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CONS. D'ÉTAT 16 décembre 1910. CULTES, ETABLISSEMENTS DU CULTE SUPPRIMÉS, ATTRIBUTION DES BIENS, IMMEUBLE N'APPARTENNANT PAS A L'ÉTABLISSEMENT DU CULTE, REVENDICATION, PRÉFET, REJET, EXCÈS DE POUVOIR, CONSEIL D'ETAT, RECOURS POUR EXCES DE POUVOIR.

Lorsqu'un particulier a revendiqué, par mémoire adressé au directeur des domaines et au préfet du département, la propriété de diverses parcelles qu'il prétend avoir été comprises à tort dans le patrimoine d'un ancien établissement public du culte, cette demande tend à une revendication de droit commun, sur laquelle il n'appartient pas au préfet de statuer (1) (LL. 9 déc. 1905, art. 8 et 9; 13 avril 1908, art. 1 et 3).

Si la demande a été formulée par application des dispositions spéciales de l'art. 9 de la loi du 9 déc. 1905, modifié par l'art. 3 de la loi du 13 avril 1908, le préfet, qui tient de ces dispositions le pouvoir de faire droit à tout ou partie de la demande, ne peut prendre une décision de rejet, de nature, dans les conditions et les formes où elle intervient, à préjuger une solution qu'il n'appartient qu'à l'autorité judiciaire de prononcer; et, au cas où il l'a fait, sa décision est entachée d'excès de pouvoir (2) (Id.).

Le préfet tranche une question de revendication de propriété, lorsqu'il rejette une demande d'un particulier, revendiquant la propriété d'un immeuble qui aurait été compris à tort dans le patrimoine d'un ancien établissement du culte, et, par suite, sa décision est susceptible d'être déférée au Conseil d'Etat par la voie du recours

(1-2) La loi du 9 déc. 1905, modifiée par la loi du 13 avril 1908, a prévu une action en reprise des biens ayant appartenu aux anciens établissements publics du culte; l'art. 9, § 3, de la loi de 1905, tel qu'il a été modifié par l'art. 3 de la loi de 1908, règle les conditions dans lesquelles cette action peut être exercée. Mais il ne s'agit là que d'une action visant des biens qui étaient autrefois la propriété de l'établissement public du culte. Ces textes ne font aucune allusion à l'action en revendication, tendant à faire décider qu'un bien mis sous séquestre, ou attribué par décret comme ayant appartenu à un établissement public du culte, n'appartenait pas, en réalité, à cet établissement, et qu'il était, au contraire, la propriété du revendiquant. Une telle action peut donc être formée dans les termes du droit commun. V. Cass. 26 déc. 1910 (sol. implic.) (S. et P. 1912.1.214; Pand. pér., 1912.1.214), la note et les renvois.

D'un autre côté, la procédure de l'action en reprise est dominée par deux idées: 1° L'action doit être portée devant l'autorité judiciaire, dans tous les cas, alors même que, par sa nature, elle pourrait être de la compétence de la juridiction administrative. V. Trib. des conflits, 4 juin 1910, Mr Douais, évêque de Beauvais (S. et P. 1910. 3,115; Pand. pér., 1910.3.115), et les conclusions de

pour excès de pouvoir (3) (L. 24 mai 1872, art. 9).

(Orsatti).

--

LE CONSEIL D'ÉTAT; Vu les lois des 28 pluv. an 8 et 13 avril 1908; Considérant qu'il résulte des conclusions de la requête que le sieur Orsatti avait revendiqué, par mémoire du 25 août 1909, adressé au directeur des domaines et au préfet de la Corse, la propriété de diverses parcelles qu'il prétendait avoir été comprises à tort dans le patrimoine à attribuer de l'ancienne fabrique de Quenza; Considérant, d'une part, que, si cette demande tendait à une revendication de droit commun, il n'appartenait pas au préfet d'y statuer; que si, d'autre part, la même demande avait été formulée et le mémoire déposé par application des dispositions spéciales de l'art. 3 de la loi du 13 avril 1908, le préfet, qui tient de ces dispositions, dans le but d'arrêter des instances inutiles pour l'Etat, le pouvoir de faire droit à tout ou partie de la demande, ne pouvait prendre une décision de rejet, de nature, dans les conditions et dans les formes où elle intervient, à préjuger une solution qu'il n'appartient qu'à l'autorité judiciaire de prononcer; qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de la Corse, en rejetant, par l'arrêté attaqué, les conclusions formulées dans le mémoire du sieur Orsatti, et qui ne relevaient juridiquement que des tribunaux, est sorti de ses attributions et a excédé ses pouvoirs, et que le requérant est, à la fois, recevable et fondé à demander l'annulation de cet arrêté;.... Art. 1er. L'arrêté est annulé. Du 16 déc. 1910. Cons. d'Etat. MM. Imbart de la Tour, rapp.; Pichat, comm, du gouv.

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CONS. D'ÉTAT 16 décembre 1910. 1° CULTES, SONNERIES DE CLOCHES, HOS

M. Pichat, commissaire du gouvernement. 2o Afin d'éviter des frais et des lenteurs, le préfet a compétence, en tout état de la procédure, pour faire droit à la demande en reprise. Mais l'art. 3 de la loi du 13 avril 1908 ne prévoit que l'admission totale ou partielle de la demande par le préfet. Il ne prévoit pas une décision du préfet rejetant la demande. Et cela se justifie fort bien; on comprend que la loi ait donné compétence à une autorité administrative pour faire droit à la demande, car, dans ce cas, l'autorité judiciaire n'a plus à intervenir; mais, si le préfet pouvait rejeter la demande, il relèverait, contrairement au principe de la séparation des pouvoirs, de l'autorité judiciaire compétente pour statuer sur l'action en reprise, que l'intéressé conserverait toujours le droit d'exercer. Le préfet n'a pas plus le droit de rejeter la demande qu'il n'aurait le droit de prendre un arrété de rejet, au vu du mémoire à lui adressé, préalablement à toute action judiciaire à intenter contre l'Etat (L. 5 nov. 1790, art. 15), ou contre le département (L. 10 août 1871, art. 55), ou contre une commune (L. 5 avril 1884, art. 124). Nous ajouterons que les travaux préparatoires de la loi de 1908 sont formels dans le sens de l'interprétation de la loi de 1898 que nous venons d'indiquer. V. les déclarations de M. Raynaud, rapporteur du

PICE, CHAPELLE NON OUVERTE AU PUBLIC,
MAIRE, RÉGLEMENTATION, EXCÈS DE POU-
VOIR. 2o RÈGLEMENT DE POLICE OU
MUNICIPAL, HOSPICE, SONNERIES DE CLO-
CHES, ARRÊTÉ MUNICIPAL, RÉGLEMENTA-
TION, INFRACTION, POURSUITES.

1° Lorsque les seules cloches existant dans une commune sont la propriété d'un hospice dont la chapelle n'est pas ouverte au public, le maire, qui, en tant que prési dent de la commission administrative, ne possède pas le pouvoir réglementaire, ne peut régler l'usage de ces cloches, par application de l'art. 27 de la loi du 9 déc. 1905 et des art. 50 et 51 du décret du 16 mars 1906, ces textes visant uniquement les sonneries des cloches des édifices servant à l'exercice public du culte (4) (L. 9 déc. 1905, art. 27; Décr., 16 mars 1906, art. 50 et 51).

20 Mais le maire peut réglementer les sonneries de ces cloches, en vertu de l'art. 97 de la loi du 5 avril 1884, qui lui confie le soin d'assurer la tranquillité et la sécurité publiques, et il ne fait qu'user des pouvoirs généraux de police qui lui sont conférés par ce texte, en prescrivant que les sonneries pour les cérémonies et services funèbres pourront être suspendues en temps d'épidémie; en réglementant les heures en dehors desquelles ne pourront avoir lieu les sonneries, suivant la saison; en décidant que ces sonneries pourront être provisoirement interdites, lorsque, en raison de l'état de solidité du clocher, elles constitueraient un danger pour la sécurité publique; en édictant que le maire aura le droit de faire sonner les cloches lorsqu'il sera nécessaire de réunir les habitants en cas de péril commun exigeant un prompt secours; en prescrivant enfin que les infractions à son arrêté seront constatées et poursuivies conformément aux lois (5) (L. 5 avril 1884, art. 97).

projet de loi à la Chambre des députés, à la séance du 17 déc. 1907, à propos du § 6, ajouté à l'art. 9 de la loi du 9 déc. 1905 par la loi du 13 avril 1908 (S. et P. Lois annotées de 1908, p. 678, note 27; Pand, pér., Lois annotées de 1908, p. 678, note 27). V. égal., les déclarations du même rapporteur à la même séance, à propos du § 7, in fine (S. et P. loc. cit., p. 678, note 33; Pand. pér., loc. cit., p. 678, note 33).

(3) Solution sans difficulté. Le préfet ne s'était pas borné à émettre une prétention, comme représentant des intérêts domaniaux de l'Etat. Il n'aurait eu, d'ailleurs, aucune qualité pour le faire; c'était le rôle du séquestre, c'est-à-dire du directeur général des domaines (LL. 9 déc. 1905, art. 9; 13 avril 1908, art. 3). Le préfet avait pris un arrêté, comme représentant de la puissance publique, pour trancher une question de revendication de propriété. Son arrêté, véritable acte d'autorité, échappait au contrôle de l'autorité judiciaire; il faisait grief au requérant, et il aurait subsisté, si le Conseil d'Etat ne l'avait point annulé.

(4-5) Ces solutions ne soulèvent pas d'objections. L'art. 27 de la loi du 9 déc. 1905 a conféré au maire le droit de réglementer les sonneries de cloches des édifices affectés au culte et appartenant à la commune (V. sur les pouvoirs du maire en cette matière, Cons, d'Etat, 29 juill. 1910, Abbģ

(Comm. de Trainel).

Dans la commune de Trainel (Aube), il existe un hospice, dont la fondation remonte à Juvénal des Ursins, le conseiller du roi Charles VII. La chapelle de l'hospice n'est plus ouverte au public. Dans le clocher de cette chapelle se trouvent les seules cloches qui existent dans la commune. Le maire de Trainel a pris un arrêté réglementant les sonneries de cloches dans la commune. Dans cet arrêté, il a confié au desservant en exercice dans la commune le soin de faire sonner les cloches de l'hospice, pour annoncer les offices religieux devant être célébrés dans l'église communale; il a réglementé le nombre et la durée de ces sonneries; il a prévu la sonnerie des cloches de l'hospice pour annoncer le passage du Président de la République, la veille et le jour de la Fête nationale et les fêtes locales. Puis il a édicté toute une série de prescriptions indiquées dans la décision ci-dessous rapportée. Le préfet de Pourvoi. l'Aube a annulé cet arrêté.

LE CONSEIL D'ÉTAT; Vu les lois des 5 avril 1884 et 9 déc. 1905; le décret du 16 mars 1906; Considérant que, pour annuler l'arrêté, en date du 8 oct. 1908, par lequel le maire de Trainel a réglé les sonneries de cloches dans cette commune, le préfet du département de l'Aube s'est fondé sur ce que cet arrêté aurait été pris en violation des art. 27 de la loi du 9 déc. 1905, 50 et 51 du décret du 16 mars 1906;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, que les seules cloches existant dans la commune de Trainel, et dont le maire a, par l'arrêté attaqué, entendu régler les sonneries, sont là propriété de l'hospice; que si, aux termes des art. 27 de la loi du 9 déc. 1905, 50 et 51 du décret du 16 mars 1906, les sonneries de cloches sont réglées par arrêté municipal, ces textes visent uniquement les sonneries des cloches des édifices servant à l'exercice public du culte; que la chapelle de l'hospice de Trainel n'est point ouverte au public; que, dès lors, le maire, qui, en tant que président de la commission administrative de

Miniac, supra, 3 part., p. 28; 11 nov. 1910, Abbé Barthez, supra, 3° part., p. 41, et les renvois sous ces arrêts), droit qui ne lui appartenait point sous l'empire de la législation antérieure (L. 5 avril 1884, art. 100). Mais il n'a pas touché aux pouvoirs généraux de police appartenant au maire en vertu de l'art. 97 de la loi du 5 avril 1884. Par suite, le maire peut édicter des prescriptions, relativement aux sonneries de cloches se trouvant dans des immeubles autres que des édifices du culte, alors qu'il agit en vue d'assurer la sécurité et la tranquillité publiques.

(1-2-3) La disposition de l'art. 3 de la loi du 7 juill. 1904 (S. et P. Lois annotées de 1905, p. 849; Pand. pér., 1904.3.97), d'après laquelle l'arrêté de fermeture d'une école congréganiste doit être notifié quinze jours au moins avant la fin de l'année scolaire, a été insérée dans la loi à la suite d'un amendement présenté par M. Lamy à la Chambre des députés. Elle a été édictée dans l'intérêt de la congrégation, des parents et des enfants. V. S. et P. Lois annotées de 1905, p. 870, notes 65 et 66. II

l'hospice, ne possède point le pouvoir réglementaire, ne pouvaît, par application des dispositions précitées, en régler l'usage;

Mais considérant que l'arrêté du maire de Trainel a été pris également en vertu de l'art. 97 de la loi du 5 avril 1884, qu'il vise expressément; que ledit article confie à l'autorité municipale le soin d'assurer la tranquillité et la sécurité publiques; que, dès lors, en prescrivant, par l'art. 3 de l'arrêté attaqué, que les sonneries pour cérémonies et services funèbres pourront être suspendues en temps d'épidémie; en interdisant, par l'art. 4, les sonneries avant 4 heures du matin et après 8 heures du soir du 1er avril au 30 septembre, avant 5 heures du matin et après 8 heures du 1er octobre au 31 mars, par l'art. 8, les sonneries en volée pendant les orages; en décidant, par l'art. 10, qu'elles pourraient être provisoirement interdites, lorsque, en raison de l'état de solidité du clocher, elles constitueraient un danger pour la sécurité publique; en édictant, par l'art. 6, § ler, que le maire aura le droit de faire sonner les cloches, lorsqu'il sera nécessaire de réunir les habitants en cas de péril commun exigeant un prompt secours; et en prescrivant, enfin, par l'art. 11, que les infractions au présent arrêté seraient constatées et poursuivies conformément aux lois, le maire de la commune de Trainel n'a fait qu'user des pouvoirs généraux de police qui lui sont reconnus par l'art. 97 précité; que, dès lors, il est fondé à soutenir qu'en annulant les art. 3, 4, 6,

ler, 8, 10 et 11 de l'arrêté portant règlement des sonneries de cloches dans la commune de Trainel, par le motif qu'ils contenaient des dispositions édictées en violation de la loi, le préfet de l'Aube a excédé ses pouvoirs; Art. 1er. L'arrêté du préfet du département de l'Aube, en date du 14 nov. 1908, est annulé en tant qu'il a prononcé l'annulation des art. 3, 4, 6, § Îer, 8, 10 et 11 de l'arrêté par lequel le maire de Trainel a réglé les sonneries de cloches de ladite commune. Art. 2. Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

semble résulter de la rédaction de la décision cidessus rapportée que, si ce délai n'était pas observé, l'arrêté de fermeture serait susceptible d'être annulé pour violation de la loi. On peut avoir quelques doutes sur l'exactitude de cette solution. En effet, il est de principe que l'irrégularité de la notification d'un acte ne constitue pas un vice propre de cet acte et ne saurait en entraîner l'annulation; il doit en être de même de la tardiveté de la notification. V. sur le principe, Cons. d'Etat, 19 févr. 1904, Dame Bernier (S. et P. 1906.3.73), et le renvoi. Adde, comme applications, dans des espèces analogues à celles de l'arrêt ci-dessus, Cons. d'État, 18 déc. 1908, Communauté des Ursulines d'Angers (Rec. des arrêts du Cons. d'Etat, p. 1054); 2 juill. 1909, Congrégation des Ursulines de Gravelines (Id., p. 639); 11 févr. 1910, Congregation des Urselines de Mortain (Id., p. 111).

En ce qui concerne les pouvoirs du préfet pour fixer la date de la fin de l'année scolaire, la solution ne saurait faire doute. L'art. 29 du décret du 18 janv. 1887 (S. Lois annotées de 1887, p. 203.

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CONS. D'ÉTAT 16 décembre 1910. 1° INSTRUCTION PUBLIQUE, ENSEIGNEMENT PRIMAIRE, ANNÉE SCOLAIRE, FIN, FIXATION, Ecoles Publiques, Ecoles privÉES, PRÉFET, EXCÈS DE POUVOIR (Rép., v Instruction publique, n. 1591 et s., 2400 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 612 et s., 1560 et s.). 2o COMMUNAUTÉ OU CONGREGATION RELIGIEUSE, CONGREGATION AUTORISÉE, ETABLISSEMENT D'ENSEIGNEMENT, ARRÊTÉ DE FERMETURE, NOTIFICATION, ANNÉE SCOLAIRE, DÉLAI DE QUINZE JOURS, CESSATION DES CLASSES, DATE HABITUELLE.

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1o Si, d'après le règlement des écoles publiques d'un département, rédigé par application de l'art. 29 du décret du 18 janv. 1887, et conformément au règlement modèle, le préfet peut fixer la date de la fin de l'année scolaire pour les écoles primaires publiques, il ne lui appartient pas de le faire pour les écoles primaires privées (1) (L. 30 oct. 1886; Décr. 18 janv. 1887, art. 29).

20 En conséquence, pour une école congréganiste, dont la fermeture a été ordonnée par application de la loi du 7 juill. 1904, la date de la fin de l'année scolaire, que la notification de l'arrêté de fermeture doit précéder d'au moins quinze jours, est, non la date fixée par le préfet pour les écoles publiques, mais celle à laquelle la cessation des classes était fixée habituellement par la directrice de l'établissement (2) (L. 7 juill. 1904, art. 1er et 3, § 2).

Par suite, l'arrêté de fermeture ne peut être annulé, s'il a été notifié quinze jours avant cette date (3) (Id.).

(Congrég. des Ursulines de Carhaix).

La congrégation des Ursulines de Carhaix a déféré au Conseil d'Etat un arrêté, en date du 12 juill. 1906, par lequel le ministre de l'intérieur avait prescrit la fermeture de son établissement. Elle a invoqué l'art. 3, § 2, de la loi du 7 juill. 1904,

P. Lois, décr., etc. de 1887, p. 351; Pand. pér., 1887. 3.5), rendu en exécution de la loi du 30 oct. 1886 (S. Lois annotées de 1887, p. 169.-P. Lois, decr., etc. de 1887, p. 287; Pand. pér., 1886.3.177), porte: Un règlement des écoles primaires publiques de chaque département sera rédigé par le conseil départemental, d'après les indications d'un règlement modele arrêté par le ministre de l'instruction publique en conseil supérieur ». Ce texte se trouve dans le titre 1 du décret de 1887, intitulé: « De l'enseignement public », et, dans ses termes, il ne vise qu'un règlement pour les écoles publiques. Le réglement modele, annexé à un arrêté ministériel du 18 janv. 1887, ne vise que les écoles primaires publiques; il contient un art. 22, portant: L'époque et la durée des vacances sont fixées chaque année par le préfet en conseil départemental ». Au surplus, les cas dans lesquels l'Administration peut intervenir dans le fonctionnement des écoles privées sont limitativement énumérés par l'art. 35 de la loi du 30 oct. 1886, et la fixation de la date des vacances ne rentre point dans ces cas.

d'après lequel la fermeture de chaque établissement scolaire doit être effectuée par un arrêté de mise en demeure, qui sera notifié au supérieur de la congrégation et au directeur de l'établissement quinze jours au moins avant la fin de l'année scolaire; et elle a soutenu que l'arrêté était nul, comme lui ayant été signifié moins de quinze jours avant le 31 juillet, date à laquelle le ministère de l'intérieur a, à diverses reprises, admis que se plaçait la fin normale de l'année scolaire, et, en tout cas, moins de quinze jours avant la date à laquelle avait lieu habituellement la cessation des classes dans l'établissement visé. Le ministre de l'intérieur ayant fait observer que, dans le département du Finistère, la fin de l'année scolaire avait été fixée par le préfet au 11 août seulement, la requérante a prétendu que cette réglementation ne concernait que les écoles publiques et non les écoles privées, qui n'avaient pas à tenir compte de cette date.

LE CONSEIL D'ÉTAT; Vu les lois des 7 juill. 1904, 30 oct. 1886, et le décret du 18 janv. 1887; les lois des 7-14 oct. 1790 et 24 mai 1872; - Considérant que, d'après l'art. 3, § 2, de la loi du 7 juill. 1904, la fermeture des établissements et des services scolaires', prévue par le 1er dudit article, sera effectuée aux dates fixées, pour chacun d'eux, par un arrêté de mise en demeure du ministre de l'intérieur, qui sera, après insertion au Journal officiel, notifié dans la forme administrative au supérieur de la congrégation et au directeur de l'établissement quinze jours au moins avant la fin de l'année scolaire; Considérant que si, d'après le règlement des écoles primaires publiques du dépar tement du Finistère, rédigé par application de l'art. 29 du décret du 18 janv. 1887, et conformément au règlement modèle arrêté par le ministre de l'instruction publique, en exécution de ce décret, le préfet du Finistère a pu fixer au 11 août 1906 la fin de l'année scolaire pour les écoles primaires publiques, il ne lui appartenait pas de le faire pour les écoles primaires privées, dont les directeurs et directrices, tout en restant soumis à l'inspection de l'Etat, sont entièrement libres, aux termes de l'art. 35 de la loi du 30 oct. 1886, dans le choix des méthodes, des programmes et des livres; qu'en conséquence, pour l'école de Carhaix, dont la fermeture a été ordonnée par l'arrêté attaqué, la date de la fin de l'année scolaire, que la notification dudit arrêté devait précéder d'au moins quinze jours, était celle

(1-2) Cette solution ne soulève pas de difficulté. Le décret du 30 mars 1907 (S. et P. Lois annotées de 1907, p. 480), qui détermine les conditions d'application à la ville de Paris de la loi du 14 juill. 1905 (S. et P. Lois annotées de 1906, p. 125; Pand. per., 1905.3.198), a bien conféré au directeur de l'Assistance publique des pouvoirs spéciaux, à l'effet d'admettre provisoirement à l'assistance des vieillards, infirmes ou incurables, même sans qu'ait été préalablement consulté le conseil municipal, qui, partout ailleurs qu'à Paris, a seul qualité pour prononcer l'admission à l'assistance. Mais le décret du 30 mars ANNÉE 1913. 5° cah.

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CONS. D'ÉTAT 23 décembre 1910. ASSISTANCE PUBLIQUE, ASSISTANCE AUX VIEILLARDS, AUX INFIRMES ET AUX INCURABLES, LOI DU 14 JUILL. 1905, PARIS (VILLE DE), ALLOCATION, RÉDUCTION, CONSEIL MUNICIPAL, DÉLIBÉRATION (ABSENCE DE), DIRECTEUR DE L'ASSISTANCE PUBLIQUE, EXCES DE POUVOIR (Rép., vo Assistance publique, n. 960 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 173 et s.).

Si le décret du 30 mars 1907 a édicté pour la ville de Paris une procédure exceptionnelle, permettant au directeur de l'Assistance publique de prononcer des admissions provisoires à l'assistance aux vieillards, infirmes ou incurables, décisions soumises à la ratification ultérieure du conseil municipal, ce régime, institué en faveur des assistés, est limité aux inscriptions, et laisse subsister intégralement, en ce qui concerne la radiation, l'art. 18 de la loi du 14 juill. 1905, qui règle, à Paris comme dans les autres communes, les cas de retrait total ou partiel de l'assistance (1) (L. 14 juill. 1905, art. 18; Décr., 30 mars 1907).

En conséquence, le directeur de l'Assistance publique à Paris excède ses pouvoirs, en réduisant, sans l'intervention du conseil municipal, l'allocation attribuée à unayant droit à l'assistance (2) (Id.).

(Dame Choisnet).

LE CONSEIL D'ÉTAT; Vu la loi du 24 mai 1872; la loi du 14 juill. 1905; le décret du 30 mars 1907; Considérant qu'aux termes de l'art. 18 de la loi susvisée du 14 juill. 1905, le retrait de l'assistance ne peut être prononcé que par le conseil municipal, où, suivant les cas, par la commission départementale, ou le ministre de l'intérieur; que cette disposition n'est pas de celles dont le législateur, par l'art. 37 de la loi, a limitati

1907 ne contient aucune disposition analogue en ce qui concerne la radiation des listes d'assistance. C'est donc, en cette hypothèse, l'art. 18 de la loi du 14 juill. 1905 qui doit s'appliquer, même à Paris, et ce texte dispose que, lorsqu'il s'agit de personnes assistées par la commune, le retrait de l'assistance ne peut être prononcé que par le conseil municipal. V. Sachet, L'assistance aux vieillards, n. 322. Le directeur de l'Assistance publique avait donc excédé ses pouvoirs en prononçant seul la radiation de la requérante pour la réinscrire avec une allocation inférieure. Il convient d'ailleurs de

vement délégué à un règlement d'administration publique l'adaptation spéciale à la ville de Paris; Considérant que,

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si le décret du 30 mars 1907 a édicté pour Paris une procédure exceptionnelle, permettant au directeur de l'Assistance publique de prononcer des admissions provisoires, soumises à la ratification ultérieure du conseil municipal, ce régime, institué en faveur des assistés, est limité aux inscriptions, et laisse subsister intégralement, en ce qui concerne la radiation, l'art. 18 de la loi du 14 juill. 1905, qui règle, à Paris comme dans les autres communes, les cas de retrait total ou partiel; que, dès lors, le directeur de l'Assistance publique, en retirant lui-même à la requérante, dont le domicile de secours est à Paris, l'allocation de 30 fr., pour la réinscrire, en fixant sa nouvelle allocation à 20 fr., au lieu de soumettre au conseil municipal une proposition de réduction, a excédé ses pouvoirs;... Art. 1er. La décision est annulée.

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Du 23 déc. 1910. Cons. d'Etat. MM. Cahen, rapp.; Blum, comm. du gouv.

CONS. D'ÉTAT 23 décembre 1910. COMMUNE, FRAIS DE PROCÈS, EXEMPTION, CONTRIBUABLE, DOMMAGES-INTÉRÊTS, ATTROUPEMENTS ET RASSEMBLEMENTS, DOMMAGES AUX PERSONNES OU AUX PROPRIÉTÉS, IMPOSITION EXTRAORDINAIRE, VICTIMES DES DOMMAGES, DOMICILE DANS LA COMMUNE (Rép., vo Commune, n. 1507; Pand. Rép., eod. verb., n. 4324 et s.).

L'art. 131 de la loi du 5 avril 1884, aux termes duquel toute partie qui a obtenu une condamnation contre une commune n'est point passible des charges ou contributions imposées pour l'acquittement des frais et dommages-intérêts qui résultent du procès, doit être entendu en ce sens que l'exemption qu'il prévoit concerne, non le principal de la condamnation, mais seulement les dépens de l'instance et les dommages-intérêts alloués pour le préjudice occasionné au plaideur par le fait même du procès (3) (L. 5 avril 1884, art. 131).

Cette disposition ne saurait, en conséquence, être appliquée à l'indemnité qu'un contribuable a obtenue d'une commune, en réparation des dommages par lui éprouvés, au cours de troubles qui s'étaient produits dans cette commune (4) (Id.).

D'ailleurs, l'art. 106, § 2, de la loi du 5 avril 1884, en prescrivant que les dommages-intérêts dont une commune est pas

remarquer que la direction de l'Assistance publique, à Paris, a tendance à exagérer les pouvoirs qui lui sont conférés par le décret du 30 mars 1907. C'est ainsi notamment que le Conseil d'Etat a condamné la prétention que le directeur de l'Assistance publique à Paris avait émise d'avoir qualité pour se pourvoir devant le Conseil d'Etat, en toute hypothèse, contre les décisions de la commission spéciale instituée par l'àrt. 5 du décret. V. Cons. d'Etat, 30 juin 1911, Directeur de l'Assist, publ. (Supra, 3 part., p. 65), et la note de M. Hauriou. (3-4) L'arrêt ci-dessus donne de l'art. 131 de la III PART. 10

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sible, à raison des dommages causés par des altroupements ou rassemblements, seront répartis entre tous les habitants domiciliés dans la commune, en vertu d'un rôle spécial comprenant les quatre contributions directes, n'a édicté aucune exception au profit de ceux qui ont été victimes des dommages (1) (L. 5 avril 1884, art. 106 et 131).

En conséquence, les victimes des troubles, domiciliées dans la commune, sont à bon droit portées sur le rôle d'une imposition extraordinaire, dont le produit est destiné à les indemniser des dommages par elles subis (2) (Id.).

(Comm. d'Armentières).

M. Blum, commissaire du gouvernement, a présenté dans cette affaire les conclusions suivantes :

« A la suite de troubles qui se produisirent à Armentières, le 13 oct. 1903, au cours d'une grève des ouvriers du textile, des dommages furent causés à un certain nombre de propriétés urbaines. Aux termes de l'art. 106 de la loi municipale, la commune d'Armentières se trouvait civilement responsable des dégâts ainsi causés à des propriétés privées par ces attroupements ou rassemblements », et, parmi les propriétaires lésés qui formèrent une réclamation, se trouvaient un sieur Dufour-Lescornez et une dame Motte-Cordonnier. La commune, d'après les indications du dossier, ne déclina pas le principe de sa responsabilité, et s'entendit avec les propriétaires intéressés, à l'amiable.

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loi du 5 avril 1884 une interprétation qui paraît conforme à l'intention qui a présidé à la rédaction de ce texte, emprunté à la loi du 18 juill. 1837. V. les conclusions ci-dessus rapportées de M. le commissaire du gouvernement Blum. Et, cette interprétation une fois admise, il paraît bien s'ensuivre, comme l'a décidé le Conseil d'Etat, que, l'art. 106 de la loi du 5 avril 1884 s'étant borné à disposer que les dommages-intérêts alloués aux victimes de dommages causés par des attroupements seraient répartis entre tous les habitants domiciliés dans la commune, en vertu d'un rôle spécial portant sur les quatre contributions directes, sans faire aucune exception en faveur des victimes des dommages, celles-ci doivent acquitter, dans la proportion de leur imposition aux contributions directes, l'imposition destinée à les indemniser. V. les conclusions précitées de M. Blum.

Il n'en est pas moins vrai que l'équité est singulièrement blessée d'un pareil résultat, et il n'y a pas lieu d'être surpris que la commission du Sénat, saisie d'une proposition de loi de M. Gourju, tendant à modifier les art. 106 et s. de la loi du 5 avril 1884, se soit préoccupée d'y apporter remède. Dans ce but, et pour éviter ce qu'il y a d'injuste, « après avoir décidé que les victimes seraient indemnisées, à leur demander de se verser à elles-mêmes la plus grosse part de l'indemnité, lorsque le cas, fréquent d'ailleurs, serait celui où un industriel, ou un particulier, alimentant le budget communal dans une proportion considérable, se verrait exposé à reverser à la commune, sous forme d'impôt, la plus grande partie de l'indemnité qui lui aurait été accordée par les tribunaux » (Rapport de M. Touron; J. off. de mai 1911, doc. parl. du Sénat, p. 136, 1re col.), la commission du Sénat a substitué au § 2 de l'art. 106 de la loi du 5 avril 1884, qui était ainsi conçu : Les dommages-inté

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En tout cas, en ce qui concerne le sieur DufourLescornez et la dame Motte, aucun jugement n'intervint. Des actions en référé avaient été introduites devant le président du tribunal civil, lequel avait désigné un expert. La commune accepta à l'amiable l'évaluation des dommages, telle que l'expert l'avait déterminée. Mais, lorsque la commune eut acquitté le montant des dégâts causés aux propriétés, et qui s'élevaient à 100.000 fr., il fallut bien se préoccuper de recouvrer le montant des charges extraordinaires qui venaient de lui incomber. Le mode de recouvrement, en cette matière, est prescrit par la loi du 5 avril 1884. L'art. 106, dans sa seconde partie, dispose, en effet, que les dommagesintérêts dont les communes sont responsables sont répartis entre tous les habitants domiciliés dans ladite commune, en vertu d'un rôle spécial comprenant les quatre contributions directes. Ce rôle fut émis le 29 avril 1906. Le sieur Dufour-Lescornez, qui comptait au nombre des habitants domiciliés dans la commune d'Armentières, y fut compris au même titre que les autres contribuables qui habitaient la commune au moment des troubles. C'est contre cette imposition qu'il a réclamé. Le conseil de préfecture lui a donné gain de cause, et la commune d'Armentières, qui a succombé devant les premiers juges, vous défère cet arrêté.

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rêts dont la commune est responsable sont répartis entre tous les habitants domiciliés dans ladite commune, en vertu d'un rôle spécial comprenant les quatre contributions directes le texte suivant : Les dommages-intérêts et les frais dont la commune est responsable sont répartis, en vertu d'un rôle spécial, entre toutes les personnes inscrites au rôle d'une des contributions directes, sans autre exception que celles prévues à l'art. 131, proportionnellement au montant en principal de toutes leurs contributions directes » Cette rédaction a été adoptée sans discussion par le Sénat, dans la séance du 6 juin 1911 (J. off. du 7, déb. parl. du Sénat, p. 602, 1'e col.); et elle a été également acceptée par la commission de la Chambre des députés, saisie du projet de loi dont l'ensemble avait été voté par le Sénat le 6 juin 1911 (J. off. du 7,déb. parl. du Sénat, p. 605, 3o col.).

Il faut bien convenir que le texte, tel qu'il est sorti des délibérations du Sénat, traduit insuffisamment l'intention qui l'a inspiré. On a voulu, cela ressort du rapport de M. Touron au Sénat, écarter, dans le nouvel art. 106, l'interprétation que le Conseil d'Etat avait donnée de cet article, dans l'arrêt ci-dessus, par son rapprochement avec l'art. 131 de la loi de 1884. Or, dire que les dommages-intérêts et les frais dont la commune est responsable seront répartis entre toutes les personnes inscrites au rôle d'une des contributions directes, " sans autre exception que celles prévues par l'art. 131 », n'était-ce pas, dès lors qu'aucune modification n'était apportée à l'art. 131, dire que l'art. 131 serait appliqué, dans l'hypothèse prévue par le nouvel art. 106, avec la portée que lui a donnée le Conseil d'Etat dans l'arrêt ci-dessus? L'objection n'a pas échappé à la commission de la Chambre des députés, et elle avait d'abord songé, pour en tenir compte, à modifier

tenu une indemnité de la commune, à l'occasion desdits désordres; que, dès lors, conformément à l'art. 131 de la loi du 5 avril 1884, il doit être exonéré de ladite imposition; - Arrête :- Il est accordé au réclamant décharge de l'imposition communale et extraordinaire dont il s'agit ». Le conseil de préfecture, comme vous le voyez, se fonde sur un moyen unique. L'art. 131 de la loi du 5 avril 1884 déciderait que le contribuable, qui a obtenu une indemnité de la commune dans les circonstances comme celles que nous vous avons indiquées, a droit à la décharge de l'imposition extraordinaire destinée à en couvrir le montant. L'art. 131, dont il est ainsi fait usage, est conçu dans les termes que voici : « La section (la section de commune), qui a obtenu une condamnation contre la commune ou une autre section, n'est point passible des charges ou contributions imposées pour l'acquittement des frais et dommages-intérêts qui résultent du procès. Il en est de même à l'égard de toute partie qui plaide contre une commune ou section de commune ». Il faut remarquer tout de suite, qu'en admettant même que le principe sur lequel se fonde le conseil de préfecture fût exact, la conséquence qu'il en a tirée n'était pas rigoureuse. En admettant que le requérant dût être considéré comme une partie plaidant contre la commune d'Armentières, au sens de l'art. 131, le seul droit que cet article lui aurait conféré était d'obtenir décharge de la part de l'imposition correspondant à l'indemnité qui lui aurait été personnellement accordée, et non pas du tout décharge entière de l'intégralité de la cote. D'autre part, l'art. 131 parle expressément de sections ou de parties qui plaident contre une commune, des frais et dom

ainsi le texte voté par le Sénat: Les dommages-intérêts et frais... sont répartis, en vertu d'un rôle spécial, entre toutes les personnes inscrites au rôle d'une des contributions directes, proportionnellement au montant en principal de toutes leurs contributions directes, sans autre exception que celles prévues à l'art. 131, l'exemption prévue par ledit article concernant à la fois le principal de la condamnation, les dépens de l'instance et les dommages-intérêts alloués pour le préjudice occasionné aux plaideurs par le fait même du procès ». V. le rapport de M. Frayssinet à la Chambre des députés (J. off. d'août 1912, doc. parl. de la Chambre des députés, p. 1367, col. 2). Si la commission a renoncé à introduire cette précision dans le texte, c'est pour éviter d'occasionner un nouveau retard, par le retour au Sénat qu'aurait nécessité cette modification, et aussi parce qu'il lui a paru que la volonté du législateur était suffisamment claire. L'insertion des mots : « sans autre exception que celles prévues à l'art. 131 -, porte le rapport de M. Frayssinet, a pour but unique d'étendre la disposition de l'art. 131 à l'art. 106,

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ce que le Conseil d'Etat n'a pas voulu faire luimême, - en donnant ici à cette disposition un sens précis, différent de l'interprétation adoptée dans l'arrêt du 23 déc. 1910, sens précis qui ne saurait être douteux à l'avenir; c'est au principal de la condamnation, aussi bien qu'aux dépens et aux dommages alloués pour le préjudice causé par le fait du procès, que s'applique l'exemption » (Rapport de M. Frayssinet, loc. cit.). Il est à prévoir que la Chambre des députés ratifiera les propositions de sa commission; mais on peut regretter que la réforme réalisée ressorte d'un texte dont la portée ne peut être déterminée que par le rapprochement des explications des rapporteurs (1-2) V. la note qui précède,

mages résultant du procès, et, ainsi que nous vous l'avons dit, l'instance engagée par les réclamants contre la commune n'a pas abouti à un jugement. On ne peut même pas dire qu'il y ait eu instance, puisque la seule action introduite a été une demande de référé, ayant pour objet la désignation d'un expert. Sur le rapport de cet expert, la commune a payé à l'amiable le montant des dommages tel qu'il venait d'être calculé. Les sommes versées par la commune l'ont donc été volontairement par elle, et non pas en exécution d'une condamnation prononcée contre elle. Enfin, nous ne pouvons admettre, pour notre part, que le principe posé par l'art. 131 soit en aucune manière applicable au cas prévu par l'art. 106, c'est-à-dire au cas où la responsabilité des communes se trouve engagée à la suite des violences commises par des attroupements. Cette responsabilité est d'ordre tout spécial. Elle a été établie par des textes spéciaux; elle ne rentre pas dans le cas générique prévu par l'art. 131. Le texte même de l'art. 106 s'oppose à cette assimilation, puisqu'il dispose, en termes formels, que le rôle spécial destiné à compenser les dommagesintérêts à la charge de la commune comprend tous les habitants domiciliés dans cette commune. Dans la pensée des auteurs de l'art. 106, la responsabilité des communes, en cette matière, était une responsabilité d'ordre quasi politique: on punissait les habitants d'avoir donné leur vote à une municipalité qui s'était montrée incapable de maintenir l'ordre et de remplir les fonctions de police que la loi lui reconnaissait. Cette responsabilité pèse évidemment d'une façon indistincte sur tous les habitants, qu'ils aient été ou non les victimes des troubles. Et, en équité, il ne saurait en être autrement. Une fois les troubles réparés, une fois les dommages-intérêts payés, celui que le hasard des événements a rendu victime des troubles, celui dont la propriété s'est trouvée endommagée plutôt que toute autre propriété, se trouve exactement dans le même cas que l'habitant dont la propriété est restée indemne et qui est incontestablement imposable. Nous ne voyons donc, ni en fait ni en droit, ni en considérant la lettre des textes, ni en envisageant leur esprit, aucune raison de décider que la règle de l'art. 131 s'applique au cas particulier prévu par l'art. 106.

Mais il y a mieux. Le conseil de préfecture du Nord s'est mépris d'une façon complète sur le sens et sur la portée de cet art. 131, dont il a entendu faire application. Il l'a interprété comme si l'habitant d'une cominune pouvait demander à être exonéré des conséquences de toutes les condamnations prononcées contre la commune et à son profit. Il n'en est rien. L'art. 131 ne parle pas d'une condamnation quelconque. Il se borne à parler des frais et dommages-intérêts qui résultent du procès, et, par ces mots : « frais et dommages-intérêts qui résultent du procès », le législateur a entendu, non pas la condamnation principale, celle qui comporte, par elle-même, la reconnaissance du droit ou la réparation du dommage, mais simplement les frais de justice et les dommages accessoires qu'ont pu causer la résistance de la commune, et la nécessité où le demandeur s'est trouvé de soumettre aux juges la contestation pendante entre la commune et lui.

Sur ce point, l'étude des travaux préparatoires du texte ne laisse aucune espèce de doute. L'art. 131 de la loi de 1884 n'est que la reproduction de l'art. 58 de la loi du 18 juill. 1837, et cet article, qui ne figurait pas dans le projet du gouvernement, y a été introduit dans les circonstances que voici. La commission de la Chambre des députés, puis la Chambre elle-même, avaient ajouté au projet

gouvernemental un premier texte, qui décidait que la section de commune, qui aurait obtenu des condamnations contre la commune, ne serait point passible des charges imposées pour leur acquittement. Il était question alors des condamnations, au sens large, telles qu'elles résultaient du jugement, de la condamnation principale aussi bien que des frais ou des dommages-intérêts. Mais vous allez voir dans quelles conditions ce texte fut modifié par la Chambre des pairs. Un certain nombre de pairs avaient demandé que le privilège qui avait été ainsi reconnu à la section plaidant contre la commune le fût également aux particuliers. Mais, tout en admettant le principe de cette extension, d'autres pairs, et notamment M. Tripier, expliquèrent que la rédaction de la Chambre était beaucoup trop générale, en ce sens qu'elle accordait l'exemption des contributions imposées pour l'acquittement de la condamnation, sans distinguer entre les divers éléments que cette condamnation pouvait comprendre. La condamnation, dit M. Tripier, se compose de deux choses: la condamnation principale, et puis la condamnation aux dommages-intérêts. Pour la condamnation principale, il est hors de doute, à mes yeux, que la section ou le particulier qui a gagné ne peut pas être déchargé de sa part contributive de cette partie de la condamnation. Ce n'est pas le procès qui a fait naître la dette principale; aussi elle doit peser sur toute la commune indistinctement. Le débat ne peut s'agiter que sur les conséquences directes du procès, car, pour les dépens, les dommages-inintérêts, pour cette partie-là, je maintiens les propositions de la commission ». Lorsque M. Tripier eut terminé son discours, le président signala à la commission la justesse de la distinction qui venait d'être proposée. Aussi, à une séance suivante, la séance du 7 avril 1835, un des membres qui avaient proposé d'étendre aux particuliers le principe admis par la Chambre, M. le comte Roy, vint-il se rallier, en termes explicites, à la distinction apportée par M. Tripier quelques jours auparavant : " Les membres qui ont fait l'amendement et qui l'ont appuyé, dit-il, n'ont jamais entendu que la partie qui gagnerait son procés ne participerait pas au capital; il n'a été question que des frais et des dommages-intérêts qui pourraient résulter du fait même du procès Et, comme sanctions aux observations de M. Tripier et de M. le comte Roy, qui avaient visiblement obtenu l'adhésion de la Chambre des pairs, la rédaction de la commission était modifiée dans des termes qui montrent avec évidence que leur système avait prévalu. On ne parlait plus, comme dans le texte primitif, des contributions imposées pour l'acquittement de la condamnation; il n'était plus question que des condamnations imposées pour l'acquittement des frais et des dommages-intérêts qui résulteraient du fait du procès. C'est cette rédaction qui devint l'art. 58 de la loi, et cette modification du texte, rapprochée des observations que nous venons de vous rappeler, et dont l'une émanait de l'un des auteurs de l'amendement, montre bien qu'il n'était plus question d'exonérer les habitants du montant de la condamnation principale, et que la commission s'était bornée à formuler, par son nouveau texte, la distinction même que M. Tripier avait proposée le premier à la Chambre des pairs.

« C'est ainsi que fut voté pour la première fois ce texte, qui est repris à peu près littéralement dans l'art 131 de la loi du 5 avril 1884, et la distinction sur laquelle il repose nous paraît correspondre d'une façon tout à fait équitable à la nature des choses. Quand un procès s'engage entre une commune et un de ses habitants, ce procès peut

résulter et il résultera même, dans la plupart des cas, de ce que l'habitant s'est trouvé le fournisseur de la commune, son 'bailleur, de ce qu'il lui a fourni des denrées, loué un immeuble. En cas de désaccord et de procès entre l'habitant et la commune sur le montant des sommes dues, la condamnation principale équivaudra au montant de la prestation, laquelle est évidemment une dépense d'intérêt général, à laquelle l'intéressé, par conséquent, doit contribuer comme tous les autres habitants de la commune. Le cas est le méme que celui du créancier d'une société qui se trouverait en même temps son actionnaire. Comme créancier, il fera valoir contre la société son action; comme actionnaire, si le procès est perdu, il supportera sa charge de la condamnation prononcée contre la société dont il avait fait partie. Le seul fait qui ait indûment accru les charges communales, ce n'est pas, par conséquent, la condamnation principale, c'est uniquement la condamnation accessoire, puisqu'elle correspond à cette résistance injustifiée de la commune qui a provoqué le procès. C'est de ces charges supplémentaires, encourues malgré lui et contre lui, que la loi a voulu que l'adversaire de la commune fût exempt, et, à la vérité, même sur ce point particulier, même en ce qui concerne ces dépens et dommages accessoires résultant du procès, on comprendrait aisément que la loi eût adopté une solution contraire. La présomption est qu'en refusant le paiement, en s'exposant au procès, la commune a cru agir dans l'intérêt général des habitants, et nous ne voyons pas de raison, en réalité, pour rompre sur ce point particulier, entre la commune et l'un quelconque des citoyens qui la composent, le principe de la solidarité commu

nale.

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A cet égard, la question ne peut plus se poser, puisqu'elle serait résolue d'avance par un texte très formel. Mais il n'y a pas lieu d'en étendre l'application, ni d'élargir l'exception qu'il apporte aux principes généraux. Le principe, en cette matière, c'est que celui qui traite avec une commune, qui agit contre elle, revêt, par cela même, deux qualités distinctes celle d'un contractant ou d'un créancier, qui aura, le cas échéant, à faire valoir des droits et des intérêts particuliers; celle d'un habitant, qui devra supporter comme les autres sa part de dette, sa part de charge, qui devra comme les autres payer sa quote-part ou sa prime d'assurance dans cet ensemble solidaire que constitue la commune. Le montant des charges sociales auxquelles il contribue n'a pas été accru du fait que la commune a traité avec lui, au lieu de traiter avec l'habitant d'une commune différente, et le caractère particulier de ses intérêts ne diminue pas sa part de responsabilité générale.

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Ainsi, pour nous résumer, nous estimons que l'art. 131 n'était pas applicable en l'espèce. L'eût-il été, nous estimons qu'il n'a pas le sens ou la portée que le conseil de préfecture lui a donné, et qu'il serait impossible d'en tirer les conclusions que le conseil de préfecture en a déduites. L'art. 131 écarté, nous ne nous trouvons plus en présence que de l'art. 106, et de cette formule tout à fait expresse et générale « les dommages et intérêts dont la commune est responsable, sont répartis entre tous les habitants domiciliés dans ladite commune, en vertu d'un rôle spécial comprenant les quatre contributions directes ». C'est donc à tort que le conseil de préfecture a accordé décharge des contributions portées à ce rôle, par le motif que le contribuable avait été, en même temps, une des victimes indemnisées. Nous concluons, par suite, à l'annulation de l'arrêté du 29 juin 1907; à ce que le sieur Dufour-Lescornez soit rétabli sur le rôle

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