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nommés à ce grade antérieurement au 1er janv. 1904, qui ne passeraient dans l'artillerie qu'à la condition, acceptée par eux, de prendre rang à la suite des lieutenants d'artillerie nommés antérieurement à cette dernière date ou à cette date même. Un second décret, en date du 11 nov. 1909, a nommé dans l'arme de l'artillerie 150 lieutenants d'infanterie dans les conditions prévues par le décret du 11 oct. 1909. MM. Pellissier de Féligonde et autres lieutenants d'artillerie ont déféré ces deux décrets au Conseil d'Etat pour excès de pouvoir.

LE CONSEIL D'ÉTAT; Vu la loi du 24 juill. 1909, portant réorganisation de l'artillerie; la loi du 14 avril 1832, sur l'avancement dans l'armée, l'ordonn. du 16 mars 1838; les lois des 26 mars 1891 et 24 mai 1872; - Considérant que la loi du 24 juill. 1909, qui a créé de nouveaux corps d'artillerie, ne contenant pas de dispositions spéciales touchant la façon dont seront constitués les cadres d'officiers de ces nouveaux corps, il appartenait au Président de la République, en vue d'assurer l'exécution de cette loi, de parer à l'insuffisance constatée du recrutement normal des officiers pour permettre la constitution complète des cadres des nouvelles unités créées, en appelant, par mesure exceptionnelle, des officiers d'infanterie en nombre déterminé à passer dans l'artillerie; que le droit de prendre une mesure de cette nature n'est d'ailleurs pas contesté au chef de l'Etat par les requérants, qui se bornent à soutenir que les lieutenants d'infanterie, admis à passer dans l'artillerie, ne pouvaient conserver leur ancienneté, et devaient prendre rang après les lieutenants les moins anciens de l'arme de l'artillerie à la date de leur passage dans cette arme;

Mais considérant que l'art. 15 de la loi du 14 avril 1832 porte que l'ancienneté pour l'avancement sera déterminée par la date du brevet du grade » ; Considérant qu'aucun officier ne peut, en dehors du cas d'interruption de service, prévu

(1-2) La jurisprudence du Conseil d'Etat et de la Cour de cassation est bien établie, en ce qui concerne le caractère des contrats passés par les départements ou les communes, qui sont soumis à l'approbation de l'autorité supérieure, notamment en ce qui concerne les concessions de chemins de fer d'intérêt local ou de tramways, qui doivent faire l'objet d'une déclaration d'utilité publique par une loi ou par un décret (L. 11 juin 1880, art. 2 et 29). V. la note de M. Hauriou sous Cons. d'Etat, 14 févr. 1902, Blanleuil et Vernaudon (S. et P. 1904.3.81). D'après cette jurisprudence, la convention n'est définitive que lorsqu'elle a été approuvée par l'autorité supérieure; mais il y a néanmoins un lien de droit qui est immédiatement créé. V. Cass. 6 déc. 1875 (S. 1876.1.23. P. 1876.35);

12 déc. 1881 (S. 1882.1.353.-P. 1882.1.859). Il résulte de là que, si l'approbation n'est pas donnée, sans que ce refus provienne du fait des parties contractantes, celles-ci sont entièrement dégagées du lien de droit qui les unissait. V. Cons. d'Etat, 16 juin 1893, Chevalier et autres (S. et P. 1895.3.45); 10 févr. 1899, Soc. des chemins de fer à intérêts garantis (Rec. des arrêts du Cons. d'Etat,

par l'art. 16 de la loi du 14 avril 1832, être privé de son ancienneté, telle qu'elle est déterminée par les dispositions de cette loi, s'il n'a pas renoncé volontairement à cette ancienneté ou à une partie de ses avantages: Considérant qu'aucune disposition de loi n'obligeait le Président de la République à subordonner à une renonciation à leur ancienneté le passage dans l'arme de l'artillerie, sur leur demande, des lieutenants d'infanterie appelés à concourir à la formation des cadres des nouveaux corps d'artillerie créés par la loi du 24 juill. 1909; qu'il lui appartenait seulement de le faire, s'il le jugeait utile, et de préciser alors les avantages d'ancienneté auxquels ces officiers devraient renoncer pour être admis à changer d'arme; qu'en décidant, par le décret du 11 oct. 1909, dont le décret du 11 nov. 1909 n'a fait que l'application, que ces lieutenants, à l'exception de ceux dont l'ancienneté était antérieure au 1er janv. 1904, conserveraient leur ancienneté, et prendraient rang à la suite des lieutenants d'artillerie ayant la même ancienneté qu'eux, et que ceux des officiers d'infanterie admis à changer d'arme, dont l'ancienneté était antérieure au 1er janv. 1904, devraient renoncer à une partie des avantages de cette ancienneté, et prendre rang à partir de ladite date, le Président de la République n'a fait qu'user des pouvoirs qui lui appartenaient, et n'a porté aucune atteinte aux droits des requérants, tels qu'ils résultent des lois réglant l'état des officiers et les conditions de leur avancement; Art. 1er. La requête est rejetée.

Du 17 mars 1911. Cons. d'Etat. MM. Chareyre, rapp.; Blum, comm. du gouv.; Alcock et Bailby, av.

CONS. D'ÉTAT 17 mars 1911. CHEMIN DE FER, CHEMIN DE FER D'INTÉRÊT LOCAL, DÉPARTEMENT, CONCESSION, DECLARATION D'UTILITÉ PUBLIQUE, MINISTRE, MODIFICATIONS, CONSEIL GÉNÉRAL, RENON

p. 120). Si l'approbation n'est pas donnée pour une cause imputable à l'une des parties, celle-ci est responsable, vis-à-vis de l'autre, du préjudice qu'elle lui a causé, et passible de dommages-intérêts. Il en a été ainsi décidé à l'égard d'une commune qui avait déclaré renoncer à l'exécution de la convention. V. Cons. d'Etat, 14 févr. 1902, Blanleuil et Vernaudon, précité, avec la note de M. Hauriou. Il en est de même au cas où l'une des parties a provoqué le refus d'approbation par des procédés déloyaux. V. Cass. 6 déc. 1875, précité.

Toutefois, rien ne s'oppose à ce que l'une des parties contractantes fasse valoir devant l'autorité supérieure les motifs qui peuvent justifier le refus d'approbation. Il n'y a point là violation des engagements intervenus, puisque ces engagements sont subordonnés à approbation, et qu'il y a intérêt à ce que l'autorité supérieure soit éclairée. V. sur ce point, les conclusions de M. l'avocat général Reverchon, rapportées avec Cass. 6 déc. 1875, précité.

Enfin, dans le cas où l'autorité supérieure subordonne son approbation à des modifications de la convention intervenue, les parties contractantes, qui avaient traité dans des conditions déterminées, et

CIATION, INDEMNITÉ, FAUTE (ABSENCE DE) (Rép., v° Travaux publics [Concessions, entreprises, marchés de], n. 471, 1262 et s.; Pand. Rép., v Chemins de fer, n. 1709 et s.).

Les concessions de chemin de fer d'intérêt local ne peuvent produire un effet définitif que si l'utilité publique des travaux est déclarée et l'exécution des travaux autorisée par une loi (1) (L. 11 juin 1880, art. 2).

En conséquence, lorsque le ministre des travaux publics a, pour des motifs d'ordre technique et financier, refusé de provoquer la déclaration d'utilité publique d'une ligne de chemin de fer d'intérêt local, le conseil général peut décider qu'à raison des modifications essentielles prescrites par le ministre, il renonce à donner suite à la concession, qui imposerait de trop lourdes charges financières au département; et celle décision n'ouvre pas de droit à une indemnité au profit d'un particulier, avec lequel le département avait passé une convention pour la concession du chemin de fer (2) (Id.). (Casanova et Nobili C. Départ. de la Corse).

LE CONSEIL D'ÉTAT; Vu les lois des 10 août 1871, art. 46, et 11 juin 1880, art. 2; 28 pluv. an 8; Considérant que la convention passée, le 24 sept. 1903, entre le département de la Corse et les sieurs Casanova et Nobili, avait pour objet de concéder à ces derniers la construction et l'exploitation d'une ligne de chemin de fer d'intérêt local de Bastia à Erbalunga; Considérant que, des dispositions combinées de l'art. 46 de la loi du 10 août 1871 et de l'art. 2 de la loi du 11 juin 1880, il ressort que les concessions de chemins de fer d'intérêt local ne peuvent produire un effet définitif que si l'utilité publique des travaux est déclarée, et l'exécution des travaux autorisée par une loi; que les requérants soutiennent que la volonté des représentants du département a seule empêché l'accomplissement des conditions. auxquelles était subordonné l'effet utile de leur convention; Considérant qu'il résulte de l'instruction que le ministre des

:

qui n'étaient liées que dans cette limite, ne sont point obligées de faire une convention nouvelle, conforme aux dispositions imposées par l'autorité supérieure, alors même que ces dispositions seraient favorables à la partie. qui refuse de traiter à nouveau. Il en a été ainsi décidé dans le cas où l'Etat ne consent à accorder à un département, pour un chemin de fer d'intérêt local, qu'une participation financière inférieure à celle que prévoyait le contrat de concession (V. Cons, d'Etat, 1er mai 1891, Bardon, Mallet et C, S. et P. 1893.3.48; 12 juin 1891, Comp. des chemins de fer départementaux, Rec, des arrêts du Cons. d'Etat, p. 442); -- dans le cas où le ministre des travaux publics exige qu'un département substitue au tramway concédé un chemin de fer d'intérêt local, avec un tracé différent. V. Cons. d'Etat, 19 mars 1910, Comp. des chemins de fer à voie étroite de Chateaubriant à Erbray (S. et P. 1912.3.122; Pand. pér., 1912.3.122), et la

note.

Cette jurisprudence n'est que l'application des art. 1134 et 1147, C. civ. La décision recueillie est fondée sur ces principes, et conforme à la jurisprudence qui vient d'être rappelée.

travaux publics, saisi de divers projets successifs, préparés en vue de la concession aux sieurs Casanova et Nobilt d'une ligne de chemin de fer d'intérêt local, a refusé de les approuver et de provoquer la déclaration d'utilité publique, pour des motifs d'ordre technique et financier; qu'en particulier, en ce qui touche le projet faisant l'objet de la convention ci-dessus rappelée, en date du 24 sept. 1903, le ministre a subordonné son approbation à tout un ensemble de modifications, qui avaient pour effet de transformer entièrement la nature mème de la concession, ses conditions d'exécution et toute l'économie du projet; que, dans ces conditions, le conseil général a pu, sans manquer à ses engagements, décider, ainsi qu'il l'a fait par sa délibération du 4 oct. 1906, après une étude approfondie des modifications prescrites par le ministre, qu'il renonçait à donner suite à cette concession, qui imposerait de trop lourdes charges financières au départe ment; que les requérants n'établissent aucun fait pouvant engager la responsabilité du département, et pouvant donner ouverture, à leur profit, à un droit à indemnité;... (le reste sans intérêt).

Du 17 mars 1911. - Cons. d'Etat. MM. Wurtz, rapp.; Pichat, comm. du gouv.; Aguillon et Bernier, av.

CONS. D'ÉTAT 17 mars 1911.

COLONIES, AFRique occidentaLE FRANÇAISE, DAHOMEY, FAUTE DU SERVICE PUBLIC LOCAL, ACTION EN INDEMNITÉ, CONSEIL DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF, COMPÉTENCE (Rép., v° Colonies, n. 727 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 528 et s.).

C'est au conseil du contentieux administratif de l'Afrique occidentale française qu'il appartient de statuer en premier ressort sur une action en indemnité, formée par un ouvrier monteur d'un ouvrage métallique pour un chemin de fer, au Dahomey, à raison d'une maladie qu'il aurait contractée par suite d'une faute du service public local (1) (Ordonn., 21 août 1825, art. 160, § 13; 9 févr. 1827, art. 176, § 13; DD. 5 août 1881, art. 3; 7 sept. 1881; 22 juin 1904; 18 oct. 1904).

En conséquence, n'est pas recevable un

(1-2) Cette solution est certaine. Il s'agissait, en l'espèce, d'une demande d'indemnité à raison d'une faute d'un service public d'une colonie. Or, c'est là une demande qui rentre dans la compétence du conseil du contentieux administratif de la colonie, juge ordinaire du contentieux administratif local. V. comme applications, Cons. d'Etat, 6 avril 1906, Min. des colonies (S. et P. 1908.3.103; Pand. pér., 1908.3.103), la note et les renvois; 13 déc. 1907, Peytel (S. et P. 1910.3.28; Pand. pér., 1910.3.28), et la note. En ce qui concerne le Dahomey, cette compétence résulte du décret du 22 juin 1894 (Bull. off. du minist. des col., 1894, p. 479), dont l'art. 5 porte: « Le conseil d'administration du Dahomey et dépendances peut se constituer en conseil du contentieux administratif. Dans ce cas, il fonctionne conformément aux dispositions des décrets des 5 août et 7 sept. 1881, qui sont rendus applicables

recours formé directement devant le Conseil d'Etat contre une décision du ministre des colonies qui a rejeté la demande d'indemnité (2) (Id.).

(Mathias).

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LE CONSEIL D'ÉTAT: Vu les décrets des 5 août 1881, art. 3, et 7 sept. 1881; la loi du 24 mai 1872; Considérant que, dans sa requête, le sieur Mathias réclame au ministre des colonies, à titre de dommages-intérêts, une somme de 5.000 fr., à la suite de la maladie qu'il aurait contractée pendant son séjour dans l'Afrique occidentale française, où il avait été envoyé en qualité de chef monteur, par l'adjudicataire de la fourniture de la charpente métallique du pont d'Agouagou sur Ouémé, pour la construction du chemin de fer du Dahomey; que le dommage ainsi

causé devrait être attribué à des fautes du service public local, et engagerait la responsabilité de ce service; qu'ainsi, c'est devant le conseil du contentieux administratif de l'Afrique occidentale française que le sieur Mathias devait porter sa récla mation et non directement devant le Conseil d'Etat;... Art. Ier. La requête est rejetée.

-

Du 17 mars 1911. Cons. d'Etat. MM. Guéret-Desnoyers, rapp.; Pichat, comm. du gouv.; Coche, av.

CONS. D'ÉTAT 17 mars 1911.

COMMUNE, DROITS DE STATIONnement, Voie PUBLIQUE, DOMAINE PUBLIC NATIONAL, ASSIETTE, MODIFICATION (ABSENCE DE), KIOSQUE-BUVETTE, REDEVANCE, CONSEIL D'ETAT, RECOURS POUR EXCÈS DE POUVOIR (Rép., vo Commune, n. 1229; Pand. Rép., eod. verb., n. 3725 et s.).

La disposition de l'art. 133, § 7, de la loi du 5 avril 1884, d'après laquelle les recettes du budget ordinaire des communes comprennent le produit des permis de stationnement et de location sur la voie publique, s'applique aux redevances exigées des concessionnaires d'ouvrages qui, à raison de la légèreté des travaux, ne modifient pas l'assiette du domaine public (3) (L. 5 avril 1884, art. 133, § 7).

Elle s'applique notamment à un kiosque

dans toute l'étendue de la colonie du Dahomey et dépendances... Elle résulte également, pour le gouvernement général de l'Afrique occidentale française, dont fait partie le Dahomey, du décret du 18 oct. 1904 (Bull. off. du minist. des col., 1904, p. 1036), sur le conseil de gouvernement de l'Afrique occidentale française, dont l'art. 9 porte : « La commission permanente du conseil de gouvernement remplit, en ce qui concerne les services dépendant du gouvernement général, les attributions dévolues aux conseils d'administration des colonies de l'Afrique occidentale française. Elle est constituée en conseil de contentieux par l'adjonction de deux conseillers à la Cour d'appel... Le conseil du contentieux de l'Afrique occidentale française ainsi constitué fonctionne conformément aux décrets des 5 août et 7 sept. 1881 ..

(3-4-5) V. en ce sens, Cons. d'Etat, 2 juill. 1909,

buvette, alors même qu'il est encastré audessous du niveau normal d'une promenade, si la dalle de beton sur laquelle il est place ne peut avoir pour effet de modifier l'assiette de cette voie (4) (Id.).

Par suite, la redevance pour occupation du domaine public national par ce kiosque doit être perçue au profit de la commune. et non au profit de l'Etat (5) (Id.).

Est recevable le recours formé par une commune contre un arrêté préfectoral qui a établi une redevance au profit de l'Etat pour la concession d'un kiosque sur une voie publique dépendant du domaine public national (6) (L. 24 mai 1872, art. 9). Sol. implic.

(Ville de Lyon).

LE CONSEIL D'ÉTAT; - Vu les lois des 11 frim. an 7 et 5 avril 1884; 7-14 oct. 1790 et 24 mai 1872; 17 avril 1906, art. 4;

Considérant qu'aux termes de l'art. 133, $7, de la loi susvisée du 5 avril 1884, les recettes du budget ordinaire des communes comprennent le produit des permis de stationnement et de location sur la voie publique; que cette disposition s'applique notamment aux redevances exigées des concessionnaires d'ouvrages qui, à raison de la légèreté des travaux, ne modifient pas l'assiette du domaine public;

Considérant qu'en admettant, ce qui est contesté par la ville de Lyon, que le kiosque-buvette, dit banc de tisane », dont l'établissement, sur le quai de Retz, a été autorisé au profit du sieur BénierRollet, soit réellement encastré au-dessous du niveau normal et régulier de cette promenade sablée, il résulte de l'instruction que la dalle de béton sur laquelle il est placé ne saurait avoir pour effet de modifier l'assiette de cette voie du domaine public national; que, par suite, c'est sans droit que, par l'arrêté attaqué, le préfet du Rhône a établi une redevance annuelle de 250 fr. à verser à l'Etat par la ville de Lyon, à raison de l'occupation du domaine public par le kiosque précité, dont elle a adjugé la concession;..... Art. 1er. L'arrêté est annulé, dans celle de ses dispositions qui prescrit à la ville de Lyon de verser au Trésor une redevance annuelle de 250 fr., pour occupation du domaine public par le kiosque-buvette du quai de Retz.

Maire d'Ajaccio (S. et P. 1912.3.22; Pand. pér., 1912.3.22), et la note.

(6) Cette question a été examinée par M. le commissaire du gouvernement Pichat dans ses conclusions. La solution ne saurait faire doute; le Conseil d'Etat était bien compétent pour statuer sur la requête. En effet, il ne s'agissait pas de juger si un particulier occupant le domaine public devait ou non une redevance, cas auquel l'autorité judiciaire aurait été compétente, une redevance de cette nature étant assimilée aux contributions indirectes. V. Cons. d'Etat, 16 juill, 1886, Comm. de Courbevoie (Rec. des arrêts du Cons, d'Etat, p. 615). Il s'agissait de savoir si la redevance devait revenir à la commune ou bien à l'Etat, Le Conseil d'Etat s'était déjà prononcé implicitement dans le même sens. V. Cons. d'Etat, 2 juill. 1909, Maire d'Ajaccio (S. et P. 1912.3.22; Pand. pér., 1912.3.22).

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CONS. D'ÉTAT 17 mars 1911.

CULTES, CLOCHES (SONNERIES DE), RÈGLEMENT MUNICIPAL, EGLISE CATHOLIQUE, OBSEQUES CIVILES, OBSÈQUES FAITES EN DEHORS DU CULTE CATHOLIQUE, MAIRE, EXCÈS DE POUVOIR (Rép., vis Cloches d'église, n. 26 et s., Culte, n. 228 et s., Règlement de police ou municipal, n. 236 et s., 498 et s., 1521 et s.; Pand. Rép., vo Arrêté municipal, n. 312 et s., 332 et s., 953 et s.).

Un maire excède ses pouvoirs en autorisant l'usage des cloches de l'église catholique de la commune, soit pour des obsèques civiles (1) (LL. 9 déc. 1905, art. 27; 2 janv. 1907, art. 5, § 1; Décr., 16 mars 1906, art. 51).

...

Soit pour des obsèques faites en dehors du culte catholique (2) (Id.).

(Abbé Bourgeois et autres).

Le maire de Neubourg a pris, pour réglementer les sonneries de cloches religieuses et civiles, un arrêté qui contenait un art. 5, § 1, ainsi conçu: Le maire ou son délégué aura le droit de faire sonner les cloches de l'église pour annoncer le décès d'une personne qui désire être enterrée civilement, et au moment du départ du cercueil pour le cimetière. Les familles des personnes professant tout autre culte auront le même droit ». M. l'abbé Bourgeois, desservant de la paroisse, et plusieurs habitants, ont déféré cette disposi

(1) C'est un point certain qu'un maire excède ses pouvoirs, en prescrivant des sonneries civiles en dehors des cas prévus par l'art. 51 du décret du 16 mars 1906, c'est-à-dire hors du cas de péril commun et en dehors des circonstances où l'emploi des cloches est autorisé par les lois et règlements ou par les usages locaux. V. Trib. des conflits, 22 avril et 4 juin 1910, Abbé Piment et Abbé Mignon (S. et P. 1910.3.129; Pand. pér., 1910.3.129), et la note de M. Hauriou; Cons. d'Etat, 30 juill. 1909, Abbé Jourdan et autres (S. et P. 1912.3.39; Pand. pér., 1912.2.39), et les renvois en note; 8 juill. 1910, Abbé Bruant (S. et P. 1910.3. 129; Pand. pér., 1910.3.129); 13 janv. 1911, Abbé Bazergues (Supra, 3o part., p. 86), la note et les renvois. V. encore, Cons. d'Etat, 3 févr. 1911, Abbé Bouvard (Supra, 3° part, p. 104), la note et les renvois.

(2) Il s'agissait ici de sonneries ayant un caractère religieux, puisqu'elles annonçaient le décès et l'enterrement d'une personne morte en communion avec une religion. Mais la disposition de l'arrêté municipal qui les visait n'en était pas moins illégale, car elle permettait l'emploi des cloches d'une église affectée au culte catholique pour l'exercice d'un culte autre que le culte catholique. Or, il résulte des art. 4 et 13 de la loi du 9 déc. 1905 et de l'art. 5 de la loi du 2 janv. 1907 que le législateur a maintenu l'affectation exclusive des églises et de leurs dépendances immobilières ou mobilières, ce qui comprend les cloches (V. Leroy, La situation jurid. des églises catholiques, p. 116; Curet, Les communes et la loi de séparation, n. 303),

tion de l'arrêté municipal au Conseil d'Etat pour excès de pouvoir.

LE CONSEIL D'ÉTAT; Vu les lois des 9 déc. 1905 et 2 janv. 1907; le décret du 16 mars 1906; les lois des 7-14 oct. 1790 et du 24 mai 1872; Considérant, d'une

part, que, d'après l'art. 51 du décret du 16 mars 1906, rendu en exécution du § 3 de l'art. 27 de la loi du 9 déc. 1905, les cloches des églises ne peuvent être employées aux sonneries civiles que dans le cas de péril commun exigeant un prompt secours, et lorsque leur emploi est prescrit par les lois ou règlements ou autorisé par les usages locaux; d'autre part, que, d'après l'art. 5, § ler, de la loi du 2 janv. 1907, les édifices du culte et les meubles les garnissant sont, à défaut d'associations cultuelles, laissés à la disposition des ministres du culte et des fidèles pour la pratique de leur religion; Considérant que l'art. 5, S ler, de l'arrêté attaqué, en autorisant l'usage des cloches de l'église catholique de Neubourg, soit pour des obsèques civiles, soit pour des obsèques faites en dehors du culte catholique, permet de procéder à des sonneries non prévues par l'art. 51 du décret précité, et dans des conditions contraires aux prescriptions ci-dessus rappelées de la loi du 2 janv. 1907; qu'ainsi, les requérants sont fondés à soutenir que cette disposition est entachée d'excès de pouvoir;... Art. 1er. L'art. 5, ler, de l'arrêté du maire de Neubourg est annulé.

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Du 17 mars 1911. Cons. d'État. MM. Imbart de la Tour, rapp.; Pichat, comm. du gouv.

au culte qui y était pratiqué avant la loi de séparation des Eglises et de l'Etat, à l'exclusion de tout autre culte. V. en ce sens, les déclarations faites par M. Briand, ministre des cultes, lors de la discussion de la loi du 2 janv. 1907, à la séance de la Chambre des députés du 21 déc. 1906 (S. et P. Lois annotées de 1907, p. 319, note 22), et Circul. minist. des cultes du 3 févr. 1907 (J. off. du 4 févr. 1907, p. 937). Adde, comme application, Montpellier, 25 juill. 1911 (S. et P. 1912.2.143; Pand. pér., 1912.2.143), et la note. En ce qui concerne spécialement les cloches des églises, leur affectation exclusive au culte auquel est affectée l'église dont elles dépendent résulte très nettement des conditions dans lesquelles a été voté l'art. 27 de la loi du 9 déc. 1905, relatif aux sonneries de cloches. Ce texte a été adopté par la Chambre des députés, à la suite de la prise en considération d'un amendement de M. Alfred Le Roy, qui avait soutenu e qu'il fallait persister dans la législation de 1884, qui avait donné vingt et un ans de bonne harmonie (S. et P. Lois annotées de 1906, p. 250, note 149, 2 col.). Or, l'art. 100 de la loi du 5 avril 1884, qui régissait les sonneries de cloches avant son abrogation par la loi du 9 déc. 1905 et son remplacement par l'art. 27 de cette loi, et auquel le législateur de 1905 s'est référé, en l'adaptant sculement aux nécessités du régime nouveau, s'était inspiré d'un avis du comité de législation du Conseil d'Etat du 17 juin 1840.

J'ai fait passer,

avait dit le rapporteur de la loi du 5 avril 1884 à la Chambre des députés, dans l'art. 100, non pas seulement l'esprit, mais je dirai la lettre de l'avis

CONS. D'ÉTAT 17 mars 1911.

CULTES, SÉPARATION DES EGLISES ET DE L'ETAT, COMMUNE, ORGANISTE de l'Église, TRAITEMENT, INSCRIPTION AU Budget, DoNATION, CONDITION, REFUS D'APPROBATION, PRÉFET.

Un préfet n'excède pas ses pouvoirs, en refusant d'approuver l'inscription au budget d'une commune d'un crédit pour le paiement du traitement de l'organiste de l'église, bien que ce traitement constitue une charge d'une donation faite à la commune (3) (LL. 9 déc. 1905, art. 2, 9, § 14; 13 avril 1908).

(Comm. de Celles-sur-Plaine).

LE CONSEIL D'ÉTAT; - Vu la loi du 9 déc. 1905; Considérant que, d'après l'art. 2 de la loi du 9 déc. 1905, à partir du 1er janvier qui suivra sa promulgation, seront supprimées des budgets des communes toutes dépenses relatives à l'exercice des cultes; que cette prohibition générale et absolue ne permet pas de distinguer entre celles qui y étaient inscrites à titre de subventions municipales, et celles qui ne constituaient, pour les communes, que des charges des libéralités à elles faites; Considérant, dès lors, qu'en refusant d'approuver l'inscription au budget de Cellessur-Plaine d'un crédit de 300 fr., pour le paiement du traitement de l'organiste de l'église, bien que ce traitement constituât une charge d'une donation faite à la commune en 1860, le préfet a fait une exacte application de la disposition législative précitée, et que la commune requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision du préfet est entachée d'excès de pou

du Conseil d'Etat de 1840 » (S. Lois annotées de 1884, p. 578, note 184, 2 col. P. Lois, décr., etc. de 1884, p. 936, note 184, 2° col.). Cet avis du Conseil d'Etat portait que « les cloches des églises sont spécialement affectées aux cérémonies de la religion catholique; d'où il suit qu'on ne peut en exiger l'emploi pour les célébrations concernant des personnes étrangères au culte catholique, ni pour l'enterrement de celles à qui les prières de l'Eglise auraient été refusées en vertu des règles canoniques... (Journ. des conseils de fabrique, 18391840, p. 354).

(3) Cette solution ne saurait être contestée sous l'empire de la loi du 13 avril 1908, qui a modifié différentes dispositions de la loi du 9 déc. 1905, et qui, notamment, a complété le § 3 de l'art. 9 de cette loi par la disposition suivante: « § 14. L'Etat, les départements, les communes et les établissements publics ne peuvent remplir, ni les charges pieuses ou cultuelles afférentes aux libéralités à eux faites ou aux contrats conclus par eux, ni les charges dont l'exécution comportait l'intervention, soit d'un établissement public du culte, soit de titulaires ecclésiastiques ». Or, dans l'espèce, il s'agissait bien évidemment d'une charge cultuelle.

Mais les faits qui avaient donné lieu au pourvoi étaient antérieurs à la loi du 13 avril 1908, qui n'est, par suite, pas visée dans la décision recueillic. Le Conseil d'Etat a estimé que la même solution résultait de l'art. 2 de la loi du 9 déc. 1905, qui est conçu dans les termes les plus généraux, et que, sur ce point, la loi du 13 avril 1908 n'avait en rien innové.

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voir;... Art. 1er. La requête est rejetée. Du 17 mars 1911. Cons. d'Etat. MM. Georges Cahen, rapp.; Blum, comm. du gouv.

CONS. D'ÉTAT 17 mars 1911 (2 ARRÊTS).

1° CULTES, SÉPARATION DES EGLISES ET DE L'ETAT, LOIS DES 9 DEC. 1905 ET 2 JANV. 1907, PRESBYTERE, MINISTRE DU CULTE, PRÉFET, EXPULSION, VOIE ADMINISTRATIVE, SÉQUESTRE, AUTORITÉ JUDICIAIRE, RÉFÉRE, JUGEMENT, MAINTIEN PROVISOIRE.

20 CONSEIL D'ETAT, RECOURS, CURÉ, ARRÊTÉ PRÉFECTORAL, PRESBYTÈRE, EXPULSION, QUALITÉ POUR AGIR.

1° Il appartient au préfet, chargé d'assurer l'application de la loi, de poursuivre, par la voie administrative, en cas d'inaction de la commune propriétaire, et à défaut de toute autre procédure pouvant être utilement employée, l'évacuation des presbytères qui continuent à être indûment occupés par les ministres du culte (1) (LL. 9 déc. 1905; 2 janv. 1907). Ire espèce.

Mais, lorsqu'un presbytère a été mis sous séquestre, comme bien appartenant à la fabrique d'une église paroissiale, il dépend du séquestre de contraindre, par une action en justice, le ministre du culte en exercice à cesser son occupation illicite du presbytère; par suite, le préfet excède ses pouvoirs, en mettant le ministre du culte en exercice en demeure d'évacuer le presbytère, sous peine d'être expulsé par la force publique (2) (LL. 9 déc. 1905; 2 janv. 1907; 13 avril 1908). ld.

De même, lorsqu'un jugement rendu sur référé a ordonné que le ministre du culte en exercice serait maintenu en possession provisoire du presbytère, et que ce jugement n'a pas été infirmé par l'autorité competente, l'arrêté du préfet, ordonnant l'expulsion immédiate du ministre du culte, fail obstacle à l'exécution d'une décision de justice, et, par suite, il est entaché d'excès de pouvoir (3) (Id.). 2o espèce.

20 Un ministre du culte, agissant en qualité de curé de la paroisse, est recevable à déférer au Conseil d'Etat, pour excès de pouvoir, un arrêté, par lequel le préfel du département a ordonné son expulsion, en cette même qualité, du presbytère qu'il occupait (4) (L. 9 déc. 1905, art. 1 et 2). 2o espèce.

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(1-2-3) V. sur ces questions, les conclusions de M. Blum, commissaire du gouvernement, ci-dessus rapportées.

(4) Cette solution est fort intéressante. Dans l'affaire actuelle, M. le commissaire du gouvernement avait fait remarquer, avec beaucoup de raison, que l'arrêté du préfet portait atteinte aux droits que le curé prétendait lui appartenir personnellement, et que, par suite, le recours était recevable. Mais le Conseil d'Etat, dans la décision recueillie, ne s'est point placé à ce point de vue, et, en déclaANNÉE 1913. 9 cah.

La fabrique s'est considérée, pendant près d'un siècle, comme propriétaire de fimmeuble ainsi légué, et, au lendemain de la loi de séparation, le presbytère a été compris, par un arrêté préfectoral du 13 déc. 1906, parmi les biens de la fabrique placés sous séquestre. M. l'abbé Bouchon, alors curé de Puijard, ayant refusé de passer un bail avec la commune pour la jouissance du presbytère, et ayant, d'autre part, refusé d'évacuer cet immeuble, le préfet de la Gironde a pris un arrêté le mettant en demeure de quitter le presbytère dans un délai de quinze jours. M. l'abbé Bouchon, sur la notification qui lui a été faite de cet arrêté, a, d'une part, formé contre cet arrêté un recours pour excès de pouvoir; d'autre part, il a assigné l'Administration de l'enregistrement, prise en qualité de séquestre, à l'effet d'obtenir sa réintégration. La procédure judiciaire a suivi son cours, et, par un jugement du 13 janv. 1908, le tribunal civil de Bordeaux, faisant droit à la demande de l'abbé Bouchon, a ordonné sa réintégration dans le presbytère. L'Administration de l'enregistrement a formé appel de ce jugement devant la Cour de Bordeaux, et, au cours de l'instruction de l'affaire, un fait nouveau, imprévu, et inconnu, semble-t-il, de toutes les parties en cause, s'est révélé. On a découvert, en effet, dans les minutes de l'étude du notaire de Puijard, un acte de vente en date du 22 sept. 1817, postérieur, par conséquent, au testament, et par lequel l'abbé Dubreuil avait vendu aux communes de Puijard et de Virsac, toujours pour servir au logement des desservants de ces deux communes, la maison presbytérale, à laquelle s'était précédemment appliqué son legs du 3 sept. 1815. L'acte de vente portait également sur les diverses dépendances de cette maison, sauf le pré et la vigne, que, dans ce contrat, l'abbé Dubreuil déclarait expressément réservés. Aucun doute ne pouvant s'élever ni sur le caractère de l'acte de vente, ni sur sa portée, aucune des parties intéressées n'a contesté devant la Cour de Bordeaux les effets de droit qui devaient en sortir; et la Cour, par arrêt du 3 mai 1909, a infirmé le jugement du 13 janv. 1908, et déclaré l'abbé Bouchon mal fondé dans son action.

C'est dans ces conditions que le Conseil d'Etat a été appelé à se prononcer sur le recours pour excès de pouvoir dont il avait été saisi.

M. Blum, commissaire du gouvernement, a présenté des conclusions dont nous extrayons ce qui suit :

Il est définitivement acquis que le presbytère, considéré pendant près d'un siècle comme bien de

rant le recours recevable, il a accentué les solutions qui ressortaient de ses décisions antérieures. Il avait été décidé que les ministres du culte, en leur qualité de fidèles, étaient recevables à déférer au Conseil d'Etat des arrêtés portant atteinte au libre exercice du culte, garanti par la loi du 9 déc. 1905. V. not., Cons. d'Etat, 28 juill. 1911, Rougegré et autres (S. et P. 1912.3.97; Pand. pér., 1912.3.97), et les conclusions de M. Chardenet, commissaire du gouvernement. Dans la décision recueillie, le Conseil d'Etat a admis que l'organisation gé

fabrique, mis sous séquestre comme bien de fabrique, et sur lequel l'abbé Bouchon avait prétendu un droit d'usufruit contre le séquestre de la fabrique, appartient en réalité aux communes de Puijard et de Virsac. Cela étant, l'arrêté qui vous est déféré, et qui avait pour objet de provoquer l'expulsion du sieur Bouchon hors de ce pres bytère, est-il entaché d'excès de pouvoir?

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Nous croyons tout d'abord que la légalité do cet arrêté ne pouvait dépendre en aucune façon des clauses du testament ou de l'acte de vente, et c'est ce qui nous parait résulter d'une façon très nette de la jurisprudence du Tribunal des conflits, telle qu'elle résulte notamment des décisions du 23 mars 1907, Evêque de Nice (S. et P. 1907.3.130) du 20 avril 1907, Basse C. Préfet du Puy-de-Dôme (S. et P. 1907.3.131), toutes deux conformes aux conclusions de M. l'avocat général Feuilloley, et du 2 mai 1907, Abbé Septfonts (Rec. des arrêts du Cons. d'Etat, p. 397). Le sens de cette jurisprudence nous paraît, en effet, être le suivant. Si l'ecclésiastique allègue simplement, pour demander son maintien ou sa réintégration dans un immeuble à affectation cultuelle, des droits résultant de l'usage, ou de sa seule qualité ecclésiastique, aucune action devant l'autorité judiciaire ne lui est ouverte, parce que cette action aurait exclusivement le caractère d'une demande tendant à faire obstacle à l'exécution des pouvoirs qui appartiennent à l'Administration pour faire exécuter la loi de séparation des Eglises et de l'Etat. Si on allègue, au contraire, comme c'était le cas en l'espèce, des droits ou des obligations résultant d'un titre civil, s'il s'agit d'un testament ou d'un contrat de vente, comme les contrats qui régissent les biens à affectation cultuelle n'ont pas cessé d'être des contrats de droit civil, et qu'aucun texte sur ce point n'a dérogé au droit commun, les tribunaux civils restent compétents. Mais cette action est tout à fait indépendante de l'exécution administrative, puisqu'elle peut être introduite, alors même que la procédure administrative serait arrivée à son terme et aurait abouti à des voies d'exécution forcée. Rien, en principe, ne faisait donc obstacle à ce que le préfet de la Gironde agît, vis-à-vis d'un presbytère grevé d'une charge d'habitation ou d'usufruit au profit des desservants, comme il aurait agi vis-à-vis d'un presbytère dont la commune aurait eu la propriété entière, nette et libre de toute charge. L'action administrative, en l'absence de tout jugement acquis et passé en force de chose jugée, n'avait pas à s'arrêter devant l'exhibition d'un titre civil, ou devant le fait qu'une action fondée sur ce titre avait été portée devant l'autorité judiciaire.

La question de savoir si le desservant de la commune était ou non en droit d'opposer un titre est une question dans laquelle l'autorité administrative n'avait pas à entrer, par la raison qu'elle échappait radicalement à sa compétence, et qu'elle supposait l'examen ou même simplement la connaissance de titres et dates dont l'interprétation appartenait exclusivement aux tribunaux civils.

nérale du culte catholique comporte des ministres du culte exerçant les fonctions de curés dans les paroisses, et que, par suite, un curé est recevable, en cette qualité, à déférer au Conseil d'Etat un arrêté qui porterait atteinte à l'exercice de ses fonctions de curé de la paroisse. Ce n'est donc plus la qualité de fidéle, incluse dans celle de ministre du culte, que retient le Conseil d'Etat, pour déclarer le recours recevable, c'est la qualité même de curé de la paroisse, appartenant au ministre du culte qui exerce le recours.

III PART. 17

L'autorité administrative et l'autorité judiciaire se meuvent, en cette matière, dans des sphères parfaitement indépendantes, où chacune ne se trouve limitée dans son action que par l'obligation de ne pas détruire l'effet des décisions déjà prises compétemment par l'autre. L'autorité judiciaire ne pourra, par le dispositif de ses jugements, prescrire des mesures dont l'exécution irait à l'encontre des actes administratifs déjà accomplis. L'autorité administrative ne pourra prendre des mesures dont l'exécution pourrait contrarier ou annuler l'effet des décisions de justice, déjà passées en force de chose jugée. Mais, en l'absence d'une décision de justice exécutoire, ce qui était le cas en l'espèce, la situation était bien claire, et c'est en tenant compte du testament ou du titre de vente, opposé par l'abbé Bouchon, que le préfet de la Gironde aurait, en réalité, excédé ses pouvoirs et empiété sur les attributions de l'autorité judiciaire.

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On peut donc poser en fait, à notre avis, que la question de savoir si le testament de 1815 ou l'acte de vente de 1818 créaient ou non, en faveur des desservants successifs de la commune, un droit d'habitation on d'usufruit, et si cette clause avait conservé sa valeur depuis la mise en vigueur des lois de séparation, échappait nécessairement au préfet de la Gironde; qu'il devait ignorer cette question, et agir, pour assurer l'exécution de la loi, comme si la commune avait repris l'entière possession du presbytère qui lui appartenait, quitte, bien entendu, à l'abbé Bouchon à faire valoir ses droits devant l'autorité judiciaire, seule compétente pour les apprécier et les reconnaître.

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Mais, à supposer le presbytère libre de toute charge, le préfet se trouvait-il dans un des cas où votre jurisprudence reconnaît à l'autorité administrative le droit d'assurer elle-même, et par tous les moyens de contrainte dont elle dispose, l'exécution de ses dispositions? Sur ce point encore, la jurisprudence est aujourd'hui définie d'une façon parfaitement certaine et parfaitement nette, et c'est ce qui résulte de la décision du Tribunal des conflits du 2 déc. 1902, Soc. immobilière de Saint-Just (S. et P. 1904.3.17, avec les conclusions de M. le commissaire du gouvernement Romieu, et la note de M. Hauriou); des décisions du Conseil d'Etat des 19 févr. 1904, Dame Bernier (S. et P. 1906.3.73) et 12 mars 1909, Comm. de Triconville (S. et P. 1909. 3.51: Pand. pér., 1909.3.51, avec les conclusions de M. le commissaire du gouvernement Chardenet). Il résulte de ces décisions et des conclusions de MM. Romieu et Chardenet, présentées sur ces affaires, que, pour que l'exécution administrative soit possible, il faut que quatre conditions soient remplies: Il faut, tout d'abord, que l'Administration se trouve en présence d'une situation illégale, et qu'il est de son devoir de faire cesser, en tant qu'autorité chargée d'assurer l'application de la loi. C'était le cas, puisque les lois du 9 déc. 1905, art. 2, et du 2 janv. 1907, art. 1, s'opposaient, en termes formels et généraux, à ce qu'un ministre du culte continuât à occuper gratuitement un presbytère appartenant à la commune. Il fallait aussi que la mesure d'exécution n'eût pas d'autre objet que d'assurer l'obéissance stricte à la loi, et c'était encore le cas. Mais il fallait, en plus, qu'on se trouvât en présence d'une désobéissance, d'une rébellion à la loi, qu'il fût du devoir de l'Administration de faire céder, et aussi que, pour venir à bout de cette désobéissance, de cette rébellion, aucune sanction d'un autre ordre ne fût possible, non seulement aucune sanction pénale, comme le disait la décision Dame Bernier, mais même aucune sanction judiciaire, comme le dit la décision Commune de Triconville, car, dans

les cas comme celui de l'espèce, une action civile peut être un procédé d'exécution aussi bien qu'une poursuite pénale. Il fallait, en un mot, qu'aucun autre procédé ne se présentât pour assurer l'exécution de la loi, l'exécution par voie administrative n'étant justifiée, en principe, que par la nécessité d'assurer l'obéissance à la loi et l'impossibilité de l'assurer par tout autre procédé juridique. En fait, dans l'espèce qui nous occupe, ces conditions ne se trouvaient pas remplies, à notre avis. Il est impossible, en effet, de considérer que la commune propriétaire ait refusé d'assurer, par les moyens judiciaires dont il lui appartenait d'user, l'exécution de la loi qui lui enjoignait de reprendre libre possession du presbytère lui appartenant, et cela pour la raison bien simple et bien évidente qu'au moment où est intervenu l'arrêt attaqué, la commune ignorait qu'elle fût propriétaire de ce presbytère.

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Nous nous trouvons ici en présence, non pas d'une commune refusant de faire valoir son droit de propriété, mais d'une commune ignorant son droit de propriété, et, dans cette ignorance, il nous est impossible de trouver l'élément de cette désobéissance, de cette rébellion, qui reste une des conditions essentielles de la légalité de l'exécution administrative. Rien ne nous dit, en l'espèce, que, si la commune avait connu son droit de propriété, et que si le préfet l'avait invitée à en user, elle eût refusé de déférer à cette invitation, qu'elle eût refusé, par exemple, d'imposer à l'abbé Bouchon un contrat de location, et que, si l'abbé Bouchon avait persisté, malgré les mises en demeure du maire, à occuper indument l'immeuble presbytéral, la commune se fût refusée à introduire devant l'autorité judiciaire une action tendant à son expulsion. Il ne nous paraît donc pas certain que l'attitude de la commune ait été de nature à justifier, en l'espèce, l'exécution par voie administrative; et si, pour examiner la légalité de l'acte qui vous est déféré, nous nous plaçons maintenant à la date à laquelle il a été pris, si nous nous reportons à la situation de fait qui existait à cette date, nous croyons que son illégalité devra vous apparaître encore plus certaine. Car enfin, le 9 juill. 1907, à la date où le préfet de la Gironde sommait l'abbé Bouchon, sous menace d'expulsion par la force, d'évacuer l'immeuble presbytéral, tout le monde ignorait encore que cet immeuble fût la propriété de la commune. La commune n'en avait pas repris possession. Bien au contraire, il avait été mis sous séquestre comme bien de fabrique, et c'est l'Administration des domaines qui en avait pris possession en cette qualité. Or, il nous paraît évident qu'à l'égard d'un bien de fabrique, placé sous séquestre par arrêté préfectoral et mis en possession de l'Administration des domaines désignée comme séquestre, l'expulsion par voie administra. tive n'était pas le seul procédé possible pour assurer l'obéissance à la loi. Une action judiciaire était possible, et cette action judiciaire était tout simplement l'action introduite devant l'autorité judiciaire par l'Administration de l'enregistrement, agissant en sa qualité de séquestre. Rien n'empêchait, lorsque l'arrêté attaqué a été pris, que le receveur séquestre introduisît, devant les juges civils, une action tendant à l'expulsion de l'abbé Bouchon hors du presbytère qu'il habitait indûment. Lorsque l'immeuble appartient à la commune, aucun texte ne donne au préfet le pouvoir d'engager une action de cette nature à la place de la commune, ou de contraindre la commune à l'exercer, et c'est précisément cette impossibilité où se trouve le préfet de contraindre la commune à agir judiciairement qui vous a fait reconnaître la nécessité, et par suite la légalité, des voies d'exé

cution administratives. Mais, vis-à-vis du séquestre, le préfet avait, à ce qu'il nous semble, les pouvoirs qu'il n'a pas vis-à-vis du maire. Il ne s'agit pas ici d'un séquestre nommé par les tribunaux et indépendant de l'autorité administrative; il s'agit d'un séquestré nommé par le préfet, et sur lequel, par conséquent, le préfet pouvait conserver l'autorité nécessaire pour le déterminer à introduire cette action judiciaire, dont la possibilité seule suffit pour exclure l'idée de l'exécution administrative.

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Nous arrivons donc à la conclusion suivante : l'arrêté attaqué est entaché d'excès de pouvoir, soit que l'on considère la situation de droit et de fait qui existait à l'époque à laquelle il a été pris, soit que l'on considère la situation actuelle, telle que l'arrêt de la Cour de Bordeaux la détermine. S'il s'agit d'un bien de fabrique dont l'Administra-, tion des domaines était séquestre, comme il est impossible d'exclure l'idée d'une solidarité entre l'Administration des domaines et l'Administration préfectorale, nous ne nous trouvons pas dans le cas où l'on puisse affirmer que l'exécution par voie administrative était le moyen d'assurer l'obéissance à la loi. S'il s'agit d'un presbytere appartenant à la commune, il n'est pas établi que la commune se soit refusée à entrer dans les voies d'action judiciaire qui lui étaient ouvertes, et par suite, nous ne nous trouvons pas dans un des cas que votre jurisprudence a prévus et réglés, c'est-à-dire les cas de désobéissance, ou, plus exactement, les cas de connivence, de collusion entre les anciens ministres du culte et les communes, pour échapper à l'application stricte de la loi. Dans l'une ou l'autre de ces hypothèses, l'arrêté du préfet de la Gironde était entaché d'excès de pouvoir, et nous concluons par suite à son annulation ».

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9 déc. 1905, 2 janv. 1907, 13 avril 1908, 7-14 oct. 1790, 24 mai 1872, et la loi de finances du 17 avril 1906, art. 4; - Considérant, que, s'il appartient au préfet, chargé d'assurer l'application de la loi, de poursuivre par la voie administrative, en cas d'inaction de la commune propriétaire, et à défaut de toute autre procédure pouvant être utilement employée, l'évacuation des presbytères qui continuent à être indûment occupés par les ministres du culte, il résulte de l'instruction qu'à l'époque où est intervenu l'arrêté du préfet de la Gironde du 9 juill. 1907, le presbytère de Puijard avait été mis sous séquestre comme bien faisant partie du patrimoine de la fabrique de l'église de Puijard; qu'il dépendait du séquestre de contraindre, par une action en justice, le ministre du culte en exercice à cesser son occupation illicite du presbytère; qu'il suit de là que le requérant est fondé à soutenir que l'arrêté précité du préfet de la Gironde, par lequel il a été mis en demeure d'évacuer le presbytère, sous peine d'en étre expulsé par la force publique, est entaché d'excès de pouvoir; .... - Art. 1er. L'arrêté est annulé. Du 17 mars 1911. Cons. d'Etat. MM. Guillaumot, rapp.; Blum, comm. du gouv.; Bailby, av.

20 Espèce.(Abbé Hardel). En 1820, Mile Fétu a fait donation de sa maison à la commune de Droué, sous condition que cet immeuble serait affecté à perpétuité au logement des curés de la paroisse. A la suite des lois du 9 déc. 1905

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