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publique dépendant de la grande voirie, est celle qui est tracée par les art. 4 et 5 de la loi du 21 juin 1898, et non plus la procé dure organisée par les déclarations royales des 18 juill. 1729 et 18 août 1730 (1) (Péclar., 18 juill. 1729 et 18 août 1730; L. 21 juin 1898, art. 4 et 5).

Et, en vertu de la loi du 21 juin 1898, c'est au conseil de préfecture seul qu'il appartient, si le propriétaire conteste l'état de péril de son immeuble et s'il n'a pas désigné son expert, de statuer, et de fixer, s'il y a lieu, le délai pour exécuter les travaux de démolition. En conséquence, un préfet excède ses pouvoirs, lorsqu'il enjoint au propriétaire d'une maison, sise le long d'une voie publique dépendant de la grande voirie (une route départementale), de la démolir pour cause de vétuste, en désignant d'office un expert, et en faisant démolir ledit immeuble, à défaut par le propriétaire de déférer à l'injonction à lui adressée (2 (Id.).

(Gaillot).

Par arrêté du 16 oct. 1909, le préfet de la Seine a prescrit à M. Gaillot, propriétaire d'une maison située à Bagnolet, en bordure d'une rue qui correspond à une traverse d'une route départementale, de démolir cette maison, qui, à raison de son état de vétusté, présentait un péril immiment pour la sécurité publique. Par arrêté du 13 avril 1901, il a désigné un expert pour constater l'état de la maison. Enfin, par arrêté du 3 juill. 1901, le préfet de la Seine a enjoint à M. Gaillot de démolir sa maison, et, devant son refus, il a fait procéder d'office à cette démolition. M. Gaillot ayant saisi le conseil de préfecture de la Seine d'une requête, tendant à l'annulation des arrêtés ci-dessus indiqués, le conseil de préfecture s'est déclaré incompétent. M. Gaillot a alors saisi le Conseil d'Etat d'un double recours, tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du conseil de préfecture de la Seine, et, d'autre part, à l'annulation des arrêtés du préfet de la Seine, pour excès de pouvoir. Ces recours ont été rejetés, par deux arrêts du 16 déc. 1904, rapportés S. et P. 1906.3.155, avec les conclusions de M. Saint-Paul, commissaire du gouvernement. Sur ces entrefaites, M. Gail

(1-2) Deux questions se sont posées après la promulgation de la loi du 21 juin 1898, qui, dans ses art. 3 à 6, relatifs aux réparations ou à la démolition des bâtiments menaçant ruine sur la voie publique, ne parle que du maire: 1° sous l'empire de cette loi, le préfet conserve-t-il une compétence quelconque, en ce qui concerne les dépendances de la grande voirie, ou bien la loi nouvelle n'a-t-elle pas eu pour effet de généraliser la compétence du maire et de l'étendre à tous les immeubles compris dans l'agglomération d'une commune, quelle que soit la nature des voies publiques dont ces immeubles sont riverains; 20 dans le cas où le préfet conserverait sa com pétence ancienne pour les immeubles riverains des voies dépendant de la grande voirie, ne doit-il pas procéder suivant les formes prescrites par la loi nouvelle? Le Conseil d'Etat a admis que la loi de 1898 ne touche point aux pouvoirs de fond

lot a saisi le tribunal de la Seine d'une demande tendant à la condamnation du préfet de la Seine, ès qualités, au paiement d'une indemnité, en réparation du dommage à lui causé par l'atteinte portée à sa propriété en dehors des formes prescrites par la loi. Le tribunal de la Seine s'est déclaré incompétent pour connaitre de cette demande. Mais, sur appel, la Cour de Paris a estimé que, dans le cas où les arrêtés du préfet de la Seine seraient entachés d'illégalité, on serait en présence d'une voie de fait, d'une violation du droit de propriété, et que l'autorité judiciaire serait seule compétente pour allouer une indemnité en réparation du dommage causé. Elle a, en conséquence, sursis à statuer jusqu'à ce que la juridiction administrative eût apprécié la légalité des arrêtés du préfet de la Seine. M. Gaillot a saisi le Conseil d'Etat de cette question de légalité. Le préfet de la Seine a soutenu que, pour les immeubles menaçant ruine situés en bordure de voies publiques dépendant de la grande voirie, la procédure applicable était celle résultant, non pas de la loi du 21 juin 1898, mais des déclarations royales des 18 juill. 1729 et 18 août 1730. D'après lui, la loi de 1898 n'était applicable que dans les cas où le maire, d'après la législation antérieure, était compétent pour déclarer le péril et pour prescrire la démolition; elle ne l'était pas, lorsque ce pouvoir appartenait au préfet, à raison de ses attributions sur les dépendances de la grande voirie.

LE CONSEIL D'ÉTAT; Vu les déclarations royales, en date des 18 juill. 1729 et 18 août 1730; les lois des 5 avril 1884, 21 juin 1898 et 24 mai 1872; Considérant, d'une part, que, par application de la loi du 21 juin 1898, c'est au conseil de préfecture seul qu'il appartient, si le propriétaire conteste l'état de péril de son immeuble, et s'il n'a pas désigné son expert, de statuer, et de fixer, s'il y a lieu, le délai pour l'exécution des travaux de démolition; Considérant, d'autre part, que la procédure à suivre pour ordonner la démolition d'édifices menacant ruine, riverains d'une voie publique dépendant, soit de la grande, soit de la petite voirie, est celle qui est tracée par les art. 4 et 5

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des préfets, à leur compétence, mais que la procédure à suivre, lorsque les préfets ont à intervenir, est celle réglée par la loi de 1898. V. Cons. d'Etat, 29 avril 1910, Dame Richard (Rec. des arrêts du Cons. d'Etat, p. 371). Adde sur la question, les conclusions de M. le commissaire du gouvernement Saint-Paul, rapportées avec Cons. d'Etat, 16 déc. 1904, Gaillot (2 arrêts) (S. et P. 1906.3.155). V. aussi le dernier de ces arréts. Dans l'affaire actuelle, le Conseil d'Etat n'a fait qu'appliquer ces principes.

(3) En dehors des cas de vices de construction et de malfaçons dans un ouvrage (V. sur ce point, Cass. 16 mai 1904, S. et P. 1910.1.132; Pand. pér., 1910.1.132, et les renvois), et en dehors des cas prévus par les art. 1792 et 2270, C. civ., l'architecte peut être déclaré responsable envers le maître de l'ouvrage, en sa seule qualité de mandataire et à raison d'une faute commise dans l'exécution de son mandat. V. Cass. 11 nov. 1885 (sol. implic.) (S.

de la loi du 21 juin 1898 et non plus la procédure organisée par les déclarations royales des 18 juill. 1729 et 18 août 1730;

Considérant, dès lors, que le préfet de la Seine, qui n'a pas saisi le conseil de préfecture, et n'a pas procédé conforméinent aux règles édictées dans les articles précités de la loi du 21 juin 1898, a méconnu les dispositions de ladite loi, et que ses arrêtés en date des 16 oct. 1300, 13 avril et 3 juill. 1901 sont, pour ce motif, entachés d'illégalité;... - Art. Ier. Sont déclarés illégaux les arrêtés du préfet de la Seine, en date des 16 oct. 1990, 13 avril et 3 juill. 1901, etc.

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Du 2 déc. 1910. Cons. d'Etat. MM. Guillaumot, rapp.; Blum, comm. du gouv.; de Ramel et Aubert, av.

CONS. D'ÉTAT 7 décembre 1910. ARCHITECTE, TRAVAUX PUBLICS, MANDAT, FAUTE ALLÉGUÉE, RESPONSABILITÉ, REVI SION DE COMPTE, FIN DE NON-RECEVOIR (Rép., vo Compte [Reddition de], n. 366 et s.; Pand. Rép., v° Mandat, n. 819 et s.).

L'art. 541, C. proc., qui met obstacle à la revision d'un décompte signé par les parties, sauf en cas d'omission, de faux ou de double emploi, s'il est opposable au maître de l'ouvrage, exerçant une action en revision de compte contre l'entrepreneur, ne l'est pas au maître de l'ouvrage, exerçant contre son architecte une action directe en responsabilité, à raison des fautes que ce dernier aurait commises dans l'accomplissement de son mandat (3) (C. civ., 1992; C. proc., 541).

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1886.1.303.

P. 1886.1.729). C'est ainsi qu'il sera responsable, à raison de négligences ou d'imprévisions du devis dressé par lui. V. Cons. d'Etat, 3 août 1906, Comm. de St-Quentin (Rec. des arréts du Cons. d'Etat, p. 757). Dans ces cas, l'entrepreneur est hors de cause; sa responsabilité ne peut être engagée. Mais l'architecte n'est pas fondé à opposer à l'action en responsabilité du maître de l'ouvrage une fin de non-recevoir tirée de l'art. 541, C. proc. En effet, si les règles posées par ce texte sont applicables aux décomptes dressés par les entrepreneurs de travaux publics et acceptés par l'Administration (V. Cons. d'Etat, 8 avril 1892, Ghislain, S. et P. 1894.3.30), il ressort des termes mêmes de l'art. 541, C. proc., que ses dispositions ne peuvent s'appliquer qu'entre les parties qui sont en compte. Or, le décompte des travaux d'une entreprise est arrété entre le maitre de l'ouvrage et son entrepreneur, et non point avec l'architecte.

tise, à l'effet de rechercher si, par suite de négligences imputables à cet architecte, dans l'exercice de ses fonctions, le montant du décompte, vérifié par lui, n'avait pas été majoré au détriment de la commune: Considérant que, par l'arrêté attaqué, le conseil de préfecture a mis l'entrepreneur hors de cause, par le motif que la revision d'un décompte signé par les parties ne saurait être autorisée, en dehors des cas prévus par l'art. 541, C. proc., et qu'il n'y a pas de pourvoi sur ce point; Mais considérant que ledit art. 541 n'est pas opposable à la commune de Retaud, exerçant contre son architecte une action directe en responsabilité, à raison de fautes que ce dernier aurait commises dans l'accomplissement de son mandat; que, dès lors, le requérant n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté attaqué, en tant qu'il a ordonné une expertise sur les conclusions prises par la commune contre son architecte;... Art. 1er. La requête est rejetée. Du 7 déc. 1910. Cons. d'Etat. MM. Guillaumot, rapp.; Corneille, comm. du gouv.; Brugnon, av.

CONS. D'ÉTAT 9 décembre 1910. BOIS COMMUNAUX, GARDES FORESTIERS, SALAIRE, FIXATION, CONSEIL MUNICIPAL, AVIS PRÉALABLE, COMMUNE, DÉPENSE OBLIGATOIRE, BUDGET, INSCRIPTION D'OFFICE, PREFET (Rép., vo Forêts, n. 1142 et s.; Pand. Rép., v Commune, n. 4436 et s.).

Le salaire des gardes des bois communaux, qui constitue une dépense obligatoire pour la commune, est réglé par le préfet sur la proposition du conseil municipal (1) (C. forest., 98; L. 5 avril 1884, art. 136, 6o).

Lorsque ce salaire a été ainsi réglé, le fait que le conseil municipal n'a inscrit au budget qu'une somme inférieure ne peut modifier la quotité de la dépense à la charge de la commune, et le préfet agit dans la limite de ses pouvoirs en inscrivant d'office la différence au budget de la commune (2) (L. 5 avril 1884, art. 136, 6o, 145 et 149).

(Comm. de Fabrezan).

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(1-2) C'est au préfet qu'il appartient de fixer le salaire des gardes des bois communaux, sur la proposition du conseil municipal, et il n'est pas tenu de se conformer à cette proposition. V. Cons. d'Etat, 8 janv. 1909, Comm. de Rouvres-sur-Aube (S. et P. 1911.3.48; Pand. pér., 1911.3.48), et la note. Le salaire ainsi fixé constitue une dépense obligatoire pour la commune, et il ne saurait appartenir au conseil municipal de diminuer la dette de la commune, en n'inscrivant point intégralement au budget le salaire fixé par le préfet.

(3-4) V. sur ces questions, les conclusions de

5 avril 1884, constitue une dépense obligatoire, est réglé par le préfet, sur la proposition du conseil municipal; Considé

rant qu'il résulte de l'instruction que, par arrêté préfectoral, en date du 18 avril 1907, pris sur la proposition du conseil municipal de Fabrezan, le traitement du garde forestier de cette commune a été fixé à 300 fr.; que, depuis lors, aucune décision du préfet de l'Aude n'est intervenue pour en réduire les émoluments; que, si, pour l'année 1909, il n'a été porté au budget municipal qu'un crédit de 150 fr., cette circonstance n'a pu modifier la quotité de la dépense à la charge de la commune; qu'ainsi, c'est avec raison que, sur le refus de la municipalité de faire figurer audit budget la somme de 151 fr. 20, destinée à parfaire le salaire du garde forestier, le préfet de l'Aude l'y a inscrite d'office, après inise en demeure régulière... Art. 1er. La requête est rejetée. Du 9 déc. 1910.

Cons. d'Etat.

MM. Smet, rapp.; Riboulet, comm. du gouv.

CONS. D'ÉTAT 9 décembre 1910. CAISSES D'ÉPARGNE, RESSORT, LIMITATION (ABSENCE DE), SUCCURSALE, ARRONDISSEMENT OU DÉPARTEMENT AUTRE QUE CELUI DU SIÈGE SOCIAL, OPERATIONS, INTERDICTION, MINISTRE, EXCÈS DE POUVOIR (Rép., vo Caisse d'épargne, n. 45, 240 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 118 et s., 220 et s.). Antérieurement à la loi du 22 juill. 1912, aucune disposition de loi ou de règlement n'assignait aux caisses d'épargne des circonscriptions déterminées, et ne leur interdisait de fonder des succursales en dehors des arrondissements ou des départements où elles avaient leur siège (3) (L. 20 juill. 1895, art. 22).

En conséquence, si deux caisses d'épar gne avaient, chacune, créé dans une même commune une succursale, le ministre du travail et de la prévoyance sociale excédait ses pouvoirs en prescrivant à celle de ces deux caisses qui avait, la première, créé dans cette commune une succursale, de fermer cet établissement, par le motif que cette succursale avait été établie en dehors de l'arrondissement et même du département où se trouvait le siège de la caisse d'épargne (4) (Id.).

(Caisse d'épargne de Gannat). M. le commissaire du gouvernement Riboulet a présenté, dans cette affaire, des conclusions dont nous extrayons ce qui suit:

M. le commissaire du gouvernement Riboulet, cidessus rapportées. Il convient d'observer que, depuis l'arrét ci-dessus, est intervenue la loi du 22 juill. 1912 (S. et P. Lois annotées de 1912, p. 324; Pand. pér., Lois annotées de 1912, p. 324), qui consacre le système admis dans la présente affaire par le ministre du travail et de la prévoyance sociale, en ajoutant à l'art. 22 de la loi du 20 juill. 1895 deux alinéas ainsi conçus : « Lorsque plusieurs caisses d'épargne ordinaires ont leur siège dans le même arrondissement, elles ne pourront, à l'avenir, instituer de succursales que dans

a

La caisse d'épargne ordinaire de Gannat (Allier) vous demande l'annulation d'une décision du ministre du travail et de la prévoyance sociale, qui lui a enjoint de fermer la succursale qu'elle a créée à Aigueperse, dans le département du Puy-de-Dôme. Dans cette dernière localité, en effet, coexistent deux succursales de caisses d'épargne, filiales : l'une. de la caisse d'épargne de Gannat; l'autre, de la caisse d'épargne de Riom. Or, l'art. 22 de la loi du 20 juill. 1895 stipule : « A l'avenir, l'existence d'une caisse d'épargne ordinaire ou d'une succursale dans une commune fera obstacle à l'ouverture, dans cette même commune, d'une autre caisse d'épargne ou d'une succursale relevant d'une autre caisse. Le ministre du travail, en présence de cette situation contraire à la loi, et se fondant sur la circonstance que la succursale de la caisse d'épargne de Gannat à Aigueperse, établie dans un autre département que celui de la caisse principale de laquelle elle dépend, a méconnu les prescriptions de la circulaire ministérielle du 12 janv. 1861, affectant à ces établissements publics un ressort naturel dans lequel elles doivent se renfermer, en a prescrit la fermeture, par la décision qui vous est déférée.

Les questions que le pourvoi présente à juger sont les suivantes: En droit, quelles sont les conditions nécessaires et suffisantes pour qu'une suecursale de caisse d'épargne ordinaire soit considérée comme ouverte, ou, plus exactement, pour employer les termes mêmes de la loi, comme existante? En fait, quelle est celle des deux suceursales de Gannat ou de Riom qui peut être réputée avoir existé avant l'autre, celle-ci devant fermer ses portes devant celle-là?

"

I. Vous savez que les caisses d'épargne ordinaires sont des établissements privés, assimilés par la loi aux établissements d'utilité publique. Elles sont créées par décret rendu dans la forme de règlement d'administration publique, et c'est à compter de la décision présidentielle qui les institue, en approuvant leurs statuts, qu'elles acquièrent la vie civile, et l'aptitude notamment à recevoir les dons et legs destinés à leur fonds de dotation. A la difference des caisses elles-mêmes, les succursales n'ont pas besoin d'être autorisées par les pouvoirs publics. Ces succursales constituent, en effet, de simples bureaux, ouverts au public pour éviter aux déposants de trop longs déplacements; émanation directe de la caisse d'épargne principale, elles puisent leur droit d'existence dans l'investiture qui a été conférée à l'organe central, dont elles ne sont, en réalité, qu'un démembrement, et qui reste seul juge de l'opportunité de leur création ou de leur sappression. Et alors, de cette absence d'existence propre, de ce caractère nettement établi de simple annexe de la caisse principale, vont découler un certain nombre de conséquences, déterminées, à défaut d'un texte légal ou réglementaire inutile en l'espèce, soit par des instructions ministérielles (circulaires du ministre du commerce des 12 et 16 janv 1861, encore en vigueur), soit par la doctrine et la

le canton où elles ont leur siege, à moins qu'elles ne justifient, pour les autres cantons de l'arrondissement, d'accords écrits préalables à cet effet avec les autres caisses d'épargne de l'arrondissement. Les caisses d'épargne ordinaires ne pourront, à l'avenir, instituer de succursales dans un arrondissement autre que celui où elles ont leur siege que si cet arrondissement ne possède point encore lui-même de caisse d'épargne, on bien si elles justifient d'accords écrits préalables à cet effet avec les caisses d'épargne ayant leur siège dans ledit arrondissement ».

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urisprudence. Pour ouvrir ou fermer une succursale, les caisses d'épargne n'ont aucune formalité à remplir, aucune autorisation à demander, aucune approbation à obtenir, soit de l'Administration centrale, soit de l'autorité préfectorale. Aucun règlement nouveau ne doit être élaboré les statuts de la succursale sont ceux de la caisse principale. Quant à l'existence de la succursale, -au regard notamment de l'art. 22 de la loi de 1895, — elle résultera d'une délibération du conseil des directeurs de la caisse d'épargne principale, à condition que cette délibération soit assez précise pour ne pas constituer un simple vœu, et qu'elle soit suivie de faits et d'actes impliquant le fonctionnement normal du bureau annexe : c'est-à-dire la désignation d'un local, d'un préposé, bref une ouverture donnant toute garantie au public. Exigera-t-on, ainsi que le prétend la caisse d'épargne de Riom, la nomination régulière immédiate des directeurs de la succursale? En aucune façon le conseil des directeurs de la caisse centrale a pleins pouvoirs à cet égard: il lui appartient, selon les nécessités de la situation, de nommer des directeurs spéciaux, de conférer la direction de la succursale, temporairement ou à titre permanent, à des directeurs de la caisse centrale, de gérer enfin lui-même sa succursale, car ce conseil, mandant, est aussi qualifié pour la gestion qu'un délégué, son mandataire.

"

:

Le principe de liberté qui préside à l'institution des succursales entraîne, pour les caisses d'épargne ordinaires, une seconde conséquence : l'absence de toute circonscription légale, et, par suite, la faculté pour les caisses d'étendre leur action dans toutes les localités où elles le jugent convenable. Ces établissements revêtant en partie le caractère d'institutions privées, il convenait de leur assurer le bénéfice d'une sorte de liberté commerciale, avec la certitude qu'ils n'en abuseraient point, puisque leur prospérité restait liée aux intérêts des déposants. Les caisses centrales étaient à même d'apprécier sur quels points de territoire il importait de créer, à raison de l'intensité de l'activité commerciale, industrielle ou agricole, des annexes susceptibles de drainer plus facilement l'épargne publique. On répondait, en même temps, au désir du législateur de développer, jusque dans les campagnes les plus reculées, l'esprit d'économie et de prévoyance.

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Le ministre du travail, dans sa réponse au pourvoi, et la caisse d'épargne de Riom, ne contestent pas cette règle de liberté, formellement édictée par la circulaire du 12 janv. 1861; mais ils objectent, pour conclure au rejet du recours, l'existence d'une sorte de ressort naturel, dans lequel les caisses d'épargne doivent sagement se renfermer : ce ressort naturel serait limité à l'arrondissement, quand il existe une seule caisse d'épargne dans l'arrondissement, et, dans le cas contraire, à tous les cantons qui, à raison, soit des communications, soit du courant des affaires, ont, plus spécialement, leurs relations avec la ville où son siège est établi. Nous convenons volontiers que, pratiquement, il peut être utile de modérer le zèle de certaines caisses d'épargne, et d'éviter des concurrences fâcheuses aussi bien pour les déposants que pour la prospérité même des établissements d'épargne; on ne fait, dans cet ordre d'idées, que s'inspirer du

(1) Les délibérations des commissions départementales prononçant l'ouverture d'un chemin vicinal ordinaire ou d'un chemin rural constituent, non point des jugements, mais des actes administratifs. Par suite, comme tout acte administratif, elles peuvent être rapportées tant qu'elles n'ont pas reçu d'exécution. V. Cons. d'Etat, 13 juin 1873, Comm.

vœu même du législateur de 1895, qui, dans son art. 22, interdit la coexistence de deux caisses on de deux succursales dans la même commune. Mais c'est ici le domaine de l'administration pure, celui des mesures officieuses. Lorsqu'il s'agit, comme dans l'espèce, d'un véritable droit conféré en quelque sorte au premier existant, droit qui comporte une sanction grave, la fermeture de l'établissement dont l'existence lui est postérieure en date, avec les conséquences financières qui en découlent, le juge, pour asseoir sa décision, ne peut se contenter de réglementations administratives. Or, aucun texte de loi ni de règlement n'institue de ressort naturel et, lorsque nous examinerons, tout à l'heure, la situation respective des deux succursales, vous ne sauriez faire état de dispositions administratives, dont, an surplus, l'autorité qui doit les appliquer ne manque pas de s'affranchir elle-même, quand elle estime que les circonstances de fait lui en font une obligation.

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II. En fait, quelle est celle des deux succursales qui peut être réputée avoir existé avant l'autre, au sens de l'art. 22 de la loi du 20 juill. 1895?...

(M. le commissaire du gouvernement, après avoir tiré des faits de la cause, par les motifs énoncés à l'arrêt, que la succursale de la caisse d'épargne de Gannat avait été créée la première, conclut ainsi): Nous concluons à l'annulation de la décision du ministre du travail et de la prévoyance sociale, en date du 3 juin 1908, enjoignant à la caisse d'épargne de Gannat de procéder à la fermeture de sa succursale d'Aigueperse ».

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LE CONSEIL D'ÉTAT; Vu les lois des 20 juill. 1895, 7-14 oct. 1790 et 24 mai 1872;

-

Considérant que l'art. 22 de la loi du 20 juill. 1895 dispose qu'à l'avenir, l'existence d'une caisse d'épargne ordinaire ou d'une succursale dans une commune fera obstacle à l'ouverture, dans cette même commune, d'une autre caisse d'épargne ou d'une succursale relevant d'une autre caisse ; — Considérant qu'en fait, la caisse d'épargne de Gannat et celle de Riom ont ouvert, depuis la promulgation de ladite loi, des succursales dans la commune d'Aigueperse, où n'existait auparavant aucune caisse d'épargne ordinaire, ni aucune succursale de caisse d'épargne; Considé rant que la succursale d'Aigueperse de la caisse d'épargne de Gannat a été créée par une délibération du conseil des directeurs de cette caisse, du 2 juill. 1907, qu'elle a été ouverte le 4 août suivant, et a fonctionné, à partir de cette date, dans les conditions fixées par une délibération du même con

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seil du 1er août 1907; que les deux délibé rations précitées ont été prises dans les limites des pouvoirs dudit conseil, à qui il appartenait de décider la création d'une succursale et de régler les conditions de son fonctionnement, notamment en la faisant gérer par les administrateurs de la caisse principale, en attendant qu'elle fût pourvue d'administrateurs spéciaux; Considérant qu'à la date susmentionnée du 4 août 1907, la caisse d'épargne de Riom n'avait pas encore créé de succursale à Aigueperse; Considérant que, pour prescrire la fermeture de la succursale d'Aigueperse de la caisse d'épargne de Gannat, le ministre du travail et de la prévoyance sociale s'est fondé sur ce que cette succursale, établie en dehors de l'arrondissement et même du département où se trouve placé le siège de la caisse d'épar gne de Gannat, aurait été ainsi fondée dans des conditions irrégulières; - Mais considérant qu'aucune disposition de loi ou de règlement n'assigne des circonscriptions déterminées aux caisses d'épargne, ou ne leur interdit de fonder des succursales en dehors des arrondissements ou des dépar ments où elles ont leur siège; qu'ainsi, la circonstance relevée dans la décision attaquée n'était pas de nature à faire considérer comme irrégulièrement établie la succursale d'Aigueperse de la caisse d'épargne de Gannat, et que le ministre, en prescrivant, pour ce motif, la fermeture de cette succursale, fondée d'ailleurs, ainsi qu'il a été établi ci-dessus, dans des conditions telles que son ouverture n'était pas interdite par l'art. 22 de la loi du 20 juill. 1895, a excédé ses pouvoirs;... — Art. Ier. La décision est annulée.

-

Du 9 déc. 1910. Cons. d'État. MM. Chareyre, rapp.; Riboulet, comm. du gouv.; Lefort et Labbé, av.

CONS. D'ÉTAT 9 décembre 1910.

CHEMIN RURAL, OUVERTURE, COMMISSION DÉPARTEMENTALE, DÉLIBÉRATION, EXÉCUTION (ABSENCE D'), POURVOI, EFFET SUSPENSIF, NOUVELLE DÉLIBÉRATION (Rép., vo Chemin rural, n. 17 et s.; Pand. Rép., vo Chemins ruraux, n. 340 et s., 351 et s., 370 et s.).

Une commission départementale agit dans la limite de ses pouvoirs, en prenant, pour réparer les irrégularités commises dans la procédure d'ouverture d'un chemin rural, une nouvelle délibération prononcant l'ouverture de ce chemin, alors même que sa première délibération avait été déférée au Conseil d'Etat, et malgré le caractère suspensif du pourvoi en la matière (1) (LL. 10 août 1871, art. 88; 20 août 1881).

la commission départementale fait obstacle à l'exécution de la délibération attaquée, tant que le Conseil d'Etat n'a pas statué sur sa validité, il ne peut avoir pour effet de priver la commission départementale du droit de prendre une nouvelle délibé ration. V. Cons. d'Etat, 2 juill. 1902, Denise et Gentil, précité.

(Consorts Iribe).

LE CONSEIL D'ÉTAT; - Vu les lois des 10 août 1871 et 20 août 1881; Sur le moyen tiré de ce que la commission departementale ne pouvait, sans excéder ses pouvoirs, prononcer, par la délibération attaquée, l'ouverture du chemin rural n. 1 dans la commune de La Genevraye, avant que le Conseil d'Etat eut statué sur la requete présentée par les requérants contre la délibération du 26 juin 1905, par laquelle ladite commission avait prononcé l'ouverture du même chemin : Considérant que si, en vertu de l'art. 88 de la loi du 10 août 1871, les recours formés devant le Conseil d'Etat contre les délibérations de la commission départementale ont le caractère suspensif, cette disposition législative, qui faisait obstacle à ce qu'il fut procédé, à l'égard des requérants, à l'exécution de la délibération du 26 juin 1905, qu'ils avaient déférée au Conseil d'Etat, n'a pu, par contre, priver la commission départementale du droit de prendre, en vue de réparer les irrégularités commises dans la procédure d'ouverture du chemin rural n. I dans la commune de La Genevraye, une nouvelle délibération prononcant l'ouverture dudit chemin. Art. 1er. La requête est rejetée.

Du 9 déc. 1910. Cons. d'Etat. MM. Vergniaud, rapp.; Riboulet, comm. du gouv.; Jouarre, av.

CONS. D'ÉTAT 9 décembre 1910. CONSEIL MUNICIPAL, CONVOCATION, MAIRE, Registre des délibérations, InsCRIPTION, AFFICHAGE, AVIS, SIGNATURE DU MAIRE, GRIFFE, USAGE LOCAL (Rép., vo Commune, n. 196 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 1592 et s.).

Dans le cas où l'ordre de convoquer le conseil municipal a bien été donné par le maire, qu'il a été affiché, mentionné au registre des délibérations, et porté à la connaissance des membres du conseil, dans les délais légaux, par un agent municipal, la convocation est régulière, bien que, sur l'avis de convocation, la signature du maire ait été apposée au moyen d'une griffe, selon la forme en usage dans la commune (1) (L. 5 avril 1881, art. 48).

Par suite, la délibération intervenue à la suite de cette convocation a été prise au cours d'une réunion légale du conseil municipal, et elle ne saurait être annulée (2) (L. 5 avril 1834, art. 48, 63, 65 et 67).

(Caval et Cormeille).

LE CONSEIL D'ÉTAT; Vu les lois des

(1-2) Aux termes de l'art. 48 de la loi du 5 avril 1884: « Toute convocation est faite par le maire. Elle est mentionnée au registre des délibérations, affichée à la porte de la mairie, et adressée par écrit et à domicile, trois jours francs avant celui de la réunion ». Ce que le législateur a voulu, c'est que le maire fixe le jour, l'heure et le lieu de la réunion du conseil, et adresse la convocation trois jours franes avant la séance. V. Cons, d'Etat, 15 févr. 1901, Cons. munic, de Gap (S. et P. 1903,3,100), et les renvois. Mais il est certain que, l'ordre de convocation une fois donné par le maire, inscrit sur le

5 avril 1884, art. 48, 63, 65 et 67, et 24 mai 1872; Considérant que les requérants ne contestent pas que l'ordre de convoquer le conseil municipal d'Agen, pour la réunion du 21 sept. 1907, ait bien été donné par le maire et qu'il ait été affiché; qu'ils se bornent à critiquer la forme sous laquelle la signature du maire a été apposée sur les lettres de convocation; Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'ordre du maire a été mentionné au registre des délibérations du conseil municipal, et porté à la connaissance des membres du conseil, dans les délais légaux, par un agent municipal; que si, sur l'avis de convocation, la signature du maire a été apposée au moyen d'une griffe, selon la forme en usage dans la commune, les requérants ne sont pas fondés à se prévaloir de cette seule circonstance pour soutenir que la convocation doit être réputée nulle, pour n'avoir pas été faite selon les prescriptions de l'art. 48 de la loi du 5 avril 1884; que, par suite, la convocation ayant été régulière, c'est à bon droit que le préfet a estimé que les délibérations, qui lui avaient été déférées, avaient été prises au cours d'une réunion légale, et rejeté, par l'arrêté attaqué, la demande d'annulation dont il avait été saisi. Art. 1er. La requête est rejetée.

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Du 9 déc. 1910. Cons. d'Etat. MM. Jaray, rapp.; Riboulet, comm. du gouv.

TRIB. DES CONFLITS 10 décembre 1910. CHEMIN VICINAL, TALUS, ARBRES, PROPRIÉTAIRE RIVERAIN, POSSESSION RECONNUE, ACTION POSSESSOIRE, RECÉPAGE, MAIRE, EXÉCUTION D'OFFICE, VOIE DE FAIT, AUTORITÉ JUDICIAIRE, COMPÉTENCE (Rép., vo Fonctionnaire public, n. 448 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 277 et s.).

Lorsqu'un maire, sans avoir procédé à une injonction préalable, fait receper par les agents du service vicinal des rejetons d'arbres indument abattus antérieurement par la commune, sur le talus d'un chemin vicinal, au droit de la propriété d'un particulier, et dont celui-ci avait été reconnu en possession par une sentence du juge de paix, ce recépage constitue une voie de fait, et non l'exécution régulière d'un travail public; par suite, c'est à l'autorité judiciaire qu'il appartient de connaître d'une action en dommages-intérêts formée par le propriétaire des arbres contre le maire (3) (LL. 16-24 août 1790; 16 fruct. an 3; 28 pluv. an 8).

(Mérot C. Maire de Rosoy). LE TRIBUNAL DES CONFLITS; Vu la loi

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registre des délibérations, et affiché à la porte de la mairie, son exécution matérielle peut être assurée conformément aux usages locaux, à la seule condition que chacun des conseillers municipaux reçoive à son domicile le texte intégral de l'ordre de convocation émanant du maire. Le Conseil d'Etat avait déjà estimé régulière une convocation, qui avait été adressée aux conseillers municipaux par lettre signée du secrétaire de la mairie. V. Cons. d'Etat, 28 mars 1884, Elect, de Saint-Hilaire Bissonies (Rec, des arrêts du Cons, d'Etat, p. 257). Adde, Morgand, La loi municipale, 8o éd., t. 1o, n. 309.

du 28 pluv. an 8; le règlement général sur les chemins vicinaux du département de l'Yonne, pris en exécution de l'art. 21 de la loi du 21 mai 1836; la loi du 16-24 août 1790 et le décret du 16 fruct. an 3; les or donnances des 1er juin 1828 et 12 mars 1831, et le règlement d'administration publique du 26 oct. 1849; la loi du 4 févr. 1850 et la loi du 24 mai 1872; · Considé rant que l'instance introduite par le sieur Mérot devant le juge de paix du canton nord de Sens, et portée ensuite devant le tribunal civil de la même ville, tendait à faire condamner le sieur Bouzon, pris en qualité de maire de la commune de Rozoy, au paiement de la somme de 300 fr. de dommages-intérêts et aux dépens, pour avoir fait recéper, en novembre 1909, les rejetons d'arbres indument abattus l'année précédente par la commune sur le talus du chemin vicinal de la Charbonnière, au droit de la propriété du réclamant, et dont il avait été reconnu possesseur, par jugement du même juge de paix, en date du 30 janv. 1909; Considérant que, dans les termes où elle était formulée, la demande du sieur Mérot avait pour objet la répression d'une atteinté qu'il prétendait avoir été illégalement portée à son droit de possession; qu'à ce titre, elle ressortissait à l'autorité judiciaire; Considérant, d'autre part, que, si les chemins vicinaux ordinaires sont, d'après les art. 18 et 110 du règlement général sur les chemins vicinaux du département de l'Yonne, pris en exécution de l'art. 21 de la loi du 21 mai 1836, placés sous l'autorité des maires pour leur exécution et leur entretien, il résulte du même règlement, et spécialement de l'art. 187, que, en ce qui concerne les arbres qui bordent ces chemins, il ne peut être procédé par le service vicinal, sur l'invitation de l'administration municipale, aux actes de la nature de ceux imputés par le sieur Mérot au maire de la commune de Rosoy; qu'en pareille matière, injonction doit être faite par le maire aux particuliers de procéder eux-mêmes au recépage, et que, s'ils ne le font pas, procès-verbal doit être dressé contre eux, pour être statué par l'autorité compétente; que, dans les circonstances de là cause, le recépage incriminé par le sieur Mérot constituait donc une voie de fait, et non l'exécution régulière d'un travail public. et qu'ainsi c'est à bon droit que le tribunal civil de Sens s'est déclaré compétent;...

Art. 1er. L'arrêté de conflit est annulé. Du 10 déc. 1910. Trib. des conflits. MM. Flourens, rapp.; Mérillon, comm. du gouv.; Mihura, av.

(3) Sur le principe que l'autorité judiciaire est seule compétente pour connaitre des actions en dommages-intérêts fondées sur des voies de fait portant atteinte au droit de propriété, V. Trib. des conflits, 21 déc. 1904, Cons. Montlaur et Mary (S. et P. 1907.3.3; Pand, pér., 1905.4.10), et les conclusions de M. Romieu, commissaire du gouverne ment. Idde, dans une espèce analogue à celle de l'arrêt ci-dessus recueilli, Cass. 5 août 1901 (S. et P. 1903.1.279; Pand. pér., 1903.1.369), la note et les renvois.

CONS. D'ÉTAT 30 juin 1911, 24 novembre 1911 et 17 mars 1913.

ASSISTANCE PUBLIQUE, ASSISTANCE AUX VIEILLARDS, INFIRMES OU INCURABLES, LOI DU 14 JUILL. 1905, COMMISSION CENTRALE, DÉCISION, RECOURS POUR EXCÈS DE POUVOIR, COMMISSION CANTONALE, RECOURS, EFFET SUSPENSIF, MAINTIEN SUR LA LISTE, RADIATION, PARIS (VILLE DE), COMMISSION SPÉCIALE, Directeur de l'AssISTANCE PUBLIQUE, QUALITÉ POUR AGIR (Rép., vo Assistance publique, n. 960 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 177 et s.).

La décision rendue par la commission centrale d'assistance instituée par l'art. 17 de la loi du 14 juill. 1905, sur le recours dirige contre une décision de la commission spéciale de la ville de Paris qui élevait le taux de l'allocation mensuelle à accorder à un assisté, est susceptible d'être déférée au Conseil d'Etat, par la voie du recours pour excès de pouvoir (1) (L. 14 juill, 1905, art. 17). 1re espèce (sol. implic.).

Les vieillards, infirmes ou incurables ayant droit à l'assistance prévue par la loi du 14 juill. 1905, tant qu'ils n'ont pas été rayés définitivement des listes d'assis

(1 à 6) Il semble que, dans le monde des intéressés au service de l'assistance des vieillards, on ne se rende pas un compte très exact de la nature des décisions qui sont prises par la commission cantonale et par la commission centrale sur les réclamations portées devant elles, et du véritable caractère des recours qui peuvent être formés contre ces décisions. Il ne sera pas inutile de projeter sur ces questions quelque lumière, à l'aide d'un certain nombre d'arrêts récents du Conseil d'Etat.

On sait que les vieillards de soixante-dix ans, les infirmes et les incurables, qui demandent l'assistance, doivent, à cet effet, être inscrits sur une liste d'assistance. Cette inscription est réglée d'une manière analogue à l'inscription sur la liste de l'assistance médicale, c'est-à-dire que le bureau d'assistance et le conseil municipal prononcent les admissions ou les radiations, et que des réclamations peuvent être formées, contre les admissions ou les radiations, par tous les intéressés, et par tout habitant ou contribuable de la commune. Il est statué sur ces réclamations par une commission cantonale, composée du sous-préfet, du conseiller général, d'un conseiller d'arrondissement dans l'ordre des nominations, du juge de paix du canton, d'une personne désignée par le préfet, d'un délégué des bureaux d'assistance du canton, et d'un délégué des sociétés de secours mutuels existant dans le canton. Les décisions de la commission cantonale peuvent, à leur tour, être déférées par toute personne intéressée à une commission centrale, instituée auprès du ministre de l'intérieur, et composée, conformément à l'art. 17 de la loi du 14 juill. 1905 (S. et P. Lois annotées de 1906, p. 125), modifié par la loi du 30 déc. 1908 (S. et P. Lois annotées de 1909, p. 835 ; Pand. pér., Lois annotées de 1909, p. 835), de vingt membres élus par le Conseil supérieur de l'assistance publique et de quatre membres élus par le Conseil supérieur de la mutualité. Cette commission, dit le texte, « statue définitivement sur les recours ».

I. Que sont les commissions cantonales et la commission centrale? Sont-ce des juridictions ou des autorités administratives, et que sont les recours portés devant elles?

ANNÉE 1913. 5° cah.

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tance par l'autorité compétente, et le recours formé devant la commission centrale contre les décisions des commissions cantonales n'ayant pas d'effet suspensif, aux termes de l'art. 11 de la loi, le préfet et le trésorier-payeur général d'un département excèdent leurs pouvoirs, en prescrivant de suspendre le paiement des allocations mensuelles de certains assistés, dont l'inscription, maintenue par la commission canionale, est contestée devant la commission centrale (2) (L. 14 juill. 1905, art. 1er, 11, 17). 20 espèce.

Mais, lorsque la commission cantonale a rayé certaines personnes des listes d'assistance, le préfet agit dans les limites de ses pouvoirs en supprimant les allocations mensuelles qui leur étaient servies, encore bien qu'un recours ait été formé devant la commission centrale contre la décision de la commission cantonale (3) (L. 14 juill. 1905, art. 11). 3o, espèce.

L'art. 4 du décret du 30 mars 1907, déterminant les conditions d'application à la ville de Paris de la loi du 14 juill. 1905, qui énumère les personnes ayant qualité pour saisir la commission spéciale, insti tuée pour la ville de Paris par l'art. 5 du même décret, n'a pas pour effet de limiter

En ce qui concerne les commissions cantonales, la question avait été tranchée par un arrêt du Conseil d'Etat du 12 mai 1905, Comm. de Portiragnes (S. et P. 1907.3.54), confirme depuis par un second arrêt du 19 juill. 1912, Broussard. Il s'agissait, à la vérité, de la commission cantonale créée par l'art. 17 de la loi du 15 juill. 1893, sur l'assistance médicale gratuite, mais les deux commissions cantonales, quoique n'étant pas composées d'une manière absolument identique, sont certainement de même espèce. Il résultait déjà des arrêts Comm. de Portiragnes et Broussard que la commission cantonale n'est pas une juridiction, qu'elle n'est qu'une autorité administrative, que les réclamations portées devant elle ne sont que des réclamations administratives, et que le recours formé au Conseil d'Etat contre sa décision est un recours pour excès de pouvoir.

Pour ce qui est de la commission centrale, créée par la loi du 14 juill. 1905, et qui n'a pas son analogue dans l'organisation de l'assistance médicale gratuite, la solution est la même; elle n'est pas une juridiction, elle est une simple autorité administrative, les recours portés devant elle ne sont que des réclamations administratives, et on peut, contre ses décisions, former des recours pour excès de pouvoir. Cela résulte de l'arrêt du 30 juin 1911, Directeur de l'Assistance publique à Paris (1° espèce). A la vérité, cet arrêt rejette le recours pour excès de pouvoir formé par le directeur de l'Assistance publique contre une décision de la commission centrale, mais le rejet n'est pas motivé sur ce que le Conseil d'Etat serait incompétent pour connaître du recours pour excès de pouvoir; il est motivė sur ce fait que le directeur de l'Assistance publique à Paris n'avait pas qualité pour former un pourvoi dans l'intérêt du service de l'assistance aux vieillards, vu qu'à Paris, c'est-à-dire dans le département de la Seine, ce service est départemental, comme dans tous les autres départements (Décr., 30 mars 1907, S. et P. Lois annotées de 1907, p. 480), et vu que le directeur de l'Assistance publique n'est qu'un agent municipal (Comp. sur les pouvoirs conférés au directeur de l'Assistance publique, en

à ces personnes le droit de se pourvoir devant la commission centrale contre les décisions de la commission spéciale, droit que l'art. 6 du même décret a ouvert à toute personne intéressée (4) (Décr., 30 mars 1907, art. 4, 5 et 6). Ire espèce.

Mais, le service de l'assistance publique étant placé, dans la ville de Paris comme dans l'ensemble des départements, sous l'autorité du préfet, le directeur de l'Assistance publique n'a pas qualité pour déférer à la commission centrale une décision de la commission spéciale qui a élevé le taux de l'allocation mensuelle à accorder à un assisté, dès lors qu'il n'allègue pas que cette décision ait porte atteinte aux intérêts de l'Assistance publique, envisagée comme personne morale, et qu'il se borne à soutenir que la décision par lui attaquée est contraire aux intérêts généraux du service de l'assistance aux vieillards, infirmes et incurables (5) (Id.).

Id.

Et il n'est pas davantage recevable a demander au Conseil d'Etat l'annulation de la décision par laquelle la commission centrale a rejeté, pour défaut de qualité, le recours qu'il avait formé contre la décision de la commission spéciale (6) (Id.). — Id.

matière d'assistance aux vieillards infirmes et incurables, par le décret du 30 mars 1907, Cons. d'Etat, 23 déc. 1910, Dame Choisnet, infra, 3° part., p. 73, et la note). Ainsi, implicitement, la possibilité d'un recours pour excès de pouvoirs, qui serait intenté par un personnage ayant qualité, est affirmée. V. dans le même sens, Sachet, Assistance des vieillards, n. 315. D'ailleurs, la requête du directeur de l'Assistance publique visait expressément le recours pour excès de pouvoir: « Vu la requête, pour le directeur de l'administration générale de l'Assistance publique à Paris, tendant à ce qu'il plaise au Conseil annuler pour excès de pouvoir une décision du 8 juill. 1909, par laquelle la commission centrale a rejeté, etc... ; Ce faire, attendu qu'en la forme la requête est recevable; qu'en effet, la commission centrale est une autorité administrative, au sens de l'art. 9 de la loi du 24 mai 1872, dont les actes sont susceptibles d'être déférés au Conseil d'Etat pour excès de pouvoir ». Et telle est l'interprétation que cet arrêt a paru aux rédacteurs du Recueil des arrêts du Conseil d'Etat devoir comporter, puisqu'ils en donnent cette analyse sommaire (Rec. des arrêts du Cons. d'Etat, p. 757) : Les décisions rendues par la commission centrale sur les recours dirigés, soit contre les décisions des commissions cantonales, soit contre celles des commissions départementales ou des conseils généraux, sont susceptibles d'être déférées au Conseil d'Etat pour excès de pouvoir (résolution implicite) ».

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Sans doute, la commission centrale est organisée de façon à se rapprocher d'une juridiction, plus que les commissions cantonales; la loi du 30 déc. 1908 prévoit que le ministre peut la répartir en sections; qu'il peut être statué définitivement sur les recours, soit par les sections, soit par l'assemblée générale, si l'affaire est évoquée devant celle-ci; que le ministre peut attacher à la commission ou à chaque section un ou plusieurs commissaires du gouvernement et des rapporteurs; que les rapporteurs ont voix délibérative dans les affaires dont ils sont chargés. Ce sont des détails de structure qui rappellent l'organisation du Conseil d'Etat statuant au contentieux, mais qui ne sont pas incompatibles III PART. 9

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