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DIJON 23 novembre 1911.

COMMUNAUTÉ CONJUGALE, PASSIF, FRAIS DU DIVORCE, MARI, CONDAMNATION, RÉCOMPENSE (Rép., vo Communauté conjugale, n. 906 et s.; Pand. Rép., v Mariage, n. 4802 et s., 4924 et s. 5254 et s.).

(1-2-3) Le mari, contre lequel vient d'être prononcé le divorce ou la séparation de corps, avec condamnation aux dépens de l'instance, est-il fondé à laisser cette dette à la charge de la communauté dissoute? L'affirmative, qui est consacrée par l'arrêt ci-dessus de la Cour de Dijon, n'est-elle pas logiquement imposée par les termes de l'art. 1409-2o, C. civ. ? N'est-ce pas là une dette contractée durant la communauté »? Quelques auteurs l'ont pensé. V. Rodière et Pont, Tr. du contr. de mariage, t. 2, n. 814; Guillouard, Tr. du contr. de mariage, t. 2, n. 840; et notre Rép. gén. du dr. fr., vo Communauté conjugale, n. 1066; Pand. Rép., vo Mariage, n. 5254. Cette solution n'en rencontre pas moins, en pratique, de vives résistances. Elles s'expliquent par le contraste qui s'établit ainsi, en jurisprudence, entre les conséquences de la condamnation aux dépens de l'instance en séparation de corps ou en divorce, suivant qu'elle est prononcée contre le mari ou.contre la femme. A l'égard de la femme, les textes et les principes sont d'accord avec l'équité pour consacrer cette règle que les frais de l'instance doivent rester à sa charge, si elle a été condamnée à les supporter. V. Cass. 9 juin 1898 (S. et P. 1899.1.23; Pand. pér., 1899.1.173), et les renvois. Adde, Baudry-Lacantinerie, Le Courtois et Surville, Du contr. de mar., 3o éd., t. 1o, n. 629. Elle n'a pu plaider contre son mari qu'avec l'autorisation de justice (C. civ., 238, et C. proc., 878). Or, c'est seulement lorsqu'elle est autorisée de son mari qu'elle oblige la communauté (C. civ., 1409-2o et 1419). V. Aubry et Rau, 4° éd., t. 5, p. 339. § 501; Laurent, Princ. de dr. civ., t. 22, n. 80; Baudry-Lacantinerie, Le Courtois et Surville, op. et loc. cit.; Rodière et Pont, op. cit., t. 2, n. 786; Guillouard, op. cit., t. 2, n. 850. Vainement a-t-on tenté d'ouvrir, tout au moins à l'avoué qui a occupé pour la femme coupable, une action contre la communauté pour le paiement de ses frais, à défaut d'une provision suffisante. Ce recours lui a été refusé. V. Cass. 30 avril 1862 (S. 1862.1.449. P. 1862. 695; Pand. chr.); 5 juill. 1865 (motifs) (S. 1865. 1.340 P. 1865.870; Pand. chr.), et les renvois. Adde la note, n. II, de M. Naquet sous Aix, 26 mai 1886 (S. 1887.2.97. P. 1887.1.562). V. cep. en sens contraire cet arrêt. D'autre part, les provisions ne sont que des avances, des prêts, dont la femme sera comptable lors de la liquidation de ses reprises ou de la communauté. V. Amiens, 24 déc. 1896, sous Cass. 9 juin 1898 (motifs), précité, et les renvois.

Au contraire, quand la condamnation aux dépens de l'instance en divorce est prononcée contre le mari, ne se heurte-t-on pas à la règle que « toute dette du mari est une dette de la communauté durant laquelle elle est née? Il n'est pas inutile de remarquer que, sous tout autre ré(a) D... C. D...). ARRÊT.

LA COUR; Sur le deuxième chef: Attendu que, par jugement du 22 mai 1901, le divorce a été prononcé au profit de la dame D.... contre son mari, qui a été condamné en tous les dépens de l'instance; Attendu qu'aux termes de l'art. 252, C. civ., le jugement de divorce dûment transcrit remonte, quant à ses effets entre époux, au jour de la demande: que, par suite de cette disposition, les frais de l'instance en divorce, mis à la charge exclusive du mari, lui sont restés personnels et ne sont ANNÉE 1913. 10° cah.

Les dettes contractées par le mari chef de la communauté ne se distinguent pas des dettes communes, sauf l'exception prévue par l'art. 1425, C. civ. (1) (C. civ., 1409, 1425).

Ne doit donc pas être considérée comme une dette incombant personnellement au

gime, l'équité reçoit satisfaction: la dette du mari lui demeure personnelle. Même sous le régime de la communauté, si le passif égale l'actif, la femme laissera pour compte au mari les dépens au paiement desquels il a été condamné, pour peu qu'elle renonce à la communauté, ou qu'elle ait fait inventaire (art. 1483). Mais, si la communauté est prospère, comment éviter à la femme l'application de l'art. 1482, qui veut qu'elle supporte pour moitié toutes les dettes de la communauté? Par quel procédé rejeter sur le mari la totalité de la dette des frais de l'instance dans laquelle il a succombé?

Un premier expédient a été proposé sans succès par MM. Massé et Vergé, sur Zachariæ (t. 4, p. 98, § 642, note 35). Il consisterait à prendre à la lettre le jugement qui a condamné le mari personnellement aux dépens. La femme n'a-t-elle pas été

exonérée de toute participation aux frais de l'instance par le jugement qui accueille sa demande? On a répondu, avec raison, que la condamnation personnelle du mari fait que cette dette doit être traitée comme une dette « contractée par le mari ». C'est précisément parce qu'elle est une dette du mari qu'elle fait partie du passif commun (C. civ., 1409-2°). Cela est conforme aux principes, qui ont toujours fait supporter par la communauté les dettes ayant leur origine dans les fautes, dans les actes de dissipation du mari.

D'autre part, c'est en vain que le tribunal déclarerait mettre les dépens à la charge personnelle du mari, à titre de dommages et intérêts. Outre qu'une telle condamnation ne pourrait être prononcée qu'à titre exceptionnel, et devrait être fondée sur des motifs spéciaux (V. sur le principe, Cass. 3 juin 1890, S. et P. 1893.1.459, et les renvois. V. égal., Cass. 25 mai 1897, S. et P. 1901.1.508, et le renvoi), il n'en résulterait nullement que cette dette serait soustraite à la règle générale qui fait tomber à la charge de la communauté toutes les dettes du mari. Il n'en résulterait pas davantage que le mari en devrait récompense à la communauté. Nous devons déduire, en effet, de l'art. 1424, C. civ. (le seul texte qui, depuis l'abolition de la mort civile, rendant l'art. 1425 inutile, régisse, à notre point de vue, les condamnations pécuniaires prononcées contre le mari pour infractions à la loi pénale), les deux règles suivantes :-- -1° Il faut entendre par dettes contractées par le mari même les dettes dérivant de quasi-contrats, de délits ou de quasi-délits; de quelque source qu'elles découlent, toutes font partie du passif de la communauté. V. Aubry et Rau, 4 éd., t. 5, p. 331, § 509, texte et note 21; Guillouard, op. cit., t. 2, n. 746 et 747; Baudry-Lacantinerie, Le Courtois et Surville, op. cit., t. 1er, n. 567; et notre C. civ. anpas tombés dans la communauté antérieurement dissoute; qu'à tort, par conséquent, les premiers juges ont considéré que ces frais devaient être supportés par demi par chacun des ex-conjoints...; Par ces motifs, etc. Du 30 juill. 1903. C. Douai, 20 ch. MM. Mau. flastre, prés.; Bossu, av. gén.; Boutet et Plouvier, av. (b) (Lagarde C. Lagarde).

JUGEMENT.

LE TRIBUNAL: -... Prononce la séparation de corps entre les époux Lagarde...; Et, attendu que la séparation de corps entraîne la séparation de biens...; En ce

mari le montant des frais de l'instance en divorce, auxquels il a été condamné par le jugement qui a prononcé le divorce à ses torts exclusifs (2) (C. civ., 1409, 2o).

La communauté, responsable des fautes du mari, doit supporter cette dette définiti vement et sans récompense (3) (Id.).

noté, par Fuzier-Herman et Darras, sur l'art. 1124, n. 7.-2o Le mari ne doit récompense que pour les amendes, peines pécuniaires, mais nullement pour le paiement par la communauté des autres condamnations pécuniaires, telles que dommagesintérêts ou frais de justice. V. Cass. 9 déc. 1874 (S. 1875.1.113. P. 1875.267; Pand. chr.); Pau, 23 mai 1877 (sol. implic.) (S. 1877.2.333. P. 1877.1301); Paris, 26 mars 1885 (motifs) (S. 1886.2.53. P. 1886.1.326), et les renvois. Adde, Aubry et Rau, 4 éd., t. 5, p. 333, § 509, texte et note 27; Guillouard, op. cit., t. 2, n. 752. V. cepen sens contraire, Rodière et Pont, op. cit., t. 2, n. 838. V. au surplus, notre C. civ. annoté, loc. cit., n. 2. A plus forte raison, la communauté doit-elle supporter sans récompense les frais d'une instance civile; peu importe que le mari ait été condamné à les payer à titre de simples dépens ou à titre de dommages-intérêts.

Est-ce à dire que la thèse qui assure gain de cause au mari, lorsqu'il réclame l'inscription au passif de la communauté des frais de divorce mis à sa charge par le jugement, soit irréfutable? D'après un arrêt de la Cour de Douai, cette thèse pécherait par la base. V. Douai, 30 juill. 1903, reproduit en sous-note (a). V. égal., Trib. de Gien, 12 avril 1892, reproduit en sous-note (b). En effet, le jugement de divorce dûment transcrit remonte au jour de la demande, quant à ses effets pécuniaires entre époux (C. civ., 252, in fine). Entre époux divorcés ou séparés de corps, la communauté est donc rétroactivement dissoute du jour de la demande, c'est-à-dire dès le début de l'instance. Or, c'est seulement par le jugement qui termine cette instance que le mari est constitué débiteur des frais de justice envers sa femme. Cette dette du mari est donc une dette par lui « contractée », non durant la communauté, mais depuis sa dissolution. Elle doit lui demeurer personnelle, au moins dans le réglement des intérêts pécuniaires entre les époux, dans la liquidation des droits et reprises qu'ils auront à exercer sur la masse commune. On conçoit qu'il en aille autrement à l'égard des tiers. Vis-à-vis de ces derniers, la communauté n'est pas réputée rétroactivement dissoute; l'art. 252 le déclare nettement. Par exemple, l'avoué du mari pourra poursuivre sur les biens de la communauté le paiement des frais par lui faits au cours de l'instance, sauf à la femme, vis-à-vis de laquelle la communauté est réputée dissoute dès le début de l'instance, à exiger, an cours de la liquidation, que son mari tienne compte, soit de ce qui aura été avancé pour lui, soit, en général, de tous les frais au paiement desquels il vient d'être condamné.

On aurait tort d'objecter qu'il manque à ce système l'appui d'un texte analogue à l'art. 1425.

qui concerne les dépens: - Attendu qu'aux termes de l'art. 1444, C. civ, tout jugement qui prononce la séparation de biens remonte, quant à ses effets, au jour de la demande; Attendu que, dans ces conditions, on ne saurait considérer les frais faits dans une instance en séparation de corps comme dettes du mari, et devant incomber de ce chef à la communauté; - Condamne personnellement Lagarde en tous les dépens, etc.

Du 12 avril 1892. - Trib. civ. de Gien. M. Razouer. prés.

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(Landré C. Dame Perrin). ARRÊT.

LA COUR; Attendu que, devant la Cour, Landré, appelant, soutient par un contredit nouveau qu'à tort le notaire liquidateur a considéré comme une dette lui incombant personnellement le montant des frais de l'instance en divorce introduite contre lui par sa femme, la dame Perrin, auxquels il a été condamné par le jugement ayant prononcé le divorce à ses torts exclusifs; Attendu que la communauté est responsable des fautes du mari qui en est le chef, et que les dettes contractées par celui-ci ne se distinguent pas des dettes communes, sauf l'exception prévue par l'art. 1425, C. civ.; qu'ainsi, la communauté doit supporter définitivement et sans récompense les frais auxquels le mari a été condamné, alors même que l'instance était dirigée contre lui par sa femme, comme elle supporterait ceux de tout procès perdu par lui; que le contredit soulevé par Landré est donc fondé; Par ces motifs; - Confirme le jugement rendu par le tribunal civil de Chalon-surSaone, le 29 juill. 1910; - Dit toutefois qu'en outre des rectifications ordonnées par le jugement ainsi confirmé, le travail liquidatif sera encore rectifié en ce sens que les frais de l'instance en divorce, tels que Landré justifiera par quittances ou états en bonne forme les avoir payés, plus le solde restant dû, seront compris sans récompense dans le passif de la communauté Landré-Perrin, etc.

Du 23 nov. 1911.-C. Dijon. - MM. Vieillard-Baron, prés. ; Flamarion, subst.; Delucenay et B. Nourissat, av.

MONTPELLIER 22 juin 1912. OUVRIER, ACCIDENTS DU TRAVAIL, RESPONSA

Nous venons de constater qu'il découle logiquement de la disposition finale de l'art. 252, C. civ. Au contraire, la mort civile, encourue seulement lors de l'exécution de la peine, n'avait pas d'effet rétroactif (C. civ., art. 26). V. aussi, Demolombe, Public. et eff. des lois, t. 1, n. 220. Puis, en raison des préoccupations nées à ce sujet sous l'ancien droit, l'art. 1425 avait eu pour but d'enlever aux tiers toute action sur la part de l'autre époux dans les biens de la communauté. Comp. Pothier, Tr. de la comm., n. 249, éd. Bugnet, t. 7, p. 159.

Une objection plus délicate consisterait à soutenir que la dette des dépens, au paiement desquels le mari a été condamné, a, comme les réparations civiles qu'il pourrait devoir (V. la note de M. Labbé sous Cass. 3 janv. 1893, S. et P. 1893.1.225. V. aussi, Angers, 25 janv. 1905 et Trib. de Châlons-sur-Marne, 14 avril 1905, S. et P. 1906.2.49 et 52), son origine dans les faits qui ont motivé le divorce. Elle aurait été, en quelque sorte, implicitement contractée pendant la communauté. N'admet-on pas assez généralement que la femme, créanciere des frais de divorce ou de séparation de corps, a, pour les recouvrer contre son mari, la garantie de son hypothèque légale? V. pour les frais de divorce, Bordeaux, 22 mars 1889, et Trib. de Nontron, 20 déc. 1888, rapporté avec cet arrêt (S. 1890.2.52. P. 1890.1.330); et pour les frais de séparation de corps, Cass. 25 juin 1895 (S. et P. 1895.1.348; Pand, pér., 1896.1.174), et, sur renvoi, Amiens, 9 juill. 1896 (S. et P. 1898.

BILITÉ, LO DU 9 AVRIL 1898, CALCUL DE L'INDEMNITÉ, SALAIRE DE BASE, POURBOIRES (Rép., vo Responsabilité civile, n. 2146 et s.; Pand. Rép., vo Travail, n. 2454 et s.).

Il ne doit pas être tenu compte, pour le calcul du salaire de base servant à déterminer le montant de la rente due à la victime d'un accident du travail, des pourboires reçus par l'ouvrier, lorsqu'ils n'avaient pas une certitude et une stabilité suffisantes pour que celui-ci en ait tenu compte dans la fixation de son salaire, et qu'il n'apparait pas que le salaire fixe alloué à l'ouvrier ait été diminué en prévision des pourboires qu'il devait recevoir (1) (L. 9 ́avril 1898, art. 10).

(Cros et Gras-Fay C. Azéma).

ARRÊT.

LA COUR; Attendu qu'il n'est pas contesté qu'à la suite de l'accident dont Azéma a été victime au service des appelants, la réduction de capacité de travail doit être fixée à 10 p. 100, et la consolidation de la blessure au 15 déc. 1911; que les appelants soutiennent, toutefois, que les premiers juges ont mal à propos fait état des pourboires pour la fixation du salaire de base; Attendu qu'Azéma est resté 3 mois 24 jours au service des appelants, à 100 fr. par mois; que, tout d'abord, il était wagonnier et ne touchait pas de pourboires; qu'en dernier lieu, il était livreur, et qu'il prétend qu'en cette dernière qualité, il recevait des gratifications;

Attendu que, dans l'enquête à laquelle il a été procédé par le juge de paix, il n'a déclaré que son salaire de 100 fr. par mois; que, d'après l'enquête faite à l'audience, il aurait touché de 3 à 4 fr. par jour de pourboires, d'après certains témoins, 50 à 75 centimes d'après les autres; que, d'après certains certificats, il n'était que facteur adjoint sans responsabilité, et ne tou

2.68), avec les renvois. Adde sur les deux points, Aubry et Rau, 5o éd., t. 3, p. 372, § 264 ter; Guillouard, Tr. des priv. et hyp., t. 2, n. 784; BaudryLacantinerie et de Loynes, Du nantiss., des priv. et hyp., 3 éd., t. 2, p. 86, n. 981, 2o.

Mais on peut répondre que, d'après la jurisprudence, la femme divorcée jonit aussi de la protection de son hypothèque légale pour le paiement de la pension alimentaire qui lui aura été allouée, aux termes de l'art. 301, C. civ. V. Cass. 15 déc. 1909 (S. et P. 1912.1.313, Pand. pér., 1912.1.313), et la note de M. Gaudemet. Et certes, le mari ne peut faire considérer cette pension comme une dette de communauté. Elle lui est évidemment personnelle. De ce qu'une dette de l'ex-mari envers son épouse est garantie par l'hypothèque légale, il n'en faut donc pas conclure que cette dette fait nécessairement partie du passif de la communauté comme dette contractée pendant sa durée. Pourquoi n'en serait-il pas ainsi des frais de l'instance en divorce?

Quoi qu'il en soit, il ne nous semble pas témé. raire de souhaiter que la jurisprudence adopte une solution qui mette, sur notre question, l'équité d'accord avec les principes du régime de la communauté, de telle sorte que les frais de l'instance en divorce ou en séparation de corps restent toujours à la charge personnelle de l'époux qui a été condamné à les payer intégralement. Ce résultat est toujours atteint quand le divorce ou la séparation ont été prononcés aux torts de la femme ;

chait rien; qu'enfin, Azéma n'explique pas pourquoi les pourboires importants, ajoutés au salaire fixe d'abord stipulé, n'en auraient pas déterminé la diminution; qu'il n'est donc pas démontré que les pourboires aient eu pour Azéma une certitude et une stabilité suffisantes pour qu'il en ait tenu compte dans la fixation de son salaire; que c'est donc à tort que le tribunal les a compris dans ce salaire de base, et qu'il faut infirmer quant à ce le jugement; -Par ces motifs; Infirme le jugement du 29 févr. 1912 du tribunal civil de Béziers, en ce qu'il a compris les pourboires dans le salaire de base; fixe le salaire à 1.200 fr., et la rente viagère, payable par trimestre à partir du 15 déc. 1911, à 60 fr., etc. Du 22 juin 1912. C. Montpellier, 3o ch. MM. le cons. Frézouls, prés.; Lau (du barreau de Béziers) et Allien, av.

PARIS 15 novembre 1912. PROPRIÉTÉ LITTÉRAIRE OU ARTISTIQUE, ROMAN, TRADUCTION, AUTORISATION (ABSENCE DE), CONTREFACON, RÉPUBLIQUE ARGENTINE, JOURNALÉTRANGER, REPRÉSENTANT EN FRANCE, DÉBIT, MISE EN VENTE, DOMMAGESINTÉRÊTS (Rép., vo Contrefaçon, n. 1407 et s.; Pand. Rép., v° Propriété littéraire, etc., n. 1006 et s.).

Le débit en France de la traduction, même partielle, d'une œuvre française publiée à l'étranger sans l'autorisation de l'auteur, porte atteinte au droit de propriété de l'auteur, et autorise ce dernier, alors même que la législation du pays dans lequel la traduction a été publiée ne protégerait pas le droit de propriété littéraire, à réclamer la réparation du préjudice subi à celui par le fait duquel ce préjudice a été causé (2) (C. pén.. 426; L. 19-24 juill. 1793, art. 1).

il l'est fréquemment aussi, quand le mari est déclaré seul coupable. Il serait fâcheux, en présence des critiques si vives dirigées parfois contre notre législation matrimoniale, que le mari, condamné personnellement à payer l'intégralité des frais de l'instance, eût par exception, sous le régime de com. munauté, et dans le cas spécial où cette communauté est solvable, la possibilité de faire payer ces frais par la masse cominune, c'est-à-dire de les faire supporter pour moitié par sa femme. Il n'en devrait étre ainsi que lorsque le tribunal, prononçant le divorce aux torts des deux époux les condamne l'un et l'autre aux dépens.

J. LE C.

(1) Cette solution rentre dans la jurisprudence, d'après laquelle les pourboires touchés par un ou vrier ou employé ne doivent être pris en consideration, pour la détermination du salaire de base, qu'autant qu'à raison de leur caractère régulier, et de leur répercussion sur le salaire fixe, réduit à un chiffre inférieur en prévision des pourboires que devait toucher l'ouvrier, ils doivent être regardés comme une partie du salaire. V. à cet égard, Cass. 15 mars 1904 (S. et P. 1905.1.399; Pand. për..., 1905.1.72), et la note avec les renvois; 21 déc. 1909 (S. et P. 1911.1.359; Pand. pér., 1911.1.359), et la note. Adde, Sachet, Tr. de la légist. sur les acc. du trav., 5° éd., t. 1er, n. 826 et 827.

(2) La jurisprudence et la doctrine sont déti

Spécialementle Français, auteur d'un roman dont la traduction en espagnol, faite sans son autorisation, a été reproduite partiellement en feuilleton dans un journal imprimé et paraissant dans la République Argentine, est fondé à actionner en dommages-intérêts le représentant à Paris dujournal étranger, qui a vendu en France des numéros de ce journal contenant la traduction de son auvre (1) (Id.).

(Foley C. Cazaux : Journ. La Prensa). 29 nov. 1910, jugement du tribunal civil de la Seine, ainsi concu: - «Le Tribunal;

Attendu que, suivant assignation du 17 mars 1909, Foley, prétendant pratiquée illicitement la traduction en langue espagnole, ensemble la publication faite en octobre 1908, notamment dans le feuilleton, de l'édition parisienne du journal argentin La Prensa, de son œuvre littéraire dénommée « Kova la Mystérieuse », demande la condamnation de Cazaux, ès qualités, en 4.000 fr. de dommages-intérêts, ensemble, sous une astreinte de 50 fr. par jour de retard pendant un mois, passé lequel délai il serait fait droit, l'insertion dans le journal La Prensa du jugement à intervenir, dans les huit jours de sa signification, enfin, le coût de l'insertion du même jugement dans vingt autres journaux de son choix; - Attendu que, suivant acte du palais du 17 avril 1909, Cazaux, ès qualités, soutenant que ses fonctions au journal La Prensa se réduisent à la direction du service des informations télégraphiques de ce journal à Paris, conclut à l'irrecevabilité de la demande; Attendu que, suivant acte du palais du 25 nov. 1910, Cazaux, ès qualité, excipant de ce que la propriété littéraire n'était pas encore reconnue par les EtatsUnis de La Plata, au moment de la publication incriminée, soutenant qu'en tout cas le préjudice qu'il a pu involontairement causer à Foley n'a pu être qu'infime, conclut, au fond, au rejet de la demande;

nitivement fixées en ce sens que la traduction d'une œuvre, faite sans l'autorisation de l'auteur constitue une contrefaçon. V. en ce sens, Rouen, 7 nov. 1845 (S. 1846,2.521.-P. 1846.1.658); Cass. 12 janv. 1853 (S. 1853.1.81. P. 1853.1.177):

C. d'appel de Bruxelles, 17 mai 1880 (S. 1861.4.9. P. 1881.2 12), et la note de M. Louis Renault. Adde, Calmels, De la propr. et de la contref. des œuvres de l'intelligence, p. 150; Rendu et Delorme, Tr. prat. de dr. industr., n. 814 et 869; Darras, Tr. theor. et prat. de la contref., n. 68 et s.; Pouillet, Tr. de la propr. litt. et art., 5° éd., par Maillard et Claro, n. 533; et notre Rép. gén, du dr. fr., v Contrefaçon, n. 1407 et s.; Pand. Rép., vo Propriété littéraire, etc., n. 1006 et s. L'opinion contraire avait cependant été soutenue par Renouard (Tr. des dr. d'auteur, n. 16) et par Gastambide (De la contref., n. 58), qui se refusaient à voir dans la traduction d'une œuvre un fait constitutif de contrefaçon, sous le prétexte qu'il n'en résultait aucun préjudice pour l'auteur de l'œuvre originale. Mais, outre que la contrefaçon résulte de toute atteinte portée au droit privatif de l'auteur, il a été victorieusement démontré que le traducteur, en s'appropriant sans droit l'ouvre d'autrui, cause à l'auteur un préjudice à la fois matériel et moral, en le privant du bénéfice qu'aurait pu lui procurer

Attendu

« Sur l'exception proposée : que Cazaux justifie que le loyer de l'appartement où il exerce à Paris les fonctions à lui confiées par le journal La Prensa, lequel loyer s'élève annuellement à 23.700 fr., est consenti personnellement à Paz, directeur propriétaire du journal La Prensa; le bail des mêmes locaux spécifie que ceux-ci sont loués aux fins de servir de représentation au journal La Prensa, et les papiers à entête imprimée, dont fait usage Cazaux, et dont plusieurs exemplaires sont produits, sont notamment libellés : « La Prensa. Suc cursale de Paris. Directeur, F. Cazaux »; - Attendu, d'autre part, que, n'étant pas contesté que le journal La Prensa imprime à Paris une édition, il est manifeste que la responsabilité, ès qualités, de tout quasi-délit commis dans cette publication incombe à Cazaux; que les conclusions prises contre lui sont donc recevables;

-

Sur le caractère prétendu illicite des traductions et publications prétendues dommageables: Attendu que Cazaux, ès qualités, n'allègue point que l'œuvre, dont la traduction et la publication sont en cause, soit tombée dans le domaine public, ou que les reproductions prétendues dommageables aient été autorisées par l'auteur de l'œuvre; Attendu qu'aux termes de l'art. 1er de la loi des 19-24 juill. 1793, modifiée par la loi du 11 mars 1902, les auteurs d'écrits en tous genres jouissent, durant leur vie entière, du droit exclusif de vendre, faire vendre et distribuer leurs œuvres en France; Attendu que la loi sus-visée doit être interprétée comme ayant constitué à temps un droit exclusif à toute utilisation de l'oeuvre, à toute reproduction, partant, à toute traduction; que la demande de Foley est donc fondée en principe; Sur l'importance de la réparation : (sans intérêt); - Par ces motifs; Dit que l'œuvre littéraire créée par Foley, sous le nom de « Kova la Mystérieuse », a été traduite en langue espagnole, et publiée en

la cession du droit de traduction, tout en risquant de porter atteinte à sa réputation littéraire, si la traduction est insuffisante à rendre toute la pensée de l'oeuvre originale. V. not., C. d'appel de Bruxelles, 17 mai 1880 (motifs), précité, et la note de M. Renault. La convention de Berne du 9 sept. 1886, dont la loi du 28 mars 1887 (S. Lois annotées de 1888, p. 257.-P. Lois, décr., etc. de 1888, p. 445) a autorisé en France la promulgation, et qui a trait à la création d'une Union internationale pour la protection des œuvres littéraires et artistiques, a affirmé le droit de l'auteur sur les traductions de son œuvre. L'art. 5 de la convention dispose, en effet, que les auteurs ressortissant à l'un des pays de l'Union ou leurs ayants cause jouiront, dans les autres pays, du droit exclusif de faire ou d'autoriser la traduction de leurs ouvrages jusqu'à l'expiration de dix années à partir de la publication de l'œuvre originale dans l'un des pays de l'Union.

Des dispositions de cet art. 5 de la convention de Berne, il résulte que l'auteur, dont l'œuvre est traduite et reproduite sans son autorisation, peut poursuivre le traducteur dans tous les pays ayant adhéré à la convention d'Union. Dans l'espèce, la République Argentine ne faisant pas partie des Etats de l'Union, une telle poursuite n'était pas

fragments, en octobre 1908, dans l'édition parisienne du journal La Prensa, en violation du droit de propriété de Foley; Dit que les traduction et publication susénoncées ont causé à Foley un préjudice tant matériel que moral dont réparation est due; Condamne Cazaux, ès qualités, à payer à Foley la somme de 1.000 fr.. en réparation du préjudice sus-énoncé, etc. ». Appel par M. Cazaux,

ARRÊT.

LA COUR; Considérant qu'une traduction partielle en langue espagnole d'un roman de Foley, intitulé « Kova la Mystérieuse », a été publiée en feuilleton, sans autorisation de l'auteur, dans quelques numéros d'octobre 1908 du journal La Prensa ; que ce journal, imprimé et paraissant à Buenos-Ayres (République Argentine), n'a pas d'édition parisienne, ainsi que le dit par erreur le jugement entrepris; mais qu'il a à Paris une succursale et un représentant; que Cazaux, directeur de cette succursale, et représentant de la La Prensa à Paris, a été poursuivi par Foley, non pour avoir publié une édition parisienne de ce journal, dans laquelle aurait été insérée la traduction non autorisée, mais pour avoir vendu, en sesdites qualités, les numéros de ce journal dans lesquels se trouvait cette traduction; qu'il ne pouvait donc être condamné, ainsi qu'il l'à été par le jugement entrepris, à raison des fautes commises dans l'édition parisienne; mais qu'en sesdites qualités, il a engagé sa responsabilité pour avoir vendu à Paris les numéros incriminés du journal La Prensa; qu'en effet, le débit en France de la traduction, même partielle, d'une œuvre française publiée à l'étranger sans l'autorisation de son auteur, porte atteinte au droit de propriété de l'auteur et l'autorise, même au cas où la législation du pays dans lequel la publication a été faite ne protégerait pas le droit de propriété littéraire, à réclamer la répa

α

possible au siège social du journal qui avait publié cette traduction à Buenos-Ayres. Mais, aux yeux de la législation française, la traduction, faite sans aucune autorisation, n'en demeurait pas moins une ouvre contrefaite, par application de la jurisprudence ci-dessus rappelée. Or, le débit en France d'ouvrages contrefaits, ce qui doit s'entendre même d'ouvrages contrefaits à l'étranger (V. Pouillet, op. cit., n. 595), est assimilé par l'art. 126, C. pen., an délit de contrefaçon. Il n'était donc pas nécessaire, comme l'avait à tort pensé le tribunal, pour prononcer une condamnation contre le directeur de la succursale parisienne du journal argentin, à raison de la vente en France de numéros de ce journal contenant la traduction incriminée, de le représenter comme rédigeant une édition parisienne du journal; c'était là une erreur matérielle, puisque le directeur de la succursale se bornait à vendre en France le journal tel qu'il était imprimé dans la République Argentine; mais une condamnation n'en devait pas moins être prononcée, du moment où l'auteur de l'oeuvre indûment traduite établissait que le directeur de la succursale parisienne du journal argentin avait mis en vente et vendu des numéros du journal dans lequel se trouvait reproduite en feuilleton la traduction.

(1) V. la note qui précède.

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ration du préjudice subi à celui par le fait duquel ce préjudice a été causé; que Cazaux, ayant, en sa qualité de directeur de la succursale et de représentant à Paris du journal La Prensa, débité en France ce journal, est tenu, en sesdites qualités, de réparer le préjudice que la vente des numéros de ce journal, contenant la traduction illicite, a causé à Foley; - Considérant qu'il ne peut être contesté que la vente en France desdits numéros du journal La Prensa a fait éprouver à Foley un préjudice matériel et moral dont il lui est du réparation; que les documents produits permettent d'en déterminer l'importance, et qu'il échet, en adoptant sur ce point seulement les motifs des premiers juges, de maintenir la condamnation prononcée par le jugement entrepris, laquelle fait une exacte appréciation du dommage éprouvé par l'intime; Par ces motifs; Dit que, le journal La Prensa n'ayant pas, en octobre 1908, d'édition parisienne, Cazaux ne pouvait être déclaré tenu, en sa qualité de directeur de la succursale de ce journal à Paris, des fautes dommageables commises dans une édition parisienne inexistante, basées sur la publication dans cette édition de la traduction non autorisée de fragments du roman de Foley; Réforme, quant à ce, le jugement entrepris; Et statuant sur la demande de Foley, par décision nouvelle; Dit qu'en mettant en vente et en débitant à Paris les numéros du journal La Prensa, publié à Buenos-Ayres, dans lesquels se trouve la traduction partielle du roman de Foley, traduction et publication faites sans l'autorisation de cet auteur, Cazaux a porté atteinte au droit de propriété de ce dernier, et a commis, en sesdites qualités, un acte illicite et dommageable, dont Foley est recevable et fondé à lui demander réparation; maintient la condamnation prononcée contre Cazaux, ès qualité, et toutes autres dispositions dudit jugement non contraires au présent arrêt, etc.

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Du 15 nov. 1912. — C. Paris, 4o ch. MM. Valabrègue, prés.; Courtin, av. gén.; Hugon et de Monzie, av.

TRIB. DE PAIX DU HAVRE (2° ARR.)
1er juin 1912.

MARINE-MARINS, SALAIRES, INSAISISSABILITÉ,
NAVIRE, GARÇON DE SALLE, SAISIE-ARRÊT,

(1) La loi du 12 janv. 1895, qui limite la portion saisissable des salaires et petits traitements (C. trav., liv. 1, art. 61 et s.), a laissé subsister l'insaisissabilité absolue, édictée, pour les salaires des marins et gens de mer, par l'ordonn. du 1er nov. 1745, et maintenue par l'ordonn. du 17 juill. 1816, ainsi que par le décret du 4 mars 1852. V. en ce sens, Cass, 28 nov. 1900 (sol. implic.) (S. et P. 1901.1.257, et la note de M. Lyon-Caen; Pand.. pr., 1901.1.57).

(2-3) Si l'on admet aujourd'hui sans difficulté que l'insaisissabilité édictée par l'ordonn. de 1745 pour les salaires des marins et gens de mer s'applique aux salaires des matelots de l'équipage, et même aux gages du capitaine (V. Rennes, 13 juin 1889, S. 1891.2.123. — P. 1891.1.694, la note et les renvois), bien que ce dernier point ait été contro

NULLITÉ (Rép., vo Gens de mer, n. 412
et s., 441; Pand. Rép., v Marins, n. 701
et S.,
718).

L'insaisissabilité des salaires des marins et des gens de mer, édictée par l'ordonn. du 1er nov. 1745, et maintenue par le décret du 4 mars 1852, subsiste meme depuis la loi du 12 janv. 1895 (C. trav., liv. Jer, art. 61 et s.), relative à la saisie-arrêt des salaires et petits traitements des ouvriers et employés (1) (Ordonn., 1er nov. 1745; L. 12 janv. 1895; C. trav., liv. 1er, art. 61 et s.). Sol. implic.

Cette insaisissabilité profite, non seulement aux marins inscrits maritimes, mais aussi aux autres gens de mer non inscrits, employés, non pas à la manœuvre du navire, mais à des travaux étrangers à celle manoeuvre (2) (Id.).

Spécialement, est nulle la saisie-arrel pratiquée entre les mains d'une Comp. de navigation sur le salaire d'un garçon de salle, employé à bord d'un paquebot (3) (Id.).

(Ve Durécu C. Lenormand).

JUGEMENT.

LE TRIBUNAL; Attendu qu'à la date du 11 août 1911, la dame Durécu, agissant en vertu de la loi du 12 janv. 1895, et comme créancière du sieur Lenormand, faisant partie du personnel civil de la Comp. générale transatlantique, a fait pratiquer une saisie-arrêt sur les salaires de son débiteur, aux mains du représentant de ladite Comp. au Havre; Attendu qu'elle nous demande aujourd'hui de valider cette opposition, et de recevoir la déclaration affirmative du tiers saisi; Attendu que Lenormand ne conteste pas qu'il soit débiteur de la dame Durecu d'une somme de 27 fr. 25, mais prétend que ses salaires sont insaisissables, par application des dispositions contenues dans. l'ordonn. du 1er nov. 1745; Attendu que, de son côté, M. Dicquemare, représentant de la Comp. générale transatlantique, se prévalant de ces mêmes dispositions, déclare qu'il n'a rien retenu sur les salaires de Lenormand; Attendu que la veuve Durécu répond à cela que, l'ordonnance de 1745 n'a créé le privilège de l'insaisissabilité qu'au profit des marins et matelots inscrits maritimes, en compensation des charges diverses qui leur sont imposées,

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versé (V. les autorités citées sous Rennes, 13 juin 1889, précité), il y a, au contraire, des dissidences sur le point de savoir si l'insaisissabilité s'applique aux différentes personnes qui, sans contribuer à la conduite du navire, sont employées à bord.

Une première opinion enseigne que, la disposition de l'ordonn. du 1er nov. 1745 devant être interprétée très largement, le bénéfice de l'insaisissabilité peut être invoqué par les personnes qui, bien que ne figurant pas sur les listes de l'inscription maritime, font partie de l'équipage et sont employées à bord au service du navire. V. Laurin, sur Cresp, Dr. marit., t. 1er, p. 457, texte et note; et notre Rép. gén. du dr. fr., v° Gens de mer, n. 411; Pand. Rep., v° Marins, n. 718. Il a été jugé en ce sens que sont insaisissables les salaires d'un chirurgien à bord d'un navire de commerce (V. Trib.

et non au profit des autres navigateurs non inscrits maritimes, et par suite exempts desdites charges; que, dès lors, l'opposi tion qu'elle a pratiquée sur les salaires de Lenormand doit produire son plein et entier effet; En fait: - Attendu que Lenormand n'est pas inscrit, mais fait partie, comme garçon de salle, de l'équipage de La Touraine, paquebot servant au transport des voyageurs, et appartenant à la Comp. générale transatlantique; -En droit: Attendu que la seule question qui se pose est celle de savoir si l'insaisissabilité des salaires, édictée par l'ordonn. du 1er nov. 1745, doit profiter, non seulement aux marins inscrits maritimes, mais aussi aux autres gens de mer non inscrits, et employés, non pas à la manœuvre du navire, mais à des travaux complètement étrangers à cette manouvre; - Attendu que, si cette question a pu autrefois être controversée, elle ne parait plus l'être aujourd'hui, ni en doctrine, ni en jurisprudence; que d'excellents auteurs professent, à l'heure actuelle, que tous les navigateurs en général doivent bénéficier des dispositions de l'ordonnance de 1745; que de nombreuses décisions judiciaires consacrent cette manière de voir, qui parait même avoir été, implicitement du moins, adoptée par la Cour de cassation; Attendu qu'il convient, tout d'abord, de remarquer que l'ordonnance de 1745 semble bien appliquer le principe de l'insaisissabilité, non seulement aux salaires des matelots plus spécialement affectés à la conduite du navire, mais à ceux de tous les autres gens de mer, c'est-à-dire de toutes les personnes attachées au service du navire, et, comme telles, inscrites au rôle de l'équipage et payées par l'armement; Attendu que, pour dissiper les doutes que pouvaient encore laisser subsister les termes de l'ordonnance de 1745, le décret-loi du 4 mars 1852, relatif à l'engagement des marins sur navires de commerce, a pris soin de dire que les dispositions de cette ordonnance protégeaient tout marin engagé pour le service d'un bâtiment marchand; Attendu qu'en se servant de cette expression: « tout marin», le légis lateur de 1852 a très nettement consacré l'assimilation, aux matelots chargés de la conduite du navire, des autres marins se trouvant à bord du bâtiment, en vue d'assurer le bon fonctionnement des services

de la Seine, 2 juill. 1892, S. et P. 1894.2.182), ou les salaires des commissaires, cuisiniers, femmes de chambres embarqués à bord des navires transatlantiques. V. Trib. du Havre, 29 avril 1869 (Rec. du Havre, 1869.2.87). On a fait observer en ce sens que ces différentes personnes sont nécessaires au service normal du navire. V. Trib. du Havre, 29 avril 1869 et Trib. de la Seine, 2 juill. 1892, précités.

D'après une seconde opinion, le caractère excep tionnel de la disposition de l'ordonn. du 1er nov. 1745 impose une interprétation restrictive, en telle sorte que le bénéfice de l'insaisissabilité doit être réservé aux personnes qui participent effectivement à la conduite et à la direction du navire. V. en ce sens, Lyon-Caen et Renault, Tr. de dr. comm., 4 éd., t. 5, n. 396; Desjardins, Tr. de dr. comm. marit., t. 3, n. 675; de Valroger, Dr. marit., t. 2, n. 660.

indépendants de celui de la manœuvre;

Attendu, enfin, que le Code de commerce, dans ses art. 231, 251, 262 et 347, vise sans distinction tout le personnel marin embarqué avec salaires sur un navire de commerce; Attendu, en outre, qu'une circulaire du ministre de la marine, en date du 31 mars 1896, portant notification d'un avis du comité contentieux de la marine, délibéré le 5 août 1892, recommande aux agents supérieurs de cette Administration de tenir compte dudit avis, lequel, très motivé, conclut, au point de vue de l'insaisissabilité des salaires, à l'assimilation de tous les marins, à quelque titre qu'ils soient employés à bord du navire; Attendu que l'observation des dispositions législatives ci-dessus rappelées et des instructions ministérielles données en conformité est garantie par le contrôle effectif de l'Administration de la marine, laquelle n'autorise le paiement des salaires des matelots, marins et autres gens de mer qu'après avoir approuvé les états de solde de l'équipage, et exercé son contrôle sur le paiement des salaires de tous les gens de mer, à quelque catégorie qu'ils appartiennent; Attendu qu'il n'y

a pas lieu non plus de s'arrêter à l'argument qui tendrait à faire admettre que les inscrits maritimes seuls, en raison des charges exceptionnelles qu'ils supportent, auraient le droit d'invoquer, à leur profit, le privilège de l'insaisissabilité des salaires; qu'en effet, il est imposé aux marins non inscrits des charges à peu près équivalentes à celles que supportent les marins inscrits; que, tout comme ceux-ci, ceux-là sont obligés de subir la retenue d'un tant pour cent, destinée à alimenter, d'une part, la Caisse des invalides de la marine, et, d'autre part, la Caisse de prévoyance des marins français; Par ces motifs; Disons nulle et de nul effet la saisie-arrêt pratiquée le 11 août 1911, par la veuve Durécu, sur les salaires du sieur Lenormand, etc.

Du 1er juin 1912. Trib. de paix du

-

(1) Antérieurement à la loi du 17 juill. 1907 (S. et P. Lois annotées de 1908, p. 599; Pand. pér., Lois annotées de 1908, p. 599), la jurisprudence refusait au juge des référés compétence pour statuer sur une demande en mainlevée de saisie-arrêt, lorsque la demande en validité était pendante devant le tribunal. V. Cass. 5 mars 1895 (S. et P. 1895.1.168; Pand. pér., 1896.1.407); 6 mars 1901 (S. et P. 1903.1.213; Pand. per., 1901.1.416); Dijon, 10 mars 1903 (S. et P. 1904.2.95); Paris, 12 avril 1905 (S. et P. 1905.2.200), et les renvois. Lorsque le tribunal n'était pas encore saisi de la demande en validité, indépendamment de l'hypothese dans laquelle il était demandé au juge des référés de restreindre les effets de la saisie-arrêt à une partie de la somme frappée de saisie, avec affectation spéciale au profit du saisissant, hypothèse dans laquelle la jurisprudence tendait à reconnaître au juge des référés, vu l'urgence, le droit de donner mainlevée partielle de la saisie-arrêt aux conditions spécifiées (V. Paris, 1er août 1876, Paris, 18 août 1876 et Poitiers, 4 août 1887, S. et P. 1898. 2.73, ad notam; Paris, 22 juill. 1895, S. et P. 1897. 2.237, les notes et les renvois. Adde, Glasson, Précis de proc., 2° éd., par Tissier, t. 2, n. 1281),

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TRIB. DE NANTUA (RÉFÉRÉ) 25 octobre 1912. SAISIE-ARRET, TITRE (DÉFAUT DE), PERMISSION DU JUGE (ABSENCE DE), NULLITÉ, MAINLEVÉE, COMPÉTENCE, RÉFÉRÉ (Rép., vo Saisie-arrêt, n. 1188 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 1661 et s.).

Le juge des référés est compétent pour ordonner la mainlevée pure et simple d'une saisie-arrêt radicalement nulle, comme ayant été faite sans titre ni permission du juge, et contrairement aux prescriptions des art. 558, 563, 564 et s., C. proc. (1) (C. proc., 567).

(Dame Trébouet C. Vuillermoz).

ORDONNANCE.

NOUS, PRÉSIDENT; - Attendu que, suivant exploit de l'huissier Gojon, en date du 24 oct. 1912, enregistré, la dame Demond, femme Trébouet, a fait assigner le sieur Vuillermoz (Calixte) par-devant nous, aux fins de voir dire, la demanderesse étant autorisée d'office à ester en justice, que la saisie-arrêt ou opposition, pratiquée par Me Ballet, huissier à Oyonnax, dans les premiers jours d'octobre 1912, entre les mains des locataires de la dame Trébouet, à la requête de Vuillermoz (Calixte), est nulle et de nul effet; en voir prononcer, en conséquence, la mainlevée; voir dire que les tiers saisis devront se libérer entre les mains de la dame Trébouet du montant des locations échues, et que, ce faisant, ils seront bien et valablement libérés; s'entendre le sieur Calixte Vuillermoz condamner aux dépens; Attendu que, bien que régulièrement assigné, le sieur Calixte Vuillermoz ne comparaît pas; donnons défaut contre lui et pour le profit; Attendu que cette saisie-arrêt est radicalement nulle, comme ayant été faite sans

on admettait que le juge des référés était compétent pour donner mainlevée de la saisie-arrêt, lorsqu'elle était nulle pour avoir été pratiquée sans titre ou avec un titre irrégulier. V. Paris, 24 nov. 1887 (sol. implic.) (S. 1889.2.51. P. 1889.1.829); Paris, 22 juill. 1895, précité, la note et les renvois. On faisait observer que, dans ce cas, il n'y a pas de principal, et qu'il s'agit seulement de lever un obstacle de fait qui s'oppose à l'exercice par le saisi de ses droits. V. Glasson, op. et loc. cit. V. cep. en sens contraire, dans le sens de l'incompétence absolue du juge des référés à l'effet de statuer sur une demande en mainlevée, Paris, 11 juin 1861 (S. 1861.2.416. P. 1862.35). Adde, les autorités citées dans la note sous Paris, 22 juill. 1895, précité.

La loi du 17 juill. 1907 a permis en tout état de cause, et quel que soit l'état de l'affaire, à la partie saisie de se pourvoir en référé, afin de toucher du tiers saisi, à charge de consigner une somme suffisante pour répondre des causes de la saisie, arbitrée par le juge des référés ». Il s'ensuit que, lorsque la demande en mainlevée est accompagnée d'une offre de consignation, le juge des référés a toujours qualité pour y déférer, même si la de

titre ni permission du juge, et par inobservation des prescriptions des art. 558, 563, 564 et s., C. proc.; qu'il est admis et reconnu aujourd'hui que le juge des référés est compétent pour accorder mainlevée d'une saisie-arrêt pratiquée sans titre, ou en vertu d'un titre irrégulier, (Paris, 22 juill. 1895, S. et P. 1897.2.237);

Attendu que la dame Trébouet ne saurait être astreinte à attendre le bon vouloir de Vuillermoz pour se dégager d'une opposition irrégulière, qui la prive de la jouissance de ses biens, et lui enlève tous moyens d'existence; qu'il y a ainsi urgence pour elle à en obtenir la mainlevée; que cette urgence détermine encore, selon l'art. 806, C. proc., la compétence du juge des référés; Par ces motifs; Déclarons nulle et de nul effet l'opposition formée par le sieur Calixte Vuillermoz, au préjudice de dame Trébouet, entré les mains des locataires de cette dernière; Ordonnons la mainlevée pure et simple de l'opposition dont s'agit, et autorisons la demanderesse à toucher des mains des tiers saisis les sommes lui appartenant, etc.

Du 25 oct. 1912. - Trib. de Nantua (référé). MM. Dulceux, prés.; Dominjon, avoué.

TRIB. DE SIMPLE POLICE DE MONTREUILSUR-MER 10 septembre 1912. RÈGLEMENT DE POLICE OU MUNICIPAL, COMMUNE, DISTRACTION, COMMUNE NOUVELLE, FORCE OBLIGATOIRE (Rép., vo Règlement de police ou municipal, n. 1270; Pand. Rép., vo Arrêté municipal, n. 97).

Les arrêtés régulièrement pris par l'au torité municipale restent obligatoires et subsistent tant qu'ils n'ont pas été expressément abrogés ou régulièrement rapportés (2) (C. pén., 471, n. 15).

Et, lorsqu'une portion de commune est, en vertu d'une loi, érigée en commune, les

mande en validité a déjà été portée devant le tribunal (V. Lyon, 10 févr. 1910, S. et P. 1911.2.8; Pand. pér., 1911.2.8), et aussi bien dans le cas où la saisie-arrêt a été pratiquée sans titre que dans celui où elle a été pratiquée avec titre. V. Paris, 30 juin 1908 (S. et P. 1911.2.5; Pand. pér., 1911. 2.5); Trib. de Châteauroux, 13 nov. 1911 (S. et P. 1912.2.125; Paud. pér., 1912.2.125), les notes et les renvois.

Mais, si la demande de mainlevée n'est pas, ce qui était le cas de l'espèce, accompagnée d'offre de consignation, la loi de 1907 ne s'applique pas (V. la note sous Cass. 9 nov. 1908, S. et P. 1909.1.436; Pand. pér., 1909,1.436); il faut alors, pour déterminer si le juge des référés est compétent, appliquer les règles antérieurement admises en ce qui concerne la compétence du juge des référés en matière de validité de saisie-arrêt; d'où la conséquence que la compétence doit être reconnue au juge des référés, si la demande en mainlevée est fondée sur ce que la saisie-arrêt a été pratiquée irrégulie

rement.

(2) Il est certain que les arrêtés ou règlements municipaux légalement pris sont obligatoires tant qu'ils n'ont pas été régulièrement rapportés. V.

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