préfet, pour l'arrondissement de Laon, ou par le souspréfet pour les autres arrondissements;

Mais attendu qu'en admettant que le pouvoir de déterminer les conditions d'exercice du droit de destruction des animaux malfaisants ou nuisibles, conféré aux préfets par l'art. 9 de la loi du 3 mai 1844, implique celui de réglementer dans une certaine mesure la délégation de ce droit, les préfets ne sauraient néanmoins soumettre cette délégation à des conditions portant atteinte au droit de déléguer, et, notamment, à des conditions qui permettraient à l'autorité administrative d'empêcher ou d'entraver arbitrairement l'exercice de ce droit; que tel est évidemment le cas de la disposition précitée, qui exige, outre un pouvoir écrit, visé par le maire, l'agrément

à l'époque où l'acte de destruction doit s'accomplir (V. Poitiers, 19 janv. 1883, S. 1883.2.85. P. 1883.1.464; M. Baudouin, Jaffeux et Radot, op. et verb. cit., n. 6; Carême, op. et verb. cit., n. 159; et notre Rép. gen. du dr. fr., verb. cit., n. 58; Pand. Rép., verb. cit., n. 394); mais, en fait, il sera bien difficile, si l'autorisation est simplement verbale, de véri fier si elle a été donnée antérieurement à l'acte de destruction. Le danger est si évident que des auteurs conseillent au délégataire, pour éviter à cet égard toute difficulté, de faire une déclaration à la mairie, et d'obtenir une délégation par écrit. V. Carême, op. et verb. cit., n. 160. Le préfet peut donc, dit-on, pour garantir la nécessité de la délégation, et prévenir les abus, exiger que la délégation soit donnée par écrit, et qu'elle soit visée par le maire. Il ne fait ainsi qu'assurer l'exercice régulier et normal du droit de délégation, et les mcsures par lui prises échappent à la critique. D'autre part, en subordonnant à son agrément l'exercice du droit de délégation, il poursuit le même but, qui est de prévenir les fraudes, puisqu'il pourra ainsi écarter les personnes qui ne présenteraient pas de garanties suffisantes

Le système contraire, qui avait été admis par le tribunal, dans l'espèce ci-dessus, peut également se défendre par des considérations très sérieuses. On peut observer d'abord que la loi du 3 mai 1844, en donnant aux préfets le droit de prendre des arrêtés... " pour déterminer les espèces d'animaux malfaisants ou nuisibles que le propriétaire, possesseur ou fermier pourra, en tout temps, détruire sur ses terres, et les conditions de l'exercice de ce droit », n'a pu avoir en vue de donner au préfet le droit de réglementer la délégation, que la loi n'a nulle part prévue, et surtout d'en restreindre l'exercice de la part du propriétaire, possesseur ou fermier. Et l'on

du délégué par le préfet ou par le souspréfet; qu'en effet, ceux-ci pouvant arbitrairement accorder ou refuser l'agrément sollicité, l'exercice du droit de délégation se trouve ainsi subordonné à leur bon plaisir, et il leur est même loisible d'en priver complètement un propriétaire, possesseur ou fermier, en refusant systématiquement d'agréer tous les tiers qu'il présenterait à cet effet; Attendu, en conséquence, que l'art. 11, $ 3, de l'arrêté préfectoral du 3 janv. 1912, invoqué en la cause par le ministère public et la partie civile, est manifestement illégal; - D'où il suit que le prévenu n'a encouru aucune peine en ne s'y conformant pas; Par ces motifs; - Relaxe purement et simplement Roze, etc. ». Appel par le ministère public.

'ARRÊT.

LA COUR; Considérant que, pour échapper aux poursuites dirigées contre lui, le prévenu a produit une autorisation écrite, en date du 15 juin 1912, par laquelle Maréchal lui donnait le droit de détruire les lapins sur la pâture où il a été surpris ;

Considérant qu'aux termes de l'art. 9 de la loi du 3 mai 1844, les préfets ont un pouvoir réglementaire pour déterminer les animaux malfaisants et nuisibles que les propriétaires, possesseurs ou fermiers peuvent détruire sur leurs terres, ainsi que les conditions d'exercice de ce droit; qu'en conséquence, le préfet de l'Aisne a pris, le 3 janv. 1912, un arrêté, aux termes duquel les tiers choisis par les proprié

peut dire que le préfet restreint arbitrairement le droit de délégation, lorsqu'il impose une autorisation écrite au propriétaire, possesseur ou fermier, alors que la loi n'a pas limité les conditions dans lesquelles pourrait se faire la délégation, et qu'elle a, par là même, permis la délégation verbale aussi bien que la délégation écrite. L'objection prend plus de force encore, lorsqu'il s'agit de l'opposer à une prescription d'un arrêté préfectoral exigeant l'agrément du préfet ou du sous-préfet pour l'exercice du droit de délégation, car cette exigence ne tend à rien moins qu'à entraver le droit de destruction des animaux malfaisants ou nuisibles, et même à en priver indirectement le propriétaire, possesseur ou fermier, si la personne à laquelle le préfet a refusé l'agrément est la seule que le propriétaire, possesseur ou fermier soit en mesure de se substituer. Or, si, comme il a été jugé, le préfet ne peut porter atteinte directement au pouvoir qu'a le propriétaire, possesseur ou fermier de déléguer son droit de détruire les animaux malfaisants ou nuisibles (V. en ce sens, Angers, 19 mars 1859, S. 1859.2.667. P. 1860.1010; M. Baudouin, Jaffeux et Radot, op. cit., vo Destruction, n. 2; Carême, op. et verb. cit., n. 157), il ne doit pas davantage pouvoir y porter atteinte d'une manière indirecte, en se réservant la faculté de refuser son agrément au délégué de l'ayant droit.

(1) On s'accorde à reconnaître que l'infraction à un arrêté préfectoral, pris dans les formes prévues par l'art. 9 de la loi du 3 mai 1844, constitue un délit de chasse. V. Paris, 8 mai 1899 (2° arrêt) (S. et P. 1900.2.13), et la note. V. spécialement, pour l'infraction à un arrêté préfectoral pris pour réglementer la destruction des animaux nuisibles ou malfaisants, Lyon, 19 mai 1905 (S. et P. 1906.2.213), la note et les renvois.

taires, possesseurs ou fermiers, pour coopérer à la destruction des animaux malfaisants ou nuisibles, doivent être munis d'un pouvoir écrit, visé par le préfet pour le chef-lieu, et les sous-préfets, pour les autres arrondissements; Considérant que cet arrêté du préfet de l'Aisne, régulièrement pris, l'a été dans la plénitude de ses attributions réglementaires de l'exercice du droit de destruction des animaux malfaisants ou nuisibles; qu'on ne saurait nier que, notamment, l'obligation de l'agrément administratif, auquel sont soumis les pouvoirs donnés par les déléguants à des tiers, ne résulte pas de l'autorité que le préfet tient de la foi; que cette obligation poursuit un double but: celui de s'assurer, à la fois, de l'identité des délégataires, et de donner date certaine aux pouvoirs, en contrôlant le visa délivré par le maire: qu'il importe, en effet, au préfet ou aux sous préfets, ses subordonnés, de savoir le degré de confiance devant être accordé à des tiers, à une époque où la chasse est fermée, et où, sous prétexte de destruction d'animaux malfaisants, il serait trop facile, pour des individus sans scrupules, de commettre des abus qu'on se trouverait dans l'impossibilité presque absolue de réprimer, surtout si ces abus étaient couverts par des autorisations tardives et de complaisance, qui ne manqueraient pas d'être fournies, à défaut des précautions prises par l'arrêté; qu'en admettant même, comme l'a fait le tribunal, que le préfet ait, ce qui n'est pas, dépassé ses attributions, en exigeant son agrément, il n'en reste pas moins certain que le prévenu n'a pas, tout au moins, obtenu le visa du maire, formalité dont personne ne songe à contester la légalité: qu'il résulte, par suite, de tout ce qui précède que Roze, en présentant une autorisation non revêtue des formalités prescrites, n'a pas satisfait aux obligations qui lui incombaient; Par ces motifs; -Infirme le jugement dont est appel; Dit que Roze, en ne possédant pas un pouvoir régulièrement visé par le maire d'Englancourt, et agréé par le souspréfet de Vervins, a, non chassé en temps prohibé, mais contrevenu à l'arrêté du préfet de l'Aisne, en date du 3 janv. 1912, etc.

(1-2) L'art. 674, C. civ., impose à celui qui veut creuser un puits ou une fosse d'aisances à proximité d'un mur, mitoyen ou non, y construire une cheminée, un âtre, un fourneau ou une forge, y adosser une étable, ou établir contre ce mur un dépôt de sel ou autres matières corrosives, l'obligation de laisser la distance prescrite par les règlements et usages sur la matière, ou, du moins, de faire les ouvrages prescrits par les mêmes règlements et usages pour éviter de nuire au voisin.

En prescrivant l'observation de distances entre les travaux et constructions qu'il énumère et le mur qui sépare la propriété où sont entrepris les travaux de la propriété voisine, ou, à défaut, l'exécution des ouvrages jugés nécessaires, l'art. 674. C. civ., n'a pas eu seulement en vue la protection de la propriété, il a eu pour but également d'assurer la sécurité et la salubrité publique. Il faut distinguer, parmi les travaux et constructions qu'il énumère, ceux qui peuvent seulement préjudicier au voisin,

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LYON 25 octobre 1910. SERVITUDES, MUR, Distance, Four de bouLANGER, USAGE LOCAL, CONVENTION, PRESCRIPTION (Rép., vo Four-Fourneau, n. 16 et s.; Pand. Rép., vo Servitudes, n. 717 et s.). Si l'on peut acquérir par titre, par destination du père de famille, ou par prescription, le droit de maintenir des travaux établis sans l'observation de celles des prescriptions de l'art. 674, C. civ., qui sont imposées dans l'intérêt privé des propriétaires voisins, on ne peut, en aucun cas, s'affranchir des prescriptions que le même article édicte dans un intérêt public de sûreté (1) (C. civ., 674).

Specialement, un propriétaire, qui a construit un four près d'un mur mitoyen, ne peut s'affranchir, ni par convention, ni par prescription, de l'obligation de laisser, entre le mur mitoyen et le four, la distance prescrite par l'usage local (2) (Id.).

(Pinsard C. Malon).

ARRÊT.

LA COUR; Attendu, en ce qui concerne le four, que, des documents versés aux débats, et notamment des recherches et constatations consignées par l'expert dans son rapport, il résulte que le four de boulanger, qui se trouve dans la maison du sieur Malon, à St-Etienne, n'est séparé du mur mitoyen, existant entre cette maison et celle du sieur Pinsard, lequel mur a une épaisseur ordinaire de 50 centimètres, que par un vide variant de 6 à 10 centimètres; Attendu qu'aux termes des prescriptions formelles de l'art. 674, C. civ., le sieur Malon est obligé de laisser, entre ce mur et son four, la distance prescrite par les règlements et usages; que, suivant les usages locaux de St-Etienne, cette distance est de 16 centimètres; que le sieur Pinsard est, dès lors, bien fondé à demander que le sieur Malon soit tenu de mettre son four à distance légale, et que le jugement entrepris doit être réformé de ce chef; Attendu qu'il

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et ceux qui, s'ils ne sont pas exécutés dans les conditions qu'il indique, peuvent menacer la sécurité et la santé publiques, ce qui est le cas notamment pour la construction des cheminées, âtres, forges, fours et fourneaux, et l'établissement des fosses d'aisance. V. Aubry et Rau, 5o éd., t. 2, p. 334, § 198; Demolombe, Des servit., t. 1er, n. 515; Baudry-Lacantinerie et Chauveau, Des biens, 3° éd., n. 1022. Et l'on décide, en général, que, s'il est possible d'acquérir par titre, par destination du père de famille, ou par prescription, le droit de maintenir des travaux ou constructions qui auraient été établis à une distance moindre que celle prescrite par les règlements ou usages particuliers auxquels renvoie l'art. 674, ou sans l'exécution des mesures commandées par ces mêmes règlements ou usages, lorsque, seul, l'intérêt du voisin est en jeu, on ne peut, ni par convention ni par prescription, s'affranchir de l'obligation d'observer les mesures imposées dans un intérêt public. V. Aubry et Ran, 5o éd.,

importerait peu que ce four existât dans ces conditions prohibées par la loi depuis une époque antérieure à la date à laquelle le sieur Pinsard est devenu propriétaire de la maison contiguë à celle du sieur Malon; que, parmi les mesures préventives imposées par ledit art. 674 et les règlements et usages auxquels il renvoie, les unes sont prescrites dans le seul intérêt privé des voisins, et les autres le sont dans un intérêt public de sûreté, telles que celles concernant les fours de boulanger; que, si le droit de maintenir des travaux établis sans l'observation des précautions prescrites seulement dans l'intérêt privé des voisins peut être acquis par titre, par destination du père de famille et par prescription, il ne saurait en être de même des autres; qu'il n'est permis de s'affran chir par aucune convention, ni par aucun laps de temps, de l'obligation d'observer les mesures imposées dans un intérêt public;

Par ces motifs; - Réforme le jugement entrepris; Condamne Malon à mettre son four à la distance légale, conformément aux règles de l'art et aux usages, etc. Du 25 oct. 1910. C. Lyon, 3 ch. MM. de Coston, prés.; Grellet-Dumazeau, av. gén.; Soulenc, Laforge et Harent, av.

BOURGES 27 février 1912. DISTRIBUTION PAR CONTRIBUTION, CRÉANCIER NON OPPOSANT, DÉLAI POUR PRODUIRE, FORCLUSION (Rép., v° Distribution par contribution, n. 290 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 322 et s.).

Encore bien que l'art. 660, C. proc., qui impartit aux créanciers opposants un délai d'un mois pour produire à une distribution par contribution, n'ait pas visé les creanciers non opposants, la forclusion qu'il édicte doit, par analogie, être étendue à ces créanciers (3) (C. proc., 660).

En conséquence, le créancier non opposant, qui n'a pas produit avant l'expiration du délai d'un mois, prévu à l'art. 660, est définitivement forclos, encore bien qu'au jour de sa production, le règlement provi soire ne soit pas intervenu (4) (Id.)

t. 2, p. 335, § 198; Demolombe, op. et loc. cit.; Baudry-Lacantinerie et Chauveau, op. et loc. cit.; et notre C. civ. annoté, par Fuzier-Herman et Darras, sur l'art. 674, n. 14. La Cour de Bordeaux a jugé, en ce sens, que celui qui a acquis par prescription le droit d'avoir des fosses d'aisances adossées aux fondations du mur du voisin ne cesse pas pour cela d'être tenu d'exécuter les travaux qui pourraient être jugés nécessaires dans un intérêt de police. V. Bordeaux, 18 mai 1858 (S. 1859.2.177. - P. 1859.710).

(3-4) La question de savoir jusqu'à quel moment les créanciers non opposants et non sommés de produire conservent le droit de produire à la distribution par contribution a soulevé de vives controverses. V. la note, § 2, de M. Hugueney, sous Cass., 28 avril 1911 (Supra, 1 part., p. 97). La Cour de cassation, à diverses reprises, avait décidé que les créanciers non opposants et non sommés doivent produire, à peine de forclusion, dans le mois

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