S II. Des obligations du preneur. SOMMAIRE. 13. Le preneur doit garnir les lieux d'une manière suffisante, ои donner des sûretés au bailleur, pour le paiement du loyer. 14. Les objets, sur lesquels ne s'étend pas le privilège du bailleur, ne doivent pas être considérés comme garnissant les lieux. 15. Le preneur n'est pas obligé de placer dans les lieux loués, des objets d'une valeur égale aux loyers pendant toute la durée du bail. 16. Pour savoir si les lieux sont suffisamment garnis, il faut s'attacher à connaître ce sur quoi a dû compler le bailleur, plutôt qu'à calculer si la valeur du mobilier peut répondre de tel ou tel nombre de termes. 17. Le preneur peut enlever une partie des objets qui ont été placés dans les lieux; pourvu que ceux qui restent offrent une garantie suffisante au bailleur. 18. Suite. 19. Sûretés que doit offrir le locataire, qui ne garnit pas suffisamment les lieux. 20. En quoi les meubles des sous-locataires concourent à garnir les lieux. 21. Le preneur est tenu des réparations locatives. Renvoi. 22. Nomenclature des réparations locatives dont est tenu le locataire. 23. Exception pour les réparations qui auraient été occasionées par vétusté ou force majeure. 24. Développemens de la nomenclature des réparations lo catives. 25. Les locataires d'une même maison ne sont pas tenus des réparations locatives des lieux, dont la jouissance est commune. 26. Réparations locatives des moulins. 27. Répartition des contributions entre le propriétaire et le locataire. Renvoi. 28. Le logement des gens de guerre incombe au propriétaire et au locataire, dans la proportion de l'espace que chacun occupe dans la maison. 29. L'obligation du balayage des rues, du moins relativement à l'autorité, est toujours à la charge du propriétaire seul, quand il habite lamaison, et alors même qu'il n'y habile pas, si elle n'est pas louée. 30. Si elle est louée à un principal locataire, celui-ci est tenu de l'obligation et responsable envers l'autorité: Si elle est louée à plusieurs locataires, le propriétaire peut seul élre poursuivi, quoiqu'il n'habite pas la maison. 13. Le privilège attribué au bailleur sur tout ce qui garnit la maison louée (Code civil, article 2102) (1), ne peut avoir de résultat utile, qu'autant que le mobilier du locataire a une valeur assez grande pour assurer le paiement du loyer. Ainsi, ce sont deux choses étroitement enchaînées, que la concession du privilège au bailleur et l'obligation pour le preneur de garnir les lieux d'une manière suffisante. D'ailleurs, la protection singulière accordée à la créance du bailleur indique assez l'étendue et la force de l'obligation imposée au locataire. Si donc, cette obligation est méconnue, si le loca (1) Voy. L. 4, ff. in quibus causis pign. vel hyp. taire ne garnit pas la maison de meubles suffisans, il peut être expulsé (1). Pour prévenir la résolution, conséquence de l'infraction à ses engagemens, il faut qu'il présente au bailleur l'équivalent des effets du privilège, c'est-à-dire, qu'il donne des sûretés capables de répondre du loyer. Pour compléter ces règles consacrées par l'article 1752, et qu'à défaut d'un texte formel on eût aisément établies, par induction des principes généraux, je dois indiquer: 1° à quel signe on peut reconnaître si les meubles qui garnissent la maison sont suffisans; 2° quelle espèce de sûretés le locataire est tenu de fournir, lorsque le mobilier ne donne pas au propriétaire une garantie convenable. 1 14. D'abord ce n'est pas ici le lieu d'expliquer (2) quels sont les meubles et effets qui sont affectés au privilège du bailleur; il suffit de dire que si, par exception, quelques-uns des objets que le locataire a placés dans les lieux qu'il habite échappent au privilège, ils ne doivent pas être considérés, comme faisant partie de ceux qui garnissent la maison. 15. En second lieu, jamais on n'a pensé que le bailleur pût exiger que les meubles qui garnissent la maison eussent une valeur égale au montant des loyers, pour toute la durée du bail. « Les lieux (1) Art. 1752, Pothier, du Louage, no 318. (2) Voy. dans le Traité des privilèges hypothèques sur l'article 2102, n° I. sont censés suffisamment garnis, dit Bourjon, lorsqu'ils sont meublés suivant la condition du loca taire, quoique les meubles ne montent pas à la valeur des loyers qui écherront pendant tout le cours du bail, c'est au propriétaire à veiller par terme ». Puis il ajoute : « Cela a été ainsi jugé au Parc civil plusieurs fois, moi plaidant (1)». Les auteurs modernes partagent tous cette opinion, Cependant l'article 2102 donne privilège au bailleur, lorsque le bail a date certaine, pour tout ce qui est échu et pour tout ce qui est à échoir; d'où l'on semblerait autorisé à conclure que le mobilier n'a une valeur suffisante, que lorsqu'il peut assurer le paiement de tous les loyers qui courront pendant la durée du bail. Mais quand on y réfléchit, on s'aperçoit que l'induction ne serait pas exacte. L'article 2102 s'applique au cas, où le mobilier qui garnit la maison est vendu, où le prix doit en être distribué entre les différens créanciers du locataire. Il faut bien alors que le prix du mobilier, qui formait le gage spécial du bailleur, lui soit attribué jusqu'à concurrence de tout ce qui lui est dû et de tout ce qui pourra l'être à l'avenir; sans cela, il verrait passer une partie de ce prix entre les mains d'autres créanciers, et il y aurait ainsi certitude que le mobilier, sur lequel s'appuyait son privilège, serait du moins, pour une portion, détourné de sa destination. Lorsque au contraire le bail commence, que le locataire paie (3) Liv. IV, tit. IV, chap. III, sect. III, no 31. exactement, qu'aucun créancier ne réclame, que les meubles ne sont point saisis; sans doute on peut craindre que, la valeur du mobilier étant inférieure à la somme totale des loyers, un jour, le gage ne soit insuffisant pour l'exercice du privilège; mais entre cette possibilité d'insuffisance et la certitude de non-paiement qui a déterminé la disposition de l'article 2102, la différence est évidente. L'on conçoit donc très bien que la loi ait accordé au bailleur le droit de se faire payer tous les loyers sur le prix de son gage, lorsque ce gage va lui être enlevé; sans que pour cela, elle ait entendu obliger le locataire à fournir un gage d'une valeur égale au montant de tous les loyers. (1) 16. L'article 417 de la coutume d'Orléans considérait l'obligation de garnir la maison comme remplie, lorsque les meubles suffisaient pour le paiement de deux termes de loyer (2). A Paris, s'il faut en croire le Répertoire de jurisprudence (3), pour que les meubles soient censés suffisans, ils faut qu'en les vendant par autorité de justice, on puisse en tirer au moins le montant d'une année de loyer, non compris les frais de vente. MM. Delvincourt et Duranton pa (1) M. Delvincourt, tome III, notes, page 201; M. Duranton, tome XVII, no 157. . (2) « Le locataire qui n'a de quoi payer ou qui ne garnist l'hostel de biens meubles pour le paiement de deux termes de loyer, en peut être expulsé et mis hors par ledit seigneur d'hostel, avec auctorité et permission de justice. » V. Pothier, du Louage, no 318. (3) V° Bail, § VII, no 3. |