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(Gourdin C. Dme Gourdin).

M. Gourdin, ayant été mobilisé au cours de l'instance en divorce qu'il avait intro

et la note; Fand pér., 1890.1.35). Adde, Curet, la Jurid. des référés, n. 1010 et s. Comp. Cass. Belgique, 28 nov. 1890 (S. 1891.4.14. P. 1891.2. 24).

§ 3.

Compétence et procédure en matière de demande de sursis à la continuation de l'instance.

Si l'on passe à la question de savoir si le président avait le droit de déclarer recevable la demande que lui adressait le mobilisé, en vue d'un sursis, c'est-à-dire de décider si l'instance serait ou non continuée, il convient encore de distinguer suivant la voie employée par le mobilisé.

Si c'est la voie de la requête ordinaire, la nonrecevabilité semble certaine. Le président, en vertu du droit commun et de ses pouvoirs ordinaires, c'est-à-dire abstraction faite des décrets, peut bien prendre certaines mesures relatives aux remises de causes, mais il ne semble pas que ces pouvoirs aillent jusqu'à lui permettre de décider que, en droit, en vertu de l'art. 4 de la loi du 5 août 1914 un obstacle légal s'oppose à ce que l'instance soit poursuivie tant que la mobilisation de l'une des parties n'aura pas pris fin.

Si c'est la voie de la requête avec convocation, définie, par exemple, dans les art. 1o et 2 du décret du 11 mai 1915, la non-recevabilité paraît encore certaine ; le président semble incompétent. En effet, même si l'on tient compte de l'art. 2 du décret du 15 déc. 1914, qui mentionne expressément le révocation des autorisations de continuation d'instance, on voit la compétence répartie de la façon suivante le président est compétent pour autoriser, le tribunal est compétent pour révoquer l'autorisation; en d'autres termes, le président est compétent, si l'on demande à poursuivre, et le tribunal est compétent, si l'on demande un sursis. Il est certain que le tribunal ne peut pas autoriser à poursuivre. V. cep., Trib. comm. de Nantes, 14 nov. 1914, sous Rennes, 23 juin 1915 (S. et P. 1917.2.42; Pand pér., 1917.2.42). V. d'ailleurs, contre la compétence du tribunal pour l'autorisation de poursuivre, la note,§ 2, sous ce jugement; et notre note, § 3, n. II, sous Cass. req. 7 juin 1916, précité. Faut-il dire, de même, que le président ne peut pas statuer sur une demande de sursis? On peut hésiter dans le cas où il y a eu, préalablement, ordonnance autorisant la continuation de l'instance, car, cette ordonnance n'étant pas contentieuse, on peut soutenir que le magistrat, qui l'a rendue, peut la révoquer, n'étant pas arrêté par la chose jugée; mais encore peut-on prétendre, en sens contraire, que le président n'en a pas moins, en autorisant la poursuite, conféré définitivement au requérant un droit à la continuation de l'instance dont il n'est plus maître, et qui ne peut être supprimé sans une procédure contentieuse; encore peut-on prétendre, aussi, que le décret, en prévoyant expressément la révocation par le tribunal saisi, a entendu régler la question, réserver à ce tribunal le droit de révocation, le retirer, par conséquent, au président. En tout cas, lorsqu'il n'y a pas eu d'ordonnance autorisant la continuation de l'instance, une demande de sursis n'est pas une demande de révocation, car il n'y a pas de décision antérieure du président qu'il puisse s'agir de révoquer; dès lors, la compétence du président n'aurait aucune base, et il faut dire que le sursis, en pareil cas, ne peut être demandé qu'au tribunal lui-même.

duite contre sa femme, a présenté requête au président du tribunal civil de Bordeaux pour obtenir que cette instance fut suspendue. Mais, par ordonnance du 5 mars

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Si c'est la voie du référé que l'on a employée pour demander au président un sursis à la continuation de l'instance, la compétence de ce magistrat, quant au sursis, peut paraître probable, en vertu de l'art. 4 du décret du 10 août 1914, qui prévoit qu'un délai de grâce peut être accordé en toute matière pendant la durée des hostilités, soit par le tribunal saisi, soit même par le juge des référés. La circulaire du 12 août 1914 (Législation de la guerre de 1914, t. 1, p. 48) montre que l'on a voulu ainsi permettre au débiteur, notamment, de faire surseoir à la continuation de l'instance, en obtenant un délai de grâce avant le jugement, et non pas seulement de faire surseoir à une mesure d'exécution après le juge. ment. La circulaire vise le cas où une ordonnance autorisant la poursuite a été rendue, contre le débiteur, conformément à l'art. 3 du décret du 10 août 1914; il n'est donc pas douteux que le président serait compétent, sur référé, non seulement pour ordonner un sursis de plano, mais encore pour faire échec, par ce sursis, à une précédente ordonnance d'autorisation. Faut-il apporter des limitations à cette disposition? On peut songer à dire que le délai de grâce, par son idée essentielle, est applicable lorsqu'il s'agit de débiteurs malheureux, et suppose une poursuite exercée en vertu d'un droit de créance; que, si l'expression toute matière permet de penser que le décret du 10 août 1914 a voulu l'étendre, par exemple, aux hypotheses où la poursuite s'exerce en vertu d'un droit réel, en tout cas, n'en peut-il être de même pour le cas où il s'agit, comme dans l'espèce de l'arrêt ci-dessus recueilli, d'une action en divorce; que, d'ailleurs, le gouvernement, autorisé, par l'art. 2 de la loi du 5 août 1914, à suspendre l'effet des obligations, suspension que peut réaliser la concession d'un délai de grâce, n'avait pas le pouvoir de suspendre les effets des droits réels, ni surtout les instances relatives à l'état des personnes. A ces objections, on répondrait, sans pouvoir prétendre les faire disparaître, que l'expres. sion toute matière est très large, et que, au point de vue de la légalité, si le délai de grâce accordé pour la poursuite d'une instance ne fait que rétablir la suspension des instances, édictée par les art. 1er et 3 du décret du 10 août 1914, il peut être aussi largement applicable que cette suspension (laquelle comprend même les actions en divorce), puisque la suspension des instances ne rentre pas plus mal dans les pouvoirs du gouvernement, en tant qu'elle renaît après révocation d'une levée de suspension, qu'en tant qu'elle atteint les instances originairement, avant toute levée. On objecterait encore que les décrets ultérieurs ont limité ou abrogé l'art. 4 du décret du 10 août 1914, notamment en tant que celui-ci concerne la révocation des levées de suspension d'instance, l'art. 2 du décret du 15 déc. 1914 ayant confié expressément au tribunal lui-même le soin de statuer sur cette révocation; objection à laquelle on répliquerait, avec raison, que nul décret n'a retouché le décret du 10 août 1914 dans son art. 4, que nul décret n'a repris la matière du délai de grâce. et que le pouvoir de révocation du tribunal saisi ne rend pas inutile la faculté, pour les intéressés, de demander cette révocation, à titre peutêtre purement temporaire, d'ailleurs, par la voie plus simple et plus rapide du référé.

"

1917, le président du tribunal a refusé de faire droit à cette requête, motif pris de ce que M. Gourdin était demandeur dans l'instance.

$4.

Pouvoirs du président quant à la question de recevabilité de l'exception de mobilisation. L'arrêt ci-dessus recueilli aborde encore une autre question relative aux pouvoirs du président, et qui est la suivante : le président peut-il, pour interdire ou autoriser la continuation de l'instance, se fonder sur le fait que, d'après son appréciation, l'intéressé possède ou ne possède pas l'exception de mobilisation?

L'arrêt pourrait paraître trancher une partie de la question, en décidant que le tribunal seul, non le président, a le droit de dire que l'exception de mobilisation n'appartient pas à l'intéressé et que l'instance peut être poursuivie. Mais, en réalité. l'arrêt n'a pas cette large portée; il concerne le cas où c'est le sursis, la discontinuation de la procédure, qui est sollicité, non point l'autorisation de poursuivre: il dit, avec raison, que le sursis ne peut pas être demandé au président ni accordé par celui-ci; le tribunal seul pouvant être saisi de la demande de sursis, il est évident que lui seul aussi peut statuer sur le point de savoir si l'exception de mobilisation, alléguée comme motif du sursis, appartient bien à l'intéressé.

Pour que la question, que nous avons énoncée plus haut, se posat exactement, il faudrait envisager l'hypothèse suivante : l'adversaire du prétendu mobilisé présente requête au président afin d'être autorisé à poursuivre l'instance; devant le président, l'autre partie, convoquée, combat cette requête, en invoquant l'exception de mobilisation; le président peut-il rejeter la requête, motif pris de ce que, d'après lui, l'exception de mobilisation est opposée à bon droit ?

Il est certain que la décision du président n'a jamais autorité de chose jugée. S'il autorisait la continuation de l'instance, en déclarant l'exception non opposable, le plaideur, qui se prétend mobilisé, pourrait renouveler sa prétention devant le tribunal, et obtenir que le tribunal annulât l'autorisation, s'il admettait l'exception. Mais, si le président considère l'exception comme justifiée et refuse l'autorisation, sa décision est sans recours, car le tribunal, qui garde en théorie le droit de dire l'exception non justifiée, n'aura pas l'occasion d'exercer ce droit, en fait, puisqu'il lui est interdit de laisser l'affaire se poursuivre sans le consentement du prétendu mobilisé, faute d'ordonnance permettant la continuation de l'instance.

Deux thèses se conçoivent.

Ou bien on dira que le président, ayant souverain pouvoir de rejeter la requête en autorisation de continuation d'instance, sans même avoir à donner de motifs (V. Cass. req. 22 déc. 1915, S. et P. 1916.1.77; Pand. pér., 1916.1.77; 7 juin 1916, précité, et notre note, § 8, n. V), échappe à toute critique, alors même qu'il a refusé l'autorisation uniquement parce qu'il a cru, à tort, à l'existence d'un obstacle de droit : l'exception de mobilisation, qu'il a, par erreur, déclarée justifiée. Toute circonstance, qui lui paraît conseiller le sursis, peut être, par lui, d'après les termes des décrets, retenue comme suffisante pour entraîner rejet de la requête; ainsi en est-il, dira-t-on, de la situation contestée qui est celle de l'adversaire du requérant, adversaire dont la mobilisation est discutée; le

POURVOI en cassation par M. Gourdin. - Moyen unique. Violation de l'art. 4 de la loi du 5 août 1914 et de l'art. 3 du décret du 10 août 1914, modifié et complété par les décrets du 15 déc. 1914 et du 11 mai 1915, en ce que l'ordonnance attaquée reconnait qu'il peut être suivi une instance contre un citoyen présent sous les drapeaux, sous prétexte que celui-ci avait engagé l'instance, alors qu'il a été mobilisé postérieurement, et qu'en outre, une demande reconventionnelle a été introduite.

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seul doute existant sur cette situation peut être retenu par le président comme motif suffisant de sursis; peu importe qu'il soit allé jusqu'à croire, même à tort, que ce plaideur possédait bien l'exception et jouissait d'une protection légale absolue.

Ou bien, au contraire, on dira que le président doit se borner strictement à apprécier en fait l'opportunité de la levée, qu'il n'a pas compétence pour trancher les contestations de droit, qu'il abuserait de ses pouvoirs en s'en servant pour empêcher, par un refus d'autorisation, que l'opinion, qu'il adopte sur la question de l'existence de l'exception de mobilisation, puisse être revisée par le tribunal. Pour faire apparaître avec plus de force les considérations rationnelles qui militént en faveur de cette thèse, on pourra aller jusqu'à supposer que le président, d'une part, estime désirable, en fait, la continuation de l'instance, et, d'autre part, croit que la poursuite de la procédure est impossible en droit, l'exception de mobilisation lui paraissant opposable: et l'on dira qu'il serait vraiment inadmissible qu'il fût tenu de rejeter la requête, empêchant le tribunal de statuer sur ce dernier point, alors que, pentêtre, le tribunal reconnaîtrait l'exception non existante, et pourrait alors procéder à la continuation de l'instance, que le président lui-même aurait bien voulu pouvoir autoriser. Mieux vaut, conclura-t-on, que le président, se tenant exclusivement sur le terrain du fait, autorise la continuation de l'instance, laissant au tribunal le soin de rétablir la suspension, si le tribunal estime l'exception invoquée à bon droit, puisque, aussi bien, le tribunal a seul le pouvoir de trancher définitivement cette question avec l'autorité de la chose jugée.

Cette seconde thèse séduit évidemment par la logique et l'exactitude de son analyse, étant donné qu'elle empêche de soustraire à la connaissance du tribunal, par un détour dépourvu d'élégance, une question sur laquelle lui seul pourrait dire définitivement le droit, avec l'autorité de la chose jugée. Dans le cas plus particulier que nous venons de voir cette seconde thèse envisager, en dernier lieu, comme mettant spécialement en relief les éléments qui lui sont favorables, il est évident aussi que l'utilité pratique lui fournit un

survenance de sa mobilisation au cours de l'instance suffisait à lui donner le droit d'obtenir la discontinuation de l'instance, par application de la loi du 5 août 1914; Mais attendu que, si le motif exprimé dans l'ordonnance constitue une interprétation inexacte de ce texte, le dispositif de ladite ordonnance se trouve cependant justifié en droit: Attendu, en effet, que, si le président du tribunal était compétent, aux termes des décrets des 10 août 1914, 15 déc. 1914 et 11 mai 1915, pour statuer sur la continuation d'une instance concernant un individu non mobilisé, ce magistrat ne l'était point pour statuer au cas de mobilisation survenue au cours de l'instance;

qu'en ce cas, aucun texte de loi ne lui donne le pouvoir d'autoriser, soit la continuation, soit la suspension de l'instance; qu'il appartient à la seule juridiction saisie de l'instance de statuer sur les prétentions des parties à cet égard; que, par suite, le dispositif de la décision attaquée, déclarant non recevable la demande adressée au président, est justifié en droit; - Rejette, etc.

Du 14 mai 1918.

Ch. req.

-

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MM. Mé

argument sérieux. Il semble bien que cette autorisation sous réserve doit être conseillée au magistrat, en pareil cas, et qu'elle ne se heurte à aucun obstacle légal. Mais peut-on aller jusqu'à ériger en règle de droit la solution d'après laquelle le président ne doit pas se faire juge du bien fondé de l'exception de mobilisation? Le doute provient, d'abord, des pouvoirs très larges, presque illimités, que les décrets lui accordent, lorsqu'il s'agit de refuser l'autorisation. Ensuite, on peut se demander si l'on est fondé à dire que le président n'a pas le droit ou même le devoir de statuer selon la conviction qu'il se sera faite au sujet de l'existence de l'exception; placé en présence d'une loi qui interdit la poursuite des instances contre les mobilisés (loi qui ne constitue peut-être pas le texte en vertu duquel il est saisi, ce texte est celui du décret [V. cep., le décret du 15 déc. 1914, art. 2), mais loi qu'il ne peut pas ignorer), peut-on dire qu'il doit autoriser la poursuite de l'instance, alors même qu'il sait, ou qu'il croit, que la partie est mobilisée? Cela est délicat à affirmer, et l'on est tenté de dire que le président pourra, sinon même devra, refuser l'autorisation de poursuivre, si l'exception de mobilisation lui apparaît opposable, non point, sans doute, parce qu'il prétendra trancher contentieusement un litige sur ce point, mais en vertu de cette sorte de pouvoir nécessaire de fait, qui appartient à tout organe de décision, de se faire une opinion sur les questions dont la solution constitue une condition préalable de la solution finale à adopter sur le fond, lorsque l'organe de décision est obligé, s'il adopte un certain parti, de trancher implicitement une question préalable, de la trancher, sans doute, sous réserve des pouvoirs souverains des juges contentieux appelés à dire le droit en cas de contestation ultérieure, mais de la trancher, malgré tout, à titre au moins provisoire, de prendre parti sur cette question; on peut donner un certain relief, au point de vue de l'utilité pratique, à cette observation, en faisant observer que, si le président ne peut empêcher de porter à l'audience l'affaire concernant le mobilisé, celui-ci sera obligé de conclure devant le tribunal sur l'exception de mobilisation, ou bien sera jugé par défaut, ce qui peut paraître diminuer la protection que les mobilisés tirent de l'art. 4 de la loi du 5 août 1914.

rillon, prés.; Morellet, rapp.; TrouardRiolle, av. gén. (concl. conf.); de Ségogne,

av.

MEUBLES

CASS.-C. 26 janvier 1914. FONDS DE COMMERCE, UNIVERSALITÉ JURIDIQUE, RÈGLE « EN FAIT DE POSSESSION VAUT TITRE », NON-APPLICATION (Rép., v Fonds de Commerce, n. 49 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 12 et s.).

La règle qu'en fait de meubles possession vaut titre ne s'applique qu'aux meubles corporels, susceptibles d'une tradition manuelle (1) (C. civ., 2279).

Elle ne s'étend pas aux meubles incorporels, ni par suite aux fonds de commerce, qui, comprenant, non seulement des objets matériels et les marchandises qui les garnissent, mais, encore et surtout, la clientèle ou achalandage, l'enseigne et le droit au bail des immeubles où ils sont installés, constituent des universalités juridiques, qui ne comportent pas de tradition manuelle (2) (d.).

Enfin, la thèse, qui interdit au président un refus d'autorisation fondé sur l'existence de l'exception, se heurte à une difficulté matérielle en ce qui concerne la sanction; même si l'on admet que le président ne peut fonder son refus sur ce motif, on n'admettra sans doute point que l'autre partie puisse demander l'annulation de l'ordonnance de rejet, en raison de ce fait, qualifié excès de pouvoir; prétendît-on ouvrir cette action en nullité dans le cas où l'ordonnance serait expressément motivée de cette façon, on ne l'ouvrirait probablement pas, car cela paraîtrait bien impossible, dans le cas où l'ordonnance ne serait pas motivée du tout; et, l'ordonnance motivée n'étant pas exigée là même où le décret veut des motifs exceptionnels », a fortiori n'est-elle aucunement exigée, lorsque le président rejette la requête. Quant à une demande incidente d'annulation de l'ordonnance, présentée devant le tribunal saisi, il n'y faut point songer, puisque, faute d'autorisation, le tribunal ne peut être saisi; d'autre part, si même on ouvrait l'action principale en nullité contre l'ordonnance, et que cette action réussit, il est bien entendu qu'il faudrait revenir devant le même président pour obtenir une autorisation de continuation d'instance, et que le président, battu sur le terrain de l'exception de mobilisation, aurait toujours le droit de refuser l'autorisation, sans donner aucun motif, puisqu'il peut décider souverainement qu'il résulte des circonstances qu'il n'y a pas lien de donner l'autorisation.

R. JAPIOT. Professeur à la Faculté de Droit de Dijon.

(1) Principe certain. V. Cass. req. 4 nov. 1902 (S. et P. 1903.1.173), et la note. Adde, la note de M. Wahl, n. VIII, et les renvois, sous Paris, 23 mai 1901 (S. et P. 1905.2.121).

(2) La question résolue par l'arrêt ci-dessus recueilli a donné lieu, de la part de la Cour d'appel de Paris, à des revirements de jurisprudence. V. dans le sens de l'arrêt ci-dessus, Paris, 27 juin et 22 nov. 1904 (S. et P. 1905.2.121). Mais V. en sens contraire, Paris, 23 mai 1901 (S. et P. 1905.2.121); Paris, 13 mars 1909 (rendu

(Paris C. Veuve Lacombas et autres).

M. Paris s'est pourvu en cassation d'un arrêt de la Cour de Paris, du 13 mars 1909, rendu au profit de Mme Vve Lacombas et autres. Moyen unique. Violation par fausse application des art. 2279, C. civ., et 7 de la loi du 20 avril 1810, pour défaut de motifs, en ce que l'arrêt attaqué a déclaré ledit art. 2279 applicable à une vente de fonds de commerce.

ARRÊT.

LA COUR; Sur le moyen unique du pourvoi Vu l'art. 2279, C. civ. ; Attendu que la règle de cet article, portant qu'en fait de meubles, la possession vaut titre, ne s'applique qu'aux meubles corporels susceptibles d'une tradition manuelle. et ne s'étend pas aux meubles incorporels, et, par suite, aux fonds de commerce; que ceux-ci, comprenant, non seulement des objets matériels et les marchandises qui les garnissent, mais, encore et surtout, la clientèle ou achalandage, l'enseigne et le droit au bail des immeubles où ils sont installés, constituent des universalités juridiques, qui ne comportent pas de tradition manuelle; qu'aux termes des art. Ier et 3 de la loi du 17 mars 1909, leur vente doit, au regard des tiers, ètre constatée par écrit, et être publiée par extrait ou avis dans un journal d'annonces légales, ce qui permetaux acquéreurs de savoir aisément s'ils traitent avec leur véritable propriétaire ; Attendu, cependant, que, pour repous

dans la présente affaire). V. aussi, Paris, 11 juill. 1904 (S. et P. 1905.2.121).

Dans sa note sous les arrêts des 23 mai 1901, 27 juin, 11 juill. et 22 nov. 1904, précités, notre distingué collaborateur, M. Wahl, a défendu l'opinion d'après laquelle la règle qu'en fait de meubles possession vaut titre s'applique aux fonds de commerce, en ajoutant que cette opinion se justifiait, alors même que l'on considérait le fonds de commerce comme une universalité juridique. Nous n'examinerons donc pas de nouveau ici l'argument que la Cour de cassation tire du caractère d'universalité juridique qu'elle reconnaît aux fonds de commerce (V. Cass. civ. 31 oct. 1906, S. et P. 1907.1.24, et la note; adde, Pau, 6 nov. 1911, S. et P. 1913.2.193, Pand. per., 1913.2.193. Mais V. les notes de M. Wahl sous Pau, 6 nov. 1911, précité, et sous Cass. req. 20 janv. 1913, qui précède), pour les déclarer non susceptibles de tradition manuelle, et les soustraire l'application de l'art. 2279, nous bornant sur ce point à nous référer aux observations de notre collaborateur.

La Cour de cassation, dans l'arrêt ci-dessus, appuie la solution qu'elle donne sur un second argument, qui lui est fourni par les art. 1o et 3 de la loi du 17 mars 1909, prescrivant que les ventes de fonds de commerce soient constatées par écrit et soient publiées dans un journal d'annonces légales. Il n'est pas contestable que ces dispositions puissent être d'un grand poids dans la question. L'art. 2279 suppose des ventes qui se font sans écrit. Avant la loi du 17 mars 1909, on invoquait, pour soumettre les fonds de commerce à la règle en fait de meubles possession vaut titre ", l'usage assez général de passer sans écrit la vente de ces fonds, du moins lorsqu'ils étaient pea importants. V. la note de M. Wahl sous Paris, 23 mai 1901 et autres arrêts précités.

ser l'action que Paris exerçait contre la demoiselle Cartaux, la veuve Lacombas et le sieur Vignal, à raison du fonds de commerce, dit Hôtel du Luxembourg, dont il avait confié la gestion à la demoiselle Cartaux, et que celle-ci avait vendu à la veuve Lacombas, qui l'avait, à son tour, cédé au sieur Vignal, l'arrêt attaqué, tout en reconnaissant le droit de propriété du demandeur, s'est basé sur ce que la veuve Lacombas et le sieur Vignal avaient traité avec le propriétaire apparent du fonds, étaient de bonne foi lors de leur contrat, et avaient, dès lors, le droit d'invoquer la maxime qu'en fait de meubles possession vaut titre qu'en statuant ainsi, l'arrêt attaqué a faussement appliqué, et. par suite, violé l'art. 2279, susvisé; - Casse...; renvoie devant la Cour d'Amiens, etc.

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CASS.-CIV. 30 mai 1916.

DÉLAI, DÉLAI DE GRACE, JUGEMENT PORTANT CONDAMNATION, JUGEMENT POSTÉRIEUR, PAIEMENT PAR ACOMPTES (Rép., v Délai, n. 107 et s.; Pand. Rép., v Obligations, n. 3250).

Un débiteur, poursuivi en vertu d'un jugement contradictoire et en dernier ressort, qui l'a condamné purement et simpleAujourd'hui qu'un écrit est exigé pour la validité à l'égard des tiers, et doit même être accompagné d'une publication, l'acquéreur est à même de vérifier les titres de son vendeur, et n'a plus besoin, par conséquent, d'étre protégé par l'art. 2279 contre le risque d'une acquisition a non domino, La solution consacrée par la Cour de cassation doit donc, en définitive, être admise. V. BaudryLacantinerie et Tissier. Prescript., 3° éd., n. 843 bis. V. aussi n. 845.

Mais, si elle se justifie en ce qui concerne les ventes de fonds de commerce conclues depuis la loi du 17 mars 1909, il convient d'observer que la décision, rendue par la Cour d'appel de Paris dans la cause, remontait au 13 mars 1909, c'est-àdire à une date antérieure à la promulgation de la loi invoquée par la Cour de cassation. En tirant argument de cette loi pour solutionner un litige auquel elle ne pouvait certainement pas être appliquée, la Cour s'est donc écartée de l'une de ses règles habituelles, celle par laquelle elle s'interdit de faire état d'une législation qui n'existait pas encore à l'époque où a été rendue la décision attaquée. V. Faye, La C. de cass., p. 86, n. 57.

(1) C'est un point consacré par le texte même de l'art. 122, C. proc., et reconnu par la jurisprudence et la doctrine, que les tribunaux ne peuvent accorder de délais à la partie condamnée que par le jugement qui statue sur la contestation. La raison en est que le tribunal est dessaisi de la contestation par le jugement qu'il à rendu, et ne peut s'en ressaisir sur un incident d'exécution. V. Colmar, 30 août 1809 (8. et P. chr.); Bourges, 9 mai 1812 (S. et P. chr.); Bordeaux, 29 juin 1827 (S. et P. chr.); Nancy, 3 juin 1871 (S. 1871.2. P. 1871.820); C. d'appel de Bruxelles, 9 déc. 1907, motifs (S. et P. 1908.4.28; Pand. pér.,

250.

ment au paiement d'une dette, ne peut obtenir du juge qui a rendu ce jugement une autre décision lui accordant la faculté de diviser le paiement, en se libérant par acomptes successifs (1) (C. civ., 1244; C. proc., 122).

ARRÊT.

(Darius C. Hérigoyen). LA COUR; Sur le moyen unique du pourvoi Vu l'art. 122, C. proc.: Attendu qu'aux termes de cet article, dans le cas où les tribunaux peuvent accorder des délais pour l'exécution de leurs jugements, ils doivent le faire par la décision même qui statue sur la contestation; que cette disposition est fondée sur ce que le juge, une fois dessaisi par un jugement contradictoire et définitif, ne peut plus connaître, une seconde fois, de la même affaire; qu'il s'ensuit qu'un débiteur, poursuivi en vertu d'un jugement contradictoire et en dernier ressort, qui l'a condamné purement et simplement au paiement d'une dette, ne peut obtenir, du juge qui a rendu ce jugement, une autre décision lui accordant la faculté de diviser le paiement, en se libérant par acomptes successifs; Attendu que, des constatations du jugement attaqué, il résulte que Darius (Ulysse), créancier d'Hérigoyen, en vertu d'un jugement contradictoire, rendu le 7 juin 1912 par le tribunal de Bastia, a fait commandement à son débiteur de payer, avec les intérêts de droit et les frais, la somme de 1.080 fr., montant en principal des condamnations

-

1908.4.28). Adde, la note, col. 2, de M. Labbé sous Paris, 25 sept. 1884 (S. 1885.2.193. P. 1885.1. 1116); Carré et Chauveau, Lois de la proc., 5o éd., t. 1er, quest. 525; Bioche, Dict. de proc., vo Délai, n. 84; Rousseau et Laisney, Dict. de proc., v° Délai, n. 31; Glasson et Tissier, Précis de proc., 2o éd., t. 1, n. 498; Garsonnet et Cézar Bru, Tr. de proc., 3e éd., t. 4, n. 113; Demolombe, Contr. ou oblig., t. 2, n. 596; Laurent, Princ. de dr. civ., t. 17, n. 581; Larombière, Théor. et prat. des oblig., 2o éd., t. 4, sur l'art. 1244, n. 29.

A fortiori des tribunaux ne pourraient accorder des délais pour l'exécution de jugements qu'ils n'auraient pas eux-mêmes rendus; le président du tribunal, notamment, statuant en référé, ne peut accorder au débiteur condamné des délais qu'il n'a pas sollicités ou qu'il n'a pas obtenus du tribunal. V. Paris, 26 févr. et 20 mai 1884 (S. 1886.2.204. P. 1886.1.1163), et les notes; Paris, 25 sept. 1884 (S. 1885.2.193. P. 1885.1.1116), les conclusions de de M. l'avocat général Godart, et la note de M. Labbé; C. d'appel de Bruxelles, 9 déc. 1907, précité; Alger, 9 juin 1909 (S. et P. 1909.2.271; Pand. per., 1909.2.271.), et les notes. Comp. Alger, 22 mai 1916 (S. et P. 1916.2.105; Pand. pér., 1916.2.105), et la note de M. Japiot; Bordeaux, 29 janv. 1917 (S. et P. 1917.2.119; Pand. pér., 1917.2.119), et la note.

Il a été jugé, toutefois, que la faculté d'accorder un délai, conférée aux tribunaux par le décret du Gouvernement de la défense nationale, en date du 7 sept. 1870, était générale, et s'appliquait aux poursuites et exécutions en toute matière, même à celles exercées en vertu de jugements ou arrêts. V. Bourges, 9 nov. 1870 (S. 1871.2.47. P. 1871.266). Mais cette décision, rendue en vertu de dispositions exceptionnelles et temporaires, n'a touché en rien au principe.

prononcées contre lui; que Hérigoyen, par exploit du 10 juill. 1912, a formé opposition à ce commandement, en sollicitant un délai de grâce pour se libérer; — Attendu que, par le jugement attaqué, le même tribunal de Bastia l'a débouté de son opposition, mais lui a accordé la Attendu faculté de se libérer par fractions mensuelles et successives de 30 fr.:

qu'en statuant ainsi, il a violé le texte de Casse le jugement loi ci-dessus visé; rendu par le tribunal civil de Bastia le 26 juill. 1912, etc.

Du 30 mai 1916.

· Ch. civ.

MM. Fal

cimaigne, prés.; Lénard, rapp.; Mérillon, av. gen. Morillot et Mornard (suppléant Me Retouret), av.

CASS.-REQ. 6 juillet 1915

-

et 12 novembre 1918 (2 ARRÈTS). 1o CASSATION, LOI ÉTRANGÈRE, LOI AMÉRICAINE, HARTER ACT », CAPITAINE, ARMATEUR, RESPONSABILITÉ, CONNAISSEMENT, INTERPRÉTATION, POUVOIR DU JUGE, AppréCIATION SOUVERAINE (Rép., vo Cassation [mat. civ.], n. 2344 et s.; Pand. Rép., - 2o ARMACassation civile, n. 725 et s.). TEUR, RESPONSABILITÉ, LOI AMÉRICAINE, « HARTER ACT », AVARIE, FAUTE, ARRIMAGE OU AMÉNAGEMENTS DEFECTUEUX (Rép., vo Armateur, n. 135 et s., et Suppl., eod. verb., n. 149 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 160 et s.). 3o MOTIFS DE JUGEMENT OU D'ARRÊT, ADOPTION DE MOTIFS, CONCLUSIONS, MOTIFS IMPLICITES, ARMATEUR, RESPONSABILITÉ, DEMANDE NOUVELLE, FIN DE NONRECEVOIR, DEMANDE ACCESSOIRE, MARCHANDISES AVARIÉES, FRAIS DE

MAGASI

NAGE (Rép., vo Jugement et arrêt [mat. civ. et comm.], n. 1495 et s., 1756 et s., 2044 et s.; Pand. Rép., v Jugements et arrêts, n. 1035 et s., 1062 et s., 1074 et s., 2379 et s.).

40 INTERETS, POINT

(1) Encore bien que la question soit toujours controversée, la jurisprudence de la Cour de cassation cst en ce sens. V. Cass. req. 19 mars 1918 (S. et P. 1918-1919.1.83; Pand. pér., 1918-1919. 1.83), la note et les renvois.

(2 à 6) La jurisprudence française paraît fixée en ce sens, d'une part, que la clause de non-responsabilité des fautes du capitaine et de l'équipage, insérée dans un connaissement, est licite et doit produire un effet absolu (V. Cass. civ. 6 mars 1912, S. et P. 1913.1.355; Pand. pér., 1913.1.355; 20 oct. 1914, sol. implic., S. et P. 1915.1.39; Pand. pér., 1915.1.39, les notes et les renvois), et, d'autre part, que la clause d'exonération de ses propres fautes, insérée par un armateur dans un connaissement, ne peut avoir pour effet que de faire disparaître la présomption de faute qui pèse sur lui, aux termes du droit commun, en déplaçant le fardeau de la preuve à son profit. V. Cass. req. 9 nov. 1898 (S. et P. 1899.1. 398, et les renvois; Pand. pér., 1899.1.39). V. d'ailleurs, sur les clauses de non-responsabilité dans les transports maritimes, Lyon-Caen et Renault, Tr. de dr. comm., 4o éd., t. 5, n. 740 et s., p. 582 et s.; Thaller et Ripert, Dr. marit., t. 1o, n. 772 et a., p. 614 et s.; Danjon, Tr. de dr. marit., t. 2, n. 722 et s., p. 619 et s.; Gautier, Des clauses d'irresponsabilité en matière de transport mari

JURISPRUDENCE DE LA COUR DE CASSATION.

DE DÉPART, INTÉRÊTS COMPENSATOIRES,
POUVOIR DU JUGE (Rép., v Intérêts,
n. 448 et s.; Pand. Rép., v Obligations,
n. 3453 et s.). -5 FRET, FRET PAYABLE
D'AVANCE, FRET ACQUIS EN CAS DE SINIS-
TRE, FRET PAYABLE SUR POIDS DÉLIVRÉ,
CLAUSE MANUSCRITE, CLAUSE IMPRIMÉE,
CONTRADICTION (ABSENCE DE), MANQUANTS,
RISTOURNE SUR LE FRET, POUvoir du Juge
(Rép., v° Affrètement, n. 635 et s., 699;
Affrètement Affréteur,
Pand. Rép., vo

n. 817 et s.).

1° Une décision uniquement fondée sur
une loi étrangère échappe au contrôle de
la Cour de cassation (1) (C. civ., 1or).
Ire espèce.

après
Il en est ainsi notamment de la décision
par laquelle les juges du fond,
avoir constaté qu'un connaissement a été
établi sous l'empire de la loi américaine,
et déclaré que, de cette loi, et notamment
des art. 2 et s. de la loi du 13 févr. 1893, dite

Harter Act », ressort la nullité de toute
clause ayant pour but d'atténuer ou d'élu-
der la responsabilité du capitaine en ce
qui concerne la garde et la livraison de la
cargaison, et que, de la mention, obligatoire
sur le connaissement, du nombre des colis
embarqués, ne résulte qu'une présomp-
tion susceptible de preuve contraire,
plus
apprécient, au regard de la loi américaine,
le sens et la portée de la clause:
ou moins, accompagnant, dans le con-
naissement, la mention du nombre des
Id.
colis (2) (Id.).

«

De même, les juges du fond ne font qu'u ser de leur pouvoir d'interprétation de la loi étrangère, en décidant que la loi americaine du 13 févr. 1893, dite Harter Act, frappe de nullité la clause du connaissement ayant pour but d'exonérer les armateurs de la responsabilité encourue à raison d'un manquant dans la quantité des marchandises portées au connaissement, et leur décision ne peut donner ou

time; notre Rép. gén. du dr. fr., v° Armateur,
n. 135 et 8., et Suppl., eod. verb., n. 149 et s.; Pand.
Rép., vis Armateur, n. 156 et s., Capitaine de na-
vire, n. 1369 et s.

Dans les différentes affaires sur lesquelles sont
intervenus les arrêts ci-dessus rapportés de la
chambre des requêtes, les tribunaux n'ont pas eu
à appliquer la jurisprudence française en matière
de clauses de non-responsabilité insérées dans les
connaissements. En effet, les contrats passés par
les armateurs avaient été, dans les trois espèces,
conclus sous l'empire de la loi des Etats-Unis de
l'Amérique du Nord. C'était donc au regard de
cette loi que devaient être appréciées la respon-
sabilité de l'armateur et la validité des clauses
excluant sa responsabilité.

La loi applicable était la loi américaine du 13 févr. 1893 (Ann. de législ. étr., 1893, p. 767 et s.), dite Harter Act, du nom de son auteur. Cette loi, extrêmement importante, a défendu d'insérer, dans aucun connaissement ou autre police de chargement, aucune clause, stipulation ou convention en vertu de laquelle les gérant, d'un navire agent, capitaine ou propriétaire seraient déclarés non responsables de la perte ou de l'avarie provenant d'une négligence, faute ou défaut dans le bon chargement, l'arrimage, la garde, le soin ou la livraison convenable de toute

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De même encore, en décidant que règlement français du 2 déc. 1893, sur l'arrimage, n'est pas applicable aux navires de nationalité étrangère, et que l'observation des mesures prescrites par ce règlement ne suffit pas à exonérer, de plein droit, l'armateur et le capitaine de ces navires de toute responsabilité à l'égard de la loi américaine du 13 févr. 1893, dite « Harter Act ». les juges du fond usent de leur pouvoir souverain d'appréciation d'une loi étrangère, et leur décision ne peut donner ouverture à cassation (4) (Id.). 3o espèce.

2o Les juges du fond, qui, après avoir constaté que les avaries subies par les marchandises embarquées sur un navire sont la chaleur dégagée dues uniquement à par la chaudière du bateau, en déduisent que les armateurs et le capitaine n'ont pas fait toutes les diligences nécessaires pour assurer le bon arrimage et la conservation des marchandises dont ils avaient la charge, justifient, par ces considérations, le rejet des présomptions d'irresponsabilité invoquées par les armateurs, ainsi que l'existence à leur charge d'une faute entrainant responsabilité, aux termes de la loi américaine du 13 févr. 1893, dite Harter Act, applicable à l'espèce, et par eux interprétée (5) C. civ., 1134; 3e espèce. C. comm., 216).

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De même, les juges du fond ont pu déclarer les armateurs responsables de l'avarie occasionnée aux marchandises chargées alors qu'ils sur un navire sous l'empire de la loi américaine, dite Harter Act constatent que, si l'avarie est survenue par suite de la démolition, au cours d'une tempête, d'une cloison du navire, il résulte d'un rapport d'expert, homologué par eux, que l'avarie est due au défaut de solidité de la cloison, dont l'aménagement avait été négligé au départ du navire (6) (Id.). 2o espèce.

marchandise légitime à eux confiée» (art. 1er). La même loi a prohibé également l'insertion de semblables clauses dans le but de diminuer, attédu ou des armanuer ou éluder l'obligation

teurs dudit navire d'exercer la diligence nécessaire pour son bon armement, équipement, approvisionnement et aménagement, ainsi que pour le mettre en bon état de navigabilité et capable d'accomplir le voyage projeté, ou l'obligation des capitaines, officiers, agents ou préposés de manipuler et d'arrimer avec soin la cargaison, d'en prendre soin et de la livrer comme il convient » (art. 2)..

Comme compensation à ces prohibitions. qui enlèvent à l'armateur tout moyen de se dégager des fautes commerciales qu'il a pu commettre ou qu'ont pu commettre ses capitaines, préposés ou agents, dans le transport des marchandises à lui confiées, l'llarter Act l'exonére, de plein droit, des conséquences de toutes les fautes nautiques commises par ses préposés, pourvu qu'il ait fourni au départ la due diligence, c'est-à-dire qu'il ait apporté à la préparation du voyage le soin qu'un bon armateur doit apporter expédition maritime. V. Thaller et Ripert, op. cit., t. 1, n. 824, p. 663. due diligence, L'armateur, s'il a fait pas responsable du dommage ou de la perte

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30 En maintenant le chiffre du manquant dans la cargaison d'un navire, tel qu'il avait été fixé par les premiers juges, dont ils adoptent les motifs, les juges d'appel écartent implicitement, par là meme, les présomptions invoquées par des armateurs dans leurs conclusions d'appel, en vue d'établir que le nombre des colis chargés aurait été majoré dans la déclaration à l'embarquement (1) (L. 20 avril 1810, art. 7). - 2o espèce.

Lorsque les premiers juges ont omis de statuer sur des conclusions tendant à la condamnation solidaire du capitaine d'un navire et des armateurs au paiement des frais de magasinage et de venté publique des marchandises avariées provenant de la cargaison du navire, les juges d'appel, saisis de ces conclusions par appel incident de l'intime, répondent suffisamment à la fin de non-recevoir opposée par l'appelant à ces conclusions, et tirée de la nouveauté de

provenant des fautes ou erreurs de navigation ou de gestion du navire, pas plus qu'il ne le serait des risques de mer, des cas fortuits ou de force majeure, du vice propre de la marchandise ou des fautes de l'expéditeur (art. 3).

La jurisprudence française a été fréquemment appelée à se prononcer sur l'interprétation qui doit être donnée de l'Harter Act, au point de vue de la portée des dispositions prohibitives des clauses de non-responsabilité des fautes commerciales de l'armateur ou de ses préposés.

Il a été jugé que l'armateur ne peut valablement s'exonérer des fautes commerciales. V.Trib. comm. du Havre, 6 mars 1894 (Rec. Havre, 1894.1.85); Trib. comm. du Havre, 30 avril 1895 (Rec. Havre, 1895.1.98); Rouen, 31 juill. 1895 (Rec. Havre, 1895.2.221); Poitiers, 19 déc. 1898, sous Cass. req. 28 mars 1900 (S. et P. 1901.1.405; Pand. pér., 1901.1.388), et le reavoi; Trib. comm. de Bordeaux, 1er mars 1902 (Rev. intern. de dr. marit., t. 18, p. 197); Trib. comm. de Dunkerque, 15 mai 1903 (Rev. intern. de dr. marit., t. 19, p. 32); Trib. comm. du Havre, 8 août 1905 (Rev. intern. de dr. marit., t. 21, p. 195); Rennes, 13 févr. 1912 (Rev. intern. de dr. marit., t. 29, p. 35). Il ne peut pas même s'exonérer indirectement par l'insertion d'une clause qui le déchargerait de l'obligation de représenter en bon état tous les objets chargés sur le navire, par exemple de la clause «< poids inconnu (V. Trib. comm. de Bordeaux, 1er mars 1902, précité. V. cep., Trib. comm. du Havre, 21 août 1912, Rev. intern. de dr. marit., t. 28, p. 364. Comp. Rouen, 19 mars 1907, Rev. intern. de dr. marit., t. 22, p. 769), ou de la clause que dit être. (V. Trib. comm. du Havre, 8 août 1905, précité), ou, enfin, comme dans l'espèce de l'arrêt de Cass. req. 6 juill. 1915, ci-dessus recueilli, de la clause plus ou moins ».

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Toutes ces clauses tendent, en effet, à permettre à l'armateur de ne restituer qu'une partie du chargement qui lui a été confié. Or, l'Harter Act exige de l'armateur ou de son préposé qu'il délivre au chargeur un connaissement «< constatant, entre autres choses, les marques nécessaires pour vérifier l'identité et le nombre des colis ou la quantité embarquée, constatant si le poids est fixé par le transporteur ou par le chargeur, l'état apparent ou la condition de la marchandise» (art. 4).

Les tribunaux français assurent l'application rigoureuse de cette clause, en refusant à l'arma

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teur le droit de remettre au chargeur des marchandises qui ne porteraient pas de marques, alors que des marques ont été indiquées au connaissement (V. Trib. comm. du Havre, 6 mars 1894 et 30 avril 1895 et Rouen, 31 juill. 1895, précités; Rouen, 16 juill. 1902, Rev. intern, de dr. marit., t. 18, p. 17), ou qui porteraient des marques différentes de celles indiquées au connaissement. V. Trib. comm. de Cette, 17 févr. 1904 (Rev. intern. de dr. marit., t. 25, p. 513). V. aussi, Rouen, 19 mars 1907, précité.

L'armateur ne peut pas non plus s'exonérer de la responsabilité des avaries qui sont survenues, soit par suite d'une négligence dans le chargement (V. Trib. comm. de Marseille, 9 mars 1909, Rev. intern. de dr. marit., t. 24, p. 654), soit, comme dans les espèces des deux arrêts de Cass. req. 12 nov. 1918, rapportés ci-dessus, par suite d'une installation défectueuse du navire. V. Trib. comm. du Havre, 23 sept. 1903 (Rev. intern. de dr. marit., t. 19, p. 384); Rennes, 13 févr. 1912, précité; Trib. comm. du Havre, 28 août 1918 (Rev. intern. de dr. marit., t. 31, p. 122). Comp. Trib. comm. de Marseille, 10 mai 1907 (Rev. intern. de dr. marit., t. 23, p. 383); Cass. civ. 5 déc. 1910 (S. et P. 1911.1.129; Pand. pér., 1911.1.129), et la note de M. Lyon-Caen.

De l'exposé qui précède, il ressort que la jurisprudence française paraît bien, par l'interprétation qu'elle donne de l'arter Act, appliquer, dans son esprit comme dans sa lettre, les dispositions de cette loi, qui a eu pour but, au dire de ses auteurs, de protéger le commerce américain contre les armateurs étrangers, auxquels l'insuffisance de la marine marchande des Etats-Unis, à cette époque, le forçait à avoir recours. V. Danjon, op. cit., t. 2, n. 744, p. 728 et s.; Thaller et Ripert, op. cit., t. 1, n. 777, p. 622. V. aussi, Gautier, op. cit., n. 86 et s., p. 161 et s. Si elle a été édictée dans l'intérêt exclusif des chargeurs de nationalité américaine, elle n'en doit pas moins être interprétée dans le sens le plus favorable aux chargeurs, quelle que soit leur nationalité.

Mais, s'agissant d'une loi étrangère, les décisions des juridictions françaises qui ont à statuer sur son application échappent au contrôle de la Cour de cassation, celle-ci se refusant à reviser l'interprétation donnée par les juges du fond des lois étrangères. V. la note 1, qui précède. C'est la solution que confirment les trois arrêts ci

raison de manquants, usent de leur pouvoir d'appréciation, en allouant au destinataire les intérets de droit à compter d'une date antérieure à l'assignation (4) (C. civ., 1153). 2o espèce.

5o Les juges du fond constatent_souverainement, par une interprétation des conventions des parties qui n'en dénature ni le sens, ni la portée, que la clause manuscrite d'une charte-partie, stipulant : « fret payable d'avance, lors de la mise à bord de la cargaison, fret acquis au navire perdu ou non perdu », rise un cas tout autre que celui prévu par la clause imprimée fret payable sur poids délivré laquelle donne droit au réceptionnaire à une ristourne du fret perçu en trop sur toute quantité de marchandises non livrée, alors surtout que les stipulations du connaissement confirment ce droit du réceptionnaire (5) (C. civ., 1134; C. comin., 273, 281, 302). 3e espèce.

dessus reproduits, qui reconnaissent le pouvoir souverain des juges du fond pour interpréter 1 Harter Act ».

(1) Application du principe que les juges d'appel motivent suffisamment le rejet de conclusions prises devant eux, en adoptant purement et simplement les motifs des premiers juges, qui répondaient par avance à ces conclusions. V. Cass. req. 11 nov. 1902 (S. et P. 1907.1.451, et les renvois; Pand. per., 1903.1.493). Adde, comme application, Cass. civ. 29 mars 1909 (S. et P. 1910.1.241; Pand. pér., 1910.1.241).

(2) Des motifs implicites suffisent à assurer la régularité d'une décision. V. Cass. req. 24 mai 1913 (S. et P. 1913.1.555; Pand. pér., 1913.1.555); Cass. civ. 26 mai 1913 (S. et P. 1913.1.318; Pand. pér., 1913.1.318); 20 juin 1917 (S. et P. 1917.1.33; Pand. pér., 1917.1.33), et les renvois.

(3) La décision sur l'accessoire, lorsqu'elle est une conséquence de la décision prise sur le principal, n'a pas besoin d'être motivée. V. Cass. req. 9 mars 1891 (2 arrêt) (S. et P. 1893 1.457); Cass. civ. 21 févr. 1893 (S. et P. 1893. 1.477); 30 oct. 1893 (S. et P. 1894.1.326), et les ren vois.

(1) Principe certain, V. Cass. req. 6 juill. 1905 (S. et P. 1910.1.241, ad notam; Pand. pér., 1910.1.241, ad notam); 22 avril 1909 (S. et P. 1909.1.368; Pand. pér., 1909.1.368), et les renvois. V. aussi. Cass. civ. 21 oct. 1912 (S. et P. 1913.1.195; Pand. pér., 1913.1.195); 15 juill. 1914 (S. et P. 1918-1919.1.43; Pand. pér., 19181919.1.43).

(5) Il appartient aux juges du fond de déterminer le caractère et la portée d'une convention, sous la seule condition de ne pas la dénaturer. V. Cass. req. 19 oct. 1915 (S. et P. 1918-1919.1.117; Pand. pér., 1918-1919.1.117), et les renvois. V. comme application en matière de charte-partie, Cass. req. 15 avril 1908 (8. et P. 1910.1.510; Pand. pér., 1910.1.510), et le renvoi. V. d'ailleurs, sur la clause du fret acquis, Cass. civ. 25 févr. 1892 (2 arrêts) (S. et P. 1892.1.153), les conclusions de M. Desjardins, la note et le renvoi; adde, Danjon, Tr. de dr. marit., t. 2, n. 757 et s., p. 758 et s., et sur les difficultés auxquelles peut donner lieu la clause de fret payable sur poids délivré », Cass. req. 6 mars 1901 (S. et P. 1904.1.517); adde, Danjon, op. cit., t. 3, n. 847, p. 147 et s.

ex

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