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DROIT DE RÉPONSE, REFUS D'INSERTION, PROVOCATION, INJURE, DIFFAMATION (Rép., vo Journaux et écrits périodiques, n. 723 et s.; Pand. Rép., vo Presse, n. 662 et s.). 29 DIFFAMATION, DELIT, PROVOCATION (Rép., v Diffamation, n. 1228 et s.; Pand. Rep., v Diffamation-injure, n. 708 et s.).

1° Si le droit de réponse, consacré par l'art. 13 de la loi du 29 juill. 1881, est général et absolu, et si celui qui l'exerce est seul juge de la forme, de la teneur et de l'utilité de la réponse, l'insertion de cette réponse peut pourtant être refusée, si elle est contraire à la loi (1) (L. 29 juill. 1881, art. 13).

2o D'autre part, si la provocation enlève à l'injure envers des particuliers son caractère délictueux, il en est différemment de la diffamation, à laquelle ne s'applique pas l'excuse de provocation (2) (L. 29 juill. 1881, art. 32 et 33).

3o Par suite, si la réponse dont l'insertion a été refusée contient des expressions simplement injurieuses à l'égard de personnes déterminées, les juges du fond ont à rechercher si l'attaque n'a pas été ellemême injurieuse, et ne constitue pas l'excuse de provocation, en telle sorte que, la réponse n'étant pas contraire à la loi, l'insertion n'en pouvait être refusée (3) (L. 29 juill. 1881, art. 13, 32 et 33).

Au contraire, le refus d'insertion d'une réponse est justifié, lorsqu'elle contient des imputations diffamatoires, sans qu'il y ait à prendre en considération les conditions ni les termes de l'attaque (4) (Id.).

Spécialement, les juges refusent à bon droit d'ordonner l'insertion d'une réponse, malgré le caractère diffamatoire de l'arti cle qui l'a provoquée, lorsque cette réponse contient elle-même, à l'encontre de l'auteur de l'article auquel il est répondu, des imputations diffamatoires, telles que celle d'a voir été disqualifié par une sentence arbitrale, et d'être un « plagiaire » (5) (Id.).

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(1 à 5) Si le droit de réponse est, en principe, général et absolu, et si celui qui est appelé à l'exercer demeure le seul juge de l'opportunité, de la forme et de la teneur même de sa réponse (V. Cass. 13 mars 1908, S. et P. 1908.1.297; Pand. pér., 1908.1.297; Paris, 25 avril 1910, S. et P. 1910.2.255; Pand. pér., 1910.2.255, et les renvois), néanmoins, on peut refuser l'insertion d'une réponse dont les termes sont contraires aux lois et aux bonnes mœurs ou à l'intérêt légitime des tiers. V. Paris, 25 avril 1910 (sol. implic.), précité, et les renvois. Adde, Barbier, Code expliqué de la presse, 2e éd., par Matter et Rondelet, t. 1er, n. 131.

L'auteur d'une réponse ne peut donc exiger l'insertion d'une réponse contenant, soit à l'égard des tiers, soit envers l'auteur de l'article auquel il

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traire à la loi; Considérant qu'aux termes des art. 29 et s. de la loi du 29 juill. 1881, la diffamation est un délit; que si, aux termes de l'art. 33, l'injure envers un particulier n'est punissable que lorsqu'elle n'a pas été précédée de provocation, aux termes des art. 32 et 33 combinés, cette excuse ne s'applique pas à la diffamation envers particulier; Considérant, dès lors, que, si la réponse dont l'insertion a été refusée contient des expressions simplement injurieuses à l'égard de personnes déterminées, les juges du fond ont à se demander si l'attaque n'a pas été elle-même injurieuse, si elle ne constitue pas l'excuse de provocation, et si l'insertion ne doit pas être ordonnée, n'étant pas contraire à la loi; que c'est là une application normale du principe, constamment admis par la jurisprudence, que, dans l'appréciation des termes de la réponse, on doit prendre en considération la nature et la forme de l'attaque, les besoins de la défense, et la légitime susceptibilité de la personne nommée ou désignée; Mais considérant que les juges n'ont point à se préoccuper de l'article qui a motivé la réponse, quand cette réponse, dépassant l'expression vive, ironique, malicieuse, malveillante, blessante ou même injurieuse, renferme des termes nettement diffamatoires; que peu importerait, en effet, que ledit article initial fùt lui-même diffamatoire, puisque cette provocation n'excuserait pas la diffamation constatée dans la réponse, laquelle demeurerait délictueuse, c'est-à-dire contraire à la loi; — Considérant qu'il ne saurait être au pouvoir d'une juridiction de jugement de favoriser la perpétration d'un délit chez l'auteur de la réponse, de l'imposer même au gérant du journal condamné à l'insertion, et de donner ouverture, par l'effet de sa propre sentence, à des actions en dommages-intérêts de la part des personnes lésées par le délit; - Considérant, en conséquence, qu'une réponse, où l'on relève des expressions diffamatoires, doit être rejetée de plano, sans considération des conditions ni des termes de l'attaque, et qu'on ne saurait, dans aucun cas, en ordonner l'insertion; - Considérant, en fait, que, dans les circonstances énoncées au jugement de première instance, Jean Beck, en réponse à un article du journal La Revue musicale, du 15 mai 1910, signé Pierre Aubry, où il était nommé, a adressé au gérant dudit journal, avec

est répondu, des injures ou des diffamations tombant sous l'application de la loi du 29 juill. 1881. La réponse est, en effet, en ce cas, contraire aux lois, puisqu'elle contient un délit d'injure ou de diffamation. Mais en est-il encore ainsi, si l'injure ou la diffamation contenues dans la réponse ont été provoquées par des injures ou des diffamations contenues dans l'article auquel il est répondu? L'arrêt ci-dessus fait, à cet égard, une distinction, qui re. pose sur la différence qui existe entre la diffamation et l'injure, au point de vue de l'excuse résultant de la provocation. La provocation, si elle peut constituer une cause d'atténuation de responsabilité, ne fait pas disparaître le délit de diffamation. V. Cass. 8 juin 1905 (S. et P. 1905.1.384), et les renvois. Au contraire, l'injure entre particu

réquisition d'insérer, une réponse audit article; Considérant qu'on lit dans cette réponse (page 1): « Je croirais commettre une inconvenance à l'égard des arbitres, si je me laissais aller à discuter de nouveau mes droits avec un adversaire que leur sentence a disqualifié »; (page 6):

L'annonce suivante, indiquant le retrait de la première édition plagiaire du livre de M. Pierre Aubry »; (page 6): ... « Quelques semaines plus tard, l'édition plagiaire se trouva remplacée par une deuxième édition; (page 6) ... « Ces corrections et ces modifications consistaient en les changements suivants de l'édition plagiaire (page 6): « Edition plagiaire, nouvelle édition »; Considérant que le premier passage ci-dessus transcrit contient une diffamation; qu'en effet, le mot

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disqualifié », dans le sens général où il est employé par Jean Beck à l'adresse de Pierre Aubry, signifie déshonoré, flétri; que, si l'on rapproche ce mot du sujet de la proposition « que leur sentence a disqualifié », on trouve bien là l'imputation d'un fait précis, portant atteinte à l'honneur ou à la considération de Pierre Aubry; - Considérant que les quatre autres passages visés contiennent également une diffamation; qu'en qualifiant d'édition plagiaire, à quatre reprises, la première édition de l'ouvrage de Pierre Aubry « Trouvères et Troubadours », Jean Beck indique que Pierre Aubry a pillé une œuvre littéraire ou artistique appartenant à autrui, pour s'en approprier le mérite; que, là encore, il y a imputation d'un fait précis, portant atteinte à l'honneur ou à la considération de Pierre Aubry; - Considérant, dès lors, qu'en vertu des principes de droit ci-dessus rappelés, il n'y a lieu de se reporter à l'article auquel il est répondu, les diffamations contenues dans la réponse ne pouvant, dans aucune mesure, être excusées même par celles qu'on pourrait constater dans l'attaque; que c'est donc à bon droit que les premiers juges ont refusé d'ordonner l'insertion, et renvoyé le gérant et le directeur du journal La Revue musicale, des fins de la poursuite; - Par ces motifs; Confirme le jugement dont est appel, etc.

Du 2 janv. 1912. C. Paris, ch. corr. MM. de Valles, prés.; Scherdlin, subst.; Gouzy et Albert Martin, av.

liers ne constitue un délit qu'autant qu'elle n'a pas été provoquée. V. Cass. 2 mai 1910 (S. et 1911.1.247; Pand. pér., 1911.1.247). Si donc la réponse contient des injures envers l'auteur de l'article auquel il est répondu, ces injures n'étant pas délictueuses au cas où elles sont excusées par la provocation, le refus d'insertion de la réponse n'est pas justifié, dès lors que l'auteur de la réponse établit qu'il a été provoqué par les injures contenues dans l'article auquel il répond. Si, au contraire, la réponse contient des diffamations, la provocation ne pouvant les excuser, la réponse est délictueuse, et par suite contraire aux lois, quel que soit le caractère des attaques auxquelles se serait livré l'auteur de l'article incriminé; le refus d'insérer la réponse est, par suite, justifié.

PAU 24 juillet 1911.

NOTAIRE, NOTAIRE EN SECOND, PARTAGE DES HONORAIRES, DÉCRETS DU 25 AOUT 1898, REGLEMENT INTÉRIEUR, TESTAMENT AUTHENTIQUE, CONCOURS A L'ACTE (Rép., vo Notaire, n. 977 et s., 1537 et s., 2763 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 582 et s., 1231 et s., 3399 et s.).

Lorsqu'un testament authentique a été reçu par deux notaires en présence de

(1-2) La question du partage des honoraires d'un acte entre les notaires qui ont participé à sa réception a été, dans nos Recueils (Sirey et Journal du Palais), l'objet d'une magistrale étude de notre regretté collaborateur, M. Labbé, à l'occasion d'un arrêt de la Cour de cassation du 7 janv. 1879 (S. 1879.1.241. - P. 1879.609), qui, dans l'hypothèse d'un acte à la rédaction et à la réception duquel un notaire avait effectivement concouru avec le notaire dépositaire de la minute, avait reconnu au notaire en second droit au partage des honoraires. Adde, les conclusions de M. l'avocat général Desjardins, reproduites au cours de cet article. Notre savant collaborateur, dans la note qu'il avait consacrée à cet arrêt, avait défendu la thèse du partage d'honoraires au profit du notaire en second, quelle que soit sa participation à l'acte reçu, n'y eût-il été appelé que pour donner sa signature, sauf à mesurer sa part de rémunération, suivant que son intervention à l'acte aurait été plus ou moins considérable.

Depuis que cette note a été publiée, il est intervenu, en outre de la loi qui a réglementé à nouveau l'intervention du notaire en second dans les actes notariés (L. 12 août 1902), un fait d'une portée considérable; la loi du 20 juin 1896 (S. et P. Lois annotées de 1896, p. 125; Pand. pér., 1898.3.123) a prescrit l'établissement de tarifs légaux des honoraires des notaires, et a été suivie, le 25 août 1898, de décrets, qui, pour chaque Cour d'appel, ont fixé les tarifs des honoraires et frais dus aux notaires. V. le texte de ces décrets, S. et P. Lois annotées de 1900, p. 955; Pand. pér., 1898.3.127, et le texte des tarifs annexés, Bull, des Lois, 12 série, 2081, n. 36600 à 36626. V. encore, -notre Rép. gen. du dr. fr., v° Notaire, n. 995 et s.; Pand. Rep., eod. verb., n. 682. C'est en tenant compte de cette législation nouvelle que la question du partage des honoraires doit aujourd'hui être étudiée. Aussi convient-il, pour apprécier la solution qu'elle doit recevoir, de rappeler d'abord brièvement quelles sont les règles auxquelles a été et est aujourd'hui soumise la participation d'un notaire en second dans les actes, pour exposer ensuite comment se posait la question du partage des honoraires jusqu'à la date de la publication des décrets du 25 août 1898, et quelle solution elle comporte depuis la mise en application de ces décrets, et pour appliquer enfin à l'espèce cidessus les principes qui se seront dégagés de cet

examen.

I. L'art. 9 de la loi du 25 vent. an 11 posait en règle que les actes notariés seraient reçus par deux notaires, ou par un notaire assisté de deux témoins. La pratique s'était établie de se borner à faire apposer sur l'acte la signature du notaire en second, sans qu'il eût assisté à la réception de l'acte. Mais, la Cour de cassation ayant reconnu l'irrégularité de cette pratique (V. Cass. 25 janv. 1841, S. 1841.1.105. - P. 1841.1.154; 16 nov. 1841, 1842.1.128. P. 1843.2.573), et l'effet de cette jurisprudence étant de frapper de nullité un grand ANNÉE 1913. 1er cal.

deux témoins, le notaire en second, qui a participé à la réception de ce testament, dont son confrère a gardé la minute, et qui, par suite de cette participation, est responsable des nullités de forme et de fond qui pourraient vicier le testament, doit être considéré comme ayant concouru réellement à la réception de l'acte (1) (C. civ., 971 et s.; L. 20 juin 1896; Décr., 25 août 1898, art. 11).

Si donc le décret, qui a fixé, pour le ressort de la Cour d'appel, le tarif des hono

nombre d'actes antérieurement reçus, et de compromettre ainsi très gravement les intérêts des parties, la loi interprétative du 21 juin 1843 est intervenue pour valider les actes reçus avant sa promulgation, dont la nullité aurait pu être demandée à raison de la non-participation à l'acte du second notaire ou des témoins, et pour restreindre dans l'avenir à un petit nombre d'actes (donation entre vifs, donation entre époux pendant le mariage, révocation de testaments ou de donations, reconnaissance d'enfant naturel, procurations pour consentir ces divers actes) la nécessité de la présence réelle du second notaire ou des témoins instrumentaires. L'art. 4 de cette loi spécifiait, en outre, qu'il n'était rien innové aux règles sur la forme des testaments, d'où la conséquence que les testaments authentiques demeuraient soumis aux prescriptions de l'art. 971, C. civ., aux termes duquel le testament par acte public est reçu par deux notaires en présence de deux témoins, ou par un notaire en présence de quatre témoins.

Le rôle du notaire en second a été à nouveau réglementé et précisé par la loi précitée du 12 août 1902, qui, modifiant l'art. 9 de la loi du 25 vent. an 11, a disposé que les actes notariés pourraient désormais être reçus par un seul notaire, en faisant toutefois exception : 1° pour les testaments, qui demeurent régis par les art. 971 et s., C. civ.; 2o pour les actes énumérés par la loi de 1843, auxquels ont été ajoutées les acceptations de donations et les autorisations pour consentir ces divers actes, la présence du notaire en second ou des témoins n'étant requise qu'au moment de la lecture de l'acte et de la signature des parties, comme le prescrivait déjà la loi de 1843, ou de leur déclaration de ne savoir ou ne pouvoir signer; 3° pour les actes dans lesquels les deux parties ou l'une d'elles ne savent ou ne peuvent signer, auquel cas l'acte doit être soumis à la signature d'un second notaire ou de deux témoins.

Le rôle du notaire en second, depuis les lois de 1843 et de 1902, se trouve donc très nettement délimité. En dehors des testaments authentiques, pour lesquels il demeure soumis aux prescriptions des art. 971 et 972, le notaire en second n'intervient plus nécessairement, dans les actes où sa présence est nécessaire, que pour assister à la lecture de l'acte et à sa signature, ou à la déclaration par les parties qu'elles ne peuvent ou ne savent signer.

II. Comme nous l'avons rappelé au début de cette note, la question de savoir si le notaire en second a droit à un partage d'honoraires, à raison de sa participation aux actes à la réception desquels il est intervenu, s'était posée antérieurement à la loi du 20 juin 1896 et aux décrets qui, en exécution de cette loi, ont fixé le tarif des honoraires des notaires, en l'état de la législation alors existante sur le rôle du notaire en second dans les actes notariés.

Si l'accord s'était fait sans difficulté sur ce point qu'un notaire ne peut, en aucune circons

raires de notaires, au cas de concours d'un notaire en second à la réception d'un acte, alloue au notaire en second la moitié des honoraires afférents à l'acte, en réservant seulement le cas où le règlement intérieur de la compagnie des notaires disposerait autrement, le notaire en second, qui a participé à la rédaction du testament authentique, a droit, à défaut de disposition contraire du règlement intérieur de la compagnie, à la moitié des honoraires (2) (Id.).

tance, prétendre à un partage d'honoraires, pour sa participation à la rédaction d'actes reçus en dehors de son ressort (V. Cass. 17 mai 1899, S. et P. 1900.1.21, la note et les renvois; Pand. pér., 1899.1.240), il en était différemment, au cas où le notaire en second avait concouru à la récep tion d'actes passés devant un notaire de son ressort. Trois opinions avaient été soutenues : l'une, peu suivie, qui refusait en toute hypothèse le partage d'honoraires (V. en ce sens, Trib. de Rambouillet, 13 juill. 1876, cassé par l'arrêt du 7 janv. 1879, précité; Legrand, Tr. formul. des honoraires des notaires, n. 730 et s.); une autre, qui admettait que le notaire avait droit au partage des honoraires, ne fût-il intervenu que par sa signature, pour suppléer à la présence de deux témoins, et sans qu'il fût besoin qu'il eût donné son concours au notaire rédacteur pour la préparation ou la rédaction de l'acte, sauf à mesurer la part d'honoraires au rôle qu'il avait eu dans la réception de l'acte (V. en ce sens, la note de M. Labbé sous Cass. 7 janv. 1879, précité); une troisième, enfin, d'après laquelle le second notaire n'avait droit au partage d'honoraires que si, sans se borner à intervenir par sa signature pour conférer l'authenticité à l'acte reçu par son confrère, il avait pris part à la rédaction de cet acte, et donné ainsi à son confrère un concours effectif. V. les conclusions de M. l'avocat général Desjardins sous Cass. 7 janv. 1879, précité; Nancy, 31 janv. 1891 (S. 1891.2.76.

P. 1891.1.451; Pand. pér., 1891.2.293), et les renvois. Adde, Rolland de Villargues, Rép. du not., vo Honoraires, n. 194; Amiaud, Tr. formul. du not., vo Ilonoraires, n. 66; Aubertin, Des honoraires et frais d'actes des notaires, p. 136. On a invoqué en faveur de cette dernière opinion l'arrêt de Cass. 7 janv. 1879, précité. Mais cet arrêt s'est borné à admettre le droit au partage d'honoraires dans une hypothèse où le notaire en second avait donné un concours effectif à la rédaction de l'acte, sans se prononcer sur le point de savoir s'il y avait lieu à partage en dehors de cette hypothèse.

III. Les décrets du 25 août 1898, sur les tarifs des notaires, ont, comme nous l'avons déjà dit, introduit dans la discussion de cette question un élément nouveau et fort important. Après avoir envisagé, dans l'art. 10, le concours à un acte d'un second notaire, en disposant que ce concours n'augmente pas l'honoraire, ces décrets ajoutent, dans l'art. 11, 2, qu'entre notaires, • si le règlement intérieur de la compagnie n'en dispose pas autrement, le partage se fait de la manière suivante : le notaire qui garde la minute a droit à la moitié de l'honoraire, et le notaire en second à l'autre moitié... ». En prévoyant ainsi le partage d'honoraires, et en le subordonnant seulement aux prescriptions particulières des règlements intérieurs des compagnies de notaires, les décrets du 25 août 1898 ont condamné aussi nettement que possible l'opinion qui refusait, en toute hypothèse, au notaire en second le droit

II PART. 4

Barbe C. Capdecomme).

:

16 nov. 1910, jugement du tribunal civil de Tarbes, ainsi concu: « Le Tribunal; --Attendu que Me Baurez a cédé à Me Barbe, en même temps que son office, tous droits aux honoraires proportionnels qui pourraient ultérieurement être dus à raison des actes reçus par lui; qu'en ce qui touche les droits litigieux, relatifs au testament Lefébure, il appert des mentions insérées dans ses registres qu'il, n'avait pas entendu en faire l'abandon, et que ces droits comme tous autres ont été transmis au demandeur, dont l'action doit être déclarée recevable; Au fond Attendu que le règlement intérieur de la compagnie des notaires de l'arrondissement de Tarbes, auquel il convient de se reporter, conformément aux dispositions de l'art. 11 du décret du 25 août 1898, décide, en son art. 43, que les honoraires des actes auxquels deux notaires ont concouru sont partagés par moitié entre eux. sauf conventions contraires »; mais que, pour ne pas avoir défini ce qu'il faut entendre par le mot « concouru », ce texte laisse entière la question soumise au tribunal; que, s'il convient de donner à ce mot sa signification la plus large, il faudrait dire que, dans toutes les hypothèses où la législation prévoit, pour tenir lieu de témoins instrumentaires, l'intervention de deux notaires, les honoraires devraient être partagés entre ceux-ci;

à des honoraires sur l'acte auquel il était intervenu, et mis hors de discussion le principe même du partage des honoraires entre les deux notaires.

Mais la question reste de déterminer dans quels cas il y a lieu à partage d'honoraires, en dehors, bien entendu, de stipulations des règlements intérieurs, expressément réservées par les décrets du 25 août 1898. Sans doute, la loi du 12 août 1902 n'a pas sensiblement innové en ce qui concerne les conditions et les modalités de l'intervention obligatoire du notaire en second. Mais, si l'on tient compte, d'une part, de ce que les décrets du 25 août 1898 ne prévoient le partage d'honoraires que pour le cas de a concours » du notaire à l'acte, ce qui était l'expression même qui avait été employée pour soutenir que le droit au partage des honoraires existait seulement lorsque le notaire en second ne s'était pas borné à donner sa signature, mais avait eu une participation effective à la rédaction et à la réception de l'acte; si l'on tient compte, d'autre part, de ce que, à défaut de stipulation des règlements intérieurs des compagnies de notaires, les décrets du 25 août 1898 attribuent au notaire en second la moitié des honoraires, ce qui serait certainement disproportionné, lorsqu'il vient simplement donner sa signature à un acte préparé et rédigé par un confrère, il nous semble bien difficile de maintenir aujourd'hui l'opinion, qui pouvait être défendue par de très sérieuses raisons auparavant, d'après laquelle, en toute hypothèse, le notaire en second a droit au partage; il faut désormais reconnaître que le partage d'honoraires n'est possible que si le rôle du notaire en second n'est pas seulement le rôle de figurant auquel l'ont restreint les lois du 21 juin 1843 et du 12 août 1902, et s'il a pris une part effective à la rédaction de l'acte.

IV. Dans l'espèce de l'arrêt ci-dessus recueilli, le règlement intérieur de la compagnie, à laquelle appartenaient les deux notaires en cause, prévoyait

quel que soit, en effet, le rôle plus ou moins étendu qu'ils remplissent, ils n'en font pas moins, dans tous les cas, œuvre notariale et contribuent notamment à conférer en commun le caractère d'au thenticité à l'acte qu'ils reçoivent; que pareille interprétation ne saurait être adinise, car elle aboutirait à une véritable injustice; que, si cela est toujours vrai, au cas où deux notaires sont appelés à la réception d'un des actes solennels mentionnés à la loi du 12 août 1902, alors que la présence de l'un des notaires n'est requise qu'au moment de la lecture de l'acte et de la signature des parties, cela peut encore être vrai parfois lorsqu'il s'agira de la réception d'un testament authentique, les exigences théoriques de l'art. 972, C. civ., n'impliquant pas nécessairement la collaboration effective de deux notaires, puisqu'il sera loisible en fait à l'un d'eux, figurant, par hypothèse, à défaut d'un nombre suffisant de témoins, de se renfermer dans un rôle de simple spectateur; que c'est donc à tort que le demandeur croit voir, dans la seule présence des deux notaires à l'acte, une circonstance justifiant a priori le partage des honoraires; Attendu que l'idée de responsabilité notariale, trop extrinsèque aussi, ne contient pas davantage le critérium cherché; que l'on est ainsi conduit, suivant une doctrine qui a conservé toute sa force, à considérer que le droit aux honoraires

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le partage des honoraires, dans une disposition ainsi conçue : Les honoraires des actes auxquels deux notaires ont concouru sont partagés par moitié entre eux, sauf conventions contraires ». Ce règlement n'apportait ainsi aucune autre dérogation aux règles posées par les décrets du 25 août 1898 que de prévoir la possibilité de conventions contraires, réserve qui était sans importance dans la présente affaire, où il n'était argué d'aucune convention ayant trait au partage d'honoraires. Pour déterminer si le notaire en second, qui avait assisté un de ses confrères dans la réception d'un testament authentique, avait droit au partage des honoraires afférents à cet acte, il fallait donc rechercher si le notaire en second avait concouru » au testament authentique, au sens que les décrets du 25 août 1898 ont, à notre avis, attaché à cette expression. La Cour de Pau a estimé qu'il y avait eu, de la part du notaire en second, concours au testament, donnant droit au par. tage d'honoraires, et cette solution nous paraît devoir être approuvée. Elle ressort avec évidence tant du rôle que les art. 971 et 972, C. civ., dont les dispositions ont, comme nous l'avons rappelé, été maintenues intégralement en vigueur par la loi du 21 juin 1843 et la loi du 12 août 1902, ont assigné au notaire en second, que des conséquences qui en dérivent. D'après l'art. 971, le testament authentique est celui qui est reçu par deux notaires; c'est dire que, pour la réception de cet acte, les deux notaires sont mis sur le même pied, et que l'un et l'autre, encore bien qu'un seul doive garder la minute, doivent veiller à l'accomplissement des formalités multiples que prescrivent les art. 971 et s. D'autre part, l'art. 972 précise que, si le testament est écrit par un seul des notaires, la dictée leur en est faite par le testateur; celui qui ne tient pas la plume, et auquel la dictée est faite en même temps qu'à son confrère, est ainsi en mesure de s'assurer que les volontés du testateur

proportionnels, pour chacun des notaires ayant participé à la réception d'un testament authentique, dérive de leur coopération réelle, réclamée et voulue par la partie comparante, qui, désireuse d'entourer son acte de dernière volonté de la plus grande somme de garanties, fait appel à l'assistance et à la compétence de deux officiers publics, lesquels, dans ce cas, accomplissent dans toute leur plénitude les Attendu fonctions dont ils sont investis;

que, de ce qui précède, du rôle facultatif joué par l'un des notaires, il s'évince que la preuve de la réquisition de la partie ne saurait résulter des énonciations de l'acte lui-même; que cette preuve demeure donc à la charge du demandeur; que celui-ci fait valoir des présomptions tirées de ce que le testament du 15 mai 1907, qui est seul sorti à effet, avait été précédé de trois autres, à la réception desquels Me Baurez, et avant lui Me Souviron, son prédécesseur, avaient participé; que cette persistance est relevée comme démonstrative de la volonté de Mme Lefébure de faire recevoir Atson testament par deux notaires; tendu que cette conclusion est loin de s'imposer nécessairement, surtout si l'on songe que la personnalité de l'officier public assistant Me Capdecomme s'est trouvée être différente d'un testament à l'autre ; que Me Barbe s'appuie encore sur la circonstance que MMes Souviron et Baurez ont reçu de la testatrice, après chacune de

-

ont été exactement consignées. Il est, dans ces conditions, impossible de contester que le notaire en second a un rôle effectif dans la rédaction du testament authentique, qu'il participe réellement à sa rédaction, et qu'ainsi, il y a, de sa part, le a concours, que les décrets du 25 août 1898 ont entendu rémunérer par le partage des honoraires. Cela est si vrai, et le caractère effectif de la participation du notaire en second à la rédaction du testament authentique peut d'autant moins être discuté que, tandis que l'on s'accorde à reconnaître que le notaire en second n'est pas responsable des nullités qui peuvent vicier un acte, alors qu'il est resté complètement étranger à sa rédaction, et qu'il n'a fait qu'y apposer sa signature (V. Grenoble, 28 juill. 1865, S. 1866.2.137.-P. 1866.580; Lyon, 13 avril 1867, Rev. du not., n. 1913; Paris, 13 mars 1890, Gaz. Pal., 15 mars 1890; Rolland de Villargues, Respons. des not., n. 173; Pagès, De la respons. des not., p. 215; Dict. du not., v° Respons. des not., n. 405 et 406; Eloy, De la respons. des not. et de la discipline notariale, t. 1°r, p. 329 et 380; Mathieu, De la respons. civile des not. en dr. fr., p. 136; Clerc, Tr. gen. du not., t. 1er, p. 441; Clerc, Dalloz et Vergé, Manuel du not., t. 2, n. 191; Rogier, Et. sur les tabellions et la force de leurs actes, p. 144; Bauby, Tr. de la respons. des notaires, p. 354), on admet, au contraire, que la responsabilité du notaire en second peut être engagée, au cas où un vice de forme quelconque viendrait inficier le testament authentique à la réception duquel il a participé. V. Bordeaux, 8 mai 1860 (S. 1860.2.433.-P. 1861.823; Pand. chr.); Bauby, op. cit., p. 357. Et c'est là une raison de plus pour reconnaître que le notaire en second á droit au partage des honoraires, car il est équitable que la responsabilité, qui peut lui incomber à raison des vices de forme du testament, trouve une contrepartie dans sa participation aux honoraires. V. sur ce point, Amiaud et Voland, op. cit., n. 696.

leurs interventions, une rémunération d'recte, se chiffrant à 200 fr.; que ce fait, non contesté, qui serait, au besoin, établi par une lettre de Me Souviron, du 26 sept. 1903, semble se retourner à l'encontre des prétentions du demandeur; qu'étant données la situation de fortune et l'éducation de Mme Lefébure, il apparait, en effet, que celle-ci a entendu indemniser largement les notaires comparants, pour le dérangement et la perte de temps qu'ils avaient subis; qu'elle se fut sans doute montrée moins généreuse, si elle avait pu croire que ceux-ci seraient appelés à prendre leur part dans les honoraires proportionnels; qu'il n'est pas d'ailleurs allégué qu'elle ait pris pareille attitude à l'égard de Me Capdecomme; Attendu, au demeurant, qu'en s'en tenant aux faits établis ou non contestés de la cause, si on compare le rôle respectif des notaires ayant reçu le testament du 15 mai 1907, et dont le premier, Me Capdecomme, notaire de la famille depuis déjà plusieurs années, a assisté sa cliente de ses conseils dans la préparation de l'acte, a réuni les témoins, a tenu la plume, a conservé la garde de la minute, tandis que le second, M Baurez, a simplement assisté à la rédaction dudit testament, il ressort que ce dernier n'a été autre qu'un auxiliaire, que deux témoins eussent pu efficacement remplacer; qu'il n'a donc pu, en conséquence, transmettre à son successeur, Me Barbe, des droits à des honoraires proportionnels qui ne lui appartiennent pas; tifs, etc. ».

Appel par Me Barbe.

LA COUR;

ARRÊT.

Par ces mo

Attendu que la recevabilité de l'action introduite par Me Barbe, notaire à Tarbes, successeur de Me Baurez, résulte des motifs qui assortissent le jugement entrepris, et qu'il y a lieu d'adopter; - Attendu que les art. 971 et 972, C. civ., précisent les conditions de forme et de validité du testament authentique; que, conformément aux prescriptions de ces articles de loi, le testament du 15 mai 1907 a été dicté par la dame Lefébure à Mes Capdecomme et Baurez, tous les deux notaires en résidence à Tarbes, en présence de deux témoins requis par ladite dame; que ce testament a été écrit en entier par Me Capdecomme, et lu par lui à la testatrice, le tout encore en présence dudit Me Baurez et des deux témoins instrumentaires ; qu'en assistant son confrère dans la réception de l'acte susdit, Me Baurez, qui avait pouvoir de le faire, a réellement concouru à l'accomplissement de toutes les formalités prescrites pour sa validité, et que ce concours doit être considéré comme la raison du partage des honoraires proportionnels touchés par Me Capdecomme,

(1 à 4) La jurisprudence est fixée en ce sens que les agréés, n'ayant aucune existence légale (V. Toulouse. 1er août 1904, S. et P. 1905.2.137, la note de M. Tissier et les renvois; Cass. 28 déc. 1908, S. et P. 1909.1.315; Pand. pér., 1909.1.315; Douai, 21 nov. 1910, S. et P. 1911.2.41; Pand. per., 1911.2.41, et les renvois), ne peuvent être assimilés à des officiers ministériels, et sont seule

At

partage réclamé par Me Barbe, agissant aux droits de Me Baurcz, son prédécesseur; que Me Barbe, était, en effet, et dès lors, responsable des nullités de forme ou de fond de nature à entacher l'acte reçu, et que, dans ces conditions, toutes les considerations et présomptions invoquées par le tribunal, relativement aux circonstances dans lesquelles il a pu être appelé à recevoir, avec Me Capdecomme, le testament de la dame Lefebure, sont insuffisantes à justifier le rejet de sa prétention; - Attendu, d'ailleurs, qu'en présence des termes des lois et décrets qui réglementent l'exercice de la fonction notariale, l'infirmation du jugement entrepris s'impose plus manifestement encore; tendu, en effet, que la loi du 21 juin 1843, sur la forme des actes notariés, a, dans son art. 4, déclaré ne rien innover aux dispositions du Code civil sur les conditions de réception des testaments; que la loi du 12 août 1902, qui a modifié l'art. 9 de la loi du 25 vent. an 11, et décidé que les actes notariés pourront être reçus par un seul notaire, a excepté toutefois, entre autres actes, les testaments, qui restent soumis aux règles spéciales du Code civil; qu'à la différence des actes où la présence du second notaire et des deux témoins n'est exigée par le texte susvisé qu'au moment de la lecture et de la signature des parties, ou de leur déclaration de ne savoir ou de ne pouvoir signer, les deux notaires participent done également à toutes les formalités de la réception d'un testament, dont la plus importante est la dictée, qui, dit le texte, leur est faite à tous les deux; qu'il n'est donc point nécessaire de rechercher, ainsi que l'exige le jugement entrepris, si tous les deux ont concouru à la réception de l'acte, parce que la réalité de ce concours ressort des termes mêmes de l'art. 972, C. civ., et des obligations qui en résultent pour l'un comme pour l'autre; qu'ainsi s'impose, dans l'espèce, l'application de l'art. 10 du décret du 25 août 1898, qui a, en exécution de la loi du 20 juin 1896, tarifé, pour le ressort de la Cour d'appel de Pau, les honoraires, vacations et autres droits dus aux notaires à l'occasion de leurs actes; qu'au cas spécial du concours d'un second notaire à un même acte, cet article alloue la moitié de l'honoraire à celui des deux officiers publics qui garde la minute, et l'autre moitié à son confrère; qu'à cette règle générale, il n'est admis d'exception que dans le cas où le règlement intérieur de la compagnie disposerait autrement; — Mais attendu que le règlement intérieur de la compagnie des notaires de l'arrondissement de Tarbes, approuvé par l'arrêté de M. le garde des sceaux, en date du 12 mars 1907, rendu antérieurement au testament dont s'agit, n'a prévu, à son tour, dans

ment, réserve faite de la situation de fait qu'ils tirent de leur agrément par le tribunal de commerce, et qu'ils peuvent défendre contre les empiétement de tiers sans qualité (V. Toulouse, 1er août 1904, précité, et la note de M. Tissier; Cass. 23 déc. 1908, précité, et les renvois), les mandataires des parties. V. Lyon, 27 déc. 1898 (S. et P. 1901.2.41, et la note de M. Tissier; Pand. pér.,

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son art. 43, d'autre dérogation à la même règle que celle qui résulterait de conventions contraires; qu'aucune stipulation de cette nature n'est, d'ailleurs, alléguée, et qu'il y a lieu, en conséquence, de faire droit à l'appel interjeté et d'infirmer le jugement entrepris; Par ces motifs; Dit que l'action introduite par Me Barbe, notaire à Tarbes, déclarée, à bon droit, recevable par le jugement rendu le 16 nov. 1910 par le tribunal civil de Tarbes, a été rejetée, à tort, comme mal fondée;' - Et, faisant ce que les premiers juges auraient dù faire; Condamne Me Capdecomme à payer audit Me Barbe, avec les intérêts de droit, la moitié des honoraires proportionnels perçus par lui dans la succession de la damne Lefébure, en raison du testament de ladite dame, en date du 15 mai 1907; etc.

Du 24 juill. 1911. C. Pau. MM. Cadot de Villemomble, 1er prés.; Gaches, subst.; Lamaignère et Dazet (ce dernier, du barreau de Tarbes), av.

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L'agréé, n'étant qu'un simple mandataire des parties, sans caractère légal, est obligé de justifier à son mandant des peines et soins qu'il a donnés à l'affaire dont il a été chargé, pour permettre aur juges, saisis du différend, d'apprécier si les honoraires qu'il réclame sont proportionnés au service rendu (1) (C. civ., 1999; C. proc., 414, 421; C. comm., 627).

Il importe peu que le montant des honoraires réclamés par l'agréé à son client ait été taxé par la chambre des agréés, et approuvé par le président du tribunal de commerce, cette taxe n'ayant que le caractère d'un règlement intérieur inopposable aux parties plaidantes (2) (Id.).

Spécialement, si le montant des honoraires de l'agréé avait été fixé, par une convention intervenue entre lui et son client, à un chiffre inférieur au montant de la taxe, l'agréé ne peut demander des honoraires supérieurs à ceux déterminés par la convention qu'à la condition d'établir que l'affaire a nécessité un surcroit de travail, qu'il n'avait pu prévoir lors de la convention (3) (Id.).

Et le client ne peut, de son côté, ob. tenir une réduction du chiffre d'honoraires fixé par la convention qu'à la condition de prouver que l'agréé a mal ou incomplètement rempli la mission dont il était chargé (4) (Id.).

1899.2.41). Adde, Ruben de Couder, Dict. de dr. comm., v Agréé, n. 13; Lyon-Caen et Renault, Tr. de dr. comm., 4° éd., t. 1er, n. 852; Thaller, Tr. élém. de dr. comm., 4° éd., n. 2247; et notre Rép. gén, du dr. fr., v° Agréé, n. 9 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 44 et s.

Du principe que les agréés ne sont que des mandataires des parties, et ne peuvent être assi

Rigaud C. C...).

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ARRÈT.

LA COUR; Considérant que C..., agréé, chargé par Rigaud, entrepreneur de travaux publics, de soutenir ses intérêts devant le tribunal de commerce de la Seine contre la Société des chemins de fer de la Nièvre, l'a assigné en paiement de 151 fr. 50, restant dus sur le montant de ses déboursés et honoraires; que l'appelant, de son côté, a cité l'intimé pour obtenir le remboursement de 1.760 fr., dont il se prétend créancier; que les premiers juges ont rejeté les prétentions de Rigaud, qui a été condamné à verser la somme réclamée par C...; Considérant que cette décision ne saurait être confirmée; qu'en effet, s'il ne peut y avoir de contestation sur le chiffre des déboursés et des vacations auquel est en droit de prétendre l'agréé, et qui s'élève à 4.901 fr. 90, il n'en est pas de même en ce qui touche le montant des honoraires, que C... fixe à 2.000 fr., bien qu'il ait été taxé par la chambre des agréés et approuvé par le président du tribunal de commerce, cette taxe n'ayant que le caractère d'un règlement intérieur, qui reste inopposable aux parties plaidantes; Considérant que l'agréé n'est qu'un simple mandataire sans caractére légal; qu'il est donc obligé de justifier à son mandant des peines et soins qu'il a donnés à l'affaire, afin de permettre d'apprécier si le salaire qu'il est en droit de réclamer se trouve proportionné au service rendu; Considérant que Rigaud a versé à l'intimé 6.750 fr., sur lesquels 4.901 fr. 90 ont été employés au paiement des frais de procédure et des droits de vacation; que, par suite, sans entrer dans le détail des critiques formulées par Rigaud, la seule question à juger est de savoir si le chiffre de 2.000 fr., réclamé à titre d'honoraires, n'est pas exagéré;

milés à des officiers ministériels, la jurisprudence a tiré la conséquence qu'il ne peut être établi par le tribunal de commerce un tarif pour fixer leurs honoraires. V. Cass. 25 juin 1850 (S. 1850. 1.743. - P. 1851.2.118; Pand. chr.); 16 mars 1852 (S. 1852.1.458. - P. 1853.1.639; Pand. chr., sous Cass. 25 juin 1850, ad notam), et les notes. Les délibérations d'un tribunal fixant les émoluments des agréés n'ont que le caractère de règle. ment intérieur, sans aucune force obligatoire. V. Ruben de Couder, op. et verb. cit., n. 56; et notre Rép. gén, du dr. fr., verb. cit., n. 103; Pand. Rép., eod. verb., n. 244. La taxe, faite par la chambre des agréés, des honoraires dus à un agréé dans une affaire, fût-elle approuvée par le président du tribunal de commerce, ne peut donc s'imposer, ni au client auquel les honoraires sont réclamés, ni aux juges devant lesquels est portée la demande en paiement d'honoraires. Et, du caractère de mandataires reconnu par la jurisprudence aux agréés, l'arrêt ci-dessus tire cette autre conséquence qu'il faut appliquer à la demande en paiement d'honoraires, formée par un agréé contre son client, la règle, affirmée par la jurisprudence, que les juges ont le droit de déterminer le salaire dû au mandataire, en le proportionnant au service rendu, alors même qu'il a été fixé par une convention. V. Cass. 29 févr. 1904 (S. et P. 1907.1.389; Pand. pér. 1905.1.12); 27 janv. 1908 (S. et P. 1908.1.223; Pand. pér., 1908.1.223); 12 déc. 1911 (S. et P.

Considérant qu'il résulte de la correspondance que les parties étaient tombées d'accord sur la somme de 1.000 fr.; que l'appelant ne peut donc obtenir la diminution que s'il établit que l'agréé aurait incomplè tement ou mal rempli sa mission, et que l'intimé, de son côté, est sans droit pour la faire majorer, à moins qu'il ne prouve que l'affaire était d'une nature si spéciale qu'elle a nécessité de sa part un surcroît de travail qu'il n'avait pu prévoir : Considérant que rien ne démontre que C... ait apporté de la négligence à la préparation de l'affaire qu'il a soutenue, ni que les intérêts de l'appelant aient été abandonnés, mais que l'agréé ne justifie pas non plus des prétendus soins exceptionnels, qu'il invoque pour réclamer une somme aussi importante à l'occasion d'une plaidoirie ordinaire; qu'il échet, dans ces circonstances, de décider que la convention des parties devra être intégralement appliquée; Considérant que, Rigaud se reconnaissant débiteur de 151 fr. 90, il y a lieu de les déduire des 1.000 fr. qui doivent lui être remboursés; Par ces motifs; - Condamne C... à rembourser à l'appelant la somme de 1.000 fr., sous déduction de 151 fr. 90, etc.

Du 23 janv. 1912. C. Paris, 6 ch. - MM. Saint-Aubin, prés.; Willm et Marcel Boyer, av.

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CHAMBÉRY 6 février 1912. CULTES, SÉPARATION DES ÉGLISES ET DE L'ETAT, LOIS Des 9 déc. 1905 et 13 AVRIL 1908, ETABLISSEMENTS PUBLICS SUPPRIMÉS, FABRIQUE D'ÉGLISE, MeubleS, ACTION EN REVENDICATION, SÉQUESTRE, ADMINISTRATION DES DOMAINES, QUALITÉ POUR PROCÉDER.

Les meubles garnissant les églises ayant

1912.1.374; Pand. pér., 1912.1.374), et les renvois. Cette jurisprudence a été, on le sait, vivement critiquée, en tant qu'elle admet le pouvoir d'appréciation des juges, même au cas où le salaire du mandataire a été fixé par une convention. V. les notes sous les arrêts précités, et les renvois. Mais, dans l'espèce ci-dessus, la Cour de Paris, tout en admettant implicitement le pouvoir du juge de réduire ou de majorer, suivant les circonstances, l'honoraire stipulé par la convention intervenue entre l'agréé et son client, s'est bornée à allouer à l'agréé les honoraires fixés par la convention intervenue, aucun motif ne lui paraissant justifier, ni la majoration réclamée par l'agréé, ni la réduction sollicitée par le client.

L'existence de cette convention explique même pourquoi la Cour n'a pas admis, en fait, la fixation des honoraires, telle qu'elle avait été faite par la taxe officieuse de la chambre des agréés, approuvée par le président du tribunal de commerce; car, si cette taxe n'a aucune valeur légale, il est bien évident que les juges, saisis de demandes en paiement d'honoraires, formées par des agréés, ne reviseront la taxe officieuse du président du tribunal de commerce que dans des cas tout exceptionnels, le président du tribunal de commerce étant mieux placé que tout autre pour apprécier la rémunération que comporte une affaire plaidée devant le tribunal qu'il préside.

(1-2) La jurisprudence des Cours d'appel et

été, comme les autres biens appartenant aux fabriques, placés sous séquestre en vertu de Part. 8 de la loi du 9 dec. 1905, et les communes n'en devenant propriétaires qu'à l'expiration du délai légal, et à défaut de toute revendication, c'est contre l'Administration des domaines, prise en qualité de séquestre, que doivent être intentées les actions en reprise dont ces meubles peuvent être l'objet (1) (LL. 9 déc. 1905, art. 8, 9, 1er: 13 avril 1908).

Vainement l'Administration des domaines soutiendrait que l'art. 1er de la loi du 13 avril 1908, en attribuant aux communes la propriété du mobilier des églises, a eu pour effet de dessaisir le séquestre de ses fonctions, le droit ainsi conféré aux communes étant un droit éventuel, subordonné à une condition suspensive, el ne devant se réaliser qu'à défaut de toute revendication se produisant dans le délai prévu (2) (Id.).

(Admin. des domaines C. Lachat). - ARRÊT.

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LA COUR; Attendu que Lachat, ancien desservant de l'église de Chevenoz, a revendiqué contre l'Administration des domaines, en sa qualité de séquestre des biens de la fabrique, divers objets cultuels achetés de ses deniers, et placés par lui dans ladite église; Sur la fin de nonrecevoir : - Attendu que l'Administration appelante prétend que l'art. 1er de la loi du 13 avril 1908, en attribuant aux communes la propriété du mobilier des égli ses, a eu pour effet de dessaisir le séquestre de ses fonctions, et qu'en conséquence, depuis la promulgation de ladite loi, elle se trouve sans qualité pour répondre à l'action dirigée contre elle; Mais attendu que la loi du 13 avril 1908, dans son art. ler ler, n. 1 et 2, dispose que les meubles ayant appartenu aux fabriques, et qui garnissaient les églises lors

des tribunaux décide, en général, conformément à l'arrêt ci-dessus recueilli, que l'art. 9, § 1er, de la loi du 9 déc. 1905, modifié par la loi du 13 avril 1908 (S. et P. Lois annotées de 1908, p. 662; Pand. pér., Lois annotées de 1908, p. 662), a conféré à l'Etat et aux communes, sur les meubles ayant appartenu aux fabriques supprimées, qui garnissent les églises dont ils sont propriétaires, non pas un droit de propriété affecté d'une condition résolutoire pour le cas où se produirait une action en reprise ou en revendication, mais un droit de propriété soumis à la condition suspensive qu'il ne se produira pas, dans le délai légal, d'action en revendication. V. Besançon, 23 mars 1910 et Rouen, 6 juill. 1910 (S. et P. 1910.2.309; Pand. pér., 1910.2.309), la note et les renvois. V. toutefois en sens contraire, Nancy, 5 mars 1910 (S. et P. 1911.2.218; Pand. pér., 1911.2.218). L'opinion généralement admise par la jurisprudence, sur les caractères du droit des communes et de l'Etat à la propriété des meubles garnissant les églises, entraîne cette conséquence que, tant que la condition à laquelle est subordonnée l'attribution de propriété n'est pas accomplie, l'Administration des domaines, en qualité de séquestre de ces meubles, a seule qualité pour défendre anx actions en reprise ou en revendication. V. Besançon, 23 mars 1910 et Rouen, 6 juill. 1910, précités, et la note. Adde, les renvois de la note sous Nancy, 5 mars 1910, précité. Mais V. en sens contraire cet arrêt,

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