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connaitre les prétentions adverses;

Attendu qu'on a cherché à détruire cette objection en disant que l'arrêt rendu contre la partie civile est un arrêt par défaut susceptible d'opposition; - Attendu que nulle part cette faculté d'opposition n'est consacrée par la loi, qui paraît n'admettre exclusivement contre les arrêts des chambres d'accusation que le pourvoi en cassation; - Attendu qu'il serait d'ailleurs bien singulier que l'arrêt, qui n'est pas susceptible d'opposition en tant qu'il statue sur l'ordonnance du juge d'instruction, puisse être frappé d'opposition pour la condamnation aux dommages-intérêts; - Attendu, enfin, qu'aucun délai n'est fixé pour l'exercice de ce prétendu droit d'opposition aux arrêts des chambres d'accusation, et qu'il serait purement arbitraire de prétendre que c'est le même délai que celui fixé pour l'opposition aux ordonnances du juge d'instruction;

Attendu que, de tout ce qui précède, il résulte que la chambre d'accusation ne peut, sur les seules réquisitions du ministère public, prononcer une condamnation à des dommages-intérêts au profit d'un prévenu qui n'en demande pas, contre une partie civile qui n'a pu se défendre; Par ces motifs; - Faisant droit sur les réquisitions du ministère public; - Déclare irrecevable en la forme comme tardive l'opposition formée par Redde; la déclare mal fondée et l'en déboute; et, sans avoir égard aux réquisitions du procureur général en ce qui concerne les dommages-intérêts, dit n'y avoir lieu à statuer, la demande étant non recevable.

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Du 22 juill. 1912. - C. Caen, ch. d'acc. MM. Fosse, prés.; Franck, subst.; Lemaréchal (du barreau d'Alençon), et Buteau (du barreau de Paris), av.

2o Espèce.

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LA COUR; Sur les dommages-intérêts qui peuvent être alloués aux inculpés: Considérant que, suivant l'art. 136, C. instr. crim., la partie civile qui succombera sera condamnée aux dommages-intérêts envers le prévenu; qu'il résulte de cette disposition, dont les termes sont clairs, précis et impératifs, que, toutes les fois qu'une partie civile a fait opposition à l'exécution d'une ordonnance de non-lieu, et que son opposition est reconnue maĺ fondée, elle doit nécessairement étre condamnée à des dommages-intérêts envers l'inculpé; que ces dommages-intérêts, dus dans tous les cas, ont pour fondement juridique la faute dommageable commise par la partie civile; que le législateur, édictant une sorte de présomption légale, impute à faute à la partie civile le fait par elle d'avoir, par une opposition reconnue plus tard mal fondée, fait revivre l'action publique, alors que celle-ci était à bon droit éteinté; que, d'autre part, il apparaît manifestement que l'opposition à l'ordonnance de non-lieu cause à l'inculpé un préjudice, qui, suivant les cas, peut être plus ou moins grave, mais dont l'existence est nécessai

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rement certaine, puisqu'elle a toujours pour effet de le faire rentrer dans les liens d une inculpation dont l'ordonnance l'avait affranchi; que, d'ailleurs, il résulte tant des termes que de l'esprit de la disposition précitée, laquelle a eu pour objet de créer un contrepoids au pouvoir exorbitant de la partie civile, que les dommages-intérêts dus à l'inculpé doivent lui être alloués d'office, et alors même qu'il n'a formé aucune demande à cet égard, sauf, bien entendu, et dans tous les cas, le devoir, pour la Cour, de mesurer l'étendue du préjudice causé par l'opposition, et de fixer en conséquence le chiffre des dommages-intérêts qui sont dus; Considérant, spécialement, qu'il n'entre pas dans la mission de la Cour de faire état du préjudice causé à l'inculpé par la plainte téméraire qui a abouti à l'ordonnance de non-lieu, mais uniquement du supplément de préjudice occasionné par l'opposition... (le reste sans intérêt); Par ces motifs; Reçoit la partie civile en son opposition; Confirme l'ordonnance entreprise; dit qu'elle sortira son plein et entier effet; Condamne la dame Gilbert, partie civile, à payer à titre de dommages-intérêts à Louis, inculpé, la somme de 1 fr., et à la dame Beaufils, également inculpée, la somme de 2.000 fr., etc.

Du 4 févr. 1913. C. Paris, ch. d'acc. MM. Milliard, prés.; Laurence, subst.; Coulon, Séligman et Buteau, av.

BASTIA 29 avril 1913.

DEMANDE INCIDENTE, ACTE D'AVOUÉ A AVOUÉ, JUGEMENTS ET ARRÊTS, INTERPRÉTATION, EXECUTION, AVOUÉ, CONSTITUTION, POUVOIRS (Rép., vo Demande incidente, n. 11 et s.; Pand. Rép., v° Conclusions, n. 3, 48).

La demande à fin d'interprétation d'un arrêt constitue, lorsqu'elle se rattache étroitement au litige tranché par cet arrêt, une demande incidente (1) (C. proc., 337).

En conséquence, elle peut être formée par simple acte signifié à l'avoué qui a occupé pour la partie adverse, dans le procès terminé par l'arrêt dont l'interprétation est demandée (2) (Id.).

Vainement on soutiendrait que, plus d'une année s'étant écoulée depuis le prononcé de l'arrêt dont l'interprétation est demandée, cet avoué serait sans pouvoirs, si, sur la signification à lui faite, l'avoué s'est constitué pour ses clients; cette constitution, dės lors qu'elle a été faite sans opposition des clients, vaut comme pouvoir nouveau à l'effet de les représenter, à moins de désaveu de leur part, dans les formes prescrites par la loi (3) (C. proc., 337, 1038).

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l'arrêt ci-dessus recueilli. V. Cass. 20 mars 1889 (S. et P. 1892.1.565, la note sous cet arrêt et

-

représentés en l'instance par M. PetriGuasco, ont été reconnus propriétaires des terrains situés sur la rive droite du ruisseau Giunco ou Cardo, portant les n. 247, 248, 249, 250, de la section G, de la commune de Portovecchio; Attendu que, par acte du 15 oct. 1912, Me de Gentile, avoué des Lugiani et consorts, adversaires des Feracci, en 1902, a sommé Me Petri-Guasco de comparaître et faire comparaître ses parties devant la Cour de céans, à fin d'interprétation de l'arrêt du 7 mars 1902, soutenant qu'à la suite d'une prétendue confusion au sujet de la dénomination du ruisseau Cardo, les Feracci se seraient emparés de deux autres parcelles, comprises sous les n. 245 et 251 de la même section G, sur lesquelles ils n'auraient aucun droit; Sur la nullité de l'instance ainsi engagée, moyen pris de ce qu'elle aurait dû l'être par exploit d'ajournement, en conformité de l'art. 61.C. proc., et non par un simple avenir, Me PetriGuasco ne pouvant occuper sans nouveaux pouvoirs, aux termes de l'art. 1038 du même Code, alors que plus d'une année s'était écoulée depuis le prononcé de l'arrêt: Attendu que ce moyen ne saurait être accueilli; qu'il s'agit, en effet, dans l'espèce, non d'un nouveau litige, nécessitant le recours aux formes ordinaires de l'ajournement, mais bien d'un incident, se rattachant étroitement au procès de 1902; que, la jurisprudence assimilant une demande d'interprétation à une demande concernant l'exécution, demande incidente par sa nature, et toute demande incidente devant être formée par un simple acte, aux termes de l'art. 337, C. proc., il s'ensuit que la procédure suivie par Me de Gentile est de tous points régulière; Attendu, quant aux pouvoirs de Me Petri-Guasco, qu'il était loisible à cet avoué, au reçu de la sommation du 15 oct. 1912, à lui notifiée plus d'un an après l'exécution de l'arrêt, de décliner les pouvoirs dont il avait été investi, et de bénéficier ainsi des dispositions de l'art. 1038, précité; que le fait par lui d'avoir, apres ce délai, continué de prêter son ministère aux Feracci, sans la moindre opposition de leur part, et de s'être constitué pour occuper sur l'incident, vaut comme pouvoir nouveau, l'autorisant à les représenter, à moins d'un désaveu dans les formes prescrites par la loi; qu'il a été ainsi jugé par la Cour de cassation, par arrêt du 20 mars 1889 (S. et P. 1892.1.565; Pand. per., 1889.1.225); Par ces motifs; Rejette comme non fondé le moyen proposé; Déclare, en conséquence, régulière et recevable la demande à fin d'interprétation formée par l'acte du 15 oct. 1912, etc. Du 29 avril 1913. C. Bastia. Ire ch. MM. Levie-Ramolino, ler prés.; Le Marc'hadour, av. gén.; de Caraffa et Moretti, av.

les renvois; Pand. pér., 1889.1.225).

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RENNES 11 juillet 1910.

CHEMIN VICINAL, ELARGISSEMENT, DÉCISION ADMINISTRATIVE, TRANSFERT DE PROPRIÉTÉ, POSSESSION, INDEMNITÉ, PAIEMENT PRÉALABLE, PRESCRIPTION BIENNALE, POINT DE DÉPART, PRISE DE POSSESSION, JUGE DE PAIX, COMPÉTENCE, TRIBUNAL CIVIL, EXCEPTION (Rép., vo Chemin vicinal, n. 701 et s., 764 et s.; Pand. Rép., vo Chemins vicinaux, n. 308 et s., 395 et s.).

(1-2) La loi du 21 mai 1836, sur les chemins vicinaux (S. 2o vol. des Lois annotées, p. 298), a prévu le cas où, en vue de l'ouverture, du redressement, ou de l'élargissement d'un chemin vicinal, l'Administration se verrait dans l'obligation d'acquérir des terrains appartenant à des particuliers, et elle a, dans ses art. 15 et 16, organisé deux procédures différentes, suivant la nature des travaux dont l'exécution est projetée.

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Lorsqu'il s'agit de créer un chemin nouveau ou de redresser un chemin déjà existant, l'Administration doit, faute d'une entente amiable avec les intéressés, recourir, pour la fixation de l'indemnité, à la procédure d'expropriation pour utilité publique, suivant des formes simplifiées qui sont déterminées par les art. 15 et 16 de la loi du 21 mai 1836, le jury n'étant composé que de quatre jurés, et étant présidé par un juge délégué par le tribunal civil, qui peut aussi désigner comme magistrat directeur le juge de paix du canton. Malgré la simplification des formes, il n'y a pas de doute qu'il s'agit bien d'une véritable expropriation pour cause d'utilité publique, à laquelle sont applicables les règles générales posées par les lois sur l'expropriation. V. en ce sens, sous l'empire de la loi du 7 juill. 1833, Cass. 21 août 1838 (S. 1838.1.784. P. 1847.1. 213); 21 août 1838 (S. 1838.1.975. P. 1847. 1.213); 9 juill. 1839 (S. 1839.1.792. P. 1846. 2.655); et, depuis la loi du 3 mai 1841, Cass. 14 déc. 1847 (S. 1848.1.189. P. 1848.1.27); 29 mars 1887 (S. 1888.1.134. P. 1888.1.304; Pand. pér., 1888.1.211); 3 août 1908 (S. et P. 1910. 1.47; Pand. per., 1910.1.47). La conséquence en est que, lorsqu'il est procédé à une expropriation, en vue de l'ouverture ou du redressement d'un chemin vicinal, si le propriétaire exproprié perd, par l'effet du jugement d'expropriation, son droit de propriété (L. 3 mai 1841, art. 16 et 18), le paiement de l'indemnité, ou sa consignation, si l'exproprié refuse de recevoir paiement, doivent, conformément à la règle essentielle posée dans l'art. 53 de la loi du 3 mai 1841, être préalables à la prise de possession des terrains expropriés. V. Cass. 6 janv. 1906 (S. et P. 1906.1.108; Pand. pér., 1906. 1.151); Dufour, Tr. gen. de dr. admin., 3o éd., t. 3, n. 335; Gisclard, Code des chem. vicinaux, t. 1, n. 89; Herman, Tr. de la voirie vicinale, n. 199 et 251.

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Les mêmes principes doivent s'appliquer, en vertu de l'art. 2 de la loi du 8 juin 1864 (S. Lois annotées de 1864, p. 38. - P. Lois, décr., etc. de 1864, p. 66), en matière d'élargissement de chemins vicinaux, toutes les fois que les terrains qu'il s'agit d'incorporer au sol du chemin à élargir sont des terrains bâtis (V. sur ce qu'il faut entendre par cette dernière expression, Dijon, 19 juin 1883, S. 1884.2.34. P. 1884.1.211, et la note; Cons. d'Etat, 25 nov. 1887, Godineau, S. 1889.3.51. P. chr., et les renvois), puisqu'en pareil cas, conformément à l'art. 2, précité, il est fait application des règles de l'art. 16 de la loi du 21 mai 1836, relatives à l'expropriation des terrains nécessaires ANNÉE 1913. 11 cah.

La loi du 21 mai 1836, en simplifiant les formalités de l'expropriation pour cause d'utilité publique en matière de chemins vicinaux, n'a pas porté atteinte au principe tutelaire du paiement préalable de l'indemnité d'expropriation (1) (C. civ., 545; LL. 21 mai 1836, art. 15; 3 mai 1841, art. 53).

En conséquence, si, à partir de la décision administrative portant reconnaissance et fixation de la largeur d'un chemin vici

à l'ouverture ou au redressement d'un chemin vicinal.

Lorsque l'élargissement d'un chemin vicinal nécessite, au contraire, l'acquisition de parcelles de terrains non bâtis, ce ne sont plus les dispositions de l'art. 16 de la loi du 21 mai 1836 qu'il y a lieu d'appliquer, mais celles de l'art. 15, lequel est ainsi conçu: « Les arrêtés du préfet portant reconnaissance et fixation de la largeur d'un chemin vicinal attribuent définitivement au chemin le sol compris dans les limites qu'ils déterminent. Le droit des propriétaires riverains se résout en une indemnité, qui sera réglée à l'amiable ou par le juge de paix du canton, sur le rapport d'experts nommés conformément à l'art. 17». Les formalités qui précèdent l'incorporation au sol du chemin vicinal des terrains compris dans les limites de ce chemin sont considérablement simplifiées par ce texte. Il n'est plus besoin d'un jugement d'expropriation, et il n'est pas nécessaire de réunir un jury pour fixer les indemnités à allouer aux propriétaires dépossédés. D'une part, il suffit, pour incorporer les terrains au chemin, d'une décision de l'autorité administrative déterminant les limites du chemin, décision qui, d'après la loi de 1836, était prise par le préfet, dont les pouvoirs, depuis la loi du 10 août 1871 (S. Lois annotées de 1871, p. 63. P. Lois, décr., etc. de 1871, p. 107), ont été transférés au conseil général ou à la commission départementale, suivant qu'il s'agit d'un chemin de grande communication ou d'un chemin d'intérêt commun, ou qu'il s'agit d'un chemin vicinal ordinaire. D'autre part, l'indemnité doit, à défaut d'accord amiable, être fixée par le juge de paix, sur rapport d'experts.

"

L'art. 15 déroge ainsi au principe qu'un propriétaire ne peut être dépossédé de sa propriété, en dehors de son consentement, que par la voie de l'expropriation pour cause d'utilité publique ; mais la question se pose de savoir si ce texte n'a pas une portée plus considérable encore, et si, en déclarant que les arrêtés du préfet attribuent definitivement au chemin le sol compris dans les limites qu'ils déterminent », et que « le droit des propriétaires riverains se résout en une indemnité », il n'a pas entendu faire échec à la règle proclamée dans l'art. 17 de la Déclaration des droits de l'homme, reproduite dans l'art. 545, C. civ., et dans l'art. 10 de la Charte constitutionnelle du 4 juin 1814 (S. 1 vol. des Lois annotées, p. 894), devenu l'art. 9 de la Charte de 1830, et dont l'art. 53 de la loi du 3 mai 1841 fait application, que nul ne peut être privé de sa propriété, si ce n'est sous la condition d'une juste et préalable indemnité. En d'autres termes, l'art. 15 n'attribue-t-il pas à la décision administrative fixant les limites d'un chemin vicinal cet effet considérable, non seulement de rendre la commune propriétaire de tous les terrains compris dans ces limites, mais encore de lui en transférer la possession immédiate, sans que les propriétaires riverains dépossédés aient été préalablement indemnisés ? C'est en ce sens que l'Adminis

nal, le droit des propriétaires riverains sur les parcelles incorporées dans les limites nouvelles du chemin se résout en une indemnité, le paiement de cette indemnité n'en est pas moins une condition essentielle de l'expropriation, et doit précéder la prise de possession par la commune (2) (Id.).

D'autre pari, la prescription de deux ans, édictée par l'art. 18 de la loi du 21 mai 1836, pour l'action en indemnité des propriétaires à raison des terrains qui auront

tration a toujours interprété l'art. 15 de la loi du 21 mai 1836. Sans qu'il soit besoin de remonter jusqu'à l'instruction ministérielle du 24 juin 1836, qui enjoignait aux communes d'occuper, dés la décision préfectorale autorisant l'élar gissement d'un chemin, et avant même le paiement du prix ou sa fixation, les terrains compris dans les nouvelles limites du chemin, on peut rappeler que l'art. 21 de l'instruction générale sur le service des chemins vicinaux du 6 déc. 1870, après avoir prescrit que la décision ordonnant l'élargissement et fixant les limites d'un chemin vicinal soit notifiée aux propriétaires des terrains au moins dix jours avant la prise de possession, ajoute : A l'expiration de ce délai, et sauf l'exception qui concerne les terrains bâtis, il pourra être procédé à l'exécution des travaux, préalablement au règlement de l'indemnité (Instruction générale, éd. de 1909, p. 5).

Cette interprétation avait été également, jusqu'à ce jour, donnée par la jurisprudence, sans aucune dissidence. La Cour de cassation décide, en effet, que, par le seul effet de la décision administrative approuvant les limites d'un chemin vicinal, le propriétaire des terrains non bâtis incorporés au sol du chemin est dépouillé définitivement, non seulement de son droit de propriété (V.Cass. 12 août 1873, S. 1874.1.29. P. 1874.45; 28 févr. 1877, S. 1878. 1.453. P. 1878.1.189; 3 mai 1887, S. 1888.1.32. P. 1888.1.51; Pand. pér., 1887.1.247; 18 juill. 1893, S. et P. 1895.1.18, les notes et les renvois), mais encore de la possession de ses terrains. V. Cass. 12 août 1873, précité; 2 mars 1887 (S. 1890.1.439. - P. 1890.1.1067), et les renvois; 18 juill. 1893, précité, la note et les renvois; 6 janv. 1906 (sol. implic.), précité. De même, le Conseil d'Etat a fréquemment condamné le propriétaire riverain d'un chemin vicinal élargi, qui, après la décision administrative prévue à l'art. 15 de la loi de 1836, faisait acte de possession sur les parcelles comprises dans les limites de la voie nouvelle. V. Cons. d'Etat, 26 juill. 1889, Courtiade (S. 1891.3.89. P. chr.), et le renvoi; 24 mars 1893, Giraudet (S. et P. 1895.3.10), et les renvois; 30 juin 1899, Thuillier (S. et P. 1901.3.135), et le renvoi.

La grande majorité de la doctrine donne son adhésion à la solution admise par la jurisprudence. V. Dufour, op. et loc. cit.; Ducrocq, Cours de dr. admin., 7e éd., t. 6, n. 2268, p. 187; Berthélemy, Tr. élém. de dr. admin., 7° éd., p. 456; de Champagny, Tr. de la police municipale, t. 3, n. CCVI; Herman, op. cit., n. 143; Gisclard, op. cit., t. 1, n. 89; Féraud-Giraud, Servit. de voirie, t. 2, n. 613 et 614. Pour ces auteurs, le législateur de 1836, préoccupé de procurer aux communes le moyen de procéder rapidement à l'amélioration de leurs chemins publics, a voulu donner à l'Administration le droit de passer outre à la résistance des particuliers, lorsqu'il s'agit d'élargir un chemin vicinal. Cette dérogation aux principes s'explique, ajoutent-ils, par le peu d'étendue et la minime valeur qu'ont en général les parcelles de terrain qu'il s'agit, II PART. 39

servi à la confection des chemins vicinaux, prescription qui s'applique aussi bien à Vélargissement qu'à l'ouverture ou au redressement d'un chemin (1), commence à courir, non pas à compter de la décision de la commission départementale altribuant les terrains au chemin à élargir, mais seulement à partir de la prise de possession de ces terrains par la commune (2) (L. 21 mai 1836, art. 18).

En effet, la commune, qui peut avoir intérêt à différer l'exécution des travaux après qu'elle a été autorisée par la commission départementale à les entreprendre, ne saurait trouver dans ce retard un moyen de se soustraire à ses obligations, et d'invoquer, à l'encontre du propriétaire dépossédé, la prescription de deux ans de l'art. 18 de la loi du 21 mai 1836 (3) (Id.).

Si le juge de paix est, aux termes de

en cette hypothèse, d'incorporer au sol du chemin élargi, et elle se justifie par les avantages que procure aux riverains de la voie élargie l'amélioration de la viabilité de chemins qu'ils sont les premiers intéressés à voir susceptibles d'une circulation plus aisée.

Si le système que nous venons d'exposer peut se réclamer d'une pratique administrative et d'une jurisprudence constantes, approuvées par la majorité de la doctrine, il a néanmoins été vivement critiqué par certains auteurs, qui soutiennent que l'art. 15 de la loi du 21 mai 1836 n'a pas pour effet de porter atteinte à la règle qu'un propriétaire ne peut être dépossédé de son bien, s'il n'a été au préalable indemnisé. V. Dumay, Comment. de la loi sur les chemins vicinaux, t. 1, n. 60; Aucoc, Confer. sur le dr. admin., 3e éd., t. 2, n. 822; L. Delanney, Du paiement des terrains nécessaires à l'élargissement des chemins vicinaux, passim. A l'appui de cette seconde opinion, on fait observer que le législateur de 1836 n'a pu vouloir violer un principe qui, à l'époque, était expressément écrit dans le Code civil et dans la Constitution en vigueur (Charte de 1814, art. 10; Charte de 1830, art. 9), et qui, depuis 1789, a été proclamé par nos constitutions successives. Si les auteurs de la loi avaient eu cette pensée, ils n'auraient, dit-on, pas manqué de s'en expliquer formellement. Or, non seulement ils ne l'ont pas fait, mais, même, la disposition de l'art. 15, dans laquelle on voit la consécration implicite de cette dérogation, peut s'expliquer d'une tout autre manière. En déclarant que les arrêtés portant reconnaissance et fixation de la largeur d'un chemin vicinal attribuent définitivement au chemin le sol compris dans les limites qu'ils déterminent, l'art. 15 n'a pas dit autre chose, sinon que, par la décision portant reconnaissance et fixation de la largeur du chemin, le droit de propriété des riverains sur les parcelles comprises dans les limites du chemin est résolu, et transformé en un droit à une indemnité. C'est exactement l'effet que l'art. 18 de la loi du 3 mai 1841, qui reproduit textuellement l'art. 18 de la loi du 7 juill. 1833, attribue au jugement d'expropriation. Ce jugement éteint tous les droits réels qui existaient sur l'immeuble exproprié; ces droits sont transportés sur le prix On est fondé

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à en conclure que la loi de 1836 a voulu, dans le cas particulier visé par l'art. 15, simplifier les formalités de la procédure de l'expropriation pour cause d'utilité publique, en attribuant à une décision de l'autorité administrative les effets d'un jugement d'expropriation. Or, dans le système de

l'art. 15 de la loi du 21 mai 1836, compétent pour régler l'indemnité due à des propriétaires, à raison de terrains incorporés dans les limites d'un chemin vicinal, c'est au tribunal civil qu'il appartient de statuer sur l'exception tirée de la prescription de deux ans, opposée par la commune à la demande d'indemnité du propriétaire (4) (L. 21 mai 1836, art. 15, 18).

(Dupont C. Comm. de Lignol). - ARRÊT. LA COUR; Considérant que, par exploit de Le Nestour, huissier, en date du 24 avril 1909, Dupont a régulièrement ajourné, devant le tribunal civil de Pontivy, Le Feur, ès qualités de maire de la commune de Lignol, pour voir dire et juger que lui, Dupont, est propriétaire du n. 194, section K, du cadastre de la commune de Lignol, et, par suite, de la por

la loi du 3 mai 1841 (art. 16, 18 et 53), le jugement d'expropriation transmet à l'expropriant, d'une manière irrévocable, la propriété, mais non la possession, que l'exproprié conserve jusqu'au paiement ou à la consignation de l'indemnité.

On ajoute que les travaux préparatoires de la loi du 21 mai 1836 attestent que les auteurs de cette loi n'ont pas voulu donner une portée plus étendue à la décision de l'autorité administrative fixant les limites d'un chemin. Si l'on veut bien, dit-on, tenir compte que, dans le projet présenté par le gouvernement, l'art. 15 comprenait, outre sa disposition actuelle, les dispositions qui forment aujourd'hui l'art. 16, et qui organisent une véritable procédure d'expropriation, maintenant, comme nous l'avons vu (V. supra), l'exproprié en possession jusqu'au paiement ou à la consignation de l'indemnité, il paraît bien peu vraisemblable que les auteurs de la loi aient pu vouloir faire échec, dans la première partie du texte, au principe de l'indemnité préalable à la dépossession, qu'ils consacraient implicitement dans la seconde. Au surplus, le rapporteur à la Chambre des pairs s'est expliqué formellement sur le point en discussion, et son opinion va directement à l'encontre de la thèse de l'Administration et de la jurisprudence. Dans le rapport qu'il a présenté à la tribune de la Chambre des pairs, M. le comte Roy, après avoir exposé l'économie de l'art. 15, s'est exprimé en ces termes : « Il ne résulte pas cependant de cette disposition que le propriétaire du sol ou d'une partie du sol compris dans les limites fixées par l'arrêté du préfet puisse être immédiatement dépossédé du terrain qui lui appartient avant que l'indemnité qui lui est due ait été fixée et acquittée» (Chambre des pairs, séance du 25 avril 1836; Moniteur du 26, p. 871, 2o col.). Cette affirmation n'a soulevé aucune objection lors de la discussion générale, et la première partie de l'art. 15 a été adoptée sans discussion, à la séance du 2 mai (Moniteur du 3, p. 965, 3° col.), et est devenue l'art. 15 actuel.

Ces arguments très sérieux ont déterminé la Cour de Rennes à se rallier à l'opinion, d'après laquelle les propriétaires des parcelles incorporées au sol d'un chemin vicinal par la décision administrative qui en fixe les limites ne sont dépossédés de leurs terrains que par le paiement ou la consignation de l'indemnité. La thèse contraire a pour elle une jurisprudence si bien établie qu'on peut douter que l'arrêt ci-dessus recueilli provoque un revirement qui, à bien des égards, paraîtrait souhaitable. La thèse généralement admise peut,

tion retranchée de ce numéro, au profit de la voie publique, par un arrêté d'alignement du 5 juin 1908; voir dire qu'en tout cas, il a droit à une indemnité; le voir autoriser à poursuivre, ainsi que de droit, le paiement de cette indemnité; - Considérant que, devant le tribunal, Le Feur a conclu à ce que Dupont fût déclaré non recevable et mal fondé dans sa demande, et subsidiairement : 1o à ce qu'il fût renvoyé devant l'autorité administrative pour la détermination de l'assiette ancienne et nouvelle du chemin; 2o devant le juge de paix, par application de l'art. 15 de la loi du 21 mai 1836; Considérant que, par jugement du 15 déc. 1909, le tribunal de Pontivy a débouté Dupont de toutes ses demandes, fins et conclusions, et l'a condamné aux dépens; que ce jugement a été régulièrement frappé d'appel;

Si

en effet, entraîner, et entraîne en fait des abus. L'Administration, ne se considérant pas comme obligée de prendre l'initiative du règlement de l'indemnité, a pour règle, une fois en possession. d'attendre la réclamation du propriétaire. celui-ci est ignorant ou inactif, il pourra se voir opposer, au bout de deux ans, la prescription (V. infra, note 2-3). D'autre part, dans bien des cas, l'Administration ne s'assure pas, avant de provoquer la décision autorisant l'élargissement d'un chemin, que la commune est en mesure de payer les terrains nécessaires. Il s'ensuit qu'une fois les travaux exécutés, les riverains dépossédés sont obligés d'attendre pendant longtemps, faute de crédits, le paiement des indemnités qui leur sont dues. V. au surplus, notre Rép. gén. du dr. fr., vo Chemin vicinal, n. 709; Pand. Rep., v° Chemins vicinaux, n. 308.

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(1) L'art. 18 de la loi du 21 mai 1836 déclare prescrite par deux ans l'action en indemnité des propriétaires pour les terrains qui auront servi à la confection des chemins vicinaux. Il semble bien qu'il ne peut faire difficulté que, dans l'expression la confection des chemins vicinaux le législateur a entendu comprendre aussi bien l'élargissement que l'ouverture ou le redressement de ces chemins, et qu'il a voulu que la prescription biennale s'appliquât même dans le cas où un propriétaire a été dépossédé en vue de l'élargissement d'un chemin vicinal. V. en ce sens, Trib. de Marseille, 12 mai 1880 (sol. implic.) (S. 1881.2.70. P. 1881.1.471). Toutefois, la question est controversée. V. en sens contraire, Douai, 5 août 1843 (S. 1844.2.24.-P. 1844.1.164); et Gisclard, Code des chem. vicinaux, t. 1er, n. 137.

(2-3) L'opinion la plus générale se prononce dans le sens de l'arrêt ci-dessus recueilli, et décide que la prescription biennale de l'action en indemnité du propriétaire dont les terrains ont été empris pour la confection de chemins vicinaux, court seulement du jour de la prise de possession du terrain par la commune. V. Trib. de Marseille, 12 mai 1880 (S. 1881.2.70.-P. 1881.1.471), et les renvois. Adde, Gisclard, Code des chem. vicinaux, t. 1o, n. 91; Rabany et Monsarrat, Tr. prat. de la voirie, t. 1er, n. 119; et notre Rép. gen. du dr. fr., vo Chemin vicinal, n. 765; Pand. Rep., v° Chemins vicinaux, n. 395. V. cep. les autorités citées en sens contraire sous Trib. de Marseille, 12 mai 1880. précité.

(4) V. dans le même sens, Trib. de paix de Marseille, 7 nov. 1879 (S. 1881.2.70. - P. 1881.1.471). V au surplus, la note sous ce jugement

En fait : Considérant que la parcelle litigieuse, faisant partie du n. 194, et appartenant à Dupont, a été comprise au plan d'alignement du chemin vicinal ordinaire n. 1, de Lignol à Ploudat, approuvé par la commission départementale du Morbihan, le 17 août 1891; Considérant qu'il n'est pas contesté que Dupont, par lui ou par ses auteurs, est maître de ce terrain, qui est demeuré au même et semblable état qu'avant 1890, et que c'est lorsqu'il a demandé l'alignement pour construire que les difficultés ont pris naissance; que le maire de la commune, par lettre du 3 mars 1908, refusait de donner satisfaction à Dupont tant que celui-ci n'aurait pas prouvé son droit de propriété; que, renonçant à soutenir ce moyen devant le tribunal, il a prétendu que la décision de la commission départementale avait opéré de plein droit l'expropriation de la parcelle litigieuse au profit de la commune; que les droits du propriétaire avaient été convertis en un droit à une indemnité (L. 21 mai 1836, art. 15), et que, aux termes de l'art. 18 de la même loi, l'action en indemnité était prescrite;

:

En droit - Considérant qu'aux termes de l'art. 545, C. civ., nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n'est pour cause d'utilité publique et moyennant une juste et préalable indemnité; que la loi du 21 mai 1836, qui a eu pour but de simplifier les formalités d'expropriation pour cause d'utilité publique, en ce qui concerne les chemins vicinaux, n'a pas porté atteinte au principe tutélaire du paiement préalable de l'indemnité; que si, à partir de la décision de la commission départementale, à qui la loi du 10 août 1871 a conféré les attributions dévolues au préfet par la loi de 1836, le droit des propriétaires riverains se résout en une indemnité, le paiement de cette indemnité n'en est pas moins une condition essentielle de l'expropriation, et doit précéder la prise de possession de la commune;

Considérant que le propriétaire exproprié puise bien, dans l'acte administratif qui l'exproprie, le droit de poursuivre le règlement de l'indemnité, de manière à ne pas être forcé de conserver une propriété devenue précaire, mais que la commune, qui peut avoir intérêt à différer l'exécution des travaux autorisés, ne saurait trouver dans ce retard un moyen de se soustraire à ses obligations, et soutenir qu'elle s'est libérée du paiement de l'indemnité

(1-2-3) La provocation adressée à des militaires dans le but de les détourner de leurs devoirs militaires et de l'obéissance due à leurs chefs dans ce qu'ils leur commandent pour l'exécution des lois et règlements militaires et la défense de la Constitution républicaine, est, en vertu de l'art. 25 de la loi du 29 juill. 1881, sur la presse, modifiée par la loi du 28 juill. 1894 (S. et P. Lois annotées de 1894, p. 809; Pand. pér., 1895.3.126), de la compétence de la Cour d'assises ou du tribunal de police correctionnelle, d'après les distinctions suivantes. Si la provocation est inspirée par un but de propagande anarchiste, elle est, bien qu'elle soit publique, déférée aux tribunaux de police

par la prescription de deux ans prévue par la loi de 1836; que cette prescription ne peut être par elle invoquée que tout autant qu'au fait légal de l'expropriation, que les intéressés ont pu ignorer, viendra se joindre le fait matériel de la prise de possession; Considérant que l'intention du législateur de 1836 a été fort bien appréciée par la circulaire du ministre de l'intérieur du 24 juin 1836 : il faut éviter que des propriétaires qui ont consenti à l'occupation de leurs terrains par la commune puissent venir, longtemps après, formuler des réclamations tardives; - Considérant qu'il serait contraire à toutes les règles du droit qu'une partie put prescrire sans avoir, en fait, possédé, et à toutes les règles de l'équité et de la justice, qu'une autre partie pût perdre sa propriété, comme conséquence d'un acte qu'elle aurait pu ne pas connaître, et alors qu'aucune négligence ne lui serait imputable; Considérant, au surplus, que les termes de l'art. 18 de la loi de 1836 sont formels : L'action en indemnité des propriétaires pour les terrains qui auront servi à la confection des chemins vicinaux et pour extraction de matériaux, sera prescrite par le laps de temps de deux ans ; - Considérant que les termes mêmes dont s'est servi le législateur montrent bien que la prescription partira, non pas d'un acte antérieur, mais du moment où le terrain aura servi à la confection du chemin; Considérant que le mot de confection » s'applique aussi bien à l'ouverture qu'au redressement ou à l'élargissement d'un chemin, mais ne saurait s'appliquer à l'acte d'expropriation; Considérant, enfin, que l'art. 18 fournit un autre argument de texte, en édictant la même prescription pour les indemnités dues à raison de terrains ayant servi à la confection des chemins vicinaux que pour les indemnités dues à raison de ceux ayant servi pour extraction de matériaux; qu'il est bien certain que, dans ce dernier cas, c'est à partir du moment où, l'extraction terminée, Î'indemnité peut être calculée, que part le délai de prescription, et non à partir de l'arrêté qui a autorisé l'occupation temporaire; Considérant, dès lors,

que c'est à tort que le jugement dont est appel a accueilli l'exception de prescription invoquée par la commune et, débouté Dupont de toutes ses fins et conclusions;

Considérant que le tribunal était compétent pour statuer sur le principe de l'in

correctionnelle, conformément à l'art. 1o de la loi du 28 juill. 1894, combiné avec l'art. 25 de la loi du 29 juill. 1881, déjà modifié par la loi du 12 déc. 1893 (S. et P. Lois annotées de 1894, p. 649; Pand. pér., 1895.3.33); si elle est publique, mais inspirée par un autre but que la propagande anarchiste, elle est déférée à la Cour d'assises, conformément aux art. 25 et 45 de la loi du 29 juill. 1881, sur la presse, qui reprennent dans ce cas leur empire, l'art. 1er de la loi du 28 juill. 1894 n'ayant prévu la compétence correctionnelle que lorsqu'il y a eu propagande anarchiste. Enfin, si la provocation n'a pas été publique, il importe peu qu'elle ait ou non eu pour but la propagande anarchiste; dans

demnité qui était contestée, mais que le juge de paix est seul compétent, aux termes de la loi de 1836, pour déterminer le montant de cette indemnité; Considé

rant que, devant le tribunal, les deux parties avaient reconnu la compétence du juge de paix, Dupont, en demandant à être autorisé à poursuivre ainsi que de droit le paiement de cette indemnité, et Le Feur, par ses conclusions très subsidiaires; que, si le tribunal a été saisi, c'est par suite de l'attitude de la commune de Lignol, qui concluait au débouté pur et simple de Dupont, et contestait qu'il eût droit à une indemnité; que la commune succombe donc dans ses prétentions et doit être condamnée en tous les dépens;

Par ces motifs;- Réforme etmet à néant le jugement dont appel; - Et, faisant ce que les premiers juges auraient dû faire, dit que la prescription de l'art. 18 de la loi du 21 mai 1836 n'a pu commencer à courir qu'à partir de l'occupation du terrain par la commune;-Rejette, en conséquence, l'exception de prescription soulevée par la commune; renvoie les parties devant le juge de paix compétent pour la fixation de l'indemnité due à Dupont; décharge Dupont de la condamnation aux dépens pro noncée contre lui; déboute la commune de toutes ses demandes, fins et conclusions contraires au présent arrêt, etc.

Du 11 juill. 1910. - C. Rennes, 2o ch. MM. de Savignon-Larombière, prés.; Mahoudeau, av. gén.; Chauveau et Charlier, av.

PARIS 26 octobre 1911. ANARCHISTES, PROVOCATION ADRESSÉE A DES MILITAIRES, LETTRE MISSIVE, PUBLICITÉ (ABSENCE DE), COMPÉTENCE, TRIBUNAL DE POLICE CORRECTIONNELLE (Rép., v° Menées anarchistes, n. 58; Pand. Rép., vo Presse, n. 742 et s.).

Est de la compétence du tribunal de police correctionnelle le délit résultant de l'envoi à divers militaires, par la poste et par pli fermé, d'écrits contenant une provocation à la désobéissance (1) (L. 28 juill. 1894, art. 2).

En effet, même au cas de pluralité d'envois, il y a là un fait qui, à raison du caractère personnel de la correspondance, est exclusif de publicité (2) (Id.).

Il en est ainsi surtout, alors que les lettres contenaient un mandat postal à l'adresse du destinataire (3) (Id.).”

l'un et l'autre cas, elle sera déférée au tribunal de police correctionnelle, en vertu de l'art. 2 de la loi du 28 juill. 1894. V. sur ces différents points, S. et P. Lois annotées de 1894, p. 813,814 et s., 816, notes 5, 9, 11 et 17; Le Poittevin, Tr. de la presse, t. 2. n. 606, 609 et 611; Garraud, Tr. du dr. pén. fr., Suppl., n. 77; Loubat, Code de la législ. sur les anarchistes, p. 11, 47, et 50; Coulon, De la liberté de la presse; Comment. de la loi du 28 juill. 1894, p. 179 et 263; et notre Rép. gen. du dr. fr., v° Menées anarchistes, n. 27 et s., 56 et s., 58; Pand. Rep., vo Presse, n. 742 et s.

Il importe donc, pour déterminer, en cas de provocation à des militaires dans le but de les dé

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LA COUR; Considérant que l'ordonnance de renvoi du juge d'instruction, en date du 2 août 1911, qui, en droit, limite strictement le débat, porte uniquement sur l'envoi, par la poste, à des soldats, du factum considéré comme délictueux; Considérant que, même au cas de pluralité d'envois, l'envoi, à l'adresse d'un tiers, d'un pli fermé, dont le caractère personnel est accentué par l'insertion, sous ce pli, d'un mandat postal au nom et au bénéfice dudit tiers, constitue manifestement une correspondance privée, exclusive de publicité; Considérant, d'autre part, que la provocation incriminée, n'ayant pas été publique, est régie par l'avant-dernier paragraphe de l'art. 2 de la loi du 28 juill. 1894, lequel paragraphe défere aux tribunaux correctionnels une telle provocation

même dans le cas où elle n'aurait pas le caractère d'un acte de propagande anarchiste »; Par ces motifs; Rejette les conclusions prises; Confirme le jugement entrepris. etc.

Du 26 oct. 1911.

C. Paris, ch. corr. - MM. Bidault de l'Isle, prés.; Rambaud, av. gén.; Boucheron, av.

PAU 15 juillet 1913. FAILLITE, SAISIE IMMOBILIÈRE, CRÉANCIER CHIROGRAPHAIRE, POURSUITE COMMENCÉE (Rép., vo Faillite, n. 962; Pand. Rép., vo Faillite, liquidation judiciaire, etc., n. 4149, 8073).

Le créancier chirographaire, porteur d'un

tourner de l'obéissance, quelle est la juridiction compétente, de rechercher si la provocation a été publique. Dans l'espèce, la provocation était contenue dans des écrits adressés par la poste sous plis fermés, dans lesquels était enfermé un mandat d'argent au nom de chaque destinataire. Il est bien certain qu'en principe, un pareil mode d'envoi est exclusif de publicité, en matière de diffamation ou d'injures. V. Aix, 2 févr. 1899 (S.et P. 1899.2.168); Cass. 28 mars 1908 (S. et P. 1908.1.488; Pand. pér., 1908.1.488), les notes et renvois. Adde, Le Poittevin, op. cit., t. 1, p. 584, n. 530. En est-il ainsi, alors même que l'écrit incriminé a été envoyé à plusieurs personnes? La jurisprudence parait admettre que la distribution, à plusieurs exemplaires, de l'écrit incriminé peut constituer la publicité (V. Cass. 7 mai 1880, S. 1881.1.280. P. 1881.1.659; 18 nov. 1881, 2o arrêt, S. 1882.1.236. P. 1882.1.553; 22 oct. 1897, S. et P. 1898.1.112, et le renvoi. Adde, Le Poittevin, op. cit, t. 1er, p. 583, n. 530; Barbier, Code expliqué de la presse, 2e éd., par Matter et Rondelet, t. 1o, p. 251, n. 261), dès lors que cette distribution n'a pas été faite à titre confidentiel (V. Cass. 18 nov. 1881 et 22 oct. 1897, précités, et le renvoi), et à la condition encore, suivant la doctrine critiquable de l'arrêt de Cass. 31 déc. 1909 (Supra, 1 part., p. 59), qu'il ne soit pas tenu compte, pour déterminer l'élément de publicité, des distributions faites en dehors du ressort du tribunal saisi de la poursuite. V. la note sous l'arrêt. La Cour de cassation n'a pas jugé, in terminis, que ces principes fussent applicables à l'envoi à plusieurs personnes par la poste d'une lettre fermée. Mais un de ses arrêts a implicitement admis que l'envoi à plusieurs personnes de lettres missives contenant des imputations diffa

litre exécutoire, qui a commencé une poursuite en saisie immobilière, n'a pas le droit de la continuer après la faillite du débiteur (1) (C. comm., 443, 571, 572).

(Tort C. Conte).

LA COUR;

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Attendu qu'un jugement du tribunal de Mostaganem, en date du 14 déc. 1911, a condamné le sieur Conte fils à payer au sieur Tort une somme de 17.283 fr. 10; que Tort a pris hypothèque judiciaire en vertu de ce jugement; - Attendu que, le 4 avril 1912, Tort a signifié ce jugement à Conte et lui a fait commandement; - Attendu que, les 6 et 7 mai 1912, il a fait procéder à la saisie des immeubles appartenant à Conte, et que, le 13 mai, il a déposé le cahier des charges au greffe du tribunal civil; Attendu que, le 15 mai 1912. Conte a été déclaré en état de faillite. et que la date de cette faillite a été reportée au 5 août 1911, ce qui a rendu sans valeur l'hypothèque judiciaire prise par Tort; Attendu que, le 14 juin 1912, Conte père. créancier hypothécaire de son fils, a demandé au tribunal d'Orthez d'ordonner la discontinuation des poursuites commencées par Tort; - Attendu que celui-ci soutient que si, aux termes des art. 571 et 572, C. comm., les créanciers chirographaires ne peuvent, après la déclaration de faillite, commencer des poursuites en saisie immobilière et en expropriation forcée, ils sont en droit de continuer celles déjà entamées; Attendu que, aux termes de l'art. 443, C. comm., et conformément aux principes généraux en matière de faillite, toute poursuite individuelle, toute voie

matoires pouvait constituer le délit de diffamation. V. Cass. 7 nov. 1900 (S. et P. 1901.1.72). D'autre part. plusieurs des arrêts qui ont reconnu l'élément de publicité dans la distribution à plusieurs personnes d'un même écrit, lorsque cette communication n'a pas un caractère confidentiel, paraissent bien avoir statué dans des espèces où il s'agissait de plis fermés envoyés par la poste. V. Cass. 29 juill. 1858 (Bull. crim., n. 16); 7 mai 1880, précité. V. toutefois, mais pour le cas où la lettre n'a été envoyée qu'à deux destinataires, Cass. 28 mars 1908, précité. Enfin, la Cour d'Aix, dans l'arrêt du 2 févr. 1899, précité, en décidant qu'un écrit diffamatoire envoyé sous pli cacheté à diverses personnes ne présentait pas l'élément de publicité, si toutes précautions avaient été prises pour que le caractère confidentiel lui fût maintenu, a reconnu qu'il en aurait été différemment, si l'écrit n'avait pas été confidentiel. C'est de ces principes que l'arrêt ci-dessus s'est inspiré pour décider que la distribution à plusieurs militaires, par la voie de la poste et sous pli fermé, d'écrits contenant provocation à la désobéissance, n'était pas publique, et ressortissait dès lors à la police correctionnelle, qu'elle eût été ou non inspirée par un but de propagande anarchiste, si la correspondance avait un caractère purement personnel, accentué par l'insertion dans chaque lettre, au nom et au bénéfice du destinataire, d'un mandat postal.

(1) La question de savoir si le créancier chirographaire muni d'un titre exécutoire peut continuer, après la déclaration de faillite, les poursuites de saisie immobilière qu'il a commencées avant le. jugement déclaratif, a fait naître une controverse, dont nous avons exposé les éléments dans la note sous Montpellier, 31 oct. 1895 (S. et P. 1896.2.161).

At

d'exécution est interdite aux créanciers chirographaires, après la déclaration de faillite; que cette suspension des poursuites individuelles a lieu dans l'intérêt de la masse, représentée par le syndic; tendu, par suite, que, après le jugement déclaratif de la faillite, les créanciers ne peuvent poursuivre l'expropriation des immeubles sur lesquels ils n'ont pas d'hypothèque; que l'expression poursuivre, par elle-même, vise aussi bien les procédures commencées que celles qui ne le sont pas;

Attendu que l'art. 572, C. comm., vise l'état d'union, et décide que, s'il n'y a pas de poursuite commencée avant l'état d'union, les syndics seuls sont autorisés à poursuivre la vente; Attendu que l'art. 572, en se référant aux poursuites commencées, n'a eu en vue que les poursuites faites par ceux qui ont un droit à les exercer, c'est-à-dire les créanciers privilégiés ou hypothécaires; que l'on conçoit que le législateur ait fait une situation spéciale à ceux-ci, qui ont un droit distinct de celui de la masse; que les créanciers chirographaires, qui ont commencé des poursuites avant la déclaration de faillite, demeurent des créanciers chirographaires au même titre que les autres, et qu'il n'existe aucune raison pour créer en leur faveur une situation privilégiée, contraire aux principes généraux sur l'organisation et la marche de la faillite; - Par ces motifs; Confirme, etc.

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mencer 32

D'après un premier système, ce qui est interdit au créancier chirographaire, c'est seulement de « comdes poursuites de saisie immobilière après le jugement déclaratif; mais il peut continuer les poursuites commencées auparavant. V. en ce sens, Paris, 30 nov. 1839 (P. 1840.1.128); Bordeaux, 16 mars 1852 (P. 1853.1.94); Caen, 12 oct. 1861, et Rouen, 10 oct. 1862 (S. et P. 1896.2.161, ad notam); Angers, 22 mai 1874 (S. 1874.2.251. P. 1874.1042); Montpellier, 31 oct. 1895, précité, et les renvois. Adde, Carré et Chauveau, Lois de la proc., t. 5, quest. 2198, § 2, 4°, p. 410; Esnault, Tr. des faill. et des banquer., t. 3, n. 615.

Dans une seconde opinion, en faveur de laquelle se prononce l'arrêt ci-dessus, et qui est enseignée par le plus grand nombre des auteurs, on décide que le principe que les poursuites individuelles cessent lors de la déclaration de faillite s'applique même au cas de poursuites commencées, les poursuites de saisie immobilière commencées avant le jugement déclaratif ne pouvant pas être continuées après ce jugement. V. en ce sens, Bordeaux, 13 janv. 1865 (S.1865.2.144. — P. 1865.700). Adde, les renvois de la note sous Montpellier, 31 oct. 1895, précité; et Bravard-Veyrières et Demangeat, Tr. de dr. comm., 2e éd., t. 5, p. 133 et s.; Alauzet, Comment. du C. comm., t. 7, n. 2483; Ruben de Couder. Dict. de dr. comm., vo Faillite, n. 226; Boistel, Tr. élém. de dr. comm., 3o éd., n. 920; Lyon-Caen et Renault, Tr. de dr. comm., 3o éd., t. 7, n. 254; Rousseau et Defert, Code annoté des faillites, p. 415, § 2. V. au surplus, notre C. comm. annoté. par Cohendy et Darras, sur l'art. 443, n. 270 et s.; et notre Rép. gen. du dr. fr., v° Faillite, n. 960 et s.; Pand. Rép., vo Faillite, liquidation judiciaire, etc., n. 4149, 8073.

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