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LE CONSEIL adopte cette exception, et celle de l'impossibilité physique de cohabitation.

La discussion de l'exception résultant de la séparation est

ouverte.

LE CONSUL CAMBACÉRÈS dit qu'il est difficile d'adopter cette exception, parce que la séparation de corps n'établit pas entre les époux l'impossibilité de cohabitation. Il n'est pas ordinaire qu'ils se fréquentent; cependant cet événement est possible. Mais si l'exception est admise, il conviendra, pour ne pas se contredire, de supprimer le mot physique dans la disposition qui établit l'exception de l'impossibilité de cohabitation.

LE PREMIER CONSUL dit qu'en effet les rapprochemens que ménageront entre les époux ceux qui tenteraient de les réconcilier peuvent leur donner lieu d'avoir commerce ensemble, sans être cependant suivis d'une réconciliation définitive.

M. BOULAY dit que la circonstance de la séparation est une forte présomption contre la paternité; qu'elle ne doit céder qu'à l'évidence des preuves. Il serait dur, en effet, que la femme pût donner librement des enfans étrangers au mari.

LE PREMIER CONSUL dit que cette réflexion prouve qu'il est nécessaire, avant de prononcer, de traiter la matière de la séparation. Comment se fixer, lorsqu'on ignore si l'enfant de la femme séparée de corps portera le nom du mari, si, en certains cas, la séparation ne sera pas suivie de la clôture?

M. TRONCHET croit l'ajournement d'autant plus nécessaire, qu'après la matière du divorce on arrivera à un chapitre de fins de non-recevoir, qui résout la plupart de ces questions. L'ajournement est proposé.

L'article 3 du chapitre II est mis en délibération comme base. LE CONSEIL l'adopte en principe avec les amendemens du Consul Cambacérès et de M. Portalis.

Le Conseil adopte également en principe que les héritiers du mari seront admis à la preuve qu'il n'est pas le père de l'enfant, quoique celui-ci ait justifié qu'il est né de la femme pendant le mariage.

(Procès-verbal de la séance du a4 brumaire an X. - 15 novembre 1801.)

Le chapitre III, intitulé des Enfans nés hors mariage, est soumis à la discussion.

La section première, sur la légitimation de ces enfans, est d'abord discutée.

L'article 1er est adopté ainsi qu'il suit :

« Les enfans nés hors mariage, d'un père et d'une mère * libres, pourront être légitimés. »

L'article 2 est discuté; il est ainsi conçu :

« Ils seront légitimés par le mariage subsequent de leurs « père et mère, lorsque ceux-ci les auront légalement re« connus avant leur mariage, ou qu'ils les reconnaîtront dans « l'acte même de célébration. »

LE MINISTRE DE LA JUSTICE fait observer que cet article semble refuser à la reconnaissance faite postérieurement au mariage l'effet de légitimer les enfans nés avant que le père et la mère fussent mariés. Il est cependant possible que la pudeur que l'intérêt, de ne pas aliéner des parens austères, aient empêché les époux de reconnaître leurs enfans, soit avant, soit lors de la célébration de leur mariage; et alors il n'est plus en leur pouvoir de rendre l'état civil aux fruits prématurés de leur union. Cependant, la légitimation est l'effet nécessaire du mariage; la déclaration des père et mère, et toutes les formalités, ne servent qu'à déterminer l'application de ce principe.

M. REGNIER dit que le système du Ministre faciliterait la fraude des époux qui, pour s'assurer une succession, ou par d'autres motifs, s'accorderaient à reconnaître un enfant qui leur est étranger.

LE MINISTRE répond que, comme ce serait là une fraude,

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Ib.

les tiers intéressés seraient admis à contester la reconnaissance. M. DeFermon ajoute que d'ailleurs ce genre de fraude serait difficile, puisque deux époux ne pourraient le tenter qu'autant qu'ils trouveraient un enfant qui n'appartiendrait à personne.

M. TRONCHET dit que l'objection du Ministre vient de ce qu'il confond les effets que le mariage subséquent avait sous l'ancienne jurisprudence, et ceux qu'il a aujourd'hui. Autrefois le mariage subséquent légitimait de plein droit les enfans, sans qu'il fût besoin d'une reconnaissance antérieure ou faite lors de la célébration, parce que la filiation pouvait être prouvée, même à l'égard du père; mais la recherche de la paternité étant abrogée, la filiation ne peut plus être prouvée que par la reconnaissance du père : or, l'article s'applique à l'enfant qui n'a pas été reconnu. Cette reconnaissance ne peut être constatée que par un titre. L'article veut que, quand il n'en existe pas avant le mariage, il soit rédigé au moment de sa célébration.

LE MINISTRE DE LA JUSTICE fait observer que ce n'est pas sous ce rapport qu'il attaque l'article; que jusqu'ici le mariage subséquent a emporté avec lui la légitimation; que cet effet du mariage est encore conservé par le projet dont il s'agit; qu'il est bien évident que cet effet suppose une reconnaissance des conjoints; que la seule question est de savoir si cette reconnaissance ne doit pas avoir la même force après la célébration qu'auparavant ou au moment même, et qu'on ne voit pas de raisons suffisantes pour lui refuser cet effet.

M. TRONCHET dit que l'enfant ne doit pas obtenir la légitimation, si son état n'a été fixé avant le mariage; autrement, on faciliterait l'introduction des enfans étrangers, ou du moins d'un seul des époux, qui, par des menaces, pourrait obtenir l'aveu de l'autre. La fausse pudeur qui empêcherait de reconnaître ses enfans naturels au moment où l'on en épouse la mère ne doit être d'aucune considération pour le législateur.

M. BOULAY fait observer que l'adoption sera un moyen de suppléer la reconnaissance postérieure au mariage; mais cette reconnaissance entraînerait de grands abus. D'ailleurs, il est de principe que le mariage subséquent légitime les enfans. Mais l'application de ce principe ne peut se faire qu'au moment où le mariage se célèbre. C'est dans ce moment seul qu'il produit cet effet de la légitimation.

LE MINISTRE DE LA Justice répond que c'est ce principe même qui donne aux enfans un droit imprescriptible qu'ils acquièrent par le seul fait du mariage, et que rien n'est capable de leur enlever. Si les deux époux, au moment de la célébration du mariage, privaient leurs enfans nés antérieurement de l'état que leur rend naturellement le mariage, ce serait une injustice à l'égard de ces enfans, qu'on ne peut ôter aux époux la faculté de réparer. Autrement, ceux qui, par un contrat légitime, auraient sanctifié une union antici pée seraient traités plus rigoureusement que ceux qui restent dans des liens illégitimes, auxquels le projet accorde, à toutes les époques, la faculté de reconnaître leurs enfans naturels. M. PORTALIS dit que la légitimation par mariage subséquent n'est pas l'effet naturel du mariage, mais un bénéfice de la loi. Elle n'a pas été adoptée en Angleterre, parce qu'on l'y a considérée comme favorisant le concubinage. Cependant, comme elle est reçue depuis long-temps en France, où elle a été introduite, non par le droit civil, mais par le droit canonique, les rédacteurs du projet de Code ont cru devoir la maintenir. Néanmoins, parce que les enfans nés hors mariage n'ont qu'une existence équivoque, puisqu'ils n'ont pour eux aucune présomption, il faut que le témoignagne qui leur donne un état soit rendu dans un temps non suspect. Des exemples prouvent que les reconnaissances faites après le mariage ont quelquefois introduit dans les familles des enfans étrangers, de la même manière qu'eût fait l'adoption: on a donc cru devoir les écarter comme suspectes de fraude. Autrefois même elles n'étaient pas admises; car il y avait des cérémonies publiques placées au moment du mariage, et dont l'omission privait les enfans de la légitimité : quelle raison y a-t-il de leur donner aujourd'hui plus de faveur? Est-ce la fausse pudeur des parens? quand on obéit à la fois à la nature et à sa conscience, on ne peut compromettre son honneur.

LE MINISTRE DE LA JUSTICE soutient que la facilité d'adopter détruit tous les inconvéniens des déclarations postérieures au mariage. Il n'est plus besoin de fraudes quand la loi donne un moyen d'obtenir l'effet qu'on désire.

Il n'est pas présumable, d'ailleurs, que des pères et mères qui ont des enfans veuillent leur associer des étrangers; et, s'ils n'en ont pas, les réclamations de leurs collatéraux pourraient déjouer la fraude.

Au reste, la reconnaissance postérieure au mariage ne favorise pas plus le concubinage que celle qui est faite au moment de la célébration; mais elle peut être nécessaire pour ménager l'honneur d'une jeune personne, dont la vertu ne s'est démentie qu'un moment, qui craint même que la connaissance de sa faiblesse ne porte des parens trop sévères à la priver de leur succession. Il n'y a donc de danger ni pour les mœurs, ni pour les familles, à proroger au-delà du mariage la faculté de reconnaître les enfans; et l'intérêt de ces enfans réclame cette faculté.

M. REGNIER fait observer que les enfans ne tiennent leur légitimité que de la déclaration du père; qu'il peut arriver qu'elle soit frauduleuse, qu'il est donc naturel de la circonscrire dans un terme. Avant le mariage, le père et la mère peuvent avoir de justes motifs de cacher leur paternité; mais ces motifs s'évanouissent au moment du mariage. Il n'y a point de honte à avouer une faiblesse alors qu'on la répare. M. RÉAL dit: M. Portalis pense que la légitimation par mariage subséquent n'est pas l'effet du mariage, qu'elle facilite le concubinage, et est contraire aux mœurs; il veut, avec M. Tronchet, que les reconnaissances postérieures au

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