férence sur ceux qui ont négligé de le faire. Donc, tant que la succession n'est pas définitivement liquidée, il ne saurait être question de réduire à tels ou tels immeubles déterminés l'inscription des séparatistes; si la réduction était possible, les créanciers ou légataires ayant pris inscription devraient subir, sur les biens grevés, le concours des créanciers ou légataires n'ayant pas pris la même précaution, et risqueraient de ne pas être désintéressés intégralement par le prix des immeubles sur lesquels leur garantie aurait été cantonnée. B. - Privilèges généraux sur les immeubles. 524. Ces privilèges sont de deux espèces. a) Les premiers sont indiqués par l'article 2104 : « Les privi<< lèges qui s'étendent sur les meubles et sur les immeubles << sont ceux énoncés en l'article 2101. » Nous avons déjà dit1 que les privilèges de l'article 2101 portent sur le patrimoine tout entier: principalement sur les meubles, subsidiairement sur les immeubles en cas d'insuffisance du mobilier *. Cette règle doit s'entendre non seulement des cinq privilèges généraux sur les meubles énumérés en 1804 dans l'article 2101, mais des trois privilèges de même nature créés par les lois des 23 décembre 1874, 27 décembre 1895 et 9 avril 18983. En effet ces diverses lois, en instituant de nouveaux privilèges, les ont incorporés à l'énumération de l'article 2101, de sorte qu'ils doivent être considérés comme « énoncés en l'article 2101 ». Mais si l'article 2104 est applicable aux privilèges généraux sur meubles de l'article 2101 et autres assimilés, il reste étranger aux privilèges généraux sur meubles institués par des lois spéciales au profit du Trésor 1. La solution n'est pas douteuse, bien qu'elle semble écartée par certains auteurs3. En effet, l'article 2104 ne fait pas porter subsidiairement sur les immeubles tous les privilèges généraux sur les meubles, mais seulement ceux qui sont « énoncés en l'article 2101 ». La loi du 5 septembre 1807 fournit, d'ailleurs, un argument décisif en ce sens. Après avoir accordé au Trésor un privilège général sur les meubles pour le recouvrement des frais de justice criminelle (article 2), elle lui accorde expressément un privilège général sur les immeubles comme garantie de la même créance (article 3) 5; l'institution de ce privilège aurait été sans objet si l'article 2104 était applicable aux privilèges généraux sur meubles accordés au Trésor. 1. Suprà, tome 1, p. 312 et 329. 2. Toutefois, le privilège des frais de justice ne s'étend aux immeubles que si ces frais ont été faits dans une procédure intéressant à la fois les meubles et les immeubles. En effet, les frais de justice ne sont privilégiés qu'au regard des créanciers dans l'intérêt desquels ils ontété faits (suprà, tome I, p.314 et suiv.). Ainsi, malgré le texte très général de l'article 2104, les frais des ventes mobilières ne sont pas privilégiés sur le prix des immeubles. Voy. Cass. 25 juillet 1893, D.P 1893.1.599,- Aubry et Rau, 5o édition, III, p.209 et 278,- Baudry-Lacantinerie et de Loynes, Privilèges et hypothèques, 1, no 316. 3. Suprà, tome I, no 365, p. 314. 4. Ibid., p. 321, 324 et 328. A plus forte raison la règle doit-elle s'entendre du privilège établi par l'article 549 du Code de commerce; il ne se distingue pas, en effet, du privilège de l'article 2101-40, dont il n'est qu'une application nouvelle. Voy. suprà, tome I, p. 323. Les privilèges visés par l'article 2104 affectent la généralité des immeubles du débiteur pour la même raison qui fait qu'ils affectent la généralité de ses meubles 6. Il n'y a aucun rapport entre la créance garantie et tel immeuble plutôt que tel autre; dès lors, tous les immeubles sont affectés par le privilège. On sait qu'ils ne portent sur les immeubles que d'une façon subsidiaire. De là découlent deux conséquences. 1o Le créancier qui a omis par négligence, à plus forte raison par collusion, de produire à la distribution du prix des meubles, est déchu de son privilège sur les immeubles, dans la mesure au moins de ce qu'il aurait pu toucher dans la contribution 7. 2o Le créancier, quand il produit à l'ordre ouvert sur le prix d'un immeuble, peut être renvoyé à discuter d'abord les meubles du débiteur. Du moins, il n'est colloqué que provisoirement, sauf réduction ultérieure à la partie de la dette dont il ne sera pas payé sur la masse mobilière 8. 1. Suprà, tome I, p. 415 et suiv. 2. Ibid., p. 312. 3. Aubry et Rau, 5o édition, III, p. 278, note 4, p. 307, texte et note 27. 4. Suprà, tome I, p. 417. 5. Infrà, p. 30. 6. Suprà, tome I, no 364, p. 313. 7. Cette déchéance existe non seulement au profit des autres créanciers privilégiés, mais aussi au profit des créanciers hypothécaires. Seuls les créanciers chirographaires ne peuvent pas s'en prévaloir, parce qu'ils n'ont stipulé aucune sûreté spéciale. 8. Pont, Privilèges el hypothèques, 1, no 243, - Aubry et Rau, 5o édition, 111, p. 279,- Thézard, Privilèges et hypothèques, no 381. b) En second lieu, il faut signaler comme portant sur tous les immeubles un privilège du Trésor: le privilège pour le recouvrement des frais en matière pénale (loi du 5 septembre 1807, article 3). L'Etat possède, comme garantie de ce recouvrement, un privilège sur les meubles (loi de 1807, article 2); il est en outre muni d'un privilège sur les immeubles (article 3). Ce privilège ne porte-t-il sur les immeubles que d'une façon subsidiaire, conformément à l'article 2104, ou les affecte-t-il d'une manière principale ? Certains auteurs soutiennent qu'il ne les affecte que subsidiairement 2. Mais cela n'est écrit nulle part. § 2. De l'exercice des privilèges sur les immeubles. 525. De même que les privilèges sur les meubles, les privilèges sur les immeubles sont des bénéfices légaux, inhérents à certaines créances. Puisqu'ils résultent de la qualité de la créance, ils naissent et sont acquis au créancier en même temps que la créance elle-même. Toutefois, leur efficacité réelle et pratique est subordonnée à deux formalités. 1o Le créancier, pour exercer son privilège, doit l'avoir inscrit. En effet, l'article 2106 est ainsi conçu: « Entre les <<< créanciers, les privilèges ne produisent d'effet à l'égard << des immeubles qu'autant qu'ils sont rendus publics par << inscription sur les registres du conservateur des hypothè<<ques, de la manière déterminée par la loi et à compter de << la date de cette inscription. » Donc le créancier ne peut exercer son privilège, au moins en règle générale, qu'à la condition de l'avoir préalablement inscrit. Il le conserve par l'inscription. 2o Le créancier doit produire à l'ordre ouvert sur le prix et produire en temps utile, sous peine de forclusion. La production à l'ordre est le mode pratique d'exercice des privilèges sur les immeubles. Reprenons ces deux notions. 1. Suprà, tome I, p. 417. 2. Aubry et Rau, 5o édition, III, p. 307, texte et note 27. A De l'inscription des privilèges immobiliers, 526. En exigeant l'inscription, qu'il s'agisse de privilèges sur les immeubles ou d'hypothèques, la loi fait application aux sûretés réelles immobilières du principe général de la publicité des droits réels immobiliers dans l'intérêt des tiers. L'inscription a pour but et pour effet de conserver les privilèges. C'est l'expression dont se sert la rubrique de la section IV (articles 2106 et suivants): Comment se conservent les privilèges. La loi les confère; ils sont des bénéfices légaux inhérents à certaines créances. L'inscription les rend susceptibles d'exercice, en fait une réalité pratique; elle les conserve. 527. Les règles relatives à la forme de l'inscription sont tracées dans une autre partie du titre, à propos des hypothèques (articles 2146 et suivants); elles sont applicables aux privilèges. Nous pourrions donc nous borner à un renvoi. Cependant, il est impossible de parler de l'exercice des privilèges immobiliers, et surtout du rang de collocation qui en résulte, sans donner quelques notions sur ce point. Ce que nous allons en dire sera d'ailleurs autant d'acquis pour plus tard. Dès maintenant apparaît la pénétration, sinon l'enchevêtrement des deux sujets. L'inscription consiste dans une mention faite sur les registres de la conservation des hypothèques. Aux termes de l'article 2148, le créancier qui veut prendre inscription doit présenter au conservateur des hypothèques << l'original en brevet ou une expédition authentique..... de « l'acte qui donne naissance au privilège... ». A cet original ou à cette expédition doivent être joints deux bordereaux, contenant les indications prescrites par la fin de l'article 2148. L'article 2150 ajoute : « Le conservateur fait mention sur << son registre du contenu aux bordereaux, et remet au re« quérant, tant le titre ou l'expédition du titre, que l'un des « bordereaux, au pied duquel il certifie avoir fait l'inscrip«tion. » Le texte n'exige qu'une mention. Mais l'Administration de l'Enregistrement prescrit à ses agents de procéder à la copie textuelle et intégrale des pièces remises par le requérant, afin d'éviter les responsabilités qui pourraient résulter pour elle d'erreurs ou de maladresses commises dans la rédaction de simples mentions; pratique commode pour l'Administration, mais qui rend la formalité coûteuse dans les cas fréquents où les pièces produites sont longues. La réquisition est mentionnée sur le registre d'ordre; la copie est faite sur le registre de formalités 1. Voilà en quoi consiste l'inscription. 528. Tant qu'elle n'a pas été prise, le créancier ne peut se prévaloir de son privilège contre les tiers. Le privilège existe; mais il est sans valeur au regard des tiers. Par tiers il faut entendre les personnes suivantes. 1o Les acquéreurs de l'immeuble affecté par privilège. Le créancier ne peut pas leur opposer son droit de suite si le privilège n'est pas inscrit (article 2166). 2o Les autres créanciers soit privilégiés, soit hypothécaires. Le créancier ne peut leur opposer son droit de préférence, autrement dit produire à l'ordre, si le privilège n'a pas été inscrit (article 2106). Le droit de produire à l'ordre afin d'être colloqué par préférence en vertu d'un privilège est subordonné à l'existence de l'inscription; on ne tient compte dans les ordres que des créanciers inscrits. 3o Les créanciers chirographaires. L'article 2106, en effet, ne fait aucune distinction. Le créancier, tant qu'il n'a pas inscrit son privilège, ne peut pas opposer son droit de préférence aux créanciers chirographaires et vient au marc le franc avec eux. L'inscription est la condition préalable de l'efficacité des privilèges sur les immeubles. 529. Pour rendre ainsi le privilège efficace, opposable aux tiers, susceptible d'être exercé, l'inscription doit réunir trois conditions. Il faut d'abord qu'elle soit régulière en la forme. Nous renvoyons à cet égard aux articles 2148 et suivants, dont les règles sont communes aux privilèges et aux hypothèques. Il faut, en outre, que l'inscription ne soit pas périmée lors de l'exercice du droit, en d'autres termes lors de la production à l'ordre. « Les inscriptions, dit l'article 2154, conser« vent l'hypothèque et le privilège pendant dix années à << compter du jour de leur date; leur effet cesse si ces ins<< criptions n'ont été renouvelées avant l'expiration de cсе <<« délai. >> Au bout de dix ans, il est vraisemblable que la 1. Sur le mécanisme de ces divers registres, voy. suprà, tome I, p. 302 et suiv. |