« Au reste, ajoute le même auteur, cette décision n'a lieu que quand il est impossible de savoir, par le fait de qui une dégradation est arrivée. Dès que l'on connaît celui des locataires qui a occasioné un accident par lui-même ou par ses gens, ou par les étrangers qui vont à son logement, lui seul en est responsable. >> « On conçoit, dit-il enfin, que lorsqu'une maison est louée à une seule personne ou à un principal locataire, il répond de tout envers le bailleur. A l'égard de ceux à qui il sous-loue, il exérce les mêmes droits que le propriétaire. En conséquence, s'il a plusieurs sous-locataires, les décisions qu'on vient d'exposer recevront leur application aux réparations des objets, dont ils jouissent en com mun. » 26. Pour connaître les réparations des moulins, qui doivent être considérées comme locatives, il faut consulter les usages de chaque localité. Ceux qui étaient suivis dans le ressort de l'ancienne coutume de Paris ont une grande autorité et forment à-peu-près le droit commun. Ils ont été recueillis par Desgodets et Goupy, son annotateur. Je me borne presque à analyser leur ouvrage. D'abord, l'usage est de faire estimer cè que valent tous les objets nécessaires à l'exploitation des moulins, lorsqu'on les livre au locataire, et au moment où finit le bail. Si la dernière prisée est plus forte que la première, le propriétaire rembourse au locataire la différence; et lorsque la dernière prisée est moins considérable, c'est le locataire qui paie au propriétaire ce que celle-ci vaut de moins. En second lieu, tous les objets particuliers aux moulins, et qu'on n'énonce pas comme sujets à réparations locatives, sont à la charge du propriétaire... La présomption est qu'ils sont usés par vétusté. Le locataire n'en serait tenu que dans le cas où on prouverait que la dégradation n'est pas l'effet d'un cas fortuit. Les palées des moulins à eau, les vannes, les tournans et travaillans sont à la charge du locataire. (1) Dans les moulins pendans, c'est-à-dire dans ceux dont la roue peut se hausser et se baisser, on considère comme faisant partie des tournans et travaillans la charpente qui sert à élever ou à baisser la roue, selon l'augmentation ou la diminution des eaux. le On demande si le locataire d'un moulin pendant est tenu de réparer la charpente, lorsqu'elle a été endommagée, soit par les glaces, soit par choc d'un bateau ou de quelque autre objet entraîné par les eaux. La raison de douter est que le locataire n'est pas responsable des dégradations survenues par cas fortuit. Mais comme on peut ordinairement éviter les dommages causés par les glaces ou par le choc des corps qu'entraînent les /courans, en prenant certaines précautions; le lo (1) On trouve dans Lepage, Lois des bâtimens, la définition de toutes les expressions techniques, et une longue énumération de tous les objets qui sont compris sous la dénomination de tournans et travaillans. Voy. part. II, pages 161 et suiv. cataire qui n'a rien fait pour prévenir les accidens est responsable de leurs suites. S'il n'a pas d'autres moyens de se garantir que d'avoir des pienx de garde, il doit en demander au propriétaire, le mettre en demeure de les faire placer, et rejeter ainsi sur lui toute la responsabilité des accidens. Outre les tournans et travaillans, les ustensiles et objets mobiliers servant à l'exploitation du moulin, sont à la charge du locataire. Dans un moulin à eau, ce sont ordinairement les câbles à reprendre l'hérisson, les verins, les pinces de fer et le treuil · garni de ses bras ou, autrement dit, de son moulinet; le câble à lever la meule, les vingtaines sur le tambour et pour la lotoire; les escaliers pour monter à la trémie, et les treuils servant à suspendre le moulin, des corbeilles à engrener, un crible de fil de fer, une banne de treillis; les marteaux à rhabiller les meules, le marteau à pannes, les masses, les ciseaux et la petite échelle à monter la fariue. La réparation des digues établies pour retenir l'eau et la porter en plus grande quantité sur les moulins, le fauchage des herbes qui croissent dans l'eau et en ralentissent la vitesse; l'enlèvement des attérissemens, c'est-à-dire des amas de vase ou de sable qui se forment au-dessus, au-dessous des moulins, sont à la charge du propriétaire (1); mais lorsque le bail oblige le locataire à exécuter ces (1) Voy. cependant dans la section suivante, ce que je dis du curage des cours d'eau. différens travaux, il est seul tenu de les faire, et si les grandes eaux les détruisent, il n'a point le droit de réclamer d'indemnité contre le propriétaire. Le ravage que peuvent causer ces grandes eaux est un cas que les parties sont censées avoir prévu. S'il s'agit de moulins établis sur bateaux, nonseulement les locataires sont tenus de l'entretien des tournans et travaillans, ainsi que des ustensiles, comme il vient d'être dit; mais encore ils sont responsables de tous les dommages arrivés aux bateaux qui supportent les moulins, ainsi qu'au corps même des moulins. On ne regarde pas comme évènemens de force majeure, qui fassent cesser la responsabilité du locataire, les pertes causées lors des grandes eaux ou des glaces, par la surcharge, la rupture des câbles, les frottemens ou le choc des autres bateaux, ou d'objets quelconques entraînés par le courant. Les moulins sont naturellement exposés à ces divers accidens, et les parties sont censées les avoir prévus. + Dans les moulins à vent, les tournans et travaillans, ainsi que les ustensiles, sont également à la charge du locataire; et de même que les dégradations qu'éprouve un moulin à eau par l'effet de la violence des courans, sont à la charge du locataire; de même, le locataire est tenu de réparer le mal qu'aurait causé la force du vent, s'il était prouvé qu'il a négligé de tourner le moulin, comme il convenait, pour éviter l'accident. Desgodets fait, à l'occasion de la prisée des moulins, une réflexion qui est très importante. Il recommande aux experts, chargés de la seconde estimation, de considérer l'état où se trouvent les objets, eu égard à l'état où ils étaient au commencement du bail. « Si on ne faisait attention, dit-il, qu'à leur valeur actuelle, le propriétaire ou le locataire pourrait être lésé. Par exemple, les tournans et travaillans d'un moulin sont en très bon état, lorsque le locataire en prend possession, et leur prix est porté à 1500 francs; à la fin du bail, on trouve que les mêmes objets ont été mal entretenus et ne sont pas, à beaucoup près, dans un état aussi bon que celui où ils étaient lors de l'entrée en jouissance du locataire. Cependant, comme les circonstances ont rendu le bois et autres matières plus chères, la seconde évaluation des mêmes objets, si elle était faite à raison des prix actuels, se monterait à la même somme que la première, c'est-à-dire à 1500 francs; alors le locataire qui n'a pas entretenu convenablement les objets confiés à sa garde, ne devrait aucune indemnité au propriétaire, ce qui serait injuste. Il faut donc, lors de la seconde estimation, que les appréciateurs déclarent d'abord dans quelle proportion les objets ont perdu de leur valeur, s'ils ont été dépréciés du tiers, du quart ou de toute autre quotité; en suite les experts indiqueront le prix actuel de ces mêmes objets, et le locataire sera débiteur du tiers, du quart ou de toute autre portion dont la valeur sera fixée en proportion du prix actuel. Ainsi, dans l'exemple proposé, supposons que la dégradation des objets TOME XIX. 4 |